Le cardiomyocyte et sa pathologie Professeur Paul FORNES Laboratoire d’anatomie pathologique CHU, hôpital Robert Debré Cardiomyocyte Cellule musculaire striée Diamètre 15 µm Longueur : 100 µm Bifurquée aux extrémités Noyau unique central ovoïde •Sarcolemme •Système des tubules T •Costamères •Sarcoplasme •Noyau •Myofibrilles •Mitochondries •Golgi •Glycogène, lipides •Réticulum sarcoplasmique Strie Z Sarcomère Bande I (actine) Bande A (myosine) SS desmosomes (desmine) pas d’HD Jonctions gap fascia adherens lame basale Desmosome Jonction gap coastamères • • • • Les filaments épais sont formés de l’assemblage régulier de molécules de myosine (queue et tête de myosine à activité ATPasique). Chaque molécule de myosine est formée de 2 chaînes lourdes identiques et de 2 paires de chaînes légères. Les deux chaînes lourdes de la myosine sont identiques et accolées l'une à l'autre : leur longue queue forme un axe torsadé, et leur pôle globulaire émerge du filament épais sous la forme d'une tête double. La partie distale des têtes de myosine, appelé domaine moteur, possède une poche de fixation de l'ATP (à sa face interne) et un site d'interaction avec l'actine caractérisé par la présence d'une profonde crevasse (à sa face externe). La myosine possède une activité ATPasique qui s'accroît au contact de l'actine (activité ATPasique actine-dépendante). Les deux paires de chaînes légères sont situées à la base des têtes de myosine, dans une région appelée domaine de transmission, dont elles assurent la rigidité. • Les myofilaments fins sont composés de polymères d’actine. L'actine est une molécule polypeptidique de forme globulaire. La polymérisation des monomères d'actine se fait sous une forme filamentaire. Les polymères d'actine s'accolent par deux pour former une longue double hélice. Les filaments fins sont formés de l'association de cette double hélice d'actine et de deux protéines régulatrices: la tropomyosine, dimère filamenteux rigide de renforcement, et la troponine, complexe de trois sous-unités polypeptidiques, I, C et T, disposées à intervalles réguliers le long des filaments d'actine, en regard de chaque tête de myosine, et impliquées dans la régulation de la contraction musculaire par le calcium. Chaque extrémité libre des filaments d'actine est coiffée par une molécule de tropomoduline, qui pourrait jouer un rôle dans le maintien et la stabilisation de la longueur finale des filaments fins. •Les disques M renferment des filaments de myomésine. •Les disques Z sont formés de l’organisation quadratique de filaments d’alpha-actinine servant à relier les extrémités des filaments fins de chaque sarcomère entre elles et avec les extrémités des filaments fins du sarcomère adjacent. La contraction musculaire, c'est à dire le raccourcissement des cellules musculaires, résulte du glissement actif des filaments épais de myosine entre les filaments fins d'actine. Dans l'unité élémentaire responsable de la contraction musculaire, l'actine se comporte comme une crémaillère et la myosine comme la partie active du moteur biologique responsable de la progression du filament épais le long de la crémaillère actinique Cytosquelette • • Le cytosquelette endosarcomérique, est représenté par la titine. La titine est une protéine qui, dans chaque demi-sarcomère, relie chaque filament épais à la strie Z. Composant élastique, elle maintient l'alignement des filaments épais et oppose une résistance à l'étirement excessif du sarcomère. Le cytosquelette exosarcomérique comprend des microtubules et des filaments intermédiaires de desmine. • • • Le cytosquelette sous-sarcolemmique est représenté par le complexe dystrophine-protéines associées à la dystrophine qui sert à amarrer l'appareil contractile à la matrice extracellulaire. La dystrophine est une protéine sarcoplasmique située sous la membrane plasmique. Sa distribution n'est pas uniforme le long de la face interne du sarcolemme, mais se fait sous la forme d'arcs (ou costamères) dont les plus marqués sont situés en regard des disques Z des myofibrilles. L'accrochage de la dystrophine à la membrane plasmique du myocyte se fait par l'intermédiaire d'un complexe de glycoprotéines contenant des protéines intracytoplasmiques (les syntrophines), des protéines transmembranaires: le complexe des sarcoglycanes et du dystroglycane et d'une protéine extra-cellulaire (dystroglycane). Alpha-actinines Téléthonine (titin-cap) MLP (muscle LIM protein) Titine Myotiline Filaments intermédiaires Desmine Lamines Emérine Sarcolemme Dystrophine Dystrobrévine sarcoglycanes Dysferline Laminine 2 Costamères alpha-actinines Actine non sarcomérique Fibronectine Vinculine Métavinculine Intégrine Spectrine/anchorine Desmine Cavéoline 3 Desmosomes Plakophiline-2 et 4, desmoplakine, plakoglobine, desmogléine 2, desmocolline. Jonctions Gap Connexines 40, 43, 45 Fascia adherens N cadhérine, alpha, béta et gamma caténine, vinculine, Voies de conduction Cardiomyopathies Définitions • OMS 1995 : maladies du myocarde s’accompagnant d’insuffisance cardiaque. CM hypertrophiques, dilatées, restrictives, ventriculaire droite arythmogène • AHA 2006 Maron BJ et al. Circulation 2006;113:1807-16 « A heterogeneous group of diseases of the myocardium associated with mechanical and/or electrical dysfunction that usually (but not invariably) exibit inappropriate ventricular hypertrophy or dilatation and are due to a widely variety of causes that frequently are genetic. Cardiomyopathies either are confined to the heart or are part of generalized systemic disorders often leading to cardiovascular death or progressive heart failure-related disability. » • Classification Cardiomyopathies primitives – Génétiques • • • • • CMH CVDA VG non compacté Maladies du tissu de conduction – – – Maladie de Lenègre Sick sinus syndrome WPW Canalopathies – – – – – Syndrome du QT long Syndrome de Brugada TV polymorphe catécholaminergique Syndrome du QT court FV idiopathique – Cardiomyopathies mixtes (génétiques et non génétiques) • • CMD CM primitive restrictive non hypertrophique • • • Myocardites Takotsubo Autres (péripartum) – Acquises • Cardiomyopathies secondaires –… Classification moléculaire des cardiomyopathies Les structures histologiques Sarcomère Les cardiomyopathies CMH CMR Sarcolemme Filaments intermédiaires CMD +/myopathie périphérique Système T Stries scalariformes CVDA DAVD syndromique et non syndromique Cardiomyopathie hypertrophique Poids du cœur normal Hypertrophie physiologique Cardiomyopathie hypertrophique • Le poids du cœur doit être interprété en tenant compte du poids corporel. – Kitzman et al. Mayo Clinic Proc 1988;63:137-46 • L’hypertrophie cardiaque est un phénomène • • • physiologique d’adaptation en réponse à des contraintes. Paradoxalement, l’HVG est un facteur de risque de mort subite, quelle qu’en soit la cause. L’hypertrophie cardiaque devient un substrat anatomique arythmogène La fibrose est le substrat histologique arythmogène Cardiomyopathie hypertrophique primitive • Prévalence de 1 sur 500 • Dix gènes sarcomériques ; > 300 mutations – Chaîne lourde ß de la myosine – Protéine C de liaison à la myosine – Troponines T, C, I – α actine – Chaînes légères – α tropomyosine – Titine – Chaîne lourde α • Rendement des analyses génétiques chez un cas index : 70 % environ Hétérogénéité génétique dans la CMH Gène Locus Protéine Fréquence Mutations MYH7 14q12 b myosin heavy chain 20-35% TNNT2 1q32 troponin T 5-15 TPM1 15q22.1 a tropomyosin <5 MYBPC3 11p11.2 cardiac protein C 20-40 96 MYL3 3p essentiel light chain <1 MYL2 12q23 regulatory light chain 1-5 TNNI3 19p13.4 troponin I 5 ACTC15q11-q14 cardiac actin < 2 6 TNNC1 3p21.3-p14.3 cardiac troponin rare TTN 2q31 titin rare MYH6 14q12 a myosin heavy chain rare CSRP3 11p15.1 muscle LIM protéine rare TCAP17q12 telethonin rare Charron & Komajda. Expert Rev Mol Diagn 2006;6:65-78. 134 23 8 5 10 23 1 1 2 3 2 Cardiomyopathie hypertrophique Cardiomyopathie hypertrophique avec surcharge glycogénique Mutation du gène de la sous-unité γ de la protéine kinase K, Association à un syndrome de WPW Définition • • • • • Cardiomyopathie caractérisée par le remplacement du myocarde ventriculaire droit par du tissu adipeux et de la fibrose. 1736, …1961,…1982,…1988,…2001-8 Prévalence de 1 / 5000 40 % de formes familiales Diagnostic cardiologique très difficile, s’appuyant sur des critères majeurs et mineurs : antécédents personnels et familiaux, ECG, imagerie Diagnostic anatomo-pathologique également très difficile en raison de frontières mal délimitées entre ventricule droit normal, remplacement adipeux pur et cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène Ventricule droit normal et remplacement adipeux pur du myocarde Burke AP, et al. Arrhythmogenic right ventricular cardiomyopathy and fatty replacement of the right ventricular myocardium: are they different diseases? Circulation 1998 ;97:1532-5 Cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène Cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène Atteinte biventriculaire Cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène Atteinte biventriculaire Cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène et inflammation Cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène Génétique • • • 40 % de formes familiales CVDA non syndromiques à transmission autosomique dominante et pénétrance incomplète CVDA syndromiques à transmission autosomique récessive : maladies de Naxos et de Carvajal Maladie de Naxos “Cardiomyopathie desmosomale” Plakophiline-2 et 4, desmoplakine (Carvajal), plakoglobine (Naxos), desmogléine 2, desmocolline. TGFb3 et récepteur cardiaque ryanodine 2 (RyR2) (2001) Intérêt des investigations génétiques post mortem si la maladie est diagnostiquée à l’autopsie Famille G. Cancer colique Aurore , pas d’atcd MS à 13 ans Autopsie: CVDA Légende : : CVDA : Sain Famille K. Cancer colique 37 ans asympto. Bilan : CVDA mineure A. , pas d’atcd MS à 13 ans Autopsie: CVDA Bilans cardiaques normaux C. née 1994 ECG, Echo normaux Légende : E. né 2000 ECG, Echo normaux : CVDA : Sain Famille K. Cancer colique Pas de mutation : mutation A., pas d’atcd MS à 13 ans Autopsie: CVDA : mutation Pas de mutation 37 ans Asympto. Bilan: CVDA mineure Bilans cardiaques normaux C. née 1994 ECG, Echo normaux No mutation E. né 2000 ECG, Echo normaux Légende : : mutation : CVDA : Sain Modalités des prélèvements post mortem Guidelines for Autopsy Investigation of Sudden Cardiac Death. C. Basso, M. Burke, P. Fornes, P. Gallagher, M. Sheppard, G. Thiene, van der Wal on behalf of the Association for European Cardiovascular Pathology. Virchows Archiv, 2008;452:11-8. • Prélèvements – Fragments congelés : coeur, 5 g ; rate, 5 g – – Azote liquide et congélation à – 80 C (RNA later) – (Tissus inclus en paraffine) – Tissus formolés non utilisables • • Extraction d’ADN Analyse des gènes d’intérêt • Vérification causalité variant génétique – Amplification PCR, et séquençage ou dHPLC Conclusions • • • Les cardiomyopathies génétiques sont la cause la plus fréquente de mort subite chez le sujet jeune, d’où l’importance d’un diagnostic précis pour permettre la prise en charge adaptée de la famille. La démarche diagnostique s’appuie d’abord sur l’autopsie avec examen anatomo-pathologique spécialisé. La démarche est complétée dans tous les cas par un bilan cardiologique familial et des investigations génétiques. Conclusions • • • • Les analyses génétiques doivent être pratiquées soit chez le sujet décédé, soit chez un apparenté porteur de la cardiopathie. Les analyses génétiques permettent un diagnostic prédictif chez les apparentés et guident ainsi la surveillance et la thérapeutique au sein de la famille La prise en charge d’une famille après une mort subite nécessite de recourir à des compétences pluridisciplinaires (cardiologue, généticien clinicien, biologiste moléculaire, psychologue...). Le plan Maladies Rares du Ministère de la Santé a récemment labellisé des Centres de Référence. Cardiomyopathie dilatée • • • • • • • Prévalence : 36/100.000 25 – 35 % de formes génétiques à transmission variable souvent autosomique dominante Autres étiologies : – Virales, toxique, métabolique Association possible à une myopathie périphérique > 15 gènes : cytosquelette (ex: dystrophine), sarcomère (ex: chaîne lourde béta myosine); mb nucléaire (ex:lamines A/C);; bande Z (MLP);; canal ionique (SCN5A)… Mutations nombreuses mais aucune ne prédomine (mutations privées) Rendement des analyses génétiques dans une famille de CMD: • ~ 20 %, si CMD commune • ~ 50%, si CMD + BAV (+/- myopathie)(gène LMNA) Cardiomyopathie dilatée Amylose Maladie de Fabry Cardiopathies non structurales Mort subite chez le sujet jeune 3% Sportifs Maron et al. JAMA 1996;276:199-204 Série italienne Corrado et al. Cardiovascular Research 2001;50:399-408 Structure normale Cardiomyopathies Myocardites Valvulopathies Athérosclérose Anévrysmes ou dissections Malformations coronaires Autres 29% Série australienne Puranik et al. Heart Rythym 2005;2:1282 6% 40% Série américaine militaire Eckart et al. Annals of Internal medicine 2004;141:829-834 Syndrome du QT long • • • • • Gènes : KCNQ1 (LQT1), KCNH2, SCN5A, KCNE1, KCNE2, ANK2, KCNJ2 Perte de fonction des canaux potassiques et diminution du courant de repolarisation ( LQT1, LQT2, LQT5, LQT6, LQT7 LQT3 et SCN5A : gain de fonction de canal sodique responsable du courant de dépolarisation ANK2 et LQT4 gènes codant pour la tankyrine (ankyrine 4) Plus de 300 mutations dont 80% concernent les gènes KCNQ1 (LQT1) et HERG (LQT2) AFSSAPS – Centre de pharmacovigilance • Liste de 12 neuroleptiques susceptibles de prolonger l’intervalle QT et d’entraîner des torsades de pointes en clinique : – chlorpromazine, cyamémazine, lévomépromazine, thioridazine, trifluopérazine, amisulpride, sulpiride, sultopride, tiapride, dropéridol, halopéridol et pimozide. • « L’hypokaliémie et la bradycardie sont des facteurs favorisant la survenue des torsades de pointe. » • « Dans tous les cas, un suivi médical strict mérite d’être exercé, incluant des contrôles du ionogramme plasmatique et de l’ECG, lorsqu’il est fait recours à de telles associations. » • • • « Antiarythmiques de classe Ia (quinidine, hydroquinidine, disopyramide) et de classe III (amiodarone, ibutilide, dofétilide, sotalol), bépridil, cisapride, diphémanil, érythromycine par voie I.V., vincamine par voie I.V., mizolastine. FDA Adverse Events Reporting System Database AzCERT : > 130 médicaments classés en 4 catégories : médicaments à risque certain, médicaments avec risque possible, médicaments à risque si facteur(s) surajouté(s), médicaments à risque en cas de syndrome du QT long génétique. Observation • • • • • • M. H, 35 ans Découvert décédé lors d’une hospitalisation Schizophrénie Plusieurs jours avant le décès : douleurs abdominales, vomissements, diarrhée, fièvre, asthénie, anorexie Conclusion clinique : « Torsades de pointe par complications des interactions médicamenteuses » Autopsie après exhumation, 1,5 mois après le décès. – Absence de lésions viscérales expliquant la mort Observation Expertise toxicologique • • • • • • • • • Tropatépine : 0,11 µg/mL (concentrations thérapeutiques : 0,01 à 1 µg/ml) Venlafaxine : 0,45 µg/ml (concentrations thérapeutiques : 0,07 à 0,4 µg/ml) Venlafaxine métabolite Cyamémazine : 0,06 µg/ml (concentrations thérapeutiques : 0,05 à 0,4 µg/ml) Paracétamol : 23 µg/ml (concentrations thérapeutiques : 2,5 à 20 µg/ml) • • • • • • • • • Traitement de M. H. : Effexor (venlafaxine), 150 mg/l Imovane, 7,5 mg le soir Lepticur (tropatépine), 20 mg/j Risperdal, 12 mg/j Rivotril, 0,5 mg injectable IM «si agitation» Sulfarlem, 40 gouttes/J Tercian (cyamamézine), 400 gouttes/j Tercian 1 ampoule IM «si agitation» Observation Synthèse • • Mort subite par arythmie ventriculaire Circonstances du décès – – Gastro-entérite Une hypokaliémie causée par les vomissements et la diarrhée a pu favoriser la cardiotoxicité de la cyamémazine, et à un moindre degré (?) de la venlafaxine (« médicaments avec risque possible »). – Rôle d’un syndrome du QT long génétique ? Femme, 23 ans Diarrhée et hypokaliémie Pentamidine Homme, 62 ans FA et HTA Digoxine et hydrochlorothiazide Kaliémie : 3,2 meq/l TdP 12 heures après 4 comprimés de gluconate de quinidine Homme, 64 ans Procainamide pour fréquentes ESV Conclusions • • • • • • • • Une mort subite par torsades de pointe peut survenir dans le contexte d’un traitement qui entraîne un trouble de la repolarisation se traduisant par un allongement de l’intervalle QT. Le toxicologue doit bien connaître les médicaments à risque. Il doit alerter le médecin légiste sur le risque de mort subite. Ainsi le médecin légiste recherchera les éventuels facteurs susceptibles d’avoir favorisé la mort subite : hypokaliémie, bradycardie, interactions médicamenteuses, cardiopathie (substrat anatomique). L’analyse des résultats toxicologiques doit être menée conjointement par le médecin légiste et le toxicologue. Une expertise anatomo-pathologique est indispensable avec un examen spécialisé du cœur. Un connaissance approfondie de la pathologie et de la pharmacologie cardiaque est indispensable. Chez le sujet jeune, la question d’un syndrome du QT long génétique doit être soulevée et des prélèvements congelés doivent être pratiqués pour analyse génétique lors de l’autopsie. Modalités des prélèvements post mortem Guidelines for Autopsy Investigation of Sudden Cardiac Death. C. Basso, M. Burke, P. Fornes, P. Gallagher, M. Sheppard, G. Thiene, van der Wal on behalf of the Association for European Cardiovascular Pathology. Virchows Archiv, 2008;452:11-8. O F3C H N O N H O CF3 • Pharmacologie • Toxicologie analytique post-mortem • Observations • Difficultés d’interprétation des résultats toxicologiques et implications médico-légales Pharmacologie • Antiarythmique de classe IC – – – – Bloque le canal sodique Elargissement de QRS et allongement de QT Ralentit la conduction Inotrope négatif • Indications : tachyarythmies supraventriculaires, (arythmies ventriculaires) • • • • • • Pic plasmatique : 2 - 4 h (0,5 – 6) Biodisponibilité : 90 % Volume de distribution : 7 – 10 l / kg Fixation protéique : 40 % Demi-vie : 12 - 27 h Elimination hépatique (CYP, 2D6) et urinaire • Concentration thérapeutique : 0,2 – 1 mg/L – Posologie moyenne : 200 mg/j, maximum : 300 mg/j Pharmacologie • • Interactions médicamenteuses : – – Effets indésirables : – – – – – • • Augmente l’activité de la digoxine et du propranolol Activité augmentée par la cimétidine, le propranolol, l’amiodarone, et la quinidine Insuffisance cardiaque Troubles de la conduction Arythmies Troubles neurologiques : vertiges, vision floue, tremblements, instabilité, céphalées, asthénie Troubles digestifs : nausées Contre-indications : – infarctus du myocarde / cardiopathie ischémique, insuffisance cardiaque, blocs Précautions / risques d’arythmie en cas d’hyper/hypokaliémie, hypomagnésémie, insuffisance rénale, et chez le sujet âgé • Syndrome du QT long • Effets proarythmiques à doses suprathérapeutiques et thérapeutiques. • • • • Toxicologie analytique HPLC / MS Concentration thérapeutique : 0,2 – 1 mg/L – Concentration toxique : > 1,5 mg/L – – Arythmies ventriculaires, défaillance cardiaque, blocs auriculo-ventriculaires Vertiges, vision floue, tremblements, instabilité, céphalées, asthénie, nausées Les concentrations sanguines post-mortem (sang veineux périphérique) sont supérieures à celles mesurées ante-mortem, atteignant les valeurs toxiques. – – • Posologie moyenne : 200 mg/j ; maximum : 300 mg/j O’Sullivan et al. Hum Exp Toxicol 1995 ; 14 : 605-8 • • PM : 3,3 mg/L ; AM : 0,9 mg/L PM / AM : 3,6 Romain et al. Forensic Sci Int 1999 ; 106 : 115-23 • 7,3 mg/L ; 7,7 mg/L ; 13 mg/L ; 16,3 mg/L ; 93,7 mg/L ; 100 mg/L Redistribution post-mortem… Le toxicologue doit alerter le médecin légiste sur la difficulté de l’interprétation des concentrations sanguines post-mortem. L’analyse des résultats doit être menée conjointement. L’expertise anatomo-pathologique et les données de l’enquête sont indispensables. Nous considérons indispensable une connaissance approfondie de la pathologie et de la pharmacologie cardiaque. Observation 1 • • • • • • • • • Mme B., 73 ans Chute de sa hauteur à son domicile Intervention des pompiers Pas d’hospitalisation Découverte décédée le lendemain à son domicile Le corps mesure 1 m 56 et pèse 119 kg Poids du cœur : 440 g, modérément augmenté Athérosclérose coronaire modérée, sans sténoses significatives Histologie : – Inflammation aiguë épicardique focale, sans épanchement, avec rares et – – • petits foyers inflammatoires sous-épicardiques Fibrose interstitielle modérée Congestion et œdème pulmonaire Une expertise toxicologique est indispensable Observation 1 • • Concentration sanguine de flécaïnide : – – Sang veineux périphérique Sang cardiaque : 3,723 mg/L : 2,300 mg/L Concentration thérapeutique : 0,2 – 1 mg/L – Posologie moyenne : 200 mg/j • Concentration toxique : > 1,5 mg/L • Bile : 41,3 µg/L ; Contenu gastrique : 34,3 µg/L • Sang veineux périphérique : – – • Sang périphérique vs sang cardiaque, 4,5 mois après la première analyse : – – – • Concentrations infra-thérapeutiques de paracétamol (traces), codéïne (8 µg/L), bromazépam (19 µg/L; toxique >300, coma : >1000), Concentration thérapeutique de paroxétine (31 µg/L; toxique >400). Flécaïnide • Sang veineux : 3,703 mg/L ; Sang cardiaque : 2,418 mg/L Bromazepam Paroxétine : 70 µg/L vs 83 µg/L : 10 µg/L vs 14 µg/L Traitement : flécaïne 200 mg/j, aldalix, veinamitol, imovane, lexomil et efferalgan codéïné. Synthèse • • • 73 ans, chute inexpliquée et inhabituelle la veille du décès Obésité très importante – « un peu de diabète » – « légers problèmes cardiaques » : HTA ? Arythmie ? • Hypertrophie ventriculaire gauche avec fibrose interstitielle modérées (HTA probable). Inflammation aiguë épicardique focale. Concentrations sanguines de flécaïnide > 1 mg/L • Conclusion : – O’Sullivan et al. Hum Exp Toxicol : PM / AM : 3,6 (3,3 vs 0,9) – Sang périphérique : 3,7 mg/L – Redistribution post-mortem non démontrée / non confirmée – Mort subite cardiaque par arythmie ventriculaire – Toxicologie et circonstances du décès compatibles avec un – surdosage de flécaïnide Absence d’indices médico-légaux de crime ou de délit. Observation 2 • • • • • • • • M. C, 61 ans Découvert décédé dans l’escalier de son immeuble Fracture de C5 sans déplacement ni lésion médullaire Alcoolémie : 2,25 g/L Flécaïnide (sang cardiaque) : 0,9 mg/L et 0,54 mg/L à J+7; urine : 17 mg/L ; métabolites : 3,34 mg/L ; présence dans contenu gastrique Cardiopathie ischémique sévère. Deux autopsies, une expertise anatomo-pathologique, deux expertises toxicologiques, une expertise de synthèse (médecin légiste - anatomopathologiste, cardiologue, toxicologue) Conclusion – – – – Cause du décès : arythmie ventriculaire Circonstances du décès : chute par perte de l’équilibre résultant soit de l’état d’ébriété, soit d’un « malaise cardiaque » (arythmie, accident coronaire). Il est impossible d’établir si l’arythmie a été à l’origine de la chute ou une conséquence (stress). En dépit du risque potentiel d’arythmie ventriculaire de l’association flécaïnide et cardiopathie ischémique sévère, il n’est pas possible d’établir formellement un rôle éventuel de la flécaïnide dans la chute et le décès. Absence d’indices médico-légaux de crime ou de délit. Observation 3 • • • • • • • M. G., 32 ans Mort subite sans prodromes au cours d’une bagarre Lésions traumatiques au visage Cœur normal Conclusion autopsique : mort subite cardiaque avec cœur morphologiquement normal Alcoolémie : 1,75 g/L Dossier médical – – – • fibrillation atriale chronique congénitale. L’ablation par radiofréquence, 3 ans avant le décès, n’avait pas permis de guérir sa maladie. Il recevait un traitement, qu’il avait arrêté spontanément. Traitement : préviscan, aprovel, flécaïne LP200, aténolol 50. Conclusion : – Mort subite par arythmie ventriculaire déclenchée par un stress émotionnel résultant de violences. L’arythmie ventriculaire est survenue dans le contexte d’une FA chronique, non traitée, par non compliance. Conclusions • La flécaïnide est un antiarythmique de classe IC très utilisé pour le traitement des arythmies supraventriculaires, mais le traitement doit être surveillé avec une très grande vigilance (ECG, dosages en cas de symptômes faisant suspecter des effets secondaires). • La flécaïnide a des effets proarythmiques, favorisés principalement par une cardiopathie ischémique, et/ou une insuffisance cardiaque, et/ou des troubles de conduction. Une hyper/hypokaliémie ou une hypomagnésémie peuvent favoriser une arythmie. Chez le sujet âgé, la surveillance doit être particulièrement vigilante. • • Des interactions médicamenteuses doivent être recherchées. L’association d’un syndrome du QT long génétique ou d’origine médicamenteuse doit être considérée. Conclusions • • Les concentrations sanguines post-mortem doivent être interprétées avec la plus grande prudence, car une concentration supérieure à la concentration thérapeutique peut être d’origine criminelle ou délictuelle, mais également « artéfactuelle ». Le toxicologue doit alerter le médecin légiste sur la difficulté de l’interprétation des concentrations sanguines post-mortem. L’analyse des résultats doit être menée conjointement. L’expertise anatomo-pathologique et les données de l’enquête sont indispensables en complément de l’autopsie et de la toxicologie. Nous considérons indispensable une connaissance approfondie de la pathologie et de la pharmacologie cardiaque. Syndrome du QT court • Trois gènes : HERG, KCNQ1, KCNJ2 • Canaux potassiques Syndrome de Brugada • Elevation du segment ST dans les • dérivations précordiales droites Gène SCN5A codant pour la sous-unité alpha du canal sodique Intrications entre myocardite et maladie génétique monogénique Cardiomyopathie Syndrome de Brugada hypertrophique • biopsie chez 18 pts • Biopsie chez 119 pts (42 • Myocardite localisée, n = 7 avec décompensation aigue et 77 stables) • Mutation SCN5A, n = 4 • lymphocytes CD45RO+ • CVDA intriquée, n = 1 (>14/mm2) avec nécrose focale: 66% groupe Aigu vs Frustaci et al. Circulation 2005;112:3880 0% stables • Genome viral présent: 50% des pts avec myocardite vs 0% autres pts Frustaci et al. Eur Heart J 2007; 28:733 Tachycardie ventriculaire paroxystique catécholaminergique • Gène RyR2 : 50% des formes familiales • ave transmission autosomique dominante CASQ2 : isoforme cardiaque de calséquestrine Enjeux médicaux du test génétique chez les apparentés Mutation identifiée dans la famille (chez le cas index) - Pas de suivi médical ++ Test génétique chez l’apparenté « sain » -Pas de risque de transmission -à la desendance ++ Dépistage précoce de l’expression cardiaque Pas de mutation Présence d’une mutation Suivi médical ++ (écho, ECG…) Discuter restriction sportive (CVDA, CMH) Discuter ttt médical Mise en place traitement (ex IEC si CMD) Prévention (BêtaBloq /QTL) Décès cardiaque Liste Md contre indiqués ++ (QTL, Brugada) Modalités du test génétique post mortem • Recueil matériel – RNA later (kit Quiagen): tissus frais mis dans solution, conservation à température ambiante pdt 7 jours, envoi laboratoire moléculaire – Tissu frais dans sérum physiologique et adresser au laboratoire les jours suivants (à tester) – Tissus congelés dans azote liquide, puis transfert – Tissus inclus dans paraffine: ADN en faible quantité – Tissu mis dans formol: Non utilisable ++ • • Extraction d’ADN Analyse des gènes d’intérêt • Vérification causalité variant génétique – Grand nombre / plusieurs pathologies testées – Amplification PCR, et séquençage ou dHPLC Prélèvements autopsiques • Fragments frais: • 0.5 cm dans 1 ml RNA later • Sang sur EDTA • Fragments congelés : • Azote liquide • Sang sur EDTA à -20 or -80 • Fragments fixés dans du formol Conclusions • • • • La mort subite chez le sujet jeune relève essentiellement de maladies cardiaques héréditaires, d’où l’importance d’un diagnostic precis de façon à permettre la prise en charge adaptée de la famille. La démarche diagnostique passe d’abord par l’autopsie avec examen anatomo-pathologique spécialisé. La démarche est complétée dans tous les cas par le bilan cardiaque familial, adapté à la pathologie diagnostiquée, ou bien non spécifique en l’absence de diagnostique autopsique Les maladies cardiaques structurales (cardiomyopathies...) sont les plus fréquemment en cause. Néanmoins l’impact des maladies électriques pures apparaît grandissant (QT long, TV catécholaminergique, Brugada) Conclusions • • • Le test génétique doit être pratiqué soit chez un apparenté avec cardiopathie, soit chez le sujet décédé en post mortem Le résultat du test génétique peut parfois permettre d’identifier la cause du décès (post mortem), et il permet un diagnostic prédictif chez les apparentés et guide ainsi la surveillance et la thérapeutique au sein de la famille La prise en charge d’une famille après une mort subite nécessite de recourir à des compétences pluridisciplinaires (cardiologue, généticien clinicien, biologiste moléculaire, psychologue...). Le plan Maladies Rares du Ministère de la Santé a récemment labellisé des Centres de Référence. Coordonnateur du centre: Ph. Charron Réseau inter CHU, AP-HP www.cardiogen.aphp.fr CHU Pitié-Salpêtrière (R. Frank, M. Komajda) CHU Lariboisière (I. Denjoy, A. Leenhardt) CHU A. Paré (O. Dubourg) CHU HEGP (JY. Le Heuzey, M. Desnos) CHU R. Debré (JM. Lupoglazoff) CHU Necker (D. Bonnet, D. Sidi) Label du Ministère de la Santé (2005-2009) Consultation Pluridisciplinaire de Cardiogénétique CHU Pitié-Salpêtrière Tél : 01 42 16 13 95 ou 46 [email protected]