DEBLOCK.E- ETH R17- Réhabilitation des quartiers spontanés : approches anthropologiques
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Face à l'affluence de la population dans les villes et à l'incapacité des autorités de
fournir un accès au logement pour les plus pauvres, on observe une « taudification » de
l'habitat urbain, et souvent c'est une forme particulière d'habitat qui se développe, que l'on
connait « bien » aujourd'hui: le quartier spontané, dénomination cachant plusieurs réalités,
mais souvent désignées sous le nom englobant et stigmatisant de « bidonville »; celui-ci peut
avant tout se définir par la précarité des installations, aussi bien en terme de bâti que de
légalité, les modes d'appropriation ou de lotissement du sol échappant la plupart du temps au
monde légal. Nous chercherons au cours de notre réflexion à décrire et comprendre les réalités
complexes qui constituent ces quartiers. Toujours est-il que ces quartiers spontanés font l'objet
de diverses politiques, programmes et plans d' « intégration » (suite à une période qui a
privilégié les « déguerpissements » et expulsions), qui procèdent globalement de deux
logiques différentes mais souvent complémentaires (N. Mathieu, 1997 ; § 13):
-On peut chercher à intégrer un quartier par une approche sociale, qui se caractérise par une
volonté d'intégration des individus et des groupes à la vie économique, culturelle et sociale;
c'est notamment le travail des associations de quartier, des assistantes sociales, etc.
-On peut d'un autre côté travailler depuis une approche urbanistique, où l'on recherche non-
plus l'intégration de l'individu, mais du quartier identifié par sa structure, ses besoins en
services de base (eau, électricité, assainissement...), son agencement, son accessibilité, son
architecture, ses espaces publics...
C'est sur cette dernière façon de penser l'intégration que nous allons nous interroger. Il
nous semble effectivement intéressant de nous pencher sur cette question, qui relève se place
à la charnière de la recherche et du développement. C‟est le rapport entre transformation des
formes et transformation sociale qui nous intéressera, celui-ci étant étudié de manière
fondamentale mais peu (pas ?) réinvestit dans les opérations d‟aménagement et d‟habilitation.
Un questionnement rapproche couramment sciences sociales et urbanisme autour du
paradigme de la ségrégation: s‟y rejoignent le territoire, la forme et l'exclusion. Comme nous
le verrons, on peut plus ou moins dater la première recherche sur la ségrégation urbaine aux
travaux réalisés de l'Ecole de Chicago, portant sur l'articulation socio-spatiale des quartiers
dans cette même ville. Si ces travaux font encore aujourd'hui référence, il nous semble que si
la prospective urbaine veut prendre un réel tournant qualitatif, l'anthropologie, et notamment
l'anthropologie de l'espace et de l'habitat, apportent un éclairage fondamental, en se
rapprochant du quartier, à l'opposée d'une conception englobante et spatialisante telle qu'elle
est généralement appliquée dans les plans d'aménagement et/ou d‟habilitation. En nous
rapprochant des habitants, de leur façon d'occuper l'espace et de proprement vivre cette ville
en marge, nous accédons à un degré de compréhension qui fournit des clés pour l'action et le