Il faut alors savoir quelle place le droit accorde à l’autonomie personnelle2, dont on
s’aperçoit que les limites varient dans le temps et dans l’espace3. Ainsi, contrairement à
d’autres législations, la France refuse que la mort soit délibérément provoquée par un tiers ou
avec son assistance (I), la mort, même si elle est encadrée, ne pouvant être qu’attendue (II).
I. LA MORT PROVOQUEE
Certains pays admettent que la mort d’autrui puisse être provoquée (A), ce que, comme
d’autres, la France refuse (B).
A. L’admission de la provocation de la mort d’autrui
Le suicide assisté a été légalisé4 dans certains États étrangers. Par exemple, la possibilité
de s’adresser à un médecin pour se faire prescrire, à des conditions strictement définies5, une
substance mortifère est reconnue aux habitants de l’Oregon6. Précisons que la décision
d’avaler le médicament appartient au patient qui, dans l’affirmative, doit lui-même l’absorber.
Sur la notion d’euthanasie dans le langage moderne, voir par exemple (ces références ne sont pas exhaustives),
B. Legros, « Les "droits" des malades en fin de vie », thèse Lille II, Les Études Hospitalières Éditions, 1999,
n° 309 et s. Voir également, E. Dunet-Larousse, « L’euthanasie : signification et qualification au regard du droit
pénal », RD sanit. soc. 1998, p. 265 ; A. Prothais, « Accompagnement de la fin de vie et droit pénal », JCP éd. G
2004, I, 130, spéc. n° 1 et 2 ; F. Vialla, « Dérive sémantique et instrumentalisation de l’euthanasie », in La fin de
vie et l’euthanasie, Actes du colloque d’Aix-en-Provence 30 nov. - 1er déc. 2007, Les Études Hospitalières
Éditions, 2008, p. 257 et, du même auteur, « La France peut-elle avoir légalisé l’euthanasie ? », in La mort et le
la droit, op. cit., p. 389 ; B. Beignier, « Respect et protection du corps humain. La mort », JCl. Civil Code, art. 16
à 16-13, fasc. 70, 2007.
Sur la distinction entre suicide et euthanasie, citons ici les propos de B. Legros, « Sur l’opportunité d’instituer
une exception d’euthanasie en droit français », préc., spéc. p. 26, 1re col. : « L’homme, s’il veut mourir, peut se
suicider, mais il n’a pas à proprement parler un droit au suicide ; il bénéficie néanmoins d’une permission car
le suicide ne peut être ni ordonné, ni défendu. Toute personne peut donc disposer de sa propre vie, même pour y
mettre fin, mais elle ne peut pour autant demander à un tiers d’y procéder. Cette intervention d’autrui sur sa vie
est une atteinte à son intégrité physique qui s’analyse en une euthanasie ». Sur le suicide et ses conséquences ou
le régime applicable, voir par exemple F. Terré, « Du suicide en droit civil », in Mélanges Weill, Dalloz, 1983,
p. 523 ; E. Putman, « Le suicide et le droit », in La fin de vie et l’euthanasie, op. cit., p. 247 ; A. Moine, « Les
entraves légales à la volonté de mourir », in La mort et de la droit, op. cit., p. 247 ; B. Beignier, préc., spéc. n° 17
et s.
2 Sur cette question, voir notamment M. Fabre-Magnan, « Le domaine de l’autonomie personnelle,
indisponibilité du corps humain et justice sociales », D. 2008, p. 31.
3 A. Moine, préc., spéc. p. 254, note 19.
4 La légalisation « se dit (…) de la consécration par la loi soit d’une pratique jusqu’alors non réglementée, soit
même d’un comportement illicite, mais souvent déjà toléré » (V° Légalisation, « Vocabulaire juridique »,
G. Cornu (dir.), Association H. Capitant, PUF, 8e éd., 2007). La dépénalisation est l’ « opération consistant à
soustraire un agissement de la sanction du droit pénal » (V° Dépénalisation, « Vocabulaire juridique », op. cit.).
Sur ce point, voir par exemple J.-B. Thierry, préc. ; B. Legros, « L’euthanasie et le droit, état des lieux sur un
sujet médiatisé », Les Études Hospitalières Éditions, 2e éd., 2006, spéc. p. 135 et s.
5 Le patient doit formuler sa demande trois fois, dont une par écrit et plusieurs médecins doivent intervenir dans
le processus.
6 Suite à un référendum, une loi relative à la mort dans la dignité a été approuvée (Oregon Death with Dignity
Act). Cependant, ce texte n’est entré en vigueur qu’en 1997, un recours en justice ayant été déposé par les
opposants à cette loi. Par ailleurs, le 5 mars 2009 est entrée en vigueur, dans l’État de Washington, la loi « mort
dans la dignité » Initiative 1000, approuvée par référendum en novembre 2008 par près de 60 % des électeurs.