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les invertébrés benthiques constituent du fait de leur relation étroite avec la qualité du substrat un bon indicateur de
l’état et de l’évolution des habitats littoraux et estuariens et des différentes fonctionnalités écologiques qu’ils assurent
notamment pour les oiseaux et les poissons. C’est pourquoi ils sont pris en compte par la DCE comme critères
d’évaluation de l’état de MET.
Les milieux estuariens jouent un rôle essentiel en assurant pour de nombreuses espèces de poissons d'origine marine,
migratrices ou autochtones, des fonctions vitales pour le bon déroulement de leur cycle biologique. Zones de nourricerie,
c’est-à-dire propices au développement des jeunes poissons, les habitats estuariens et les marais adjacents sont
également des sites importants d’alimentation et de voie de migration. La disponibilité élevée de la nourriture de ces
habitats les rend essentiels pour nombre d’espèces de poissons et de crustacés. Le signal des eaux douces en mer et la
libre circulation au débouché des fleuves influencent la migration anadrome d’espèces emblématiques (qui colonisent les
eaux douces en venant de la mer) telles que les salmonidés (i.e. saumon, truite de mer), l’anguille et les clupéidés
(aloses).
Nombre de ces espèces ont de plus un intérêt halieutique et/ou patrimonial majeur (soles, bar, anguille, aloses,
lamproies, saumon…). C’est pourquoi les poissons ont été identifiés en tant qu’indicateurs de l’état des masses d’eau de
transition, au titre de la DCE.
Les estuaires
, du fait des étendues importantes de vasières, de prairies humides et de roselières qu’ils présentent
sont les sites où se rencontrent les plus fortes concentrations d’oiseaux . En Europe, c’est surtout leur valeur de
zone d’hivernage et d’étape migratoire dans les trajets pré et post nuptiaux qui confère aux estuaires leur
importance majeure pour un grand nombre d’espèces et justifie le classement de nombreux sites en ZPS (zone
de protection spéciale).
Placés en haut de la chaine trophique, le suivi de ces populations
et de leur état de santé permet d’apporter des
éléments intégrateurs sur l’évolution des milieux estuariens.
Par sa position centrale au sein de la voie de
migration Est-Atlantique, le littoral et les estuaires métropolitains, notamment normands, constituent des zones
d’enjeu importantes. Parmi les groupes d’espèces les plus représentés, on trouve notamment les limicoles plus
particulièrement étudiés dans Licco .
La perte d’habitats
estuariens due aux aménagements et aux activités humaines concerne essentiellement les
zones intertidales. Les effets de cette perte sont très élevés, notamment sur les fonctions d'alimentation et de
nourricerie et par conséquent sur le renouvellement des stocks.
Au cours du 20èmesiècle, la perte de surface d’habitats estuariens à l’échelon européen est estimée par certains
auteurs à 51%, moyenne calculée sur une sélection de 22 estuaires.
Plus précisément, les aménagements
réalisés (polders, voie de navigation, extension d’activités terrestres et
portuaires…) contribuent à réduire fortement les espaces de l’estuaire amont et à accélérer son comblement du
fait du déplacement des dépôts sédimentaires vers l’aval ainsi qu’à réduire le volume oscillant des marées. Cela
se traduit par une réduction des volumes en eau des estuaires, par une diminution drastique de l’aire intertidale
des vasières et par une nette progradation du delta sableux tidal vers la mer. De la même façon, l’endiguement
des chenaux a pour conséquence la migration vers l’aval de la limite de salinité et du bouchon vaseux, qui assure
un rôle de filtre, stocke et transforme les substances chimiques, dont les contaminants.
De même, en tant que milieu de transition, toute modification des conditions chimiques (qualité de l’eau) ou physiques
(barrages, obstacles) risque d’avoir des conséquences notables sur la continuité écologique, la circulation des espèces et
au final sur les populations entières, non seulement à l’échelle d’un bassin versant, mais aussi à l’échelle des stocks
d’intérêt commercial.
Enfin, d’autres menaces ou pressions peuvent toucher ces milieux sensibles, ainsi les invasions biologiques,
plutôt végétales, qui affectent tous les niveaux des prés salés et l’eutrophisation .
On peut définir un estuaire comme un écosystème dynamique ayant une connexion libre avec la mer et dans lequel
celle-ci pénètre selon le cycle semi diurne de la marée. Cette masse d’eau marine qui entre dans l’estuaire se dilue
avec l’eau douce en provenance du fleuve. C’est donc une zone de mélange dont les caractéristiques hydrologiques
sont propres à chaque estuaire, en fonction des volumes d’eau douce et de la gamme d’amplitude de marée (Mc
Lusky, 1989).