MICROECONOMIE - 2ème année de Sciences-Economiques Chapitre IV - Les défaillances du marché III. Les biens publics On va étudier la propriété de non-rivalité : les biens publics font l'objet d'une consommation collective : Justice, éclairage urbain, démocratie… Il n'existe donc pas de marchés pour ces biens car on ne peut pas faire payer à chaque utilisateur la part qu'il consomme. Ici, on suppose qu'il n'y a pas d'Etat : on ne paie pas les biens publics. On va montrer qu'en présence de biens publics, l'ECG n'est plus optimal au sens de Pareto. A/. Optimum et équilibre concurrentiel avec des biens publics La présence de biens publics engendre 2 types de modifications. 1) changements sur les conditions d'équilibre du marché m Pour un bien privé (noté i) : ∑x c i = qi avec xic : la somme des consommations c= i c 1 Pour un bien public (noté 1) : x = x1 = q1 ici, chacun des agents consomme la même quantité du bien public. Remarque : les biens publics peuvent être des biens publics de production ou de consommation ; ici, on ne considère que les biens publics de consommation. 2) changements sur les fonctions d'utilité On va avoir U( x1 ,x 2c ,x 3c ...x cn ) . On n'indice pas la quantité consommée d'Alice par c car elle consomme toute la quantité de bien 1. --[30/03/2001] Modélisation : on a 1 seul producteur, 2 consommateurs et 3 biens (2 privés et 1 public). La fonction de production s'écrit : F(q1 ,z2 ,z3 ) = 0 avec q1 : l'output et z2 ,z3 à la fois input et output La fonction d'utilité s'écrit : Uc (x1 , x c2 , x c3 ) Les conditions d'équilibre sont : x1 = q1 ; x2a + x 2b = z2 et x 3a + x b3 = z3 --Le problème est de Max Ua sous Ub = U F x1 = q ∑x2 = z2 ∑x3 = z3 Le Lagrangien associé à ce problème s'écrit : L(x1 , x a2 , x3a , x1b , x2b , q1 ,z2 , z3 ,λ a ,λ b ,λ1 ,λ 2 , λ3 ) = U a ( x1 , x a2 , x3a ) + λ a F (q1 , z2 ,z3 ) [ + λb U b (x1 , x b2 , x3b ) − U b © Notes de cours F.Géraud sur le cours de microéconomie de Ph.Darreau 2000-2001 ] Page 97 + λ1 ( x1 − q1 ) + λ2 ( x2a + x2b − z2 ) + λ3 (x 3a + x b3 − z3 ) ∂L ∂U a ∂U b (1) = + λb + λ1 = 0 ∂x1 ∂x1 ∂x1 (2) ∂L ∂U a = + λ2 = 0 ∂x a2 ∂x 2a (3) ∂L ∂U a = + λ3 = 0 ∂x 3a ∂x3a (4) ∂L ∂U b = λ + λ2 = 0 b ∂x1b ∂x2b (5) ∂L ∂U b = λ + λ3 = 0 b ∂x2b ∂x3b (6) ∂L ∂F = λ0 − λ1 = 0 ∂q1 ∂q1 (7) ∂L ∂F = λ0 − λ2 = 0 ∂z2 ∂z2 (8) ∂L ∂F = λ0 − λ3 = 0 ∂z3 ∂z3 sous réserve d'erreurs ** TMS et TTP entre biens privés (2) (4) (7) λ 2 , , = (3) (3) (8) λ3 ∂U a On obtient ∂U ∂x a 2 a ∂x 3a ∂U b = ∂U ∂x 2b b ∂F = ∂x 3b ∂F ∂z2 d'où ∂z3 TMS23a = TMS23b = TTP23 ** TMS et TTP entre un bien public et un bien privé ∂U a ∂U (1) λ1 ∂x1a λ b ∂x1 ⇒ = + a a ∂U (2) λ 2 ∂U ∂x2a ∂x 2a ∂F (6) λ1 ∂q1 ⇒ = = TTP (7) λ 2 ∂F ∂z2 ∂Ua λ ∂Ub (4) et (2) ⇒ a = b b ∂x 2 ∂x 2 b © Notes de cours F.Géraud sur le cours de microéconomie de Ph.Darreau 2000-2001 Page 98 ∂U a ∂U ∂x1 a ∂x 2a ∂U b + ∂U ∂x1 b ∂F = ∂x 2b m ∑ TMS c =1 c bien public/bien privé ∂F ∂q1 ∂z2 TMS12a + TMS12b = TTP12optimal = TTPbien public/bien privé ** à l'équilibre concurrentiel c EC TTPbien = TTPbien public/bien privé public/bien privé Exemple : on suppose que tous les agents sont identiques et qu'ils sont d'accord pour donner 5F pour l'acaht d'une pomme. Consommation privée : pour produire une pomme, les producteurs consacrent 5F ; d'où TMS pomme/monnaie = 5 = TTP Consommation publique : avec le bien Justice, par exemple, tous les Français "mettent" 500F. En concurrence, le producteur dépenserait 500F. Ici, TTP = 60 000 000 * 5. Comment résoudre le problème ? (on est toujours dans un pays sans Etat). Il existe 2 solutions : ** une passe par le marché : on décentralise, ** l'autre passe par l'Etat : on centralise. B/. Le pseudo équilibre de LINDHAL (1919) Hypothèse : supposons que chaque agent annonce sa disponibilité à payer le bien public, la valeur qu'il y attache. Ici, les agents n'ont pas le même goût : certains donneront 100F, d'autres 500F ou plus… Le prix d'achat du bien public est noté p1c ( p1a , p1b ...) . Le producteur va vendre le bien public à chaque m agent, au même prix ; ce prix de vente est noté p1a + p1b + ... = ∑ p1c . c =1 © Notes de cours F.Géraud sur le cours de microéconomie de Ph.Darreau 2000-2001 Page 99 Calculons l'équilibre général Problème du consommateur : Max U c ( x1 , x2c , x3c ) c c c sous p1 x1 + p2 x 2 + p3 x3 = ω La condition du 1er ordre est TMS12c = Problème du producteur : p1c p2 m Max π = ∑ p1c q1 + p2 z2 + p3 z3 c=1 sous F (q1, z2 ,z3 ) = 0 m ∑p c 1 La condition du 1er ordre est TTP12 = c=1 p2 m Le pseudo équilibre de LINDHAL s'écrit ∑ TMS c = TTP12 c =1 Conclusion : on a retrouvé la condition d'optimalité ; le pseudo équilibre de LINDHAL est OP. --Remarque : ** pour la demande des biens publics : la demande globale s'obtient en agrégant horizontalement les demandes individuelles sur le graphique. ** pour la demande de biens privés : la demande globale s'obtient en agrégant verticalement les demandes individuelles sur le graphique (illustration ci-après). © Notes de cours F.Géraud sur le cours de microéconomie de Ph.Darreau 2000-2001 Page 100 C/. Le problème du free-rider, du passager clandestin Il s'agit d'une critique de l'hypothèse de LINDHAL. Ici, l'équilibre n'est pas possible car les agents sont rationnels (rationalité du folklore) : ils vont se conduire comme des passagers clandestins ; quoiqu'il en soit, les agents auront des biens publics. D/. La révélation des disponibilités à payer p1c ⇒ t1c (TAXE), on introduit l'Etat. Comment faire parler les gens ? leur faire dire la vérité ? ** dans la Bible, c'est le Jugement de Salomon qui permet de révéler la vérité. ** l'enchère de Vickrey (Prix Nobel 1961) : on veut connaître la valeur de la Joconde ; c'est-à-dire ce que chacun est prêt à payer. Individu A : 10 000F Individu B : 5000F 5001F (on ne saura pas que A était prêt à donner 10 000F) Individu C : 3000F On préfère que chacun des agents remettent secrètement un pli cacheté au commissaire priseur indiquant la valeur estimée du tableau. Celui qui donne le plus obtient l'objet mais il n'aura à payer que le 2ème prix (on apprend alors ce que cet individu était prêt à donner). © Notes de cours F.Géraud sur le cours de microéconomie de Ph.Darreau 2000-2001 Page 101 ** Stratégie dominante (concept de théorie des jeux) : "la meilleure chose que vous avez à faire quoi que fassent les autres". C'est sur cette base que GROVES en 1975 a travaillé : chacun envoie à l'Etat la somme qu'il est prêt à donner pour financer les biens publics en sachant qu'il n'aura à payer qu'une taxe (notée ta ). L'Etat produira la quantité de biens publics qui maximise l'utilité de l'agent (si celui-ci indique sa variable de choix). Il existe des procédures qui permettent de financer au plus juste les biens publics mais en réalité l'impôt n'est pas personnalisé, il n'est pas optimal. --- Conclusion sur les biens publics. S'ouvre ici le domaine de l'économie publique traitant de la fiscalité optimale, de la révélation des préférences… (DEA Toulouse). On voulait dire que l'équilibre concurrentiel n'est plus optimal en présence de biens publics ; la situation centralisée est meilleure (intervention de l'Etat) mais se pose la question du financement optimal, de la quantité optimale produite de biens publics. On cherchera donc les procédures les moins mauvaises possibles. © Notes de cours F.Géraud sur le cours de microéconomie de Ph.Darreau 2000-2001 Page 102