LE CORPS EN IMAGES, COURS N° 3/3 Page 3 sur 5
les prêtres glabres sont censés plus temporels, les barbus plus évangéliques : l'horrible Frolo était
rasé, le bon Père de Foucauld barbu ; derrière la barbe, on appartient un peu moins à son évêque, à
la hiérarchie, à l'Eglise politique ; on semble plus libre, un peu franc-tireur, en un mot plus primitif,
bénéficiant du prestige des premiers solitaires, disposant de la rude franchise des fondateurs du
monachisme, dépositaires de l'esprit contre la lettre... »
Roland BARTHES, Iconographie de l'abbé Pierre, Lettres nouvelles, 23, janvier 1955
Qu'appelez-vous: "publicité sexiste" ?
« Ce qui m'apparaît le plus important, c'est d'abord de se demander pourquoi cette question
n'est jamais posée à personne. Tout un-e chacun-e a du sexisme une perception, une analyse, un
jugement, une interprétation différente. Lorsque nous nous sommes réunies entre féministes pour
réagir contre des publicités particulièrement sexistes, ce qui nous a le plus étonnées, c'est de
découvrir que nous n'étions souvent pas d'accord entre nous. La reconnaissance de cette diversité
devrait être l'objet de débats privés et publics qui, seuls, nous permettraient de comprendre les
raisons qui expliquent pourquoi ce qui choque l'un-e ne choque pas l'autre. Seule cette confrontation
nous permettrait d'évoluer, d'avancer. Mais pour cela encore faudrait-il que la société française
reconnaisse que l'inégalité des relations entre les sexes est un débat politique.
Ceci posé, pour moi, une publicité sexiste est une publicité qui reproduit des préjugés négatifs, qu'ils
soient discriminants, méprisants à l'égard des femmes par rapport aux hommes et ce, sur le plan
intellectuel, social, sexuel, symbolique. » […]
Marie-Victoire LOUIS, À propos du sexisme dans la publicité
http://www.marievictoirelouis.net/document.php?id=458&themeid
« Deux figures de la mort, qui n’ont de commun que leur simultanéité (1945 en
Allemagne) et, peut-être, cette posture du corps, visage renversé, bouche ouverte. Mais par-delà
cette fragile proximité, l’écart absolu, radical, qui sépare le suicide librement décidé – tel une voie
d’issue – par cette fille du bourgmestre de Leipzig à l’arrivée des Alliées, et l’extermination
méthodique, sérielle, dont gît ici l’une des anonymes victimes.
Dans la première image, la mort se laisse encore, pourrait-on dire « portraiturer ». Le
visage demeure intact, les mains reposent délicatement sur l’uniforme, et il entre quelque théâtralité
dans ce corps suicidé qui n’est pas encore un cadavre comme si une esthétique – celle-là même du
nazisme – était encore possible autour de cette mort, que viennent renforcer la beauté de la jeune
allemande et le cuir du canapé.
Dans la seconde image, rien de tel : quel portrait serait encore possible de ce visage
creusé, révulsé, anonyme dans son martyre jusqu’à être le visage de tous les déportés ? Car il ne
s’agit plus même d’un visage, mais déjà d’un cadavre, que n’attendrait nul apaisement, nulle
transfiguration post mortem. Et de ce cadavre, que dire, que comprendre ? Le regard — celui,
étonné, presque hébété, de ces deux soldats américains, le nôtre, aussi — se heurte à une zone de
hors sens.
Ce qui se dit, si violemment,dans cette photographie de Lee Miller, c’est que les
camps d’extermination proposent une figure inouïe de la mort : l’inhumaine barbarie de la mort en
série, planifiée, industrialisée […]
Mais ce qui se profile, aussi, dans la stupeur des deux soldats, c’est ce que sera
l’après-Auschwitz : un long et douloureux questionnement, dont tout laisse à penser qu’il n’a pas
encore trouvé sa réponse. […]
D.B. (initiales seules, sans doute Dominique BAQUÉ), in La Recherche
Photographique N°6, juin 1989