Bulles Spéculatives – Prophylaxie et thérapeutique – MOKHFI ET

Bulles Spéculatives : Prophylaxie et thérapeutique
A. MOKHEFI
M.AMRANI*
Résumé:
La crise financière actuelle est la première crise due aux limites du nouveau modèle
bancaire. Elle est la conséquence d'une crise très localisée, survenue sur un segment mineur du
marché du crédit immobilier américain .Cette crise a été provoquée par le refus des
établissements de crédit de croire à la réalité de la bulle spéculative immobilière, et à leur
recherche de l'extension de leurs activités de prêt, fort rentables, sans considération de la
solvabilité des emprunteurs.
L’éclatement d’une bulle spéculative c’est-à-dire l’effondrement des cours boursiers dans
un secteur donné conduit les entreprises concernées à trouver un mode de financement adapté à
cette conjoncture. Minsky distingue, notamment dans le cas de bulles de crédit, trois structures
de financement des firmes possibles selon leur aversion au risque. Il y a le hedge finance (dette
couverte par des revenus), spéculative finance (des revenus couvrent les intérêts mais pas le
capital à rembourser), et Ponzi finance (couverture des engagements par la dette).Ce dernier
mène à la plus grande fragilité financière.
Et d’autre part, l'évaluation du montant des bulles est souvent difficile a réaliser. La bulle
immobilière américaine, à son paroxysme de 2006, est chiffrée par certains experts de
l'urbanisme et de l'immobilier à 4 000 milliards de dollars soit un montant voisin évoqué pour la
bulle immobilière européenne. Une partie porte sur une bulle purement financière susceptible de
s'effondrer en quelques mois. Une autre disparaîtra plus lentement avec les migrations, les
mutations économiques ou les assouplissements réglementaires. Par ailleurs, de nombreuses
valeurs boursières ou monétaires sont en partie adossées à des actifs et créances immobiliers.
Ceux-ci, une fois titrisés, figurent indirectement dans de nombreux portefeuilles eux-mêmes
titrisés ou dans les actifs de sociétés cotées en bourse. Certains auteurs estiment le cumul des
valorisations participant de la bulle financière de 2008 à cinquante fois le PIB mondial.
Bien que le phénomène de bulle financière soit connu et identifié depuis plusieurs siècles
par les économistes, il a fallu attendre les années quatre-vingt pour que des modèles
mathématiques en donnent une formulation précise. Le but de cette communication est de
présenter brièvement les principaux modèles décrivant ou expliquant la formation des bulles.
D’une manière générale, l’existence d’une bulle, définie comme un écart important et persistant
du prix d’un actif par rapport à sa valeur fondamentale, repose sur le fait que le prix des actifs
financiers dépend largement des anticipations de prix futurs, ce qui engendre des possibilités
d’équilibres multiples. Deux types de modèles sont distingués à savoir: les bulles « rationnelles »
et les bulles « irrationnelles ».
Mots clés :
bulle spéculative – modèles - crise financière.
Maître assistant, Université de Mostaganem, Faculté de Droit et des sciences commerciales, Département sciences
commerciales.
* Maître assistant, Université de Mostaganem, Faculté de Droit et des sciences commerciales, Département sciences
de gestion.
Introduction :
La mondialisation et son cortège de déréglementation a donné naissance à un vaste
marché international de capitaux. Les agents économiques se rencontrent sur les marchés
financiers pour assurer le financement de l’économie réelle. Tandis que les uns apportent des
capitaux en échange de plus-values potentielles, les autres les reçoivent pour répondre à leurs
besoins financiers.
Cette connexion entre sphère elle et monétaire devrait donc se traduire par une même
évolution des deux sphères. En effet; la valeur boursière d’une entreprise est censée traduire ses
performances. Il n’y aurait donc aucune raison pour qu’une évolution des cours lui soit favorable
dés lors que ses résultats économiques révèlent sa mauvaise posture.
Nonobstant cette analyse a priori, force est de constater les spéculations massives et
récurrentes. Ce sont surtout les krachs retentissants dont elles sont accompagnées qui inquiètent,
or dans le même temps, l’économie réelle semble stable.
Effectivement; les taux de croissances sont réguliers et l’inflation reste modérée dans les
pays de la zone euro.
Cette instabilité des marchés concomitante d’une économie réelle stable a bien eu lieu en
1987 et 1998 en France. La réalité des faits contredit ainsi l’analyse a priori d’une évolution
parallèle des deux sphères.
Pour autant; la bourse ne peut cependant durablement prospérer dans une économie réelle
en panne et inversement; la situation sur les marchés financiers finira par peser sur la conjoncture
économique.
Dés lors, l’analyse des causes et des effets de cette relation complexe est nécessaire.
Deux thèses s'affrontent. La première invoque la déconnexion des sphères financières et
réelles pour expliquer la coexistence d’une volatilité des marchés et d’une stabilité de
l’économie. Cependant, en dépit de cette déconnexion, les marchés volatiles seraient néfastes. La
seconde plaide en faveur d’un lien entre économie réelle et économie financière. Cette seconde
thèse assure que l’économie réelle bénéficie des conséquences positives grâce aux marchés
volatiles.
La question de la connexion / déconnexion entre la sphère financière et sphère réelle de
l’économie est pourtant une question récurrente, que se posent les économistes, les dirigeants
politiques, les dirigeants d’entreprises, les salariés…..
Ainsi, l’épisode actuel le montre clairement et cruellement. Les erreurs de choix et de
comportements des agents sur les marchés financiers et les déséquilibres financiers associés ont
eu des conséquences majeures sur les acteurs et leurs opérations dans l’économie réelles.
Les faillites bancaires, les défaillances successives d’organismes de crédit, les
licenciements, les ménages devenus insolvables (en cessation de paiement), sont les premières
preuves indiscutables de l’interdépendance entre les sphères réelles et financières de l’économie.
Toutes les crises financières; qu’il s’agisse d’une crise de change, d’une crise bancaire,
d’une crise de dette, d’une crise boursière, sont susceptibles de provoquer une récession, voire
une dépression dans la sphère réelle.
Alors; sommes nous au sein d’une crise économique internationale profonde? Ou bien;
nous trouvons nous dans une phase de transition entre deux équilibres par définition instables ?
Pour répondre à cette question, ou au moins tenter d’y apporter quelques réponses, on
peut commencer par se demander pourquoi les crises financières suscitent toujours tant de
craintes, éveillent tant de passions, ouvrent tant débats?
Tout simplement parce que les crises financières ont (toujours et forcément) des effets
réels! Si tel n’était pas le cas; le sujet serait probablement moins étudié et chacun d’entre nous
s'interrogerait moins sur les effets (réels) potentiels de ces crises qualifiés de financiers
1- Les fondements théoriques des bulles spéculatives :
Les gains de certains opérateurs sur le marché financier surprennent lorsqu’on les corrèle
avec l’évolution de la croissance entreprenariale. Les actifs financiers étant censés refléter la
valorisation de l’entreprise, cette très grande volatilité semble incongrue. L’aspect spéculatif de
ces échanges financiers est indéniable. La similitude des comportements spéculatifs peut
conduire à des bulles spéculatives sans précédent. L’implosion et les conséquences induites par
ces dernières ont été désastreuses pour certains secteurs notamment à partir des années 80.
C’est d’ailleurs à compter de cette date que les premières théories sont apparues. La bulle
spéculative se définit comme une surestimation d’un actif par rapport à sa valeur fondamentale.
Cette dernière étant le reflet d’une carte d’identité de l’entreprise, regroupant tous les éléments
décisifs tels que le chiffre d’affaires, le résultat, dette, trésorerie…
Le concept d’asymétrie d’information a longtemps été la solution explicative rêvée. Il est
vrai que les distorsions liées à une information incomplète joue dans le cadre d’un simple marché
haussier. Cependant la bulle spéculative est contre intuitive dans le sens ou elle ne répond pas à
des logiques habituelles de valorisation économique.
Un éclaircissement est nécessaire quand à l’amalgame que l’on peut trouver entre bulle
spéculative et crise financière. Une bulle spéculative ne détient pas en elle même les
caractéristiques d’une crise financière généralisée. Ce n’est qu’éventuellement la corrélation des
marchés ou l’importance du secteur victime de la bulle qui expliquerait le passage à une crise
financière. Ainsi pourrait-on apposer l’étiquette « micro » pour la bulle spéculative, et« macro »
pour la crise financière. De plus la bulle spéculative dans son concept même est difficilement
théorisable. Tous les économistes conçoivent la possibilité de surévaluation inopportune d’un
actif mais ne la considère pas tous comme une bulle spéculative au sens propre.
La bulle fait appel à des variables difficilement mesurables telles que le hasard, les
mimétismes, ou encore ce que Diamond (1965) nommera les croyances auto réalisatrices.
Il n’en reste pas moins qu’il est nécessaire de tenter une théorisation voire une
modélisation de la bulle spéculative pour prévenir son explosion et par voie de conséquences la
chute brutale des marchés financiers (ie krach). Attention cependant à ne pas tomber dans une
spirale la bulle spéculative serait le nom donné à n’importe quelle croissance financière
accompagnant l’évolution d’actifs.
Les fondements théoriques (I) doivent donc être appliqués via un cas majeur de bulle
spéculative, en l’occurrence la bulle Internet (II A). Il apparaît également nécessaire de ne pas
catapulter toute surévaluation de « pricing » comme une bulle spéculative. C’est probablement
avec cette idée en tête que le cas Immobilier (II B) doit être abordé et testé.
*Détection des bulles spéculatives:
Plus ludique qu’une simple « transcription » de manuels scolaires ou qu’une liste
exhaustive de définitions, les fondements théoriques de la bulle spéculative sont ici présentés
sous forme de questions/réponses. Ces mêmes questions que tout étudiant, s’intéressant au sujet,
est en droit de se poser. Nous avons ainsi tenté d’y répondre avec le plus justesse possible.
*Qu'est-ce qu'une bulle spéculative ?
Une bulle spéculative, aussi appelée « bulle boursière » ou « bulle financière», est une
hausse des prix très excessive sur un marché d'actifs financiers (actions, obligations, taux de
change), de l'immobilier, des matières premières, etc. Les logiques habituelles de valorisation
économique des actifs ne s'appliquent plus, et c'est par cette rupture de logique qu'une bulle
diffère d'un simple marché haussier.
Il s'agit d'un écart durable entre la valeur fondamentale d'un actif et le cours boursier
constaté.
La valeur fondamentale d'un actif dépend de la « santé » de l'entreprise- le chiffre
d'affaire, le PER (Price Earning Ratio), la trésorerie- ainsi que des fondamentaux économiques
(croissance, ...) dont elle suit l'évolution. Il peut exister un écart entre cette valeur et celle que
l’on constate car cette dernière résulte des anticipations non observables des agents.
*Quelle est la cause d'apparition de la bulle?
Une bulle est due souvent à une combinaison de différents facteurs comme:
- De fondamentaux économiques apparaissant, à tort ou à raison, favorables et
durables, et qui constituent en quelque sorte la base du mouvement ;
- De mimétismes euphoriques collectifs (en voyant les autres acheter et gagner de
l'argent, grâce à la hausse des cours, on veut participer soi-même à la fête) ;
- Et parfois de véritables mythes (le mythe du golden boy ou la facilité qu'il y aurait à
gagner de l'argent en spéculant sans relâche, dans les années 1980 ou bien la nouvelle
économie dans la deuxième moitié des années 1990) qu'on évoque dans un climat de
rumeurs. Il y a bulle à partir du moment le raisonnement d'arbitrage entre les différents
actifs ne s'applique plus et la logique de formation des prix devient essentiellement auto
référentielle: un prix démesurément élevé aujourd'hui se justifie uniquement par
la croyance qu'il sera plus élevé demain, alors que la comparaison avec les prix d'autres
actifs ne peut le justifier. Ce genre de comportement plus ou moins irrationnel des marchés,
créant des anomalies de prix, fait partie des phénomènes qu'étudie la finance
comportementale.
*Comment est-il possible de détecter une bulle spéculative ?
Bien que la présence de bulles spéculatives ne soit détectée en général qu'après leur
effondrement, il existe toutefois, et c'est ce que certains économistes ont cherché a démontré, des
facteurs révélateurs de la volatilisur les marchés, de l'instabilité crée par la spéculation et de
surcroît, de l'apparition d'une bulle spéculative.
*Avons-nous des exemples de bulles spéculatives ?
Les exemples sont nombreux et nous pourrions passer en revue tous les cas de bulles
spéculatives depuis le 17ème siècle avec l’épisode de la «tulipomanie » jusqu'à la bulle Internet
(que nous aborderons plus longuement par la suite) en passant par le krach boursier de1929.
Toutefois nous ne choisirons que d’observer la bulle du dollar à partir de 1980.
2 - Les différents types de bulles :
D’une manière générale, une bulle spéculative se définit comme un écart important et
persistant du prix d’un actif par rapport à sa valeur fondamentale. Cette définition implique qu’il
existe un modèle permettant de déterminer le prix fondamental d’un actif, même si celui-ci n’est
généralement pas observable. La formation d’une bulle repose sur le fait que des anticipations
auto-réalisatrices peuvent conduire les prix d’un actif à s’éloigner de leurs valeurs
fondamentales, sans que cette divergence soit directement détectable. Les exemples historiques
de bulles spéculatives les plus connus concernent les bules de tulipes en Hollande entre 1634 et
1637, les actions de la Compagnie des Indes en France en 1720 (Garber, 2000). Plus récemment,
l’appréciation du dollar entre 1982 et 1985 (Frankel et Froot, 1986) ou la montée des prix sur les
actions de la nouvelle économie à la fin des années 1990 (Bond et Cummins, 2000), suivie de
leur effondrement en 2000, sont souvent considérées comme des exemples de bulles financières.
Par ailleurs, la littérature économique propose de nombreux modèles théoriques de bulles
spéculatives. L’objet de cet article n’est pas d’en faire une synthèse exhaustive mais plutôt de
fournir une vue d’ensemble sur les différents types. Une façon de classer ces modèles consiste à
se référer à l’hypothèse de rationalité des agents : il existe des bulles « rationnelles » et des bulles
« irrationnelles ».
2-1-Bulles rationnelles:
2-1-1-Définition:
Des bulles peuvent apparaître sur les marchés financiers même si les agents ont un
comportement rationnel. Ces bulles se forment alors en raison de l’indétermination des prix qui
peut résulter des anticipations rationnelles. En effet, le prix d’un actif pend des anticipations
que forment les opérateurs sur son niveau futur. Pour comprendre intuitivement le phénomène de
bulle rationnelle, on peut considérer que les opérateurs sont disposés à acheter un actif à un prix
supérieur à sa valeur fondamentale dès lors qu’ils s’attendent à pouvoir le revendre plus cher
dans le futur.
1 / 18 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans l'interface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer l'interface utilisateur de StudyLib ? N'hésitez pas à envoyer vos suggestions. C'est très important pour nous!