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VENDREDI 14 OCTOBRE
uotidien
Le
Q
des Journées Francophones de Radiologie
La thrombectomie mécanique : un virage à ne pas manquer
Olivier Naggara1, Frédéric Clarençon2, Apolline Kazemi3, René Anxionnat4, Alexandre Krainik5, Hubert Desal6
1. Hôpital Sainte-Anne, Paris. 2. Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris. 3. CHU Lille. 4. CHU Nancy. 5. CHU Grenoble.
6. CHU Nantes
L’accident vasculaire cérébral ischémique (AVCI)
est l’une des trois premières causes de mortalité en
France, la seconde cause de démence et la première
cause de handicap. Début 2015, plusieurs études in-
ternationales, européennes et nord-américaines ont
montré, avec un haut niveau de preuve, le bénéce
apporté par la thrombectomie mécanique (TM) dans
l’AVCI. En effet, une évolution clinique favorable est
plus fréquente pour les patients qui ont eu une TM en
plus de la thrombolyse intraveineuse (TIV), par com-
paraison à ceux chez qui seule une TIV a été réali-
sée. La TM doit être proposée dans les six premières
heures après l’apparition du décit neurologique,
chez un patient dont l’imagerie a démontré d’une part
la présence d’une ischémie cérébrale, et d’autre part
une occlusion intracrânienne proximale de la circula-
tion antérieure (terminaison carotide, segment M1 de
l’artère cérébrale moyenne).
Dans les années 90, le traitement des AVCI a bénécié
d’une première révolution avec la démonstration de
l’efcacité de la TIV, administrée dans les premières 4h30
suivant le début des symptômes. Du fait d’une longue
liste de contre-indications à la TIV et de la démonstration
d’un bénéce clinique à recanaliser une artère occluse,
le traitement intra-artériel est apparu progressivement,
avec une efcacité angiographique (recanalisation
artérielle) et clinique variable. Plus récemment, le
développement d’outils dédiés au traitement intra-artériel,
tels que les « stent-retrievers », a permis de progresser
en termes d’efcacité angiographique. L’étude prospective,
randomisée multicentrique « Mr CLEAN » a inclus 500
patients néerlandais et montré qu’en cas d’AVC avec
occlusion artérielle proximale, la récupération clinique à 3
mois était plus fréquente lorsque les patients avaient une
TM en plus du traitement de référence (32.6% vs. 19.1%)1.
Selon cette étude, le nombre de patients à traiter par TM
pour obtenir un patient autonome est de 7. Dans les mois
qui ont suivi, 4 études2-5 sont parues dans le New England
Journal of Medicine (ESCAPE-Canada, EXTEND-IA
Australie, SWIFT PRIME-USA, et REVASCAT-Espagne),
conrmant toutes que la réalisation d’une TM améliorait le
pronostic fonctionnel des patients à 3 mois. Ce bénéce est
conrmé par l’essai Français THRACE (THRombectomie
des Artères CErébrales, 414 patients, 26 centres), dont
les résultats publiés le 22 août dernier, montrent une
évolution clinique plus souvent favorable en cas de TM6.
La thrombectomie mécanique est un geste de
neuroradiologie interventionnelle (NRI), permettant
le retrait du thrombus obstructif au sein d’une artère
intracrânienne, par l’utilisation de cathéters et de systèmes
de désobstruction spéciques, sous contrôle radioscopique,
Editorial
Yves Menu1, Jean-François Meder2
1. Président des JFR. 2. Président de la SFR
Bienvenue !
Comme tous les ans, les JFR sont le rendez-vous de toute
la radiologie française et francophone. Vous appréciez
l’offre abondante des JFR en termes de formation conti-
nue, mais vous plébiscitez aussi le forum scientique, qui
conrme les capacités d’innovation de notre communauté.
Cette année, l’accent est mis sur deux thèmes en particu-
lier : le suivi oncologique et l’imagerie du sportif. Le patient
oncologique bénécie de progrès diagnostiques et théra-
peutiques incessants, mais nécessite un suivi toujours plus
soutenu : pour le radiologue, il est impératif de suivre de
près l’évolution très rapide des connaissances pour être
un maillon-clé dans la chaîne du réseau de soins. Le par-
cours thématique des JFR fournira toutes les armes utiles
à une optimisation de la pratique oncologique. Le sportif
de haut niveau est également un client dèle de l’image-
rie. Toutefois, l’imagerie du sport ne concerne pas que les
grands noms : elle concerne aussi les nombreux sportifs
plus occasionnels. Ces derniers attendent de notre part la
même réactivité et la meilleure compétence possible, et ils
ont raison.
La conférence Antoine Béclère invitera le Pr Agnès Buzyn,
présidente du Collège de la HAS, à s’exprimer sur les pro-
jets de tutelle pour l’amélioration de la prise en charge des
patients. Nous aurons l’occasion de vérier que notre rôle
majeur auprès du patient est bien compris des tutelles, et
de témoigner de nos réalisations, depuis la radioprotection
jusqu’à la décision médicale.
Nous avons l’honneur d’accueillir cette année deux socié-
tés amies : celles de Corée du Sud et de Belgique. La
SFR entretient avec elles des rapports très étroits et nous
sommes heureux de cette reconnaissance plus ofcielle,
qui devrait encore renforcer la réalisation de projets com-
muns.
Le Syllabus 2016 porte sur l’imagerie gynécologique. C’est
l’occasion pour chacun de se remettre à niveau d’une
façon exhaustive, tout en bénéciant du support écrit des
cours, coordonnés par le Pr Isabelle Thomassin-Naggara.
Encore deux remarques importantes :
Les JFR restent les JFR, mais le mot « Francophones »
remplace le mot « Françaises ». Qu’est-ce que cela signie ?
Tout simplement la reconnaissance du rôle de ces
nombreux collègues et amis, unis dans une communauté
scientique et culturelle à laquelle ils participent en
l’enrichissant de façon considérable. Plus encore, nous
souhaitons accueillir, comme depuis déjà de nombreuses
années, des contributions qui ne peuvent pas s’exprimer
en français, mais en anglais. Ces contributions participent
encore plus à l’audience internationale des JFR, soulignant
leur capacité d’accueil, d’écoute et de partage.
• Une deuxième remarque concerne le développement
des communications en ligne : en effet, pourquoi bouger
quand l’enseignement peut voyager électroniquement ? La
SFR met depuis longtemps des ressources pédagogiques
en ligne, et cela ne fera que s’amplier. Mais inversement,
le virtuel ne remplace pas les avantages du présentiel.
L’alchimie des rapports humains permet la confrontation
directe des idées, et surtout entretient la vie amicale et fra-
ternelle d’une communauté qui a toujours su se retrouver
dans une solidarité exemplaire.
Pour toutes ces raisons, et au nom de tous ceux qui ont
œuvré pour que ces JFR soient inoubliables, je serai extrê-
mement heureux de vous y accueillir.
Soyez les bienvenus !
1
Fig. 1. Patiente âgée de 58 ans, décit neurologique brutal depuis 1h30. Mutisme, décit hémi-corporel droit. NIHSS = 15. Hypersignal en diffusion
dans le territoire sylvien profond gauche et occlusion de l’artère cérébrale moyenne gauche en ARM (médaillon) et en artériographie (A). Recanalisa-
tion complète par thrombo-aspiration (B).
Suite page 2
2
Suite de la page 1
par abord artériel fémoral (Fig. 1). Les systèmes qui ont fait leurs
preuves sont le « stent-retriever » et plus récemment la thrombo-
aspiration. La technique « stent-retriever » consiste à déployer un
stent au sein du thrombus qui, piégé dans les mailles, peut ensuite
être retiré.
Le taux de recanalisation atteint 90 % dans les équipes les plus
entraînées, ce qui souligne la nécessité de réaliser la TM dans des
centres experts. Une évaluation médico-économique est mainte-
nant attendue et sera apportée par l’essai français THRACE.
Les résultats concordants de ces essais 2015 et 2016 apportent
un certain nombre de modications à notre prise en charge radiolo-
gique. Tout d’abord, il existe un élargissement de la « fenêtre théra-
peutique ». Si la TIV doit toujours être administrée impérativement
dans les premières 4h30 (recommandation 1A), la TM peut quant
à elle être proposée jusqu’à 6 heures (recommandation 1A). L’ini-
tiation de la TIV ne doit pas retarder celle de la TM et inversement.
Il faut donc rester mobilisés en cas de patient présentant un décit
neurologique depuis plus de 4h30. L’imagerie est bien requise en
urgence extrême, tant que l’on est dans la limite des six premières
heures après l’apparition des symptômes. Par ailleurs, la visualisa-
tion du site de l’occlusion artérielle est désormais indispensable. En
effet, la démonstration d’une occlusion proximale fait poser l’indi-
cation de TM, qu’une TIV soit possible ou non (recommandation
1A). Outre le scanner cérébral sans injection ou la séquence de
diffusion, la réalisation d’un angioscanner/d’une ARM du polygone
de Willis est indispensable (recommandation niveau 1A). Sa non-
réalisation peut entraîner une perte de chance pour le patient.
Ces nouvelles recommandations peuvent poser plusieurs difcul-
tés. La pénurie de médecins radiologues dans certains territoires
pour assurer la permanence des soins est certainement la pre-
mière d’entre elles. Le déploiement de la téléradiologie et de la
télé-expertise (transfert de l’imagerie vers le centre assurant la
TM) doit permettre de pallier au moins en partie cette difculté.
Dans d’autres territoires, la permanence des soins de radiologie
est assurée en astreinte à domicile. Ceci peut poser la question
théorique de la responsabilité de l’injection du produit de contraste
pour l’angioscanner, en l’absence physique du radiologue. Cette
difculté n’en est en réalité pas une : le manipulateur travaille sous
la responsabilité d’un médecin qui pourra être, le cas échéant, le
confrère urgentiste ou neurologue sur place, en charge du patient.
Enn, l’évolution du traitement de référence de l’AVC ischémique
doit conduire à renforcer les équipes de NRI, an de pouvoir pro-
poser effectivement cette avancée médicale à la population. Selon
une enquête de la Société Française de Neuroradiologie (SFNR)
(http://www.sfnr.net/neuroradiologie-quotidien/thrombectomie/etat-
lieux-carte-interactive), le nombre de TM a augmenté de 140%
en 2015, avec près de 2900 TM. Cette activité devrait continuer à
progresser dans les prochaines années avec une meilleure infor-
mation des patients et des médecins sur les signes diagnostiques
précoces de l’AVCI, une meilleure structuration de la lière AVC
avec un transfert plus rapide vers les UNV et les centres de NRI.
On envisage que le nombre de TM, une fois les réseaux organisés,
sera d’environ 120 TM/million d’habitants, soit entre 8 et 10000 TM/
an en France. Le renforcement de la NRI doit donc concerner à la
fois le matériel (une table de NRI disponible rapidement, sans obs-
tacle liée à l’activité programmée) et l’augmentation du nombre de
praticiens de NRI formés selon les exigences du décret de forma-
tion, an d’assurer la permanence des soins sur la totalité du ter-
ritoire. Selon l’enquête de la SFNR, 37 centres de neuroradiologie
interventionnelle associés à une UNV de référence ont pratiqué la
TM en 2015. Ces centres accueillent également des patients trans-
férés par l’une des 95 UNV de proximité, dont 94% sont situées à
moins de 1h30 par transport routier. Dans l’ensemble, si la cou-
verture territoriale est excellente, il est indispensable de renforcer
les centres de NRI existants tout en préparant l’avenir an de faire
face à l’augmentation de l’activité dans les meilleures conditions.
C’est une condition indispensable an que le développement du
traitement des AVC ischémiques en NRI puisse être protable à
la population et ne mette pas en péril d’autres lières de prise en
charge, comme celle des AVC hémorragiques, dans laquelle le rôle
de la NRI est central (embolisation des malformations vasculaires
crâniennes). Enn, améliorer la visibilité de notre spécialité auprès
des plus jeunes (externat, postes échés d’internes) ainsi que son
attractivité (postes de chef de clinique, valorisation de la perma-
nence des soins) est indispensable à la formation des neuroradio-
logues de demain.
Références
1. Berkhemer OA, Fransen PSS, Beumer D, et al. A randomized trial of intraarte-
rial treatment for acute ischemic stroke. N Engl J Med 2015 ;371:11-20.
2. Campbell BCV, Mitchell PJ, Kleinig TJ, et al. Endovascular therapy for ischemic
stroke with perfusion-imaging selection. N Engl J Med 2015 ;372:1009-18.
3. Goyal M, Demchuk AM, Menon BK, et al. Randomized assessment of rapid endo-
vascular treatment of ischemic stroke. N Engl J Med 2015; 372:1019-30.
4. Saver JL, Goyal M, Bonafe A, et al. Stent-retriever thrombectomy after intrave-
nous t-PA vs. t-PA alone in stroke. N Engl J Med 2015; 372:2285-95.
5. Jovin TG, Chamorro A, Cobo E, et al. Thrombectomy within 8 hours after symp-
tom onset in ischemic stroke. N Engl J Med 2015;372: 2296-306
6. Bracard S, Ducrocq X, Mas JL, et al. THRACE investigators. Mechanical throm-
bectomy after intravenous alteplase versus alteplase alone after stroke (THRACE):
a randomised controlled trial. Lancet Neurol. 2016 Aug 23.
Sommaire
La thrombectomie mécanique :
un virage à ne pas manquer 1
Apports des nouvelles méthodes
de diminution de la dose en scanner
abdominal 3
Mise à jour des modalités de renouvellement
de la compétence en radioprotection
des patients 4
L’IRM du parenchyme pulmonaire :
une option aujourd’hui réaliste 5
Les traumatismes orthopédiques
pédiatriques en urgence 6
Évaluation de la réponse tumorale
en imagerie 7
Où en est-on de la tolérance et la toxicité
des chélates de gadolinium en IRM ? 8
Du prix SFR au PHRIP : Hycorema,
un projet de recherche paramédicale 9
Programme du jour 10
Traitement mini-invasif des varices des
membres inférieurs (radiofréquence, laser,
encollage) : un nouveau terrain de jeu
pour le radiologue interventionnel ? 12
Qualité en radiologie interventionnelle 13
La Corée du Sud, locomotive des
technologies de santé - Partie 1 15
Prix des JFR 16
Plan du congrès 18
Cas du jour 20
VENDREDI 14 OCTOBRE 2016
JFR.RADIOLOGIE.FR
uotidien
Le
des Journées Francophones de Radiologie
En savoir
Séance scientique
Neuroradiologie
interventionnelle
14h00 - 15h30
Salle 351 Vri
Recommandations de la Société Française de Neuroradiologie
Recommandations thérapeutiques
La thrombectomie mécanique (TM) est recommandée à la phase aiguë dans le traitement de l’AVC jusqu’à 6 heures après le -
but des symptômes chez les patients qui présentent une occlusion proximale des artères cérébrales (OPAC) (carotide, cérébrale
moyenne, tronc basilaire) (Grade A, Niveau 1a).
La TM est réalisée en complément de la thrombolyse intraveineuse (TIV) lorsqu’elle est indiquée (4h30) ou d’emblée en cas de contre-
indications à la TIV (Grade A, Niveau 1a).
La décision de réaliser une TM ne doit pas retarder la réalisation de la TIV. De même, la réalisation de la TIV ne doit pas retarder la
TM (Grade A, Niveau 1a).
La TM doit être réalisée le plus rapidement possible dès que son indication a été posée. (Grade A, Niveau 1a).
Sélection des patients
L’occlusion vasculaire doit être diagnostiquée par une méthode non invasive en première intention avant d’envisager la phase théra-
peutique par thrombectomie mécanique (Grade A, Niveau 1a).
Les techniques d’imagerie pour déterminer la zone d’ischémie et de pénombre sont recommandées pour mieux sélectionner les
patients et évaluer le bénéce de la thrombectomie mécanique (Grade B, Niveau 1b).
L’âge élevé (> 80 ans) n’est pas à lui seul une contre-indication à la thrombectomie mécanique (Grade A, Niveau 1a).
Thrombectomie
Cet article fait le point sur un sujet traité il y a un an dans les
colonnes du Quotidien.
3
VENDREDI 14 OCTOBRE 2016
JFR.RADIOLOGIE.FR
uotidien
Le
des Journées Francophones de Radiologie
En savoir
Séance pédagogique
Reconstruction itérative en
scanographie : de la théorie
à la pratique clinique
16h00 - 17h15
Salle 342A
Fig. 1. La reconstruction itérative model-based (MBIR, GE Healthcare, Milwaukee, USA) a permis une diminution
du bruit (SD divisé par 2) tout en permettant une diminution de la dose délivrée (diminution du CTDIvol d’un fac-
teur 4) par rapport à une acquisition FBP, chez ce patient de 70 ans suivi pour une leucémie lymphoïde chronique,
avec une qualité images conservée.
Apports des nouvelles méthodes de diminution de la dose
en scanner abdominal
Edouard Herin1, François Gardavaud2, Hugo Pasquier1, Alain Luciani1
1. Service d’imagerie médicale, CHU Henri Mondor, Créteil. 2. Service d’imagerie médicale, CHU Tenon, Paris
Devant l’augmentation du nombre de scanners réalisés dans le
monde chaque année, et les inquiétudes concernant le risque
potentiel théorique de cancer radio-induits, il est incontournable
d’optimiser le couple qualité image/dose délivrée au patient lors
de chaque examen. Outre le respect du principe de justication
– selon le guide du bon usage des examens d’imagerie gbu.ra-
diologie.fr, le radiologue dispose désormais des dernières inno-
vations techniques, proposées par les constructeurs, utilisables
en routine clinique et permettant une limitation de la dose. Cette
mise au point se veut pratique, en présentant les principes de
réduction de dose en scannographie abdominale disponibles
en 2016 (optimisation des paramètres d’acquisitions, dernières
nouveautés sur les reconstructions itératives).
L’optimisation des constantes d’acquisitions (dont notamment les kV,
et les mAs), est un préalable indispensable pour limiter la dose en
scanner abdominal. Tension et intensité peuvent être modulés en
fonction du type d’indication (exemple : scanner basse dose IV- pour
la recherche de lithiase urinaire), et du morphotype du patient. Ces
ajustements doivent permettre de diminuer la dose délivrée au pa-
tient tout en maintenant la qualité image, et peuvent à eux seuls per-
mettre une réduction de plus de 50 % du CTDIvol. Classiquement, les
kV peuvent être abaissés pour l’étude des vaisseaux, des lésions hy-
per-vasculaires ou du rehaussement des muqueuses digestives, en
raison de la plus forte atténuation de l’iode à bas kV, provoquant un
rehaussement de contraste des matériaux hyperdense au détriment
du bruit dans l’image. La modulation automatique des mA (selon les
plans axiaux et transverses) se base sur les valeurs d’atténuation du
topogramme et des précédentes coupes axiales an de délivrer une
image théorique à bruit constant. Son utilisation nécessite un topo-
gramme bien réalisé (couverture de toute la zone anatomique, kV
identique entre le topogramme et l’acquisition hélicoïdale, positionne-
ment du patient à l’isocentre) et une bonne compréhension des diffé-
rentes approches utilisées par les constructeurs (le paramétrage se
fait soit selon un niveau de bruit, soit un niveau de mAs de référence
ou encore selon un « cas-référence »).
Les reconstructions itératives se sont généralisées ces dernières
années, permettant une diminution du bruit de l’image et un main-
tien (voire une amélioration) de la résolution spatiale et de contraste.
Depuis l’utilisation des premiers algorithmes de reconstruction basés
sur des modèles statistiques, avec des acronymes variables selon
les constructeurs (ASIR, AIDR, iDose, SAFIRE), ceux-ci proposent
désormais leur troisième génération de reconstruction, basée sur
la modélisation de l’ensemble de la chaîne d’acquisition du scan-
ner (« model-based » : MBIR, IMR, ADMIRE), et certains proposent
des modèles mixtes (ASIR-V). Chacun de ces algorithmes possède
une approche spécique pour la reconstruction de l’image, et ils
diffèrent chacun dans leur vitesse de reconstruction, leur compor-
tement en fonction de la zone clinique et leurs possibilités de para-
métrages (Tableau 1). La reconstruction par rétroprojection ltrée
(FBP) a été utilisée pendant 30 ans en raison de la faible puissance
de calcul informatique nécessaire pour une taille de matrice image
importante (minimum 512 × 512) ; la FBP est sufsante pour la réa-
lisation de scanner « pleine dose ». Toutefois, avec l’arrivée de la
reconstruction itérative, certaines études ont montré qu’il était pos-
sible de diminuer la dose délivrée pour un scanner abdominal, de
l’ordre de 50% avec les algorithmes statistiques, et jusqu’à 70
voire 80 % pour les algorithmes « model-based », tout en conser-
vant la qualité diagnostique nécessaire (Fig. 1). Les algorithmes
« model-based » offrent une meilleure détectabilité des structures de
faible contraste par rapport à certains algorithmes statistiques (sur
un même jeu de données brutes), eux-mêmes supérieurs à la FBP
seule. Les algorithmes de reconstruction « model-based » présentent
toutefois deux inconvénients, qui sont leur coût à l’achat et un temps
de reconstruction plus élevé que les modèles statistiques. L’appa-
rence des images après reconstruction itérative est également diffé-
rente et nécessite une adaptation progressive de l’œil du radiologue.
La session de ce jour intitulée « Reconstruction itérative en scanogra-
phie : de la théorie à la pratique clinique » sera l’occasion d’aborder
plus en détail cette thématique.
Constructeur et technique de reconstruction itérative Algorithme Réglage du niveau de
reconstruction itérative
Temps
de reconstruction
General Electric
Adaptive Statistical Iterative Reconstruction (ASIR)
Model Based Iterative Reconstruction (MBIR ou Veo®)
ASIR-V
Statistique
Model-Based
Model-Based
10 niveaux (de 0 à 100%)
1 niveau
10 niveaux (de 0 à 100%)
55 images/sec
30-45min/examen
30 images/sec
Philips Healthcare
iDose4
Iterative Model Reconstruction (IMR)
Statistique
Model-Based
7 niveaux
3 niveaux
50 images/sec
5 min/examen
Siemens Healthcare
Sinogram AFrmed Iterative Reconstruction (SAFIRE)
Advanced Model-Based Iterative Reconstruction (ADMIRE)
Statistique
Model-Based
5 niveaux
5 niveaux
60 images/sec mais
25 images/sec en crâne
20 images/sec
Toshiba
Adaptive Iterative Dose Reconstruction (AIDR 3D)
Adaptive Iterative Dose Reconstruction (AIDR 3D Enhanced)
Forward projected model-based Iterative Reconstruction SoluTion (First®)
Statistique
Model-Based
Model-Based
3 niveaux
3 niveaux
32 à 60 images/sec
20 % supérieur à AIDR
3D
3 min/examen
Tableau 1. Techniques de reconstruction itérative proposées par les différents constructeurs.
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des Journées Francophones de Radiologie
4
Mise à jour des modalités de renouvellement de la compétence
en radioprotection des patients
Jean-François Chateil, Hubert Ducou Le Pointe, Emmanuel Museux pour le G4
La directive Euratom 2013/59 a été promulguée en décembre 2013,
et doit donc être transcrite en France dans les textes de loi, règle-
ments ofciels ayant trait à la radioprotection. La nouvelle directive
renforce les obligations de formation en pédiatrie, dans le cadre
du dépistage organisé, et lorsque les doses peuvent être élevées :
radiologie interventionnelle, médecine nucléaire, tomodensitométrie.
Cette formation doit se faire conformément au guide européen ME-
DRAPET, publiée en 2014. La formation initiale et continue à la
radioprotection des patients, mise en place à la suite de la direc-
tive Euratom précédente (97/43), va de ce fait évoluer. La formation
continue dans ce domaine concerne tous les radiologues pratiquant
des actes utilisant les rayons X. L’évaluation de la formation continue
initialement mise ne place en 2004 a fait apparaître d’importantes
disparités des formations proposées, tant sur le plan qualitatif que
sur la durée de l’enseignement et sur les modalités d’évaluation.
Sous l’égide de l’ASN, un vaste travail est donc entrepris pour dé-
nir les nouvelles modalités de cette formation continue. Ce travail
concerne toutes les professions médicales et paramédicales, les
radiologues étant représentés par des délégués du G4, conseil pro-
fessionnel de la radiologie française. Il vise à créer, par discipline,
des référentiels de formation dans le domaine de la radioprotection
(guides professionnels), et à élaborer un cadre de formation mo-
délisant et reproductible. Six objectifs généraux constituent la char-
pente de cette formation : reconnaître les composants des risques
inhérents aux rayonnements ionisants dans le domaine médical,
appliquer la réglementation, mettre en œuvre de façon opération-
nelle le principe de justication des expositions, faire de même pour
le principe d’optimisation de la radioprotection des patients, analyser
sa pratique professionnelle sous l’angle de la gestion des risques,
de la justication des expositions et de l’optimisation des doses à
délivrer pour améliorer la radioprotection des patients, enn informer
et impliquer le patient pour le rendre co-acteur de sa sécurité. Les
objectifs de formation sont déclinés de façon spécique pour chaque
profession, sur proposition des délégués du G4.
Cette formation devra être dispensée par un organisme de formation
professionnelle reconnu, employant des formateurs ayant une com-
pétence spécique dans le domaine. Le schéma préliminaire propo-
sé par le G4 s’appuie sur une durée de formation réalisable en une
journée. Une partie des objectifs peut s’appuyer sur un enseigne-
ment en ligne (E-learning), une part présentielle d’une demi-journée
restant essentielle pour les études de cas, les mises en situation pra-
tique. La durée de validité de cette formation continue, actuellement
de 10 ans, pourrait être ramenée à 7 ou 8 ans pour les radiologues.
Cette formation devra en outre s’adapter aux pratiques diverses des
radiologues : ceux ayant une activité spécique de radiologie inter-
ventionnelle pourraient ainsi compléter leur formation par une dé-
marche régulière d’évaluation des pratiques professionnelles, visant
notamment à analyser les éventuels incidents et à dénir et évaluer
des niveaux de référence interventionnels (NRI) correspondant à
leur pratique.
Dans l’attente de l’entrée en vigueur de la future réglementation, il
est recommandé aux radiologues de suivre ces nouvelles recom-
mandations lors du renouvellement de leur formation obligatoire,
dont la durée de validité reste de 10 ans tant que le nouveau texte
n’est pas promulgué. Par ailleurs, le G4 reste attentif aux impératifs
de formation continue des manipulateurs, nos plus proches collabo-
rateurs, de façon à ce que ceux-ci soient cohérents avec ceux des
radiologues et réalistes dans leur application pratique.
En savoir
Séance scientique
Radioprotection
en milieu médical
10h30 - 12h00
Salle 241
VENDREDI 14 OCTOBRE 2016
JFR.RADIOLOGIE.FR
uotidien
Le
des Journées Francophones de Radiologie
5
L’IRM du parenchyme pulmonaire : une option aujourd’hui réaliste
François Laurent, Gaël Dournes
Service de radiologie diagnostique et thérapeutique, groupe hospitalier Sud, CHU de Bordeaux. Université de Bordeaux, Centre de
Recherche Cardio-Thoracique, INSERM 1045.
L’IRM pulmonaire a fait l’objet d’intenses recherches ces dernières décennies mais n’a jusqu’ici pas convaincu les imageurs de son
utilité pratique, face à l’excellente imagerie morphologique possible en scanner. Les progrès techniques et le besoin de diminuer les
irradiations répétées peuvent conduire à un changement de paradigme du « tout scanner » en imagerie pulmonaire. Parce que la
résolution spatiale submillimétrique est possible, la richesse des contrastes offerte par l’IRM pourra montrer tout son intérêt. Il n’est
pas surprenant que les applications les plus convaincantes soient celles qui concernent les sujets jeunes souffrant de maladies chro-
niques, au premier rang desquelles la mucoviscidose.
L’IRM est une technique peu utilisée aujourd’hui en routine clinique pour
l’exploration des affections du parenchyme pulmonaire, alors que ses
indications en imagerie oncologique et pour l’exploration des vaisseaux
pulmonaires sont routinières. Les besoins en imagerie augmentent
pourtant de façon constante dans les maladies chroniques pulmonaires
pour lesquelles l’irradiation répétée en scanner pose de très sérieuses
questions d’innocuité, malgré les progrès réalisés en économie de
dose. Du fait de sa structure, le poumon est en effet particulièrement
peu adapté à l’IRM : sa densité protonique est très faible (0,1 g/ml) et
les innombrables micro-interfaces entre l’air et les parois alvéolaires
sont à l’origine d’une importante hétérogénéité locale de champ magné-
tique (ou effets de susceptibilité magnétique), et donc d’un signal du
parenchyme pulmonaire extrêmement faible avec les séquences d’IRM
classiques. La faible teneur en proton du parenchyme aéré, la faible
résolution spatiale et les artefacts des mouvements cardiaques et respi-
ratoires ont donc été les principaux obstacles à l’utilisation de l’IRM dans
les maladies broncho-pulmonaires chroniques.
Pourtant, l’IRM est une technique particulièrement séduisante parce
qu’elle est non irradiante, qu’elle permet une analyse globale des struc-
tures thoraciques, et enn parce que le contraste de l’image n’est pas
monoparamétrique comme en scanner, mais peut être pondéré par les
temps de relaxation, la densité de proton, la diffusion des molécules
d’eau, la perfusion tissulaire, la ventilation etc. Ces contrastes permet-
tant d’appréhender les phénomènes de perfusion, de ventilation, de
diffusion et d’envisager un rôle à l’IRM qui soit complémentaire à celui
du scanner, comme par exemple différencier inammation et brose.
Des techniques spéciques d’IRM fonctionnelle ont été développées au
niveau du poumon avant que ne soit décrite une méthode sufsamment
robuste pour permettre l’acquisition d’images morphologiques, et ce fut
un obstacle à leur utilisation. Avec l’apparition des séquences à temps
d’écho ultracourt, l’IRM devient enn une technique morphologique plus
performante, encore inférieure au scanner en termes de robustesse et
de résolution spatiale, mais néanmoins de qualité diagnostique suf-
sante, permettant de percevoir les anomalies structurales pulmonaires
et bronchiques et de les superposer aux modications de perfusion, de
ventilation, de diffusion, etc. Ces progrès dans l’imagerie morphologique
ouvrent le champ très large des capacités de l’IRM fonctionnelle.
Ces progrès sont permis parce que de nouvelles séquences à temps
d’écho ultracourt sont proposées pour pallier la décroissance très rapide
du signal pulmonaire. Elles permettent d’accélérer la vitesse d’enco-
dage, de s’affranchir des artefacts habituels de cette imagerie pulmo-
naire à TE ultracourts et d’obtenir une résolution submillimétrique qui
permet de visualiser les parois bronchiques et de détecter la présence
de signal au sein du parenchyme pulmonaire.
L’intérêt du suivi par l’IRM dans la mucoviscidose est logiquement la
meilleure indication actuelle compte tenu de l’intérêt de l’imagerie dans
le suivi de ces sujets jeunes et des nouvelles perspectives thérapeu-
tiques qui vont encore augmenter la durée de vie de ces patients dans
les prochaines années. La visualisation des bronches, qui sont des
structures de petite taille, dans un environnement pauvre en protons et
riche en interfaces air-tissu générateurs de microchamps magnétiques
et de déphasage, ne permettait pas jusqu’ici d’obtenir ne serait-ce
qu’une visualisation sufsante de ces structures, et donc une analyse
qualitative et quantitative des lumières, épaisseurs, du signal, etc.
La comparaison d’une série de patients enfants et adultes porteurs
d’une mucoviscidose a conrmé qu’une technique de temps d’écho
ultracourt pouvait remplacer le scanner dans cette indication en appor-
tant les mêmes informations structurales sur les bronches et leurs ano-
malies, avec des performances égales au scanner pour déterminer le
score de Helbich-Bhalla (1).
La BPCO et l’asthme sont des problèmes majeurs de santé publique
dont les deux composantes pathologiques principales, emphysème
et remodelage bronchique, bénécient de plus en plus du dévelop-
pement de thérapeutiques ciblées. La quantication de l’emphysème
est fondamentale pour le phénotypage et pour le suivi sous traitement
des patients. Cette quantication est aujourd’hui bien standardisée en
tomodensitométrie, au prix cependant d’une irradiation non négligeable,
croissante avec la répétition des examens. La plupart des études utili-
sant l’IRM étaient donc basées sur l’étude de
la perfusion et de la ventilation pulmonaire,
de réalisation complexe. Le développement
récent des séquences à temps d’écho ultra-
court (UTE) permet d’échantillonner le signal
très tôt avant sa décroissance, limitant ainsi
les effets de susceptibilité magnétique. Des
résultats prometteurs en IRM UTE ont déjà
été publiés chez le petit animal et sont à
l’étude chez l’homme dans ces indications.
L’utilité de l’IRM a été démontrée avec les
séquences classiques dans le diagnostic de
bronchocèle. Aux critères morphologiques
identiques à ceux du scanner (aspect en V
ou Y), s’ajoutent les critères d’intensité du
signal : un bronchocèle apparaît hyperintense
en T2 et hypointense en T1 en raison de son
contenu muqueux très riche en eau. Dans
le cas particulier de l’ABPA, les bronchocèles
présentent un hyposignal T2, analogue mais
plus sensible que l’hyperdensité observée en
scanner. Une communication présentée par la
SIT au cours de ces JFR montre l’intérêt de sa
détection spécique et précoce par l’IRM dans
le cadre de la mucoviscidose (Fig. 1).
Le scanner thoracique joue actuellement un rôle fondamental dans la
prise en charge des patients atteints de pneumonies inltrantes diffuses
(PID), en particulier de la brose pulmonaire idiopathique, pour laquelle il
est un des piliers de la stratégie diagnostique initiale, dans la mesure
le diagnostic peut être porté sur les seules anomalies décrites au TDM.
Actuellement, l’IRM utilisant des séquences adaptées et principalement
les séquences à TE ultracourt permet de décrire les principaux patterns
identiés en scanner dans les PID, avec une résolution plus faible et
sans que la robustesse de la méthode et sa reproductibilité aient été
conrmées. Il n’est pas surprenant que l’IRM ait été d’abord proposée
pour explorer les PID de l’enfant. Grâce à ces nouvelles séquences per-
mettant une analyse morphologique ne, toutes les données fournies
par l’étude des contrastes (perfusion, diffusion, ventilation, inamma-
tion) seront analysables et corrélables aux données morphologiques.
Ces études pourraient permettre de mieux appréhender la physiopatho-
logie des différentes PID et peut-être de dénir des prols de patients «
exacerbateurs » ou « répondeurs au traitement ».
La possibilité d’explorer par l’IRM dans le même temps la plèvre, la paroi
et le médiastin est certainement, comme un scanner, un avantage de
la technique. L’exploration morphologique et fonctionnelle du cœur en
constitue un autre, l’étude combinée du cœur et poumon étant à l’évi-
dence instructive dans les maladies de système et la BPCO. L’IRM pul-
monaire a donc probablement une place importante dans l’exploration
morphologique du poumon, que les recherches à venir préciseront.
Référence
1 - Dournes G, Menut F, Macey J, et al. Lung morphology assessment of cystic brosis using
MRI with ultra-short echo time at submillimeter spatial resolution. European Radiology
2016.
En savoir
Séance scientique
Nouveautés techniques
et sémiologiques
du parenchyme et des
vaisseaux pulmonaires
17h30 - 18h45
Salle 251
Fig. 1. IRM (A, B) et TDM (C, D) pulmonaire réalisée chez une enfant de 9 ans avec une mucovis-
cidose connue et réalisée au décours d’une exacerbation. L’IRM morphologique, à l’aide d’une sé-
quence 3D-UTE (A), montre un inltrat radiologique sans bronchogramme aérien. Un complément
de caractérisation à l’aide d’une séquence pondérée en T2 (B) révèle la présence de bronchocèles
au sein de l’inltrat, en hyposignal T2 homogène et marqué, tandis que la condensation adjacente
est en hypersignal T2 liquidien. On note une bonne concordance sur l’aspect morphologique entre
IRM UTE et TDM en fenêtre parenchymateuse (C), tandis que l’hyposignal T2 des bronchocèles
est concordant avec des hyperdensités en TDM en fenêtre médiastinale (D). Les dosages immu-
nologiques ont démontré la présence d’une aspergillose pulmonaire broncho-allergique avec une
culture positive pour Aspergillus fumigatus.
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