macbeth - Le Théâtre du Soleil

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Date : 01/04/2014
Pays : FRANCE
Page(s) : 17
Diffusion : (76300)
Périodicité : Mensuel
Surface : 23 %
GROSPLAN
DU SOLEIL
DEWILLIAMSHAKESPEARE
I TRADUITET
MACBETH
majeur: la nouvelle
création du Théâtre du Soleil
commence en avril. La troupe
s'attaque
à Macbeth
de
Shakespeare.
Après la formidable épopée Les Naufragés du
Fol Espoir, qui a connu une vaste tournée dans
le monde entier, après avoir achevé son adap
tation cinématographique, qui sort en DVD
ArianeMnouehklnependantles répétitionsde
Macbeth.
et sera diffusée dans les mois qui viennent
sur ARTEet France 3, après avoir accueilli et
accompagné diverses aventures théâtrales
dont celle de L'Histoire terrible mois inachevée
de Norodom Sihanouk, roi de Cambodge de
Hélène Cixous, et celle du Théâtre Aftaab avec
(1/1) THEATRE DU SOLEIL
PARARIANEMNOUCHKINE
La Rondede Nuit, leThéâtre du Soleil présente
sa nouvelle création, la tragédie de Mocbeth.
Une création qui marque les cinquante ans de
la société coopérative ouvrière de production
"Théâtre du Soleil" fondée le 29 mai 1964. Une
le génie shakespearien interroge
création
une terrifiante figure du pouvoir, et en cela
résonne comme une alerte. Pressé par Lady
Macbeth, Macbeth répand le sang du vieux
Roi Duncan, et cet assassinat inaugure une
série de meurtres arbitraires.
LE
EST
UNCOMBAT
Duvaillant soldat au tyran sanguinaire, de la
volonté claire à la pulsion inavouable, de la
raison à la folie, de la soif de pouvoir aux tour
ments de la culpabilité : Shakespeare explore
dans son
les méandres de l'esprit
humain et l'exercice de son action. LeThéâtre
du Soleil invite à une plongée théâtrale dans
la jungie mentale d'un homme «qui se méfie
de la pensée, qui invoque et défie les forces les
plus dangereuses ». « En montant Macbeth, il
ne s'agit pas de faire un constat apocalyptique
passif. Le dévoilement est déjà un combat, il
nous faudra la patience, la force, l'humilité, le
courage de chercher, de comprendre, de mettre
te mal sur le théâtre, en musique, en rythme,
en spectacle. Il faudra ouvrir le personnoge
aux spectateurs comme on dissèque un pois
son pourri...» Le théâtre d'Ariane Mnouchkine
s'adresse profondément à nous tous !
Agnès Santi
Théâtredu Soleil,Cartoucherie,routedu
Champ-de
75012Paris.
partirdu 23 avril, mercredi,jeudi etvendred
à 19h30,samedienmatinéeet à 19h30,
dimancheà 13h30.Tél.0143 74 24 08.
«
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Date : 11/04/2014
Pays : FRANCE
Surface : 111 %
Mots : 750
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Pleins Feux sur le Théâtre du Soleil
un lieu de théâtre et de création inédit. Un lieu
aussi. De rencontres,
Un lieu retiré
dans
merveilleux de la Cartoucherie de Vincennes. Un lieu de pensée qui réfléchit le monde au présent, Un
lieu magique
le public se presse à chaque nouveau spectacle. Le Théâtre du Soleil,
et dirigé
magistralement par Ariane Mnouchkine, aura 50 ans le 29 mai prochain. Un anniversaire qui vient célébrer des
années
activité artistique engagée, exigeante et sans cesse renouvelée. Des années de travail collectif
chaque artiste se vit comme
grand tout, une des pierres essentielles à
théâtral qui se
construit de spectacle en spectacle. Bruno Tackels vient
un essai remarquable à leur sujet: "Ariane
Mnouchkine et le Théâtre du Soleil", dans la lignée de ses écrits sur les Ecrivains de plateau (édités aux Solitaires
Intempestifs). Après Romeo Castelluci, François Tanguy, Anatoli Vassiliev, Rodrigo Garcia et Pippo Delbono,
au tour de la célèbre troupe
dans la ronde des territoires
du philosophe et critique
dramatique aguerri. Le livre est passionnant et rend hommage, dans tous ses aspects, à
Mnouchkine réalise jour après jour à la Cartoucherie. Extrêmement documenté, instruit, et nourri de
par
un suivi de longues années et une immersion au sein du travail quotidien de la troupe au moment du tournage du
film "Les Naufragés du Fol Espoir", il est un témoignage radieux sur le fonctionnement de ce théâtre pas comme
les autres, ses engagements politiques, ses inspirations artistiques et sociales, les personnalités qui le composent,
notamment
Hélène Cixous et le musicien Jean-Jacques Lemêtre, et évidemment, celle, initiatrice et
rayonnante,
Mnouchkine elle-même. 50 ans donc que la Société coopérative ouvrière de production
"Théâtre du Soleil" aura été fondée en mai prochain. Et une actualité qui ne tarit pas, qui déborde même. Dans la
tradition de la troupe, des festivités sont à prévoir cet été. Banquets et bals au programme pour fêter dans la joie
ces cinquante années passées mais
les cinquante à venir! Egalement au menu, la sortie DVD du film "Les
Naufragés du Fol Espoir", une version cinématographique créée à partir du spectacle du même titre. Et puis, pour
prolonger les liens entre le Théâtre du Soleil et le 7 ème art, le film "1789" devrait ressortir sur les écrans de
cinéma à
entièrement restauré. Que de bonnes nouvelles! Du côté des planches, on attend avec
enfant attendant Noël la nouvelle création de la troupequi, après plusieurs spectacles réalisés en
écriture collective, revient aux grands textes qui font la moelle épinière du théâtre, à savoir le maudit "Macbeth"
de Shakespeare. Une pièce monstre, pleine de sang et de fureur, de folie et de culpabilité. Un monument de la
littérature dramatique, miroir des trous noirs de
reflet des ignominies auxquelles peut pousser la soif
de pouvoir. Une
fascinante et pleine de mystères. Une
extravagante. Et pour reprendre les mots du
Soleil à
de son fidèle public: «Mesdames et Messieurs, cher Public (Roulements de tambour). Venez
voir un polar au rythme haletant. Une plongée dans la jungle mentale
homme bien plus féroce que les bêtes
sauvages (Roulements de tambour). Un homme qui se méfie de la pensée, qui invoque et défie les forces les plus
dangereuses (Roulements de tambour). Et dont la convoitise et la goinfrerie maléfiques troublent et souillent
sacré de la nature.» Quant à ce
dit Ariane Mnouchkine,dont
est toujours,
certaine manière, militant : «En montant Macbeth, il ne
pas de faire un constat apocalyptique passif. Le
dévoilement est déjà un combat, il nous faudra la patience, la force,
le courage de chercher, de
comprendre, de mettre le mal sur le théâtre, en musique, en rythme, en spectacle. Il faudra ouvrir le personnage
aux spectateurs comme on dissèque un poisson pourri... Comme quand Molière monte Tartuffe, il écrit Tartuffe
pour que cela ne soit plus, et
effectivement, je crois, dans cette pièce
va le plus loin dans sa réflexion
sur le mal. Montrer les choses,
déjà les changer. Les cacher,
refuser de les voir changer.» Il
a rien à
ajouter, juste à se précipiter pour
prendre plein les yeux et les oreilles, et en sortir bouleversé, changé,
heureux. Par Marie Plantin "Macbeth",
à partir du 30 avril au Théâtre du Soleil (Cartoucherie de Vincennes)
>> En savoir plus sur le spectacle Macbeth
(1/1) THEATRE DU SOLEIL
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Date : 07/05/2014
Pays : FRANCE
Suppl. : Figaro Scope
Page(s) : 26
Rubrique : THEATRE
Diffusion : 317209
Périodicité : Quotidien
Surface : 91 %
PARARMELLE
LECHOIX DE
BENJAMIN MILLEPIED
[email protected]
Macbeth
(ici, lors
desrépétitions),
auThéâtre
duSoleil.
BENJAMIN
MILLEPIED EST
LA RENCONTRE
MNOUCHKINE
EN PLEINES
DU « MACBETH »
DE SHAKESPEARE
A TRADUIT ET
TROUPE
NOMBREUSE JOUE.
(1/1) THEATRE DU SOLEIL
Avec son allure
silhouette déliée
et vêtements sport, le chorégraphe et danseur, futur directeur du Ballet de
de
Paris, pourrait être
des membres de la
troupe du Soleil !
Tandis
Ariane Mnouchkine
dirige une répétition,
Charles-Henri
Bradier, codirecteur, fait les honneurs du lieu :
visite du grand atelier
travaille sur
certains éléments du décor. Ici, chacun
participe à
de la création du
spectacle et les comédiens qui ne sont pas
sur le plateau fignolent des peintures, poncent des pièces. Là-haut, on se glisse dans
la caverne aux mille trésors du musicien
Jean-Jacques Lemêtre. Des instruments de
musique venus des quatre coins du monde
côtoient ceux que lui-même
a inventés.
et beaux objets dont Benjamin
Millepied fait sonner délicatement les cordes, ébahi comme un enfant devant un
coffre de joujoux.
On redescend pour
aller de
côté du Théâtre de la Tempête. Là est la salle de répétition. Ariane aime
la prêter à de jeunes troupes : en ce moment,
Chantal Melior et le Théâtre du Voyageur qui préparent Les Nomades et Ignatius .
Là aussi est
maître de
du
masque, Erhard Stieffel. Souriant, il accueille le visiteur émerveillé. Les chats roupillent et les assistants sont concentrés sur
leurs travaux. Ici, on met aussi au point certains éléments qui viendront compléter le
décor de Macbeth.
Déjà, il est 12 h 30. « table ! » Sur la pelouse, de nouvelles tables viennent
installées. Chacun va se servir, dans la salle à
manger couverte, près des cuisines récemment refaites. Salade de tomates et
mollet, puis pâtes aux courgettes ou aux lardons.
Ariane est là, souriante et généreuse. Elle interroge Benjamin Millepied, qui expose ses
projets pour le Ballet. Tout importe à son
e ciel légèrement couvert de ce lun: des planchers trop durs à la restauradi de Pâques se déchire doucement
tion. En Ariane Mnouchkine, il voit aussi la
sous les rayons chauds. Les pâquechorégraphe, celle qui sait animer les grourettes constellent
drue et les lilas
pes, imaginer des mouvements très expressont en fleurs. Un paradis au milieu du bois,
sifs, aussi importants que les mots dans ses
à deux pas du château de Vincenspectacles. Elle
immédiatement
nes. Le vaste enclos de la Cartoututoyé : il est de sa famille.
e
cherie ((XII ) semble déserté en ce
Après le dessert écossais que
jour férié.
pourtant,
teste ce jour-là, Macbethh oblige, a
DU
SOLEIL
dans le manège, les chevaux sont
lieu la cérémonie de Pâques : les
RouteduChamp-deau travail. Et au loin, sur la droite,
cloches sont passées et les enfants
(XIIe )
on aperçoit du monde qui
partent à la recherche des chocolats.
:
devant les bâtiments du Théâtre du 0143 74 24 08
Mais déjà il est
de reprendre
HORAIRES
:
Soleil.
la répétition et Benjamin Millepied
Ce jour-là, Benjamin Millepied a 19 h 30 ou15 h 30
se glisse dans la grande salle, imDATES
:
rendez-vous avec une artiste
patient de découvrir les beautés
juillet,
admire, dont il connaît certains
sauvages de ce Shakespeare joué
puis cetautomne
spectacles, mais
encore
PLACES
:
par quarante-huit comédiens. Mais
de15 à 29
jamais rencontrée.
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Date : 12/05/2014
Pays : FRANCE
Page(s) : 22
Rubrique : Culture ET Savoirs
Diffusion : 40558
Périodicité : Quotidien
Surface : 40 %
Culture & Savoirs
Mnouchkine
fait
les
Macbeth
sortir
du
bois
Le Théâtre du Soleil revient à Shakespeare en faisant
exploser la modernité de la tragédie de
L
(1/2) THEATRE DU SOLEIL
a nouveauté
du Macbeth
tyanandan jusque dans son style de
Mnouchkine, ce
petite brune qui
pas froid aux
pas le texte
a traduit,
yeux.
la façon de
Ce couple moderne
des métaphores clés de la pièce est
de tout
de la modernité des
dans la prédiction qui rassure
complots : les exécuteurs de Banquo,
sassin du roi Duncan : rien ne peut
le supposé rival de Macbeth, ont tout
le menacer tant que la fameuse forêt
des
gominés ; on passe sans
de Birnam ne se mettra pas en
transition
à des conciliabules
marche vers la colline de Dunsinane.
à costards
Mnouchkine
fait, elle, « sortir du
sombres. « Pour tromper
bois » les Macbeth de son temps
ressembler à
»:
bien
a débusqués et qui forment
du Shakespeare, même si cela vous
un tableau du mal. Sareprésentation
a un air de recommandation
est à elle seule un scénario de ce qui
stage de managers ! Et, mieux en: la dictature, les diccore, les libérateurs de la tytatures, et la résistance,
rannie de Macbeth qui
les résistances, qui
partent
« ATTENTION !
les affrontent.
Le
rappellent les libéLE MAL ESTSANS
félon Macbeth est un
rateurs
autre
VOUS
chef militaire victo?»
tyrannie partis de
CIXOUS,
rieux et qui, fort de
Londres. Dans la disMACBETH,
ses lauriers, se livre
trib uti o n, par
DANS LA TRADUCTION
à un coup
groupes, apparaisDans le meurtre du
sent les milices et les
MNOUCHKINE.
roi, il y a
Hélène
du pouvoir légal et la traCixous conclut sa préface
hison de celui qui a exalté sa
par un avertissement : « Atgloire. Serge Nicolaï épouse toutes
tention ! Le mal est sans arrêt. Vous
les facettes,
ou minables,
êtes prévenus ? »
des abonnés aux putschs.
Avec cette tragédie, « comme elle
Les Macbeth sont deux. Et la méest actuellement jouée au Théâtre du
taphore prend une nouvelle dimenSoleil », sa directrice
donne
sion : la folle ambition de
littéralement à
joie. La « folie »
réchauffée par une prophétie de
de la mise en scène qui présidait à
sorcières, qui
que sa voix inses Naufragés du fol espoir , qui
térieure, tantôt livrée à elle-même,
autre que
fracassée
tantôt apeurée et hésitante, ne suffit
sur la guerre de 14-18, rebondit dans
pas. Avec Lady Macbeth entre en
le fracas de Macbeth : courses effréscène
détermination
nées, changements de décors à vue,
qui va «
bout », le fameux
musique cosmique, grand collectif
« froid calcul de
égoïste » .
et de jeunes.
CHARLES SILVESTRE
Cette Lady perd sa noblesse pour
devenir une arriviste aux dents longues que joue à fond Nirupama NiRéservations: 01 43 74 88 50.
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Date : 12/05/2014
Pays : FRANCE
Surface : 253 %
Mots : 1705
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Au Théâtre du Soleil, le crime de Macbeth défigure le
monde
Shakespeare, avec son monstre qui s'accomplit dans le régicide et l'infanticide, nous parle à
quatre siècles de distance. Ariane Mnouchkine et sa troupe en font l'ensorcelante
démonstration.
Macbeth développe l'histoire d'un premier crime. Un premier crime, tel un premier amour, pourrait permettre
d'ensuite passer à autre chose. Or dans la pièce de Shakespeare, le premier crime devient crime premier, crime
princeps, crime jamais révolu : il hante le meurtrier, s'avère phénomène addictif, provoque le tohu-bohu.Nous
sommes dans une
plongée en un temps maléfique. Macbeth, militaire victorieux, tombe sur trois sorcières
surgies des bruyères. Leur prophétie performative ( « tu seras roi » ) le font glisser du champ de bataille au
carnage ciblé ; pouvoir oblige. Il trucide d'abord Duncan, le bon monarque, puis, dans une théorie des dominos
humains, le général Banquo, avant que de réduire à néant la famille du noble Macduff. Le sang appelle le sang.
Seul l'égorgement de l'égorgeur rétablira l'ordre.Macbeth est saisi d'hallucinations - son sceptre ne va pas sans
spectre. Ce néosouverain assassin s'en tient à une aberration soufflée par le trio des pythonisses de la lande : rien à
craindre tant que la forêt de Birnam, qui fait face à sa forteresse, ne se met pas en marche. A-t-on jamais vu des
arbres avancer ? Le potentat délirant s'accroche au bon sens - dont il est toutefois dépourvu. La fin est courue
d'avance : pour liquider Macbeth, l'armée vengeresse progresse camouflée par des branchages de ladite forêt, qui
se révèle ainsi mouvante...Une telle pièce semblait écrite pour le Théâtre du Soleil d'Ariane Mnouchkine, toujours
aussi mobile et mobilisé cinquante ans exactement après sa fondation : la troupe, une quarantaine de comédiens
incandescents autour du pilier Maurice Durozier, change de décor comme le monde court à sa perte. Au cours de
la représentation, grâce à l'habileté ondoyante des "serviteurs de scène" qui surgissent puis disparaissent,
surviennent quelque vingt-cinq tableaux, aménagés sous nos yeux à raison d'éléments épars glissant sur le plateau,
comme autant de forêts de Birnam en mouvement !Le spectacle ne se contente pas d'être ainsi raccord avec tout ce
qui chaloupe chez Shakespeare. L' ostinato déployé par le musicien maison, Jean-Jacques Lemêtre - il officie
parmi son méli-mélo d'instruments avec des allures de Gaston Bachelard bouddhiste -, scande la morale et l'action
de Macbeth : ça ne se passera pas comme ça...Renonçant aux excellentes adaptations disponibles - d'Yves
Bonnefoy à Jean-Michel Déprats -, Ariane Mnouchkine a voulu que Macbeth se jouât dans une version qui
sienne. Chercher Shakespeare au fond de son anglais, c'est déjà mettre la parole en acte. C'est donner corps, en
une forme de troc vital entre les planches à venir et les mots jadis couchés : « Un corps verbal ne se laisse pas
traduire ou transposer dans une autre langue. Il est cela même que la traduction laisse tomber. Laisser tomber le
corps, telle est même l'énergie essentielle de la traduction. » (Jacques Derrida :
et la différence ,
1967).De quoi ce Macbeth s'est-il énergiquement défait ? De la mesquinerie protestante des Grands-Bretons, qui
convie à forcément "chercher la femme" derrière le meurtre. Des sorcières à Lady Macbeth, le fluide pernicieux à
sous tout cotillon sembla longtemps imprimer la cadence tragique, insuffler le
du sang, pousser au
crime. Rendu maladivement ambitieux par les sornettes des trois foldingues de la steppe écossaise, Macbeth
apparaissait ensuite voué au régicide par son hystérique d'épouse, qui ne recule devant aucun chantage à la virilité,
s'en prenant, verbalement, au « mighty member » du félon hésitant.Pas si simple, ni mécanique, ni réducteur. Lady
Macbeth manipule autant qu'elle épaule. Le couple, qui dérive et transgresse, s'attache à coréaliser une
herméneutique folle, cruelle, érotique mais scrupuleuse de l'oracle initial à débroussailler. La divination des
sorcières enclenche plus qu'elle ne déclenche, du fait d'un terreau psychique. Nous passons de la parole décochée,
à la façon dont la réception d'un message travaille deux êtres, jusqu'à les labourer de fureurs
intérieures.L'éclatement de ce couple possédé par des « substances invisibles » sanctionne les ténèbres qui
turbinent tout au long de la pièce, jusqu'à encadrer d'une grammaire puissante et subtile sa représentation, partagée
entre des clartés parcimonieuses et l'opacité à perpétuité. De bout en bout, les rares remords du
(1/3) THEATRE DU SOLEIL
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tourmenteur-tourmenté Macbeth manifestent qu'au plus profond de la violence jusqu'au-boutiste, le fil n'est jamais
rompu avec l'humanisme d'un Shakespeare lecteur de Montaigne et de son célèbre : « Chaque homme porte la
forme entière de l'humaine condition. »Du local des îles Britanniques au global cosmiqueAriane Mnouchkine et sa
troupe reprennent à leur compte le projet shakespearien, qui s'adressait aux illettrés comme aux initiés - en
témoigne un remarquable brassage générationnel, social et culturel au sein du public. Le grand Will inscrivait son
théâtre dans son époque, tout en le désincarcérant des déterminismes, des cachots identitaires et des
mentales.
sa dimension universelle. Le Théâtre du Soleil jongle avec de telles données.Macbeth scrute la
stérilité d'un couple meurtrier, qui supprime à tour de bras les lignées rivales. Voilà qui apparaît vertigineux au
possible, dans la mesure
cette tragédie fut représentée, en 1606, devant Jacques I er . Celui-ci venait de
succéder à la « Reine vierge »- donc sans postérité - Elizabeth I re , qui avait fait tuer Marie Stuart : la propre
mère de Jacques I er ! Jacques I er , roi
avant de régner sur l'Angleterre, était censé descendre de
Banquo, le général assassiné de la pièce dont le fantôme vient hanter Macbeth. Pouvait-on imaginer, sur place, en
1606, plus ahurissante mise en abîme du pouvoir ?Le génie de Shakespeare consiste à coulisser du local des îles
Britanniques au global cosmique. Le meurtre engendre un désordre politique mais également écologique. Le jour
ne se lève plus, le climat se dérègle et les chevaux consomment du cheval, en une sorte d'hiver nucléaire avant la
lettre. Une obsession du démiurgique Shakespeare, ainsi qu'en témoigne le début de Richard III : « Now is the
winter of our discontent. »Ariane Mnouchkine reprend à son compte un tel chaos annoncé, avec une finesse
inversement proportionnelle au désastre en cours : la bande-son de Jean-Jacques Lemêtre égrène des chants
d'oiseaux, à mesure que Shakespeare sème dans son textes les indices ornithologiques (du corbeau à l'hirondelle,
en passant par le hibou, le poussin, le vautour et même la chauve-souris !), comme autant d'intersignes de la
tragédie qui s'impose.Ce mystère crypté des oiseaux dans Macbeth renvoie à une énigme littéraire : le théâtre de
Shakespeare, loin des références limitées propres à l'Angleterre bigote et isolée d'alors, regorge de renvois à la
culture juive (faut-il y déceler l'influence, voire davantage, de John Florio ?). Sur la scène, dans le bois de
Vincennes, lorsqu'un marmouset menacé de prédation déclare « comme les oiseaux vivent, Maman » , on envisage
ce passage de la Bible ( Deutéronome , 22, 6 et 7) ayant donné lieu à moult commentaires talmudiques : « Si tu
rencontres en ton chemin un nid d'oiseaux sur quelque arbre ou à terre, de jeunes oiseaux ou des
sur lesquels
soit posée la mère, tu ne prendras pas la mère avec sa couvée : tu es tenu de laisser envoler la mère, sauf à
t'emparer des petits ; de la sorte, tu seras heureux et tu verras se prolonger tes jours. »(Traduction Jacques
Kohn)L'ultracontemporain n'est cependant jamais loin : l'excellent Serge Nicolaï, qui campe un Macbeth aux tics
révélateurs et aux tressaillements d'épaules assez symptomatiques, offre à se soudain figurer tel ancien président
de la République française, illégitime et imposteur à sa - brutale - façon... Durant plus de trois heures, si le
magnétisme du marasme et la diffusion de l'épouvante connaissent de rares et minimes fléchissements, la foudre
du siècle élisabéthain s'abat fermement sur le bel aujourd'hui. Et la farce, dont est farcie l'horreur, fait mouche à
chaque fois : fabuleuse Eve Doe-Bruce, dans le rôle du portier aux fulminements cocasses !Le halo médiatique
omniprésent - flopée de micros et caméras - s'impose en prisme post-moderne. Les hélicoptères des maîtres de ce
monde exténué vrombissent à maintes reprises. L'ordinateur portable a remplacé le chaudron des sorcières pour
que s'exhibe l'avenir. C'est magnifique, fantastique et apocalyptique ! Les accents variés de la troupe font sens et
restituent à merveille le souffle de l'épopée monstrueuse. Enfin l'ensemble des costumes nous aspirent sans relâche
dans une farandole de signes : uniformes balkaniques ou de l'armée tsariste vers 1914, à moins qu'il ne s'agisse
des chamarrures de
du Négus Haïlé Sélassié. Mais déjà débouchent des miliciens, surgissent des
partisans et se profilent des forces spéciales dignes du RAID ou desSpetsnaz .Comment s'étonner de tels
télescopages ? Macbeth n'a-t-il pas été composé pour nous avertir que l'homme se saurait être un territoire à
gagner ? Sinon, attenter à la vie d'autrui suivrait la logique des constitutions de "glacis" : le crime entraînerait le
crime, de même qu'une annexion en implique une suivante. Ne sont en cause ni « visions fatales » ni « sorcellerie
» , mais le passage à l'acte, ennemi des forces de l'esprit. Tel un appel nécrophile et scélérat, qui roule d'âge en
âge : « bas l'intelligence et vive la mort ! » Oyez, dit Shakespeare et donne à entendre Mnouchkine, comment,
au contraire du théâtre, l'iniquité, l'usurpation et la tyrannie se défient de toute réflexion, du moindre verbe, de la
plus petite mise à distance : « Les mots souffrent le froid sur l'ardeur de l'action. »Macbeth , de William
Shakespeare, dans une nouvelle traduction de la metteuse en scène, Ariane Mnouchkine (coédition Théâtre du
théâtrales). Avec :Serge Nicolaï (Macbeth), Nirupama Nityanandan (Lady Macbeth), Maurice
(2/3) THEATRE DU SOLEIL
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Date : 12/05/2014
Pays : FRANCE
Surface : 253 %
Mots : 1705
Durozier (Duncan et Ross), Juliana Carneiro da Cunha , Eve Doe-Bruce , Duccio Bellugi-Vannuccini , Vincent
Mangado , Sébastien Brottet-Michel , Shaghayegh Beheshti , Astrid Grant , Seietsu Onochi et toute la troupe du
Théâtre du Soleil.Mercredi, jeudi et vendredi à 19 h 30, samedi à 13 h 30 et 19 h 30, dimanche à 13 h 30. Prix des
places: individuels 29 euro; collectivités 24 euro; étudiants et scolaires 15 euro. Cartoucherie de Vincennes, route
du
M° Château-de-Vincennes, puis navette. Tél.: 01-43-74-24-08. Theatre-du-soleil.fr.
Durée: 3 h 50.
(3/3) THEATRE DU SOLEIL
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Date : 13/05/2014
Pays : FRANCE
Page(s) : 1-18
Rubrique : Culture
Diffusion : 94880
Périodicité : Quotidien
Surface : 74 %
THEATRE
Le « Macbeth »
d'Ariane
Mnouchkine,
plein de désir
et de fureur p.is
Macbeth,pleinde désiret defureur
) Revenant à Shakespeare,
Ariane Mnouchkine et la troupe
du Soleil racontent la grande saga
du pouvoir, de la folie et de la mort.
) Dans un décor en perpétuelle
métamorphose ,
40 comédiens déploient le livre
du théâtre et du monde.
MACBETH
de Shakespeare
Théâtre du Soleil, Cartoucherie de Vincennes
Ceux qui l'ont vu s'en souviennent
encore. C'était en 1982, à Avignon.
Dans la cour d'honneur du palais des
Papes, Ariane Mnouchkine et le Théâtre
du Soleil enchantaient le festival avec
les deux premières pièces de leur cycle
consacré à Shakespeare : La Nuit des
rois et Richard H. Sur fond d'immenses
rideaux de soie chatoyante
se dé
ployant et tombant du haut mur de la
cour, tout n'était que grâce, éblouissement. Rythmée parles cavalcades des
acteurs aux costumes chamarrés et
ombrelles délicates, la grande histoire
du monde se fondait dans l'Orient,
dans le mouvement inspiré des codes
du kabuki.
C'est à ce même Shakespeare que,
trente-deux ans après, célébrant leurs
cinquante
ans d'existence,
Ariane
Mnouchkine et le Soleil se confrontent
de nouveau, avec Macbeth. Fi des ré
miniscences orientales, d'Inde et du
Japon. La tragédie du général glorieux,
usurpateur du trône d'Ecosse, meur
trier de son roi pour avoir écouté trois
sorcières, hanté parles fantômes de ses
victimes, avant de périr en une ultime
bataille, est, ici, résolument conjuguée
au mode du présent.
Un présent a priori souriant, lorsque,
accueilli sur le pas de la porte par Ariane
Mnouchkine, on pénètre dans le vaste
hall au bar de vieille brasserie, propo
(1/2) THEATRE DU SOLEIL
sant, comme il se doit, saumon d'Ecosse,
« witches heer » (bière sorcière), gâteau
anglais... Aux murs sont peintes des
du portrait du « grand
reproductions
Will » et d'affiches modernes ou kitsch
des mises en scène de sa tragédie à tra
vers le monde (France, Angleterre, Rus
sie, Cambodge, Japon...), au XIXesiècle
comme au XXe.
Cependant, à peine s'installe-t-on
dans la grande salle que ce présent se
révèle très vite plus sombre, plus noir
de sang, de crime, de guerre et de chaos,
quand les rênes du désir se lâchent ;
quand seules comptent la soif du pou
voir et la manière, sinon l'art, de le gar
der; quand triomphent les forces se
crètes du Mal et la Mort. Quand toute
règle, toute morale sont abolies. Le dis
cours est terrifiant. Au bout des quatre
heures que dure le spectacle (entracte
compris), on ressort ébloui.
Cette fois encore, Ariane Mnouchkine
se révèle prodigieuse conteuse. Sans
rien perdre de son propos, elle mène,
en un balancement permanent, du rire
à la frayeur, du grave au poétique, ré
veillant toutes les émotions enfouies au
plus profond de chacun, jusqu'à provoquer
son
ébahissement.
Or
donnée
en
un incessant
ballet
de
ch a nge menls de décors, sa mise en scène
conduit, sans coup férir, à travers tout
l'univers, d'un lieu à un autre, comme
le ferait un livre d'images aux pages
toujours inattendues. Ici, c'est un tertre
de bruyère pour sabbat de sorcières, qui
se découvre QG d'opérations militaire.
Là, c'est, succédant à un paysage de
lande morte, un vaste jardin de roses
qui surgit, espace
de paix pour
Page 1
« gentry » évoquant la vieille Angleterre,
avant de se réduire à un repaire propice
au complot.
Les images ne sont pas seulement
belles. Elles sont fortes, en correspon
dance parfaite avec les scènes, toutes
traitées en de véritables épisodes de
saga : massacre de la famille de Macduff,
opposant à Macbeth; rencontre dans
un restaurant au bord de la Tamise, entre
ce même Macduff et l'héritier légitime
du trône d'Ecosse; meurtre nocturne
avec cadavre jeté dans une mer faite de
draps noirs ondulants, plus vraie que
la vraie; irruption des sorcières dans
une grande salle de réception, faisant
voler la vaisselle dans les airs... sans la
toucher, puis invitant Macbeth à décou
vrir un dernier oracle par voie d'ordi
nateur; «forêt de Birman » qui « se met
en marche », dans un étrange climat de
fraîcheur, avec petit oiseau chantant.
Ponctuée des accords en direct de JeanJacques Lemêtre, cette suite de scènes
sans fin, à jamais gravée dans les mé
moires.
Servis par la traduction vivante et
dense d'Hélène Cixous (1), les comé
diens se dépensent
sans compter. Si
certains n'ont encore trouvé une totale
liberté (il faut laisser le temps au temps),
d'autres sont d'ores et déjà formidables:
Maurice Durozier (le roi Duncan), Duccio Bellugi-Vannuccini (l'héritier légi
time), Vincent Mangado (Banquo)...,
tous rompus aux jeux du Soleil. De
même que Nirupama Nityanandan,
saisissante Lady Macbeth aussi maî
tresse d'elle-même dans l'élaboration
du crime que fragile et bouleversante à
l'heure de sa mort, dans son bain, minée
par le remords.
Face à elle, Serge Nicolaï est Macbeth.
Incertain dans les premières minutes
du spectacle, il s'affirme peu à peu,
jusqu'à sombrer dans la folie. Soldat
mal déerossi, embourgeoisé (il faut le
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Date : 13/05/2014
Pays : FRANCE
Page(s) : 1-18
Rubrique : Culture
Diffusion : 94880
Périodicité : Quotidien
Surface : 74 %
voir affalé dans son fauteuil, regardant
un match de sumo à la télévision !), il
est l'homme dépassé par son destin,
habillé de vêtements trop grands pour
lui. En une réplique célèbre, il lâche :
« La vien'est qu'une ombre en marche,
un pauvre acteur/qui, sur scène, se pa
vane et se ronge pendant une heure/et
puis qu'on n'entend plus. C'est une his
toire contée par un idiot, pleine de bruit
et defureur/et ne signifiant rien. »
DIDIER
Représentations du mercredi au vendredi à 19 h 30,
le samedi à 13 h 30 et à 19 h 30 et le dimanche à
13h 30. Jusqu'au 13juillet.
RENS.: 01.43.74.24.08. www.theatre-du-soleil.fr
[1)
Théâtre du Soleil-Théâtrales.140 p. 9 C.
REPERES
CINQUANTE ANS DE THEATRE DUSOLEIL
EN DATES
* 1964: fondation du Théâtre du Soleil,
« coopérative ouvrière », par Ariane Mnouchkine
et des membres de l'Association théâtrale
des étudiants de Paris (Atep) de la Sorbonne.
* 1970: installation à la Cartoucherie
de Vincennes. Création de 1789.
* 1978: réalisation du film Molière, présenté
en sélection officielle au Festival de Cannes.
* 1981-1983 : cycle des Shakespeare.
* 1985 : L'Histoire terrible mais inachevée
de Norodom Sihanouk, roi du Cambodge.
* 1990-1993: cycle des Atrides.
* 1995: Tartuffe, de Molière
* 1999 : Tambours sur la digue.
* 2004; Le Dernier Caravansérail.
* 2007: Les
* 2010; Les Naufragés du fol espoir.
* 2014: Macbeth, de Shakespeare.
Macbeth, mis en scène par Ariane Mnouchkine, est actuellement joué au Théâtre du Soleil dans un décor contemporain.
(2/2) THEATRE DU SOLEIL
Page 2
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Date : 14/05/2014
Pays : FRANCE
Page(s) : 72-73
Rubrique : Le rendez-vous
Diffusion : 642647
Périodicité : Hebdomadaire
Surface : 122 %
MACBETH
WILLIAM SHAKESPEARE
m
Pour le cinquantième anniversaire du
Théâtre du Soleil, Ariane Mnouchkine
a étrangement choisi de monter Mac
beth, de Shakespeare, la tragédie du
mal absolu. Cellequi depuis le 29 mai
1964défend avecsa troupe un théâtre
épique, historique, capable de réen
chanter le monde en donnant aupublic
l'énergie, l'émerveillementnécessaires
pour mieux le penser, l'affronter, s'est
donc immergée en enfer depuis des
mois. Sansdoute parce qu'à 75ans lagé
néreuse et indomptable patronne du
Soleil ne cesse de vouloir comprendre
les cancers qui rongent nos sociétés,ce
qu'il y a derrière les ambitions effré
nées de pouvoir, les faimsd'argent insa
tiables. Et si c'était on ne sait quelle
puissance obscure et funeste tapie au
fond de nous ? Shakespeare (1564-1616)
s'en empara comme personne avant lui,
à travers les figures du valeureux Mac
beth et de son élégante lady, plongés
sans jamais y résister dans la spirale
stupéfiante du meurtre et du sang.
Jusqu'à massacrer sans regret vieillard,
femmeset enfants innocents, tous ceux
qui les éloignaient de ce trône promis
un soir par trois sorcières. Jusqu'à dé
ranger par leurs crimes l'ordre de la vie
même, qui n'estselon Macbeth«qu'une
ombre en marche, un pauvre acteur qui Des séquences
sur scènesepavane et serongependant de touie beauté.
son heure/Et puis qu'on n'entendplus ; Une magie théâtrale
née d'ambiances
c'est une histoire contée par un idiot, miraculeusement
signipleine de bruit et defureur. Et ne
surgies du plateau...
(1/2) THEATRE DU SOLEIL
fiant rien.» Macbethprétend alors tuer
le sommeil, massacrer lapensée. Etfinit
par faire marcher les forêts... Le chaos
que met en scène Shakespeare est si
radical qu'on a longtemps cru que sa
pièce portait malheur, et qu'Ariane
Mnouchkine elle-même l'appelle plus
volontiers «la tragédie écossaise»
qu'elle n'aime à la nommer.
Des jours durant, elle a pourtant tra
vaillé comme à son habitude le texte
maudit, qu'elle a elle-même retraduit.
Ellea fait improviser longuement, tout
en les filmant en vidéo, la quarantaine
de comédiens de tous âges et horizons
qui forment son éclectique et ouverte
compagnie, s'entendent tous les ac
cents du monde. Comme elle le pra
tique désormais, elleles a aussi poussés
à imaginer et fabriquer les espaces, mo
bilier et accessoires de leurs scènes. Ils
les manipulent eux-mêmes à toute vi
tesse en coulisses
ils changent euxmêmes de costumes!)et sur le plateau.
IIfaut tes admirer passant à vue d'un
décor l'autre, dans des chorégraphies
magnifiquementorchestrées : lamagie
du théâtre tient aussi de ces ambiances
miraculeusement surgies du plateau.
Sans doute la scénographie globale de
Macbethy perd en unité de
et d'es
thétique. Première spectatrice de sa
troupe, amoureuse des inventions de
ses comédiens, ArianeMnouchkinen'a
pas toujours assez écourté et sélection
né les scènes. Maisreste l'essentiel, ces
séquences de toute beauté : jardins de
lady Macbeth, moments crépuscu
laires à Londres sortis d'un film noir,
banquet offert par le nouveau roi, fu
rieuses scènes de tempête à renfort
d'immenses soieries...
Page 3
Dansles années 80, Ariane Mnouch
kine avait déjà souhaité se remettre à
l'école de Shakespeare en montant
Richard II, La Nuit des rois et Henry IV.
Après nombre de créations collectives,
depuis l'arrivée à la Cartoucherie de
Vincennes, en 1970,elle voulait mieux
comprendre comment l'éhsabéthain
s'y prenait pour si bien fairethéâtre de
l'histoire de son temps, de son peuple.
Ellequi refuse au théâtre toute espèce
de réalismeavait alors dirigé ces pièces
à la lumière des codes du kabuki japo
nais ou du kathakali indien. C'est de
l'Asie, elle avait entrepris un long
voyage quasi initiatique en 1963, que
lui vient cet art du jeu oriental, fondé
sur les symptômes des passions et des
sentiments plus que sur toute bavarde
psychologie. Le
de la beauté et du
merveilleux aussi.
Trente ans plus tard, la perspective
a changé. DeL'Histoireterriblemais ina
chevée de Norodom Sihanouk, roi du
Cambodge, d'Hélène Cixous (1985),au
travail collectif du Dernier Caravan
sérail (2003)autour des impitoyables
odysséesdes clandestins d'aujourd'hui,
Ariane Mnouchkine et sa troupe ont
montré combien ils savaient prendre le
pouls de notre temps. Macbethest da
vantage une interrogation sur le choix
que certains font du mal. Pourquoil'hé
roïque général célébré par son roi choi
sit-il tour à coup de trucider le mo
narque qu'il a si bien servi? Parce que
des sorcières lui ont annoncé qu'il le
remplacerait ? MaisBanquo, à qui elles
ont prédit une descendance royale, lui,
ne tue pas... Pourquoi certains som
brent-ils, d'autres non? C'est ce mys
tère-là qu'explore Ariane Mnouchkine
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Date : 14/05/2014
Pays : FRANCE
Page(s) : 72-73
Rubrique : Le rendez-vous
Diffusion : 642647
Périodicité : Hebdomadaire
Surface : 122 %
en nombre de scènes traitées en CinémaScope.Unpeucommesitoute sapa
rentèle - lacultureanglaisevenue desa
mère, l'amour du cinéma né du père
producteur - seretrouvaitréunie dans
ce spectacletoujoursmis en farouches
ambiances sonores par le vieux com
plice Jean-Jacques Lemêtre. Autour
d'un Macbeth résolument ordinaire
(SergeNicolaï)et d'une lady Macbeth
insondable (Nirupama Nityanandan)
- coupled'acteurs étonnant - en treillis
militaire ou tenue de soirée, les sé
quences s'enchaînent en une sara
bande maléfique.Unméchant sabbat,
plutôt. Carsi certaines actualisations
- ordinateur utilisépar Macbeth,etc. détonnent, les sorcières, sombres gi
tanes dansantà tout-vasouslahoulette
drôle et terrifiantede JulianaCarneiro
da Cunha,sont, elles, traitées comme
un
antique omniprésent sorti
droit de la tragédiegrecque. Le
ici, c'est-à-dire le peuple, nous, est
donc lui aussi devenu mauvais. Sauf
qu'il émerveille par sa truculence, sa
violence.Commeémerveille la scène
des hallucinations de Macbeth au mi
lieu d'un royaldîner lestablesdes in
vités se mettent magiquement à tour
ner. Alors naît ie théâtre, l'émotion
théâtrale devant un publicsaisi.Quise
met soudain à voir, à rêver, à penser
bien plus que ce qu'il voit réellement
sur leplateau.Etcettemagie-là,Ariane
Mnouchkine nous y entraîne depuis
cinquante ans. - Fabienne Pascaud
[Mise en scène
et traduction
ArianeMnouchkine
|4h| Théâtredu
Soleil,Cartoucherie
de Vlncennes.
Paris12e
|Tél.:0143 742408.
ARIANEMNOUCHKINE
C'ESTUN
«UN
TEMPLE
DELA
«Le théâtre n'est ni une boutique, ni un bureau,
ni une usine. C'est un atelier de rencontre, de partage.
Un temple de la réflexion, de la connaissance,
de la sensibilité. Une maison
l'on doit se sentir bien,
avec de l'eau fraîche si on a soif et quelque chose
à manger si on a faim. Meyerhold disait qu'un théâtre
devait être un véritable "palais des merveilles".
C'est difficile en effet aujourd'hui de venir au théâtre,
c'est fatigant. Il faut donc accueillir les gens et leur
montrer par de petits signes à quel point nous sommes
heureux et fiers qu'ils soient là. Pourquoi y a-t-il tant
de théâtres sinistres? Je ne comprends pas. Pourquoi
a-t-on dépensé tant de millions à construire des
monstres froids? Souvent, lors de notre petite réunion
rituelle quotidienne avec les comédiens, avant
de commencer, nous nous rappelons qu'il y a dans
la salle des spectateurs pour qui c'est la première
représentation de théâtre. D'autres, pour qui
ce sera la dernière. »
(2/2) THEATRE DU SOLEIL
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Date : 16/05/2014
Pays : FRANCE
Surface : 301 %
Mots : 2035
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La troupe du Soleil porte « Macbeth », traduit par Ariane
Mnouchkine
Que l'on vienne au Théâtre du soleil pour la première ou la énième fois, le paysage que l'on découvre derrière la
porte (une grande porte à battants) est magnifique. Le prélude au nouveau spectacle, « Macbeth » de Shakespeare,
ne fait pas exception.Là, passé la porte, on est pris dans des filets magiques, l'ambiance particulière et unique au
monde de cette grande nef de la convivialité
le mot accueil n'est inscrit nulle part mais
il est partout.A
droite en entrant on sait que l'on retrouvera Fanta, alias mama Bintou, l'impératrice du jus de gingembre, à gauche
le coin des livres et les brigades de cuisiniers-serveurs, au centre les grandes tables rondes. A chaque nouvelle
création, la troupe du Soleil renouvelle le dispositif, les tableaux et fresques de la nef, les auteurs de ces
aménagements sont nommés dans le programme au même titre que ceux qui jouent,
aux costumes, aux
sons, aux patines. Jusqu'à « la brigade des assistants », les « brigades alternées du bar », l'homme de « la ronde de
nuit » Azizullah Hamrah et celui qui assure la navette jusqu'au métro Château de Vincennes, Fred Sharre.Le
spectacle « Macbeth » commence à l'heure, le soir à 19h30 (le spectacle est long, un peu trop peut-être) et les
spectateurs viennent très tôt pour s'attarder dans cette enceinte, prologue indispensable à tous les spectacles,
nef-âme que le Soleil aime reconstituer lorsque la troupe se promène à l'étranger. L'aventure n'a pas attendu
d'avoir cinquante ans cette année pour devenir mythique, en France et dans le monde entier.Mais pourquoi ce
retour à Shakespeare et pourquoi « Macbeth » ?Au début des années 80, Ariane Mnouchkine (qui parle
parfaitement l'anglais) avait traduit et mis en scène avec la troupe du Soleil trois pièces de Shakespeare : «
Richard II », « La nuit des rois » et « Henry IV ». Une aventure qui occupera la troupe plus de cinq ans. Avec
comme référents et mode d'approche deux arts, merveilles du lointain : le kabuki et le kathakali. Très jeune, alors
qu'elle faisait déjà du théâtre (universitaire), Ariane Mnouchkine avait effectué un long voyage fondateur en Asie.
L'idée d'associer Shakespeare à ces arts était forte, le résultat m'avait paru à l'époque plus plaqué qu'articulé. «
Macbeth » emprunte d'autres chemins.Ariane Mnouchkine revient cependant à Shakespeare dont elle disait il y a
huit ans « ne plus avoir envie » (« L'art du présent », entretiens avec Fabienne Pascaud, Plon). Mais elle ajoutait «
pour l'instant ». L'instant est donc venu.Ne cherchez pas un texte d'Ariane Mnouchkine expliquant dans un
programme le pourquoi du comment d'un spectacle, ce n'est pas le genre de la maison. Tout au plus laisse-t-elle
Hélène Cixous , son amie et signataire des textes de plusieurs spectacles, encadrer de deux courts textes la
publication de la traduction. Cette dernière est intégrale, et Ariane Mnouchkine a la politesse de griser les partie
de répliques supprimées pour la représentation, les coupes (des métaphores, des périphrases, des commentaires)
allant souvent dans le sens d'un rendu plus direct, plus immédiat.Qui frappe à la porte ?Et tiens, sous la plume de
Cixous, on trouve aussi une histoire de porte. Du jour au lendemain, écrit-elle, Macbeth reçoit un « télégramme du
diable » avec un seul mot : tue. Tue le roi pour devenir roi toi-même. Macbeth accélérant ainsi le destin promis
par les trois sorcières au début de la pièce. Et Cixous de poursuivre :« Un idée horrible vient de frapper à la porte
de sa pensée. Pensée ? Même pas. C'est comme si la peste avait frappé à la porte de son château. Une seconde
d'hésitation. Une seconde ? Même pas. C'est comme s'il avait ouvert la porte avant d'ouvrir. »Sur le plateau les
décors se succèdent avec force détails mais n'y cherchez pas la porte de la chambre
dans le château de
Macbeth, le roi Duncan passe ce qu'il ne sait pas être sa dernière et très courte nuit. La porte est au fond d'un
gouffre. Celui
descendent ou remontent les personnages, une pente au milieu des spectateurs. C'est de là que
revient Macbeth tenant en main des poignards ensanglantés, le forfait accompli.C'est là, sous les gradins du
public, que se trouvent aussi les loges des acteurs, les rangées de costumes que les spectateurs peuvent entrevoir
avant d'entrer dans la salle (autre tradition maison). Cette ambivalence qui va de l'histoire d'un monde à la vie d'un
groupe, cette alliance des contraires et ce jeu des contradictions, c'est ce qui fait le prix et la force de ce « Macbeth
», mais disons le autrement.« Fair is foul, foul is fair »Donc, les trois sorcières ouvrent la pièce. C'est toujours un
enjeu pour les metteurs en scène : comment figurer au théâtre ces êtres immatériels qui ont tôt fait de disparaitre «
dans le brouillard et l'air infect » comme le traduit Mnouchkine. Je vous laisse découvrir la force de la réponse,
mais attardons nous sur la traduction. Avant le brouillard et l'air infect, il lui a fallu traduire six brefs mots que
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Date : 16/05/2014
Pays : FRANCE
Surface : 301 %
Mots : 2035
prononcent ensemble les trois sorcières : « fair is foul, and foul is fair ». Sublime mais pas simple.Jean-Claude
Sallé (Bouquins) propose « Affreux est le beau, et beau est l'affreux ». André Markowicz (Les Solitaires
intempestifs) : « L'impur est pur, le pur-impur ». Jean-Michel Desprats (Pléiade) « Clair est noir, le noir est clair »
Yves Bonnefoy (Folio Classique) « L'immonde est beau, le beau immonde ». Ariane Mnouchkine (Editions
théâtrales), elle, opte pour : « Le beau est immonde, l'immonde est beau ».C'est là, en ces six mots, le résumé de
sa mise en scène. Car dans l'immonde il y a le monde. Le monde entier. Vous et moi, nos amours et nos drames
domestiques, les génocides programmés dans des petits cabinets de rois ou de président, les hégémonies
impérialistes de puissants sous les murs protecteurs de leurs palais, la course effrénée au pouvoir pour le pouvoir
s'arrangeant avec le mensonge et la trahison et réduisant à néant la vision d'un monde meilleur, etc.Treillis,
journalistes et photographesEn actualisant la pièce dans des treillis et des armes du XXe siècle, mais aussi en
montrant des héros entourés d'une nuée de journalistes et photographes qui les coupent du monde réel, cela sans
pour autant restreindre la part d'irréel de la pièce, Mnouchkine ouvre bien des possibles.Mais son art du théâtre est
d'abord concert : le monde c'est d'abord celui des ouvriers de la scène. La troupe, y compris « les stagiaires et
apprentis, attentifs et discrets observateurs du monde entier », les étudiants « tous membres de jeunes troupes de
théâtre universitaire » (c'est par là que tout commença, pour Mnouchkine). Il y en a du monde dans et autour du
spectacle. Au salut, ils sont plus de quarante.La pièce qui est pourtant la plus courte des tragédies de Shakespeare,
s'étire sur environ quatre heures. Pourquoi ?C'est que les scènes immondes de la pièce sont contrebalancées par la
beauté des contre-scènes que sont, non seulement les multiples décors mais d'abord le ballet parfait et délicieux de
leur installation. Comme une cuillère de raïta entre deux bouchées de hot curry, pour mieux apprécier en le
C'est là que le spectacle trouve son point d'équilibre, son rythme, son chant.L'odeur des fleurs fraîchesPrenons un
exemple. Les scènes 5 et 6 de l'acte I, se passe à Inverness, le château de Macbeth. Shakespeare ne donne pas
d'indications plus précises, ce qui laisse une belle latitude à la mise en scène. Dans la scène 5 Lady Macbeth lit
une lettre de son mari
il lui parle des prédictions des trois sorcières, elle prévoit d'organiser le meurtre du roi
qui arrive au château avec sa cour à la scène suivante. Dans la version du Soleil, ces deux scènes se passent dans
une vaste serre avec des grandes tables
sont disposés des bouquets de fleurs fraîches. Les pas du roi gagnant sa
chambre à coucher seront précédés de pétales rouges jetés sous ses pieds. Tout cela est mis en place par une
brigade d'acteurs dans une chorégraphie bien réglée, le contraire d'un simple changement de décor. C'est gai,
apaisant, une accalmie.Comment est née cette idée de la serre ? On peut imaginer que la verrière au-dessus de la
scène (qui fait partie de l'architecture des lieux) n'y est pas pour rien. Tout comme ces mots que Lady Macbeth
adresse à son mari dans la scène :« Ressemblez à la fleur innocente, mais soyez le serpent qui est caché dessous.
»On peut aussi penser que ces fleurs agréablement odorantes dont s'occupe Lady Macbeth sont le prélude à leur
renversement, « l'odeur du sang » dont, deux ou trois actes plus tard elle n'arrivera pas à se défaire, à l'heure du
fameux :« Tous les parfums de l'Arabie n'assainiront pas cette petite main. »Dans le programme du spectacle il est
simplement écrit que « les jardins, serres et forêts sont
de Shaghayegh Beheshti et Maurice Durozier (avec
l'aide des étudiants den Etudes théâtrales de l'Université Paris III) » , soit deux acteurs piliers de la troupe.
Durozier interprète Duncan (entre autres) et Beheshti est l'une des sorcières (mais aussi la journaliste). Les deux
autres sorcières sont également interprétées par des fidèles de la troupe, Juliana Carneiro da Cunha (qui tient aussi
le rôle du docteur) et Nirupama Nityanandan, (qui interprète Lady Macbeth) qui font également partie des «
Poissons-pilotes » assurant « l'aide aux jeunes comédiens » venus du monde entier. Une troupe très internationale
comme toujours.Seul Serge Nicolaï, ne joue qu'un seul rôle, celui de Macbeth, et lui donne une humanité noire,
faisant de ce soldat valeureux devenu meurtrier, un type dépassé par les événements, autant victime que coupable
qui fait penser au Woyzeck de
Mais peut-être l'acteur est-il aussi l'un des « kôkens », l'un de ces «
serviteurs de la scène » qui, couverts de noir de la plante des pieds au cuir chevelu, traversent le spectacle, un
emprunt -et un hommage- au bunraku.Un portier qui l'ouvre avant d'ouvrirOn pourrait citer bien d'autres scènes
(avec landes, bruyère, bunkers, rambardes, etc.) mais revenons à notre porte. Après le meurtre du roi, lady
Macbeth prend les poignards et retourne dans la chambre maquiller le meurtre en essayant de faire porter le
chapeau aux chambellans eux aussi occis. Elle revient les mains ensanglantées, Macbeth effrayé par son forfait
commence à avoir des visions. Ambiance. Alors Shakespeare, en homme de spectacle qui n'oublie jamais le
public, fait venir en scène un personnage qui ne fait pas avancer l'action d'un pouce mais fait souffler les
spectateurs, c'est le portier. On frappe à la porte, mais avant d'aller ouvrir, il prend le temps de nous faire
(2/3) THEATRE DU SOLEIL
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Date : 16/05/2014
Pays : FRANCE
Surface : 301 %
Mots : 2035
rire.Mnouchkine nous offre-là un moment exquis. Elle sait qu'il sera exquis car elle a confié le rôle du portier à
l'une de ses actrices fétiches, la phénoménale togolaise Eve Doe-Bruce. Pour certains spectateurs, par son style, ce
moment fait clignoter le souvenir de « L'âge d'or » (spectacle mythique de la troupe). Et puis on songe à un
épisode de la vie de cette actrice que raconte Bruno Tackels dans le livre qu'il consacre à Ariane Mnouchkine et
au Théâtre du soleil.Cela se passe en
1996, à l' église Saint Bernard , dans le XVIII e arrondissement,
des
sans-papiers ont trouvé refuge. Des gens de théâtre et d'autres campent là, en soutien, dont des acteurs du Soleil
très en pointe dans cette histoire. Tôt un matin, ayant reçu l'ordre d'évacuer l'église du ministre de l'intérieur, des
CRS casqués et armés de haches fracassent la porte (nous y revoilà) au moment
le père Henri Coindé
commence à dire la messe. La voix du prêtre se brise. Alors Eve Doe-Bruce se précipite, prend le micro et
commence à chanter un chant de son pays, de sa voix à faire fondre les
de pierre. « Elle chante et pleure,
sans lâcher », écrit Tackels présent sur les lieux. Sommes-nous loin de ce « Macbeth » ? Non, tout près.Infos
pratiquesSignaler une faute Proposer un lien Proposer un ajout Signaler une faute Proposer un lien Proposer un
ajout
(3/3) THEATRE DU SOLEIL
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Date : 21/05/2014
Pays : FRANCE
Suppl. : Styles
Page(s) : 44
Rubrique : Scènes
Diffusion : 420255
Périodicité : Hebdomadaire
Surface : 53 %
Scènes
Shakespeare
horsdutemps,
avecNirupama
Nityanandan
et Serge
Nicolaï.
DeWilliamShakespeare.
ParArianeMnouchkine.
LaCartoucherie,
Paris(XIIe).
Macbeth
L
(1/1) THEATRE DU SOLEIL
a fabrique du théâtre dans toute son
ampleuret, parfois aussi,danstoute sa
splendeur. Comme aux plus beaux
jours de sacarrière, Ariane Mnouchkine monte Shakespeare; ici Macbeth,
toire
chef
prophétie
annonce roi et qui va tuer pour y parvenir
avant de sombrer dans la folie. Autant de
scènes,autantde décors,comme un magnifique ballet brechtien avec le plateau et les
coulissesracontésdansun mêmeélan.
aussi à ce spectacle(3h40) que
assiste
et il permetde compenserles fragilitésdu jeu
des comédiensou les trous
texte
qui
pas
de celui de Richard III
ou de Hamlet. Mnouchkine situe Macbeth
horsdu temps(un ordinateurvoisineavecdes
fusils
autreâgeet deshélicoptèresavec
un galion) pour dire
du mal
et trouve enfin le bon rythme dans la
deuxième partie. SergeNicolaï, acteur plus
que de verbe, y joue un roi devenu
pantin désarticulédévoré par safolie et son
aveuglement.La scènedu banquetest magistrale : le chaosdu mondeselit dansles gestes
du comédien tandis que tournent les tables
mues par des techniciens de noir vêtus.
Dehors et dedans,réalité et fiction, ici et ailleurs, le spectacleet le
« La vie
est un théâtre», commedisait William. E.L.
Page 2
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théâtre
Pariscope
h
t
e
b
c
maL
Nicolas Lartigue / Michèle Laurent
tragédie
il fête ses 50
ans et
e théâShtrake esdupeSoarlee ses 450 printemmpsé-.
de com
William
hkine a décidé
Ariane Mnouc ements ensemble, ce qui
évén
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morer ces deux e idée. Car c’est la célébrat i
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dernière de la
elle
version est la de cette profusion, car qu
re
nd
ents, en
em
én
év
pas se plai
en
nse, riche
Le
pièce ! C’est de i sied à l’univers du Soleil. us
qu
xo
Ci
ce
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Marie-Célinr Nivièr
U Cartoucherie
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Théâtre du Sole
semaine du 21 au 27 mai Pariscope 11
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Montag, 26. Mai 2014 ! Nr. 120
FEUILLETON 33
Neuö Zürcör Zäitung
Von Agamemnon bis Sihanouk
Körperbetont seit 1964 – Das Théâtre du Soleil in der Cartoucherie de Vincennes bei Paris wird fünfzig
Frankreich ist kein Land für Theatertruppen. Trotz
einer im europäischen und erst recht im weltweiten
Vergleich beneidenswert grosszügig dotierten öffentlichen Kulturförderung sind fast alle hiesigen
Bühnenschauspieler Freiberufler. Der Staat unterhält vier Sprechtheater: Bloss eines davon besitzt
ein festes Ensemble, das den Namen «Truppe» verdient, die Comédie-Française. Im Privatsektor findet man ein paar Schauspielergruppen: Sie sind
klein und tendenziell kurzlebig. Doch gibt es da
noch das Théâtre du Soleil. Im Ausland so bekannt
wie die Comédie-Française, zählt es gut 70 Mitglieder. Heuer feiert es sein fünfzigjähriges Bestehen.
verschiedenen Epochen den Klassenkampf illustrierten bzw. die Geldgier und Verworfenheit der
Bourgeoisie anprangerten: «1789» und «1793», das
legendäre Diptychon über die Französische Revolution, «L’Age d’or», in dem Commedia-dell’ArteCharaktere auf zeitgenössische Figuren wie einen
maghrebinischen Arbeitsmigranten oder einen
ruchlosen Baulöwen trafen, schliesslich eine Dramatisierung von Klaus Manns Roman «Mephisto»,
der bekanntlich in den Jahren vor und nach Hitlers
Machtergreifung spielt.
Es folgten eine Shakespeare-Trilogie, die bald
Kultstatus erlangte, und Anfang der 1990er Jahre
vier griechische Tragödien über den Atriden-Stoff.
Eingeschoben zwischen diese Klassikerserien waren zwei Kollektivwerke über Sujets aus dem
20. Jahrhundert: «L’Histoire terrible mais inachevée de Norodom Sihanouk, roi du Cambodge» und
«L’Indiade, ou l’Inde de leurs rêves» über den blutigen Weg des Subkontinents in die Unabhängigkeit. Seitdem hat sich die Truppe – mit Ausnahme
des «Tartuffe» von 1995 und des zurzeit gespielten
«Macbeth» – auf kollektive Kreationen nach Textvorlagen von Hélène Cixous konzentriert.
Ein Kollektiv, keine Kommune
Faszination durch Fremdheit
Trotz einer Staatssubvention von jährlich über 1,6
Millionen Euro ist das Théâtre du Soleil nach wie
vor eine private Genossenschaft. Als solche war es
am 29. Mai 1964 durch neun Amateurtheaterleute
ins Leben gerufen worden, von denen heute nur
noch Ariane Mnouchkine der Truppe angehört.
Anders als das Living Theatre verstand sich das
Ensemble nicht als eine Künstlerkommune. Dennoch trägt seine Organisation seit je Züge einer
Lebensgemeinschaft. Das gilt etwa für die Gehälter – jedes Mitglied bezieht das gleiche Monatssalär, heute 2000 Euro –, die Verpflichtung, bei der
«Hausarbeit» mitzuhelfen, vom Kochen übers Putzen bis zu Verwaltungsaufgaben, oder die gemeinsamen Mittagessen. Doch was die Truppe zusammenhält, ist nicht ein gemeinsamer Lebensentwurf,
sondern ein künstlerisches Projekt.
Dieses steht zunächst im Dienst der Zuschauer.
Ein Besuch in der Cartoucherie de Vincennes ist
stets ein etwas anderes Theatererlebnis. Seit 1970
dient diese ehemalige Pulverfabrik am südwestlichen Pariser Stadtrand dem Théâtre du Soleil als
Spielort und Heimlager während der ausgedehnten Tourneen. Neben einem separaten Hangar mit
Kostüm- und Maskenateliers sowie dem Proberaum werden hier vier aneinandergefügte Hangars
gleicher Grösse genutzt. Der erste beherbergt die
Verwaltung, das Bühnenbildatelier und die Küche;
der zweite dient zu Vorstellungszeiten als Foyer. In
dem Riesenraum mit gläsernem Spitzdach und
gusseiserner Tragstruktur duftet es nach Gewürzen: Neben Büchern und DVD werden hier auch
warme Speisen feilgeboten (die meist besser riechen als schmecken). An den Wänden prangen
Malereien und Affichen zum Thema des jeweiligen
Stücks; Informationstexte und andere Dokumente
können konsultiert werden.
Dem egalitaristischen Geist des Ortes entsprechend sind die Plätze in den beiden vereinten Hangars, die als Theatersaal dienen, nicht reserviert:
Wer früh kommt, ergattert einen guten Platz.
Unter den Sitzreihen kann man vor Vorstellungsbeginn den Schauspielern beim Ankleiden und
Schminken zusehen – Gucklöcher in einem Vorhang laden dazu ein. Vom Ticketschalter bis zum
Sitzplatz verströmt der Ort eine Aura von Gastlichkeit, die selbst bei grantigen Grossstädtern gern
eine unbezwingbare Festlaune, wo nicht gar ein ungekanntes Gemeinschaftsgefühl hervorruft.
Das Théâtre du Soleil steht für ein nichtnaturalistisches, stark körperbetontes Theater. Über ihre
Herangehensweise an Shakespeare etwa gab
Mnouchkine zu Protokoll: «Das Gift der Psychologie wird uns durch Film und Fernsehen ganz tief
eingespritzt. Die Schauspieler kommen schon verformt bei uns an. Aber ich bin überzeugt, dass
Shakespeares Text dazu bestimmt ist, ganz direkt
gesprochen zu werden. Sobald man beginnt, ihn zu
modulieren, zu verfeinern, ihn subtil zu machen,
wird er weichlich und zuckrig.» Ziel sei, den Zustand («état») der jeweiligen Situation – für die der
Text bloss die Skizze liefert, welche die Verlebendigung auf der Bühne auszumalen hat – durch visuelle, sprich: mimisch-gestische Äquivalente zu vermitteln. Tendenziell führt dieser Ansatz in die
Nähe von Stummfilm-Schauspielerei. Man kann
über das Ergebnis geteilter Meinung sein – die häufig wiederkehrende Kritik an Aufführungen des
Théâtre du Soleil, sie seien holzschnittartig und
darstellerisch durchwachsen, findet auch in der
laufenden «Macbeth»-Produktion Nahrung. Faszinierend ist jedenfalls die Formenvielfalt, in die der
Ansatz im Lauf der Jahrzehnte aufgefächert wurde.
Fast alle Produktionen weisen einen dramaturgischen Kniff auf, der eine Distanzierung der Zuschauer bezweckt. So sollen sie zum Mitfiebern
verführt werden: Was fremd ist, fasziniert. Bei diesem Kniff kann es sich um Masken oder Maquillage handeln, aber auch um das Dispositiv der Mise
en Abı̂me, des Theaters im Theater. «1789» etwa
widerspiegelte den Beginn der Revolution im
Schmierentheater von Gauklern, «1793» deren
Fortgang in den täglichen, oft dramatischen Versammlungen einer Sektion von Sansculotten.
«Richard II», die erste und wohl einflussreichste
Inszenierung der Shakespeare-Trilogie, bestach
durch ihre Stilisierung und hohe Artifizialität. Für
den Formalismus des prononciert rhetorischen
Textes fand die hoheitsvolle, ja höfisch-ritualisierte
Aufführung schlagende Äquivalente. «Tambours
sur la digue» nahm 1999 die Form eines japanisierenden Marionettentheaters an, bei dem einige
Darsteller lebensgrosse Puppen, andere deren
Spieler verkörperten. «Les Ephémères» endlich
siedelte 2008 Alltagsszenen aus der Jetztzeit auf
kleinen Plattformen an, die mitsamt ihrem realistischen, aber fragmentarischen Dekor (ein Stück
Garten, ein halber Salon . . .) auf die Bühne gerollt
wurden – wie Bohrkerne aus unserer Eiszeit.
Eine Würdigung des Théâtre du Soleil wäre unvollständig ohne ein Aperçu über seine epochalen
Bühnenbilder. Drei Jahrzehnte lang entwarf diese
der im Februar verstorbene Guy-Claude François.
Überzeugender als die in jüngerer Zeit doch arg
auf Effekt getrimmten Bühnenmusiken von JeanJacques Lemêtre erhoben François’ Kreationen
das Postulat, Theater müsse auch ein Fest für die
Sinne sein. Für «1789» schuf er fünf Estraden, die
mit einer Sitzreihe ein Viereck einrahmten, in dem
ein Teil des Publikums stand. Die Darsteller wechselten zwischen den fünf Spielorten hin und her
und bahnten sich bisweilen auch einen Weg durch
die Zuschauermenge.
In «Méphisto» siedelte François zwei antagonistische Theater, eine Staatsbühne und ein politisches Kabarett, an beiden Enden des Saals an. Periodisch mussten die Zuschauer sich umdrehen: Ihre
Sitze hatten verstellbare Lehnen. Für «L’Age d’or»
liess er 3000 Kubikmeter Erde herbeischaffen und
Bagger vier Krater darein graben; an der Decke
hingen Kupferplatten mit Tausenden von kleinen
Glühbirnen. In «Richard II» endlich kombinierte
er Tatami-Matten und goldene Wände mit Seidenprospekten in Rot, Grau, Gold und Silber. Ein
idealer Projektionsraum für Mnouchkines Theater
der lebenden Zeichen in Bewegung.
Am 29. Mai feiert das Théâtre du Soleil
sein fünfzigjähriges Bestehen. Die Pariser
Truppe um Ariane Mnouchkine steht für
nichtnaturalistische Aufführungen von
hohem visuellem Reiz. Zurzeit spielt sie
Shakespeares Tragödie «Macbeth».
Marc Zitzmann
Zivilcourage
Sodann eignet dem Projekt des Théâtre du Soleil
auch eine militante Dimension. Im Mai und Juni
1968 spielte die Truppe gratis für streikende Arbeiter bei Citroën und Renault. (Die undankbaren
Proletarier hätten übrigens lieber Shakespeares
«Sommernachtstraum» gesehen, den das Ensemble gerade erarbeitet hatte, als Arnold Weskers
Drama «The Kitchen»: Dessen in einer Restaurantküche angesiedelte Handlung erinnerte sie allzu sehr an die eigene Arbeit am Fliessband!) 1973
setzte sich die Truppe für Gefängnisinsassen ein;
1981 für Solidarnosc, für Vaclav Havel und für die
argentinischen Desaparecidos; zehn Jahre später
für vom Bürgerkrieg bedrohte algerische Künstler.
Die aufsehenerregendste Aktion des Théâtre du
Soleil war jedoch die Aufnahme von 382 überwiegend malischen Sans-Papiers, die 1996 aus einer
Pariser Kirche vertrieben worden waren. Das
Stück «Et soudain des nuits d’éveil» widerspiegelte
im Folgejahr diese Erfahrung, derweil «Le Dernier
Caravansérail» 2003 auf das Los zentralasiatischer
Asylsuchender aufmerksam machte.
Zu den Besonderheiten der Truppe zählt, dass
sie bis auf zwei frühe Ausnahmen nie unter einer
anderen Regieführung als jener von Mnouchkine
Die Regisseurin eines ungekannten Gemeinschaftsgefühls: Ariane Mnouchkine.
gearbeitet hat. Diese war von Beginn an die dominierende Persönlichkeit, doch rechtfertigt der sehr
spezielle Entstehungsprozess wenigstens zum Teil
die Etikettierung der Produktionen des Théâtre du
Soleil als Kollektivwerken. Es entbehrt nicht einer
gewissen Ironie, dass Mnouchkine ihre erste Inszenierung mithilfe von Zinnsoldaten und einem
Modell des Bühnenbilds entworfen hatte: Jede
Geste jeder Figur stand schon vor Beginn der Proben auf dem Papier. Seitdem hat sie ihre Methode
radikal geändert: Von einer meist visuellen Initialzündung – durch Fotos, Filme usw. – ausgehend,
lässt sie die Schauspielerinnen und Schauspieler
monatelang probieren und improvisieren. Jeder
darf jede Rolle spielen, bis sich eine Besetzung und
das Grundgerüst einer Inszenierung herausschälen. Ihre Funktion sieht Mnouchkine heute darin,
kritisch zuzuschauen und die Truppenmitglieder
aus der Komfort- weg in die Risikozone zu führen.
Ein vorgefasstes Regiekonzept hat sie nicht.
JANINE NIEPCE / ROGER VIOLETT / KEYSTONE
Das Repertoire des Théâtre du Soleil ist eklektisch. Während die erste Produktion, eine von Stanislawski beeinflusste Aufführung von Gorkis
«Kleinbürgern», 1964 – auch – als ein Exorzismus
des Mittelklasse-Fluchs der meisten Truppenmitglieder angesehen werden konnte, legte die Dramatisierung von Théophile Gautiers Roman «Le
Capitaine Fracasse» 1967 Pisten für spätere Erkundungen an – Stichworte «Theater im Theater»,
«Commedia dell’Arte» und «Antinaturalismus».
«Les Clowns» nahm 1969 die Form einer losen
Folge von Sketchen an, in denen Theaterclowns ihr
je innigster Traum erfüllt wird. Dieses erste Kollektivwerk der Truppe lieferte die Vorlage für den
Schöpfungsprozess aller späteren derartigen Werke: Aberdutzende von Improvisationen, die verworfen oder verfeinert und zu einem mehr oder
weniger geschlossenen Ganzen montiert werden.
In den 1970er Jahren folgten vier Produktionen
mit marxistischem Ansatz, die mit Zeitbildern aus
......................................................................................................................................................................................................................
Macbeth mit MacBook
zit. ! Dreissig Jahre nach ihrer legendären Shakespeare-Trilogie zeigt Mnouchkine im Théâtre du
Soleil ihre Inszenierung von «Macbeth». Eng am
Text, den sie selbst neu übersetzt hat, siedelt die
Regisseurin die Handlung in einer erweiterten
Gegenwart an, die vom Feldtelefon bis zum MacBook reicht. Wie schon die Jules-Verne-Dramatisierung «Les Naufragés du Fol Espoir (Aurores)»
2010 ist dieser «Macbeth» eine Produktion Hollywoodschen Zuschnitts. Gut vierzig Schauspieler bevölkern die Bühne, die bei jedem Szenenwechsel
ein neues, aufwendiges (Film-)Dekor erhält. Und
auch die Personenführung zielt mehr ins Grosse, um
nicht zu sagen: Grobe, als ins Kleine und Feine.
Leitgedanke scheint zu sein, den «Plot» so direkt
wie möglich zu erzählen – was jeden Regieeinfall
ausschliesst, der sich auch nur ein paar Schritte weg
vom Pfad des Naheliegendsten zu bewegen wagte.
Ähnlich liessen sich die Leistungen der meisten
Schauspieler charakterisieren. Und zuvörderst jene
des Hauptdarstellers: Serge Nicolaı̈ greint und grimassiert, was das Zeug hält, und schraubt sich mit
seinem kehligen Keifen in immer höhere Stimmregister. Doch von Macbeths erst verzagtem, dann
enthemmtem Machtstreben, das endlich zum qualvollen Ersaufen seiner Seele in einem Meer aus
Blut, Angstschweiss und schwarzer Galle führt, vermittelt er nur wenig. Unter dem Strich ist Mnouchkines «Macbeth» eine visuell sehr farbige, dramaturgisch durchaus effektvolle und – um es auf eine
Formel zu bringen – «familientauglich-patrimoniale» Produktion voller Pep und Punch. Aber weder
die Ausdrucksmittel noch die Interpretation betreffend erschliesst sie je Neuland.
Date : 29/05/2014
Pays : FRANCE
Page(s) : 64-66
Rubrique : Culture
Diffusion : 147993
Périodicité : Hebdomadaire
Surface : 263 %
Culture
50 ans après sa création, retour sur
l'aventure du Théâtre du Soleil, d'Ariane
Mnouchkine, une épopée sociale et humaine.
L'UTOPIE
DUNE FEMME
(1/3) THEATRE DU SOLEIL
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Date : 29/05/2014
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Rubrique : Culture
Diffusion : 147993
Périodicité : Hebdomadaire
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ARIANE MNOUCHKINE
(premierplan a d.) répète
avecsatroupe dans
teslocaux dela Cartoucherie
deVincennes, en 1970.
par un froid glacial, pour la première fois
des spectateurs prennent le bus pour aller
voir du théâtre à la Cartoucherie de
Vincennes. Ils y assistent à une représen
tation mémorable. Son titre : 1789, son
sujet : la Révolution française. Pour le
public, le choc est total. Les acteurs
maquillés et costumés viennent à leur
rencontre et profèrent les textes comme
s'ils leur parlaient à chacun, en privé. Le
théâtre est partout, sur le plateau et dans
les gradins. Il est une fête partagée.
UNE
théâtre
La chevelure en bataille, l'oeilperçant,
campée devant une porte rouge, Ariane
Mnouchkine déchire les billets d'entrée.
Celafait 50 ans qu'elle se porte ainsi à la
rencontre de ses spectateurs, venus du
monde entier pour applaudir sa manière
singulière de faire vivre le théâtre. Tout
commence en 1964, à Paris. Parce qu'ils
aiment le théâtre par-dessus tout, une
dizaine d'étudiants décident d'en faire
leur métier. Pour que leur rêve devienne
réalité, ces acteurs débutants engagent
chacun 900 francs dans lafondation d'un
collectif professionnel. C'est ainsi que, le
29 mai, naît le Théâtre du Soleil. sa tête,
tenant les rênes de l'aventurepour ne plus
jamais les lâcher, une jeune patronne de
25ans. Elle s'appelle Ariane Mnouchkine,
et plutôt que de hanter les couloirs de la
Sorbonne, elleveut être metteur en scène.
Elle le sait déjà, le théâtre tel qu'elle le
conçoit sera exigeant, populaire et acces
sible à tous.
UN CHOC TOTAL POUR LE PUBLIC
Ariane Mnouchkine découvre, aux
portes de Paris, niché au
du bois de
Vincennes, un ancien parc militaire
se fabriquaient cartouches et explosifs.
Sur ce domaine verdoyant
poussent
les marronniers, l'armée a abandonné de
vétustés casernes. L'équipedu Soleils'ins
talle dans l'une d'elles et la rénove entiè
rement. C'est ainsi qu'en décembre 1970,
DE COMMUNION
ArianeMnouchkine ne dérogerajamais
à cette volonté de partage, de communion,
quelles que soient les pièces et les formes
qu'elles prendront. Elle crée chaque fois
des imagesd'une beauté fulgurante. Traite
de sujets durs, comme le rejet de l'autre.
Au fil des ans, des centaines de milliers
de personnes vont saluer son talent. C'est
un « génie »,affirme Myriam Azencot qui
fut de l'aventure de 1981 à 2002. « Un
maître », renchérit Nirupama Nityanandan, actrice. Une «femme humaine avec
ses défauts et ses qualités », tempère le
comédien Duccio Bellugi.Les spectateurs
applaudissent aussi l'esprit communau
taire d'une maison dirigée fermement.
Car il faut de la poigne pour tenir un navire
à bord duquel sont embarquées 70 per
sonnes, payées le même salaire, 1800 e
net par mois. « On doit pouvoir travailler
12 heures par jour tout en sachant qu'on
n'aurapas de vie ailleurs, raconte Myriam
Azencot. Il n'y a pas de distraction à la
Cartoucherie, si ce n'est le théâtre et le tra
vail. » Or le travail ne manque pas pour
entretenir le vaisseau : fabriquer les cos
tumes mais aussi réparer l'électricité,
balayer le sol ou même nettoyer les toi
lettes. « LeSoleil, on le vit au présent. un
moment,je me suisfait avaler, j'étais là en
permanence »,se souvient Georges Bigot,
un ancien membre.
A SAVOIR
®
Théâtre du Soleil,
Cartoucherie de Vincennes,
Paris XII0.
Tél. : 01 43 74 24 08.
www.theatre-du-soleit.fr
^
(2/3) THEATRE DU SOLEIL
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culture théâtre
vS*
UN MACBETH sauvage,
mis en scène par Ariane
Mnouchkine (en bas,
pendant les répétitions).
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Macbeth
ï# Sp de William Shakespeare, avec Serge Nicolaï, Nirupama Nityanandan
On se croirait au cinéma : les images déferlent comme des vagues
qui se fracassent aux pieds des spectateurs. Jardin anglais, champ
de bataille, écurie ou salon chic, elles charrient des visions par
fois sanglantes et parfois délicates qui affolent le regard. Ce flux
les pétales de rose
tourbillonnant, quasi cinématographique,
succèdent aux cadavres dépecés est le cadre choisi par Ariane
Mnouchkine qui traduit et met en scène la pièce. L'histoire est
celle de Macbeth, usurpateur du trône. Sériai killer des temps
anciens, chez qui la folie a supplanté la raison et qu eperonne
une démence plus grande encore, celle de sa femme, Lady Macbeth.
Ce drame guerrier qu'Ariane Mnouchkine traite comme si
Shakespeare l'avait écrit hier est sauvage. C'est un monstre qu'il
faut apprivoiser. Ce à quoi s'emploient les acteurs de la troupe,
pas encore totalement maîtres, pour certains, du démon qu'ils
affrontent, joëllegayot
Jusqu'au 13 juillet, Cartoucherie de Vincennes, Paris XII
Les comédiens s'échauffent tôt le
matin. Puis ils passent par la case
« concoctage », séquence qui consiste à
choisir les scènes qu'ils veulent travailler.
l'atelier, ils bâtissent ensuite le décor
dont ils auront besoin. Enfin, ils répètent
tout l'après-midi. Duccio Bellugiespérait
être le Macbeth de Shakespeare qui se
donne actuellement. 11y a seulement
deux mois, il a appris qu'il interpréterait
un autre personnage : « Au départ, tous
(3/3) THEATRE DU SOLEIL
les rôles sont ouverts. Deux ou trois mois
avant la représentation, Ariane décide et
indique à chacun quel personnage il
jouera. Cela peut être douloureux mais
c'est la règle dujeu. »
COMME
LA MAISON
« Ariane est la gardienne de l'utopie, elle
ne s'use pas »,constate Georges Bigot.Elle
salue les uns, embrasse les autres, accueille
les nouveaux venus avec le sourire.
Page 7
« Le pubiic nous est essentiel », jure
Nirupama Nityanandan. l'intérieur, les
spectateurs se pressent au bar. On dîne à
côté d'inconnus avec qui on lie connais
sance. quelques mètres, dans leurs loges,
onaperçoitlescomédiensquisemaquillent.
Chez eux, on se sent chez soi. « Le théâtre
est un art qui se pratique àplusieurs. Ici c'est
une évidence », dit en souriant Georges
Bigot. Dans les gradins, on entend parler
dans toutes les langues, le monde entier
semble s'être donné rendez-vous là. La
rencontre de l'autre, c'est l'une des tradi
tions du Soleil, parce qu'ainsi l'a voulu
Ariane Mnouchkine, cette femme hors
norme dont le nom est en 50 ans devenu
symbole d'utopie.^ joëllegayot
Tous droits de reproduction réservés
Date : 31/05/2014
Pays : FRANCE
Edition : Week-End
Page(s) : 37
Périodicité : Hebdomadaire
Surface : 29 %
SOCIETES
Par FREDERIQUE AIT-TOUATI
Shakespeare
au Soleil
n croyait connaître
Macbeth,ce conte de
l'ambition humaine
déréglée, aveuglée
par le pouvoir,
le sang
appelle le sang, la culpabilité
rend fou. Ceportrait de la peti
tesse des grands, de la corrup
tion et de l'hybris. Au Théâtre
du Soleil, Macbeth prend
une autre dimension. On y dé
couvre le bouleversement de
l'ordre naturel et cosmique, l'arrogance
d'un homme qui prétend embrigader
la nature dans son projet de domination.
Ainsi parle Macbeth : «Mêmes'il vousfaut
déchaîner les ventsI Et les laisser s'abattre
contre les églises I Même s'il faut que
lesvagues écumantesI Désoriententet ava
lent toutes lesflottes qui naviguentsur ellesI
Mêmes'il faut que lebléen herbesoit couché
et les arbres arrachés [...]. I Mêmes'il faut
que letrésor dessemencesde lanature I Soit
renverséet irrémédiablementmélangé /Jus
qu'à ce quela destructionmêmeenvomisseI
Répondezà ce queje demande (1).»
Macbeth est d'abord celui qui trouble
l'ordre de la nature en troublant l'ordre du
monde. Aveuglé par la prophétie de trois
sorcières, le général Macbeth décide de
tuer le roi Duncan qui vient de le couvrir
d'honneurs. Celui qui ose asservir la na
ture à lavolonté humaine et à l'ambition
politique déclenche sa colère. Chez les
Macbeth, les fleurs sont coupées et les ar
bres taillés, mais dans la suite de la pièce,
c'est une nature rebelle, vengeresse et
outrée, qui parle. Après la mort du roi
Duncan, on rapporte d'étranges événe
ments :
Ross: «Tu vois les cieux qui, troublés par
l'action de l'homme,
Menacent son théâtre ensanglanté.
A l'horloge il est jour
Et cependant la sombre nuit étouffe notre
flambeau voyageur.
Est-ce la prédominance de la nuit ou la
honte du jour,
Pour que l'obscurité ensevelisse ainsi la
(1/2) THEATRE DU SOLEIL
Quand la lumière vivante devrait l'em
brasser ?
Le vieil homme: C'est contre -nature,
pareil à l'acte qui fut fait.»
Les nouvelles terrifiantes envahissent peu
à peu le plateau, l'air, le monde: une
éclipse du soleil, des chevaux qui se man
gent entre eux, une chouette qui tue un
faucon. L'actecontre-nature a soulevé la
nature contre les hommes. La sauvagerie
humaine réveille une nature
sauvage. Macbeth voulait arra
cher les arbres, les arbres mar
chent contre lui. «Et alors, il me
sembla que la forêt commençait
à bouger», raconte le messager
à Macbeth hors de lui. Car les
sorcières lui avaient promis
qu'il serait invincible jusqu'au
jour
«le boisde Bimam mar
cherait en direction de Dunsinane». Il s'agit en réalité des
soldats de l'armée ennemie qui avancent
derrière des branchages. Le subterfuge
guerrier accomplit la prophétie. Mais le
théâtre permet aussi de donner àvoir l'im
possible : la révolte des arbres. Avant que
la nature ne devienne le paysage lisse et
policé que nous connaissons, ce rideau de
scène fixe devant lequel les
humains s'agitent, elle est
un cosmos vivant et palpi
tant, un acteur à part en
tière, dont les oiseaux et les
arbres, chez Shakespeare,
sont la voix et la main. La
forêt est en marche et l'époque de Shakes
peare nous parle, étrangement, de notre
époque troublée.
( :hezMmmehkine le mimde du théâtre est
un cosmosdont elle aprogressivement mis
aupoint les loisphysiques :les acteurs sur
gissent des tréfonds, au milieu des specta
teurs. Des passerelles, des plateaux à rou
lettes, des voiles produisent un espace
mouvant qui se transforme sans cesse à
vue. Un dispositif ingénieux donne l'im
pression d'une lumière naturelle, éclairant
le plateau à travers une verrière. Depuis
cinauante ans. ArianeMnouchkine déploie
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un langage qu'elle enrichit d'un spectacle
à l'autre, un vocabulaire scénique, gestuel
et visuel qui est propre à son lieu, à sa
troupe. Dans Macbeth, cette langue singu
lière est au service des éléments. Destor
rents de soie, une forêt d'acteurs. Ici, les
métaphores prennent corps et matière, les
objets s'animent. Lorsque l'image du
monde est tremblée, comme elle l'était au
tournant des XVIeet XVIIesiècles, comme
ellel'est aujourd'hui, Shakespeare invite à
transformer le paysage décor en person
nage acteur, et à interroger la place de
l'homme dans lecosmos qu'il habite. Lon
dres a le Globe,nous avonsle Soleil.Et si le
Soleil s'éteignait? Ce serait vraiment de
mauvais augure. Maisce n'est pas pour de
main.
(l) Les citations sont tirées de «Macbeth», une
tragédie, de William Shakespeare, traduction
d'Ariane Mnouchkine, éd. Théâtrales, 2014.
Frédérique Aït-Touati est chercheure
en littérature et en histoire des sciences,
elle enseigne à l'université d'Oxford
et à Sciences-Po.
Cette chronique est assurée en alternance
par Cyril Lemieux, Frédérique Aït-Touati,
Eric Fassin et Leyla Dakhli.
Macbethvoulaitarracher les arbres,
les arbres marchent contre lui [...]
et l'époque de Shakespeare nous parle,
étrangement, de notre époque troublée.
(2/2) THEATRE DU SOLEIL
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36
LOISIRS ET SPECTACLES
Le Parisien
Samedi 31 mai 2014
Le Théâtre du Soleil rayonne
IL Y A EU JEAN VILAR et le Théâ- ce, entre 1970 et 1975, d’assister aux
tre national populaire. Et puis il y a représentations de « 1789 » et « 1793 »,
eu Ariane Mnouchkine et le Théâtre premiers spectacles donnés dans les
du Soleil. Le premier a brillé treize vastes locaux d’une compagnie déans, le second réchauffe encore la sormais mondialement connue, s’en
planète théâtre cinquante ans après souviennent encore. Ils ouvraient de
sa création. Efficacité et bienfaits de grands yeux lorsque, pressés par une
l’énergie solaire. Après la fondation petite faim à l’entracte, ils étaient
de la compagnie, une société coopé- servis par tel député du peuple qui
rative ouvrière de production (Scop), venait de les haranguer sur scène
le 29 mai 1964,
quelques minutes
avec une pièce de
plus tôt. Ariane
Pour
entrer
Maxime Gorki,
Mnouchkine, la
dans la tumultueuse
« Les Petits-Bourgrande prêtresse,
grande famille, il faut déchirait les tickets
geois », cette troupe atypique erra
à l’entrée, ce
n’avoir peur de rien
six ans de scène en
qu’elle fait toujours
scène avant de trouver un jour à 75 ans, déclenchant les craintes et
d’hiver sa terre promise dans une les passions, et fonctionnant comme
cartoucherie désaffectée du bois un aimant sur n’importe quel préde Vincennes.
tendant au théâtre.
C’est là, loin de l’agitation urbaine,
Pour entrer dans la tumultueuse
avec le murmure des branches pour grande famille, il faut n’avoir peur de
accompagner la chanson de geste rien : ni du temps que cela prendra,
des acteurs, qu’un art du théâtre dif- ni de l’expérience qui s’ensuivra. Auférent a pour de bon pu voir le jour. jourd’hui, le Théâtre du Soleil résiste
On n’y faisait rien comme ailleurs. à devenir une institution. Un vingtTout le monde était payé pareil, quatrième spectacle, « Macbeth », de
soit 1 000 francs, 1 200 pour les William Shakespeare, célèbre ce cinchargés de famille, et chacun partici- quantième anniversaire. La traducpait aux tâches communes. Le prin- tion est signée Ariane Mnouchkine.
cipe n’a pas changé. Les membres « Je commence à me lasser du soleil »
du Soleil émargent à 1800 €. Une s’écrie Macbeth à la fin. Pas le public
augmentation à 2 000 € se profile qui, au vu des réservations, aime à
le mois prochain.
rester sous le Soleil exactement.
Les spectateurs qui eurent la chanPIERRE VAVASSEUR
(Michèle Laurent.)
ANNIVERSAIRE. La compagnie créée par
Ariane Mnouchkine a révolutionné le genre
avec son esprit communautaire. Elle joue
« Macbeth » à la Cartoucherie de Vincennes.
« Une troupe irremplaçable »
Son « Macbeth » en met
LA MORT ET LE SANG sont tapis
dans le parfum des roses. Elles sont
nombreuses dans cette adaptation
de « Macbeth », tantôt rassemblées
en bouquets tantôt égrenées en pétales pourpres pour symboliser le
chemin du crime. Cette tragédie
datée de 1606 raconte comment, en
Ecosse, Macbeth, cousin de Duncan, roi d’Ecosse, revenu victorieux
de la guerre contre la Norvège,
s’empare du trône après avoir as-
Julien, spectateur
Quatre
spectacles
mythiques
n PRATIQUE
Paris (XIIe), le 9 mai. Aaron, Stéphanie et Julien sont venus de loin. (LP/Jean-Baptiste Quentin.)
retrouve ses amis comédiens Stéphanie Coquillon et Aaron Qahn. Ils ont
la trentaine. Julien travaille à Bergerac, Stéphanie à Quimper, Aaron est
américain. « Le Théâtre du Soleil m’a
toujours fait rêver, dit-il. Il défend
une utopie à laquelle aspire tout jeu1970 : « 1789 ». La compagnie
vient de prendre ses quartiers à la
Cartoucherie de Vincennes. Elle
pend la crémaillère avec « 1789 »,
une création collective sur la
Révolution française qui bénéficie
d’un dispositif scénique inédit en
plusieurs plateaux. La pièce sera
donnée pendant toute l’année en
France et dans le monde avant de
connaître, trois ans plus tard, une
suite, « 1793 ». Soit
384 000 spectateurs au total.
ne acteur. C’est irremplaçable. » Julien cite Ariane Mnouchkine : « Elle
dit que le public a 5 ans. J’adore cet
émerveillement. Elle n’oublie jamais
qu’une pièce de théâtre est d’abord
quelque chose qui enchante. »
1979 : « Mephisto ». Adapté d’un texte de
Klaus Mann, fils de l’écrivain allemand
Thomas Mann, « Mephisto, roman d’une
carrière » propose une nouvelle fois une mise
en scène innovante en installant deux scènes
face à face. L’une représente un théâtre
officiel, l’autre un cabaret de Hambourg
fréquenté par une faune réfractaire. Le public
pivote sur son siège. L’histoire raconte la
trajectoire d’un comédien qui, de
sympathisant communiste, devient maître
des spectacles du IIIe Reich. Près de
160 000 spectateurs y assistent.
Où : Cartoucherie de Vincennes,
2, route du Champ-de-Manœuvre,
75012 Paris.
Quand : les mercredi, jeudi et
vendredi à 19 h 30. Le samedi à
13 h 30 et 19 h 30. Le dimanche à
13 h 30. Durée : 3 h 20. Jusqu’au
13 juillet. Reprise le 8 octobre.
Comment : MO Château-deVincennes. Navette gratuite : entre
1 h 15 et 10 minutes avant le début du
spectacle.
Autobus 112 jusqu’à l’arrêt
Cartoucherie.
Vélib’ : station Pyramide-entrée Parc
floral à neuf minutes à pied de la
Cartoucherie.
Parking à l’intérieur de la
Cartoucherie.
Combien : de 15 à 29 €.
Réservation au 01.43.74.24.08 ou sur
www.théâtre-du-soleil.fr.
P.V.
(Michèle Laurent.)
CE SOIR-LÀ, deux générations de
spectateurs se croisent à la Cartoucherie. Camille et David Azoulay,
septuagénaires parisiens, se restaurent sur le pouce avant d’entrer dans
la salle. Fidèles parmi les fidèles. « Je
pense que nous avons vu tous les
spectacles depuis que le Théâtre du
Soleil s’est installé ici », dit Camille.
Elle cite deux des pièces qui l’ont le
plus marquée : « Sihanouk » et
« Tartuffe ». « Ariane Mnouchkine a
complètement renouvelé le théâtre
en mêlant actualité et textes classiques, ajoute cette ancienne chargée
de communication qui apprécie aussi le travail musical élaboré par JeanJacques Lemêtre, compositeur attitré. Non seulement ses mises en scène sont grandioses, créatives, mais
elle surprend toujours. » « Elle a ouvert de nouvelles voies», renchérit
David, ex-consultant, qui salue également son côté pygmalion.
A quelques pas de là, Julien Dinh
sassiné son oncle. Il se débarrasse
ensuite de son fidèle ami, Banquo,
qui se doute de quelque chose.
Peu à peu, le nouveau souverain,
victime d’hallucinations, sombre
dans la folie ainsi que Lady Macbeth, poursuivie par le souvenir
des sanglantes images dont elle a
été témoin.
Long de 3 h 20 avec entracte, ce
spectacle, qui s’ouvre par une danse mi-paysanne mi-guerrière, est
1985 : « L’histoire terrible mais inachevée
de Norodom Sihanouk ». Après être
passée, de 1981 à 1984, par une trilogie
shakespearienne — «Richard II», « la Nuit
des rois », « Henry IV », la troupe s’attaque,
sur un texte d’Hélène Cixous, à une tragédie
contemporaine décrivant le Cambodge à la
veille du génocide. Pour cette pièce, la
Cartoucherie sera entièrement
métamorphosée à l’orientale, mi-temple, mipalais, dans une dominante rouge, du sol au
plafond. Le spectacle accueillera
108 000 spectateurs.
LOISIRS ET SPECTACLES
Le Parisien
Samedi 31 mai 2014
37
depuis cinquante ans
Ariane Mnouchkine
a toujours la flamme
Dans le «Macbeth»
que la troupe joue
actuellement, la mise
en scène multiplie les
anachronismes.
UNE MAMAN, une maîtresse fem- cher son téléphone sans hésiter
me, une statue de commanderesse. pour convaincre Jean-Paul Sartre
Ariane Mnouchkine, qui enfanta le de descendre dans les arènes de LuThéâtre du Soleil et sa grande famil- tèce faire une conférence sur Jean
le toujours recommencée, est née Genêt, se sera frottée à la planète. A
deux fois : la première le 3 mars Oxford, elle est copine d’un certain
1939, à Boulogne-Billancourt Ken Loach, plus tard Palme d’or à
(Hauts-de-Seine), d’une mère an- Cannes pour « Le vent se lève ». Au
glaise et d’un ogre de cinéma, Japon, elle approche le théâtre nô.
Alexandre Mnouchkine, produc- Elle file en Corée, traverse le Népal,
teur de « Fanfan la
découvre l’Inde. Il
Tulipe », « l’Homfaut beaucoup apme de Rio » ou en- A Oxford, elle est copine prendre du moncore « le Nom de la
de pour le mettre
avec Ken Loach
rose ». La seconde,
ensuite en scène,
un soir de 1954 à l’issue de la repré- voire lui donner un toit.
sentation d’« Arlequin, serviteur de
En 1995, Ariane a payé de sa perdeux maîtres », une pièce de l’Ita- sonne avec une grève de la faim
lien Carlo Goldoni mise en scène face au non-engagement de la Franpar son compatriote Giorgio Stre- ce contre les massacres en Bosnie.
hler. Cinq ans plus tard, Ariane co- Un an plus tard, les sans-papiers de
fondait avec une poignée d’amis de l’église Saint-Ambroise posaient
la Sorbonne, dont le comédien Phi- leurs ombres au Soleil. Aujourd’hui,
lippe Léotard, une Association pour croiser la Reine Ariane, c’est
théâtrale des étudiants de Paris simple. Cette silhouette vêtue de
(Atep), chrysalide devenue papillon blanc, tête couronnée d’un accent
en 1964 sous l’éclatant vocable de circonflexe de cheveux de même
Théâtre du Soleil.
couleur, et qui déchire humbleEntre-temps, cette femme au vi- ment les tickets à la porte du théâsage volontaire, capable de décro- tre, c’est elle.
PIERRE VAVASSEUR
« Nous étions
frères et sœurs »
« J’étais aussi
Monsieur Chiottes ! »
Georges Bonnaud, arrivé en 1966
Georges Bigot, membre de 1981 à 1992
P.V.
P.V.
(Michèle Laurent.)
Serge Nicolaï, impressionnant
dans le rôle titre
2006 : « Les Naufragés du fol espoir ».
L’action se passe dans le grenier d’une
guinguette des bords de Marne. Une
équipe d’amateurs tourne un film muet :
l’histoire d’un bateau parti de Cardiff dans
les années 1880 et qui échoue au cap Horn.
« Librement inspiré d’un mystérieux roman
posthume de Jules Verne » annonce
l’affiche, ce spectacle s’attache à exorciser
l’inéluctable arrivée de la Première Guerre
mondiale. Il sera joué jusqu’à Santiago
du Chili ou Taipei et réunira
185 000 spectateurs.
« J’y ai appris la vie »
Philippe Caubère, vedette de la troupe
n
Philippe Caubère a été l’une des figures
charismatiques de la compagnie. Il a
notamment joué un fabuleux Molière (photo) dans
le film éponyme réalisé par Ariane Mnouchkine. Il a
ensuite claqué la porte de la troupe avec fracas en
1977, avant de raconter son aventure dans ses
spectacles. « Lorsque j’ai rencontré le Théâtre du
Soleil, j’ai eu le sentiment que je rentrais au bercail.
Je n’étais rien. J’étais dans le caniveau et je me suis
retrouvé dans une famille. J’y ai appris la vie, la
politique et trouvé la matière de toute ma vie
artistique. En plus, le Théâtre du Soleil a toujours
essayé d’échapper aux lois communes de la
démocratie. C’était un autre ordre social. On
pouvait y passer de la dictature à l’anarchie, ce qui
me semble être le propre de l’art. J’y suis resté sept
ans. Ça a été à la fois magnifique et épouvantable.
L’histoire de la troupe était elle-même une pièce qui
se jouait. On en sort marqué au fer rouge, comme
les taureaux des manades. Quand je baisse mon
pantalon, je suis fier d’avoir cette marque-là. » P.V.
n
Il fut
notamment
le Richard II (photo)
de la trilogie
Shakespeare.
« Le Soleil
représentait pour
nous une liberté
extrême. Ariane
vous disait : Tu
veux jouer ? Tiens,
voilà une page
blanche, écris ! C’est
comme si on
m’avait donné un
(Michèle Laurent.)
grand bac à sable
pour m’ébattre. Mais à d’autres elle pouvait dire
aussi : Toi, tu n’es pas encore prêt. Va voyager !
Nous étions des chevaliers du théâtre. Nous
construisions nos costumes, nous apprenions le
texte et en même temps il fallait faire la bouffe
pour tout le monde et récurer les casseroles. Il était
hors de question qu’il y ait une femme de ménage
au Théâtre du Soleil. L’aspirateur ne fonctionnait
pas. Moi, sur Richard II, je nettoyais les toilettes.
J’étais aussi Monsieur Chiottes. Ça me faisait
dégonfler les chevilles. Nous sentions tous que nous
participions à une grande aventure. Et quand nous
partions en tournée, nous étions accueillis comme
les Beatles. »
P.V.
(Michèle Laurent.)
Ariane Mnouchkine a joué avec les
anachronismes. Macbeth consulte
ainsi sur un ordinateur les prédictions des sorcières. Une équipe de
télévision surgit à deux reprises.
Quant à la scène de bal, elle ne
déparerait pas à Cannes. Tout cela
n’était peut-être pas nécessaire
mais le résultat n’en est pas affaibli.
Mélange physique de Jean Dujardin et d’Albert Dupontel, Serge Nicolaï, en Macbeth, est impressionnant. Et c’est bien, plein les yeux, à
un théâtre toujours aussi vivant et
populaire qu’assistent les spectateurs, littéralement enchantés le
soir où nous y étions.
Georges
Bonnaud a
participé à
l’aventure du
Théâtre du Soleil de
1966 à 1980.
« Quand on a vu
comment la
communauté s’est
mise à fonctionner,
on a compris, malgré
les difficultés
financières, que cela
pourrait aller très
loin. D’autant que
(Magnum Photos/Martine Franck.)
nous avons été très
vite suivis par un public de plus en plus nombreux. Et
lorsque nous avons eu la Cartoucherie, (NDLR : en
1970), nous avons su que ça ne s’arrêterait plus. Ce
succès ne reposait pas sur une formule magique.
Juste une formule dans l’air du temps. L’époque
permettait à de jeunes compagnies de tenter leur
chance. Bien sûr, cette longévité est aussi liée au
travail acharné. Chaque spectacle était une marche
que la compagnie gravissait. Sur le plan du
fonctionnement, c’était une communauté sans
gourou. Une coopérative où les relations entre nous
étaient d’égal à égal. Nous étions frères et sœurs.
Aujourd’hui, c’est différent. La compagnie est devenue
un establishment et Ariane, c’est la grande mère. »
(Michèle Laurent.)
plein les yeux n
d’abord un livre d’images : on y
traverse le vacarme de la guerre et
le luxe des palais, le calme d’une
roseraie et le déchaînement de
l’océan. Quant à la forêt en marche,
c’est un enchantement visuel.
Ariane Mnouchkine est plus que jamais présente au Théâtre du Soleil. (Michèle Laurent.)
GLOBAL
CULTURE
글・극장사진 시원(아트홀릭 파리통신원)
공연사진 Michèle Laurent
맥베스, 셰익스피어가 남긴 가장 강렬한 비극
셰익스피어 작품 중 비교적 짧으며 긴박한 사건 전개로 강렬한 인상을 주는 비극
<맥베스>는 전 세계 수많은 극단에 의해 연극은 물론 오페라, 영화에 이르기까지 다
양한 버전의 해석으로 잘 알려진 고전이다. 중세 스코틀랜드의 왕 던컨(Duncan)의
사촌이자 많은 전투에서 혁혁한 공을 쌓은 장군 맥베스의 실화를 바탕으로 셰익스피
어가 그려낸 이 매혹적인 스토리는 괴물처럼 뻗어 나가는 욕망에 모든 운명을 내건
한 남자를 중심으로 그 욕망 뒤에 숨은 나약함과 두려움, 죄의식과 양심의 가책이라
는 인간 본성을 여실히 드러낸다.
전쟁에서 돌아오던 중, 장차 스코틀랜드의 왕이 될 것이라는 세 마녀의 예언을 듣고
야망을 품은 맥베스와 그런 그를 부추기는 맥베스 부인(Lady Macbeth), 그는 결
국 덩컨을 살해하고 왕위에 오르지만, 그 자리를 지키기 위해 폭군으로 전락한다.
동료 장군이었던 뱅코(Banquo)의 아들이 훗날 왕위를 차지할 것이라는 마녀의 예
언을 믿은 그는 뱅코 일가를 살해할 것을 명령하고, 왕자와 함께 영국으로 망명한
귀족 맥더프(Macduff)를 대신하여 남아 있는 그의 가족을 몰살하기에 이른다. 그
러나 마음속을 짓누르는 죄의식과 공포는 맥베스와 그의 부인을 불면과 몽유병의
밤으로 이끌고, 결국 레이디 맥베스는 자살로 생을 마무리한다. 두 번째로 모습을
드러낸 마녀들로부터 자신의 미래에 대한 예언을 부탁한 맥베스는 본인에게 유리한
대로 예언을 해석하여 자신만만해하지만, 왕자 맬컴(Malcom)이 이끄는 반란군은
버남 숲의 나뭇가지로 위장한 채 성으로 진입하는 데 성공하고, 맥베스는 제왕절개
를 통해 어머니의 배를 가르고 나온 맥더프(Macduff)에 의해 검은 욕망의 끈을 마
침내 내려놓게 된다.
셰익스피어의 고전 중에서도 특히, <맥베스>가 지금까지도 사랑을 받는 이유는 절대
적인 선과 악의 대립이 아닌, 각 인물 내면에 존재하는 모순적인 가치의 충돌이 인물
간의 갈등을 심화시키는 작품의 ‘현대성’ 때문일 것이다. 이와 함께 마녀들의 등장과
유령의 환상 같은 판타지적인 요소가 역사적인 사실에 극적 긴장감을 불어넣어 주며
극의 리듬을 보다 생동감 있게 살려준다. 이처럼 <맥베스>에는 셰익스피어 작품만의
문학적 특성이 고스란히 드러나는 동시에 인간 본성에 관한 날카로운 통찰이 빛나고
있다.
셰익스피어 초상화와 아리안 므누슈킨
Michèle Laurent
PARIS - 태양 극단의 신작으로 만나는 윌리엄 셰익스피어의 <맥베스>
셰익스피어와 태양 극단,
정교한 무대, 특별한 감동이 온다
프랑스 연극계의 살아 있는 전설, 아리안 므누슈킨(Ariane Mnouchkine)이 이끄는
태양 극단이 올해 창립 50주년을 맞아 셰익스피어의 비극 중 하나인 <맥베스>를 무대에 올렸다.
번역과 각색, 연출을 맡은 75세의 아리안 므누슈킨과 40여 명의 배우는
셰익스피어를 향한 한 편의 웅장한 오마주를 통해 50년 태양 극단의 발자취와
그 속에 녹아 있는 뜨거운 예술혼을 그대로 전해주었다.
삶과 예술을 하나로, 아리안 므누슈킨이 이끄는 ‘연극 공동체’
프랑스 현대 연극의 신화, 태양 극단을 이끌고 있는 아리안 므누슈킨(Ariane
Mnouchkine)은 러시아 출신의 영화 제작자 알렉산드르 므누슈킨(Alexandre
Mnouchkine)의 딸로 1939년 파리 근교에서 태어났다. 1964년 소르본 대학 학생
들을 중심으로 결성된 ‘파리 대학 연극회(ATEP)’에서 만난 동료들과 함께 태양 극
단 설립하고 본격적인 활동을 시작한다. 1970년 첫 작품 <1978>을 선보인 직후, 파
리 입구의 방센 숲(le bois de Vincennes)에 방치되어 있던 군사 시설인 ‘까르투슈
리(Cartoucherie, 탄약 제조소)’에 터전을 본격적으로 마련한다. 작품 제작 전반을
모두 담당할 수 있는 일종의 제작소이자 단원들이 삶을 꾸려나가는 안식처로 사용되
는 이곳에서 태양 극단은 대중을 위한 수준 높은 연극 공연을 제작하기 위한 구체적인
노하우를 다져나간다. 이렇듯, 독자적인 노선 위에서 첫발을 내디딘 태양극단은 이미
1970년대부터 프랑스를 대표하는 현대 극단으로 알려지면서 국내외적 명성을 쌓기
34 ArtsHolic
July · August 35
Macbeth
시작한다. 프랑스의 68 문화 혁명 세대였던 태양 극단의 창립 멤버들은 부르주아적
인 기존 연극을 지양하는 동시에 관객과의 인간적인 연대를 바탕으로 뛰어난 예술적
완성도가 있는 작품을 창작하고자 했다. 이를 위하여 태양 극단은 마치 하나의 가족과
도 같은 ‘연극 공동체’로 운영되며, 므누슈킨이 세운 몇 가지 공동 기본 방침은 지금까
지도 이어지고 있다. 즉, 태양 극단의 단원은 모두 같은 급여를 받으며, 오디션이나 공
연시에 관객 입장 관리 등 극장 운영에 관련한 일을 맡는다는 원칙이 그것이다. 현재
유럽에 남아 있는 유일한 연극 공동체인 태양 극단은 가장 현대적인 ‘공동 연극 집단’
모델로 평가받고 있다.
올해 탄생 50주년을 맞이한 태양 극단은 발표하는 작품들을 통하여 연극 작업 과정
에서의 역할 분담, 연극의 예술적・사회적 위치, 그리고 ‘연극이 현재를 어떻게 재현
태양 극단은 <맥베스>의 줄거리와 구성,
할 수 있는가’에 대한 질문을 한결같이 던진다. 공동 창작으로 완성된 초창기 작품
<1789>와 <황금시대 l’âge d’or>를 통해 그 가능성을 보여준 태양 극단은 1980년대
대사를 거의 그대로 재현하는 대신에,
초에 선보였던 셰익스피어 연작(<리처드 3세, Richard III(1981)>, <십이야, Twelfth
의상과 미장센에 현대성을 부여하였다.
Night(1982)>, <헨리 4세 1부, Henry IV, Part 1(1884)> 이후 33년 만에 다시 셰익스
피어의 작품인 <맥베스>를 무대 위에 선보이게 되었다.
전쟁을 승리로 이끈 맥베스 장군을 둘러싼 뜨거운 취재 열기.
Michèle Laurent
일상의 연장선에서 만나는 특별한 세계
평 서적들이 또 다른 방식으로 태양 극단의 세계를 접할 기회를
때마다 배우들에 의해 일사불란하게 이루어지는 무대 전환은 대
파리 메트로 1호선 종점인 뱅센 공원 역에 내리면 빈티지한 멋이 물씬 풍기는 흰색 셔
선사한다. 셰익스피어가 그려낸 <맥베스>의 세계의 도입부이자,
단히 인상적인데, 작은 소품까지 살아 있는 디테일한 무대 장치
틀버스가 까르투슈리를 방문할 관객들을 기다리고 있다. 버스로 5분 남짓, 건초 내음
태양 극단의 예술적 모토가 그대로 묻어 있는 이 메인홀에서 관
는 극을 더욱 사실적으로 만들어주는 역할을 한다. 이와 더불어,
이 물씬 풍기는 이곳이 태양 극단을 비롯한 네 개의 다른 극단들이 자리하고 있는 까
객들은 저마다의 방식으로 그 분위기를 만끽하며 공연을 기다리
장면마다 각자 그 배경이 되는 역할을 충실하게 연기하는 배우
르투슈리의 입구이다. 잔디밭을 가로질러 들어가면 기다란 나무 테이블에 나란히 앉
는 모습이었다.
들 덕분에 마치 고전 명화를 보는 것처럼 정교한 무대 구성과 현
장감 넘치는 풍성한 볼거리를 만나게 된다.
아 태양 극단이 마련한 유기농 음식을 먹으며 공연을 기다리는 관객들이 눈에 들어온
이렇듯, 아리안 므누스킨과 태양 극단 단원들의 환상적인 호흡
다. 마치 늦은 오후의 피크닉에 참석한 듯, 즐거움으로 한껏 상기된 관객 사이를 지나
태양 극단이 자리한 까르투슈리 전경
극장 입구로 들어서는 순간, 짧은 탄성이 저절로 터져 나온다. 정면에서 관객을 맞이
정교한 미장센에서 빛나는 <맥베스>의 현대적 해석
이 펼쳐내는 셰익스피어의 <맥베스>는 다소 문학적인 대사와 4
하는 셰익스피어의 대형 초상화와 웅장한 분위기의 탁 트인 홀, 그리고 양쪽 벽에 걸
공연 시간이 다가오자 홀의 조명이 점점 어두워지며 깜박거리기
시간 30분의 런타임에도 불구하고 지루할 틈 없이 박진감 있게
려있는 맥베스를 주제로 한 명화에서부터 전 세계에서 상연되었던 맥베스 공연 포스
시작했다. 흩어져 있는 관객들이 차례로 극장 안으로 입장하는
진행되었다. 공연이 끝난 후, 그들의 뜨거운 에너지를 향해 관객
터들이 시선을 압도하기 때문이다. 홀 한가운데에 이리저리 놓인 테이블들 곁에 위치
사이 무대 위에서는 열다섯 남짓의 배우들이 원을 돌며 뛰어다
들은 더 뜨거운 박수갈채를 보냈다. 관객석에서 출입구로 이어
한 바에서는 공연 시작 전과 휴식 시간에 맞추어 음식과 음료를 판매하고 있다. 태양
니고 있고, 무대 오른쪽에 마련된 공간에는 오랜 세월 태양 극단
지는 계단을 내려가는 동안 직접 볼 수 있도록 디자인된 분장실
극단이 정성껏 준비한 소박한 건강식 메뉴는 인간적인 대화와 온화한 미소가 가득한
의 음악을 맡아 온 장 자크 르메트르(Jean-Jacques Lemêtre)
과 의상실, 소품실은 무대 위의 모습뿐만 아니라 무대 뒤의 삶까
서비스와 함께 제공된다. 이와 더불어 입구 쪽에 마련된 작은 서점 코너에서는, 아리
가 북을 두드리며 장엄하면서도 긴박한 분위기를 자아낸다. 드
지도 작품 일부분이라는 태양 극단의 정신을 드러내며 긴 감동
안 므누슈킨이 직접 번역한 맥베스 극본을 비롯하여 태양 극단의 카탈로그와 작품 비
디어 <맥베스>의 막이 열리고, 맥베스의 승전 소식을 듣는 군인
의 여운을 남겼다.
들의 장면으로 극이 시작된다. 2차대전 시대를 연상시키는 군
태양 극단에서의 어느 저녁, 그것은 단순히 관람에만 그치는
복을 입은 군인들에 이어서 농민 복장을 한 다소 거친 말투의 세
연극에서 나아가 창작 과정에서부터 예술가들의 삶까지 그 모
마녀가 맥베스에게 예언을 남기고 사라지며 극은 하이라이트를
두를 경험하고 교감을 나누는 시간이다. 그러나 그 시간은 특
향해 서서히 달아오른다.
별하게 주어지는 것이 아니라, 먹고 마시고 이야기하는 일상의
태양 극단은 <맥베스>의 줄거리와 구성, 대사를 거의 그대로 재
연장선에서 즐기듯이 다가오는 것이다. 바로 이것이 아리안 므
현하는 대신에, 의상과 미장센에 현대성을 부여하였다. 모던한
누슈킨과 태양 극단이 관객들과 나누고 싶은 진정한 예술의 세
양복과 드레스를 입은 인물들과 헬리콥터, TV 등의 소품과 함께
계이다.
카메라와 마이크를 들고 왕족 일가를 따라다니며 뜨거운 취재
열기를 펼치는 기자들이나 마녀들이 건넨 노트북을 통해 자신의
미래를 들여보는 맥베스의 모습에서 태양 극단이 풍자적으로 그
려내는 현대 사회의 단편을 엿볼 수 있다. 특히, 매 장면이 바뀔
시원 약력
파리1대학 조형예술학과 석사.
다수의 전시 및 공간연출 그래픽디자인, 사진, 의상 작업 참여
July · August 37
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