Pourquoi ?
Parce que les situations ne sont en
rien comparables ! Aux Pays-Bas,
les premiers plans sociaux sont
intervenus avant la baisse des prix.
Ensuite, la conjoncture était très
différente, avec une baisse du PIB,
donc une récession. Le cadre
réglementaire, qui est très libéral,
n’entrave pas la revente à perte.
C’est aussi une différence fonda-
mentale. Plus spécifiquement sur
Ahold, qui est l’instigateur de
cette guerre des prix, sa situation
n’était absolument pas compa-
rable avec celle de nos enseignes.
Non, très sérieusement, la menace
d’un scénario à la néerlandaise
n’est objectivement pas crédible.
Autre scénario : le statu-quo.
Autrement dit un cadre
réglementaire qui n’évoluerait
pas ou peu. Quelles en seraient
les conséquences ?
C’est peut-être paradoxal, mais à
très court terme, il ne faut rien en
craindre. Les distributeurs conti-
nueraient à engranger des marges
arrières, les prix des marques res-
teraient élevés. A plus long terme,
en revanche, ca serait la confirma-
tion d’un diagnostic inquiétant sur
l’état des distributeurs français qui
se transformeraient en rentiers,
assis sur leurs mètres carrés, mais
ayant perdu tout dynamisme.
Regardez le jugement des mar-
chés boursiers. Depuis quelques
années, Carrefour et Casino ne
sont plus considérés comme des
valeurs de croissance. C’est un
signe !
Soit, mais y a-t-il un risque ?
Encore fois, pas à court terme.
Mais ne nous leurrons pas : nous
sommes dans une spirale... à
pente douce. En France, les hypers
et les supermarchés perdent régu-
lièrement des parts de marché au
profit du hard-discount. Et à l’in-
ternational, il y a manifestement
une érosion de la compétitivité
des groupes français. Pour un dis-
tributeur, la bagarre sur les prix (ce
qui est sa raison d’être), c’est sur-
tout une manière d’être bon...
Tesco l’a démontré
en Grande-Bretagne avec une
impressionnante croissance
dans les années 1990...
Oui, et le cas de Tesco est exem-
plaire. C’est aujourd’hui le groupe
que l’on désigne dès que l’on
cherche des exemples de bonnes
pratiques, de réussites, etc. Alors
que depuis des dizaines d’années
on montrait plutôt des groupes
français.
Le contre-exemple à cette théorie
du “tout pour le prix” est bien
français... C’est Super U qui,
sans être la moins chère, est
l’enseigne qui gagne le plus de
parts de marché...
Entendons-nous bien... L’objectif
n’est pas le prix pour le prix ! Ce
qui importe, c’est la capacité des
enseignes à argumenter, à légiti-
mer, à justifier leur positionne-
ment. En d’autres termes, à faire
comprendre aux consommateurs
en quoi le prix qu’on leur deman-
de de payer est justifié par la
valeur ajoutée réelle que propose
le magasin. Si aujourd’hui des
consommateurs quittent les
hypers ou les supers pour le hard-
discount, c’est parce qu’ils adhè-
rent moins au mix de l’enseigne.
Et force est de constater qu’à leur
niveau de prix, les hypers et les
supers ont perdu de leur attractivi-
té... Dans le cas de Super U, son
gain de part de marché signifie
que c’est l’enseigne qui justifie le
mieux son positionnement.
De quelle manière ?
Super U profite encore aujour-
d’hui d’importants efforts menés
à la fin des années 1990, notam-
ment au niveau de l’outil. De plus,
je pense que l’enseigne a trouvé le
bon dosage entre le national, le
régional et le local. Chez Super U,
on ne fait pas du “marketing de
siège”. Le bon sens commercial
est palpable. C’est ce qui a donné
du contenu au slogan “Nouveaux
Commerçants” qui, à l’origine,
n’était que publicité. C’est désor-
mais des valeurs que les clients ont
perçues.
Plus globalement, quelles voies
les enseignes doivent-elles suivre
pour reprendre l’initiative ?
A défaut de pouvoir sensiblement
jouer sur le prix en raison de la
réglementation, les enseignes doi-
vent s’interroger sur la prestation
qu’elles offrent au consommateur
pour le niveau de prix qu’elles lui
demande. C’est de l’analyse de la
valeur appliquée à la distribution :
“dans tout ce que je propose au
client, qu’est-ce qui a vraiment de
la valeur ? Pour quoi est-il prêt à
payer?”. Par exemple, une offre
trop profonde, donc incompré-
hensible, c’est un non sens com-
mercial. De même, les accords de
gamme sont mortels. Première
étape donc : resserer les assorti-
ments pour les rendre lisibles.
Ensuite, dans un contexte de prix
relativement harmonisés entre
enseignes, le merchandising a un
rôle crucial à jouer pour aider le
consommateur. Voilà une valeur
ajoutée sur laquelle les enseignes
doivent se positionner.
Quel regard portez-vous sur les
tests de magasins discount
menés entre autres par
Champion ou Casino ?
Le fait que plusieurs enseignes
réfléchissent dans cette direction
est intéressant. C’est la preuve
qu’elles ont pris la mesure du pro-
blème. En revanche, je reste dubi-
tatif sur la capacité de gérer deux
modèles de distribution aussi dif-
férent (par exemple un Champion
“classique” et un Champion
“ultra-discount”) sous une même
enseigne et dans une même struc-
ture. Ca revient à faire du low-
price sans être nécessairement
low-cost !
Propos recueillis par
Olivier Dauvers
La formidable épopée du commerce,
racontée telle une saga.
[par Frédéric Carluer-Lossouarn et Olivier
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