Comment trouvez-vousvotrepère
face àvous ?
Au théâtre,mon père est très humble. Il sait
qu’il doit tous les soirs jouer juste. C’est pour
lui un moteur car c‘est un art àlafois créatif
et collectif.Ilsait qu’il faut se mouiller,aller au
fond de soi et chercher son jeu dans le regard
de l’autre. Il était vidé après les répétitions.
Il aconscience que c’est un métier plus
exigeant et difficile que celui de chanteur
et qu’on l’attend au tournant !
Et pourtant, à10ans, vous avez chanté
avec votrepère dans Attention les
enfants... danger,et co-composé la chanson
Espérer,extraitedel’album Du plaisir…
Oui,c’est vrai. J’ai adoré surtout faireleclip
avec Bernard Schmitt car j’ai pu sécher
deux semaines de vacances pour
le tournage !Quant àlachanson Espérer,
extraite de l’album Du Plaisir,c’est un peu
un hasard. Il cherchait une musique
et on l’a commencé ensemble.
Quel regardportez-vous sur la carrière
de votrepère ?
C’est un exemple de carrière irréprochable.
C’est quelqu’unqui atoujours gardé son
intégrité artistique. Il atoujours fait
ce qu’il aaimé, n’ayant jamais cédé
aux facilités, àlamode. C’est un exemple
de longévité et de constance dans la qualité
des chansons.
Et, c’est quand mêmel’unedes plus belles
voix du métier !
Oui,quelle voix !Et, sa voix abien évolué.
J’ai adoré sa voix surtout àlafin des années
80 et au début des années 90.
Quelles sont les chansons préférées
de votrepère ?
J’adore des chansons qui n’ont pas
spécialement été, pour certaines, des gros
tubes commeL’acteur,Lesuccesseur,
Putain de temps, Vladimir Ilitch,Ilétaitlà
dans ce fauteuil, Une fille aux yeux clairs
ou plus récemment Les yeux de mon père.
Vous aimez les chansons qui ont davantage
trait àlafiliation…
Oui,c’est vrai forcément,cela aplus d’écho
chez moi surtout des chansons comme
L’acteur,Lesuccesseur,Ilétaitlàdans
ce fauteuil. J’avoue qu’elles sont magnifiques.
Enfin, êtes-vous satisfaitdevotreparcours?
Je le trouve insuffisant. Toutefois, je suis
content de mon évolution. J’adore ce métier.
Je ne veux pas m’arrêter de travailler.
Je veux toujoursmelaisser surprendre
et découvrir.Lamise en scène me plairait.
Est-il plus difficiledefairecarrière
quand on est un "filsde", et, en ce qui
vous concerne, un "petit-filsetarrière
petit-fils de"?
Celafacilite plein de choses, bien entendu,
surtout au niveau des connexions, des réseaux
dans le métier.C'est sûr qu'en cela, on
bénéficie d'un sacré raccourci. Mais, pour faire
carrière cela ne change rien. Le talent n'est pas
héréditaire. Ce n'est pas parce que votrepère
sait bien chanter que vous chantez forcément
bien !Cela représente aussi beaucoup
d'inconvénients car les gens sont médisants.
Certains deviennent artistes par conviction
et d'autres par dépit... Seul le temps peut dire
si on mérite sa place dans le métier.
“SECRET DE FAMILE”
THÉÂTRE DES VARIÉTÉS
Du plaisir !
Aller voir Michel Sardou au théâtre
peut apparaîtrecommeune héré-
sie pour l’intelligentsia. Toutefois,
c’est mal connaître le pedigree de
l’artiste quandonsait qu’ilacom-
mencé parune formation d’acteur
dramatique et que le théâtre atou-
jours été uneviscérale passion
assumée très tard.
Au même titrequ’on n’a jamais pardonné àSardoud’êtreunchan-
teurdedroite, comme uneoffense auxbonnes mœurs, le milieu
artistique et médiatique adumal àaccorder àMichel Sardou le
droit d’exister sur les planches d’un théâtre. «On l’attend au tour-
nant»lâche mêmeson fils. En chansons, l’intelligentsia le décréta
infréquentable, respirant la démagogie, puant le bon sens, avançant
àl’instinct,lerésumant àquelques couplets incendiaires qu’il ne
referait pas aujourd’hui. Mais on n’est pas toujoursl’hommedeses
chansons, comme il l’a chanté. Qu’importe, Sardou, indocile, n’en
faitqu’à sa tête et il sait au fonddelui, qu’il bénéficie d’un fort sou-
tienpopulaire.
Au théâtre,onl’attend au tournant. C’est le jeu. C’est de bonne
guerre. Une guerrequ’il est prêt àlivrer,lui qui al’habitude des mal-
entendus car n’est pas comédien qui veut et Sardou le sait. Il sait
qu’authéâtre,ladis-
ciplineest exigeante
et que chaque soir
le ton doit êtrejuste
et ne souffre pas
l’imprécision, l’à-
peu près des jours
chagrins. Le revoilà
donc dans sa qua-
trième pièce, Secret
de famille,une comé-
die de mœursgrin-
çante écritespéciale-
mentpour lui par
Éric Assous, don-
nant la réplique àson fils Davy,poursuivant la longue dynastie des
Sardou, comédiensetbateleursdepuis 1850.Michel Sardouincarne
Pierre, parolier àsuccèsdechansons, qui, divorcé, aélevéseul son
fils, qui doitbientôtépouser Clémence. Seulement voilà, la belleClé-
mence n’estpas amoureuse du fils mais du père !
Un personnageambigu dans lequel MichelSardou se glisse avec
délectation. Sardou, dans la peau d’un autre, commepour se repo-
ser de son image de chanteur... Certains estimeront que sa compo-
sition n’estque le reflet de sonimage. L’artiste est lucide. Il joue sur
les tableaux. Plaire, déplaire... au fond, ça l’amuse. Et, il s'amuse
dans cette comédieamoraleoùune vérité àdemiavouéenecesse
d’en cacher une suivante prêteàimploser.Serefilant mine de rien la
patatechaude (qui est l'amant de la belle, vive et pétillanteClé-
mence ?),les comédiens, cornaqués par le metteur en scène Jean-
Luc Moreau, d'une parfaite sincérité, s'en donnent àcœur joie,fai-
sant éclater les rires d'un publicconquis après les avoir faitgrincer.
Eric Assous conduit sa comédie commeAgatha Christieetses Dix
petitsnègres en déplacant la suspicion de l'un àl'autreavec un vrai
sens du suspens.Son humour allégrement grinçant
et vachard fait mouche avec des répliques àl’em-
porte-pièce face àune langue de bois, des men-
songes et des quiproquos qui cherchent àsauver la
mise, laissant le soin au metteurenscène d’affiner
la palettedes sentiments et autres ressentiments
dans une gammesubtile d'attitudes et de gestes
qui en disent long sur les comportementscontra-
dictoires et complexes des mœursfamiliales,
amicales, du couple et du métier de la chanson.
La conscience boîteuse, Michel Sardou se régale
de cettesituation amorale avec des mimiques
outrées, des expressions outrepassées, des
attitudes indignées ou gênées. Michel Sardou
fait son miel des dialogues d'Eric Assous qui
use avec un plaisir gourmand de l'autodéri-
sion, de l'image de chanteur patibulaireet
taciturne quilui colle àlapeau. Quant àDavy
Sardou,qui compteàson pedigree plus de
pièces que son père, son jeu, qui ressemble
àcelui qu'il incarnait dans Oscar,est juste et
efficace. Il endosse àmerveille le costume
de l'amoureux candide et naïf qui doute et
souffre. Une bonne comédie sans préten-
tion, mise en scène avec allégresse, qui
demande du souffle et du jarret. Et, Michel
Sardou n’en manque pas, continûment en
scène, entouréd'une excellente distribu-
tion, dont l’admirableLaurent Spielvogel.
✒Dominique PARRAVANO
Pour faire
carrière, être “fils de”
ne change rien. Le talent
n'est pas héréditaire. (...).
Certains deviennent
artistes par conviction
et d'autrespar dépit...
Seul le tempspeut dire
si on mérite sa place
dans ce métier...
“
J’en garde de très bons souvenirs car toutela
technique on l’apprend àl’école. Ce sont des
méthodes qui ont fait leurs preuves. J’ai eu
la chance de rencontrer des professeurs
avec lesquels je me suis bien entendu. Pour
l’anecdote, le jour du décès de ma grand-mère,
j’ai signé mon premier contrat de théâtre.
Et, prouesse, à20ans, vous jouiez déjà
Les Créanciersde Strindberg au Sanford
Meisner Theater New York...
Oui,tout àfait, ce fut ma première pièce avant
de jouer en 1999 Les Trois Soeursde Anton
Tchekov,mise en scène par George Loros,
au Pantheon Theater New York où j’ai
remplacé au pied levé un comédien.
Comment votre père, quivoue une passion
au métier difficileetexigeant de comédien,
a-t-ilréagi lorsqu’ilvous avusur scène
aux USApour la premièrefois ?
Il aeutrès peur carlorsqu’il est venu, il est
arrivé le premier dans la salle et le public
arrive très tardaux USA. Il aangoissé àl’idée
que je puisse jouer devant une salle vide
car il est venu àlaseconde représentation
et toutel’énergie était un peu retombée.
Il était très fier avec ma mèreetmon frère.
Toutefois, mon père est très pudique et peu
expansif. Mais, j’avoue que de me voir,
avec des béquilles, jouer en anglais dans
un tout petit théâtre défraîchi l’a bluffé!
En France, vous avez joué des pièces plus
légères, de boulevardcommeOscar,
Copier/Coller de Jean-Marie Chevret,
ou Arsenic et vieilles dentelles de Joseph
Kesselring et aujourd’hui Secret de famille.
Quelest votregenre de prédilection ?
Les deux me plaisent. Il n’y apas un genre
plus facile qu’un autre. Je suis sensible
au texte, àl’écriture. J’aime autant Molière,
Shakespeare, Hugo ou Musset qu’Anouilh,
Feydeau ou d’autres auteursplus
contemporains.
Allez-vous vous voir réciproquement
sur scène ?
Mon père esttoujours venu me voir quand
il apuetmoi également.Onaime se voir sur
scène. C’est important pour nous d’échanger,
d’avoir l’avis de l’autresans flagornerie.
Un mot justement sur EricAssous,
l’auteur de Secret de famille ?
Je l’aime beaucoup. J’aime son écriture.
Il yaplein d’intrigues, d’ellipses avec un vrai
sens de l’intrigue. C’est très bien écrit,subtile,
très drôle avec un vrai sens du comique
de situation. Il est très souple et àl’écoute
des comédiens.
Qu’est-ce qui vous aplu dans cette
pièce outre le fait de donner la réplique
àvotrepère ?
C’est un régal carc‘est beaucoup plus
méchant qu’un vaudeville parce qu’on rit
d’une situation amorale.
Oscar vous a-t-ilaidé àendosser ce rôle?
Ah oui!Bien sûr !Beaucoup !Là, c’est un
jeune hommeamoureuxtrès candideetnaïf.
C’est sa première claque amoureuse.
Puise-t-on des choses personnelles ?
Tout àfait !Surtout quand on s’est fait
plaquer !Jepense que c’est très difficile
de jouer la rupture quand on ne l’a pas vécue.
Sa composition
est ici et là le reflet de
son image. Il joue sur les
tableaux. Plaire, déplaire...
Au fond, Sardou,
ça l’amuse !”
“
Àgauche, l’équipe
de “Secret de famille”.
Ci-dessus, Michel et Davy Sardou
sur la scène du Théâtredes Variétés.
QUAND ?Dumardi au samedi à20h30. Matinées :samedi
à17h30 et dimanche à17h00. OÙ ?Théâtredes Variétés,
7boulevardMontmartre, Paris 2e. Tél. :0142330992.
PHOTOS ©AGENCE ANGELI
ÀMON AVIS...
En bas, de gauche àdroite :Jean-Luc Moreau (metteur en scène), Elisa Servier,Michel Sardou,Mathilde Penin.
En haut, de gauche àdroite :Laurent Spielvogel,Davy Sardou et Rita Brantalou.
Il ad’ailleurs l’air de prendre du plaisir...
Mon père se délecte àjouer ce genre de
comédie avec des armes commelamauvaise
foi et le mensonge. Et, de penser que sa future
belle-fille est amoureuse de lui –ce qui le met
dans une situation impossible avec son fils
qui ignore tout ça– l’amuse beaucoup !
Je trouve qu’il se libère et qu’il se laisse
de plus en plus aller sur scène.
Depuisquand avez-vous cettepassion
du théâtre ?
Oh !Depuis tout jeune, cela doit êtredans les
gènes !J’allais au théâtre avec mes parents.
Je me souviens du Canardàl’orange avec
Jean Poiret, de L’amuse-gueule avec Daniel
AuteuiloudeDoubleMixte.Jeregardais
Au théâtre ce soir àlatélé. ÀNew-York,
j’allais sans arrêt au théâtre. J’étais boulimique
de pièces. C’est une vraie passion.
Vous avez tourné dans Black and White
de James Toback, Blind DateetThe Bum
de Greg Egan. Aimeriez-vous faire
davantage de cinéma?
Ce furent mes premiers tournages
professionnels. J’en garde un souvenir
fabuleux. Oui, j’aimerais fairedavantage de
cinéma. J’aime Patrice Leconte, Bertrand Blier,
Jean Genet,Olivier Dahan... J’ai fait surtout
beaucoup de téléfilms commeCrédit
pour un meurtre pour TF1, Profils Criminels
surM6, Navarro, Léa Parker,etc.
Le métier de chanteur ne vous attirepas ?
Non,car il yaurait forcément trop de lien
direct avec mon père et j’aime les mêmes
choses que lui. Par contre, j’adore les
comédies musicales. J’ai vu Cabaret,
Le roi lion et bien d’autres.
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L’hebdo des bons plans et des petites annonces -09 Octobre 2008