Pour démarrer: raisonnements mathématiques et

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Pour démarrer: raisonnements mathématiques et stratégies de base
pour collégiens
Margaret Bilu
20 octobre 2014
Ce document 1 a pour but de vous familiariser avec quelques ”trucs” de base en mathématiques qu’il est
important de savoir, en particulier certains types de raisonnements.
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1.1
Vocabulaire de théorie des ensembles
Définitions
En mathématiques, on appelle ensemble une collection d’objets, qui peuvent être de nature variée. Les
objets contenus dans l’ensemble sont appelés éléments de l’ensemble. Ainsi, on peut considérer des ensembles
de nombres, mais par exemple aussi l’ensemble des élèves d’une classe, l’ensemble des chats roux en France
etc. Un ensemble se note entre accolades { et }. Si un élément x appartient à un ensemble A, on note x ∈ A,
sinon on note x 6∈ A.
Un ensemble est dit fini s’il ne contient qu’un nombre fini d’éléments, infini sinon. Si un ensemble A est
fini, on appelle cardinal de A le nombre d’éléments de A. On peut le noter CardA ou |A|.
Exemples
– L’ensemble {1} contient un seul élément, qui est 1.
– L’ensemble A = {1, 2, 5, 7, π} est composé de cinq éléments, les nombres 1, 2, 5, 7 et π. Cet ensemble
est donc fini de cardinal 5. On a 1 ∈ A mais −3 6∈ A.
– L’ensemble B de tous les entiers pairs est infini. On a 2 ∈ B mais 1 6∈ B, et π 6∈ B.
– L’intervalle C = [0, 4] est l’ensemble des nombres compris entre 0 et 4 (au sens large). Il est infini.
1.2
Opérations sur les ensembles
Soient A et B deux ensembles. On appelle intersection de A et B, et on note A∩B, l’ensemble des éléments
appartenant à A et à B. On peut également définir l’intersection de plusieurs ensembles A, B, C, D . . ., comme
l’ensemble des éléments appartenant à tous les ensembles considérés.
Exemple Soient A,B et C les ensembles définis ci-dessus. Alors :
– A ∩ B = {2} puisque le seul entier pair appartenant à A est 2.
– B ∩ C = {0, 2, 4} car les seul entiers pairs compris entre 0 et 4 sont 0,2 et 4.
– A ∩ C = {1, 2}.
– A ∩ B ∩ C = {2}.
Soient A et B deux ensembles. On appelle union de A et B, et on note A ∪ B, l’ensemble des éléments
appartenant à A ou à B. De même que pour l’intersection, on peut définir l’union de trois ensembles ou plus
comme l’ensemble des éléments appartenant à au moins l’un des ensembles concernés.
Soient A et B deux ensembles. On dit que A est inclus dans B (ou que B contient A) si tout élément de
A est également élément de B. On dit alors aussi que A est un sous-ensemble de B, et on note cela A ⊂ B.
Exemple
– L’ensemble des entiers pairs est un sous-ensemble de l’ensemble de tous les entiers.
– L’intervalle [0, 4] est un sous-ensemble de l’intervalle ] − 1, 5[, et contient l’ensemble {0, 1}.
1. Cet texte a été rédigé sur la base d’extraits de cours donnés par Margaret Bilu, Joon Kwon, François Lo Jacomo et Irène
Marcovici lors de divers stages olympiques et autres événements destinés aux collégiens et lycéens.
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Il est souvent commode d’illustrer des raisonnement sur des ensembles par des dessins : on représente les
ensembles par des ”patates”. On a alors A ⊂ B si la patate correspondant à A est entièrement contenue dans
celle correspondant à B. L’intersection de A et de B est l’ensemble des points contenus dans les deux patates,
l’union l’ensemble des points contenus dans au moins une des deux patates. Par exemple sur le dessin suivant,
l’intersection de A et B est la zone doublement hachurée, et l’union est toute la zone hachurée (doublement
ou pas).
B
A
1.3
Comptage et inclusion-exclusion
Dans ce paragraphe tous les ensembles utilisés seront finis, et on pourra donc parler de leur cardinal. Le
but ici est de donner des moyens de calculer les cardinaux d’intersections et d’unions d’ensembles.
Principe d’inclusion-exclusion - On note |A| le nombre d’objets d’un ensemble A. Si A, B, C sont
des ensembles, alors on a :
|A ∪ B| = |A| + |B| − |A ∩ B|
|A ∪ B ∪ C| = |A| + |B| + |C| − |A ∩ B| − |A ∩ C| − |B ∩ C| + |A ∩ B ∩ C|.
Pour démontrer ces formules, le plus simple est de dessiner des patates ! Ainsi, pour la première formule,
à l’aide du dessin ci-dessus, on peut voir que l’aire de toute la zone hachurée, qui représente |A ∪ B|, s’obtient
en ajoutant l’aire de A et l’aire de B, puis en soustrayant l’aire de la zone doublement hachurée, car cette
dernière a été comptée deux fois. Essayons de comprendre la deuxième formule en ajoutant une patate pour
l’ensemble C :
B
A
C
Ici :
– L’ensemble A correspond à la zone grisée ;
– L’ensemble B correspond à la zone hachurée ;
– L’ensemble C correspond à la zone en pointilles ;
– L’ensemble A ∩ B correspond à la zone grisée et hachurée ;
– L’ensemble B ∩ C correspond à la zone hachurée et en pointillés ;
– L’ensemble C ∩ A correspond à la zone en pointillés et grisée ;
– L’ensemble A ∩ B ∩ C correspond à la zone grisée, hachurée et en pointillés.
Nous nous intéressons à l’aire de l’ensemble A ∪ B ∪ C, qui correspond à la zone qui est grisée ou hachurée
ou en pointillés. Pour cela, on commence par additionner l’aire de la zone grisée A, de la zone hachurée B
et de la zone en pointillés C, ce qui nous donne déjà |A| + |B| + |C|. Or on a compté ici en double toutes
les aires qui ont un double coloriage. Il faut donc soustraire |A ∩ B| + |B ∩ C| + |C ∩ A|. Mais maintenant,
la zone du milieu qui est grisée, hachurée et en pointillés a été comptée trois fois dans |A| + |B| + |C|, puis
soustraite trois fois dans |A ∩ B| + |B ∩ C| + |C ∩ A|. Il faut donc rajouter |A ∩ B ∩ C| pour être sur d’avoir
pris en compte tout le monde, ce qui nous donne la formule énoncée.
2
Exercice 1 Combien y a t-il de nombres à moins de quatre chiffres (de 0 à 9999) qui ne sont divisibles ni
par 3, ni par 5, ni par 7 ?
Exercice 2 Un cube 20 × 20 × 20 est divisé en 8000 cubes unités. On écrit un nombre dans chaque cube
unité. Dans chaque ligne et dans chaque colonne de 20 petits cubes, parallèle à une des arêtes du cube, la
somme des nombres fait 1. Dans un des petits cubes, le nombre écrit est 10. Par ce petit cube passent trois
couches 1 × 20 × 20 parallèles aux faces du cube. Trouver la somme de tous les nombres en dehors de ces
trois couches.
2
Les différents ensembles de nombres
Pour se fixer les idées, rappelons rapidement les noms et définitions des différents ensembles de nombres.
L’ensemble N = {0, 1, 2, 3 . . .} contient tous les entiers positifs (y compris zéro). Pourquoi N ? Parce qu’on
l’appelle souvent l’ensemble des entiers naturels, par opposition avec les entiers relatifs contenant les négatifs,
qui, rappelons-le, ont été introduits bien plus tard.
Si on rajoute les négatifs, on obtient l’ensemble des entiers relatifs, Z, cette lettre venant probablement de
l’allemand ”Zahl”, qui veut dire ”nombre”. Ainsi, Z = {. . . , −3, −2, −1, 0, 1, 2, 3, . . .}.
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, et plus généralement ceux de la forme pq avec p et q entiers et q non nul (que
Les nombres comme 21 , − 10
vous connaissez sous le nom de fractions) sont regroupés dans Q, l’ensemble des nombres rationnels. La lettre
Q vient probablement du mot ”quotient”. Notons que tout entier n s’écrit n1 et appartient donc à Q (on note
n ∈ Q).
√
√
Exercice 1 Montrer que 2 n’appartient pas à Q. Indication : écrire 2 = pq avec p et q premiers entre eux
√
et mettre au carré. Plus généralement, si n ∈ N n’est pas le carré d’un entier, on peut montrer que n 6∈ Q.
Il y a donc des nombres non rationnels, qu’on appelle irrationnels. Un autre irrationnel célèbre est π.
Tous les nombres que vous connaissez appartiennent
√ à un ensemble beaucoup plus grand, R, l’ensemble
des nombres réels. Ainsi, R contient aussi bien 0 que 2 et que − π6 . Il contient aussi plein de nombres plus
mystérieux, qu’on ne peut pas écrire aussi facilement. Pour vous représenter R, dessinez un axe, avec les
nombres 0,1,-1,... Vous pouvez aussi placer 12 , 34 , et, plus approximativement, 13 et π.
−1
− 12
0
1
3
1
2
3π
4
5
Cet axe est souvent appelé l’axe des réels, ou la droite réelle. En fait, tout point de cet axe correspond
à un réel. Vous pouvez ainsi voir à quel point cet ensemble est gros par rapport à l’ensemble des entiers. Il
est en fait aussi beaucoup plus gros que l’ensemble des rationnels (c’est-à-dire qu’il y a beaucoup plus de
nombres irrationnels que de nombres rationnels).
Récapitulons : Nous avons quatre ensembles de nombres inclus strictement les uns dans les autres de
cette façon :
N ⊂ Z ⊂ Q ⊂ R.
3
Principes de démonstration
Dans un problème de mathématiques, on vous demandera toujours de démontrer quelque chose. Mais les
démonstrations peuvent prendre des formes très différentes, suivant l’énoncé, mais aussi suivant la solution
que vous avez trouvée, et suivant votre propre choix de rédaction. Voici néanmoins quelques grands types de
démonstrations.
3.1
Équivalence et double implication
Avant de présenter les schémas de preuve par équivalence et double implication, nous avons besoin de
faire un peu de logique. Soient P et Q deux propositions.
On dit que P implique Q, et on note P =⇒ Q si on ne peut simultanément avoir que P est vraie et que
Q est fausse. On peut alors également dire que
– Si P est vraie, alors Q est vraie.
– Pour que Q soit vraie, il suffit que P soit vraie : P est une condition suffisante pour Q.
– Pour que P soit vraie, il faut que Q soit vraie : Q est une condition nécessaire pour P .
On appelle souvent la proposition Q =⇒ P la réciproque de P =⇒ Q. Attention, si P =⇒ Q est vraie,
sa réciproque ne l’est pas nécessairement ! Voyons quelques exemples :
3
Exemples
1. Soient P =”Il fait beau aujourd’hui” et Q = ”Il ne pleut pas aujourd’hui”. Alors P =⇒ Q. En revanche,
nous n’avons pas Q =⇒ P vu qu’il pourrait très bien faire moche sans qu’il pleuve... L’absence de pluie
est donc une condition nécessaire au beau temps, mais non suffisante.
2. Soit P = (x ∈ N) et Q = (x ∈ Z). En français, P est la proposition ”x est un entier naturel” et Q est
la proposition ”x est un entier relatif”. Alors P =⇒ Q. En revanche, la réciproque n’est pas vraie, vu
qu’il existe des entiers relatifs qui ne sont pas naturels, par exemple −1. Le fait d’être un entier naturel
est une condition suffisante au fait d’être un entier relatif, mais nullement nécessaire.
Et que se passe-t-il si la réciproque est tout de même vraie ? Si P implique Q et Q implique P , on dit
que P et Q sont équivalentes et on note P ⇐⇒ Q. On peut alors également dire que
– P est vraie si et seulement si Q est vraie.
– Pour que Q soit vraie, il faut et il suffit que P soit vraie : P est une condition nécessaire et suffisante
pour Q.
– Pour que P soit vraie, il faut et il suffit que Q soit vraie : Q est une condition nécessaire et suffisante
pour P .
Exemples
1. Soit P = (x ∈ N) et Q = (x ∈ Z et x ≥ 0). Alors P ⇐⇒ Q. En effet, nous avons P ⇐⇒ Q vu qu’un
entier naturel est un entier relatif, et est positif ou nul. Réciproquement, si x est un entier relatif et
qu’il est positif, il est nécessairement naturel.
2. Soit P = (x = 3) et Q = (x + 1 = 4). Alors P ⇐⇒ Q. En effet, pour déduire Q de P il suffit d’ajouter
1 aux deux côtés de l’identité. Pour déduire Q de P , il suffit de soustraire 1 des deux côtés. Retenez
cela : si vous faites des opérations réversibles sur les égalités, c’est-à-dire telles que vous pouvez effectuer
l’opération inverse, alors vous obtenez des égalités équivalentes.
3. Soit P = (x = 3) et Q = (x2 = 9). Alors P =⇒ Q vu qu’il suffit de mettre au carré les deux côtés de
l’identité donnée par P pour obtenir Q. En revanche, Q =⇒ (x = 3 ou x = −3), mais Q n’implique
pas P : normal, nous avons effectué une élévation au carré, qui n’est pas une opération ”réversible” si
nous n’avons pas d’indications sur le signe de ce que nous avons mis au carré.
Beaucoup de théorèmes en mathématiques se présentent ou bien comme des implications, ou bien comme
des équivalences. Quelques exemples parmi ce que vous connaissez :
Racines carrées : Soit a ∈ R. Si a est la racine carrée d’un entier, alors a est entier ou irrationnel. En
revanche, la réciproque est fausse : √12 est irrationnel, mais son carré 12 n’est pas entier.
Théorème de Pythagore Soit ABC un triangle. ABC est rectangle en A si et seulement si BC 2 =
AB 2 + AC 2 .
De même, dans les exercices, on vous demandera souvent de prouver une implication ou bien une
équivalence.
Prouver une implication Si un exercice vous demande de prouver qu’une certaine proposition P implique
une proposition Q, il suffit de partir de P et d’essayer d’en déduire Q. Un exemple simple :
Exercice : Montrer que si le triangle ABC ci-dessous est rectangle en A, alors a = 5.
B
•
a
3
A•
4
•C
Démonstration. Ce qui se cache derrière le ”si...alors...” de l’énoncé, est simplement l’implication
(ABC rectangle en A) =⇒ a = 5.
C’est cela que nous allons prouver : Supposons que ABC est rectangle en A et montrons que a = 5. Le
théorème de Pythagore donne a2 = 32 + 42 = 25. Donc a = 5 ou a = −5. Mais a est positif car il s’agit d’une
longueur. D’où a = 5. Conclusion, on a bien démontré (ABC rectangle en A) =⇒ a = 5.
4
Prouver une équivalence Imaginons qu’on nous demande de prouver que pour deux propositions P et
Q, l’équivalence P ⇐⇒ Q est vraie. La manière la plus répandue et la plus prudente de procéder est celle qui
consiste à découper la preuve en deux, en montrant d’une part que P =⇒ Q, et d’autre part que Q =⇒ P .
Dans l’exemple ci-dessus, cela donne :
Exercice : Montrer que le triangle ABC ci-dessus est rectangle en A si et seulement si a = 5.
Démonstration. Nous avons déjà montré le sens direct (ABC rectangle implique a = 5). Montrons la
réciproque, c’est-à-dire supposons a = 5 et montrons qu’alors ABC est rectangle. Dans ce cas nous avons
a2 = 25 = 32 + 42 , donc la réciproque du théorème de Pythagore nous permet de conclure.
Attention : En rédigeant une preuve par double implication, il est important de bien préciser quel sens
vous êtes en train de montrer, sinon on peut vite avoir l’impression que vous vous servez de ce que vous
voulez prouver ! Par exemple dans la preuve ci-dessus, il était important de préciser qu’on était en train de
prouver la réciproque pour pouvoir utiliser le fait que a = 5.
Vous avez déjà fait pas mal de raisonnements par double implication lorsque vous avez résolu des
équations : en effet, supposons que nous voulons résoudre l’équation 4x + 5 = 0. On commence à chercher des conditions nécessaires pour qu’un nombre soit solution de l’équation, c’est-à-dire qu’on cherche à
voir ce que le fait que 4x + 5 = 0 implique sur x. Par exemple, nous pouvons voir que cela implique que
4x = −5, donc que x = − 54 . Vu que nous avons raisonné par implication, nous n’avons pour le moment montré
seulement la proposition ”Si x est solution, alors x = − 45 ”. Or on nous demande de résoudre l’équation, c’està-dire de trouver l’ensemble de toutes les solutions. Il faut donc que nous prouvions également la réciproque,
c’est-à-dire que nous vérifions que − 54 est bien solution
de l’équation. Cela se fait par simple vérification en
remplaçant x par − 45 dans l’équation : 4 × − 54 + 5 = −5 + 5 = 0. Nous avons donc prouvé :
5
4x + 5 = 0 ⇐⇒ x = − .
4
Remarquons que dans des cas simples comme celui-là, on peut raisonner directement par équivalence.
Plus précisément, nous pouvons remarquer que
4x + 5 = 0 ⇐⇒ 4x = −5,
et que
5
4x = −5 ⇐⇒ x = − ,
4
(nous n’avons effectué que des opérations ”réversibles”) d’où l’équivalence 4x + 5 = 0 ⇐⇒ x = − 54 . Le fait
de montrer que deux propositions sont équivalentes en les reliant par une succession de propositions telles
que chacune est équivalente à la suivante s’appelle un raisonnement par équivalence. Vous pouvez l’utiliser
pour des cas simples, mais si vous avez un doute, préférez la double implication.
3.2
Le raisonnement par l’absurde
Supposons qu’on nous demande de prouver qu’une certaine propriété A est vraie.
Raisonnement par l’absurde : On suppose que A est fausse, et on cherche à aboutir à une contradiction.
√
L’exemple le plus célèbre est l’irrationalité de 2 que vous avez vue dans l’exercice dans le paragraphe
sur les ensembles de nombres. Remarquons que pour cette preuve, un raisonnement par l’absurde est indispensable, car on ne sait caractériser un nombre irrationnel que par le fait qu’il n’est pas rationnel.
L’avantage du raisonnement par l’absurde, c’est qu’il introduit une hypothèse supplémentaire,
ce qui est
√
appréciable quand on ne sait pas d’où partir. Par exemple dans le cas de l’irrationalité de 2, c’est le fait
de supposer qu’il est rationnel qui nous permet de démarrer la démonstration, et d’avoir des idées pour la
mener à bout.
3.3
Bilan : règles pour bien raisonner et bien rédiger
Voici quelques conseils à suivre quand vous rédigez une solution à un exercice. Tout n’est pas forcément
obligatoire pour chaque exercice ; une fois que vous aurez l’habitude vous saurez ce qui est nécessaire et ce
qui est superflu, mais quand on débute, il vaut toujours mieux être trop précis que pas assez !
1. Dites ce que vous voulez prouver. Par exemple, si l’énoncé pose une question : ”Est-il possible de... ”,
commencez par y répondre en une phrase avant de développer votre raisonnement.
5
2. Annoncez le type de raisonnement que vous allez utiliser, grâce à une phrase du type ”Nous allons
raisonner par double implication. Montrons d’abord que ...”, ou bien ”Nous allons raisonner par l’absurde.”, ou bien ”Nous allons raisonner par récurrence sur n” (cf le paragraphe sur le raisonnement
par récurrence). Ces deux derniers points permettent à quelqu’un qui lirait votre solution de savoir à
quoi s’attendre.
3. Quand vous hésitez sur l’utilisation de certains symboles mathématiques, dans le doute préférez une
phrase en français. Prenez cependant garde à ce que la signification de la phrase en question soit bien
claire pour qu’une personne qui lit votre solution puisse comprendre.
4. Aérez votre présentation. En particulier, si vous avez à distinguer plusieurs cas, allez à la ligne, ou
sautez même une ligne, entre chaque cas. Cela permet au lecteur de votre solution de s’y repérer plus
facilement.
5. N’hésitez pas à faire des dessins : souvent c’est bien plus clair que d’écrire des paragraphes entiers de
texte.
6. N’oubliez pas de conclure et de mettre en valeur votre résultat, en le soulignant par exemple.
4
Le principe des tiroirs
Le principe des tiroirs semble très évident lorsqu’on l’énonce, pourtant c’est un principe étonnamment
puissant, utilisé dans un grand nombre de démonstrations mathématiques.
Principe des tiroirs : Si l’on place strictement plus de n objets dans n tiroirs, l’un des tiroirs au moins
contiendra au moins deux objets.
La démonstration utilise un raisonnement par l’absurde : supposons que chaque tiroir contient au plus
un objet. Alors comme il y a n tiroirs, il y a au plus n objets, contradiction avec l’hypothèse selon laquelle
il y a strictement plus de n objets.
Exemple : Imaginez que vous voulez ranger 7 chaussettes dans 6 tiroirs. Alors il y aura un tiroir au moins
qui contiendra deux chaussettes.
Il est important que le nombre d’objets (ici les chaussettes) soit strictement supérieur au nombre de
tiroirs, sinon on pourrait placer un objet par tiroir. Dans les exercices utilisant le principe des tiroirs, il
est donc important de bien identifier les chaussettes et les tiroirs, en vérifiant qu’il y a strictement plus de
chaussettes que de tiroirs.
Exercice 1 Dans le collège de Dirichletville, il y a 400 élèves. Montrer qu’il y a au moins deux élèves fêtant
leur anniversaire le même jour.
Exercice 2 Dans son armoire, Gustave a des chaussettes vertes, bleues et rouges. Hélas, son petit frère
dort dans la chambre et il ne peut donc pas allumer la lumière. Combien de chaussettes doit-il prendre à
l’aveuglette dans l’armoire pour être sûr d’en avoir deux identiques ?
Exercice 3 Montrer que parmi les élèves d’une classe, il en existe deux qui connaissent le même nombre
d’élèves de la classe.
Exercice 4 On remplit un tableau 3 × 3 avec les nombres −1, 0, 1, puis on calcule la somme des nombres
dans chaque ligne, chaque colonne, et chacune des deux diagonales. Montrer que parmi les sommes obtenues,
il y en a deux qui sont égales.
1
0 -1 1
1 1 1
-1 -1 0
0
3
-2
0 -1 2
1
Un exemple de remplissage du tableau
Exercice 5 Dans une classe il y a 25 élèves. On sait que deux filles quelconques de cette classe ne connaissent
pas le même nombre de garçons de la classe. Quel est le plus grand nombre de filles qu’il peut y avoir dans
cette classe ?
6
Exercice 6 On choisit 5 points à coordonnées entières du plan. Montrer que parmi ces points, il en existe
deux qui sont les extrémités d’un segment dont le milieu est également à coordonnées entières.
Exercice 7 Parmi les entiers 1, 2, . . . , 2014 on en a choisi 1008. Montrer que parmi les entiers choisis il y en
a deux qui sont premiers entre eux.
Le principe des tiroirs admet une variante : si l’on place dans n tiroirs strictement plus de kn objets,
au moins un tiroir contiendra au moins k + 1 objets. Un exemple tout bête : chaque Parisien a au plus 300
000 cheveux, or il y a 3 000 000 de Parisiens. On en déduit qu’on peut trouver dix Parisiens ayant le même
nombre de cheveux. Les tiroirs, c’est les nombres de cheveux, et les objets, les Parisiens. Attention qu’il y a
300 001 tiroirs, à savoir tous les nombres entre 0 et 300 000. Pour pouvoir affirmer qu’on peut trouver onze
Parisiens ayant le même nombre de cheveux, il faut qu’il y ait strictement plus que 10× 300 001 Parisiens,
donc au moins 3 000 011.
Exercice 8 Germantrude a 25 pièces d’une valeur comprise entre 1 et 10 centimes dans son porte-monnaie.
Pourra-t-elle toujours trouver 7 pièces identiques parmi celles-ci ? et 8 ?
Exercice 9 Dans une salle de classe, il y a 7 rangées de 10 places. Une classe de 50 élèves y a cours le
matin et l’après-midi. Montrer qu’il existe deux personnes ayant été assises dans la même rangée aussi bien
le matin que l’après-midi.
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Invariants
Le principe des invariants est assez vague, c’est plutôt une méthode qu’un énoncé mathématique précis.
Principe des invariants - Si une quantité est conservée par certaines transformations, alors il est
impossible de passer d’une situation à une autre où la quantité est différente en utilisant seulement ces
transformations.
Exemple :
1. Si on enlève une case à un échiquier de taille 8 × 8, on ne peut pas le paver avec des dominos de taille
1 × 2. En effet, imaginons qu’on puisse le faire. Le nombre initial de cases à paver (63) est impair, et
lorsqu’on pose un domino, cela ne change pas la parité du nombre de cases restant à paver. On ne peut
donc jamais arriver à une situation où le nombre de cases à paver est nul, donc où on a pavé toutes les
cases. Ici, l’invariant est donc simplement la parité du nombre de cases à paver.
2. Imaginons maintenant qu’on enlève deux cases situées à des coins opposés de l’échiquier (qui sont disons
blanches). Un argument d’invariant un peu plus sophistiqué permet également de montrer qu’on ne
peut pas non plus le paver avec des dominos. Remarquons pour cela qu’un domino recouvre toujours
une case blanche et une case noire de l’échiquier, donc lorsqu’on pose un domino, on ne change pas la
différence entre le nombre de cases noires et le nombre de cases blanches. Au début, cette différence
vaut 2 (nous avons 32 cases noires et 30 cases blanches) donc nous ne pouvons pas arriver en posant
des dominos à une situation où elle vaut zéro, donc où toutes les cases sont pavées. Ici l’invariant était
donc la différence entre le nombre de cases noires et le nombre de cases blanches.
Les exercices suivants permettent de voir d’autres exemples d’utilisation d’invariants.
Exercice 1 Une feuille de papier est déchirée en trois parties. Ensuite, l’une de ces parties est déchirée de
nouveau en trois parties, et ainsi de suite. Peut-on obtenir, en fin de compte, un total de cent parties ?
Exercice 2 On considère le tableau de signes suivant :
+
−
+
+
+ − +
− + +
+ + +
+ + +
On répète plusieurs fois l’opération qui consigne à choisir une ligne ou une colonne et à en changer tous les
signes en leurs opposés. Est-il possible d’atteindre un tableau constitué seulement de signes − ?
Exercice 3 Est-il possible de répartir les entiers 1, 2, . . . , 33 en 11 groupes disjoints de trois éléments chacun,
de sorte que dans chaque groupe, l’un des éléments soit la somme des deux autres ?
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Exercice 4 On écrit les nombres 1, 2, 3, . . . , 2013 sur une feuille de papier, puis on choisit deux nombres
quelconques qu’on efface et on les remplace par leur différence. Est-il possible que le dernier nombre restant
soit 2 ?
Exercice 5 Sur une ı̂le vivent 34 caméléons, qui peuvent prendre 3 couleurs : jaune, rouge et vert. Au
début 7 sont jaunes, 10 rouges et 17 verts. Lorsque deux caméléons de couleurs différentes se rencontrent, ils
prennent simultanément la troisième couleur. Il se trouve qu’au bout d’un certain temps, tous les caméléons
de l’ı̂le ont pris la même couleur. Quelle est cette couleur ? (Il faut en particulier montrer que c’est la seule
possible.)
Exercice 6 A partir d’un triplet (a, b, c), on peut effectuer l’opération suivante :
– On choisit deux des nombres√du triplet, mettons√
x et y
2 et y √
par (x + y)/ 2, en
– On remplace x par (x − y)/ √
√ laissant
√ le troisième nombre inchangé.
Peut-on passer du triplet initial (2, 2, 1/ 2) au triplet (1, 2, 1 + 2) en respectant ces règles ?
Exercice 7 On écrit les nombres 1, 2, 3, . . . , 100 000 sur une feuille de papier, puis on remplace chaque
nombre par la somme de ses chiffres, et ainsi de suite, jusqu’à ce que chaque nombre ne soit constitué que
d’un seul chiffre. Quel est le chiffre le plus fréquent de la liste obtenue ?
6
Le raisonnement par récurrence
Le raisonnement par récurrence est un type de raisonnement très courant en mathématiques. Imaginez que vous êtes tout en bas d’un escalier
infini dont les marches sont numérotées, disons à partir de 1. Imaginons
que vous pouvez atteindre la marche numéro 1, et que, pour tout n ≥ 1,
une fois arrivés sur la marche n, vous pouvez monter sur la marche n + 1.
Ainsi, vous montez sur la marche 1, puis à partir de la marche 1 vous
pouvez aller sur la marche 2, à partir de la marche 2 sur la marche 3, etc.
C’est alors assez intuitif de penser que vous pouvez atteindre toutes les
marches, et c’est exactement ce que dit le principe de récurrence ! Plus
précisément, soit P (n) une propriété dépendant d’un entier n ≥ 1. Pour
montrer par récurrence que P (n) est vraie pour tout n ≥ 1, il faut :
– Vérifier que P (1) est vraie. Cette étape s’appelle l’initialisation.
– Montrer que de P (n) on peut déduire P (n+1). Cette étape s’appelle
l’hérédité, parce qu’on vérifie que l’entier n + 1 hérite la propriété
P de l’entier n.
Faisons-le sur un exemple : Soit P (n) la propriété
P (n) :
1 + 2 + ... + n =
Hérédité
n+1
n
Initialisation
2
1
La récurrence
n(n + 1)
.
2
Exprimée en français, pour un entier n la propriété P (n) stipule donc que la somme des n premiers entiers
est égale à n(n+1)
. Notre mission consiste à
2
– prouver P (1) (c’est-à-dire monter sur la marche 1)
– prouver que de P (n) nous pouvons déduire P (n + 1) ( c’est-à-dire passer de la marche n à la marche
n + 1)
et alors d’après le principe de récurrence nous aurons prouvé P (n) pour tout n (c’est-à-dire nous pourrons
atteindre n’importe quelle marche). Allons-y !
Initialisation
Hérédité
Au rang 1 le côté gauche vaut 1, le côté droit vaut
1(1+1)
2
= 1, donc P (1) est vérifiée.
Supposons P (n) vraie et montrons P (n + 1). Nous savons que
1 + ... + n =
n(n + 1)
.
2
C’est ce qu’on appelle l’hypothèse de récurrence. Nous voulons prouver la propriété P (n + 1) qui s’écrit
?
1 + . . . + n + (n + 1) =
8
(n + 1)(n + 2)
2
(on a obtenu cela en remplaçant n par n + 1 dans P (n)). Comment s’y prendre ? Comment P (n) peutelle nous aider pour montrer P (n + 1) ? Remarquons pour cela que le côté gauche de P (n + 1) ressemble
fâcheusement au côté gauche de P (n) : en fait, c’est le même auquel on a ajouté (n + 1). Cela nous donne
l’idée d’ajouter n + 1 des deux côtés de P (n). On obtient alors
1 + . . . + n + (n + 1) =
n(n + 1)
+ n + 1.
2
On met ensuite au même dénominateur le côté gauche, et on factorise :
n(n + 1) + 2(n + 1)
(n + 1)(n + 2)
n(n + 1)
+n+1=
=
.
2
2
2
Bingo ! On a obtenu exactement le côté droit de P (n + 1), donc P (n + 1) est vraie, et la propriété P est
héréditaire.
Finalement, par le principe de récurrence on a donc prouvé P (n) pour tout n.
Notons que c’est une formule assez remarquable qui donne la somme des n premiers entiers, à retenir.
Pour mieux comprendre d’où sort cette formule, illustrons-la par le dessin suivant :
Ce dessin représente 1 + 2 + 3 + 4 + 5 carrés. Le nombre total des carrés est donc la somme des 5 premiers
entiers. Prenons maintenant une copie de ce même dessin, retournons-la, et emboı̂tons-la avec la première
copie, comme le montre la figure suivante :
←−
←−
←−
Combien y a-t-il de petits carrés maintenant ? Il y en a 5 × 6, vu qu’ils forment un rectangle de dimensions
5 × 6. D’autre part, il y en a deux fois plus que dans la figure de départ, donc
1 + ... + 5 =
5×6
,
2
ce qui est bien cohérent avec la formule prouvée plus haut (pour n = 5).
Remarque Ce qu’on vient de voir est l’expression la plus simple du principe de récurrence, qui admet de
nombreuses variantes. Par exemple, nous ne sommes pas obligés de commencer à 1, nous pouvons initialiser
notre propriété à un k quelconque, et alors par récurrence nous prouverons la propriété pour tout entier
n ≥ k. Cela revient juste à rénuméroter les marches de notre escalier à partir de k. C’est utile si par exemple
0 et 1 sont des exceptions et que la propriété n’est vraie qu’à partir de 2.
Exercice 1 Soit n ≥ 1. Conjecturer combien vaut, en fonction de n, la somme des n premiers entiers impairs,
puis prouver la conjecture obtenue par récurrence.
Somme des premiers entiers impairs
Exercice 2
9
1. Montrer que pour tout entier n ≥ 0, 2n > n.
2. Montrer que pour tout entier n ≥ 4, n! > 2n .
(Rappel : n! désigne le produit des n premiers entiers, c’est-à-dire n! = 1 × 2 × . . . × n.)
Exercice 3 Soit n ≥ 1 un entier. On se donne n cercles dans le plan, qui délimitent donc un certain nombre
de régions du plan. Montrer que l’on peut colorier le plan à l’aide de deux couleurs de sorte que deux régions
ayant une frontière commune ne soient jamais de la même couleur.
Exercice 4 Suites récurrentes Une suite est une succession de nombres u0 , u1 , u2 , . . . numérotés. Il y a
plusieurs manières de définir une suite : la première consiste à donner directement la valeur de un en fonction
de n pour tout entier n. Par exemple, si on définit pour tout n, un = n, alors la suite (un ) est simplement
la suite de tous les entiers naturels. Une autre manière de faire est de donner pour tout n une recette pour
calculer un+1 à partir de un . Bien entendu, cela ne permet de calculer tous les termes de la suite que si on
fournit également le premier terme ! Une suite définie de telle manière est appelée suite récurrente.
1. Soit la suite définie par u0 = 0 et pour tout n ≥ 0, un+1 = un + 1. Pouvez-vous trouver une formule
explicite pour un ? Qu’en est-il de la suite (vn ) définie par v0 = 1 et vn+1 = vn + 2 ?
2. Donner une formule explicite pour la suite définie par u0 = 1 et un+1 = 2un .
3. Soit (wn ) la suite définie par w0 = 2 et wn+1 = 3wn + 2. Montrer que pour tout n, wn est pair.
Exercice 5 Que pensez-vous du raisonnement suivant ?
On va montrer que tous les stylos dans une trousse sont toujours de même couleur, par récurrence sur le
nombre de stylos. S’il y a un seul stylo, c’est vrai. Supposons maintenant que c’est vrai pour une trousse de
n stylos pour un certain entier n, et considérons une trousse contenant n + 1 stylos. On enlève un certain
stylo, et on se retrouve alors avec n stylos dans une trousse. Par hypothèse de récurrence, ils sont tous de
même couleur. On remet le stylo qu’on a enlevé. S’il est de la même couleur que les autres, on a fini. Sinon,
on enlève un autre stylo, et on se retrouve de nouveau avec une trousse contenant n stylos. Par hypothèse
de récurrence, les stylos à l’intérieur sont tous de la même couleur. On remet maintenant le stylo qu’on a
enlevé, qui est forcément de la même couleur que les autres. Ainsi, tous les stylos dans la trousse sont de la
même couleur, ce qui conclut.
7
7.1
Solutions des exercices
Théorie des ensembles
Solution de l’exercice 1 On définit A comme l’ensemble des nombres divisibles par 3, B comme l’ensemble
des nombres divisibles par 5 et C comme l’ensemble des nombres divisibles par 7. Le résultat demandé vaut
10 000 − |A ∪ B ∪ C|. Il ne reste qu’à appliquer la formule d’inclusion-exclusion, en constatant que A ∩ B est
l’ensemble des nombres divisibles par 15, etc. Si on ne se trompe pas, on tombe sur 4571.
Solution de l’exercice 2 Calculons la somme sur l’union des trois couches en utilisant le principe d’inclusionexclusion. On obtient 20 + 20 + 20 − 1 − 1 − 1 + 10 = 67. La somme de tous les nombres du cube vaut 400.
Le résultat final est donc 400 − 67 = 333.
7.2
Les différents ensembles de nombres
Solution de l’exercice 1 Cet exercice utilise ce qu’on appelle le raisonnement par l’absurde : on suppose que
le résultat à prouver est faux, et on cherche à en déduire une√contradiction, quelque chose qui est ” absurde”.
Supposons donc que, contrairement à ce que dit l’énoncé,
2 est
√ rationnel et que donc il existe des entiers
√
p et q premiers entre eux avec q non nul tels que 2 = pq . Ce 2 n’est pas très beau, on est quand même
√
plus à l’aise avec des nombres entiers. Mettons donc tout au carré pour faire disparaı̂tre le 2. On obtient
2
2 = pq2 . C’est encore mieux si on multiplie le tout par q 2 , car alors on a simplement une égalité entre deux
nombres entiers : p2 = 2q 2 . Le 2 indique que le côté droit est pair, donc p2 est pair aussi. Cela veut dire
que p lui-même est pair. Écrivons p = 2p0 et remplaçons cela dans l’égalité : on obtient 4p02 = 2q 2 , d’où, en
simplifiant par 2, 2p02 = q 2 . Alors on peut par le même raisonnement affirmer que q est pair. C’est là que
nous arrivons à notre contradiction : p et q étaient supposés
premiers entre eux, donc ce n’est pas possible
√
pour eux d’être tous les deux divisibles par 2. Donc 2 est bien irrationnel.
10
7.3
Principe des tiroirs
Solution de l’exercice 1 Il y a 366 dates d’anniversaire possibles (en comptant le 29 février...), donc comme il
y a plus d’élèves que de dates possibles, le principe des tiroirs dit qu’il y a deux élèves fêtant leur anniversaire
le même jour.
Solution de l’exercice 2 Il suffit qu’il prenne 4 chaussettes. En effet, comme il n’y a que 3 couleurs possibles,
il y aura nécessairement 2 chaussettes de la même couleur.
Solution de l’exercice 3 Soit n le nombre d’élèves de la classe. Chaque élève connaı̂t entre 0 et n − 1 élèves
(on ne le compte pas parmi ses propres connaissances). Le nombre de connaissances de chacun des n élèves
peut donc prendre n valeurs différentes. Si par l’absurde deux élèves quelconques ne connaissent pas le même
nombre de personnes, cela veut dire que pour tout k entre 0 et n − 1 il existe une personne connaissant
exactement k personnes. On utilise en quelque sorte une réciproque au principe des tiroirs : si n chaussettes
sont reparties dans n tiroirs de sorte à ce qu’il n’y ait jamais deux chaussettes dans le même tiroir, alors il y
a exactement une chaussette dans chaque tiroir. En particulier, il existe un élève qui ne connait personne, et
un autre qui connait tout le monde. Contradiction, car celui qui connait tout le monde connait en particulier
celui qui ne connait personne.
Solution de l’exercice 4 Les sommes calculées sont au nombre de 8 en tout : 3 pour les lignes, 3 pour les
colonnes et 2 pour les diagonales. D’autre part, la somme de trois entiers compris entre −1 et 1 est comprise
entre −3 et 3. Les sommes calculées ne peuvent donc prendre que des valeurs contenues dans l’ensemble
{−3, −2, −1, 0, 1, 2, 3}, qui contient 7 éléments. Par le principe des tiroirs, deux de ces 8 sommes seront
égales.
Solution de l’exercice 5 Soit k le nombre de filles de la classe. Alors il y a 25 − k garçons dans la classe, et
chaque fille connaı̂t entre 0 et 25−k garçons. D’autre part, nous savons que deux filles quelconques connaissent
un nombre de garçons différent. Si les filles sont les chaussettes, et les nombres de garçons connus possibles
les tiroirs, alors nous avons k chaussettes pour 25 − k + 1 tiroirs. Pour pouvoir avoir au plus une chaussette
par tiroir, il faut et il suffit que 25 − k + 1 ≥ k, c’est-à-dire k ≤ 13. Il y a donc au plus 13 filles dans la classe.
Solution de l’exercice 6 Rappelons que le milieu de deux points de coordonnées respectives (x1 , y1 ), (x2 , y2 )
2 y1 +y2
est le point de coordonnées x1 +x
, 2 . Ainsi, pour que ce dernier soit à coordonnées entières, il faut et
2
il suffit que les entiers x1 + x2 et y1 + y2 soient divisibles par 2. Ainsi, il faut et il suffit que x1 et x2 soient
de même parité et que y1 et y2 soient de même parité.
Un point à coordonnées entières est forcément de l’une des 4 formes suivantes :
(pair, pair),
(pair, impair),
(impair, pair),
(impair, impair)
Ainsi, parmi 5 points à coordonnées entières, par le principe des tiroirs, il y en aura deux de la même forme.
Leur milieu sera alors à coordonnées entières d’après ce qu’on a dit plus haut.
Solution de l’exercice 7 On peut repartir les entiers 1, . . . , 2014 en 1007 ensembles de deux entiers consécutifs :
{1, 2}, {3, 4}, {5, 6}, . . . , {2013, 2014}.
Comme nous avons choisi 1008 entiers, par le principe des tiroirs il y a un ensemble dont les deux éléments
ont été choisis. Ce sont deux entiers consécutifs, donc ils sont premiers entre eux.
Solution de l’exercice 8 Cet exercice fait appel à un raffinement du principe des tiroirs. Il y a 4 types de
pièces possibles : les pièces de 1, 2, 5 ou 10 centimes. Supposons tout d’abord que Germantrude a au plus
6 pièces de chaque type. Alors elle a au plus 4 × 6 = 24 pièces en tout, contradiction. Donc elle a au moins
7 pièces d’un même type. D’autre part, admettons qu’elle a 7 pièces de 1 centime, 7 pièces de 2 centimes,
7 pièces de 5 centimes, ainsi que 3 pièces de 10 centimes. Alors elle a 25 pièces en tout, mais pas 8 pièces
identiques.
Solution de l’exercice 9 Le matin, il y avait au moins une rangée avec 8 personnes. En effet, sinon, il y aurait
eu au plus 7 personnes par rangée, et donc au plus 7 × 7 = 49 personnes dans la salle. Considérons donc 8
personnes ayant été dans la même rangée le matin. Puisqu’il n’y a que 7 rangées, il y en a nécessairement
deux qui vont encore se retrouver dans la même rangée l’après-midi.
Autre méthode : A chaque élève on peut associer un couple (n, m) de deux entiers vérifiant 1 ≤ n, m ≤ 7
donnant le numéro de sa rangée le matin et le numéro de sa rangée l’après-midi. Il y a en tout 7 × 7 couples
possibles. Comme il y a 50 élèves, d’après le principe des tiroirs, il y en a au moins deux qui ont le même
couple, donc qui étaient assis dans la même rangée le matin et le soir.
11
7.4
Invariants
Solution de l’exercice 1 L’invariant est simplement la parité du nombre de morceaux. A chaque étape, le
nombre total de morceaux augmente de 2. Comme il vaut 1 au début, on ne peut atteindre 100.
Solution de l’exercice 2 L’invariant est la parité du nombre de −. Si dans la ligne ou colonne choisie, il y a n
signes −, alors après inversion des signes, il y en a 4 − n. Et 4 − n a même parité que n. Or, il y a initialement
3 signes −, donc le nombre de signes − reste impair : il ne sera jamais égal à 16.
Solution de l’exercice 3 Dans un groupe donné (x, y, z), l’un des nombres, mettons z, est égal à la somme des
deux autres. Donc la somme des trois nombres, qui vaut x+y+z = x+y+(x+y) = 2∗(x+y) est paire. S’il était
possible d’effectuer une telle répartition, la somme totale des nombres de 1 à 33 serait donc paire, puisqu’elle
pourrait se décomposer en la somme de 11 nombres pairs. Or, 1 + 2 + 3 + . . . + 33 = 33 × 34/2 = 33 × 17,
c’est un nombre impair.
Solution de l’exercice 4 Un invariant est ici la parité du nombre de nombres impairs de la liste. Si les nombres
x et y choisis sont tous les deux impairs, le nombre de nombres impairs diminue de 2. Dans les autres, cas,
on vérifie qu’il ne change pas. Donc la parité du nombre de nombres impairs de la liste est conservée. Il y a
initialement 1007 nombres impairs écrits, donc le dernier nombre de peut pas être 2.
Solution de l’exercice 5 La configuration initiale est (7J, 10R, 17V ). On commence par constater que les
caméléons peuvent être tous verts : c’est le cas si les 7 jaunes rencontrent des caméléons rouges, on passe
alors à (0J, 3R, 31V ). Puis un rouge rencontre un vert : (2J, 2R, 30V ). Et enfin, les 2 jaunes et les 2 rouges
se rencontrent : (0J, 0R, 34V ). Il reste à montrer que le vert est la seule couleur pour laquelle c’est possible.
Si x, y, z sont respectivement les nombres de caméléons jaunes, rouges et verts, le reste dans la division
euclidienne de y − x par 3 est un invariant. En effet, selon les rencontres, on passera de (x, y, z) à (x + 2, y −
1, z − 1), à (x − 1, y + 2, z − 1) ou à (x − 1, y − 1, z + 2). Dans le dernier cas, la différence entre le nombre de
caméléons rouges et le nombre de caméléons jaunes ne change pas. Dans les deux premiers cas, elle diminue
ou augmente de 3. Or au départ, cette différence est un multiple de 3, donc c’est vrai à toute étape. Comme
34 n’est pas un multiple de 3, si tous les caméléons sont unis, ils sont forcément verts.
Solution de l’exercice 6 Ici, un invariant est donné par a2 + b2 + c2 . Or on constate que la somme des carrés
n’est pas la même pour les deux triplets, donc on ne peut pas passer de l’un à l’autre avec la transformation
indiquée.
Solution de l’exercice 7 Il s’agit ici de remarquer que pour tout entier n la somme des chiffres de n est
congrue à n modulo 9. La suite obtenue est donc périodique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 1, 2, 3, 4, . . . et on termine
par un 1, c’est donc lui qui apparaı̂t le plus souvent.
7.5
Récurrence
Solution de l’exercice 1 En regardant pour les petits n, et en s’inspirant du dessin fourni on a
– Pour n = 1, 1 = 12 .
– Pour n = 2, 1 + 3 = 4 = 22 .
– Pour n = 3, 1 + 3 + 5 = 9 = 32 .
Nous allons donc montrer par récurrence que pour tout n ≥ 1,
1 + 3 + . . . + (2n − 1)
|
{z
}
= n2 .
somme des n premiers entiers impairs
Appelons P (n) cette propriété. L’initialisation a été faite ci-dessus, puisque nous avons vérifié P (1), P (2), P (3).
Supposons donc que P (n) est vrai pour un certain n ≥ 1, et déduisons-en P (n + 1). Nous voulons montrer
?
1 + 3 + . . . + (2n − 1) + (2n + 1) = (n + 1)2 .
{z
}
|
somme des n + 1 premiers entiers impairs
Or d’après l’hypothèse de récurrence,
1 + 3 + . . . + (2n − 1) +(2n + 1) = n2 + (2n + 1) = (n + 1)2 ,
|
{z
}
=n2 d’après P (n)
ce qui conclut.
Solution de l’exercice 2
12
1. Appelons P (n) la propriété à montrer.
Initialisation : 20 = 1 > 0 donc P (0) est vraie.
Hérédité : Supposons que P (n) est vraie pour un certain n. Ainsi, par hypothèse de récurrence 2n > n,
ce qui peut se réécrire 2n ≥ n + 1 puisqu’il n’y a aucun entier compris strictement entre n et n + 1. Si
on multiplie le tout par 2, 2n+1 ≥ 2(n + 1). Or pour tout n ≥ 0, 2(n + 1) > n + 1. Donc 2n+1 > n + 1,
ce qui conclut.
2. Pour n ≥ 4, appelons Q(n) la propriété à montrer.
Initialisation : 4! = 24 > 24 donc Q(4) est vraie.
Hérédité : Supposons que Q(n) est vraie pour un certain n ≥ 4. Ainsi, par hypothèse de récurrence
n! > 2n . Pour faire apparaı̂tre un (n + 1)!, on multiplie les deux côtés de l’inégalité par (n + 1), ce qui
donne (n + 1)! > (n + 1)2n . Or pour n ≥ 4, n + 1 > 2, donc (n + 1)! > 2 × 2n = 2n+1 . Donc Q(n + 1)
est vraie.
Solution de l’exercice 3 Nous allons raisonner par récurrence sur le nombre n de cercles.
Initialisation : pour n = 0, on colorie le plan avec une couleur.
Hérédité : On suppose que la conclusion de l’exercice est vérifiée pour toute configuration de n cercles.
Considérons une configuration avec n + 1 cercles. Choisissons pour le moment un cercle et supprimons-le.
On se retrouve alors avec une configuration avec n cercles, que l’on colorie par hypothèse de récurrence. On
remet ensuite le cercle supprimé, et on inverse les couleurs des régions qui sont à l’intérieur de ce dernier. Ce
coloriage convient. En effet, considérons deux régions ayant une frontière en commun. Si elles sont toutes les
deux à l’extérieur du cercle, leurs couleurs n’ont pas été changées, donc elles sont de couleurs différentes. Si
elles sont toutes les deux à l’intérieur du cercle, la couleur de chacune d’entre elles a été changée, donc elles
sont également de couleurs différentes. Si elles sont de part et d’autre du cercle, elles faisaient partie d’une
même région avant qu’on remette le cercle, et la couleur de l’une d’entre elles a été changée, donc elles sont
également de couleurs différentes.
Solution de l’exercice 4
1. En calculant les premiers termes, on a u1 = u0 + 1 = 1, u2 = u1 + 1 = 2, donc on peut conjecturer que
pour tout n, un = n. Nous allons le montrer par récurrence. Cela est vrai pour n = 0 par définition de
u0 . Si c’est vrai pour n, alors un+1 = un + 1 = n + 1, donc la propriété est héréditaire.
De même, en calculant les premiers termes, v1 = v0 + 2 = 3, v2 = v1 + 2 = 5, on conjecture que
vn = 2n + 1, c’est-à-dire que vn est le n + 1-ième entier impair. Cela est vrai pour v0 , et si c’est vrai
pour n, nous avons vn+1 = 2n + 1 + 2 = 2(n + 1) + 1, ce qui conclut la récurrence.
2. Nous allons montrer que pour tout n, un = 2n . C’est vrai pour u0 , et si c’est vrai pour n, un+1 =
2un = 2 × 2n = 2n+1 . La propriété à montrer est donc vraie pour tout n.
3. Nous allons raisonner par récurrence sur n. w0 = 0 est pair. Fixons un certain n ≥ 0, et supposons
que wn est pair. Puisque wn+1 = 3wn + 2, wn+1 est de la même parité que 3wn , c’est-à-dire pair. La
propriété est donc héréditaire, et wn est pair pour tout n.
Solution de l’exercice 5 Ce raisonnement est bien entendu bancal. L’étape d’hérédité suppose en fait implicitement qu’il y a au moins 2 crayons dans la trousse que l’on peut enlever l’un après l’autre. Ainsi, l’hérédité
n’est vraie qu’à partir de n = 2, or le raisonnement n’a été initialisé que pour n = 1, et pour cause : pour
n = 2 c’est déjà faux !
13
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