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René Barbier
L’ÉTHIQUE ÉDUCATIVE AU COEUR DE L’INNOVATION
PÉDAGOGIQUE
DÉCEMBRE 2011
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SOMMAIRE(
Introduction&p.4&
Chapitre(1.(Conscience(écologique(et(éthique(de(l’éducation(:(p.9(
1.1&Ecologie,&esthétique&et&poétique&de&notre&être‐au‐monde&
1.2&L’éducateur&comme&passeur&de&sens&p.9&
1.3.&La&dimension&sociale&et&solidaire&de&l’acte&éducatif&p.10&
1.4.&&L’approche&transversale&p.12&
i.5.&Les&Trois&Pulsions&de&l’apprenant&p.14&
Morale&d’État&et&éthique&personnelle&:&une&impossible&conciliation&p.18&
Chapitre(2(L’innovation(et(la(novation(:(rappel(des(enjeux(p.22(
Introduction&p.22&
2.1&De&quelques&innovations&représentatives&d’une&éthique&éducative&p.24&
2.1.1&une&pédagogie&du&risque&;&l’escalade&p.24&
2.1.2&&La&question&de&la&dérive&en&pédagogie&p.34&
Au&total,&quelques&remarques&
Sur&le&plan&méthodologique&:&p.41&
La&force&de&l'institué&
Une&autre&option&possible&p.42&
Questionnement&éthique&sur&l’innovation&«&la&dérive&créative&»&p.43&
Chapitre(3(Technologie,(éthique(et(innovation(pédagogique(H(Réflexion(sur(
l’expérience(3(G(p.46&
3.1&Introduction&p.46&
3.2.&L’expérience&3G&p.46&
3.2.1&De&l’imaginaire&social&du&NET&p.47&
3.2.2&&L’ordinateur&et&l’imaginaire&social&p.49&
Chapitre(4(Réflexion(sur(un(sens(de(la(vie(animé(par(une(éthique(éducative(et(sur(
une(autre(éducation&p.58&
4.1.&Le&sens&de&la&vie&et&le&sens&du&monde&&p.58&
4.1.1.&.&Le&sens&de&la&vie&et&le&sens&du&monde&:&une&question&essentielle&toujours&
d’actualité&
&4.1.2.&Le&dépassement&de&soi&dans&le&processus&existentiel&et&le&symbolique&aujourd’hui&
‐&l’assomption&de&l’inéluctabilité&de&l’imaginaire&et&de&l’élaboration&collective&du&
symbolique&p.70&
‐&Sur&la&Profondeur&p.73&
‐&La&Reliance&est&ainsi&une&catégorie&fondamentale&de&la&vie&spirituelle&laïque.&p.76&
‐&Élaborer&le&symbolique&:&vers&une&éco‐éthique&&dont&parle&le&philosophe&japonais&
contemporain&Tomonobu&Imamichi.&p.81&
Le&manager&et&le&formateur&de&managers&doivent‐ils&être&«&optimistes&»&?&p.81&
Le&réenchantement&du&monde&et&la&vision&des&scientifiques&p.83&
La&pensée&du&japonais&Tomonobu&Imamichi&&p.84&
4.2.&Le&Sensuel,&le&Sensible&et&l’Intelligible&p.86&
4.2.1.&Le&Sensuel&et&l’imaginaire&p.87&
4.2.2.&Le&Sensible&et&la&participation&p.87&
4.2.3.&L’Intelligible&et&le&symbolique&p.88&
4.2.4&L’imaginaire,&le&symbolique&et&le&réel&et&le&tiers&inclus&p.88&
Le&Réel&ou&l’être‐là&et&l’Advenir&p.89&&
Conclusion&p.90&
Bibli ographie((p.92(
Annexe&:&entretien&avec&Edgar&Morin&sur&l’éthique&et&l’éducation&p.97
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Une fois l’unité perçue organiquement, le miracle c’est la diversité et non l’unité qu’elle
véhicule
Jacques Masui ( Cheminement)
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INTRODUCTION
En quoi l’éthique éducative peut-elle se refléter dans les actions pédagogiques menées par le
CIRPP et en quoi joue-t-elle un rôle dans la problématique du management émancipant ?
Toute la réflexion que j’ai menée depuis des années dans le cadre du CIRPP me conduit à
privilégier l’émergence de la question éthique dans la compréhension actuelle de l’évolution
de notre civilisation technologique1. Dès lors l’éthique éducative s’y trouve activement
concernée dans sa spécificité et son exigence ontologique.
Morale ou éthique ?
Lorsque nous voulons expliquer la spécificité de la morale, plusieurs perspectives nous sont
offertes. André Comte-Sponville en propose cinq.
- La morale versus Darwin pour laquelle tout se joue en fonction de l’intérêt de l’espèce.
- La morale versus Durkheim pour laquelle l’intérêt se déplace du côté de la société
- La morale versus Kant où la raison devient une référence absolue
- La morale versus Jésus-Christ pour laquelle l’amour prend toute la place
- La morale versus Freud complètement engendrée par le surmoi parental
Mais comme il le remarque, chaque type de morale présente une faille. Il faut dit-il les
accepter tous les cinq à la fois, dans un jeu subtil de médiation2.
André Comte-Sponville nous fournit des exemples qui font dérailler un raisonnement
purement philosophique et abstrait constitutif de la morale objective - et nous ouvrent sur
une décision relevant de la singularité d’une conscience humaine face à un problème crucial.
Ainsi nous dit-il si en 1943 des SS frappent à notre porte et que nous cachons des résistants
ou des Juifs traqués, et que les sbires nous demandent avec insistance « Y a-t-il des résistants,
des juifs cachés dans votre grenier ? », je suis certain que personne ne s’interrogera sur
l’intérêt de l’espèce. J’espère que personne ne s’interrogera sur l’intérêt de la société.
J’imagine et j’espère que tout le monde se fichera éperdument de savoir si le mensonge est ou
non universalisable sans contradiction. Vous allez mentir et vous aurez évidemment raison. »
(p.45). C’est alors que la morale concrète et existentielle s’appuie sur l’amour du prochain
pour étayer sa réponse. De mon point de vue elle passe alors directement au niveau de
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1 René Barbier, « L’éthique éducative, une problématisation », rapport au CIRPP, juin 2011, in Journal des
chercheurs http://www.barbier-rd.nom.fr/journal/article.php3?id_article=1495 (page vue le 25 novembre 2011)
2 André Comte-Sponville, François Euvé, Guillaume Lecointre, Dieu et la science, Paris, Les Presses de
l’ENSTA, 73 pages, notamment pages 44-45
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l’éthique personnelle, singulière, reflétant une philosophie de la vie radicale les valeurs
ultimes sont en jeu pour un être unique : celui qui prendra la décision.
Je suis du même avis que Michel Maffesoli lorsqu’il dit que la morale « représente un monde
qui n’est plus » après la phase de construction philosophique post-nietzschéenne et
l’aventure de la post-modernité qui instaure l’ère de la pluralité des visions du monde. La
morale issue des Lumières, celle du Progrès, de la Science ou de l’Eglise s’est terminée en
« moraline » (Nietzsche) et en hécatombes, en holocaustes et en génocides au XXe siècle. Il
ne reste plus que le retour à la conscience individuelle de la personne qui prend toute la valeur
et l’enjeu du « vouloir-vivre » et de « l’instant éternel » en reconnaissance une éthique de
l’esthétique. Il s’agit de « créer sa vie, créer dans sa vie. Jouir au présent de ce qui est donné à
vivre »3. L’attitude philosophique conduit dans ce cas à l’émergence d’éthiques particulières
multiples dans lesquelles « Au-delà ou en deça des universaux l’Humanité, la Classe, le
Parti, la Race, le Marché, dont le fondement est rationnel -, elles mettent l’accent, pour le
meilleur et pour le pire, sur le partage de valeurs spécifiques, et sur le sentiment
d’appartenance que cela ne manque pas d’induire ». (p.20)
Il me semble que nous pouvons, en vérité, réfléchir à trois orientations éthiques ;
- La première est celle du discours absolutisant et abstrait, élaboré et conceptualisé, qui veut
systématiser une morale fondée sur la raison raisonnante et l’impérialisme de valeurs prônées
par l’Occident. C’est la Morale, avec un grand M issue de la philosophie des Lumières, de la
Raison comme absolu et de la mise à l’écart de la vie affective et sensible.
- La deuxième s’inscrit dans un registre complètement singulier et dans la reconnaissance de
ce qui avait été perdu : la nature, la puissance des pulsions, la joie de la vie dionysiaque et de
l’effervescence sociale, comme Michel Maffesoli le décrit depuis des années dans toute son
oeuvre, mais que Michel Onfray vient également étayer à sa manière.
- La troisième, qui a ma préférence, sans refuser la précédente, la nuance en faisant remarquer
que sous le monde des apparences et des phénomènes multiples, émiettés, particuliers et
souvent recomposés en formes « tribales », réside un niveau plus secret, plus intime, à
découvrir par l’expérience de conscience holistique et noétique et que j’appelle la profondeur
de la non-dualité. Michel Maffesoli depuis longtemps, comme d’ailleurs d’autres chercheurs
en éducation (Michel Lobrot, Georges Lapassade, Patick Boumard, Remi Hess, Gabriele
Weigand) insistent pour valoriser la dissociation ordinaire et dénoncent « le mythe de
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3 Michel Maffesoli, Le réenchantement du monde. Une éthique pour notre temps, Paris, La Table Ronde, 206
pages, page 93.
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