Approche documentaire MathSpé PC 2014-2015 Approche documentaire : à partir de documents sur la pression osmotique, discuter de l’influence de la pression sur le potentiel chimique et des applications de cette propriété au laboratoire, en industrie ou dans le vivant. L'osmose (du grec ὠσμός, qui veut dire «poussée») est un phénomène de diffusion de matière à travers une membrane semi-perméable. Lorsque deux solutions sont séparées par une membrane semi-perméable (perméable au solvant mais pas aux solutés), un transfert de solvant se produit de la solution la moins concentrée (milieu hypotonique) vers la solution la plus concentrée (milieu hypertonique) jusqu'à l'équilibre (milieux isotoniques). C’est le phénomène d’osmose. De même, quand la membrane sépare du solvant pur et une solution de ce même solvant, un afflux de solvant dans la solution est observé. On appelle pression osmotique π la surpression qui doit être appliquée à la solution pour empêcher cet afflux de solvant. Si une pression supérieure à la pression osmotique est appliquée à la solution, le transfert de solvant s’effectue dans l’autre sens. C’est le phénomène d’osmose inverse. Lycée Descartes Page 1 sur 7 Approche documentaire MathSpé PC 2014-2015 Document 1 : Approche historique Il semble que le phénomène d’osmose ait été découvert par hasard par le physicien, ecclésiastique et épicurien français Jean-Antoine Nollet, en 1748. En effet, l'abbé Nollet, pour conserver la fraicheur de son vin, aurait utilisé un morceau de vessie animale tendue et attachée fermement autour du col d'une fiole à demi remplie de vin, qu'il a ensuite immergée dans l'eau froide. Au bout de quelques heures, le volume de la solution à l'intérieur de la fiole avait augmenté jusqu'à la capacité maximale de la fiole. Fort heureusement, le vin était encore frais et consommable, bien que moins alcoolisé… En 1886 le chimiste néerlandais Jacobus Van't Hoff (1852-1911) explique par la thermodynamique le phénomène d’osmose et publie une analogie entre la pression osmotique au sein des solutions aqueuses et l’équation des gaz parfaits. Il recevra en 1901 le premier prix Nobel de chimie « en reconnaissance des services extraordinaires qu'il a rendus par la découverte des lois de la dynamique chimique et de la pression osmotique dans les solutions » En 1950, le phénomène d’osmose inverse est mis en évidence par le physicien américain Reid. Lycée Descartes Page 2 sur 7 Approche documentaire MathSpé PC 2014-2015 Document 2 : Thermodynamique de l’osmose Le phénomène d’osmose repose sur le transfert de particules à travers une membrane semi-perméable. Constituées souvent de polymères organiques (acétate de cellulose, polyamides…) elles apparaissent à l’échelle moléculaire comme un enchevêtrement de macromolécules (figure 1). Les cavités entre les chaînes sont assez larges pour laisser passer des petites molécules de solvant (eau souvent) mais trop petites pour que des solutés hydratés la traversent. Néanmoins la taille ne fait pas tout et des molécules plus grosses que les cavités peuvent aussi traverser la membrane qui se déforme alors localement pour solubiliser les espèces. Figure 1 D’une façon plus générale les membranes permettent de réaliser des filtrations et le tableau ci-dessous indique la taille des particules stoppées et les domaines d’application : Technique séparative Filtration conventionnelle Micro filtration Ultra filtration Taille des particules stoppées Applications supérieure à 5 m Filtration classique supérieure à 1 m supérieure à 50 nm Nano filtration supérieure à 1 nm potabilisation de l'eau, traitement des effluents. industrie agroalimentaire, bio-industries,… élimination d'ions multivalents, régénération de bains usés de traitements de surface,… Osmose, osmose inverse supérieure à 0,4 nm production d'eau ultra-pure, dessalement d'eau de mer. Rappel : la "taille" de la molécule d'eau est de l'ordre de 0,3 nm. Pour comprendre l’origine du phénomène d’osmose nous allons considérer le système ci-contre (figure 2) : un compartiment (1) contenant nA(1) mol de solvant A et nB(1) mol de soluté B à une température T et sous une pression P. un compartiment (2) contenant nA(2) mol de solvant A et nB(2) mol de soluté B à une température T et sous une pression P. une membrane semi-perméable entre les 2 compartiments ne laissant passer que les molécules de solvant. On considèrera que la solution (2) est plus concentrée que la solution (1) (xB(2) > xB(1)) et que les solutions sont idéales. L’osmose directe se traduit alors par un flux de solvant du compartiment (1) au compartiment (2) donc de la solution la moins concentrée vers la plus concentrée (figure 2). h En effet, en considérant pression et température constantes on peut écrire la différentielle de l’enthalpie libre totale du système dG : dG A(1) dn A(1) A( 2) dn A( 2) A(1) A( 2) dn A(1) x A(1) donc dG RT ln x A( 2 ) dn A(1) Le solvant passe donc spontanément du compartiment (1) au (2). Q1 Lycée Descartes Figure 2 Page 3 sur 7 Approche documentaire MathSpé PC 2014-2015 Si le compartiment (1) contient du solvant pur, on peut définir la pression osmotique comme la surpression à appliquer à la solution du compartiment (2) pour empêcher l’afflux de solvant dans la solution et avoir le système ci-contre (figure 3) à l’équilibre. En traduisant l’égalité des potentiels chimiques du solvant dans les 2 compartiments à l’équilibre thermodynamique, on peut montrer après quelques lignes de calcul et approximations que la pression osmotique π des solutions idéales diluées se met sous la forme suivante appelée loi de Van’t Hoff : (2) (1) Figure 3 Loi de Van’t Hoff : π = CB RTi où π est la pression osmotique en Pascal CB est la concentration molaire volumique du soluté en mol.m-3 R est la constante des gaz parfaits (8,314 J.K-1.mol-1) et T est la température en Kelvin Remarques : 1. Si la solution contient plusieurs solutés la pression osmotique se met sous la forme : Ci RT 2. Si la solution n’est pas idéale on admet généralement que l’équation de Van’t Hoff se réduit au premier terme du développement polynomial suivant : RTC B (1 aCB bCB2 ...) RTC B (1 aCB ) , a est la constante du viriel osmotique. Pour mesurer les pressions osmotiques des osmomètres ont été construit, correspondant au montage ci-contre (figure 4). La situation se complique alors un peu : au début les niveaux sont à la même hauteur dans le solvant et dans la solution qui contient une concentration CB init en soluté. L’afflux de solvant dans la solution dilue le soluté et provoque une montée de la solution dans l’osmomètre. On atteindra l’équilibre quand la pression hydrostatique de la colonne de solution coïncidera avec la pression osmotique. Cela permet d’établir facilement la formule : π = CB fin RT = solvant g hi où g est l’accélération de la pesanteur (9,81 m.s-2), CB fin est la concentration finale en soluté en mol.m-3 solvant est la masse volumique du solvant en kg.m-3 et h est la hauteur de la colonne de solution en m. Figure 4 Les pressions osmotiques peuvent atteindre des valeurs très importantes : ainsi, pour de l’eau de mer (assimilée à une solution de chlorure de sodium à 32 g.L-1) à 15 °C, elle atteint plus de 20 bars ! Lycée Descartes Page 4 sur 7 Approche documentaire MathSpé PC 2014-2015 Document 3 : Une application au laboratoire Détermination des masses molaires par osmométrie L’une des applications les plus courantes de l’osmométrie est la mesure des masses molaires des macromolécules telles que les protéines et les polymères synthétiques. La masse molaire de l’hémoglobine peut ainsi être déterminée à partir de la mesure de pression osmotique suivante : en dissolvant dans 100 mL d’eau 4,00 g d’hémoglobine humaine on obtient une solution dont la pression osmotique à 7,4 °C est de 13,4 mbar. Hémoglobine : protéine constituée de quatre chaînes identiques deux à deux. Chacune de ces chaînes est associée à un groupement particulier, l’hème constitué d’un ion fer (II) partiellement complexé. Contenue dans les globules rouges, son rôle est de transporter l'oxygène des poumons aux tissus et le dioxyde de carbone dans le sens inverse. La masse molaire de l’hémoglobine humaine est de l’ordre de 65000 g.mol-1. Réaliser une série de mesure à des concentrations différentes permet d’améliorer la précision de la masse molaire obtenue. Ainsi, pour mesurer la masse molaire moyenne d’un échantillon de PVC (polychlorure de vinyle) des chercheurs ont réalisé différentes solutions (non idéales à cause de la taille des macromolécules) à 25°C dans la cyclohexanone. Le tableau suivant indique les hauteurs de solution ( = 0,980 kg.L-1) dans l’osmomètre en fonction de la concentration massique en polymère, ce qui a permis aux chercheurs de déterminer que la masse molaire moyenne ̅̅̅ 𝑀 du -1 polymère était de 120 kg.mol et son degré de polymérisation moyen 𝑛̅ était de 1920. C (g.L-1) h (cm) 1,00 0,28 2,00 0,71 4,00 2,01 7,00 5,10 9,00 8,00 PVC ou polychlorure de vinyle : polymère constitué de macromolécules dans lesquelles le motif unitaire (-CH2-CHCl-) se répète un très grand nombre de fois. Masse molaire : M(Cl) = 35,5 g.mol-1 Lycée Descartes Page 5 sur 7 Approche documentaire MathSpé PC 2014-2015 Document 4 : Une application à l’industrie Dessalement de l’eau de mer par osmose inverse (www.médiachimie.org) Le document vidéo proposé ci-dessous est un prolongement du travail effectué en première année sur l’eau (méthodes de détection d’espèces, procédés mis en jeu pour la séparation des espèces…). Il réinvestit également la méthode de distillation vue en thermodynamique Document : « D’eau et de sel » (Serge Bigot, CNRS Images, 2011, 14 min) http://videotheque.cnrs.fr/doc=2887 Schéma d'un système à osmose inverse utilisé pour la désalinisation, employant un échangeur de pression. 1: entrée de l'eau de mer, 2: sortie de l'eau filtrée (40 %), 3: flux concentré (60 %), 4: flux d'eau de mer (60 %), 5: concentré, Membrane semi-perméable utilisée dans la désalinisation. Lycée Descartes A: flux de la pompe à haute pression (40 %), B: pompe de circulation, C: unité d'osmose avec membrane D: échangeur de pression Installation industrielle d'osmose inverse d'une capacité de 1000 litres Page 6 sur 7 Approche documentaire MathSpé PC 2014-2015 Annexes Quelques formules Différentielle de l’enthalpie libre : dG VdP SdT i dni i En utilisant le théorème de Schwartz on peut en déduire la dérivée partielle du potentiel chimique par rapport à la pression : i Vm,i où Vm,i est le volume molaire partiel du constituant i P T ,n j i Relation fondamentale de la statique des fluides (z ascendant) : dP gdz Quelques questions Document 2 : Thermodynamique 1. Redémontrer l’expression de dG proposée et, en tenant compte des hypothèses citées pour la température et la pression, expliquer la conclusion aboutissant au phénomène d’osmose de la figure 2. Q1 2. Ecrire, à température constante, la condition d’équilibre du solvant dans les deux compartiments de la figure 3. On introduit la pression osmotique dans la formule du potentiel chimique A (figure 3) en prenant en compte ici l’influence de la pression sur le potentiel chimique (Annexe). 3. Démontrer la loi de Van’t Hoff en précisant les hypothèses. 4. Démontrer l’expression de la pression hydrostatique en précisant les hypothèses. 5. Calculer la pression osmotique π (eau de mer) et la hauteur h associée ; faire un commentaire sur l’idéalité. Document 3 : application au laboratoire 1. 2. 3. 4. Evaluer la masse molaire de l’hémoglobine. Pourquoi cette protéine permet le transport du dioxygène ? Retrouver par régression linéaire la masse molaire moyenne de l’échantillon de PVC. En déduire son degré de polymérisation moyen et commenter. Document 4 : application à l’industrie 1. Comment qualifier la disponibilité en eau prévue en France en 2025 ? 2. Quelles améliorations ont été apportées aux installations industrielles de distillation ? 3. Dégager la problématique principale : quel est le principe de l’osmose inverse ? Pourquoi la valeur de la pression P = 60 bars citée dans le texte est-elle très supérieure à la valeur calculée dans le document 2 ? Citer quatre avantages et un inconvénient de la méthode d’osmose inverse. 4. Quelles sont les trois causes de dépôt colmatant sur les membranes semi-perméables ? Quelle méthode permet d’observer ces dépôts ? Quel traitement de l’eau peut-on faire au préalable pour éviter certains de ces dépôts ? Lycée Descartes Page 7 sur 7