Pique-niques, barbecues : gare aux bactéries de l`été

ALLEZ SAVOIR! / N°38 MAI 20078
MÉDECINE
Pique-niques,
barbecues : gare aux
bactéries de l’été
Vive l’été, ses pique-niques et barbecues en
plein air! Si elles pouvaient parler, certaines
bactéries entonneraient, elles aussi, ce refrain.
Campylobacter, salmonelles, shigelles ou
Escherichia coli profitent de la chaleur
pour se multiplier dans nos sandwiches
et nos grillades mal cuites, provoquant
des gastro-entérites. Les explications
et les conseils de deux chercheurs de
l’UNIL pour s’en prémunir.
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MÉDECINE
Pique-niques, barbecues: gare aux bactéries de l’été
I
nvariablement, chaque été apporte
son lot de gastro-entérites d’origine
alimentaire. Les courbes saisonnières des
infections dues au campylobacter et aux
salmonelles, dressées par l’Office fédé-
ral de la santé publique (OFSP), en
témoignent: elles se caractérisent par des
pics importants en juillet et en août. On
pourrait en dire autant des troubles intes-
tinaux provoqués par les shigelles et les
Escherichia coli.
Aucun doute n’est possible. Ces bac-
téries et quelques autres profitent de la
saison chaude pour s’insinuer en nombre
dans notre système digestif, provoquant
des diarrhées qui peuvent s’accompagner
d’autres symptômes. Des troubles tou-
jours déplaisants et qui, parfois, peuvent
se révéler plus graves.
Chaîne du froid rompue
Mais pourquoi l’été? Question de cli-
mat, tout simplement. Lorsque la tem-
pérature atteint et dépasse 30°C, ces
micro-organismes s’épanouissent et pro-
lifèrent rapidement. Pour eux, «c’est la
situation idéale, constate Thierry Calan-
dra, chef du Service des maladies infec-
tieuses du CHUV et professeur à la
Faculté de biologie et de médecine de
l’UNIL. La température ambiante est
alors proche de celle (37°C) que l’on uti-
lise dans nos laboratoires pour faire pous-
ser ces germes.»
Nos habitudes estivales font le reste
pour favoriser les contaminations. Ces
micro-organismes sont véhiculés par les
animaux domestiques – volailles et
bovins notamment – et par l’eau. Ils se
retrouvent ensuite dans la viande et les
œufs crus ou insuffisamment cuits, ainsi
que dans le lait non pasteurisé. Autant
dire que si l’on rompt la chaîne du froid
– ce qui est fréquent en été lorsque les
sandwichs restent dans les sacs avant
d’être consommés au terme d’une
longue balade – ils ont tout le loisir de
se multiplier.
Steak peu cuit, eau
non bouillie...
Les déjeuners sur l’herbe ne sont tou-
tefois pas les seuls en cause. Les barbe-
cues sont, eux aussi, propices à l’appa-
rition des infections alimentaires. Le feu
qui tarde à prendre, les invités qui s’im-
patientent et crient leur faim: il n’en faut
pas plus pour que l’assemblée se préci-
pite sur des steaks ou des morceaux de
poulet peu cuits et qui, de ce fait, peu-
vent être vecteurs d’infections.
Si, de surcroît, les convives veulent
profiter de l’eau d’une rivière pour pré-
parer leurs boissons, ils risquent gros. En
août 2003, rapporte l’OFSP, neufs jeunes
recrues ont été victimes d’une entérite à
campylobacter après avoir bu du thé
infusé dans de l’eau de ruisseau non
bouillie.
Sans compter que la saison chaude est
par excellence celle de la convivialité.
Lors des fêtes et manifestations, de nom-
breuses personnes se trouvent réunies
autour d’une même table. En plein air de
surcroît, où il n’est pas toujours facile de
se laver les mains. Promiscuité, manque
d’hygiène: les facteurs sont réunis pour
favoriser la transmission des infections
de toutes sortes, d’origine alimentaire
notamment.
Tout est affaire de quantité
En fait, ces bactéries, en soi, ne sont
pas toutes pathogènes. «On mange des
salmonelles tous les jours, souligne
Jacques Bille, directeur de l’Institut de
microbiologie médicale rattaché au
CHUV et professeur de microbiologie à
la Faculté de biologie et de médecine de
l’UNIL. Si l’on en consomme peu et que
© N. Chuard
Thierry Calandra, chef du Service des maladies infectieuses du CHUV et
professeur à la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL
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nos défenses immunitaires sont intactes,
on ne risque rien.» Les problèmes vien-
nent de l’importance de l’inoculum, c’est-
à-dire de la quantité de micro-organismes
ingérée. Pour être infecté par des salmo-
nelles, il faut en avaler plusieurs millions;
pour ce qui est des shigelles, quelques
dizaines suffisent.
Lorsque les germes arrivent en nom-
bre dans l’estomac, les sucs gastriques
sont débordés et ne peuvent plus détruire
les intrus. «Les salmonelles passent alors
dans l’intestin grêle. Là, elles peuvent
suivre deux chemins différents, selon leur
type. Celles qui causent des gastro-enté-
rites restent localisées dans la muqueuse
intestinale. En revanche, les «S. typhi»,
qui sont des agents de la typhoïde, pénè-
trent dans les cellules intestinales; elles
résistent au système immunitaire et pas-
sent dans la circulation sanguine, puis
disséminent dans les différents organes
(foie, rate, etc.)», précise Thierry Calan-
dra. Fort heureusement, les cas de ty-
phoïdes restent rares en Suisse; la quasi-
totalité est acquise dans les pays en
développement.
Bactérie du hamburger
«Le tableau clinique est assez peu spé-
cifique», souligne pour sa part le micro-
biologiste du CHUV. Les salmonelles et
les shigelles provoquent des diarrhées –
dans lesquelles peuvent apparaître du
sang ou des glaires – et parfois de la fièvre
(lire en p. 14). Les campylobacter, qui
sont responsables, en Suisse, du plus
grand nombre d’infections alimentaires,
causent d’ailleurs les mêmes symptômes,
mais ceux-ci sont «plus marqués».
Quant à certains sérotypes d’Escheri-
chia coli, ils induisent la fameuse turista
Les barbecues sont propices à l’apparition d’infections alimentaires. Les personnes les plus
menacées sont les gens âgés et les enfants
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La «bactérie du hamburger»
a provoqué plusieurs poussées épidémiques chez les mangeurs
de viande hachée mal cuite
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Pique-niques, barbecues: gare aux bactéries de l’été
du voyageur. Mais d’autres, comme les
colibacilles entérohémorragiques, sécrè-
tent des toxines qui peuvent avoir des
conséquences beaucoup plus graves. De
tels cas sont très rares en Suisse. En
revanche, «ces bactéries du hamburger»
ont provoqué, aux Etats-Unis, plusieurs
poussées épidémiques chez des consom-
mateurs de viande hachée mal cuite, alors
qu’au Japon, c’est après avoir avalé des
radis contaminés que de nombreuses per-
sonnes sont tombées malades.
Listeria: redoutables
pathogènes
Un autre microorganisme mérite d’ê-
tre mentionné : la Listéria. Certes, celle-
ci ne peut pas être considérée comme
une «bactérie de l’été», dans la mesure
où elle provoque des infections en toutes
saisons. Les cas de listérioses restent
d’ailleurs «peu fréquents en Suisse»,
précise le spécialiste Thierry Calandra.
C’est heureux car, lorsqu’ils se mani-
festent, ces germes se révèlent être de
«redoutables pathogènes alimentaires»,
comme le dit son collègue microbiolo-
giste. On se souvient des cas de listé-
rioses qui avaient été provoqués, il y a
une quinzaine d’années, par la consom-
mation de vacherins.
Les fromages à pâtes molles figurent
en effet parmi les principaux vecteurs de
ces bactéries, mais on les trouve aussi
dans les produits carnés, les salades et
les poissons – notamment fumés. Ubiqui-
taires, les Listeria résistent de surcroît
aux températures fraîches des réfrigéra-
teurs, aux fortes concentrations de sel et
même aux milieux acides. Elles provo-
quent des gastro-entérites assez sé-
rieuses, qui peuvent s’accompagner de
septicémies et de méningites chez les per-
sonnes les plus fragiles.
Intoxications alimentaires
Comme si cela ne suffisait pas, il
faut encore ajouter au tableau
quelques bactéries responsables d’in-
toxications alimentaires, autrement dit
de gastro-entérites affectant le tractus
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Le poulet cru est souvent porteur de germes. Il doit être
bien cuit avant d’être consommé
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