CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE (46-47 avant J.-C.) f Suite J IV de que César tenterait Scipion avait dû supposer débarquer, comme l'avait fait Curion en 49, sur les côtes du golfe de Carlhage, aux environs d'Utica, la capitale et le centre de la résistance des Pomde la province péiens. C'est pour cela, sans doute, qu'il avait concentré sur ce point la plus grande partie de sa flotte et qu'il au débarquement des troupes n'avait pu s'opposer adverses. Il est probable qu'il n'en eut connaissance que deux jours après, c'est-à-dire le 5 novembre, par les courriers Ils lui que Considius ne manqua pas de lui envoyer. dans difficile en même temps, la situation apprirent, laquelle se trouvait César, qui n'était arrivé qu'avec un petit nombre de navires et seulement 3,000 hommes. Il mit aussitôt ses légions en mouvement, les faisant précéder par la cavalerie sous les ordres da Labienus, de Petreius et des deux Pacidius. Le 8 novembre au matin, cette cavalerie, qui venait de se dirigeait vers Ruspina. Avec dépasser Hadrumetum, habituelle sa présomption que les événements de Pharsale n'avaient même pas' entamée, Labienus se faisait fort d'infliger bientôt à César un désastre au moins aussi *46 retentissant CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE sur les bords du que celui de Curion la tactique Bagrada. Il avait enseigné à ses escadrons de fantassins numide, les faisant combattre entremêlés à pied. Il se promettait, légers et d'archers grâce à la supériorité que cette façon de se présenter au combat devait leur assurer, de détruire en détail tous les détachements que l'ennemi ne manquerait pas d'envoyer aux fourrages et aux vivres. Or, ce même jour, César était sorti de son camp, vers 9 heures du matin, à la tête de trente cohortes, 10 à 11,000 hommes, pour battre le pays. La crainte de tomber dans des embuscades Pavait décidé à emmener plus de monde qu'on n'en emploie d'ordinaire à ce genre et bien lui en avait pris, comme nous d'opérations, allons le voir. La colonne, éclairée par un détachement de cavalerie, se dirigeait vers le sud, dans la direction des villages de Bembla, modernes et Damous. Mnarès, Mesdour Elle avait déjà parcouru trois milles (4 kilom. 500) envisur la droite une ron, quand les éclaireurs signalèrent grande poussière, soulevée évidemment par la marche d'une nombreuse cavalerie. On se trouvait alors dans cette vaste plaine sans végétation, dont nous avons déjà parlé et qui s'étend, du nord au sud, depuis le rivage de la mer jusqu'au delà des petites villes de Djemmal et de Mennzel-Kamel.Dans sa partie nord, elle est presque horizontale et n'est couà peine pée, dans son milieu, que par une dépression sensible où coule, après les pluies, POued-el-Melah. Les Arabes lui donnent le nom de Sebkha-el-Melah parce elle est souvent inondée par les que, pendant l'hiver, de l'oued. Mais, à cette époque de eaux débordées l'année, elle était encore partout praticable. Dès que l'ennemi fut signalé, César fit porter au camp l'ordre de lui envoyer toute la cavalerie disponible et les archers. 11fit déployer les cohortes, leur prescrivant de s'avancer lentement el prit les devants avec une faible CAMPAGNE DE .T. CÉSAR 147 EN AFRIQUE il fit Du plus loin qu'il aperçut l'ennemi, in campo jubet le casque en tête — milites au combat. se prépara escorte. galeari mettre — et à faire une légère m'entraîne expression galeari Elle pourrait faire supposer digression. que les Romains de César les campagnes au temps qui firent d'Afrique en étaient coiffés de la g aléa, c'est-à-dire du casque cuir, plus léger que le casque d'airain, qui était, à cette Cette époque, romaine. la coiffure dans d'ordonnance les légionnaires Autrefois, caserne de cuir, galea, et la cuirasse lorica. Au ive siècle avant notre toute avaient l'armée porté de même le matière, dictateur ère, le M. Furius Camillus leur avait substitué le casque et la cuirasse d'airain. On avait reconnu que le cuir, que sa avait fait préférer tout d'abord légèreté pour les armes il avait devenait très lourd défensives, quand reçu la pluie et qu'une fois mouillé, cissait au soleil. Le casque il se durcissait et se rétré- d'airain portait continuèrent le nom de à désigner cassis; malgré cela, les soldats couramment du nom de galea toute espèce de casque, d'où l'expresau lieu d'employer le terme réglementaire, sion l'action galeari pour indiquer en tête au moment de combattre. elle conserva Le nom son ancien moderne de nom cuirasse de mettre Quant de lorica, a, le casque à la cuirasse, de lorum, cuir. d'ailleurs, la même étymologie. Dès que les renforts l'eurent avait du camps qu'il appelés se trouva de 30 cohordisposer César rejoint, et 150 archers. tes, 1,400 chevaux L'armée de Labienus était forte montés sur des chevaux sans de 12,000 Numides, des 1,600 cavaliers bride, ramenés de Thessalie, de et gaulois qu'il avait germains en partie 6,000 hommes d'infanterie, — leois armaturoe — et, humidas armés enfin, à la légère d'un grand 148 CAMPAGNE nombre de frondeurs autres à cheval. DE J. CÉSAR EN AFRIQUE et d'archers, les uns à pied, les Beaucoup de nos cavaliers modernes se demanderont, sans doute, ce que pouvait valoir cette cavalerie montée sur des chevaux sans bride. Les Numides étaient cependant des cavaliers habiles et vigoureux ; ils se servaient, leurs d'une baguette avec diriger pour montures, laquelle ils indiquaient, par de légers coups sur les à prendre : oreilles, la direction Hic passim exsultant Nomades, gens inscia freni ludum mobilis aures Quis inler geminasper Quadripedem ftectit non cedens virga lupalis. (Sil. Ital., de Bel. pun. sec. lib. ; i, v. 215 et s.). Je possède une médaille de Bocchus II, qui régnait en entre 80 et 50 avant J.-C, médaille contemMaurétanie de l'époque qui nous occupe. poraine, par conséquent, Au revers, le roi est représenté sur son cheval au galop qu'il conduit sans frein, avec une baguette qu'il tient de la main droite et armé d'une courte lance qu'il porte au bras gauche. Cette manière de conduire le cheval n'était aux cavaliers numides ; elle était donc pas particulière par tous les peuples du nord de l'Afrique, employée Ch. Tissot raconte qu'il a vu des cavaliers appartenant de l'Atlas marocain, monter des aux tribus amazigh chevaux sans bride et les diriger, comme les Numidoe à l'aide d'une simple baguette et de l'action des infreni, jambes (t. i, p. 359). Labienus rangea ses troupes en bataille sur une ligne très étendue, mais dans un ordre tellement compact que, de loin, on croyait n'avoir devant soi que de l'infanterie — ut proc.ul Coesariani pédestres copias arbilrade cavarentur (De B. A., xiu). De forts détachements les deux ailes. lerie appuyaient CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE 149 En présence de cette armée si supérieure en nombre, de disposer ses cohorCésar se trouva dans l'obligation tes sur une seule ligne, en laissant entre elles de larges Il dispersa ses archers en avant du front et intervalles. de chacune cle ses ailes par un détachement couvrit deux 700 cavaliers. Sa ligne avait une étendue d'environ le dos à la mer et sa gauche kilomètres ; elle tournait aux flancs du plateau de Ruspina. Croyant s'appuyait à il recommanda avoir à faire surtout à de l'infanterie, cle ne pas se laisser déborder et envelopses cavaliers per par la cavalerie adverse. En raison On resta ainsi quelque temps en position. de son infériorité César ne pouvait songer à numérique, entamer l'action. Enfin, Labienus se décida à porter en avant la cavalerie qui couvrait ses deux ailes. Pendant droit à la cavalerie de César, le qu'une partie marchait reste se déployant à gauche dans la plaine, à droite sur dessinait nettement les pentes du plateau de Ruspina, un mouvement tournant sur les deux flancs de l'ennemi. La cavalerie de César, qui s'était ébranlée aussitôt, ne put résister au choc. La voyant prête à se débander, Labienus ordonna une attaque générale. Son infanterie se porta au devant des cohortes de César qui s'ébranlaient à leur tour, et les couvrit d'une grêle de traits. Les 150 archers romains ne purent tenir sous cette masse des de projectiles et se réfugièrent dans les intervalles cohortes. se lançaient à la Quand les légionnaires cavaliers et charge, le pilum à la main, les Numides, Les fantassins s'arrêfaisaient demi-tour. fantassins, leur tant à une courte distance de leurs adversaires lançaient une telle quantité de traits qu'ils les forçaient à s'arrêter, se reformait en pendant que la cavalerie arrière pour revenir à la charge. Le combat continuait de la sorte, les Numides évitant toujours le choc et harceler les cohortes. revenant, aussitôt reformés, Cette tactique était de nature à étonner tout au moins 150 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE les soldats romains plus habiles à se servir des armes de main et qui ne pouvaient en arriver au combat corps à corps dans lequel ils étaient généralement irrésistibles. Napoléon Ier fait remarquer que Labienus imita, en cette circonstance, la manière de combattre des Parthes détruisirent les légions de Crassus sur les lorsqu'ils bords du Balissus les (le Bélik) le 8 juin 53. « Attaquer légions, non avec des armes de main, genre de combat où elles étaient invincibles, mais avec une grande quantité d'armes de jet; adroits, dispos, aussi braves qu'insachant se soustraire à la poursuite du soldat telligents, l'accabler aussitôt pesamment armé, mais retournant qu'il avait repris son rang dans la légion » (Précis des guer. de J. César, en. xiv, vi, 4). Mais l'expédition de Curion nous a déjà permis de constater était familière que cette façon de combattre Si Labienus ne songea pas à imiter aux Numides. les Parthes, il eut du moins la sagacité de laisser ses auxiliaires africains employer leur tactique habituelle. « Quelque imparfaites que fussent alors les armes de de celles des modernes, lorsqu'elles jet, en comparaison étaient exercées de cette manière, elles obtenaient cons» (Nap. Ie1', loc. cit.). Les perfectiontamment l'avantage n'ont fait que rendre nements successifs de l'armement cette vérité de plus en plus évidente. son infanterie sérieusement César Voyant ébranlée, fit courir clans les rangs l'ordre de ne pas s'écarter de la ligne de plus de quatre pieds. La cavalerie des ailes, inférieure en nombre, fatiguée par sa longue traversée, ne pouayant déjà perdu bon nombre de ses chevaux, vait plus résister ; elle fut contrainte de se réfugier dans où elle les intervalles des cohortes et des manipules, vint jeter le désordre. A ce moment, la la cavalerie de Labienus débordant ligne romaine sur ses deux ailes eut bientôt fait de l'envelopper complètement. Rejetées les unes sur les autres- CAMPAGNE DE J. CÉSAR encombrées 151 EN AFRIQUE les par les cavaliers, nécessaire l'espace pour combattre. enserrée se trouve dans une longue cohortes n'ont L'armée ellipse de plus César que ferment de toutes parts les masses ennemies. Les adversaires sont rapprochés à ce point que des de part et d'autre. Labienus à ches'échangent paroles il excite ses rang. Tantôt val, la tête nue, est au premier tantôt il interpelle de César. ceux S'adressant soldats, le à l'un d'eux : — « Eh bien, conscrit, tu fais joliment brave! Votre César vous a donc bien tourné la tête par ! Par Hercule ! il vous a mis dans un bien ses discours — « Je ne suis mauvais pas! Vous me faites pitié ! » pas le légionnaire,—je Labienus,— conscrit, répond » — « Je n'en reconnais suis un vétéran de la 10e légion. — « Eh Labienus. », répliqua pas les enseignes bien, tu vas me reconnaître soldat en jetant son », dit le vieux un avec tant casque. En même temps il lui lance son pilum en vibrant dans le poitrail du de force qu'il s'enfonce a fait cabrer cheval de Labienus que son cavalier pour éviter le trait : — « A ce coup, Labienus, tu reconnaîtras bien un soldat de la 10e. » la consternation était dans les rangs, surCependant, tout parmi les jeunes soldats. Tous cherchaient des leur dernier Ils yeux César, en qui ils mettaient espoir. ne combattaient coups plus et se contentaient de parer les de l'ennemi. leur général ne s'était trouvé dans Jamais, peut-être, Sa situation une circonstance aussi était sencritique. à la bataille siblement la même du que celle de Curion Un moment un ordre d'indécision, Bagrada. ou mal compris, ou mal exécuté, et c'en l'armée. au suprême Mais il possédait degré véritablement le grand constituent qui donné, était fait de les qualités homme de il joignait le sangl'esprit, et la promptitude de froid, la fermeté d'âme, la lucidité décision d'autant à ce moment, plus nécessaire que le 11 fallait tout d'abord danger était plus pressant. percer guerre. Aux ressources de mal 152 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE le cercle qui l'étreignait et, pour cela, étendre son front par les deux ailes, de manière à déborder les deux parties, ainsi séparées, de l'armée ennemie et les empêcher de se rejoindre; puis ensuite, les charger simultanément, et coûte que coûte, les mettre en déroute. Tel fut le projet qu'il conçut aussitôt. Il donna l'ordre à quinze des cohortes, une sur deux, de faire face en arrière, puis de se porter chacune derrière la cohorte voisine restée face en tête. Il aurait ainsi deux lignes de bataille dont l'étendue serait suffisante pour l'espace restreint que lui avait laissé l'ende le tenir à nemi. Pendant qu'elles se contenteraient distance, les cohortes des ailes devraient, par des charges répétées, s'efforcer de percer le cercle et de gagner du terrain à droite et à gauche. C'était là une tâche difficile, mais il est probable que César avait eu le soin de placer aux ailes, comme on le faisait d'habitude, un grand nombre surtout quand l'armée comprenait de jeunes soldats, des légionnaires aguerris et des vétérans. de la partie la plus vulnérable Les ailes constituaient la ligne de bataille de la légion romaine, et l'on avait soin d'y placer, surtout à droite, les meilleures troupes. Les premiers rangs combattant de front, les derniers par le flanc, les cohortes des ailes finirent par gagner un peu de large ; par des quarts de conversion répétés, elles s'avancèrent peu à peu sans se laisser entamer. Grâce à leur opiniâtreté, la ligne s'allongea, les cohortes intermédiaires purent se desserrer et reprendre leurs intervalles dans lesquels la cavalerie se reforma. Enfin, le cercle fut rompu et les extrémités de la ligne débordèrent l'ennemi. A ce moment, César donna le signal de la charge que — répétèrent les trompettes — tubicines cornicinesque ; les trente cohortes s'ébranlèrent à la fois dans un élan la cavalerie chargeant à travers les interirrésistible, valles. Dérouté par cette attaque rapide, l'ennemi qui se DE J. CÉSAR CAMPAGNE 153 EN AFRIQUE en deux tronçons déjà sûr de la victoire, coupé croyait cède sur mutuellement, plus se secourir qui ne peuvent de nombreuses et s'enfuit en subissant tous les points la charge des cohortes César, qui avait conduit celles qui avaient face en tête, rejoignit chargé et reprit reforma sa ligne cle bataille en arrière, primitive le chemin de son camp. et Cn. Pison Il était à peine en marche que M. Petreius pertes. restées au arrivaient numides secours de Labienus et une nombreuse sous se rallièrent leur infanterie protection, avec d'élite. et les 1100 chevaux Les fuyards deux troupes de César. Celui-ci sur l'arrière-garde se jetèrent l'ennemi de contenir fît aussitôt volte-face, s'efforçant successives. Malheureuseses attaques et de repousser qui avait subi de fortes pertes et dont ment, sa cavalerie réunies les survivants, sés de fatigue, hommes et chevaux, se trouvaient épuiles assaillants et ne pouvait poursuivre aussi pressant Le danger redevenait les tenir en respect. numéGrâce à sa forte supériorité que tout-à-l'heure. la ligne de César. allait encore déborder l'ennemi rique, Un effort rétablir et seul sauver la situation pouvait et à Il ordonna donc aux cohortes et de ne d'exécuter une charge générale désespéré les affaires. la cavalerie plaine et rejeté dont il imporcollines des dernières l'ennemi — « donec ultra maître tait cette fois, de se rendre earum essent colles hosles repulissent, ullimas atque B. A. xvui). potiti » —(de celles sur la. crête évidemment sont Ces collines s'arrêter qu'après au-delà avoir débarrassé la d'El-Hamada et de les villages environ. On en était à 4 milles (6 kiîom.) Mesjed-Aïssa, avec la plus extrême fut entamée vigueur. La charge déjà fatigué, commençait frappé de surprise, L'ennemi, — cle vigueur avec moins et à lancer ses traits à faiblir — 11 dut enfin céder devant languide neglig enter que. En un instant, il romaines. des troupes l'impétuosité au-delà des haula plaine et disparu eut abandonné desquelles sont bâtis Revueafricaine,i6°annde.~N°Sb4L4L'f&4£i(1eret2eTrimestres 1902). 11 154 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE leurs. Les Romains s'en emparèrent facilement, s'y reformèrent et, quand il fut bien assuré qu'il n'avait César les ramena plus à redouter de retour offensif, et en bon ordre dans leur camp de Rustranquillement pina. La bataille, commencée vers la cinquième heure du coucher du jour(11 h. du matin), avait duré jusqu'au soleil (5 h. 30 du soir). Les deux armées comptaient de nombreux blessés. Labienus fit transporter les siens à Hadrumetum. César avait fait de nombreux et des transfuges, tant Romains que Numiprisonniers, en grand nombre à son camp. des, se présentèrent Cette bataille de Ruspina, qui eut lieu le 8 octobre 47 (4 janvier 708 de Rome), mérite de retenir un instant l'attention. Comme nous l'avons vu, elle ressemble dans laquelle furent exterbeaucoup à celle duBagrada, minées les légions de Curion. Dans l'une comme dans de toutes l'autre, l'armée romaine se laissa envelopper légère des Numides. parts par la cavalerie et l'infanterie 11fallut toute l'autorité, tout l'ascendant de César sur ses soldats et tout son génie pour lui permettre de sauver ses troupes d'une destruction totale. Tous les auteurs qui s'en sont occupés, Turpin de Crissé, Guischard, Rosch, le général de Goler, Rusfow et d'autres chacun à sa manière, encore, ont cherché à expliquer, à rompre le la manoeuvre par laquelle César parvint et à couper en deux l'armée cle cercle qui l'entourait cornu Labienus — coronam hostium dextro sinislroque mediam dividit (De B. A., xvn). Leurs explications sont; toutes plus ou moins entasoit parce qu'ils.n'ont chées d'erreur, pas exactement compris le texte latin, soit parce qu'ils se sont laissés aller à imaginer des manoeuvres plus en rapport avec à l'épola tactique de leur temps et l'état de l'armement à combattre de que où ils écrivaient et qui obligeait de César où l'on plus loin, qu'avec ceux de l'époque CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE 155 corps à corps. On en presque constamment venu à considérer l'épisode de Labienus et de la 10e légion comme une fable inventée à au récit. d'ornement plaisir pour servir simplement en effet, que les troupes de César, Comment admettre, cernées d'assez près pour qu'une pareille conversation ait pu s'engager d'un parti à l'autre, à 25 ou 30 pas tout au plus, au milieu du tumulte de la bataille, n'aient pas été massacrées jusqu'au dernier homme? romains A cela je répondrais que les légionnaires invuld'une armure étaient couverts qui les rendait nérables, casque, cuirasse, jambière d'airain, et portaient cle quatre pieds de long, fait de bois recouun bouclier vert d'une peau cle boeuf, consolidé tout autour par une bande de métal et au milieu duquel s'élevait une saillie ronde en fer, umbo, destinée à faire glisser les projec. dans les exercices, la plus grande tiles. On donnait, des armes et, en particulier, au maniement attention à l'emploi du bouclier. — « Les maîtres d'armes — dit Végôce (Insiit. mil., 1. i, cap. xi) — avaient surtout attenleurs coups sans se tion que les soldats portassent à ce que, découvrir ». II n'y a donc rien d'impossible de César bien que serrés de si près, les légionnaires aient pu contenir l'ennemi et résister à ses coups assez à leur général d'ordonner et de temps pour permettre de faire exécuter la seule manoeuvre qui pouvait les tirer d'un pas si difficile. elle a été expliQuant à cette manoeuvre elle-même, Les uns ont déduit de quée de diverses manières. alternis conversis cohortibus, qu'une l'expression cohorte sur deux exécuta une conversion complète son front autour de l'un cle ses flancs, pour présenter face en arrière. Cependant, le membre de phrase qui : « ut una post alteram ante signa suit immédiatement tenderet », me semble de nature à nous mieux renseique j'ai consultés ont généralegner. Les traducteurs ment omis de le rendre, sans doute parce qu'ils ne Pont combattait est même du vétéran 156 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE L'un d'eux, dont la traduction est cepenpas compris. dant considérée comme l'une des plus fidèles, le rend ainsi : — « de deux en deux cohortes (César) fait comface en arrière, mander de sorte que les enseignes se trouvassent entre les deux ». — Un autre, se Wailly, de la vérité et avance que César rapproche davantage « ordonna aux cohortes de faire alternativement demiderrière et l'autre tour, de façon que l'une se trouvât devant Pour ante les enseignes ». bien comprendre signa ce que signifie cette expression de donner quelques tendere, il est nécessaire sur l'ordonnance habituelle de la cohorte explications au temps de César. Elle était composée de trois de 100 à 120 manipules sur dix rangs de profondeur les uns, hommes, d'après d'autres et sur six seulement sur huit d'après d'après de Gôler avait un (t. n, p. 216). Chaque manipule une enseigne. un drapeau, Les soldats d'un signum, : unius sig ni milites (T. L., même manipule s'appelaient les termes de signum xxv, 23, 16). Souvent on rencontre l'un pour et de manipulus l'autre et même employés : se in signa manipulosque conjointement conjiciunt de l'opinion (B. G., vi, 40), ce qui vient bien à l'encontre l'existence des enseignes de Rustow clans qui conteste au temps cle César (Noua, les manipules ann.phil., LXXXV, p. 218). 11 ne faudrait en effet, les signa des le véritable manipules drapeau de avait été la légion. adopté par son second consulat Marius (105 av. J.-C). pendant était un aigle aux ailes éployées, Ce signum legionis confondre, avec l'aigle, qui était Ce dernier emblème pas d'une hampe; d'abord en argent, porté au sommet plus des foudres dans lard en or, cet aigle tenait quelquefois ses serres. Le porte-aigle, était choisi aquilifer, parmi et les plus robustes les soldats les plus braves par les centurions réunis. Il se distinguait par une peau d'ours « L'aigle d'or le casque et les épaules. qui lui couvrait CAMPAGNE DE J. CÉSAR — dit Duruy (Hist. des Rom., t. bole de la patrie, du devoir, de un culte véritable lui rendaient u. 17) — sont Tacite (Ann., ments Les sont les dieux des les armées dans l'objet toujours des manipules signa et jouaient v, p. 566) — était le symet les soldats l'honneur, ». — « Les aigles, — dit légions.... du culte ». Telle est l'origine des régidont les drapeaux numina legionum et superstitieux propria idolâtre 157 EN AFRIQUE avaient un emploi plus praun rôle dont l'impor- la tactique locutions ressort de nombreuses qui expriment : signa conoellere, de la légion les mouvements efferre, en marche; iollere signa (B. G., i, 39, 40), se mettre tique tance dans modernes. la légion (B. G., n, 25), atta; signa inferre s'arrêter (B. G., ; signa convertere quer ; signa statuere, deserere discedere, signa ; a signis i, 25), converser (B. G., u, 99) i, 44), fuir ; signa referre (B. G., v, 33 ; B.C., le combat; battre en retraite; engager conferre, signa proferre, s'avance promoaere en bataille (T. L., vin, 23), lorsque en rangs et files, conduire sub signis ducere, ad signa continere de combat; manipulos (B. G., vi, 34), tenir sa troupe massée. servaient à tracer la les enseignes seulement Non on s'en servait mais encore pour ligne de bataille, legionem en ordre les transmettre enseigne, inférieurs ordres des chefs. Le signifer, les parmi un rang élevé occupait cet et on n'obtenait cle la légion, Une inscription un solide apprentissage. qu'après d'un vée en Afrique, (L. Renier, 59) fait mention Félix qui était élève porte-enseigne, C. Caecilius signiferum. IL est donc porteofficiers emploi troucertain discens de chaque manipuleque le signum le combat, en avant du rang, avant se trouvait pour du général. à la troupe les commandements transmettre il rentrait dans le manipule Dès que l'action s'engageait, certain au second rang. Le pretrès probablement et se plaçait et particulièrede soldats mier était composé éprouvés les antesignani, César ment que qualifie vigoureux, •158 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE ex omnibus viros legionibus forlissimos se trouvait donc en (B. C, i, 57). Le reste de la troupe du signum et les cohortes arrière combattaient post : post signa signa, ce que l'on indiquait par l'expression tendere. A Ruspina, César ordonna donc à une cohorte sur de sorte qu'elle se trouva placée deux de faire demi-tour, ainsi : eleclos ante du De Bello Africano nous signa, ce que l'auteur en disant : « Ut una post alteram ante signa explique tenderet ». Une cohorte continuait à combattre post ante signa, ce qui signa, pendant que l'autre combattait donne bien à entendre que, dans cette dernière, on fit faire aux soldats un demi-tour individuel et non, comme Pont cru, une conversion quelques-uns complète de la de manière à ce que les antesignani continuascohorte, au premier On n'aurait sent à combattre rang. pu y arriver que par un mouvement beaucoup trop long dans difficile la circonstance et toujours à exécuter pour une sur huit ou dix rangs de profondeur. troupe combattant se porta ensuite, par le flanc, de ces cohortes celle qui était restée face en tête, post alteram. derrière Ce dernier mouvement avait pour résultat cle rétablir Chacune des intervalles entre les cohortes qui, sous la pression les unes sur les autres et à se confondre. s'étaient de l'ennemi, jetées dont les rangs commençaient une grande On attachait alors, ainsi que de nos jours, des intervalles : entre à celte observation importance de se servir librement les hommes, pour leur permettre avec le boude l'épée et de parer les coups cle l'ennemi à la ligne de clier ; entre les cohortes, pour conserver de manoeuvrer. bataille une élasticité qui lui permettait à l'ordonnance romaine La grande mobilité imprimée des intervalles par l'adoption sur trois lignes en échiquier grand secret de la supériorité et la formation sont de combat incontestablement le de la légion sur les troupes la des autres nations plus longtemps qui conservèrent l'ordre c'est-à-dire plein. phalange, CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE 159 Dans ses remarques sur la bataille de Ruspina, le colonel Stoffel (t. u, 1. vin, p. 285) donne à entendre que les collines au-delà desquelles César rejeta l'ennemi sont de la plaine, celles qui bordent la partie septentrionale vers l'est, et auxquelles s'appuyait, au début cle l'affaire, l'aile gauche de la ligne romaine. Je ne saurais partager cette manière de voir. Je crois, au contraire, que c'est au-delà des hauteurs qui limitent la plaine à l'ouest que furent repoussées les troupes de Labienus. En les rejetant au nord et à l'est, César les aurait amenées sur le plateau qui sépare cette plaine de la mer, au sud de Monastir, sur lequel il avait établi son camp et dont il avait tout intérêt à conserver l'entière d'Hadrumetum possession. C'est donc dans la direction qu'il dut les repousser. C'est de ce même côté également que Labienus devait chercher à se porter, afin de se rapprocher des secours que lui amenait Scipion, et nous avons déjà vu que c'est sur Hadrumetum qu'il dirigea ses blessés, au nombre desquels se trouvait son lieutenant Petreius. Napoléon Ier estime que, dans cette bataille, César eut le dessous. Ce ne fut pas certainement une évidemment victoire au sens propre du mot ; on peut dire que c'est une des affaires où une armée commandée par lui courut les plus grands dangers, mais on ne doit pas en conclure que ce fut une iéfaite. En effet, malgré l'inféde ses troupes, il parvint à se riorité considérable débarrasser de l'ennemi, à le chasser des environs immédiats de son camp où il put rentrer sans être inquiété et Labienus une leçon qui le rendit, il donna à l'orgueilleux pour quelque temps du moins, un peu plus circonspect. 160 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE V César avait bien de Labienus que l'attaque compris n'était que le prélude des opérations que Scipion et Juba se proposaient contre lui. Des transfuges d'entreprendre lui apprirent courait que le bruit que, dans trois jours, toutes les forces des Pompéiens seraient concentrées dans le voisinage. Comme les renforts qu'il attendait n'étaient il résolut de pas encore près de le rejoindre, donner à son camp une force telle qu'il pût les y attendre sans crainte et défier toutes les attaques. Pour conserver intactes ses communications avec et la mer, il construisit deux nouveaux retranRuspina Le premier, chements. vers le nord, barrait l'indirigé tervalle entre le camp et le rivage ; le second, partant de l'angle sud-est du camp, couvrait la ville et se provers le sud jusqu'à l'endroit où mouillait la longeait flotte. Il renforça les parapets en hauteur et en épaisseur, les domina au moyen de tours rondes de façon disposées à croiser leur tir et les arma avec les machines et les des galères. Il fit débarquer traits les raqu'il retira sur les navires gaulois meurs qui servaient et rhodiens, leur distribua comme des troupes sa armes légères et à combattre exerça afin de les entremêler avec de l'ennemi. Il renforça ses à l'exemple cavalerie, de défense au moyen troupes les des archers d'Iturée et de dans la flotte. Syrie qui servaient il organisa des ateliers Avec une infatigable activité, des pieux, la fonte des balles, le pour la fabrication Le pays ne fournissant pas de bois et à la confection des balistes et propre au clayonnage des béliers, il en envoya chercher en Sicile, ainsi que du fer et du plomb. Par sa présence, conlipar ses visites forgeage des traits. DE J. CÉSAR CAMPAGNE dans les chantiers, nuelles Pendant deur de ses soldats. s'attacha il 161 EN AFRIQUE à stimuler des cohortes, couvraient les les travaux, de cavalerie des postes et des patrouilles abords du camp pour annoncer et éviter toute surprise. l'ar- de l'ennemi l'approche était celle de grandes préoccupations Nous avons vu que Scipion avait tout rendre en rassemcette tâche impossible Une de ses plus faire vivre l'armée. fait pour lui dans les blant, le blé de la tout où places des garnisons, les campagnes en ravageant se défendre. qui ne pouvaient province, les villes et en détruisant mis il avait un il n'y avait précédente pas eu de moisson, de gré nombre de laboureurs grand ayant été enrôlés des champs qui n'avaient ou de force et tous les ouvriers dans les légions pas été incorporés ayant été contraints L'année de se renfermer Dans vée cette dans les places nécessité pressante des approvisionnements et en Sardaigne, César fortifiées. et en attendant avait qu'il obtint l'arri- demandés en de quelques parti— privatos à force de prières et de caresses culiers, — un peu de ambiendo et blande appellando (B. A., 21) blé qu'il ménageait avec le plus grand soin. Manquant de fourrages il imagina de les nourrir pour les chevaux, Sicile avec des algues J'ai constaté, marines lors que la mer rejette, bien lavées cle mon en effet, grande quantité d'algues. c'est un fucus saccharinus encore emploient la nourriture du dans dernier l'eau douce. à Sousse, une voisines, voyage sur les plages Ch. Tissot nous apprend que dont les indigènes du littoral de nos jours les tiges et les feuilles à bétail. Cette plante une sorte produit de galle que mangent les habitants des îles Kerkennah et à laquelle ils donnent le nom d'olive de mer. les vaisseaux Cependant, convois partie des premiers où il était erraient campé, se réunissant de l'ennemi, en avaient pris et brûlé de charge fait qui avaient incertains du lieu de César, à l'aventure. pour plusieurs. les Les chaloupes attaquer isolément,' Il fut obligé d'envoyer 162 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE quelques galères croiser autour des îles et des ports pour assurer la sécurité de leur marche. Comme je l'ai dit précédemment, Scipion, surpris par le débarquement de César à Hadrumetum, s'était mis en mouvement vers le 5 novembre, avec la plus grande partie de ses troupes, laissant à Utica une assez forte garnison sous les ordres cle Caton. Celui-ci avait près de lui le fils aîné de Pompée, Cneus. Il ne cessait de le et de l'exciter pousser à l'action par ses discours : — ton père, voyant la Répu« A ton âge, — lui disait-il, blique opprimée par l'audace et la scélératesse de quelques citoyens, les gens de bien mis à mort ou proscrits, n'écouta que son courage et l'amour delà gloire. Simple et encore adolescent, il rallia les débris de particulier l'armée de son père et rendit à la liberté Rome et PItalie gémissantes sous le joug. Avec une étonnante promptila Sicile, l'Afrique, la Numidie et la tude, il reconquit Mauritanie. Par ces exploits, il mérita l'éclatante renommée qui l'a rendu illustre clans le monde entier. Tout jeune encore et bien que n'étant que simple chevalier romain, il mérita les honneurs du triomphe. Cependant, en abordant les fonctions publiques, il n'avait pour le soutenir ni les hauts faits d'un père, ni la gloire d'illustres ancêtres, ni une puissante clientèle, ni l'éclat d'un grand nom. Toi, au contraire, qui as hérité de la gloire de ton père, avec ton courage peret des honneurs sonnel et ton activité, ne feras-tu donc aucun effort? Pourquoi n'irais-tu pas trouver les amis de ton père et réclamer leur appui aussi bien pour toi que pour la République et pour tous les bons citoyens ? » (B. A., 22). Sur ses conseils, le jeune Cneus Pompée embarqua sur trente navires une troupe de 2,000 hommes à la tête où régnait alors desquels il se dirigea vers laMaurrtanie, de César et ennemi de Juba. 11 Bocchus III, partisan espérait ainsi retenir ce prince dans ses états et l'empêcher de faire, sur les frontières de Numidie, une diver- CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE 163 sion qui aurait pu retarder l'allié de Scipion au moment où il se disposait à aller le rejoindre. la troupe qu'il avait réunie à la Malheureusement, hâte n'avait aucune valeur. Composée d'un mélange d'hommes libres et d'esclaves, une partie seulement en était armée — cujus partent inermem, partent armalam habuerat (B. A., 23). Après avoir débarqué sur les côtes il marcha sur la ville d'Ascurum où de la Maurétanie, Celle-ci le laissa approcher le roi avait une garnison. portes, puis faisant une sortie en masse, à jusqu'aux bouscula cette se joignirent les habitants, laquelle cohue sans discipline, qui se hâta de regagner le rivage Ce revers fit changer de projet à et de se rembarquer. Pompée; il cingla vers les îles Baléares et ne reparut plus sur cette côte. où se trouvait la ville d'AscuOn ignore absolument avec ce point de rum. On ne saurait, en effet, l'identifier la province de Constantine que les indigènes désignent sous le nom d'Ascours. On a facilement déduit de cette dénomination que les quelques ruines que l'on y rendans les débris contre, et qui consistent principalement d'une tour carrée faisant partie d'un poste byzantin, ou Ascurum. La seule devaient être celles d'Ascurus ce jour inscription que l'on y ait découverte jusqu'à (C. /. L., t. vin, 5278) date du temps d'Hadrien et ne mentionne pas le nom de la ville. au coeur même de la Àscours se trouve d'ailleurs au nord-est de Cirta qui en Numidie des Massyliens. était la capitale. Or, c'est bien plus loin vers l'ouest, au delà encore de la Numidie des Massoessyliens qui devait plus tard porter le nom de Maurétanie Césarienne, qu'il de Cn. faut chercher le point où débarqua l'expédition Pompée. La Numidie de cette époque s'étendait à l'ouest fleuve Muluccha, la Moulouya de nos jours, jusqu'au qui se jette dans la mer près des îles Zaffarines et qui du Maroc. La Maurétanie de Bocchus sépare l'Algérie 164 CAMPAGNE s'étendait elle qui entre Maurétanie trouvait fut DE J. CÉSAR le Muluccha EN AFRIQUE et l'Océan c'est Atlantique; sous le nom de postérieurement et c'est sur son territoire que se Ascurum. désignée Tingitane évidemment C'estle 13 novembre, c'est-à-dire cinq jours après l'affaire de Ruspina, arriva devant Hadrumetum que Scipion avec ses huit légions et 3,000 chevaux. Il séjourna les 14 et 15 et opéra sa jonction avec Labienus et Petreius dans la nuit du 15 au 16. L'armée réunie s'installa dans un seul camp à environ trois milles (4 kilom. 500) au sud de celui de César, sur la bordure du plateau de où Labienus avait dû prendre Ruspina pied )e lendemain ou le surlendemain de la bataille. Ce camp devait se trouver un peu à l'est des ruines sans importance désisous le nom d'Henchir à peu gnées aujourd'hui Tenir, roule entre la ville de Monastir et le petit de Krnis à 6 kilomètres au sud de cette dernière. village De ce poste, il se contenta de bloquer aussi étroitement que possible le camp de César et cle lui interdire, près à moitié toute communication grâce à sa nombreuse cavalerie, avec l'intérieur du pays. Le dictateur ne possédait donc, sur le continent africain, que l'étroit espace de six mille entre ses retranchements et la mer. Jamais pas compris armée ne s'était trouvée clans une situation plus critisur un terrain de cinq cents hectares à que: bloquée trois fois supérieur en nombre et peine par un ennemi maître de foule la province sans vivres, sans d'Afrique, fourrages, sans nouvelles des renforts anxieusement numide allait et sachant l'armée attendus, que toute bientôt se joindre à celle de Scipion. On s'explique difficilement l'inaction ne ce dernier. Il se contentait de faire battre l'intervalle entre les deux camps par des partis fois jusqu'aux abords isolés qui tentaient Le colonel Stoffel de cavalerie de Ruspina, d'aller à l'eau en donne qui, se risquant parles soldats enlevaient ou au fourrage. l'explication suivante qui DE J. CÉSAR CAMPAGNE n'est sans pas EN AFRIQUE 165 — : — « Ce qui lui en imposait autrement formidables que les ouvrages valeur bien dit-il,--• de César, c'était la présence de César même, le conquérant des Gaules, le vainqueur de Pompée. Effectivement, les grands de ce privilège hommes de guerre jouissent de leurs hauts faits double la singulier, que le prestige confiance et le courage des troupes, déconcerte au conet trouble fût-il en nombre. l'ennemi, supérieur dans les moments de crise, la présence d'Annibal,, traire Ainsi, de Turenne, de Napoléon, En ces valait toute une armée. de novembre jours 47, César placé dans des circonstances d'une sérénité meté sans gravité égale, conserve un calme et une visibles cle sa fertémoignages ni dans ses manières, ni dans son ne trahissait son inquiétude. Dans ses visites admirables, d'âme. Rien, langage, aux travaux, il se montrait aux troupes : fréquemment son attitude son égalité entreted'humeur, tranquille, naient la confiance et rassérénaient les courages près de faiblir. Voulant à la fois rendre sa position et accoutumer ses jeunes troupes aux gnable il fit travailler sans Il leur lignes. creuser donna des fossés nombre des tours cesse aux en faisant exceptionnelle Le profonds que de coutume. plus fut encore et on les pourvut abords des fossés furent défaut sema d'abatis que fatigues, de ses une force machines Les retranchements inexpu- le pays on les arma de augmenté; d'une de traits. profusion : à rendus ne impraticables fournissait pas, on des y de et on y creusa des trous chausse-trappes en quinconce. on construisit des loups disposés Enfin, de la flotte, digues dans la mer, au mouillage pour le viendrait à tenter une attaque cas où l'ennemi de ce côté. » (Hist. de J. Ces., Guer. civ., t. u, 1. vin, p. 119). à ces considérations d'ordre sur ajoutons tout moral la. remarque que nous avons déjà faite de à peu près complète des armes offenl'impuissance sives en usage à cette époque contre des retranchements Si nous solidement défendus, nous aurons une explication 166 CAMPAGNE suffisante de l'attitude DE J. CÉSAR EN AFRIQUE de Scipion devant le camp de Ruspina. On pourrait supposer que, malgré les dix-neuf siècles qui se sont écoulés depuis la campagne de César en Afrique, il doit être possible de retrouver encore aujourd'hui quelques vestiges des travaux formidables que celui-ci fit exécuter par ses soldats pour rendre inexpugnables les lignes qu'il avait établies aux environs de Ruspina. On retrouve encore, sur différents points des contrées parcourues jadis parmi les armées romaines, des traces de leurs travaux et de leurs terrassements. Il n'en est malheureusement pas de même autour de Monastir. Le terrain sur lequel furent élevés les retranchements est aujourd'hui couvert de cultures et de champs d'oliviers ; de longues levées de terre plantées et d'épaisses haies de cactus séparent les propriétés s'entrecroisent dans tous les sens. Il est bien certain ont dû faire partie des lignes de que quelques-unes César, mais les fossés ont été comblés par la chute des se sont abaissées et il est imtours, les plates-formes avec certitude. possible de les reconnaître Informé de la situation critique dans laquelle se trouvait César, Juba s'était mis en route pour le théâtre des et de nombreux continopérations avec ses éléphants et de cavalerie. U s'avançait par l'ingents d'infanterie térieur, entouré d'une pompe barbare et ridicule, ravageant tout sur son passage. Certain de forcer le dictateur et de le jeter à la mer avant dans ses retranchements qu'il eût reçu des secours, il escomptait déjà le moment où, comme prix de son alliance, il pourrait annexer à son royaume une partie tout au moins de la province d'Afrique. Un événement imprévu vint troubler ses calculs et sauver César du péril dont il le menaçait. Un certain de Nuceria (ville de la Campanie), P. Sittius, originaire CAMPAGNE venait d'envahir Maurétanie. ses Ce Sittius de Catilina conjuration de qui il s'était engagé et peut être l'Espagne. hardi, intelligent, de l'armée rangs Contraint d'Italiens DE J. CÉSAR états le concours du roi de la pendant compromis (62-63 av. J.-C), pour le compte à soulever la province d'Afrique s'était C'était qui avait de Sertorius cle s'exiler, et d'Espagnols avec 167 EN AFRIQUE il une sorte appris la pendant levé avait avec lesquels de condottiere dans les guerre la Guerre sociale. un corps petit il était passé en avec sa troupe, au Libye, où il se mettait tour-à-tour, des rois du pays qui se faisaient service la guerre les « Comme la victoire uns aux autres. restait du toujours côté où il combattait, il s'acquit une grande réputation et son armée se rendit chaque jour plus redoutable en se perfectionnant clans le métier des armes » (Appien, Guer. cio., 1. iv, 54). Peu à peu, sa troupe s'était grossie d'une fouled'autres de tous pays, etil s'était aventuriers une petite escadre de guerre avec laquelle il procuré errait le long des côtes, vivant tantôt de pillage et de tantôt de la solde que lui payaient les chefs rapines, indigènes César intelligences les Numides, Bocchus il vendait ses services. se l'attacher il avait des et, comme chez les Mauritaniens, aussi bien que chez il lui avait confié la mission de décider auxquels avait su III à se joindre à lui pour envahir les états de Juba quand celui-ci se mettrait en route, avec son armée, la privince Il leur avait promis, sans pour d'Afrique. doute à tous deux, de leur abandonner, en cas de succès, comme il le fît d'ailleurs, des compensations territoriales à prélever sur les possessions du roi de Numidie. Juba n'était plus très loin de Ruspina quand des courriers vinrent lui apprendre de ses états, la l'invasion de Cirta prise (Constantine), autres villes dont les habitants sa et de deux capitale, avaient été passés au fil de l'épée. Les envahisseurs le pays, mettan t parcouraient tout à feu et à sang sur leur passage. A cette nouvelle, il fitdemi-tour en toute hâte, vers ses frontières. etrevint, 168 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE Il ordonna a celles de ses troupes qui avaient déjà renforcé l'armée de Scipion de le rejoindre à marches forcées et ne laissa au général qu'une trenpompéien taine d'éléphants encore incomplètement dressés. VI Il y avait déjà quinze jours que César était en Afrique. Il y avait soutenu une rude bataille et, cependant, les habitants de la province, ou indiromains, phéniciens encore de son arrivée. Ils supposaient gènes, doutaient n'étaient à Hadrumetum que les troupes débarquées que de son armée, commandée l'avant-garde par un de ses lieutenants. Peut-être avait-il Scipion fait, lui-même, ce bruit la crainte répandre pour détruire que le nom de ses seul de César pouvait dans l'esprit produire soldats. L'ayant appris, César envoya des proclamations sa présence. Aussitôt dans toutes les villes, pour affirmer à son camp des notables de ces différentes accoururent et le de leur dévouement cités, lui apportant l'hommage de mettre fin aux exactions ou aux cruautés suppliant Il leur promit de commencer des troupes pompéiennes. les opérations aussitôt que les renforts qu'il attendait l'auraient rejoint. Il expédia par un bateau léger, — catas— au gouverneur de Sicile, Allienus, copium, -/.«roOTxoTrtov, et à Rabirius Postumus de lui envoyer ses troupes sans retard, sans se préoccuper de la saison ni des vents aut ulla excusaiione hiemis contraires —sine more, était ventorumque (B. A., 26), — sans quoi l'Afrique perdue. à dresser les trente De son côté, Scipion s'occupait du Be Bello éléphants que Juba lui avait laissés. L'auteur s'en étonne, car, dit-il, ces animaux indociles Africano et à peine dressés, l'ordre même après plusieurs années d'exer- CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE 169 cice, finissent toujours par être également dangereux pour les deux partis dans la mêlée. en L'éléphant, que l'on ne retrouve plus aujourd'hui se rencontrait Afrique que dans la partie australe, encore, peu d'années avant l'ère chrétienne, dans les pays au nord du Sahara. Les auteurs anciens nous en fournissent de nombreux Hérodote et Pline témoignages. affirment son existence clans la région des Syrtes et en Maurétanie. Plutarque signale que Pompée, après sa en 83 av. J.-C, s'arrêta quelques campagne d'Afrique, jours dans le pays pour y chasser le lion et l'éléphant. Végère (Instit. milit., 1. m, ch. xxm) nous enseigne de Comme nous le verrons quelle façon on le combattait. figurer dans les opérations qui vont suivre, il peut être intéressant de savoir de quelle manière les anciens l'attaquaient et se défendaient contre lui. « La masse énorme des éléphants, — dit cet écrivain militaire, — leur cri horrible et la singularité de leur figure effraient des hommes et des chevaux qui les voient pour la première fois. Pyrrhus fut le premier qui en opposa aux Romains en Lucanie. Dans la suite, Annibal en en Orient, Jugurtha en Numidie en Afrique, Antiochus eurent de grosses troupes. C'est ce qui fit imaginer différents moyens de les détruire; on leur quelquefois coupait la trompe, à l'exemple cle ce centurion qui, le premier, fit cet exploit en Lucanie; quelquefois on attelait deux chevaux bardés à un char sur lequel on plaçait des soldats armés de longues piques en forme de lances dont ils perçaient les éléphants; les armes défensives dont les soldats étaient couverts les paraient des flèches qu'on leur tirait de dessus ces animaux. « On les faisait souvent attaquer par des soldats dont toute l'armure, semée de pointes de fer, ne laissait aucune prise à la trompe; mais on opposait le plus communément aux éléphants ces soldats appelés vélites. On sait que c'étaient des jeunes gens armés à la légère, très agiles et très adroits à lancer à cheval toutes sortes Revue africaine, 4fff année. m°s »<4-4t-«4L*s-( Ier et 2e Trim estres 1901). 12 170 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE d'armes de trait. Comme ils portaient des piques dont le fer était très large et des javelots plus longs que les ils furent d'abord les seuls qui, tombant sur les autres, à course de cheval, osèrent les attaquer éléphants avec ces armes. Dans la suite, plusieurs enhardis soldats, par le succès, se rassemblèrent contre ces animaux une grêle saient morts ou blessés. « Mais l'arme la plus sûre par pelotons, de javelots, et, lançant les renver- la fronde; on la charrondes, geait de pierres parce que le jet s'en dirigeait ces pierres, avec plus de justesse; lancées par une main adroite et vigoureuse, blessaient les conducteurs des et brisaient éléphants étaient chargés. Pour même était les tours se dérobera choc, les Romains imaginèrent vis d'eux ; ainsi, ces animaux serrés tervalle, s'y trouvaient dont ces animaux cle leur l'impétuosité encore de s'ouvrir au centre arrivés cle tous vis-àde l'inaccablés côtés, avec leurs et souvent pris conducgrand nombre, sans avoir été blessés. Enfin on plaçait quelquefois de l'armée à la, queue des chariots attelés cle deux chevaux ou de deux et chargés de ces bamulets, parle teurs listes loin. qui Sitôt poussent que les les très roide et très javelots s'en étaient éléphants approchés à la portée du trait, les soldats de se servir de chargés ces machines, les bandaient contre eux avec succès; on cherche à faire de larges et profondes mais, comme blessures à ces animaux monstrueux, d'armes plus meurtrières pour eux que ». coups sont d'ailleurs plus certains Chaque jour, avaient entre les deux elles cle continuelles avec Labienus, de abords jusqu'aux jour, C. Saserna place ; mais suffisamment puissantes cavaleries quelques il n'y l'épée, a point dont les se rencontraient escarmouches. escadrons, Un se porta défendait Leptis minor, que il ne put rien entreprendre contre et munie de nombreuses fortifiée machines. et la et DE J. CÉSAR CAMPAGNE 171 EN AFRIQUE en bataille ses troupes Fréquemment, Scipion rangeait mais toujours à trois cents pas de son camp, espérant, trouverait l'occaet qu'il en vain, que César l'imiterait sion Une de l'écraser grâce il fit sortir fois, et infanterie sa à sa forte supériorité son armée, toute cavalerie et fit numérique. son déploya de mine marcher à de ses des retranchements romains, précédé l'attaque aux de tours. César prescrivit trente éléphants chargés soldats qui étaient sortis du camp, pour aller au bois ou et cle se retirer avec tous les travailleurs au fourrage, sans bruit et sans peu à peu dans les lignes, de cavalerie Il recommanda aux avant-postes de du trait, l'ennemi puis jusqu'à portée entamer. camp en bon ordre et sans se laisser ce temps, en de l'armée se tenait, pendant cle rentrer confusion. d'attendre rentrerai! reste Le à tout événement. prêt avant d'avoir Résolu à ne pas s'engager reçu tous ses de son adversaire et il méprisait la jactance renforts, à ses vaines provocations refusait de répondre des arrière retranchements, à perdre commençait attitude, Scipion d'insil en profitait pour essayer patience. Cependant à ses troupes plus de confiance qu'il n'en avait pirer lui-même. Il affectait, dans les harangues qu'il peut-être Devant cette leur d'attribuer à la terreur qu'elles adressait, de ses soldats, à César et au découragement du dictateur. pleine de prudence Tout plus et les cela n'empêchait en plus fréquentes Gélules le pas les désertions clans son armée. inspiraient la conduite de devenir de Les Numides peu à peu, les uns pour rentrer dans leurs foyers, les autres pour se rendre au César choisit les plus considérables camp ennemi. ces derniers et les envoya de leurs parmi auprès quittaient à prendre concitoyens pour les exhorter défendre contre et à refuser Scipion ordres. Quelques lui centres, des envoyèrent la ville libre députations les armes, d'exécuter entre d'Achilla, pour l'assurer à se ses autres, de leur 172 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE zèle et lui demander des garnisons. Elles lui prometen échange,de lui envoyer du blé et tous les taient, lui fournir. Se approvisionnements qu'elles pourraient rendant à leurs il commença à désirs, par envoyer Achilla un détachement, sous les ordres de C. Messius, qui s'y installa le 23 novembre. de celte place avait pour lui une réelle L'occupation non seulement au point de vue des vivres importance, en tirer, mais parce qu'il gagnait par là le qu'il pouvait de s'étendre et d'élargir la base des opérations moyen dans qui lui permettraient, plus tard, de s'avancer l'intérieur. entre autres Guischard, ont voulu Quelques auteurs, voir dans la bourgade située entre Tunis et cl'El-Alia, l'Achilla Bizerte, d'Hirlius, \'"hyfùa de Strabon, d'Appien de Byzance, et d'Etienne et du Yhyjjlv. de Ptolémée Achollitanum ou Acolilanum de Stadiasme, Voppidum de la. Table de Peutinger. C'est évidemPline, VAholla ment une erreur. Comment en effet, admettre, que César aurait commis vers le l'imprudence d'envoyer c'est-à-dire à travers tout le pays occupé nord, par un aussi faible détachement pour aller s'insl'ennemi, d'Ufica où taller dans une ville située dans le voisinage avait tous ses approvisionnements Scipion gardés par nombreuse sous les ordres de Caton? une garnison disent bien que Considius, Les Commentaires qui en partit avec huit commandait toujours àHadrumetum, dans le but de prévenir C. Messius el d'occuper cohortes la cause de l'erreur Achilla avant lui. Telle est peut-être de Considius a Ce mouvement que je viens cle signaler. pu faire croire, en effet, que C. Messius avait été obligé, cette place, de passer dans les parages pour atteindre de se diriger vers le d'Hadrumetum et, par conséquent, son nord. Mais il est probable n'entreprit que Considius de Scipion. Celui-ci, s'étani, que sur l'ordre expédition rendu compte cle la faute qu'il avait commise en n'occu- DE J. CÉSAR CAMPAGNE pant pas un plus grand sans doute, à songea la voulant pas distraire il bloquait le lesquelles 173 EN AFRIQUE de points sur le littoral, Ne ce moment, à la réparer. avec moindre partie des troupes nombre de Ruspina, il jugea préféd'Hadruune partie de la garnison rable d'y employer le moment, aucun ennemi pour metum, qui n'avait, devant elle. Une inscription dans les ruines recueillie par Ximénès camp voisines d'El-Alia, près signalée également du reste, par appris, s'élevait à cet splendidissima C'est donc que endroit, Cotuza. de Bou-Chateur (Utica) 208), nous et a p. dans la ville l'antiquité, qui, Cotuza — respublica s'appelait Shaw (t. i, libre par le sud, dans le pays laissé V. Guérin Achilla. faut chercher (Voy. Scipion, qu'il les en avoir retrouvé arch. en Tun., t. i, p. 148) croit sous le nom d'Elrestes à un endroit désigné également vers au sud de Mahedia (Alipota?) où vers le point entre le ras Salakta et le ras Kapoudia, vint attaBélisaire devait plus tard débarquer lorsqu'il de Gelimer (532). On n'y remarque quer les Vandales d'un édifice assez important, vestiges plus que quelques d'habitations d'une une des restes époque citerne, d'un relativement récente et, sur la plage, les débris Alia et situé sur le littoral Achilla était Etienne de Byzance, D'après quai. une tradition colonie de Malte (Melita) et, suivant retournés dans ses habitants seraient indigènes, de à métropole inscription delà ville l'époque n'est venue, antique dont l'invasion arabe. une des leur Aucune, ce jour, révéler le nom jusqu'à les décombres gisent, presque, sous les sables de la dune. ensevelis, complètement à 40 mille romains La Table dePeutinger place Acholla au sud de Ruspina. Or, c'est à peu près la distance qui de Monastir. On les ruines d'El-Alia sépare aujourd'hui se demandera donc d'Hadrumetum, à environ pouvait devancer espérer comment Considius, 25 kilomètres plus C. Messius à Achilla. partant au nord, La raison 174 CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE en est bien simple. Pour dérober sa marche, la petite colonne des césariens était obligée de longer le littoral et d'en suivre les contours, tandis que Considius, pouvant marcher librement par l'intérieur des terres, n'avait à parcourir sensiblement qu'un trajet égal au sien. Malgré cela il arriva le dernier. Voyant la place occupée, il n'osa en tenter l'attaque et retourna à Hadrumetum. Mais Labienus lui ayant amené des renforts, il revint mettre le siège devant la ville. Pendant ce temps, C. Sallustius que nous Crispus, avons vu partir avec une escadre pour les îles Kerkennah, s'était emparé, sans coup férir, des approvisionnements de blé qui s'y trouvaient rassemblés. L'ancien questeur C. Décimius, qui y commandait pour Scipion, s'était empressé de prendre la fuite à la nouvelle de son arrivée. Il avait donc envoyé au mouillage de Ruspina tous les vaisseaux de charge qu'il avait trouvés dans le port de Cercina, après les avoir remplis de blé. Les habitants de Thysdrus ville située à (El-Bjem), 33 milles (49 kilom. 500) au sud d'Hadrumelum, firent, à ce même moment, savoir à César qu'il y avait dans les de blé appartemagasins de la ville 300,000 boisseaux nant à des négociants italiens et à des cultivateurs des environs et lui demandèrent une garnison qu'il ne put leur envoyer de suite, mais qu'il leur promit dès que les circonstances le lui permettraient, Le 26 novembre, arriva enfin un premier convoi venant de Sicile. Il amenait, avec des vivres, les 13eet 14elégions, et mille frondeurs et archers. 800 cavaliers gaulois et des approvisionneL'arrivée de ce premier renfort ments qui commençaient à manquer louf-à-fait, ranima l'ardeur des soldats de César. Les troupes nouvellement furent distribuées daas les tours et les débarquées des fatigues de la mer — castella pour se remettre exlangore nauseaque reficere (B. A., 34), — pendant CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE 175 que les vaisseaux qui les avaient amenés retournaient en Sicile embarquer d'autres renforts. Bientôt, par un second convoi, arrivèrent deux légions de vétérans, de la cavalerie et de nouvelles troupes armées à la légère. De son côté, Caton ne restait pas inactif à Utica. Il de nouvelles levées d'affranchis, faisait continuellement d'indigènes et d'esclaves; il incorporait tous les hommes en état de porter les armes, les équipait, les armait et les envoyait, au fur et à mesure, au camp de Scipion. Mais l'armée de ce dernier commençait, à son tour, à souffrir du manque d'eau. On ne trouve, en effet, au sud de Monastir, qu'un petit nombre de puits saumâtres qui avaient dû finir par s'épuiser. Scipion se cle son camp. décida donc à changer l'emplacement A la nouvelle de son départ, César, qui avait déjà;des forces suffisantes pour sortir de l'inaction dans laquelle la faiblesse de ses effectifs Pavait tenu jusque-là, comprit la période des était venu d'entamer que le moment opérations, de marcher à l'ennemi et de chercher enfin l'occasion de se mesurer avec lui. VII Avant d'aller plus loin, il me paraît nécessaire de donner un aperçu du terrain qui va servir de théâtre aux événements qui vont suivre. Nous avons déjà parlé de la vaste plaine qui commence à l'ouest du plateau de Ruspina et s'étend vers le sud jusqu'aux environs de Djemmal et de Mennzel-Kamel. C'est là que, le 8 novembre, César avait été cerné par les troupes de Labienus et de Petreius et avait couru de si grands dangers. Cette plaine est limitée, à l'est et à l'ouest, par deux chaînes de hauteurs à peu près parai- 176 lèles CAMPAGNE DE J. CÉSAR EN AFRIQUE se au sud, par de faibles rejoignent, pentes formant comme un vaste col où prennent naissance les deux El-Melah et oueds, qui se dirige vers le nord, Ouled-Moussa qui va se jeter au sud, dans le Shebkretqui ed-Dekriba. La chaîne Sidi-Ameur, et Mesdour de l'ouest porte El-Hamada, ; elle s'élève de 80 à 90 mètres, puis direction de Sousse. Celle de l'est les de Matmer, Mennzel-Harb villages Mesjed-Aïssa, une altitude jusqu'à s'abaisse commence graduellement de près à l'est la par le s'élève la koubba à environ mer, de Monastir, du village mamelon de Hamadet-ech-Chouf, 8 kilomètres moyenne dans la de Bembla, sur lequel cle Sidi-Moussa. Colonel Pour tous MOINIER. les articles non signés Le Président, V. WAILLK.