sacrée » au début du mois d'août 18704. Les plus farouches opposants à l'Empire et à la guerre
finirent, comme Thiers, par voter les crédits de guerre. Seule une partie du clergé catholique
(inquiet du retrait de la garnison française de Rome au début d'août 1870 : ne restaient à Rome que
les zouaves pontificaux) et l'extrême gauche ne participaient pas à ce mouvement d'adhésion à la
guerre.
II. De 1870 au début des années 1890
1/ La défaite de 1870 et ses conséquences
La défaite de Sedan fut un traumatisme pour :
-les militaires, qui avaient fait preuve de détermination (l'idée de revanche naquit dans les milieux
d'officiers vaincus et internés en Allemagne5) ;
-les civils, auprès desquels l'Empire perdit toute légitimité.
Mais le nouveau régime reprend l'héritage révolutionnaire. Le Gouvernement provisoire s'intitule
Gouvernement de la Défense nationale.
La Commune se proposait de défendre Paris, au nom du patriotisme (ce qui n'excluait pas les
influences internationales). Paris avait ainsi voté contre la paix en élisant en février 1871 des
députés républicains et bellicistes. Gambetta incarne désormais la défense de la nation (et l'idée de
revanche) et dirige le camp républicain, dont les membres acceptent la conscription, qu'ils
refusaient en 1868.
La droite, élue en février 1871 sur le thème de la paix, accepte le traité de Francfort. Elle était de
plus traditionnellement hostile à :
-l'armée, qui faisait reposer sur le monde rural le fardeau de la conscription ;
-aux aventures militaires.
Mais Thiers sut préparer la libération du territoire grâce au succès de l'émission des emprunts
destinés à payer l'indemnité exigée par Bismarck. La perte de l'Alsace-Lorraine avait créé en effet
une volonté de revanche chez les Français. Gambetta est le premier homme politique à utiliser en
février 1871 le terme de revanche.
L'idée de revanche bouleverse le paysage politique français de 3 manières :
En amenant un renouveau de la réflexion sur l'idée de nation. Les Français refusent la
conception allemande proposée par Herder, selon lequel la nation serait un être vivant qui
grandirait de l'intérieur grâce à l'action inconsciente d'une force supérieure, le Volksgeist, se
manifestant par des signes extérieurs comme la langue. Renan définit en 1882 la nation
comme un « plébiscite de tous les jours » (Qu'est-ce qu'une nation ?). Il insistait sur
l'adhésion consciente et volontaire à la communauté nationale et justifiait ainsi l'irrédentisme
des Alsaciens-Lorrains.
En favorisant le militarisme. L'écrasement de la Commune a rassuré la bourgeoisie. Les
revues militaires, à partir de celle de Longchamp (juin 1871), furent des succès.
En faisant de l'idée nationale une référence idéologique. Pour Gambetta, la France se définit
par son identité nationale. Le cléricalisme était conçu par lui comme une force étrangère.
Pour Jules Ferry, l'école devait cimenté l'unité nationale. Pour Eric Hobsbawm, l'usage de la langue
nationale6 lie la petite bourgeoisie et les classes montantes au sein de l'État (mais la coexistence du
français et des langues locales n'avait d'ordinaire pas de conséquences politiques. Ainsi Mistral, qui
influença Maurras, était-il félibre et patriote). C'est l'époque de « la fin des terroirs » (E. Weber).
4 Cf A. Corbin, Le village des cannibales : en août 1870, un noble au physique ingrat a été mangé par des paysans,
persuadés qu'il était un espion prussien.
5 De nombreux officiers français ont été emprisonnés en Allemagne en 1870, même si le phénomène n'a pas atteint
l'ampleur qu'il atteindra en 1940. Albert de Mun lit, en captivité, les œuvres de Mgr von Ketteler, archevêque de
Mayence, et découvre ainsi les principes du catholicisme social.
6 Les langues régionales, basque et breton, était également pourchassées parce qu'elles étaient les langues de la
prédication catholique.