L'intervention éducative en milieu ouvert Savoir et Formation Collection dirigée par Jacky Beillerott et Michel Gault A la croisée de l'économique, du social et du culturel, des acquis du passé et des investissements qui engagent l'avenir, la formation s'impose désormais comme passage obligé, tant pour la survie et le développement des sociétés, que pour l'accomplissement des individus. La formation articule savoir et savoir-faire, elle conjugue l'appropriation des connaissances et des pratiques à des fins professionnelles, sociales, personnelles et l'exploration des thèses et des valeurs qui les sous-tendent, du sens à leur assigner. La collection Savoir et Formation veut contribuer à l'information et à la réflexion sur ces aspects majeurs. Déjà parus Christine JOURDAIN, L'enseignement des valeurs à l'école, 2004. M. PAUL, L'accompagnement: une posture professionnelle spécifique, 2004. Luc BRULIARD, Handicap mental et intégration scolaire, 2004. André CHAMBON, Villes et développement éducatif local: les cas d'Evry, d'Amiens et de Calais, 2004. M.M. BERTUCCI et C. CORBLIN (dir.), Quel français à l'Ecole? Les programmes de français face à la diversité culturelle, 2004. Alain JAILLET, L'école à l'ère numérique, 2004 Cédric FRÉTIGNÉ, Uneformation à l'emploi ?, 2004. Dominique FABLET (coord.), Professionnel(le)s de la petite enfance et analyse de pratiques, 2004. Françoise CROS, L'innovation scolaire aux risques de son évaluation, 2004. Cécile FORTIN-DEBART, Le partenariat école-musée. Pour une éducation à l' environnemennt, 2004. Arlette MUCCHIELLI-BOURCIER, La prévention de la dyslexie à l'école, 2004. Emmanuelle ANNOOT et Marie-Françoise FA VE-BONNET (coordonné par), Pratiques pédagogiques dans l'enseignement supérieur: enseigner, apprendre, évaluer, 2004. Ouvrage coordonné par Martine Beistegui L'intervention éducative en milieu ouvert Pour une rencontre entre théories et pratiques... L'Harmattan 5-7, rue de l'École-Polytechnique 75005 Paris FRANCE L'Harmattan Hongrie Kônyvesbolt Kossuth L. u. 14-16 1053 Budapest L'Harmattan Italia Via Degli Artisti, 15 10124 Torino ITALIE cg L'Harmattan, 2004 ISBN: 2-7475-7511-X EAN: 9782747575119 A Jacky Beillerat. .. Ouvrage réalisé par l'association BUZENVAL 73, rue du 8 Mai 1945 92000 NANTERRE en collaboration avec l'ETSUP, Ecole supérieure de travail social 8, villa du parc Montsouris 75014 PARIS Remerciements à Mesdames Jeanne Balland, Sylvie Boulard, Emilie Caton et Marion Hirschauer pour leur aide et leurs consei Is. . . Sommaire Avant-propos Introduction par Martine par Claude Des représentations p9 Beistegui p17 Rouyer au cœur de l'action... les représentations sociales par Catherine Sellenet Quelle place pour la représentation dans Ie travai I social? par Patrick Adamina (sociale) L'altérité en questions... l'altérité dans l'interculturalité par Belkassem Kassou le regard anthropologique: penser l'autre par Claire Calogirou Vers une prise en compte de la dimension culturelle par Vesper Barton-Clegg L'identité P 23 P 45 P 55 p 67 p 77 exilée... Du père, des pères et des parcours d'exil par Edwige Rude-Antoine l'articulation du judiciaire avec la culture: un réajustement possible dans l'action éducative par Karim Hanouti Actes professionnels et légitimité... Quelles légitimités pour le travail social? par Denis Sibony la visite à domicile: lorsque la porte s'ouvre... par Brigitte Martinon Dezan Pour faire le portrait d'une famille ou l'aide à l'indécision par Eric Bidault 7 P 85 P 101 P 121 P 127 P 135 De l'éthique aux droits fondamentaux... Ethique et travail social par Brigitte Bouquet Ni Dieu ni Marx... Quelle éthique pour quel travail social? P 143 par Florent Pinault P 153 Eléments de problématique pour aborder la question de « la portée structurante» des droits fondamentaux par Bernard Pellegrini P 161 Bibliographie P 181 Post-face: l'Association Buzenval par Bernard Pommereuil P 191 8 Avant-propos par Martine BEISTEGUI Directrice SE MO L'association BUZENVAL concourt depuis plus de quarante ans à des missions de Protection de l'Enfance sur le département des Hauts-de-Seine. Une aide éducative est proposée à des parents sur une base contractuelle définie avec le service de l'Aide Sociale à l'Enfance. Le Service Educatif en Milieu Ouvert que je dirige est, quant à lui, désigné par les Juges des Enfants pour exercer des Actions Educatives en Milieu Ouvert (AEMO) ainsi que des Investigations d'Orientations Educatives (IOE) et des Tutelles aux Prestations Sociales Enfants (TPSE). Qu'elles soient invitées par les services sociaux ou convoquées par une décision judiciaire, les familles viennent nous rencontrer et nous allons à leur rencontre. Une rencontre encouragée, sinon imposée, dont nous convoitons qu'elle autorise chacun à advenir sujet de cette obligation. Qu'en est-il de cette rencontre, de cette altérité? Nos interventions s'articulent à la frontière de l'autorité parentale et du devoir de protection de l'enfance, autour des notions antagonistes d'aide et de contrôle, à la croisée du respect du droit des familles et de l'ingérence 9 dans une sphère intime, au nom de l'intérêt de l'enfant érigé en véritable paradigme de notre société contemporaine. C. Eliacheff (1991) nous parle de l'enfantroi ou victime tandis que I. Thery dans l'ouvrage intitulé Le Démariage (1995) constate que « ce despotisme éclairé incite à déguiser tous les intérêts en intérêts ou droits de l'enfant, c'est-à-dire à en user comme des alibis. Une telle démarche s'affiche des plus généreuses, cependant que l'enfant abstrait devient pur argument d'autorité pour ceux qui se proclament du parti de l'enfant. » La notion de maltraitance s'est également introduite dans le langage courant. De ce néologisme imposant, L. Gavarini (2001) précise: « Parler de maltraitance nous ouvre un nouvel espace de représentations, d'où se dégage une figure de malheur enfantin à l'extrême opposé de la conception actuelle de l'enfant sujet, de l'enfant jouissant de droits propres, des besoins qu'on lui reconnaÎt et de ce que l'on considère aujourd'hui comme le bien-traiter.. . Avec la maltraitance et l'enfant en danger, on a également mis en continuité, de manière linéaire et quasi dogmatique, les actes d'éducation et le mal-être des enfants. » Ainsi, les signalements sociaux et judiciaires à l'origine de nos interventions soulignent des carences éducatives et affectives massives, exprimées ou supposées, d'enfants considérés en danger ou à risque. Ces signalements éclairent surtout le devant d'une scène où apparaissent des individus fréquemment aveuglés de souffrance. Ce ne sont pas tant des usagers que nous rencontrons, ni toujours des détenteurs de l'autorité parentale. Mais certainement des hommes et des femmes, des enfants ayant rarement expérimenté la parole. Nous nous étonnons toujours, à l'échéance d'une mesure ou devant le Juge des Enfants, de les entendre souligner à quel point ils ont pu s'exprimer pour la première fois, être écoutés, combien ce moment a été 10 important et fécond et a constitué une véritable découverte bénéfique. L'action éducative a besoin de temps pour permettre à chacun de se poser, de cheminer, d'explorer dans un cadre disponible, respectueux, ouvert et bienveillant. Les questions à l'ordre du jour touchent à l'Education et renvoient inexorablement à celles des séparations qui jalonnent les parcours chaotiques et apportent leur lot de traumatismes, de vide ou de confusion parfois. Confusion des places de chacun au sein d'une même famille, des générations et des sexes. Un contexte bien mouvementé et instable où il s'agit de favoriser l'accès des parents à l'élaboration de leur propre questionnement et à la reconnaissance de leurs enfants, en tant qu'individus distincts, en devenir, séparés d'eux-mêmes tout comme de leurs attentes idéalisées ou de leurs projections mortifères. A l'assemblée générale de l'Association Française des Magistrats de la Jeunesse et de la Famille au Palais de Justice à Paris en février 2004, D. Sibony évoquait « ce cri d'insuffisance symbolique de la famille ouvrant à un parcours où il espère être arrêté et au cours duquel il exprime sa violence interne ou victimaire. » C'est aussi de cette part d'humanité dont nous avons souhaité témoigner dans cet ouvrage: tant des familles que des professionnels qui les accueillent et les accompagnent. Ceux-ci étant placés dans une double contrainte liée à la délicate et nécessaire alliance paradoxale entre la relation d'aide et l'injonction normative socio-judiciaire. Cette période anniversaire de notre association nous a offert l'opportunité d'aller à la rencontre de nos pratiques professionnelles, à la faveur de six journées de formation collective. Cette démarche s'est inscrite dans une réflexion théorique visant à interroger nos expériences, nos savoir-faire et nos évidences... Mais 11 elle a également permis de nous pencher sur la démarche même de formation en tant que processus de construction des savoirs et des compétences. A ce sujet, J. Beillerot, cité dans Analyser les pratiques professionnelles (Blanchard-Laville et Fablet, 1998), précise: « Si les pratiques sont difficiles à présenter, à rendre lisibles, c'est aussi parce qu'elles ne se réduisent pas aux actes, au «faire », qu'elles sont des objets sociaux abstraits et complexes et ne sont pas des données brutes immédiatement perceptibles. Elles ne peuvent se comprendre et s'interpréter que par l'analyse. » Dès lors, si de nombreux auteurs s'attachent à porter le regard du côté des usagers, invitant même pour certains les professionnels, selon la formule consacrée, à les « placer au centre du dispositif », nous proposons de nous attarder davantage du côté des pratiques et de leurs effets et de nous immiscer dans l'intimité des réflexions - autant dire dans les coulisses de ces activités si précieuses d'enseignement et de questionnements comme des concepts théoriques qu'ils mobilisent, souvent à notre insu. Ainsi, pouvons-nous en souligner toute la complexité dynamique. Les professionnels interviennent dans un champ à la méthodologie peu formalisée et aux références théoriques plurielles et hétérogènes où la sphère émotionnelle et le domaine des représentations sont particulièrement à l'œuvre. J. Dejean dans un ouvrage collectif relatif à l'analyse des pratiques et coordonné par C. Blanchard et D. Fablet (1996) indique: « Entendre les autres buter sur le même genre de difficultés que soi-même permet de prendre de la distance par rapport à ses propres difficultés et de comprendre qu'il peut y avoir des situations symboliquement délicates à gérer qui ne remettent pas en cause les capacités de l'individu mais parlent de conflits de représentations qui viennent gêner les aptitudes ». 12 Accompagner un enfant, des parents, suppose la capacité à interroger sa pratique, à l'ouvrir à la réflexion, à en préciser l'intention, les finalités, à en saisir le sens. Ce travail convoque le praticien en tant que professionnel. Il interpelle le rapport qu'il entretient à son objet de travail, sa « mission» au sens large, au regard de ses contraintes - y compris internes - en appréciant sa part d'implication dans une activité particulière où la subjectivité est largement éprouvée. L'implication liée à la question de l'engagement des professionnels constitue un élément essentiel et caractéristique. Les interventions éducatives sont effectivement incarnées par des praticiens moins placés en position d'arbitrage ou partisane au cœur de conflits d'intérêts intra-familiaux, mais en tant que tiers impliqués eux-mêmes. M. Cifali dans Le lien éducatif: contre-jour psychanalytique (1994) ajoute: « Un praticien qui tente de construire un savoir à partir de sa pratique quotidienne travaille sur un objet dans lequel il est impliqué. Il ne peut en être autrement. Soit on lui reproche toujours d'être partial et les plaintes risquent indéfiniment de se perpétuer. Soit on fait de cette implication la base de la production de son savoir ». L'action éducative ne vient donc pas qu'en application du Droit. Elle n'est pas davantage organisée selon un modèle « prêt-à-porter» transposable d'où déclinerait une série de procédures mécaniques et stables. Elle introduit une nécessaire dialectique entre le Droit et les enjeux spécifiques de l'éducatif dans son rapport à la loi réelle et symbolique. Les professionnels, quelle que soit leur place dans l'organisation institutionnelle, doivent témoigner de leurs capacités à en assumer la responsabilité, tant dans leur discours qu'au travers de leurs actes éducatifs. Le travail social se voit aujourd'hui particulièrement interrogé, en terme de qualité, d'efficacité et de rentabilité, dans une conjoncture soucieuse de ses dépenses et donc 13 fort éloignée des enjeux de la clinique éducative. Les professionnels ont sans doute à mesurer davantage l'intérêt de valoriser les effets de leurs interventions, de rendre ces dernières plus lisibles et donc plus fondées et légitimes. M. Autès, dans Les paradoxes du travail social (1999), rappelle qu'il « y a un autre social à l'intérieur du social, un social qui se veut gestionnaire, moderne, éloigné de la culture surannée des référentiels de l'aide et de l'assistance. Le social est désormais scindé. Seule sa partie gestionnaire est valorisée. Son côté préventif et promotionnel est oublié. Or son efficacité symbolique suppose que ces deux aspects soient tenus ensemble ». La question éthique est plus que jamais ré-interpellée en cette période de crise des valeurs et, qui plus est, de mutations socio-économiques. Assisterions-nous à un retour de l'éthique comme B. Bouquet l'indique dans son récent ouvrage Ethique et travail social: une recherche de sens? Déjà, dans la réflexion collective dirigée par M. Gabel, Maltraitance : évaluation, répétition (1996), B. Bouquet écrivait: « Il s'agit d'aider le professionnel à se mouvoir le moins mal possible dans la problématique de l'enfance maltraitée en refusant le silence ou en évitant le vacarme ». Au sein de nos différents services, nous observons une évolution des problématiques et des dynamiques familiales qui invitent les professionnels que nous sommes à analyser les réponses apportées Quelles intentions, quels principes guident et président à la mise en œuvre de ces interventions inédites et singulières? Si des échanges en équipe, au sein de nos institutions respectives, permettent d'accueillir les désordres, le chaos, de bâtir des hypothèses, de proposer une mise au travail des questions à l'ordre du jour de l'actualité socio-judiciaire, quels discours sous14 tendent ces pratiques? Que traduisent-il du regard que nous portons sur la famille, l'enfant, l'éducation, la société? L'usager est-il un être de besoin, un être de désir? L'ouvrage de M. Capul et M. Lemay De l'Education spécialisée (1997) indique: « Que sommes-nous? Que faisons-nous? Comment agissons-nous? Au nom de quoi intervenons-nous? Interrogations, non seulement utiles à se poser, mais fondamentales dans le sens de se bâtir une vision de soi-même pour aider l'autre à construire "sa" vision de ce qu'il pourra être, en dépit et avec les avatars de son existence ». Ainsi nos interventions participent-elles à dégager les familles de la stigmatisation dans laquelle le signalement social ou judiciaire pourrait les enfermer? Favorisentelles l'ouverture d'un espace de négociation et de socialisation, de construction de sens, de restauration des liens? En un mot, contribuent-elles à faire évoluer la dynamique familiale? Les professionnels ont besoin d'un étayage théorique à même de soutenir ces questionnements et d'en ouvrir d'autres. M. Cifali (1994) précise que « dans les métiers de l'humain, le pouvoir est là, nu, pouvoir arbitraire du fort, pouvoir d'injustice, que rendent possibles la fonction et la disparité des forces en présence. Cet exercice d'un pouvoir sans partage et sans garde-fou, les métiers d'éduquer, de gouverner et de soigner se le partagent. C'est en quoi ils se ressemblent, et c'est en quoi ils ont la nécessité d'une éthique ». Aussi entendons-nous, dans cet ouvrage, accompagner ce mouvement qui ouvre le champ des questionnements et de la réflexion. Il participe de l'élaboration collective d'une posture éthique à partir de laquelle peuvent s'appuyer les professionnels et s'étoffer leurs pratiques. Mais aussi, afin que s'échangent sans complaisance, avec rigueur et exigence, nos points de vue. Malgré tout, chacun de nous devra toujours assumer cette part de risque, d'inconnu, de hasard présidant à 15 toute rencontre éducative. Tel un funambule sur le fil, à la recherche d'un équilibre toujours précaire, le regard porté sur l'horizon d'une terre accueillante et stable. Notre association, comme toutes celles dont nous partageons la même vocation, a la responsabilité d'encourager cette démarche et ces débats dynamiques incontournables. Je terminerai par cette citation de J. Rouzel empruntée dans l'ouvrage Les usagers de l'Action Sociale (Humbert, 2002) : «Peut-être pourrait-on dire que le travail social n'existe pas. Mais le social, c'est-à-dire la façon de nous supporter les uns les autres, nous travaille et pose à chaque citoyen, quelle que soit sa condition, la question de ce qu'il en est pour lui du lien social. Les travailleurs du champ social peuvent-ils, veulent-ils, contre toutes les injonctions de la modernité, s'engager dans le soutien de la parole de chaque sujet rencontré? Veulent-ils s'assumer comme responsables, en tant que sujet, de ce qui leur arrive? Leur honneur et leur éthique se mesureront au prix payé pour poser cette question et en soutenir en acte les conséquences dans la pratiq ue ». 16 Introduction par Claude ROUYER Responsable du CREAS (ETSUP) La littérature spécialisée s'intéresse peu aux pratiques éducatives en milieu ouvert. P. Durning et J. Chrétien (2001) ont toutefois produit un ouvrage qui recense les travaux portant sur ce sujet, rassemblant dans un même ensemble des mémoires professionnels et des travaux de recherche. Toutes les productions portant sur ce secteur d'intervention y sont rassemblées dans un état des lieux riche et exhaustif. L'axe choisi pour ce nouvel ouvrage se veut une réflexion sur les principes fondamentaux qui animent l'intervention éducative en milieu ouvert. Il n'est pas question, dans les pages qui suivent, de disserter sur les différentes approches techniques qui sous-tendent ces interventions même si, au détour des chapitres, se pose ici ou là le problème de la visite à domicile ou celui de la rédaction d'un rapport... La gageure de cet ensemble est bien davantage d'appréhender l'influence des mécanismes culturels, psychologiques et sociaux sur l'action même des travailleurs sociaux intervenant dans ce secteur, qu'il s'agisse de l'Action Educative à Domicile (communément nommée AEMO administrative) ou de l'Action Educative 17 en Milieu judiciaire ). Ouvert (communément nommée AEMO Cinq grands axes de réflexion ont été retenus dans l'élaboration de cet ouvrage: v'" le premier s'intéresse à l'impact des représentations sociales sur les pratiques. Si la représentation est un construit social, si elle est active, si elle guide les pratiques, comment faire en sorte de l'appréhender, de l'arracher au contexte social qui la crée et la colporte? Comment l'utiliser pour qu'elle aide le travailleur social à rencontrer l'autre dans sa singularité, parfois si différente et souvent si proche de la nôtre? v'" C'est dans un lien logique que le second axe de cet ouvrage interroge l'altérité, cet historique «entre deux », entre nous et l'autre, entre l'homme et le barbare (Calogirou)... Si l'opposition entre les sociétés primitives et les sociétés modernes s'est estompée, il s'agit aujourd'hui de penser l'autre dans sa différence. L'action éducative en milieu ouvert s'inscrit au plus près de populations plurielles sur lesquelles il faut, aujourd'hui plus qu'hier, porter un regard social. Au sein des sciences anthropologiques, l'ethnologie peut aider le travailleur social dans sa démarche d'observation. v'" Mais que serait la diversité des peuples sans celle des hommes qui les composent? Aussi, un troisième chapitre nous conduit à la rencontre d'itinéraires singuliers, de parcours d'exil qui influencent les conditions de vie individuelles et collectives des personnes qui les ont traversés. Tenter d'appréhender, au-delà des cultures et des peuples, la singularité des individus s'inscrit au cœur de toute démarche éducative. 18 v' Dans cet univers de plus en plus hétérogène, dans ce décor singulier mais de plus en plus complexe, le travailleur social doit trouver sa place. Entrer dans la sphère privée, donner des conseils, proposer des orientations, prendre des décisions, suppléer des familles jugées en difficultés ou défaillantes, pose le problème de la légitimité de l'acte éducatif. Si la légitimité institutionnelle est aujourd'hui interrogée, si la légitimité démocratique est parfois mise à mal, quid de la légitimité de compétence qui confèrerait au travailleur social, le temps d'un mandat, le droit de s'immiscer dans l'intimité familiale? v' Tous ces questionnements ne peuvent trouver de réponses que dans une double interrogation portant à la fois sur l'éthique et sur le droit. En affirmant la place de l'éthique dans toute intervention sociale et la prépondérance des droits fondamentaux dans le rapport à l'autre, ce chapitre ponctue cette réflexion collective. Car il s'agit bien ici d'une production collective à laquelle professionnels, chercheurs et universitaires ont été associés pour répondre aux légitimes interrogations posées par l'intervention éducative en milieu ouvert. Le fait est assez rare pour pouvoir être signalé... Ont donc participé à cet ouvrage: v' Patrick Adamina, Psychologue l'association Buzenval (SEMO) v' Vesper Barton-Clegg, Assistante Sociale l'association Buzenval (AEAD) v' Martine Beistegui, Directrice du SEMO l'association Buzenval v' Eric Bidault, Educateur Spécialisé l'association Buzenval (SEMO) 19 à à à à ./ Brigitte Bouquet, Responsable de la chaire de travail social au CNAM, Vice-Présidente du CSTS ./ Claire Calogirou, Chargée de recherche au centre d'ethnologie française, musée national des Arts et Traditions populaires ./ Karim Hanouti, Educateur Spécialisé à l'association Buzenval (AEAD) et Anthropologue ./ Belkassem Kassou, Educateur Spécialisé à l'association Buzenval (SEMO) ./ Brigitte Martinon Dezan, Educatrice Spécialisée à l'association Buzenval (AEAD) ./ Bernard Pellegrini, Chargé d'études à la DPAS, Conseil Général de Seine Saint-Denis ./ Florent Pinault, Educateur Spécialisé à l'association Buzenval (AEAD) ./ Bernard Pommereuil, Directeur Général de l'association Buzenval ./ Claude Rouyer, Responsable du CREAS, centre d'études et de recherches de l'école supérieure de travail social (ETSUP) ./ Edwige Rude-Antoine, Chargée de recherche CNRS/CURAPP ./ Catherine Sellenet, Professeur en Sciences de l'Education à l'université Rennes Il ./ Denis Sibony, Formateur et Enseignant à l'université de Montréal 20