1
CNS de constructibilité des polygônes réguliers.
Théorème 1. Le polygône régulier Pnest constructible à la règle et au compas si et seulement
si n= 2sp1. . . prsNet les pisont des nombres premiers de Fermat deux à deux distincts.
Démonstration. Une condition nécessaire et suffisante pour que Pnsoit constructible à la règle
et au compas est que le point Md’affixe ei2π/n soit constructible. Notant, (
i ,
j)les vecteurs de
base du repère orthonormé canonique (O,
i ,
j)de R2identifié à C, il s’agit donc de construire
le point Mdu cercle unité tel que l’angle orienté (
i ,
OM)soit de mesure 2π
n[2π].
Lemme 1. Pour mn= 1,Pmn constructible si ⇒ Pnet Pmconstructibles.
Démonstration. :
Etape 1 : Supposons Pmn constructible, i.e que le point Md’affixe ei2π/mn est constructible.
En reportant avec le compas, à partir du point A= (1,0) et dans le sens trigonométrique, mfois
la longeur du segment [AM ], on construit le point M0du cercle unité tel que (
i ,
OM0)soit de
mesure m×2π
mn =2π
n[2π]. On a donc construit M0d’affixe ei2π/n, ce qui suffit à construire Pn.
Par la même méthode, on construit Pm. D’où Pmn constructible =⇒ Pnet Pmconstructibles.
Etape 2 : Supposons Pnet Pmconstructibles. On sait donc construire les points Met M0
d’affixes ei2π/n et ei2π/m. Comme mn= 1, il existe (a, b)Ztels que
am +bn = 1 =2π
mn =a2π
n+b2π
m.
Comme précédemment on construit en deux étapes le point du cercle unité M00 dont l’angle
orien(
i ,
OM00)a pour mesure 2π
mn =a2π
n+b2π
m[2π], en prêtant attention au fait que si a0
ou b0il faut cette fois-ci reporter les longueurs AM et AM0en parcourant le cercle unité dans
le sens inverse du sens trigonométrique. Alors, M00 étant constructible, Pmn l’est aussi.
Bilan 1 : si n=
k
Q
i=1
pαi
i, alors Pnest constructible si et seulement si Ppαi
il’est pour tout i[[1, k]].
Objectif : Réduire l’étude de la constructibilité de Pnà l’étude de la constructibilité de Ppα
pour ppremier impair.
Lemme 2. Soit αN,P2αest constructible.
Démonstration. On utilise ici la constructibilité de la bissectrice d’un angle. Si le point Md’affixe
zM=ei2π/n est constructible, le point Nd’affixe eiπ/n l’est également, comme point d’inter-
section du cercle unité et de la bissectrice de l’angle (
i ,
OM). La constructibilité du carré P4,
nous permet d’initialiser une récurrence et on en déduit ainsi que P2αest constructible pour tout
αN.
Bilan 2 : d’après les deux lemmes précédents, on s’est ramené à prouver que pour ppremier
impair, Ppαconstructible α= 1 et p= 1 + 22βpour βN.
Etape 1 : supposons Ppαconstructible et posons q=pα. Le point Md’affixe ω=ei2π/q est
donc constructible et d’après le théorème de Wantzel, il existe une suite d’extensions quadratiques
L0, L1, . . . , Lrtelles que Q=L0(L1(. . . (Lr1(Lr=Q(ω). En particulier on en déduit
que [Q(ω) : Q] = ϕ(pα) = (p1)pα1est une puissance de 2. Ainsi, il existe dNtel que
(p1)pα1= 2det par unicité de l’écriture en facteur premier, comme pest impair, on a α= 1
et p= 1 + 2d. Il faut encore montrer que dest aussi une puissance de 2. Soit alors d=λ2βλ
est impair et βN. Puisque λest impair, on a 1 + X|1 + Xλet donc 1 + 22β|1 + (22β)λ=p,
absurde si λ6= 1, car pest premier. Finalement, si Ppαest constructible, alors α= 1 et p= 1+22β
est bien un nombre de Fermat.
Etape 2 : montrons que si p= 1 + 22β, alors Ppest constructible.
Méthode : On note n= 2βet prouvons qu’il existe une tour d’extensions quadratiques (Li)1ir
telle que pour ω=ei2π/p on ait Q=L0(L1(. . . (Lr1(Lr=Q(ω). Pour construire ces
2
extensions quadratiques deux à deux distinctes, intéressons nous aux Q-automorphismes de Q(ω)
i.e au groupe AutQ(Q(ω)).
Objectif : montrons que AutQ(Q(ω)) '(Z/pZ). Soit φAutQ(Q(ω)), par définition φest
entièrement détérminée par l’image de ωpuisque sa restricition à Qest exactement IdQ. Consi-
dérons Φp,Q, le p-ème polynôme cyclotomique, on a Φp,QZ[X]Q[X]et donc :
Φp,Q(φ(ω)) = φp,Q(ω)) = φ(0) = 0
On en déduit donc que φ(ω)est racine de Φp,Qi.e une racine primitive p-ème de l’unité et
φ(ω) = ωkpour un k[[1, p 1]]. Au final, card(AutQ(Q(ω)) = p1et donc AutQ(Q(ω)) =
{φk:ω7−ωk|k[[1, p 1]]}et AutQ(Q(ω)) (Z/pZ)
φk7−kest un isomorphisme de
groupes.
Définition de la tour d’extension. Par cyclicité de (Z/pZ), il existe dans AutQ(Q(ω)) un
générateur φd’ordre p1=2n= 22β. On définit alors pour i[[0, n]],Li=Ker(φ2iId). Notre
objectif est de montrer que les Lisont des sous-corps de Q(ω)et que :
L0=Q,Ln=Q(ω)et Li1(Lipour i[[1, n]].
Comme noyau d’un morphisme de corps, Li=Ker(φ2iId)est un sous-corps de Q(ω). De plus, φ
est aussi un Q-isomorphisme du Q-espace vectoriel Q(ω)et envoie donc la base {1,...,ωp2}
de Q(ω)sur la base {1, φ(ω), . . . , φ(ω)p2}de Q(ω). Pour zL0Q(ω), on a donc l’existence
de p1scalaires λ0, . . . , λp2Qtels que :
z=λ0+λ1φ(ω) + . . . +λp2φ(ω)p2et φ(z) = z
Autrement dit z=
p2
P
i=0
λiφ(ω)i=φ(z) =
p2
P
i=0
λiφ(ω)i+1. Par unicité d’écriture dans une base, on
a donc λ0=λ1=. . . =λp2et z=λ0φ(ω+. . . +ωp2) = λ0φ(1) = λ0Qcar la somme
des racines des nracines n-ème de l’unité est nulle pour n2. Alors, L0Qet comme QL0,
on a bien L0=Q. De plus, Ln=Q(ω)est évident car φest d’ordre p1=2n.
Objectif : montrons que Li1(Lipour i[[1, n]]. Si zLi1on a φ2i(z) = φ2i1φ2i1(z) = z
et zLi, soit Li1Li. Montrons que l’inclusion est stricte. Considérons alors :
z=
2ni11
P
k=0
φ2i+1k(ω)
et montrons que zLi+1 mais z6∈ Li. On a en effet :
φ2i+1 (z) =
2ni11
P
k=0
φ2i+1 (φ2i+1k(ω)) =
2ni11
P
k=0
φ2i+1(k+1)(ω) =
2ni1
P
j=1
φ2i+1j(ω) = z
puisque pour j= 2ni1,φ2i+1j(ω) = φ2n(ω) = φp1(ω) = ωcar φest d’ordre p1=2n. Donc
zLi+1 et montrons que z6∈ Li. Si on avait zLi, on aurait l’égalité (∗∗):
ω+φ2i+1 (ω) + . . . +φ2n2ni1(ω) = φ2i(ω) + φ2i+2i+1 (ω) + . . . +φ2i+2n2ni1(ω)
Or, φengendrant AutQ(Q(ω)) = {φk|k[[1, p 1]]}, on a :
{φk(ω)|k[[1, p 1]]}={ωk|k[[1, p 1]]}=⇒ {φk(ω)|k[[1, p 1]]}est une base de Q(ω).
Par unicité de l’écriture d’un élément dans une base, (∗∗)est absurde.
Conclusion : on a l’existence d’une tour d’extension Q=L0(L1(. . . (Ln1(Ln=Q(ω)
2n= [Q(ω) : Q] = [Ln:Ln1]. . . [L1:L0]avec [Li:Li1]>1pour tout i[[1, n]], ce
qui donne nécessairement [Li:Li1] = 2 pour tout i[[1, n]] et donc le résultat souhaité, via
le théorème de Wantzel.
Rappel 1. On note Un={ei2/n |k[[0, n 1]]}l’ensemble des nracines n-ème de l’unité.
Les points (Mk)0kn1du plan complexe d’affixes zk=ei2/n correspondent aux nsommets
d’un polygône régulier à ncôtés inscrits dans le cercle unité de C, que l’on note Pn.
3
Rappel 2. Soit P0un ensemble de points du plan, en général P0={(0,0); (0,1)}. La construc-
tion d’un point Mdu plan affine R2à partir de P0résulte d’un nombre fini d’opération élémen-
taires du type 1ou 2suivant :
1. Tracer la droite passant par deux points de P0.
2. Tracer le cercle dont le centre est un point de P0et dont le rayon est égal à la distance de
deux points de P0.
Alors un point Mdu plan R2est dit constructible à partir de P0s’il existe une suite finie de
points M1, M2, . . . , Mn=Mtels que pour tout i[[1, n]],Miest construit en une étape à partir
de l’ensemble P0∪ {M1, . . . , Mi1}.
Rappel 3. Théorème de Wantzel
Un point Mdu plan R2, d’affixe zCest constructible à la règle et au compas à partir des
points d’affixes 0et 1si et seulement s’il existe une tour d’extension Q=L0(L1(. . . (
Lr1(Lr=Q(z)telle que [Li:Li1]=2pour tout i[[0, r]].
Rappel 4. z=a+ib est constructible si et seulement si aet bsont constructibles.
Rappel 5. Les polynômes cyclotomiques Φn,Q(X)Q[X]sont irreductibles et pour ωracine
n-ème primitive de l’unité, on a [Q(ω) : Q] = deg(Φn(X)) = ϕ(n).
Rappel 6. Si an+ 1 est premier avec a2et nNalors a2Net n= 2rpour rN.
Rappel 7. Pour nN,Fn= 22n+ 1 est par définition le n-ème nombre de Fermat.
Rappel 8.
Les Fnpour n4sont premiers.
Les Fnne sont pas tous premiers : F5est divisible par 641.
Pour n1,F0F1. . . Fn1=Fn2.
Pour n6=m,FnFm= 1 et il y a une infinité de nombres premiers de Fermat.
Leçons concernées :
Extensions de corps.
Nombres complexes de module 1.
1 / 3 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !