THÈSE En vue de l'obtention du DOCTORAT DE L’UNIVERSITÉ DE TOULOUSE Délivré par l'Université Toulouse III - Paul Sabatier Discipline ou spécialité : Cancérologie Présentée et soutenue par EMILIE GROSS Le 26/10/2010 Titre : IMPACT DES COMPOSANTES CELLULAIRES DE LA LEUCEMIE LYMPHOIDE CHRONIQUE DE TYPE B DANS LES RECHUTES POST-THERAPEUTIQUES : DE LA SIDE POPULATION LEUCEMIQUE AUX CELLULES IMMUNITAIRES JURY Président : Pr. GUY LAURENT, Professeur UPS - Toulouse Dr. ANNE QUILLET-MARY, Chargée de recherche CNRS - Toulouse Dr. EMMANUELLE CHARAFE-JAUFFRET, MCU-PH CRCM - Marseille Pr. CHARLES DUMONTET, Professeur ISPB - Lyon Pr. HELENE MERLE-BERAL, Professeur Hôpital Pitié-Salpêtrière -Paris Ecole doctorale : Ecole Doctorale de Biologie - Santé - Biotechnologie Unité de recherche : U563, Centre de Physiopathologie de Toulouse Purpan Directeur(s) de Thèse : Dr. ANNE QUILLET-MARY Rapporteurs : Dr. EMMANUELLE CHARAFE-JAUFFRET, MCU-PH CRCM - Marseille Pr. CHARLES DUMONTET, Professeur ISPB - Lyon «La difficulté de réussir ne fait qu’ajouter à la nécessité d’entreprendre.» Beaumarchais - Le Barbier de Séville A mon grand-père, Henri… REMERCIEMENTS Mes premiers remerciements vont au Dr. Anne Quillet-Mary, un puit d’énergie intarissable qui m’a bien souvent fait penser à une certaine divinité indienne par la multitude de tâches qu’elle est capable d’accomplir avec succès… Bien plus que ma directrice de thèse durant ces quatre années, il m’est difficile aujourd’hui de transcrire avec des mots ma gratitude tant elle est grande. Dans cet esprit et « non-exhaustivement », je te remercie pour ce soutien sans faille que tu m’as apporté, la rigueur scientifique extrême que tu m’as enseignée et ton implication personnelle et très précieuse dans mon parcours dans le laboratoire. Toujours à mes cotés dans le combat, de la paillasse (ce qui est très rare !) aux reviewers en passant par mes projets futurs et les difficultés de financement que j’ai pu rencontrer, je trouve qu’on a formé une très belle équipe ! Ta volonté et ta curiosité scientifique nous ont permis d’aborder des thèmes ambitieux que je te remercie de m’avoir confiés. J’espère que les premières pierres de l’édifice LLC-B que l’on a apporté ensemble porteront leurs fruits et serviront ton succès professionnel que je te souhaite, de tout cœur, le plus grand possible. Je remercie le Professeur Guy Laurent, tout d’abord, d’avoir accepté de présider mon jury de thèse. Je le remercie également pour toutes les discussions qui ont ponctuées ces quatre années de thèse et durant lesquelles j’ai pu découvrir les dimensions poétique, sexy ou plus fréquemment déterministe de la science. C’est d’ailleurs au cours d’une de ces fameuses discussions qu’a jailli l’hypothèse d’une hiérarchie du clone LLC-B identifiable par le phénotype SP. Je retiendrais également de cet enseignement l’importance de la réflexion des manuscrits (So, what ?) et une gestion pragmatique de la science que je pense essentielle. Je remercie les membres du jury qui ont accepté la lourde tâche de juger mes travaux de thèse regroupés dans le présent manuscrit. J’ai été honorée de votre présence en ce jour très spécial pour moi. A ce titre je remercie, le docteur Emmanuelle Charaffe-Jauffret d’avoir apporté son expertise sur les concepts de hiérarchisation tumorale et d’avoir ouvert la discussion sur ce point qui m’était cher, bien qu’uniquement suggéré dans mes travaux. Là où d’autres avaient reculé, je lui suis très reconnaissante d’avoir surmonté les disparités fondamentales qui existent entre nos deux modèles d’étude (solide vs liquide), pour mettre en exergue les points de convergence. M’étant moi-même inspirée de ces concepts dans les cancers solides, je reste convaincue de l’importance de l’ouverture scientifique dans la démarche intellectuelle d’identification de nouveaux processus pathologiques et plus spécifiquement néoplasiques. Je tiens également à remercier le Professeur Charles Dumontet pour sa disponibilité, sa gentillesse, ses critiques justifiées et ses conseils judicieux concernant la présentation et les travaux de thèse. Son expertise, qui regroupe de façon quasi-exhaustive tous les domaines de ma thèse, de la LLC-B jusqu’à la thérapie par rituximab en passant par les pompes ABC et la chimiorésistance, ont fait de lui un acteur indispensable de ce jury. Je remercie également le Professeur Hélène Merle-Béral, référence en matière de LLC-B, d’avoir apporté sa précieuse vision du manuscrit et des travaux qui le composent. Je remercie le Docteur Jean-Jacques Fournié tout d’abord de m’avoir acceptée au sein de son équipe. Je le remercie également pour la confiance qu’il m’a témoignée, l’enthousiasme dont il a fait preuve pour mes projets et pour son apport dans la rédaction des manuscrits dont je garde un précieux enseignement. De façon analogue à Guy Laurent, sa propension à apporter de la poésie à la science et son ouverture scientifique m’ont également beaucoup motivée. Je garde un excellent souvenir des heures passées ensemble à reformuler la revue que vous m’aviez confiée, et pour laquelle j’ai pris un réel plaisir à écrire. De façon plus personnelle, je voudrais exprimer ma gratitude à : Samar : Ah ma Samar !!! Un vide intersidéral ponctuait tes absences au labo, ma pote, ma compagne de galère, bien plus qu’une simple collègue, une véritable amie. Pour moi un exemple de diplomatie, de dynamisme et de simplicité, avec elle, jamais de prises de tête… Fun only !!!!! Que dire de plus à part que t’avoir eu sur ma route a juste été un pur plaisir et que malgré nos destins géographiquement distincts j’espère te garder toujours à mes cotés…. Catherine : (à prononcer avec l’accent anglais, Caysssrine !!!) Ma grande cops, on en a partagé des éclats de rires avec Samar devant des plateaux repas pas franchement fameux à la cantine. C’était vraiment réconfortant d’avoir ton aura bienveillante à mes cotés et de bénéficier de tes sages conseils durant ces quatre années. Pour moi, tu resteras jeune toute ta vie !!! Je te souhaite pleins d’évènements heureux pour tes vacances illimitées ! Amandine : « My soulmate », ma grande confidente, tellement de choses en commun que ça en devenait troublant… Les mêmes questions existentielles nous amenaient souvent à refaire un monde hypothétique rempli de si… Ça a été énorme de te rencontrer… Emilie L. : Sur l’échelle graduée du « taquet », je demande la première marche du podium… Emilie est un modèle d’organisation teinté d’un amour du « gossip », qui jamais ne perd (mais qui devrait) le contrôle. Souvent hallucinante tant la réflexion organisationnelle est poussée, tu m’as bien souvent « coachée » sur divers points et je t’en suis très reconnaissante. Je suis plus que ravie que tu t’épanouisses aujourd’hui dans l’énigmatique LLC-B. J’espère te retrouver très bientôt dans notre Est natal où nous pourrons enfin parler allemand sans complexe… Emilie-Fleur : Sur l’échelle graduée du « taquet », je demande la dernière place… Un brin en marge du troupeau, Emilie-Fleur est de loin la plus investie des doctorantes… Sa gentillesse n’a d’égal que sa passion pour la chapelure. Toujours là pour me tenir compagnie tard le soir, on a beaucoup partagé et ri ensemble. Merci pour ton oreille toujours attentive… A bientôt j’espère sur un autre continent... Séverine : Aussi douée à la paillasse qu’aux fourneaux, j’ai beaucoup apprécié ta rigueur professionnelle et ton pragmatisme. Toujours à voir le côté positif des personnes et des situations, nos réunions thés et mojitos resteront des grands moments d’harmonie thérapeutique. Loïc : Ou l’homme qui m’a fait découvrir les ascenseurs en or (oui je sais, tu te moques encore de moi là-dessus !!). D’une motivation sans faille, un grand passionné de LLC-B et de science avec un grand S, qui retransmet admirablement bien sa fougue et sa motivation aux troupes. Je te remercie pour tous tes conseils et ton apport indispensable aux divers projets que j’ai mené. Fatima et Valérie : L’implication du plateau technique de cytométrie en flux, où j’ai passé quelques centaines d’heures durant ces quatre ans, a eu un impact considérable dans la réalisation et l’aboutissement du projet SP. Je leur suis très reconnaissante pour l’efficacité, la disponibilité et la gentillesse dont elles ont fait preuve : les heures supplémentaires devant le trieur pour atteindre quelques dizaines de milliers de cellules SP en témoignent. Cécile : Très différente du commun des scientifiques académiques, j’ai adoré ton personnage très vrai qui détonnait dans cet environnement. Surtout reste comme tu es !! Chris B. : Toujours l’énergie au niveau maximum et le sourire, notre dernière interaction sous la chaleur des breuvages magiques de Yovan reste inoubliable… Chris J. : Merci pour ta gentillesse, ton support et tes conseils durant ma thèse. Egalement victime des talents de Yovan à cette fameuse soirée, je suis sure que l’on pourra réitérer l’expérience sous un soleil de plomb, les pieds dans le sable fin, avec pour seule musique les vagues de l’océan Pacifique … Mélanie : Un merci très spécial puisqu’au titre de ton M1, tu m’as énormément soulagée et m’as accompagnée dans mes virées nocturnes au LSR2. Avec toi, j’ai également pu apprendre sur mes qualités (et défauts) d’encadrante… Merci pour ta franchise et ton volontarisme. Gema : Merci d’avoir œuvré à me faire aimer le confocal (sans succès : la béta-caténine s’est révélée trop versatile…). Je garde un très bon souvenir de nos soirées ensemble dans des temps et/ou contrées lointaines. Loïc D. : C’était toujours un plaisir de te croiser dans les couloirs. Je garde un très bon souvenir de Barcelone ensemble avec Gema. Merci à vous deux pour votre gentillesse, votre motivation et votre écoute… Yovan : Rayon de soleil permanent, ta présence solaire, ton accent et tes mojitos nous permettent de voyager loin de la grisaille des paillasses du laboratoire… Merci !! De façon plus globale, je souhaite remercier tous les membres de l’équipe Immunité Innée et Hémopathies Malignes passés et présents avec qui j’ai pu interagir : Mary (Merci pour ton enthousiasme et ta motivation exemplaire), Rémy, Frédéric Pont, Emilie Decaup (Gardes toujours le sourire...), Aude-Hélène, Ludivine, Julie G. et Pauline (A mes yeux, la plus prometteuse des étudiantes, j’espère que ta thèse sera à la mesure de ton talent !). Je remercie également le laboratoire d’hématologie, et plus particulièrement le Dr. Stéphanie Struski, pour la détection d’anomalies caryotypiques au sein de la fraction SP. Mes remerciements vont également aux équipes de l’étage jaune : l’équipe du docteur Bernard Payrastre et l’équipe du professeur Georges Delsol. Point de carrefour entre ces différentes équipes, le bureau des étudiants, où règne une émulsion scientifico-« gossipique » quasi-permanente, a représenté mon point de repliement après les heures de manipulations à la paillasse. Ces acteurs nombreux et dont le renouvellement est constant permet d’obtenir une atmosphère chaleureuse et hétéroclite. Au sein du bureau des étudiants, je souhaite remercier Emilie D. (merci pour toutes les discussions que l’on a eu, j’ai beaucoup aimé ton analyse de la science et des ragots ainsi que ton sens de l’ironie !), Julie B. (en véritable osmose avec Emilie L., merci pour ta bonne humeur et ton attitude sportive qui m’a convertie à bouger des muscles dont j’ignorais l’existence jusqu’alors…), Wilfried (merci pour tes apports toujours très pertinents aux discussions scientifiques, merci également de me donner un peu de culture moléculaire et de m’en apprendre toujours plus sur les breuvages bizarres et autres expressions élégantes de chez toi… merci d’avoir relu ma thèse !!), Cathy (un exemple d’efficacité, merci pour ta gentillesse, ta disponibilité et ta positivité), Etienne (merci de m’avoir fait énormément rire au cours de ces années, merci également pour ton volontarisme et ta motivation), Julien (merci pour ta bonne humeur et le « fun » que tu amènes au laboratoire), Charlotte (seulement à tes débuts, tu es pleine d’énergie et de motivation, je te souhaite une thèse fructueuse), Alan (parti depuis 1 an, je n’oublie pas que tu as été la première personne à me parler, toujours en confiance avec toi, j’ai beaucoup aimé nos longues discussions lors de mes premières années de thèse). Je tiens à remercier mes amis les plus sincères : Perrine (ma bonne étoile, tout là-bas) et Régis (d’une amitié née du même enthousiasme pour la science en DEA, aujourd’hui très proches au-delà de la dimension scientifique, merci pour ton soutien et ta présence !!). Les mots manquent pour exprimer de la façon la plus juste ma gratitude envers ma grande famille. La motivation profonde, que vous m’avez insufflée (sans le savoir, j’en suis sure !!), et le soutien inconditionnel que vous m’avez donné, ont représenté les plus précieux atouts de mon aboutissement personnel dans cette thèse. Partie intégrante de cette grande famille, je ne peux passer outre la personne de Morad, qui malgré une formation non-scientifique, connaît mieux que personne aujourd’hui, l’ambiguïté qu’amène l’utilisation du si-RNA béta-caténine dans le modèle de la LLC-B… A mes cotés durant la quasi-totalité de mon parcours scolaire, tu as été le catalyseur de ma réussite et le moteur de mes ambitions… ambitions qui n’étaient qu’utopies à une certaine époque mais qui aujourd’hui sont réalités… Il m’est difficile de traduire avec des mots ce que tu représentes pour moi et l’infinie gratitude que je te voue… Enfin, je ne pourrai clôturer ce chapitre sans exprimer mes plus profonds remerciements aux patients atteints de LLC-B, à leurs médecins associés (Service d’Hématologie de Toulouse Purpan) et aux donateurs de l’association Laurette Fugain et de la Fondation pour la Recherche Médicale. SOMMAIRE ABREVIATIONS 1 PREAMBULE 5 INTRODUCTION 7 I. LA LEUCEMIE LYMPHOÏDE CHRONIQUE DE TYPE B (LLC-B) 7 7 1. GENERALITES ET SPECIFICITES EPIDEMIOLOGIQUES ET DIAGNOSTIQUES 1.1 LA LLC-B EN CHIFFRE 7 1.2 CONTRIBUTIONS ENVIRONNEMENTALE ET GENETIQUE DANS L’APPARITION DE LA MALADIE 7 1.3 PARTICULARITES ET MYSTERES 8 1.4 HISTORIQUE 9 1.5 CLASSIFICATION DE LA MALADIE 10 1.6 LE DIAGNOSTIC 11 14 2. THERAPIES 2.1 TRANSPLANTATION/GREFFE DE MOELLE 15 2.2 AGENTS CHIMIOTHERAPEUTIQUES 15 2.3 L’IMMUNOVECTORISATION PAR ANTICORPS 18 2.4 NOUVEAUX AGENTS 21 2.5 COMPLICATIONS 21 2.6 RECHUTES 22 2.7 LA MALADIE RESIDUELLE 23 24 3. BIOLOGIE DE LA LLC-B 24 3.1 L’APOPTOSE 3.2 EMERGENCE DU ROLE DE LA PROLIFERATION DANS LA LLC-B 24 3.3 L’IMPORTANCE DU MICROENVIRONNEMENT DANS LA REGULATION DE LA BALANCE 26 APOPTOSE/PROLIFERATION DE LA LLC-B 29 3.4 L’INVASION ET LA MIGRATION 31 4. LA RESISTANCE AUX TRAITEMENTS CONVENTIONNELS DE LA LLC-B 4.1 LA CHIMIORESISTANCE INTRINSEQUE – SELECTION DE CLONES INTRINSEQUEMENT RESISTANTS 31 4.2 LA CHIMIORESISTANCE EXTRINSEQUE 32 4.3 LA RESISTANCE SPECIFIQUE AUX TRAITEMENTS CONVENTIONNELS DE LA LLC-B 33 37 5. HYPOTHESES SUR L’ORIGINE DE LA LLC-B (HISTOIRE NATURELLE DE LA MALADIE) 37 5.1 LA STIMULATION ANTIGENIQUE 5.2 LA CELLULE B A L’ORIGINE DE LA TRANSFORMATION LEUCEMIQUE 39 5.3 LA LYMPHOCYTOSE MONOCLONALE : MBL 41 5.4 L’APPORT DES MODELES ANIMAUX 42 5.5 LA THEORIE DE LA CELLULE SOUCHE HEMATOPOÏETIQUE ANORMALE 44 II. CELLULES SIDE POPULATION INITIATRICES DE TUMEURS ET DETERMINATRICES DE LA CHIMIORESISTANCE 46 1. 1.1 1.2 1.3 2. 2.1 2.2 2.3 2.4 3. 3.1 3.2 3.3 4. 4.1 4.2 4.3 4.4 46 46 47 48 49 50 51 53 54 55 56 58 60 61 62 63 64 65 III. CELLULES SOUCHES NORMALES PROPRIETES FONDAMENTALES DES CELLULES SOUCHES IDENTIFICATION DES CELLULES SOUCHES MECANISMES MOLECULAIRES DU MAINTIEN DE LA « STEMNESS » : BMI-1 CELLULES INITIATRICES DE TUMEURS IDENTIFICATION DES CELLULES INITIATRICES DE TUMEURS THEORIES D’INITIATION TUMORALE IMPLICATION DE BMI-1 DANS LES CELLULES INITIATRICES DE TUMEURS IMPLICATIONS THERAPEUTIQUES DU CONCEPT DES CELLULES INITIATRICES DE CANCERS LES TRANSPORTEURS ABC ABCB1 ABCG2 AUTRES TRANSPORTEURS IMPLIQUES DANS LE CANCER SIDE POPULATION (SP) LA SP REPRESENTE UNE FRACTION ENRICHIE EN CELLULES SOUCHES DETERMINANT MOLECULAIRE DU PHENOTYPE SP POINTS CRITIQUES DE LA TECHNIQUE CHIMIORESISTANCE DES CELLULES SP SURVEILLANCE IMMUNITAIRE ANTI-TUMORALE 67 1. LA SURVEILLANCE IMMUNITAIRE DES TUMEURS 1.1 PREUVES EXPERIMENTALES DE L’IMMUNOSURVEILLANCE 1.2 THEORIE DE REGULATION EXTRINSEQUE DES TUMEURS 1.3 MECANISMES GENERAUX D’ « IMMUNOEDITING » ET D’IMMUNOSUBVERSION 1.4 L’IMMUNOSURVEILLANCE DANS LA LLC-B 1.5 GENERALITES SUR L’IMPLICATION THERAPEUTIQUE DU CONCEPT D’IMMUNOSURVEILLANCE 2. LE RESEAU D’IMMUNOSURVEILLANCE DES TUMEURS 2.1 L’IMMUNITE ACQUISE 2.2 IMMUNITE INNEE OU NATURELLE ANTI-TUMORALE 67 67 68 71 71 72 73 73 77 IV. 93 OBJECTIFS DE L’ETUDE RESULTATS ET DISCUSSION 94 I. LA RECONSTITUTION IMMUNITAIRE APRES TRAITEMENT FCR DANS LA LLCB : PERSPECTIVES D’IMMUNOMODULATION NK POST-THERAPIE. 94 1. INTRODUCTION 2. ARTICLE I. 3. DISCUSSION ARTICLE I. 3.1 LA RECONSTITUTION IMMUNITAIRE POST-FCR EST MARQUEE PAR UNE PREDOMINANCE DU COMPARTIMENT NK. 3.2 LA CHIMIOTHERAPIE PERMET DE RESTAURER LES COMPETENCES CYTOTOXIQUES NK 3.3 IMPLICATION DES CELLULES CD4+ DANS LA RECHUTE POST-THERAPEUTIQUE 3.4 PERSPECTIVES D’IMMUNOMODULATION PAR L’ADCC DU RITUXIMAB 3.5 FACTEURS INFLUENTS LA MRD 94 95 96 96 97 98 100 101 II. LA BASE CELLULAIRE DE LA CHIMIORESISTANCE DE LA LLC-B REPOSE SUR L’EXISTENCE DE CELLULES SP INNEES ET ACQUISES. 102 1. INTRODUCTION 2. ARTICLE II. 3. DISCUSSION ARTICLE II. 3.1 CARACTERISATION DE LA SP INNEE LEUCEMIQUE DE LA LLC-B 3.2 LA CHIMIOTHERAPIE PERMET DE SELECTIONNER LES CELLULES SP LEUCEMIQUES 3.3 LA PROLIFERATION PERMET AUX CELLULES SP DE GENERER DES CELLULES NON-SP 102 103 104 104 107 112 DISCUSSION GENERALE 113 BIBLIOGRAPHIE 121 ANNEXE : CANCER STEM CELLS OF DIFFERENTIATED B-CELL MALIGNANCIES: MODELS AND CONSEQUENCES 135 RESUME EN ANGLAIS 146 ABREVIATIONS 5’NT: 5’ nucléotidase A ABC : ATP-Binding Cassette ADCC : Antibody Dependant Cell Cytotoxicity ALDH : Aldehyde Dehydrogenase AN : Analogue de nucléoside ATM : Ataxia Telangiectasia, Mutated B BCR : B-Cell Receptor C CAM-DR : Cellular Adhesion Mediated drug Resistance CDC : Complement Dependant Cytotoxicity CDK : Cyclin Dependant Kinase CHOP : Cyclophosphamide, Vincristine, Prednisone, Doxorubicine CMH : Complexe Majeur d’Histocompatibilité CNT : Concentrative Nucleoside Transporter CPA : Cellule Présentatrice d’Antigène CSM : Cellule Souche Mésenchymateuse CTL : Lymphocyte T Cytotoxique CVP : Cyclophosphamide, Vincristine, Prednisone D dCK : deoxycytidine kinases DLBCL : Diffuse Large B-cell Lymphoma DLEU2 : Deleted in Lymphocytic Leukemia 2 1 DNA-PK : DNA dependant Protein Kinase E EMDR : Environmental Mediated Drug Resistance ENT : Equilibrative Nucléoside Transporters F FC : Fludarabine Cyclophosphamide FCR : Fludarabine Cyclophosphamide Rituximab FMC7 : Clone d’un anticorps reconnaissant une protéine exprimée à la surface des cellules B I ICAM-1 : Inter-Cellular Adhesion Molecule IDO : Indoleamin 2,3 Dioxygenase IFN : Interferon Ig : Immunoglobuline Ig-M : Immunoglubuline mutée Ig-NM : Immunoglobuline non-mutée ITIM : Immunoreceptor Tyrosine Inhibitory Motif K KIR : Killer cell Ig- like Receptor L LAM : Leucémie Aigue Myéloïde LFA-1 : Lymphocyte Function-associated Antigen LLC-B : Leucémie Lymphoïde Chronique de type B LMC : Leucémie Myéloïde Chroique 2 LPS : Lipopolysacharride M MBC : Malignant Monoclonal B-cell MBL : Lymphocytose Monoclonale B MDR : Minimal Deleted Region MICA : MHC class I related protein A MICB : MHC class I related protein B MMP : Matrix Metallopeptidase MRD : Maladie Résiduelle N NBD : Nucleotide binding domain NBF : Nucleotide Binding Folds NK : Natural Killer P PARP : Polymérase poly(ADP-ribose) PBL : Peripheral Blood Lymphocyte PcG : Polycomb Group PCR : Polymerase Chain reaction PGE : Prostaglandin E PKC : Protéine Kinase C PRC : Polycomb Repressor Complex R R-CHOP : Rituximab, Cyclophosphamide, Vincristine, Prednisone, Doxorubicine RHAMM : Receptor for hyaluronan-mediated motility S SFM-DR : Soluble Factor Mediated Drug Resistance 3 SLL : Small Lymphocytic Lymphoma SP : Side Population SWI/SNF: SWItch/Sucrose Non-Fermenting T TCR : T-Cell receptor TCL1 : T-cell leukemia 1 TGF-β : Transforming Growth Factor β TLR : Toll Like Receptor TMD : Transmembrane Domain TN : Transporteur nucléosidique TNF : Tumor Necrosis Factor Treg : T régulateur Z Zap-70 : Zeta-chain Associated Protein kinase 4 PREAMBULE PREAMBULE Seconde cause de mortalité dans les pays « développés », la dénomination générique de Cancer regroupe une centaine d’entités pour lesquelles les statistiques d’occurrence et de mortalité actuelles sont alarmantes : près d’une personne sur trois développera au cours de sa vie un cancer et près d’une personne sur quatre en mourra. Les cancers proviennent d’un processus de sélection de clones capables d’outrepasser les barrières physiologiques bloquant l’anarchie moléculaire à l’origine de la transformation néoplasique. Cette sélection « quasi-darwinienne » permet d’élaborer la juste combinaison de lésions génétiques et de signaux microenvironnementaux conduisant le clone émergeant à assurer la pérennité de son expansion illimitée. La définition multifonctionnelle du cancer repose sur les six « hallmarks » du cancer introduites par Hanahan et Weinberg en 2000 (1): potentiel prolifératif infini, inhibition de la mort cellulaire programmée, invasion tissulaire, capacité de formation de nouveaux vaisseaux, insensibilité aux signaux anti-prolifératifs et auto-suffisance en signaux prolifératifs. En marge de ces caractéristiques oncogéniques pures s’ajoute l’échappement à l’immunité anti-tumorale, qui représente un facteur extrinsèque décisif de la progression tumorale. Près d’une décennie plus tard, il est nécessaire d’introduire la notion d’hétérogénéité intra-clonale à cette définition du cancer. De cette notion d’hétérogénéité cellulaire ont jaillit les « néo-concepts » d’organisation hiérarchique des tumeurs où l’initiation et la progression du clone tumoral sont assurées par des cellules souches transformées. En introduisant un nouveau niveau de complexité à l’éradication thérapeutique des cancers, le concept de cellules souches cancéreuses a permis d’apporter des éléments de réponse aux échecs des thérapies actuelles du cancer. Les travaux de cette thèse ont été entièrement voués au cancer unique et atypique qu’est la Leucémie Lymphoïde Chronique de type B (LLC-B), pour laquelle j’ai consacré la première partie de l’introduction de ce manuscrit. Cette hémopathie, aux processus de carcinogenèse encore énigmatiques, constitue une réelle passion intellectuelle à mes yeux. L’intrigante question de la leucémogenèse de la LLC-B, qui trouve potentiellement sa réponse dans l’hétérogénéité de cette hémopathie, a été l’inspiration de cette première partie. 5 PREAMBULE Au-delà des généralités caractéristiques et thérapeutiques de la maladie, j’ai tenté de développer les différents aspects de la biologie et de la résistance thérapeutique en mettant en exergue la documentation concernant l’hétérogénéité du clone leucémique. Cette première partie s’est achevée sur les théories actuelles concernant l’origine de la LLC-B et s’ouvre à la problématique de hiérarchisation des tumeurs. Dans une seconde partie, j’ai développé, de façon volontairement peu spécifique, le concept des cellules souches cancéreuses pour clôturer en détail, avec l’identification d’hétérogénéités cellulaires hiérarchiques par la technique des Side Population (SP). Enfin, dans une troisième partie, les concepts clés de la surveillance immunitaire antitumorale, de l’immunosélection à l’immuno-échappement en passant par les implications thérapeutiques, ont été abordés. Les acteurs principaux de la surveillance immunitaire antitumorale ont été ensuite disséqués et la documentation sur les interactions étroites de ces derniers avec les cellules de LLC-B a été délivrée le plus exhaustivement possible. Cette thèse s’inscrit dans une démarche intellectuelle vouée à la perspective d’éradication thérapeutique de la LLC-B. Cette visée thérapeutique transparaît, dans l’ensemble des travaux expérimentaux et bibliographiques regroupé de ce manuscrit, au travers de l’hétérogénéité cellulaire du potentiel chimiorésistant du clone leucémique et des perspectives d’immunomodulation post-thérapie. Bien que d’apparence éloignées, l’étude fondamentale, définissant une nouvelle hétérogénéité du clone leucémique LLC-B, et l’étude plus « appliquée », de la surveillance immunitaire après traitement, trouvent leur point de convergence dans la thérapeutique de la rechute. L’incurabilité de la LLC-B résidant dans sa propension à réémerger après thérapies, cette thèse ne se contente pas uniquement d’apporter des éléments de réponse sur l’origine cellulaire potentielle des rechutes. Elle tente également, au travers de l’immunothérapie post-chimiothérapie, d’esquisser des solutions thérapeutiques permettant une éradication complète du clone leucémique. 6 « La volonté aboutit à un ajournement, l'utopie ; la science aboutit à un doute, l'hypothèse. » Victor Hugo - Post-scriptum de ma vie INTRODUCTION INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B INTRODUCTION I. La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B (LLC-B) Définition de la LLC-B : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B (LLC-B) est caractérisée par l’accumulation et l’infiltration de lymphocytes B matures au niveau des compartiments sanguins, médullaires et ganglionnaires. 1. Généralités et spécificités épidémiologiques et diagnostiques 1.1 La LLC-B en chiffre La fréquence et l’incurabilité de la LLC-B font de cette pathologie un enjeu majeur de santé publique. En effet, la LLC-B représente la forme la plus fréquente des leucémies affectant l’adulte dans les pays développés. L’incidence est de 3,9 pour 100 000 individus aux Etats-Unis avec une forte variabilité selon le sexe, l’occurrence de la LLC-B doublant dans la population masculine en comparaison avec la population féminine. Les populations âgées sont les plus touchées, l’âge moyen au moment du diagnostic étant de 72 ans (2). 1.2 Contributions environnementale et génétique dans l’apparition de la maladie Malgré cette forte fréquence, l’étiologie de la maladie reste obscure. En effet, il existe peu de données épidémiologiques substantielles établissant un lien causal entre l’occurrence de la maladie et l’exposition à des agents chimiques ou des radiations. Seul l’Agent Orange, un herbicide utilisé au Vietnam, a été explicitement associé à un risque accru d’apparition de LLC-B. Le rôle des radiations ionisantes, dont l’exposition est traditionnellement liée aux développements de Leucémies Aigues Myéloïdes (LAM) et Leucémies Myéloïdes Chroniques (LMC), reste, pour la LLC-B, controversé au sein de la littérature épidémiologique (3, 4). 7 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B S’ajoute à ces risques environnementaux peu définis et très spécifiques, un rôle bien mieux établi du patrimoine génétique dans l’apparition de LLC-B dites « familiales » pour approximativement 5 à 10 % des cas. Cette part solide de la génétique repose sur l’observation d’une augmentation de 7,5 fois du risque de développement de LLC-B pour les personnes apparentées au premier degré à un patient LLC-B. De plus, ces parents au premier degré présentent une Lymphocytose Monoclonale B (MBL), précurseur putatif et forme précoce asymptomatique avérée de la LLC-B, dans 13,5 à 18 % des cas. Récemment, ces constats épidémiologiques se sont renforcés scientifiquement avec la preuve formelle de l’existence de loci communs impliqués dans la susceptibilité à la LLC-B (2). 1.3 Particularités et mystères Récapitulant de façon partielle les « hallmarks » du cancer (1), la LLC-B est un cancer unique caractérisé par l’accumulation de cellules B majoritairement quiescentes alimentée par une sous-population « élite » proliférante (5). En plus de ce profil prolifératif atypique, les cellules de LLC-B présentent une forte dépendance aux composantes cellulaires et cytokiniques de leur microenvironnement, rendant leur manipulation ex-vivo complexe et biaisée (6). En effet, la LLC-B présente un spectre de « homing » tissulaire diversifié avec une infiltration des cellules malignes au niveau des compartiments sanguin, médullaire et ganglionnaire. Les cellules de LLC-B isolées à partir de ces différents tissus présentent une hétérogénéité de leur profil transcriptionnel, phénotypique, apoptotique et prolifératif dictée par le microenvironnement inhérent à chacun de ces tissus (7-11). Ces études tissu-spécifiques associées à l’extrapolation des connaissances de la biologie B normale (12) tendent à démontrer que le ganglion est le siège de la pathogenèse LLC-B. Cependant, pour des raisons d’accessibilité et d’éthique, la quasi-totalité des études scientifiques sont menées sur la phase leucémique issue du sang périphérique, reflet potentiellement uniquement partiel de la LLCB. Les recherches sur cette partie cachée de l’iceberg s’avèrent être d’autant plus complexes qu’il n’existe pas de modèle cellulaire relevant de la LLC-B. 8 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 1.4 Historique La description des symptômes cliniques de la LLC-B ainsi que la définition cellulaire morphologique de la maladie, distincte d’une pathologie myéloïde, été reportée pour la première fois en 1847 par Virchow. Ce n’est qu’en 1909 que la LLC-B a été reconnue comme une entité clinique propre. La distinction entre formes chronique et aigue de leucémie ne s’est fait que plus tard en 1967. Les grandes avancées thérapeutiques et diagnostiques de la maladie se sont effectuées avec les propositions de classification, maintenant standard, de la LLC-B par Rai et Binet dans les années 70. Enfin, à la fin des années 80, l’implémentation des caractéristiques morphologiques et immunophénotypiques aux critères de classification de la maladie ont permis d’établir la base de la prise en charge actuelle du patient LLC-B (3, 13). Sang Ganglion Moelle osseuse Agent Orange Prédispositions génétiques CD19 Clonalité des chaînes légères κ ou λ CD5 CD23 Zap70 CD38 CD20 Délétions 13q, 17p et 11q Trisomies 12 Schéma 1 : Vue d’ensemble de la pathologie LLC-B 9 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 1.5 Classification de la maladie La classification de la maladie selon Rai ou Binet permet de stratifier le stade d’évolution des patients afin d’apporter une évaluation pronostique basée sur des symptômes cliniques et de guider le choix de la stratégie thérapeutique la plus spécifique au degré d’avancement de la maladie. Classification Rai d’après les références Abbott, Oncologist, 11(1), 31-30 (2006) et Leblond V., Hématologie collection FMC SFH (2009) (14, 15). Stade 0 1 2 3 4 Lymphocytose absolue (> 5 000/mm3) Lymphadénopathie * * * Hepathomégalie * Splénomégalie * Anémie * (Hémoglobine < 10 g/dl) Thrombopénie (Plaquette < 100 000/µL) Tableau 1 : Classification de Rai de la LLC-B Légende : * : Avec ou sans : Ou Classification Binet d’après les références Abbott, Oncologist, 11(1), 31-30 (2006) et Leblond V., Hématologie collection FMC SFH (2009) (14, 15). 10 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Stade A B C Lymphocytose absolue (> 5 000/mm3) < 3 aires lymphoïdes atteintes > 3 aires lymphoïdes atteintes Anémie ° (Hémoglobine < 10 g/dl) Thrombopénie ° (Plaquette < 100 000/µL) Correspondance avec Classification de Rai 0, 1 et 2 1 et 2 3 et 4 Tableau 2 : Classification de Binet de la LLC-B Légende : ° : et/ou 1.6 Le diagnostic 1.6.1 Le diagnostic clinique Conformément aux classifications de Rai et de Binet, le diagnostic clinique primitif de la LLC-B repose sur la recherche d’aires ganglionnaires atteintes et sur la détection d’une lymphocytose absolue (>5 000 cellules/mm3 de sang) chronique (persistance de plus de 3 mois). Cet examen clinique est complété par une évaluation de la morphologie et du phénotype de ces cellules (14, 16). 1.6.2 Caractéristiques phénotypiques et morphologiques L’examen microscopique de cellules de LLC-B révèle des cellules de petite taille d’aspect mature. 11 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Cependant, c’est l’étude de l’immunophénotype unique des cellules de LLC-B qui constitue l’outil essentiel au diagnostic formel de la maladie. Ces lymphocytes B matures présentent une expression des marqueurs canoniques de la lignée B, CD19 et CD20. L’expression du CD20 à la surface des cellules de LLC-B reste cependant faible comparée aux cellules B physiologiques et lymphomateuses. L’expression du « B-Cell Receptor » (BCR) à la surface de ces cellules est relativement faible et le caractère monoclonal de l’expansion leucémique est révélé par l’expression d’une seule chaîne légère des immunoglobulines (Igs) (Kappa ou Lambda). Une co-expression du marqueur du linéage T, CD5, est un des aspects les plus typiques du phénotype LLC-B lorsqu’il est associé à une positivité du marqueur d’activation CD23 et une négativité des marqueurs FMC7 et CD79b. L’ensemble de ces critères phénotypiques (CD23+, CD5+, sIg Faible, FMC7-, CD79b-) permette au moment du diagnostic d’établir un score de Matutes gradué de 1 à 5, les scores de 4 et 5 identifiant formellement une LLC-B (17). La définition de marqueurs pronostiques complétant ces systèmes de classification a été un champ de recherche particulièrement exploré dans la LLC-B. 1.6.3 Facteurs pronostiques La LLC-B compte une littérature abondante en matière de facteurs pronostiques. De façon logique, la classification de Binet ou Rai, se basant sur des critères exclusivement cliniques, constitue la première étape à la définition pronostique de la maladie. 1.6.3.1 Facteurs cytogénétiques Quantités de données dans la littérature démontrent une implication de translocations chromosomiques oncogéniques dans l’apparition et le développement de lymphomes B (18). Dans ce contexte, la LLC-B est un cas particulier puisque les translocations chromosomiques récurrentes sont rares et qu’aucune mutation oncogénique spécifique de cette hémopathie n’a été identifiée. Les aberrations caryotypiques couramment diagnostiquées dans la LLC-B sont principalement : la délétion 13q14 (plus de 50 % des cas), la délétion 11q22-q23 (environ 18 % des cas), la trisomie 12 (environ 16 % des cas) , la délétion 17p13 (environ 7 % des cas) (19). 12 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B La région 13q14 code pour deux microARNs, miR15a et miR16-1. L’étude fonctionnelle de la « minimal deleted region » (MDR) de cette région chromosomique en modèle murin démontre l’implication de cette délétion dans les mécanismes de pathogenèse de la LLC-B (20). Cette délétion est néanmoins associée à un bon pronostic (2). Concernant la trisomie 12, le support oncogénique apporté par l’aberration chromosomique reste évasif puisque aucun gène impliqué dans la pathogenèse LLC-B n’a été identifié dans cette région. Son statut pronostique reste également obscur et controversé dans la littérature (2). La région 11q22-q23 contient le gène ATM (Ataxia Telangiectasia, Mutated), composant essentiel de la réponse aux dommages de l’ADN. Cette délétion est associée à une maladie caractérisée par une progression rapide, une lymphadénopathie extensive et une survie plus courte (2). Les délétions de la région 17p13 ont un impact sur la suppression tumorale intrinsèque. En effet, la région 17p13 est porteuse du gène codant pour p53, la protéine suppresseur de tumeurs par excellence. Cette anomalie est de mauvais pronostic et est associée à une résistance à la Fludarabine. Les délétions 17p et 11q sont deux éléments prédictifs d’une survie plus courte de façon indépendante du stade de la maladie (2). 1.6.3.2 Facteurs moléculaires et phénotypiques Dans la biologie B normale, la rencontre des cellules B avec l’antigène au niveau des centres germinatifs en présence de cellules T se traduit par l’apparition de mutations ponctuelles au niveau des Igs. Ce processus conduit à la sélection de mutants présentant la meilleure affinité pour l’antigène. L’étude du statut mutationnel des Igs a permis de définir deux groupes de LLC-B de types : (i) Igs mutées (Ig-M) de bon pronostic et (ii) Igs nonmutées (Ig-NM) de pronostic péjoratif avec une médiane de survie, pour ces patients, considérablement raccourcie. Ce facteur pronostique est le plus stable au cours de la progression tumorale (21) mais également le plus fastidieux à déterminer. La recherche de marqueur de substitution du statut mutationnel du BCR a démontré que l’expression de la « zeta-chain associated protein kinase » (Zap-70), protéine clé de la signalisation du « T-Cell Receptor » (TCR), pouvait être utilisée comme indicatrice de l’absence de mutation au niveau du BCR (22). 13 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Reflet à la fois du statut prolifératif et de l’interaction avec le microenvironnement, l’expression de l’ectoenzyme CD38 à la surface des cellules est associée à un mauvais pronostic lorsqu’elle est présente sur plus de 30% des cellules leucémiques. Enfin, la valeur pronostique des marqueurs de prolifération indicateurs de l’évolution de la masse tumorale ; que sont les marqueurs sériques LDH, β2-microglobuline, CD23 soluble, et thymidine kinase ainsi que le temps de doublement des lymphocytes ; est la démonstration de l’importance de la composante proliférative de la LLC-B (14). L’ensemble de ces données cliniques diagnostiques et pronostiques permette de guider la thérapeutique vers la greffe de cellules souches, la chimiothérapie ou l’immunochimiothérapie. 2. Thérapies En dépit de l’apport constant de nouvelles thérapies, la LLC-B reste une maladie incurable. Les différentes modalités thérapeutiques cherchent à générer une réponse clinique et moléculaire/phénotypique maximale sans pour autant permettre un réel traitement curatif. Historiquement, l’objectif de la prise en charge thérapeutique des patients LLC-B est passé de palliations des symptômes, à retardement de la progression et réduction de la masse tumorale pour arriver à la visée actuelle d’une réponse clinique et moléculaire maximale. L’évolution de ces objectifs s’est faite de pair avec l’introduction de thérapies basées sur la Fludarabine et l’élaboration de nouvelles combinaisons thérapeutiques incluant les anticorps monoclonaux. Pour les patients de stade A, l’abstention thérapeutique est couramment adoptée. Pour les stades plus avancés montrant des signes d’évolutivité et d’agressivité, l’association Fludarabine, Cyclophosphamide et Rituximab (FCR) est incontestablement actuellement le « gold standard » de la thérapie LLC-B. Seule la mise en évidence d’une délétion 17p, signature moléculaire de patients réfractaires à la chimiothérapie, déroge à cette règle et dicte une approche thérapeutique alternative et plus spécifique (Alemtuzumab et greffe de moelle allogénique). Quelque soit l’option thérapeutique, l’efficacité première de celle-ci sur l’éradication des cellules leucémiques fait place de façon quasi-invariable, au cours du temps, à la réémergence du clone leucémique. 14 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 2.1 Transplantation/Greffe de moelle La transplantation de cellules souches est une modalité thérapeutique lourde dont bénéficient uniquement les sujets jeunes et à hauts risques. Deux modalités sont possibles l’autogreffe et l’allogreffe de cellules souches. L’autogreffe est l’option qui génère le moins de mortalité associée au traitement en parallèle d’un taux de rémission complète plus faible que pour l’allogreffe. En effet, bien que l’on observe une rémission prolongée (rémissions moléculaires obtenues chez plus de 2/3 des patients), l’autogreffe ne permet pas d’éradiquer durablement le clone leucémique (23). La seconde option, la transplantation de cellules souches allogéniques, apparaît comme l’unique traitement curatif de la LLC-B. Cependant, la mortalité associée à la procédure limite son usage aux patients jeunes réfractaires ou en rechute. L’efficacité du traitement repose sur l’établissement d’une réponse immunitaire du greffon contre la leucémie. Ce prérequis d’efficacité est basé sur l’observation d’un fort taux de rechute en présence de greffons dépourvus de cellules T. L’équilibre de cette réponse immunitaire est crucial étant donné les risques majeurs de mortalité résidant dans l’établissement d’une réponse immunitaire du greffon contre l’hôte. Contrairement aux autres traitements, cette approche thérapeutique permet une éradication durable du clone leucémique de façon indépendante du statut pronostique initial de ces patients (23, 24). 2.2 Agents Chimiothérapeutiques 2.2.1 Analogues de purines Les analogues de purines les plus couramment utilisés sont la Fludarabine, la Pentostatin et la Cladribine. Dans l’évolution du traitement de la LLC-B, l’introduction de la Fludarabine dans les protocoles thérapeutiques a démontré la supériorité de celle-ci en monothérapie en termes de taux de réponse clinique et de temps de rémission par rapport au Chlorambucil et à aux combinaisons CHOP et CVP (CHOP : Cyclophosphamide, Vincristine, Prednisone, Doxorubicine et CVP: Cyclophosphamide, Vincristine, Prednisone) (14, 25). 15 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B L’amélioration de la réponse clinique grâce à l’introduction de la Fludarabine en combinaison avec le Cyclophosphamide (FC) puis récemment l’addition du Rituximab au FC a permis d’atteindre des taux de rémission complète significatifs, qui ont fait de cette dernière combinaison le « gold standard » actuel de la thérapie de la LLC-B. Les analogues de purines sont des agents chimiothérapeutiques qui ciblent à la fois les cellules proliférantes et quiescentes. L’action de cette classe de drogues sur les cellules proliférantes requiert l’incorporation des analogues de purines dans l’ADN et l’inhibition de la synthèse de l’ADN. Pour les cellules quiescentes, le mécanisme cytotoxique est largement attribué à : (i) l’accumulation de cassures spontanées dans ADN, (ii) l’inhibition de la réparation de ces dommages à l’ADN, (iii) la diminution de la synthèse d’ARN (effet global sur la transcription de gènes potentiellement importants pour la survie) et (iv) la déplétion de NAD+/ATP due à l’activation continuelle de la polymérase poly(ADP-ribose) (PARP). Ce dernier aspect de la mort induite par les analogues de purines reste encore discuté dans la littérature. Les analogues de purines induisent également de façon directe une transition de la polarité de la membrane mitochondriale qui engendre une mort cellulaire via l’apoptose (lorsque celle-ci est fonctionnelle grâce à la présence de caspases) ou via la nécrose (26). Schéma 2 : Modèle de signalisation cytotoxique induite par les analogues de purines D’après Pettitt et al., British Journal of Haematology 121, 692-702 (2003) 16 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B L’action des analogues de purines repose sur la voie de signalisation suivante. La première étape du métabolisme de ces drogues est l’entrée de la molécule dans la cellule via les transporteurs nucléosidiques de la famille CNT et ENT (concentrative et equilibrative nucleoside transporters). Une fois contenus dans l’espace intracellulaire, les analogues de purines sont convertis sous forme d’un dérivé 5’-triphosphorylé par l’action de diverses deoxycytidine kinases (dCK) (La réaction inverse est catalysée par les 5’ nucléotidases (5’NT)). Cette étape est un pré-requis absolu à la cytotoxicité du composé, les réponses thérapeutiques à la Fludarabine étant corrélées au ratio dCK/5’NT. Les composés phosphorylés deviennent alors substrats de nombreuses enzymes impliquées dans la synthèse et la réparation de l’ADN (27). Schéma 3 : Modèle général du métabolisme des analogues de nucléoside D’après Jordheim et al., Bulletin du Cancer 92 (3), 239-48 (2005) Légende : AN : analogue de nucléoside TN : Transporteur nucléosidique 1 : nucléoside et nucléotide kinases 2 : 5’ nucléotidases 17 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 2.2.2 Agents alkylants Les agents alkylants utilisés dans la LLC-B sont le Chlorambucil et le Cyclophosphamide. Le Chlorambucil a été pendant longtemps le traitement de référence de la LLC-B. Le Cyclophosphamide est utilisé en combinaison avec la Fludarabine et le Rituximab. Le mode d’action des agents alkylants repose sur les liaisons fortes qu’ils établissent avec les protéines, l’ARN et l’ADN. C’est en grande partie sur cette dernière interaction que s’exerce majoritairement leur action cytotoxique, grâce à la formation de ponts à l’intérieur d’un même brin d’ADN ou entre deux brins (schéma 4, ). Le second mécanisme d’action de ces molécules passe par l’attachement d’un groupe alkyl au niveau des bases de l’ADN. L’ADN est ensuite fragmenté par les enzymes de réparation qui tentent de réparer ces défauts mineurs de l’ADN (schéma 4, ). De plus, ces bases alkylées inhibent la synthèse d’ADN et d’ARN. Le troisième mécanisme réside dans l’introduction d’erreurs d’appariement par les bases alkylées conduisant à l’apparition de mutations (schéma 4, 1 Formation de liaisons intra/inter brins 2 ). Ajout de group alkyl aux bases 3 Introduction d’erreurs d’appariement Schéma 4 : Mode d’action des agents alkylants (d’après www.cancerquest.org/index.cfm?page=486) 2.3 L’immunovectorisation par anticorps 18 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Troisième entité du traitement de référence de la LLC-B, les anticorps monoclonaux offrent par leur mode d’action distinct une nouvelle option thérapeutique complémentaire, pour le Rituximab, et/ou alternative, pour l’Alemtuzumab, à l’action chimiothérapeutique de la Fludarabine et du Cyclophosphamide. 2.3.1 Le Rituximab En clinique, le Rituximab peut être utilisé en monothérapie ou en combinaison avec la chimiothérapie (FCR, R-CHOP) en première ligne. Il est également utilisé dans des thérapies de consolidation ou d’entretien. Le Rituximab est un anticorps chimérique dirigé contre le CD20. Cette Ig glycosylée de type IgG1 est composée de régions constantes d’origine humaine et de régions variables des chaînes lourdes et légères d’origine murine. Le spectre d’expression du CD20 est restreint aux cellules B normales (du stade pré-B au B mature) et malignes. Cet antigène est absent à la surface des cellules souches hématopoïétiques, des progéniteurs B (cellules pro-B), des plasmocytes normaux et des tissus normaux non-hématopoïétiques. En plus de son profil d’expression cellulaire, un des intérêts majeurs du ciblage du CD20 est qu’il ne s’internalise pas lors de son engagement avec le Rituximab. Le Rituximab présente trois mécanismes d’action majeurs (28): la génération d’une cytotoxicité dépendante du complément (CDC) en faisant intervenir la liaison du fragment C1q du complément à l’extrémité Fc de l’anticorps (schéma 5, A). la cytotoxicité cellulaire dépendante de l’anticorps (ADCC), qui implique l’action de populations immunitaires effectrices présentant à leur surface un récepteur au fragment Fc des Igs (cellules Natural Killer (NK), macrophages, granulocytes, lymphocytes Tγδ). Ce dernier mécanisme apparaît comme le mécanisme prépondérant de l’action cytotoxique du Rituximab. En effet, il a été démontré que le polymorphisme du gène FcγRIIIa (CD16), codant pour un récepteur avec des affinités variables pour les IgGs, corrèle avec la réponse thérapeutique à la combinaison R-CHOP (29). Le débat reste cependant maintenu puisque un an plus tard, ces données ont fait l’objet d’une controverse (30) (schéma 5, B). l’induction directe de l’apoptose dont la relevance in vitro et in vivo fait l’objet de débat et par lequel, il semble exercer un effet chimiosensibilisant (31) (schéma 5, C). 19 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Schéma 5 : Modes d’action du Rituximab Modifié d’après Taylor and Lindorfer, Nat Clin Pract Rheumatol 3: 86–95 (2007). 2.3.2 L’Alemtuzumab ou Campath L’Alemtuzumab est un anticorps monoclonal IgG1 kappa humanisé dirigé contre le CD52, une protéine représentée de façon quasi-ubiquitaire par les cellules différenciées de l’hématopoïèse (Lymphocytes B et T, cellules NK, monocytes, thymocytes, macrophages et certains granulocytes). Ce spectre d’expression cellulaire explique sa limitation d’utilisation majeure : l’immunosuppression intense qu’il induit. Ce médicament est administré en monothérapie ou en association avec la chimiothérapie pour les patients réfractaires (32). Comme pour le Rituximab, son mode d’action majoritaire est dépendant de sa fraction Fc au travers de l’induction de CDC et d’ADCC, en présence d’effecteurs fonctionnels (33). Il est également capable dans des systèmes d’étude in vitro d’induire une mort par apoptose (34). 20 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 2.4 Nouveaux agents Malgré l’efficacité de toutes ces thérapies dites standard qui améliorent le temps de rémission, l’immense majorité des patients rechute de façon inexorable. Ce constat démontre le besoin d’adopter de nouvelles thérapies qui permettront d’envisager dans l’avenir une éradication durable et complète du clone leucémique. Toute une pléiade de nouveaux agents fait actuellement l’objet d’études pré-cliniques et cliniques pour la LLC-B. La Bendamustine, un agent alkylant, apparaît comme un nouveau médicament pour la LLC-B bien que celle-ci ait une histoire clinique longue en Allemagne où elle est utilisée depuis plus de 30 ans. Cette drogue apparaît très efficace pour la LLC-B puisqu’elle est active sur des patients réfractaires aux agents alkylants. De façon unique par rapport à la classe d’agent alkylant, elle induit une activation de la réponse aux dommages à l’ADN, une apoptose massive des cellules et une inhibition du point de contrôle mitotique qui engendre une catastrophe mitotique (35). Tout un panel de thérapies ciblées est actuellement en cours développement. De façon non-exhaustive, elles incluent l’anticorps monoclonal dirigé contre le CD23 (Lumiliximab), des anti-CD20 « nouvelle génération » avec une affinité augmentée pour le CD16, des modulateurs de l’immunité (le Lénalidomide), des inhibiteurs de CDK (Cyclin dependant Kinase) (Flavopiridol, SNS-032), des molécules antisenses et inhibiteurs pharmacologiques de Bcl-2, et des inhibiteurs de PKC (Protéine Kinase C) (Enzastaurin) (35, 36). 2.5 Complications Dans la LLC-B, l’envahissement et la modification du microenvironnement des compartiments sanguin, médullaire et ganglionnaire par les cellules leucémiques engendrent de lourdes répercussions sur les fonctions inhérentes au système hématopoïétique et, en particulier, sur la protection aux agents infectieux exercée par l’immunité. Les complications associées à la pathologie LLC-B sont fréquentes et majoritairement d’ordre immunitaire. Elles peuvent représenter un risque supplémentaire qui peut s’avérer fatal dans certains cas. La gravité et la fréquence des complications qui vont être abordées ; déficit immunitaire, désordres auto-immunitaires et syndrome de Richter ; sont fortement amplifiées par une thérapie immunodépressive. 21 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B La LLC-B s’accompagne de façon inhérente, d’une modification des fonctions immunitaires effectrices des différents acteurs T, NK, monocytes et complément, en termes de quantité et d’efficacité. La majorité des patients, tous stades confondus, développe une hypogammaglobulinemie. L’hypogammaglobulinemie est caractérisée par une réduction forte du niveau des Igs de classe A, G et M dont l’intensité corrèle avec la survenue d’infections bactériennes (S. pneumonia et H. influenza). L’ensemble de ces dysfonctionnements du système immunitaire inhérents et accentués par les thérapies entraîne l’émergence d’infections bactériennes (S. pneumonia, S. aureus, H. influenza) et virales (EBV, HHV8). Ces troubles infectieux représentent la première cause de mort pour les LLC-B de stade avancé. Les complications auto-immunes sont fréquentes et touchent 10 à 25% des patients. La production d’auto-anticorps par la composante B non-leucémique est à l’origine d’anémies auto-immunes hémolytiques et potentiellement de la thrombocytopenie immune. Ce sont les deux affections auto-immunes les plus couramment rencontrées dans un contexte de LLC-B (37). Enfin, l’apparition de syndromes de Richter résultant de la transformation d’une LLC-B en lymphome de haut grade, majoritairement DLBCL (Diffuse Large B-cell Lymphoma), intervient dans 5% des cas. Cette transformation représente également une issue fatale pour les patients LLC-B. Lorsque le clone DLBCL émergeant est de la même origine clonale que celui de la leucémie, une acquisition de nouvelles lésions génétiques est généralement observée et inclut majoritairement des délétions chromosomiques et des mutations affectant le gène codant pour la protéine p53. L’expression du CD38, l’absence d’une délétion 13q14 et la taille des ganglions sont des facteurs prédictifs d’un risque de développement d’un syndrome de Richter. Le syndrome de Richter engendre l’apparition d’une maladie agressive et résistante aux thérapies dont la médiane de survie avoisine les 6 mois (38). 2.6 Rechutes A l’exception des allogreffes, l’apparition de rechutes après traitement est un évènement quasi-inévitable qui survient dans des laps de temps qui diffèrent d’un patient à l’autre, de façon dépendante des facteurs pronostiques initiaux. 22 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 2.7 La maladie résiduelle De l’augmentation de l’efficacité des protocoles thérapeutiques, s’accompagnant d’un taux croissant de rémission complète (définie par les critères cliniques et morphologiques) a émergé un intérêt pour la recherche de cellules pathologiques résiduelles ou maladie résiduelle (MRD) après traitements. Biologiquement, l’origine de la persistance de ces cellules fait appel aux notions de chimiorésistance intrinsèque et extrinsèque qui vont être abordées au paragraphe §4 et dont la LLC-B est un parfait modèle récapitulatif. Différentes techniques permettent d’évaluer la présence de cellules leucémiques résiduelles. Les plus sensibles d’entres elles sont la cytométrie quatre couleurs CD19/CD5/CD22/CD81 et la « Polymerase Chain Reaction » (PCR) quantitative allèlespécifique qui détecte la séquence du réarrangement des gènes des chaînes lourdes des Igs. Ces deux techniques permettent d’atteindre des seuils de sensibilité de 10-4 (1 cellule leucémique pour 10 000 cellules normales) (15, 39). La détection de la MRD s’est avérée prédicative de la survie sans progression et de la survie globale, mais la valeur pronostique de la présence d’une maladie résiduelle reste variable suivant le traitement. De plus, la recherche de maladie résiduelle ne s’effectue que sur les compartiments sanguins et médullaires, et occulte complètement l’impact des thérapies sur la présence de maladie résiduelle au niveau des ganglions. Certaines thérapies de consolidation (Alemtuzumab) montrent une efficacité sur l’éradication de la MRD (40). L’apparition constante de rechutes post-thérapeutiques dicte le besoin d’établir une meilleure connaissance fondamentale de la LLC-B. C’est d’ailleurs au travers de l’échec des thérapies actuelles mais également de l’interprétation des facteurs pronostiques, reflet de la progression leucémique, que deux aspects majeurs mais mutuellement liés de la biologie de la LLC-B émergent : la prolifération et l’interaction avec le microenvironnement. Ces deux aspects tendent à s’opposer à la vision « ancienne école » de la LLC-B, définissant une pathologie accumulative résultant d’un défaut d’apoptose. 23 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 3. Biologie de la LLC-B 3.1 L’apoptose La résistance intrinsèque à l’apoptose des cellules de LLC-B généralement admise et à l’origine de la thèse accumulative de la maladie reste un phénomène complexe à étudier du fait de l’engagement spontané des cellules vers l’apoptose ex-vivo. Néanmoins, les cellules de LLC-B présentent un profil moléculaire de cellules résistantes à l’apoptose comme l’atteste la surexpression des protéines anti-apoptotiques Bcl-2, Bcl-xl, Mcl-1 et la sous-expression des protéines pro-apoptotiques Bax et Bcl-xs (4). Comme pour d’autres aspects de la biologie LLC-B, la part du microenvironnement dans la survie des cellules leucémiques est incontestable (cf. § 3.3). 3.2 Emergence du rôle de la prolifération dans la LLC-B 3.2.1 La nouvelle vision Quantité d’évidences scientifiques démontre que les cellules sanguines leucémiques sont quiescentes. De fait, l’examen microscopique de ces cellules révèle une chromatine nucléaire condensée, traduisant une activité métabolique minimale. De plus, ces cellules présentent de façon unanime un blocage de leur cycle cellulaire en phase G0/G1. Ces deux arguments majeurs ont alimenté pendant près de quatre décennies la vision simpliste d’une maladie inerte résultant de l’accumulation de cellules présentant un défaut d’apoptose. Des travaux récents tendent à proposer un nouveau modèle où la prolifération apparaît comme un mécanisme essentiel de la leucémogenèse. Le premier argument provient de l’analyse de la taille des télomères de cellules de LLC-B. Cette étude révèle que les cellules de LLC-B présentent des télomères plus courts en comparaison avec des cellules B normales, traduisant une histoire proliférative plus intense (41). Ce sont les travaux de Messmer en 2005 qui vont incontestablement clôturer l’ère de l’ancienne vision accumulative pour introduire la nouvelle vision de la LLC-B décrivant une maladie dynamique dotée d’un potentiel prolifératif. Cette étude basée sur l’incorporation d’eau lourde (2H2O) dans l’ADN des cellules tumorales in vivo a permis de mettre en évidence la dynamique quotidienne de génération et de mort des cellules leucémiques. 24 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B La quantité de cellules leucémiques produites représente 0,1% à 1,76% de la population tumorale totale et surpasse les taux rencontrés dans la génération de cellules B normales. La fraction proliférante leucémique est dans cette étude préférentiellement CD38+, qui apparaît ici comme un indicateur d’une division récente (42). La relevance physiopathologique de ces données est démontrée par la corrélation entre un taux de génération de cellules leucémiques supérieur à 0,35% et la présence d’une maladie progressive (5). Enfin très récemment, les modèles murins délétés au niveau de la région 13q14 présentent un développement de LLC-B en marge de phénotypes et de complications hématologiques associés à la LLC-B. Cette région chromosomique code non-exclusivement pour les microARNs miR15a et miR16-1. L’étude fonctionnelle de ces deux déterminants de la pathogenèse LLC-B indique que leur action réside dans la promotion de la prolifération en agissant au niveau de la transition G1/S du cycle cellulaire (20). Cette étude établit, de ce fait, le rôle moteur de la prolifération dans les mécanismes de leucémogenèse. L’ensemble de ces données indique que la prolifération concerne préférentiellement une population privilégiée (5) qui établit une niche intégrant des signaux microenvironnementaux multiples au niveau de structures particulières appelées centres de prolifération. 3.2.2 Les centres de prolifération La présence de centres prolifératifs au niveau des ganglions et plus rarement au niveau de la moelle osseuse est une caractéristique unique de la LLC-B. Ces foyers de proliférations forment des structures nodulaires et contiennent des agrégats de cellules tumorales de grande taille, de phénotype pseudo-blastique, proliférantes (Ki67+), CD38+ et surexprimant de nombreuses protéines anti-apoptotiques (Bcl-2, survivine, Mcl-1) (2, 6). Le lien entre ces centres prolifératifs et la génération de cellules leucémiques est suggéré de façon corrélative par la corrélation entre taille et nombre des centres prolifératifs et le temps de doublement des lymphocytes (43). Ces centres prolifératifs offrent une niche idéale pour les cellules leucémiques qui vont être soumises à des signaux prolifératifs et anti-apoptotiques fournis par les composantes cellulaires et cytokiniques de ce microenvironnement support de l’oncogenèse. Ce réservoir va permettre ensuite l’alimentation du compartiment majoritaire en cellules circulantes quiescentes. 25 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 3.3 L’importance du microenvironnement dans la régulation de la balance apoptose/prolifération de la LLC-B La démonstration la plus explicite de l’influence du microenvironnement sur la biologie LLC-B est la mort spontanée des cellules de LLC-B cultivées ex vivo. Le second argument étayant cette thèse se résume par la prévention de cette mort spontanée via l’ajout de cellules accessoires et de cytokines (6). 3.3.1 Les cellules T accessoires Au niveau des centres de prolifération, le compartiment prolifératif de cellules leucémiques semble avoir la capacité de façonner son microenvironnement en recrutant des cellules T CD3+ dont la grande majorité présente un phénotype CD4+CD40L+. Ce recrutement des lymphocytes T, dépendant des « chemokines ligands » CCL22 et CCL27, permet aux cellules leucémiques nichées dans les centre prolifératifs de se pourvoir en contacts cellulaires et signaux CD40L et IL-4 (2, 6). Ce support de l’oncogenèse LLC-B par les lymphocytes T est supporté par un ensemble de données accumulées in vitro qui démontrent la survie et/ou la prolifération de cellules LLC-B, en présence de cellules T autologues activées, ou de cytokines dérivées de ces dernières (IL-4 et CD40L) (44-46). De plus, les cellules de LLC-B issues des ganglions présentent un profil apoptotique qui diffère de leur homologue du compartiment sanguin, de façon dépendante de la stimulation du CD40 dérivée de la composante T. La forte expression de Mcl-1 est associée à une faible expression de Noxa pour les cellules du ganglion. Cette tendance est totalement inversée pour les cellules sanguines mais rétablie sous une stimulation chronique du CD40 (10). De même, ce rôle support des lymphocytes T dans la pathogenèse LLC-B est suggéré par une étude (Communication, ASH 2008) qui indique que l’expansion de cellules LLC-B xénogreffées en modèle murin est dépendante de la prolifération de la composante T autologue (47). Plusieurs études proposent un modèle de coopération cellulaire successive où la stimulation T représente un support prolifératif de courte durée au niveau des centres de prolifération. Le relais est assuré par les cellules « stromales » qui fournissent un support antiapoptotique de longue durée en interagissant préférentiellement avec la composante cellulaire leucémique circulante (44). 26 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 3.3.2 3.3.2.1 Les cellules stromales Les cellules nurses Les cellules nurses apparaissent comme une entité quasi-unique et spécifique de la LLCB. Ces cellules sont de grande taille, adhérentes, d’aspect fibroblastique et apparaissent phénotypiquement stromales (Vimentin et STRO-1) (48). Cependant, les cellules nurses proviennent de la fraction CD14+ présente dans le sang périphérique qui semble se différencier au contact des cellules leucémiques in vitro (49). Ces cellules nurses interagissent physiquement, de façon forte, avec les cellules leucémiques et les protègent d’une apoptose spontanée in vitro par un mécanisme dépendant de SDF-1 ou de BAFF/APRIL (48, 50). 3.3.2.2 Les cellules stromales de la moelle osseuse L’ajout de cellules stromales de la moelle osseuse permet d’inhiber l’apoptose spontanée des cellules de LLC-B in vitro. Il semblerait que cette suppression de l’apoptose soit indépendante de facteurs solubles mais fondée sur un contact cellulaire direct dépendant des intégrines β1 et β2. Cette propriété unique semble être propre au statut leucémique des cellules de LLC-B puisque leurs homologues B normaux sont incapables d’interagir avec cette composante stromale et d’éviter ainsi la mort cellulaire (51, 52). 3.3.3 La stimulation BCR La stimulation antigénique est l’évènement moléculaire le plus fondamental qui conduit à l’expansion des lymphocytes B. Par extrapolation avec la physiologie B normale, il est rationnel de spéculer que la stimulation antigénique de cellules LLC-B puisse constituer un événement oncogénique menant à la prolifération et à la survie du clone leucémique. Bien que les cellules LLC-B présentent une faible expression de l’Ig de surface, l’analyse du phénotype des cellules de LLC-B montre que celles-ci expriment, de façon inhérente, un certains nombre de marqueurs d’activation tels que le CD23, CD25, et fréquemment le CD69, le CD71, et le CD27. 27 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Ce phénotype de cellules B compétentes immunologiquement indique que l’expérience antigénique constitue très probablement une étape dans la leucémogenèse LLC-B (53). Les arguments, qui tendent à placer la stimulation du BCR comme centrale dans la pathogenèse LLC-B, reposent majoritairement sur la comparaison des LLC-B de types Ig-M (de bon pronostic) et Ig-NM (de mauvais pronostic). En effet, la plupart des LLC-B de type Ig-NM présentent un BCR compétent capable d’induire une signalisation alors que les cellules non-répondantes à la stimulation BCR font majoritairement partie de la catégorie IgM (54). De plus, l’analyse de la taille des télomères de cellules de LLC-B révèle que les cellules LLC-B de type Ig-NM ont des télomères plus courts, témoins de phases prolifératives passées plus intenses (55). Enfin, la présence de foyers de prolifération est, dans le contexte des hémopathies, une particularité unique de la LLC-B. De façon intéressante, la présence de ces structures cellulaires particulières dans les maladies auto-immunes (l’arthrite rhumatoïde et la sclérose multiple) renforce le concept de l’importance de la stimulation antigénique dans la prolifération leucémique et souligne un lien potentiel entre mécanismes d’auto-immunité et oncogenèse LLC-B (56). 3.3.4 Facteurs solubles et cytokines Partie intégrante de leur phénotype de cellules activées, les cellules de LLC-B expriment de nombreux récepteurs à différentes cytokines et ligands des « Toll like receptors » TLR (impliqués dans les signaux de danger), indiquant la présence d’un environnement cytokinique indépendant du BCR, complexe et varié. Exceptées les cytokines dérivées des cellules du microenvironnement préalablement citées (CD40L, SDF-1, IL-4, BAFF, APRIL), de nombreux facteurs solubles, potentiellement présents aux sites d’invasion leucémique, permettent dans des systèmes de culture in vitro d’induire l’entrée en cycle des cellules de LLC-B et de promouvoir leur survie. Non-exhaustivement, ces facteurs solubles comprennent l’IL-2, IL-15 et également les ligands du TLR9 (ADN aux motifs CpG) (57-59). D’une façon très originale et inattendue, des travaux récents démontrent l’induction d’une signalisation anti-apoptotique puissante dans les cellules de LLC-B via l’interaction du domaine non catalytique de MMP-9 (Matrix Metallopeptidase) et de l’intégrine α4β1/CD44v (60). 28 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 3.4 L’invasion et la migration Trait d’union entre ces différents aspects biologiques de la LLC-B, l’invasion tissulaire est un processus clé de la pathogenèse LLC-B puisqu’elle définit la base des systèmes de classification de la maladie. Deux axes majeurs de cytokines chimioattractives (CCL et CXCL : « chemokine ligand ») et leur récepteur spécifique (CCR : « chemokine receptor »), sont documentés, de façon prédominante, dans la littérature et guident la migration des cellules leucémiques au travers des différentes localisations anatomiques : CXCL12/CXCR4 et CCL21, CCL19/CCR7 (61). L’axe CXCL12/CXCR4 permet l’entrée dans la moelle osseuse et la sortie du ganglion. Au niveau clinique, la corrélation entre le niveau d’expression de CXCR4 et le stade d’évolution de la maladie reste encore controversée (61, 62). Cependant, l’engagement du BCR, évènement oncogénique pour les LLC-B de type Ig-NM, induit une réduction de l’expression de CXCR4 permettant l’accumulation des cellules stimulées dans les niches prolifératives contenues dans les ganglions (63). Le second axe, CCL21, CCL19/CCR7, est impliqué dans la migration préférentielle des cellules vers les ganglions. La relevance clinique de cet axe est indiquée par la corrélation entre le degré de lymphadénopathie et le couple expression/fonctionnalité du récepteur CCR7 des cellules LLC-B (64). De même, le niveau d’expression de α4β1, intégrine essentielle dans le processus de migration dépendant des chimiokines, est indicateur de la présence de lymphadénopathies (65). L’engagement de ces trois acteurs clés de l’invasion LLC-B (récepteurs CXCR4, CCR7 et l’intégrine α4β1) induit l’expression de MMP-9, la protéine de référence dans l’invasion tumorale. En effet, cette enzyme est impliquée dans la dégradation protéolytique de la membrane basale vasculaire et de la matrice extracellulaire des tissus lymphoïdes (66, 67). Enfin, plusieurs études, basées sur des systèmes d’analyse in vivo et in vitro, démontrent un défaut du potentiel de migration des cellules circulantes de la LLC-B au niveau des ganglions et de la moelle osseuse (68, 69). Ces derniers rapports suggèrent une nouvelle hétérogénéité de la LLC-B, basée sur une différence de capacité à infiltrer des tissus importants pour la pathogenèse, ce potentiel étant potentiellement réservé à une population leucémique privilégiée. 29 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Schéma 6 : Principal microenvironnement de la LLC-B En conclusion, des données scientifiques émergeantes démontrent que la prolifération est fondamentale dans la pathogenèse. Ce processus, qui semble se dérouler au niveau des centres prolifératifs, est hautement dépendant de la localisation anatomique des cellules leucémiques et traduit un rôle essentiel du microenvironnement. De plus, les cellules du microenvironnement protègent les cellules leucémiques de l’apoptose. En conséquence, les processus de migration des cellules leucémiques sont déterminants dans la pathogenèse. On notera cependant une hétérogénéité au niveau de la prolifération et de la migration qui semble être restreinte à une sous-population « élite » de cellules leucémiques. L’ensemble de ces données montre que la LLC-B présente une biologie caractérisée par une balance apoptose/prolifération dépendante du microenvironnement. De plus, les différentes stratégies thérapeutiques actuelles échouent à éradiquer de façon durable le clone leucémique, qui ré-émerge de façon quasiment invariable après traitement. Ces données cliniques traduisent un potentiel chimiorésistant, au sein des cellules leucémiques, dont les mécanismes moléculaires d’action sous-jacents sont multiples. 30 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 4. La résistance aux traitements conventionnels de la LLC-B La chimiorésistance peut être intrinsèque, résultant de l’accumulation de mutations et de l’acquisition d’éléments favorisant la résistance. Elle peut être également extrinsèque dans un phénomène communément appelé « Environmental mediated drug resistance » (EM-DR) qui peut s’accomplir au travers de facteurs solubles (SFM-DR, soluble factor mediated drug resistance) ou de l’adhésion protectrice à des éléments cellulaires du micrœnvironnement (CAM-DR, cellular adhesion mediated drug resistance) (70). 4.1 La chimiorésistance intrinsèque – sélection de clones intrinsèquement résistants 4.1.1 La cytogénétique Quantité de données dans la littérature démontre de façon irrévocable le rôle central des délétions et mutations affectant p53 dans l’établissement d’une chimiorésistance innée ou naturelle (71). De façon acquise, l’étude menée par Sturm I et al. démontre que la chimiothérapie par agents alkylants induit une sélection de clones chimiorésistants présentant des mutations de p53 (72). De façon moins catégorique, les délétions 11q affectant la protéine ATM semblent être associées à l’émergence d’une instabilité génomique et à l’occurrence de chimiorésistances secondaires. Ces deux données prédictives dictent le besoin d’adopter une approche thérapeutique alternative indépendante de la fonction p53 et des dommages à l’ADN (2). 4.1.2 Le statut anti-apoptotique La chimiorésistance de la LLC-B a été longtemps attribuée à un défaut d’activation de l’apoptose conféré par une surexpression de protéines anti-apoptotiques. De fait, les protéines Mcl-1 et Bfl-1 apparaissent comme des marqueurs du phénotype chimiorésistant et reflètent l’incapacité d’obtenir une réponse complète à diverses monothérapies in vivo (73, 74). La sélection de clones chimiorésistants en termes de profil apoptotique est suggérée par l’étude de Olsson en 2007 qui indique qu’un fort niveau d’expression de Bfl-1 est corrélé à l’absence de réponse clinique à la dernière thérapie subie (75). 31 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B De plus, le ratio Bcl-2/Bax, référence prédictive du potentiel à engager l’apoptose, détermine la sensibilité des cellules de LLC-B in vitro mais ne corrèle pas avec la réponse clinique dans la LLC-B (73, 76, 77). Néanmoins, un ratio Bcl-2/Bax important semble accompagner la caractéristique chimio-réfractaire (78). 4.1.3 Les transporteurs ATP-Binding Cassette (ABC) Les transporteurs ABC, qui permettent l’exclusion des drogues hors de la cellule, sont des acteurs clés de la résistance aux thérapies anti-tumorales. Les cellules de LLC-B expriment l’ARN messager codant pour les protéines ABCB1 (MDR1), ABCB4 (MDR3), ABCA1 (MRP1) et BCRP2 (79-81). De plus, un pourcentage substantiel de cellules présente une protéine ABCB1 (PgP, MDR1) active comme l’atteste l’efflux de la rhodamine 123, ce pourcentage s’accentuant après un épisode thérapeutique. L’activité et l’expression d’ABCB1 et de MRP est inhérente à une sous-population de cellules LLC-B et cette population est sélectionnée par des chimiothérapies contenant des substrats de ABCB1 (79, 82). Cette étude est récemment confirmée par Svirnovski et al, qui démontre l’augmentation concertée de l’activité et de l’expression d’ABCB1 dans les cellules de patients ayant été traitées avec des combinaisons chimiothérapeutiques agressives (80). La corrélation entre niveau d’expression des ABC transporteurs et expérience thérapeutique et/ou stade d’évolution de la maladie fait cependant encore l’objet de débats (83, 84). Néanmoins, la LLC-B exprime de façon importante ABCA1 (MRP1) et le niveau de cette expression semble corréler avec la progression de la maladie (83, 85). 4.2 La chimiorésistance extrinsèque La sensibilité des cellules de LLC-B cultivées ex vivo et exposées à différents agents chimiothérapeutiques ne reflète pas la réponse clinique obtenue après thérapie. Deux hypothèses peuvent être émises : (i) l’impact du microenvironnement dans l’acquisition d’un potentiel chimiorésistant est crucial et (ii) la chimiothérapie in vitro ne s’adresse pas à la population réservoir de la LLC-B qui permet de rétablir la population leucémique après traitement in vivo. Quelque soit l’hypothèse considérée, ces deux explications potentielles peuvent s’associer sous la notion de niches de chimiorésistance. 32 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Le rôle du microenvironnement dans la suppression de l’apoptose spontanée et l’expression de protéines anti-apoptotiques a été abordé au paragraphe §3.3. De la même façon, ces différents éléments du microenvironnement exercent un rôle protecteur de l’apoptose pharmacologiquement induite via l’EM-DR confortant ainsi la thèse de niche de chimiorésistance où des populations privilégiées au contact du microenvironnement sont préservées de l’effet cytotoxique des drogues. Afin de reconstituer partiellement le microenvironnement ganglionnaire spécifique de la LLC-B, il est possible de mimer le profil apoptotique des cellules « élites » du ganglion en stimulant de façon chronique les cellules sanguines de la LLC-B avec du CD40L. Ces cellules « lymph node-like » présentent un fort potentiel chimiorésistant in vitro (86, 87) et un profil d’expression protéique similaire aux cellules de LMC exprimant l’oncogène Bcr-Abl (88). Ces données expérimentales sont confirmées par l’inhibition de la chimiorésistance induite par le CD40 en présence d’inhibiteur de c-Abl (88). 4.3 La résistance spécifique aux traitements conventionnels de la LLC-B La résistance aux traitements standards de la LLC-B, Fludarabine, Cyclophosphamide et Rituximab, va être abordée dans ces paragraphes. 4.3.1 La chimiorésistance vis-à-vis de la Fludarabine P53 apparaît comme un acteur clé du potentiel cytotoxique des analogues de purines puisque les patients présentant une délétion p53 sont fortement réfractaires au traitement à la Fludarabine. Cependant, des données expérimentales accumulées in vitro démontrent que des voies p53 dépendantes et indépendantes sont impliquées dans l’action cytotoxique de cette drogue. De plus, la surexpression de protéine anti-apoptotiques tels que Mcl-1 (73) et Bcl2 (89) corrèle avec une chimiorésistance vis-à-vis de la Fludarabine. Il existe également une discordance importante entre la susceptibilité modeste des cellules in vitro et leur résistance absolue in vivo, due probablement à la mise en jeu de facteurs microenvironnementaux ou au ciblage préférentiel de populations leucémiques peu actives dans la pathogenèse (26). De fait, l’action des analogues de purines sur les cellules en division est également un point important à considérer étant donné l’importance du « pool » prolifératif, contenu au niveau des foyers de prolifération, dans l’expansion du clone leucémique. 33 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Plusieurs facteurs environnementaux interviennent dans la résistance à la Fludarabine. Le couplage CD40/CD40L, tels qu’il intervient au niveau des centres prolifératifs, permet de résister à la mort induite par la Fludarabine dans un mécanisme dépendant de NFKB (90) et potentiellement des surexpressions des protéines anti-apoptiques Bcl-xl et Mcl-1 (88). De façon similaire, la surexpression de Bcl-xl, dépendante de l’engagement de α4β1 par adhésion sur fibronectine, protège de l’action cytotoxique de la Fludarabine (91). De façon plus spécifique au métabolisme du composé, la LLC-B exprime les protéines hCNT2, hCNT3, hENT1 et hENT2 impliquées dans le transport des analogues de nucléosides. Bien que le niveau d’expression de ces transporteurs est corrélé avec la sensibilité des cellules de LLC-B à la Fludarabine in vitro (92), une surexpression de l’ARN messager de hCNT3 caractérise, de façon inattendue, les cellules de LLC-B résistantes à la Fludarabine (93). La capacité de phosphorylation des analogues de purines, révélée par le ratio dCK : 5’NT, détermine également le niveau de sensibilité des cellules de LLC-B à l’action des analogues de purines (73, 94). Low expression of transporters Protection from apoptosis by microenvironment components Schéma 7 : Points de résistance des cellules de LLC-B à l’action des analogues de nucléosides 34 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Modifié d’après Pettitt et al., British Journal of Haematology 121, 692-702 (2003) 4.3.2 La chimiorésistance vis-à-vis des agents alkylants De façon générale, la résistance des cancers aux agents alkylants s’exerce à plusieurs niveaux : (i) l’altération du transport de la drogue, (ii) les défauts de la cinétique de formation des ponts de l’ADN, (iii) la présence d’enzymes inactivant les drogues (métallothionein, aldehyde dehydrogenase (ALDH)), (iv) l’inhibition du processus d’apoptose et (v) l’amplification des capacités de réparation de l’ADN. Dans la LLC-B, l’implication des mécanismes d’entrée, de détoxification et d’inhibition d’apoptose restent controversés dans la résistance aux agents alkylants ou reposent uniquement sur des données corrélatives. Comme pour la Fludarabine, les délétions et mutations de p53 confèrent une résistance primaire aux agents alkylants. Une efficacité accrue de la réparation de l’ADN par le système NHEJ (Non-Homologous End Joinning), révélée par une augmentation de l’activité de la DNA-PK (DNA dependant protein kinase), semble contribuer au phénotype résistant des cellules de LLC-B (95). Alkylating agents ALDH Schéma 8 : Résistance à l’action des agents alkylants 35 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Modifié d’après Panasci L et al., Clin Cancer Res 7, 454-461 (2001) 4.3.3 La résistance vis-à-vis du Rituximab Outre les mécanismes de résistance au Rituximab qui vont impliquer le contrôle du système immunitaire environnant (cf. chapitres §III 2.1.3, §III 2.2.1.3 et §III 2.2.2.5), la LLCB présente de façon innée et acquise des mécanismes de résistance au Rituximab faisant intervenir principalement la modulation antigénique. En premier lieu, les cellules de LLC-B expriment très peu de CD20 à leur surface et limitent donc le nombre de sites de fixation du Rituximab. Cependant, l’impact du nombre de molécules de CD20 sur l’action cytotoxique du Rituximab reste encore discuté (96). L’existence et l’émergence post-thérapie d’un variant d’épissage alternatif du CD20, présentant un défaut d’adressage à la membrane ont été récemment reportées. Bien que les données montrent que ce variant soit très peu représenté dans les cellules de LLC-B, on note une augmentation de son transcrit pour les cellules leucémiques issues du ganglion (97). La LLC-B est une exception en termes de résistance au Rituximab puisqu’elle est la seule hémopathie maligne capable sécréter du CD20 soluble dans le plasma (98). Cette sécrétion implique la séquestration plasmatique du Rituximab, entraînant potentiellement une diminution de son effet anti-leucémique. Ce dernier point reste discutable étant donné que les doses administrées sont largement saturantes. Enfin, le « shaving » du CD20, observé pour les cellules LLC-B et faisant intervenir la composante phagocytaire, conduit à la perte de CD20 à la surface des cellules leucémiques. En effet, les monocytes, en interagissant avec la fraction Fc du Rituximab, arrachent de la surface des cellules leucémiques le complexe CD20/anticorps, laissant des cellules leucémiques invisibles au Rituximab (99). En conclusion, l’étude des mécanismes de résistance de la LLC-B aux thérapies reste indispensable à l’élaboration de traitements permettant l’éradication complète du clone leucémique. En parallèle, l’élucidation de l’origine de la LLC-B, encore hypothétique, cruciale dans la compréhension de la pathogenèse LLC-B, constitue invariablement la clé des futurs succès thérapeutiques. 36 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 5. Hypothèses sur l’origine de la LLC-B (histoire naturelle de la maladie) L’origine et la série d’évènements moléculaires et cellulaires qui conduisent au développement de la LLC-B restent aujourd’hui énigmatiques. L’exploration de la biologie de la LLC-B et de ces précurseurs putatifs, les connaissances à propos de son homologue B normal ainsi que l’émergence de nouveaux modèles murins, permettent de proposer plusieurs hypothèses sur les mécanismes de la pathogenèse LLC-B. 5.1 La stimulation antigénique L’identification de similarités au niveau des structures du BCR (plus particulièrement prononcées pour les cas Ig-NM), de différents patients LLC-B, supporte l’hypothèse d’un antigène commun potentiellement impliqué dans la pathogenèse de la maladie. Ces caractéristiques communes du récepteur impliquent la région CDR3, une chaîne légère stéréotypique et un profil de mutation somatique similaire. Cette similarité structurelle ou BCR stéréotypique, dont l’incidence concerne 20% des patients, est particulièrement intrigante puisqu’elle engendre dans 1% des cas l’expression de BCR quasi-identiques, un fait inter-individus extrêmement rare dont la probabilité de rencontre est quasi-improbable dans le contexte d’une physiologie B normale (2, 100). Cette thèse antigénique, associée à la différence de fonctionnalité du BCR entre formes Ig-M et Ig-NM pourrait expliquer la valeur pronostique du statut mutationnel des Igs. En effet, dans les formes Ig-NM, la persistance d’une stimulation antigénique de faible affinité pourrait engendrer l’expansion du clone. Inversement, pour les formes Ig-M la stimulation chronique de haute affinité aurait le potentiel de sélectionner un clone initialement répondeur, mais qui au cours du temps à force de stimulations antigéniques deviendrait anergique (56). Les LLC-B Ig-NM présentent, de façon fréquente, des BCR polyréactifs qui se lient à de multiples antigènes incluant les auto-antigènes et des antigènes du non-soi. Il est possible que les rencontres répétées d’un clone polyréactif avec son antigène microbien (infections répétées) ou auto-antigène de prédilection entraînent une expansion anormale qui en présence de mutations additionnelles conduisent à la conversion d’un lymphocyte B en cellule maligne de LLC-B (2, 100). 37 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B De plus, l’importance de la stimulation antigénique et de la nature des antigènes en cause dans la pathogenèse LLC-B est traduit par l’impact de certains sous-groupes de BCR stéréotypiques, identifiés par la séquence CDR3, sur le pronostic (2). Plusieurs cas de BCR stéréotypiques présentent des homologies de séquence HCDR3 avec des clones auto-réactifs anti-DNA, anti-facteurs rhumatoïdes, et anti-cardiolipin. De même, des études plus fonctionnelles ont démontré la liaison entre une Ig stéréotypique particulièrement représentée dans la LLC-B et une large diversité d’auto-antigènes incluant l’IgG humaine, la myoglobine et l’ADN double brins. Le rôle essentiel de l’absence de mutations somatiques dans ces phénomène de poly/auto réactivité a récemment été démontré par mutagenèse dirigée sur des cellules de LLC-B de type Ig-M (15, 56). Certains anticorps en revanche présentent une réelle spécificité pour des agents infectieux tels que les polysaccharides de S. pneumoniae. L’épisode d’une infection respiratoire, fréquemment sous forme de pneumonie, semble précéder de façon statistiquement significative l’émergence d’une LLC-B. L’ensemble de ces observations bien que spéculatives favorise la thèse d’une origine infectieuse (15). Schéma 9 : Modèle de leucomogenèse LLC-B dépendante de la stimulation du BCR D’après Chiorazzi et al., New England Journal of Medecine 352 (8), 804-815 (February 2005) 38 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 5.2 La cellule B à l’origine de la transformation leucémique La LLC-B n’est pas un pur produit de cancérisations aberrantes et désordonnées puisque l’on retrouve son homologue non-leucémique dans la différenciation normale B (CD19+CD5+CD23+). La LLC-B correspond donc, sur des considérations purement phénotypiques, au stade B mature activé qui représente dans l’hématopoïèse normale une fraction très minoritaire des lymphocytes B. Pour les LLC-B de type Ig-M, plusieurs hypothèses toujours en cours de débat sont proposées. Les mutations somatiques ne se produisant qu’au niveau des centres germinatifs, il était initialement proposé que les cellules de LLC-B de type Ig-M correspondaient à des cellules ayant été soumises à une expérience antigénique au niveau des centres germinatifs. En conséquence, les cellules de LLC-B de type Ig-M serait issues des cellules B mémoires post-GC n’ayant pas effectué la commutation isotypique des Igs (2). Cependant, bien que l’implication du centre germinatif dans le phénomène de mutations somatiques soit actuellement controversée, les profils phénotypiques et transcriptomiques, la présence de mutations au niveau de Bcl-6 (trait génétique du passage aux centres germinatifs) confortent l’hypothèse que les LLC-B de type Ig-M pourraient provenir de la transformation leucémique de cellules B mémoires IgM+IgD+CD27+ (2, 101). De la même façon, le profil d’expression génique des LLC-B de type Ig-NM comporte plus de similarité avec les cellules B mémoires post-GC que les cellules naïves CD5+. Cette thèse est confortée par la récente démonstration que le passage au niveau des centres germinatifs a la capacité de produire des cellules B mémoires ne présentant pas de mutations somatiques. De même, leur phénotype de cellules activées (plus accentué que pour les Ig-M) supporte l’hypothèse d’une expérience antigénique (2). Toujours concernant l’origine des cellules LLC-B de type Ig-NM, une deuxième thèse, décrivant une histoire biologique indépendante des centres germinatifs, reste cependant plausible. Cette hypothèse est confortée par l’auto-réactivité des cellules de LLC-B de type Ig-NM qui associe ces cellules à des lymphocytes B résidants dans la zone marginale. En effet, la poly/auto réactivité des anticorps produits par les cellules de LLC-B de type Ig-NM l’apparente orthologiquement à la lignée murine B1. Ces cellules B murines présentent le marqueur CD5 à leur surface, une Ig non-mutée et un fort potentiel de transformation. 39 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B L’expansion permanente de cette lignée chez la souris est assurée par une stimulation autoantigénique chronique. Aucun équivalent de ces cellules B1 n’est retrouvé chez l’homme. Cependant, les cellules humaines de la zone marginale tendent à récapituler certaines de leurs propriétés sous stimulation. Ces cellules, résultant d’une activation T indépendante, cette piste murine conforte l’hypothèse d’une rencontre antigénique indépendante du passage au sein des centres germinatifs (2, 15). Schéma 10 : Schéma récapitulatif des différentes hypothèses concernant l’origine cellulaire de la LLC-B D’après Zenz et al., Nature Review of Cancer 10 (1), 37-50, (February 2010) 40 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Schéma 11 : Voies de signalisation cellulaire de la maturation B D’après Chiorazzi et al., New England Journal of Medecine 352 (8), 804-815 (February 2005) 5.3 La lymphocytose monoclonale : MBL La MBL ou lymphocytose B monoclonale est une population B clonale présentant un profil immunophénotypique similaire à la LLC-B. Elle est détectée dans 3,5% de la population saine. Son occurrence augmente avec l’âge (suggérant l’existence de stimulations chroniques persistantes durant la vie d’un individu), le sexe masculin et chez les sujets sains apparentés à des cas de LLC-B dites « familiale ». Cette dernière observation soulève l’origine d’une prédisposition génétique dans l’expansion clonale de cette population précurseur de la LLC-B (56). Récemment, dans des études de grande envergure, il a été démontré que cette population précède tous les cas de LLC-B (102, 103). Cette donnée corrélative est étayée par la détection de la del13q14 dans cette population MBL, indiquant l’initiation d’acquisition de lésion génétique par le clone au stade non-leucémique (102). De façon similaire, les modèles murins délétés pour cette région chromosomique présentent une incidence non-négligeable de MBL en parallèle de développements majeurs de LLC-B (20). 41 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B En association avec la thèse du BCR, l’expansion « antigène-dépendante » d’une population B normale, visible dans les individus sains, pourrait correspondre à la MBL. L’analyse du répertoire des Igs de cette population indique cependant qu’uniquement 4% de individus sains présentant une MBL ont une séquence HCDR3 stéréotypée spécifique de la LLC-B (104). La stéréotypie du BCR est une caractéristique majeure du statut Ig-NM. Or, les cellules de la population MBL présentent une Ig majoritairement mutée. En conséquence, cette population pourrait représenter le précurseur pré-leucémique des formes Ig-M de la LLC-B (104). L’incidence de la MBL est 100 fois supérieure à celle de la LLC-B (2). Il résulte de cette constatation simple que seule une fraction des individus présentant une MBL développe une LLC-B. De ce fait, la MBL pourrait représenter potentiellement une première étape d’un processus composé d’évènements multiples de leucémogenèse. 5.4 L’apport des modèles animaux 5.4.1 La difficulté à obtenir un modèle de xénogreffe Longtemps imputée à l’absence de cellules initiatrices de LLC-B, la difficulté à obtenir un modèle relevant de xénogreffe de LLC-B, en modèles murins immunodéficients, souligne la complexité de la leucémogenèse LLC-B et l’importance du microenvironnement immunitaire dans cette pathologie (105, 106). Le premier (et seul) modèle convainquant publié de xénogreffe de cellules de patients LLC-B date de 2007. Dans ce rapport, l’efficacité de la greffe effectuée dans des souris NOD/SCID s’avère être dépendante du stade d’évolution de la maladie. Cependant, ces cellules présentent une invasion préférentielle de la rate et de la cavité du péritoine avec une infiltration des sites physiologiques de la LLC-B (moelle osseuse, sang périphérique et ganglions) relativement rare (107). Plus récemment, la reconstitution d’un microenvironnement hématopoïétique, par injection intra-os chez la souris NOD/SCID/γcnull de cellules CD34+ de cordon, de cellules souches mésenchymateuses (CSM) et de PBMC de patients LLC-B, a permit d’établir un modèle de xénogreffe proche de la physiopathologie humaine. Cependant, ces travaux n’ont pas été validés par publication (47). 42 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B 5.4.2 Le modèle Eμ-TCL1 Le modèle transgénique Eμ-TCL1 (T-cell Leukemia 1) a longtemps été le modèle murin de référence de la LLC-B. Ce modèle repose sur la surexpression de TCL1 dans la lignée B sous la dépendance de la région régulatrice « enhancer » des Igs. TCL1 est un régulateur de la voie oncogénique PI3K/AKT et sa surexpression par les cellules de LLC-B reflète un pronostic péjoratif. Ces souris transgéniques Eμ-TCL1 présentent, avec un degré âgedépendant, une expansion et une infiltration progressive de lymphocyte B CD5+IgM+ au niveau du péritoine, puis de la rate, suivie de la moelle osseuse pour finir avec une maladie symptomatique et agressive caractérisée par la présence d’adénopathies et de spléno/hépathomégalies à l’âge de 20 mois. La pertinence du modèle réside dans l’analogie qu’il présente au niveau de la nature de l’Ig de surface avec les LLC-B de mauvais pronostic. De fait, les Igs de ces cellules leucémiques murines sont majoritairement non-mutées et stéréotypées (108). 5.4.3 Les souris NZB Les souris New Zealand Black, exemptes de toutes modifications transgéniques et initialement modèles d’étude de l’auto-immunité, présentent un développement spontané et tardif de LLC-B. Favorisant la thèse de l’auto-immunité initiatrice de LLC-B, ce modèle présente dans un premier temps une hyperprolifération de lymphocytes B (B1) produisant des auto-anticorps dirigés contre l’ADN et des protéines érythrocytaire. Vers l’âge de 9 à 12 mois, cette hyperprolifération progresse ensuite inexorablement vers l’apparition d’une LLC-B (109). 5.4.4 Les modèles MDR-/- et miR-15a/16-1-/- La délétion 13q14 est l’aberration chromosomique la plus représentée dans la LLC-B. L’étude cette région chromosomique a permis de définir la région minimale délétée (MDR) et d’identifier plusieurs gènes codés par cette région : les deux microARNs miR-15a et miR16-1 et DLEU2 (Deleted in Lymphocytic Leukemia 2), un transcrit stérile. 43 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B Très récemment, des nouveaux modèles murins délétés au niveau de cette MDR ou plus spécifiquement au niveau des deux microARNs ont été établis. Ces deux modèles, avec une incidence plus prononcée pour les MDR-/-, récapitulent tous les spectres phénotypiques et pathologiques (MBL, SLL (Small Lymphocytic Lymphoma), syndrome de Richter, BCR stéréotypé) associés à la LLC-B, avec un développement prédominant et tardif de LLC-B. L’analyse fonctionnelle des deux miRs indique leur implication majeure dans l’accélération de la transition G1/S du cycle cellulaire. En parfaite adéquation avec la nouvelle vision de la LLC-B, cette étude met en exergue la prolifération dans les mécanismes de pathogenèse LLCB (20). 5.5 La théorie de la cellule souche hématopoïétique anormale L’implication de la cellule souche hématopoïétique ou de progéniteurs immatures dans la pathogenèse LLC-B, de façon analogique au modèle de leucémogenèse de la LAM, reste obscure à l’heure actuelle. L’engouement premier pour cette théorie date de 1997 avec la détection de trisomie 12 et de délétion 13q14 dans la fraction CD34+ de patient LLC-B présentant ces aberrations chromosomiques (110). Néanmoins, ces données furent rapidement controversée en 1999 par la même équipe (111). Depuis, cette théorie de hiérarchisation du clone leucémique est très rarement étayée dans la littérature et les études qui en font l’objet restent peu pertinentes ou trop préliminaires (112, 113). En conclusion, l’origine cellulaire de la LLC-B reste hypothétique aujourd’hui malgré les différentes thèses qui supportent la carcinogenèse de la cellule B-mémoire et la stimulation antigénique comme centraux dans ses processus de pathogenèse. 44 INTRODUCTION : La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B CONCLUSION La complexité de la biologie de la LLC-B, due à sa dépendance au microenvironnement, n’a pas permis de mettre en évidence une hétérogénéité du pouvoir initiateur au sein des cellules leucémiques. Cependant, l’évolution clinique des patients, qui se traduit par la rechute inévitable après thérapie, suggère l’existence d’une hiérarchie au sein du clone leucémique, avec potentiellement à sa tête un compartiment initiateur de LLC-B comprenant les cellules souches leucémiques multi-résistantes. Cette hiérarchie potentielle est également suggérée par l’hétérogénéité cellulaire des capacités de prolifération et de migration qui apparaissent confinées à une population leucémique « privilégiée ». 45 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance II. Cellules Side Population initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance 1. Cellules souches normales Le renouvellement cellulaire permanent des tissus (l’homéostasie tissulaire), qui perdure tout au long de l’existence d’un individu, est assuré par différentes populations de cellules souches pluripotentes et unipotentes capables de régénérer un tissu spécialisé. Ce dogme appliqué à l’ensemble de l’organisme, par extrapolation des connaissances acquises sur l’embryogenèse, reste cependant uniquement confirmé pour un certain nombre de tissus pour lesquels une population de cellules souches a été formellement identifiée (tissus hématopoïétique, mammaire, cerveau, intestin, peau, gonades…). 1.1 Propriétés fondamentales des cellules souches Les cellules souches sont définies de manière fonctionnelle par la division asymétrique. Cette compétence unique leur confère deux caractéristiques majeures : l’auto-renouvellement (division à l’identique assurant la pérennité du « pool » souche) et la capacité de différenciation (génération de cellules matures d’un tissu donné). La valeur physiologique de ces cellules pour l’organisme entier, conférée par leur potentiel unique, implique une rareté de ces cellules, un état de quiescence, une régulation complexe des décisions d’auto-renouvellement et de différenciation, et une protection puissante contre les agents mutagènes et cytotoxiques (114). Ces propriétés fondamentales sont assurées en grande partie par l’activation de voies de signalisation morphogènes telles que les voies Wnt/β-caténine, Sonic Hedgehog et Notch. 46 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Schéma 12 : Différentes voies de destinée des cellules souches D’après Blank et al., Blood 111 (2), 492-503 (January 2008) 1.2 Identification des cellules souches L’identification univoque des cellules souches repose majoritairement sur la présence de marqueurs immunophénotypiques d’immaturité tels que le CD34, c-kit et FLT3 et l’absence d’antigène de maturité, normalement présent sur les cellules différenciées et spécialisées. De même, l’émergence de marqueurs dit fonctionnels (Hoechst négatif, ALDH positif) permet, sur la base d’activités enzymatiques impliquées dans la « souchitude » ou « stemness », d’affiner la définition phénotypique des populations de cellules souches, en conjonction avec la détection d’un immunophénotype immature. Ce n’est cependant que par validation in vivo par transplantation sérielle chez des animaux modèles, conformément à la propriété unique de division asymétrique des cellules souches, que l’identification formelle de ces cellules peut être validée (115-117). 47 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance 1.3 Mécanismes moléculaires du maintien de la « stemness » : BMI-1 La faculté de division asymétrique garantit à la fois un profil d’expression génique maintenant l’état de pluripotence et une flexibilité génomique permettant l’engagement dans diverses voies de différenciation, en conjonction avec la disparition de la capacité d’autorenouvellement. La régulation intrinsèque de cette double contrainte est majoritairement exercée par des mécanismes épigénétiques. Parmi les différents acteurs de la régulation épigénétique, les protéines de la famille polycomb (PcG) sont fortement impliquées dans la régulation de cette « mémoire cellulaire ». Les protéines de la famille PcG s’assemblent pour former les complexes « polycomb repressor complex » (ou PRC), PRC1 et PRC2. Ces complexes se lient à leurs cibles chromatiniennes, au niveau de l’histone H3 marquée spécifiquement par des triméthylations des résidus lysine 27 et 9, et répriment la transcription de gènes cibles en inhibant le processus de remodelage de la chromatine dépendant de SWI/SNF (SWItch/Sucrose Non-Fermenting) et la machinerie de transcription. La protéine BMI-1, composante du complexe PCR1, initialement identifiée comme un oncogène coopérant avec c-myc dans le développement de lymphomes B et T, est certainement la plus étudiée dans le contexte de maintenance de la pluripotence. Ses gènes cibles comprennent p16INK4a et p19/p14ARF, deux gènes répresseurs de la phase S et suppresseurs de tumeur (118). BMI-1 apparaît être un déterminant essentiel du potentiel prolifératif des cellules souches et progénitrices hématopoïétiques (119). L’invalidation de BMI-1 en modèle murin indique une implication de celle-ci dans l’auto-renouvellement des cellules souches neurales (120). Récemment l’invalidation des gènes cibles de BMI-1 (p16INK4a, p19ARF et Trp53) a démontré l’acquisition, par les progéniteurs multipotents, d’une capacité de reconstitution à long terme de l’hématopoïèse (121). Schéma 13 : Voie de signalisation induite par BMI-1 D’après Pardal et al., Nature Reviews Cancer 3 (12), 895-902 (December 2003) 48 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance 2. Cellules initiatrices de tumeurs Les connaissances acquises sur l’immense potentiel régénératif des cellules souches et l’inhérente hétérogénéité des cellules tumorales ont fait émerger une nouvelle ère de la vision des tumeurs avec la théorie des cellules initiatrices de tumeurs ou cellules souches tumorales. L’initiation de cette nouvelle réflexion de la tumorigenèse s’est faite avec les travaux pionniers de John Dick et Dominique Bonnet en 1997 démontrant l’existence d’une organisation hiérarchique de la LAM. Dans ces travaux, l’expansion leucémique a pour origine cellulaire une cellule souche hématopoïétique et leucémique contenant les lésions génétiques originelles du clone leucémique (122). Depuis, de nombreuses données expérimentales publiées indiquent que ce modèle de hiérarchisation du clone tumoral existe dans de nombreuses tumeurs hématologiques et solides (cancer du sein, gliome, LMC….). Ce modèle stipule que l’initiation et la propagation tumorale sont alimentées par une population « réservoir » de cellules cancéreuses pourvues des propriétés fondamentales des cellules souches (différenciation et auto-renouvellement) (123, 124). Schéma 14 : Modèle de leucémogenèse proposé par Bonnet D et Dick J en 1997 D’après Bonnet D et Dick J, Nature Medecine 3 (7), 730-737 (July 1997) 49 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance 2.1 Identification des cellules initiatrices de tumeurs Par analogie à leur homologue normal, l’identification de cellules souches tumorales repose sur la sélection de populations définies par leur statut primitif (immunophénotype immature, exclusion du Hoechst, présence de l’ALDH, chimiorésistance…) combinée à la régénération de l’hétérogénéité de la tumeur primaire (différenciation) en modèle murin xénogreffé de façon sérielle (auto-renouvellement). Cette dernière méthode de criblage unique du potentiel initiateur de tumeur comporte un certain nombre de limitations et engendre un débat dans la communauté scientifique. 2.1.1 Limitations du modèle murin dans la recherche de cellules initiatrices de tumeurs Les limitations associées à l’utilisation des modèles murins incluent la différence de microenvironnement humain/murin (compatibilités cytokiniques et interactions cellulaires), le statut du microenvironnement (tumoral humain vs vierge et sain murin), l’absence de cellules immunitaires dans les modèles immunodéficients et la pertinence du site d’injection. Bien qu’ils ne récapitulent qu’en partie les mécanismes de tumorigenèse humaine et que des différences fondamentales entre niches tumorales murines et humaines persistent, les modèles murins syngéniques et transgéniques mimant l’apparition et la progression de certains cancers offrent une option alternative au modèle de xénogreffe. 2.1.2 Controverses d’initiation tumorale apportées par les modèles animaux En plus de ces barrières inhérentes aux modèles murins d’oncogenèse humaine, la controverse récente de cette méthode d’identification des cellules initiatrices de tumeurs indique que le potentiel initiateur de tumeur pourrait être contenu dans un pourcentage substantiel de cellules tumorales (mélanome : 1 cellule/4 et modèle de lymphomes et leucémies : 1 cellule/10) (125, 126). De ce fait, l’initiation tumorale ne serait pas comme le stipule le dogme initial, dictée uniquement par la biologie des cellules souches et restreinte à une population élite. Les modèles d’études disponibles actuellement semblent entraîner une sous-estimation de la fréquence de ces cellules initiatrices de tumeurs, pour le cas de certains types de cancers ou de cancers homogènes (125, 126). 50 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Contrairement aux cellules souches normales, il est cependant globalement établi dans la littérature que la rareté des cellules souches tumorales est très variable selon le grade tumoral, le pronostic initial, l’expérience passée d’une chimiothérapie et la présence de métastases (127). 2.2 Théories d’initiation tumorale Outre la théorie n’impliquant pas de hiérarchisation dans le schéma d’oncogenèse (pour les tumeurs homogènes ou équipotentes), plusieurs modèles d’initiation tumorale hiérarchiques peuvent être proposés. Le premier, de façon analogique aux travaux conduit sur la LAM, la LMC et la « stemness » physiologique, stipule que la cellule souche normale du tissu considéré est le siège de la transformation oncogénique et génère par différenciation une progénie cancéreuse (124). Le second modèle implique l’acquisition (pré- ou post-tumorale) de propriétés fonctionnelles d’auto-renouvellement et de différenciation par des compartiments cellulaires progéniteurs ou matures. L’hypothèse de dédifférenciation fonctionnelle des cellules progénitrices est corroborée par les travaux de l’équipe de Clarke qui, certes dans un contexte physiologique normal, indiquent que les délétions des gènes cibles de BMI-1 entraînent l’acquisition d’une capacité de régénération de l’hématopoïèse à long terme. Dans un contexte cancéreux, les produits de fusion MOZ-TIF2, MLL-AF9 et MLL-ENL confèrent des propriétés de cellules souches aux cellules progénitrices, les convertissant ainsi en cellules initiatrices de tumeur (123). A partir de modèles cellulaires matures, des études récentes indiquent l’induction d’une reprogrammation cellulaire vers la pluripotence au travers de l’expression de c-myc, Nanog, Oct4 et Sox2 par des cellules fibroblastes matures. Ces travaux laissent entrevoir l’existence de phénomènes de reprogrammation similaires au niveau des cellules matures dans le cancer (128). De plus, certains mécanismes moléculaires propres à la carcinogenèse apparaissent promoteurs et/ou supports du statut souche. Des études démontrent qu’à une induction de la transition épithélio-mésenchymateuse (EMT) est couplée une acquisition de propriétés de « stemness » (129), liant l’apparition de métastases aux cellules souches cancéreuses (130). De façon similaire, l’hypoxie semble promouvoir et maintenir un phénotype de cellules souches cancéreuses (131). 51 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Schéma 15 : Modèles d’initiation tumorale et parallèle avec la biologie des cellules souches normales D’après Pardal et al., Nature Reviews Cancer 3 (12), 895-902 (December 2003) Quelque soit le modèle considéré, la part fondamentale que jouent ces populations immatures dans l’initiation du cancer (« cell of origin ») et/ou dans la maintenance de la progression tumorale reste encore obscure. 52 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance 2.3 Implication de BMI-1 dans les cellules initiatrices de tumeurs Tout comme une majorité des cellules cancéreuses et des cellules souches normales, les cellules souches cancéreuses utilisent les voies de signalisation morphogènes (Sonic Hedgehog, Wnt β-caténine, Notch….). De même, BMI-1, garant de la pluripotence et médiateur de la signalisation Sonic Hedgehog dans les cellules cancéreuses, joue un rôle essentiel dans la biologie des cellules souches cancéreuses. Son implication est majeure dans la prolifération et l’auto-renouvellement des cellules souches cancéreuses du sein (132) et de certaines leucémies (LAM et LMC) (119, 133). De plus, la signalisation dépendante de BMI1 apparaît comme la signature moléculaire de l’agressivité, de la présence de métastases et prédit un pronostic péjoratif pour divers types de cancers (134). Schéma 16 : L’expression des protéines de la famille Polycomb group (PcG) est déterminante dans l’identité souche et l’émergence de tumeurs D’après Sauvageau M et Sauvageau G, Plos Biology 6 (4), e113 (April 2008) 53 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Schéma 17 : Voie de signalisation de BMI-1 dans des contextes souches normaux et tumoraux D’après Liu et al, Cancer research 66 (12), 6063-71 (June 2006) 2.4 Implications thérapeutiques du concept des cellules initiatrices de cancers La vision hiérarchisée du cancer a introduit également un nouveau niveau de réflexion dans la thérapeutique du cancer, où la réémergence de la maladie peut-être imputée à l’activité régénératrice de cellules initiatrices de cancer. Il apparaît clairement que la plupart des traitements ciblent efficacement les populations matures du cancer et n’affectent pas ou peu le compartiment initiateur. En effet, la résistance aux traitements de ces cellules initiatrices de tumeurs, conférée par leur relative quiescence, la surexpression des transporteurs ATP et de molécules anti-apoptotiques, leur résistance au stress oxidatif et aux dommages à l’ADN, et leur efficacité de réparation de l’ADN, dicte le besoin d’élaborer de nouvelles stratégies thérapeutiques permettant d’éradiquer ces cellules. 54 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Schéma 18 : Implications thérapeutiques des cellules souches cancéreuses D’après Pardal et al., Nature Reviews Cancer 3 (12), 895-902 (December 2003) Point de convergence entre chimiorésistance et « stemness », les transporteurs ABC jouent un rôle essentiel dans la biologie des cellules tumorales et des cellules souches. 3. Les transporteurs ABC La famille des transporteurs ATP Binding Cassette (ABC) compte 49 membres divisés en sept sous-classes identifiées par les lettres A à G. Ces protéines sont structurellement composées de deux segments hydrophobiques transmembranaires, qui confèrent la spécificité de l’efflux, et de domaine de liaison à l’ATP ou nucléotide « binding folds » (NBF), dont la séquence en acides aminés détermine l’appartenance aux sous-classes préalablement citées. Ces protéines effluent, hors de l’espace intracellulaire, un large spectre de molécules endogènes et exogènes dans un processus « énergie-dépendant » impliquant la liaison et l’hydrolyse de l’ATP. De façon non-exhaustive, ces substrats incluent des agents chimiothérapeutiques, des ions métalliques, des peptides, des acides aminés, des hydrates de carbone, des métabolites et des composés hydrophobiques. Les transporteurs ABC présentent un spectre d’expression tissulaire varié qui prédomine dans les organes excréteurs tels que le foie, les intestins, la barrière sang/cerveau, la barrière sang/testicule, le placenta et les reins. 55 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Le rôle majeur de ces protéines réside dans la protection tissulaire en excrétant des composés toxiques, métabolites endogènes et xénobiotiques. L’exploration des fonctions des transporteurs ABC dans des contextes normaux ou cancéreux démontrent l’implication de certains membres de cette famille dans la maintenance de l’immaturité des cellules souches et, de façon potentiellement liée, dans la chimiorésistance de certains cancers. Les exemples les plus documentés dans la littérature sont les protéines ABCG2 et ABCB1 (42, 135). Schéma 19 : Illustration de l’activité d’efflux des transporteurs ABC D’après Fletcher et al., Nature Reviews Cancer 10 (2), 147-156 (February 2010) 3.1 ABCB1 ABCB1, également connue sous la dénomination de P-glycoprotéine (P-gp) ou Multi-drug résistance 1 (MDR1), a été identifiée sur la base de sa capacité à conférer aux cellules cancéreuses qui l’expriment un phénotype résistant aux drogues. ABCB1 est exprimée dans les cellules du foie, de l’intestin, de l’endothélium, du pancréas, du placenta, et les cellules hématopoïétiques (cellules immatures CD34+ckit+, cellules NK et CD8+). 56 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Les fonctions physiologiques qui lui sont associées dans ces différents tissus relèvent de la protection tissulaire et de fonctions indépendantes de l’activité d’efflux, qui restent encore peu explorées dans la littérature. Les souris « knock-out » pour les gènes mdr1 a et b présentent des dysfonctionnements des systèmes gastrointestinal et rénal et des susceptibilités augmentées à l’action cytotoxique de certaines drogues. Les substrats de ABCB1 sont de nature cationique ou amphiphatique et souvent hydrophobique, et comprennent des agents chimiothérapeutiques (anthracyclines, vinca alkaloides, taxanes et étoposides), des drogues immunosuppressives, des inhibiteurs des protéases (spécifiques du HIV) et certains antibiotiques (42). Le rôle essentiel d’ABCB1 dans la chimiorésistance innée ou acquise des cancers est de loin la fonction d’ABCB1 la plus étudiée, en particulier dans la LAM et les tumeurs solides (42, 135). Cependant, en relation avec les « hallmarks » du cancer, il semblerait que cette protéine soit impliquée dans de nombreuses fonctions cellulaires destinées à supporter la progression tumorale (136). ABCB1 est impliquée dans la résistance à l’apoptose induite par les agents chimiothérapeutiques, les irradiations UV, l’engagement de Fas ou de TNFα. Cette résistance à l’apoptose est dépendante de l’inhibition de l’activation de la caspase 3 et/ou de l’altération du métabolisme du céramide (42, 137). De plus, l’inhibition pharmacologique, la répression de l’expression de l’ARN messager et des expériences de surexpression de ABCB1 s’accordent à confirmer le rôle de ce transporteur dans la résistance à l’apoptose et la prolifération. De façon similaire, les lignées cancéreuses délétées pour ABCB1 présentent une altération de leur phénotype migratoire et invasif (136). En conséquence, il apparaît que l’expression d’ABCB1 apporte une valeur pronostique indicatrice du niveau d’invasion, de la présence de métastases ganglionnaires, et de l’agressivité de nombreux cancers solides (136). L’implication d’ABCB1 dans la biologie des cellules souches hématopoïétiques est suggérée par sa surexpression dans ces cellules. Probablement majoritairement en charge de la protection de ce « pool » de cellules contre les xénobiotiques naturels, la surexpression ectopique d’ABCB1 par les cellules de la moelle osseuse engendre une accélération de la différenciation en parallèle d’apparitions de désordres myéloprolifératifs (138). 57 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Schéma 20 : Structure topologique putative d’ABCB1 D’après Zhang, Cell Research 17 (4), 311-323 (April 2007) Légende : TMD1 : Transmembrane domaine NBD : Nucleotide binding domain 3.2 ABCG2 ABCG2, également appelée Breast Cancer Resistance Protein 1 (BCRP1) a été découverte sur la lignée de cancer du sein MCF7 sélectionnée par la doxorubicine en présence de vérapamil. Elle représente ainsi le déterminant moléculaire d’une chimiorésistance indépendante de la fonction d’ABCB1. La protéine ABCG2 est un demi-transporteur pourvu d’un unique NBF dont l’homodimérisation semble essentielle pour assurer sa fonction de transporteur (139). Le spectre d’expression tissulaire d’ABCG2 comprend le placenta, le cerveau, les reins, l’intestin, le foie, les testicules, les ovaires, les cellules souches hématopoïétiques, les cellules NK et les précurseurs érythroïdes (116, 140). Le rôle physiologique d’ABCG2 dans ces organes relève surtout de la protection des tissus contre les composés toxiques exogènes ou endogènes (135). 58 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance ABCG2 compte une pléiade de substrats qui incluent non-exhaustivement des agents chimiothérapeutiques (Mitoxanthrone, Topetocan, Imatinib, Flavopiridol, Anthracycline, Fludarabine….), des molécules antivirales, des inhibiteurs de la HMG-CoA reductase, des molécules carcinogènes ainsi que des antibiotiques (135, 141). L’expression d’ABCG2 est finement régulée au niveau transcriptionnel notamment par certaines hormones sexuelles (progestérone et oestrogène) et par l’hypoxie. Une régulation épigénétique négative de l’expression d’ABCG2 intervient également par méthylation des îlots CpG des régions promotrices du gène abcg2 (135). Il est clairement démontré qu’ABCG2 exerce un rôle protecteur des cellules souches hématopoïétiques contre l’action cytotoxique/mutagène d’agents chimiothérapeutiques (142). Les cellules souches hématopoiëtiques surexpriment ABCG2 et l’engagement dans la différenciation est caractérisé par une répression de l’expression d’ABCG2, à l’exception du cas des progéniteurs érythrocytaires. Cette expression préférentielle d’ABCG2 dans le compartiment primitif de l’hématopoïèse indique un rôle potentiel d’ABCG2 dans le maintien de l’état indifférencié des cellules souches hématopoïétiques (139). En effet, un blocage de la maturation est observé lorsque des cellules médullaires surexprimant ABCG2 sont transplantées chez la souris irradiée léthalement, indiquant potentiellement l’efflux de molécules différenciantes par ABCG2 (140). Cette hypothèse est en partie corroborée par l’étude démontrant le rôle essentiel d’ABCG2 dans la survie de cellules progénitrices en milieu hypoxique (143). En effet, les cellules souches hématopoïétiques sont contenues dans des niches spécialisées et le microenvironnement hypoxique qui caractérise ces sites semble être essentiel au maintien de la pluripotence de ces cellules (144). Il est possible qu’in vivo l’expression d’ABCG2 confère une aptitude à survivre en milieu hypoxique et, de fait, soit le garant du statut de « stemness ». Cependant, l’expérience des souris délétées pour le gène abcg2 montrent une absence de répercussion sur le nombre de cellules souches et sur la physiologie de l’hématopoïèse, remettant ainsi en question le rôle d’ABCG2 dans le maintien de l’état indifférencié des cellules souches (136). Dans les cancers, le rôle d’ABCG2 dans la chimiorésistance des LAM est clairement établi. De plus, certaines études démontrent que l’expression d’ABCG2 pourrait servir de facteur pronostique. L’étude de l’expression d’ABCG2 au sein d’un panel contenant 150 tumeurs non-traitées démontre une positivité pour les carcinomes du tube digestif (colon, œsophage et estomac) (135). 59 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance De la même façon, pour le cancer du poumon non à petites cellules, l’expression d’ABCG2 est prédictive de la réponse à la thérapie et indique un pronostic péjoratif (136). Schéma 21 : Structure topologique putative d’ABCG2 D’après Zhang, Cell Research 17 (4), 311-323 (April 2007) Légende : TMD1 : Transmembrane domaine NBD : Nucleotide binding domain 3.3 Autres transporteurs impliqués dans le cancer D’autres transporteurs sont impliqués dans la maintenance et la progression tumorale. ABCC1 (MRP1) est impliquée dans la chimiorésistance des tumeurs en effluant des agents cytotoxiques tels que les Anthracyclines, les Vinca alkaloïds, la Mitoxantrone et l’Etoposide. ABCC1 est associée à un pronostic péjoratif dans certains cancers, tels que les carcinomes hépatocellulaires, le cancer du sein et les neuroblastomes, où son expression corrèle au degré de différenciation, à la masse tumorale et au niveau d’invasion (uniquement pour les carcinomes hépatocellulaires) (136). De façon similaire à ABCB1, ABCC1 est impliquée dans la survie, la prolifération et la migration des neuroblastomes. Il apparaît également que son expression est particulièrement élevée dans les métastases issues de carcinomes mammaires et de mélanomes (136). 60 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Dans la biologie normale, si ABCC1 est impliquée dans la maintenance de l’état indifférencié de certaines cellules hématopoïétiques matures, néanmoins son rôle dans le maintien des cellules souches reste peu étudié (138). Plus ponctuellement dans la littérature, l’expression d’autres membres de la large famille des transporteurs ABC, tels que ABCA3 et ABCB5, est associée à la tumorigenèse. L’expression d’ABCA3 corrèle avec le stade d’évolution du cancer pancréatique (136) et ABCB5 marque spécifiquement les cellules initiatrices de mélanomes récemment décrites (145). En fonction du tissu ou de la pathologie considérée, la définition immunophénotypique du compartiment de cellules souches est très variable et fait fréquemment l’objet de débats. Option alternative ou complémentaire à cette technique traditionnelle d’isolation des compartiments souches, la technique des Side Population (SP), basée sur l’activité des transporteurs ABC, offre une universalité d’usage ainsi que la possibilité d’étudier une population immature en l’absence de marqueurs de surface validés. 4. Side Population (SP) Le Hoechst 33342 est un colorant vital qui se lie aux régions riches en liaisons AT au niveau des petits sillons de l’ADN. L’intensité de la fluorescence émise reflète la quantité d’ADN, la structure de la chromatine, et permet de déterminer les phases du cycle cellulaire (137). C’est cependant son statut de substrat des transporteurs de la famille des ATP-binding cassettes (ABC) qui fait du Hoechst 33342 un marqueur de « stemness » et la base de la technique d’isolation des SP décrite par Margaret Goodell en 1996. Dans cet article princeps (146), c’est à l’occasion d’une analyse du cycle cellulaire de cellules médullaires murines que les auteurs ont découvert que l’émission simultanée du Hoechst 33342 à deux longueurs d’onde (rouge 675 nm et bleu 450 nm) permettait d’isoler distinctement une sous-population très minoritaire Hoechst négative, localisée sur le côté de la population majoritaire Hoechst positive (d’où le terme side). Cette population, très mineure, présentait un phénotype immature (Sca1+, Lin-) et un potentiel de régénération de l’hématopoïèse à long terme chez la souris irradiée. 61 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Schéma 22 : Side Population (SP) médullaire murine Lin-Sca-1+ identifiée pour la première fois en 1996 D’après l’article princeps Goodell et al., Journal of Experimental Medecine 183 (4), 1797-1806 (1996) 4.1 La SP représente une fraction enrichie en cellules souches Quatorze ans plus tard, l’abondante littérature disponible sous le mot clé SP atteste de la validité de cette méthode d’isolation ou du moins de l’intérêt qu’elle a suscité. Des cellules SP ont été identifiées dans de nombreux tissus sains (peau, poumon, cerveau, cœur, foie, reins, et sein). Le haut niveau d’expression de gènes impliqués dans la « stemness » et le potentiel de différenciation multipotent font qu’il est généralement admis, au travers de ces différents articles, que le compartiment SP est enrichi en cellules souches, à quelques exceptions près qui seront évoquées dans le paragraphe §4.3 (147). De plus, le degré de l’activité d’efflux semble être corrélé, au sein de la SP, au niveau d’engagement des cellules dans la différenciation : les cellules présentant un efflux élevé étant les moins différenciées (148). Conformément à la thèse des cellules souches cancéreuses, les adeptes de la vision hiérarchique de la carcinogenèse se sont vus offrir, par la technique des SP, un outil performant permettant de détecter de potentielles cellules initiatrices de tumeurs là où les marqueurs membranaires avaient échoué. Ainsi, des cellules SP ont été détectées au sein de lignées cellulaires tumorales (Myélome Multiple, sein, prostate, thyroïde, poumon, gliome, neuroblastome…) et d’échantillons néoplasiques primaires (LAM, ascite de cancer des ovaires, neuroblastomes, néoplasmes mésenchymateux) (147, 149, 150). 62 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Le potentiel initiateur supérieur de ces différentes SP est en général prouvé in vivo par xénogreffe chez la souris immunodéficiente en comparaison avec les cellules non-SP. Certaines études se contentent de conclure sur la capacité de division asymétrique des cellules SP par l’observation de la reconstitution de l’hétérogénéité initiale de la tumeur (cellules Hoeschst positives et cellules Hoechst négatives) (147). De façon unique, l’étude menée par Wu et collègues démontre que le couplage auto-renouvellement/différenciation est restreint à la population SP de néoplasme mésenchymateux lors de transplantations sérielles chez la souris NOD/SCID, alors que les cellules non-SP ont la capacité d’initier la tumeur uniquement lors de la première transplantation. L’article démontre également une corrélation entre grade tumoral et pourcentage de cellules SP, conférant de ce fait au phénotype Hoechst négatif une valeur pronostique pour les néoplasmes mésenchymateux (151). 4.2 Déterminant moléculaire du phénotype SP La dynamique du phénotype SP est assurée par les transporteurs ABC comme l’atteste la disparition de la population en présence d’un inhibiteur non-spécifique de ABCB1 (vérapamil) (146). Plus précisément, les déterminants moléculaires du phénotype SP, les plus documentés dans la littérature, sont ABCB1 et ABCG2 (137, 140). Cependant, de nombreuses preuves scientifiques démontrent la prédominance de la contribution d’ABCG2 dans l’expression du phénotype SP. De fait, les souris délétées pour le gène codant pour ABCB1 (mdr1a-/-b-/-) présentent un pourcentage de cellules SP médullaires identique aux souris sauvages (140). Les souris délétées pour le gène codant ABCG2 présentent une sévère réduction du pourcentage de la SP au sein des cellules de la moelle osseuse. Cependant, la persistance d’une fraction mineure de SP suggère que l’activité d’ABCG2 n’est pas l’unique déterminant moléculaire du phénotype SP de la moelle osseuse murine (142). Enfin, l’existence probable d’un troisième transporteur conférant l’efflux du Hoechst aux cellules SP médullaires murines est suggérée par la présence d’une SP dans les souris triple « knock-out » pour les gènes codant pour ABCB1 (mdr1a/b) et ABCG2 (152). Enfin, il est important de dissocier activité et expression des ABC transporteurs. Le potentiel tumorigène contenu dans la fraction SP ne semble pas être fonction du niveau d’expression d’ABCG2. En effet, les cellules triées sur la base de l’expression de membrane de cette pompe n’expriment pas de capacité initiatrice de tumeur supérieure au compartiment ABCG2 négatif (153). 63 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance Schéma 23 : Dynamique du phénotype SP et persistance d’une SP dans les souris délétées pour les gènes mdr1a et b D’après Zhou et al., Nature Medecine 7 (9), 1028-1034 (September 2001) Légende : Reserpine : inhibiteur non spécifique des ABC transporteurs 2-Deoxyglucose + sodium azide : agent supprimant l’ATP cellulaire 4.3 Points critiques de la technique Le concept de la SP enrichie en cellules souches ou initiatrices a été démontré, de façon ponctuelle dans la littérature, comme n’étant pas applicable à tous les tissus. En effet, l’existence de cellules souches hématopoïétiques au sein de la population non-SP (154), l’absence de marqueur d’immaturité de la SP isolée à partir de l’épiderme (155), et l’indépendance du phénotype SP dans la capacité régénérative du capiton graisseux mammaire (156) sont trois exemples précis réfutant l’implication du phénotype SP dans la « stemness » dans des contextes cellulaires spécifiques. La grande critique de la technique des SP est la toxicité du colorant Hoechst qui contenu dans les cellules de la fraction non-SP a le potentiel de désavantager cette fraction cellulaire dans les tests fonctionnels. 64 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance En plus d’une induction de l’apoptose ou de l’arrêt du cycle cellulaire induit par ce composé, la procédure de coloration Hoechst et de tri sur la base du phénotype SP (laser UV) des cellules SP et non-SP du sang périphérique mobilisé entraînent la perte de la capacité régénérative à court terme de la lignée myéloïde, dans le cadre d’un lymphome (157). De plus, une étude ancienne conduite sur des lignées multipotentes indique que le colorant Hoechst 33342 peut induire la différenciation cellulaire. L’extrapolation des données de cette étude unique à l’actuel protocole d’isolation des SP laisse envisager la possibilité d’une sousestimation du potentiel souche contenu dans la fraction non-SP (158). Cependant, les tests incluant, comme contrôle supplémentaire, les cellules non chargées en colorant Hoechst démontrent que pour la lignée cellulaire du cancer du sein MCF7, le colorant Hoechst n’affecte pas les propriétés fonctionnelles des cellules non-SP (159). Enfin, tous les paramètres physiques (agitation, température, durée) et chimiques (concentration du Hoechst/concentration cellulaire) du test, ainsi que les stratégies de fenêtrage, et le type d’appareillage (laser…) représentent une multitude de variables qui nécessite une constance rigoureuse. 4.4 Chimiorésistance des cellules SP Les cellules SP issues de tumeur présentent un haut degré de chimiorésistance, qui peut apparaître intuitif étant donné que le principe de leur isolation repose sur la capacité d’efflux au moyen des ABC transporteurs. De fait, les SP sont résistantes à un large de spectre de drogues comprenant de façon non-exhaustive des substrats avérés des transporteurs ABC tels que la Mitoxanthrone, la Doxorubicine, la Daunorubicine, la Fludarabine, l’Etoposide et le Cisplatine (149, 160-162). Il est possible que, de façon analogue aux cellules souches, les cellules SP expriment un arsenal moléculaire, indépendant de l’efflux, leur conférant une évasion à l’action cytotoxique des thérapies anticancéreuses. La résistance des cellules SP aux radiations ionisantes tend à supporter cette théorie (163). En parallèle de ces données accumulées in vitro, l’implication des cellules SP chimiorésistantes dans les rechutes postthérapeutiques est suggérée par le pourcentage important de cellules SP qui caractérise les patients LAM en rechute et/ou réfractaires aux thérapies (160). 65 INTRODUCTION : Cellules SP initiatrices de tumeurs et déterminatrices de la chimiorésistance CONCLUSION Bien que le concept des cellules initiatrices de cancer fasse l’objet de controverses et ne soit pas applicable à l’ensemble des cancers, l’identification et la caractérisation de ces cellules restent fondamentales pour élaborer des options thérapeutiques performantes et ciblées. La technique des Side Population (SP) basée sur l’activité d’ABCG2 permet de mettre en évidence des compartiments chimiorésistants, potentiellement immatures. En effet, l’immaturité des cellules initiatrices de cancer est souvent accompagnée d’une forte chimiorésistance. L’éradication de ces cellules, inefficace par la chimiothérapie, requiert d’autres alternatives thérapeutiques telles que l’immunothérapie via les cellules immunitaires. 66 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale III. Surveillance immunitaire anti-tumorale 1. La surveillance immunitaire des tumeurs Proposé pour la première fois par Ehrlich en 1909, le concept de surveillance immunitaire repose sur l’hypothèse d’une éradication spontanée et continuelle par le système immunitaire de tumeurs naissantes avant que celles-ci ne deviennent cliniquement détectables. Ce concept fut revisité plus d’un demi-siècle plus tard par Thomas et Burnet qui établirent les bases de l’immunosurveillance. Selon Burnet, les cellules néoplasiques expriment des antigènes propres à leur statut tumoral et sont capables d’induire une réponse immunitaire spécifique, engendrant l’éradication des tumeurs émergeantes. Thomas, quant à lui, émit l’hypothèse de l’existence, au sein d’organismes complexes pourvus d’une durée de vie longue, de mécanismes immunologiques contrôlant l’apparition de cancers de façon analogue aux défenses anti-infectieuses. 1.1 Preuves expérimentales de l’immunosurveillance Il fallut encore quelques décennies pour que ce concept jusqu’alors hypothétique ne soit formellement validé par des preuves scientifiques solides apportées par les modèles animaux et les données cliniques de patients atteints de cancers (164). De fait, les souris délétées pour des composants essentiels au fonctionnement du système immunitaire inné et adaptatif (RAG2, TCRγ, IFNγ…) présentent une susceptibilité accrue au développement de tumeurs spontanées ou induites par des agents chimiques (165). Ces modèles « preuve de concept » du contrôle immunitaire des tumeurs seront détaillées plus spécifiquement pour chaque acteur du réseau de l’immunosurveillance. Les preuves « cliniques » de la surveillance immunitaire des tumeurs à l’échelle humaine restent plus limitées et reposent sur des données majoritairement corrélatives. Le premier élément alimentant l’existence de ce concept chez l’homme est l’association d’un pronostic favorable à un taux élevé de lymphocytes infiltrant les tumeurs. De plus, une prédisposition aux leucémies, lymphomes et cancers viraux est liée à la présence d’immunodéficiences congénitales ou acquises. 67 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale Par contraste, la transplantation allogénique de cellules T et NK, utilisée à des fins thérapeutiques, permet un contrôle immunologique de la tumeur par le biais d’un effet greffon versus leucémie ou greffon versus tumeur. Enfin et conformément à la théorie originelle de Burnet, il est maintenant avéré que les cellules tumorales expriment de façon qualitative ou quantitative des antigènes tumoraux permettant l’élaboration d’une réponse immunitaire spécifique et durable (grâce à la composante cellulaire mémoire) (166). 1.2 Théorie de régulation extrinsèque des tumeurs Très récemment, l’étude plus approfondie des dialogues cellules tumorales/cellules immunitaires et le constat de l’inhérente tolérance immunologique au sein des tumeurs ont introduit de nouvelles notions de l’immunité oncologique : l’immunosélection des tumeurs qui peut être décomposée en deux phénomènes : l’ « immunoediting » et l’immunosubversion. Ce modèle de progression tumorale dépendant de facteurs extrinsèques, contrastant avec la thèse traditionnelle de facteurs exclusivement intrinsèques d’oncogenèse, propose un processus multi-étapes : La phase d’élimination (immunosurveillance), où les fonctions immunitaires agissent comme suppresseur de tumeur extrinsèque. La phase d’équilibre, où l’expansion du clone tumoral est contrôlée par l’immunité. La phase d’échappement, qui permet à la tumeur d’esquiver les réponses immunitaires et de s’amplifier de façon incontrôlée. La dernière étape d’échappement ou « immune escape » requiert la sélection d’un variant non-immunogénique (« immunoediting ») et/ou la suppression active de toutes réponses immunitaires (immunosubversion). Ces mécanismes de sélection se font au moment de l’échappement après une étape d’équilibre où le système immunitaire exerce une pression de sélection sur le clone tumoral et façonne l’immunogénicité de celui-ci (165). Quantité de données expérimentales existe en ce qui concerne les étapes d’élimination ou d’échappement. 68 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale Concernant cette dernière étape, l’argument scientifique appuyant cette thèse repose sur l’observation du haut degré d’immunogénicité des tumeurs issues de souris immunodéprimées qui s’oppose à la faible immunogénicité de tumeurs issues de souris immunocompétentes. Les données expérimentales concernant la phase d’équilibre, où phase invisible, sont de façon justifiée plus limitées. Récemment, une étude élégante a apporté la preuve expérimentale de l’existence de cette phase d’équilibre. Dans un modèle murin de tumeur induite par agent chimique, la dormance du clone tumoral est majoritairement assurée par les cellules T, et l’inhibition ciblée de ces fonctions immunitaires permet le développement de tumeur cliniquement apparente (167). Bien que l’ensemble de ces théories soit encore l’objet de débats et se situe en marge des théories classiques de progression tumorale, il a été récemment proposé que « l’immunoescape » constitue la septième « hallmark » du cancer (165). Schéma 24 : Schéma récapitulatif de la théorie de régulation extrinsèque des tumeurs D’après Zitvogel et al., Nature Reviews Immunology 6, 715-727 (October 2006) 69 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale Schéma 25 : Illustration des étapes d’immunosurveillance, d’équilibre et d’échappement D’après Dunn et al. Nature Reviews Immunology 6, 836–848 (November 2006) 70 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale 1.3 Mécanismes généraux d’ « immunoediting » et d’immunosubversion Les stratégies d’ « immunoediting » spécifiques d’un acteur de la surveillance immunitaire interviennent pendant les étapes de reconnaissance immunitaire des cellules tumorales. De façon générale, les mécanismes, mis en place par les cellules tumorales et agissant de façon « universelle » dans l’échappement immunitaire, touchent les phases de cytotoxicité post-reconnaissance ou font appel à des phénomènes d’immunosubversion généraux. Les cellules tumorales sont capables d’inhiber les voies de mort mises en œuvre par les cellules T cytotoxiques (CTL) et NK. En effet, la surexpression de PI9 (un inhibiteur de granzyme B-perforine) et de FLIP (un inhibiteur de la caspase 8), la mutation ou la sousexpression des récepteurs de mort et de la caspase 8 sont des mécanismes qui permettent d’échapper à la lyse induite par les cellules immunitaires. En parallèle, l’immunosubversion intervient généralement par la sécrétion de facteurs solubles (Indoleamin 2,3 Dioxygenase (IDO), CD95L, Tumor growth Factor- β (TGF-β), Prostaglandin E-2 (PGE2)) inhibant les fonctions anti-tumorales de nombreux acteurs de la surveillance immunitaire (165, 168). De plus, dans un microenvironnement « coopérant », les tumeurs favorisent le recrutement des composants de l’immunité supportant la progression de l’oncogenèse (macrophages alternatifs, cellules T régulatrices) au détriment des effecteurs anti-tumoraux (168). Ce microenvironnement pro-tumoral, recruté via un spectre d’expression préférentiel de chimiokines chimioattractives, est pourvu de cellules (T regulateur (Treg), CSM) ayant le potentiel d’inhiber les acteurs majeurs de l’immunité anti-tumorale en faveur de la protection du clone tumoral (168). 1.4 L’immunosurveillance dans la LLC-B Le défaut de fonctionnement du système immunitaire est une caractéristique de la LLC-B qui se manifeste au niveau clinique par la survenue d’infections (37). De manière générale, les cellules de LLC-B sécrètent de forts niveaux de molécules immunosuppressives telles que le TGF-β, l’IL-10 et l’IL-6 (169-171). De plus, l’interaction des cellules leucémiques avec les composants de l’immunité est sévèrement affectée par le défaut d’expression de molécules d’adhésions et de signaux co-stimulatifs (172). 71 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale Les modalités d’interactions des cellules LLC-B avec chacun des composants cytotoxiques de l’immunité importants dans la surveillance anti-tumorale seront abordées de façon détaillée dans les paragraphes §2.1.3, §2.2.1.2 et §2.2.2.5. 1.5 Généralités sur l’implication thérapeutique du concept d’immunosurveillance L’ensemble de ces considérations sur le rôle déterminant de la fonction immunitaire dans la progression tumorale implique un nouveau niveau de réflexion sur les stratégies thérapeutiques à adopter. En effet, la majorité des thérapies anticancéreuses contenant des agents chimiothérapeutiques sont fortement délétères pour l’ensemble du système immunitaire et entraînent une profonde immunosuppression (responsable dans certains cas de l’apparition de cancers secondaires). Il apparaît possible que l’immunosuppression induite par les traitements chimiothérapeutiques soit délétère en compromettant la surveillance immunitaire et favorisant l’échappement immunitaire des cellules tumorales persistantes postchimiothérapie (173). Malgré leur effet majoritairement immunosuppresseur, certaines thérapies conventionelles permettent (165) : de reverser les phénomènes d’immunosubversion (faible dose de cyclosporine : suppression des Treg en faveur de l’expansion tumorale), et de ce fait, rétablit les fonctions NK et CTL suppressives de tumeurs, d’inhiber les mécanismes d’ « immunoediting » (irradiation, anthracycline : restauration de l’immunogénicité des tumeurs), d’activer les fonctions effectrices du système immunitaire (imatinib mesatylate, activation des cellules NK). Enfin, l’immunothérapie anti-cancéreuse apparaît comme une alternative thérapeutique prometteuse car spécifique et durable par la mémoire immunologique et la génération constante de cellules effectrices. 72 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale Schéma 26 : Implications thérapeutiques du concept d’immunosurveillance D’après Zitvogel et al., Journal of Clinical Investigation 118 (6), 2008 2. Le réseau d’immunosurveillance des tumeurs 2.1 L’immunité acquise L’immunité acquise est une composante essentielle du système immunitaire qui se façonne au gré des rencontres antigéniques de la vie d’un individu. Cette branche de l’immunité présente les caractéristiques suivantes : spécificité antigénique, diversité, mémoire immunitaire et reconnaissance du Soi et du non-Soi. On distingue deux types de réponse immunitaire : à médiation humorale (via les lymphocytes B) et à médiation cellulaire (via les lymphocytes T pourvu d’un récepteur comprenant les chaînes α et β). Il existe une coopération indispensable à de multiples niveaux entre immunité naturelle et acquise. Brièvement, après une phase d’éducation antigénique, l’action cytotoxique des cellules B réside dans leur différenciation en cellules plasmocytaires capables de sécréter des anticorps solubles qui, lors de leur fixation à leur cible antigénique, entraîne la lyse de celle-ci via différents processus tels que la phagocytose, l’ADCC, et la CDC. 73 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale Schéma 27 : Réponse anti-tumorale à médiation humorale D’après Zitvogel et al., Nature Reviews Immunology 6, 715-727 (October 2006) Les lymphocytes Tαβ sont divisés en deux sous-types majoritaires : les cellules T auxiliaires (CD4+) et les cellules T cytotoxiques (CD8+). L’activation des cellules T se fait par la reconnaissance de leur antigène spécifique en conjonction avec le complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de classe I (pour les cellules CD8+) et II (pour les cellules CD4+) au niveau de leur TCR. Cette étape de reconnaissance s’effectue grâce aux cellules présentatrices d’antigènes (CPA). L’activation des cellules T auxiliaires conduit à la sécrétion de cytokines coordonnant les réponses immunitaires innées, humorales et cytotoxiques T. Après reconnaissance de l’antigène, les cellules T CD8+ se différencient en CTL et détruisent les cellules présentant leur antigène spécifique par des mécanismes lytiques dépendant des systèmes perforine/granzyme B (174). Cytokine production Schéma 28 : Réponse anti-tumorale à médiation cellulaire Modifié d’après Zitvogel et al., Nature Reviews Immunology 6, 715-727 (October 2006) 74 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale 2.1.1 Preuves scientifiques de l’immunosurveillance acquise La preuve la plus solide de l’implication des lymphocytes dans la surveillance immunitaire des tumeurs provient des modèles murins délétés pour le gène codant pour rag2 (recombination activating gene 2). Les mutants homozygotes pour rag2 sont viables mais sont incapables d’effectuer la recombinaison VDJ, à l’origine de la diversité et de la spécificité du répertoire de l’immunité acquise. En conséquence, ces modèles murins ne peuvent produire des cellules B et T matures. Ces souris développent, à une fréquence plus élevée et de façon plus précoce que leurs homologues non-délétés, des tumeurs induites chimiquement (175). De la même façon, les souris délétées pour le gène codant la chaîne β du TCR, présentent un haut degré de susceptibilité aux développements de tumeurs xénogreffées ou induites par agents chimiques (175). Très récemment, la dormance tumorale induite pendant la phase d’équilibre apparaît clairement dépendante des cellules T puisque l’inhibition des cellules CD4+ et CD8+ entraîne le développement de tumeurs cliniquement apparentes (167). A l’échelle du patient, de nombreuses données cliniques démontrent la valeur pronostique bénéfique des cellules T CD8+ infiltrants les tumeurs. De fait, la présence de cellules CD8+ à des sites intra-tumoraux est un marqueur pronostique indépendant, pour le cancer du colon, le cancer de l’œsophage, le cancer du sein, le cancer des ovaires, et les mélanomes malins (175). Enfin, la découverte d’antigènes tumoraux, initiée par Thierry Boon en 1991, est la démonstration de la nature antigénique des tumeurs et de leur capacité à engendrer des réponses immunitaires spécifiques (176). De nos jours, une pléiade d’antigènes tumoraux a été identifiée et constitue des cibles prometteuses pour des stratégies de vaccination anti-cancéreuses. Bien qu’une des méthodes d’identification des antigènes tumoraux repose sur un criblage des spécificités antigéniques des anticorps présents dans le sérum de patients atteints de cancers, il existe peu de preuves scientifiques démontrant l’existence d’une surveillance immunitaire à médiation humorale (177). 2.1.2 « Immunoediting » spécifique des cellules T Durant les phases d’échappement aux réactions immunitaires acquises, les tumeurs mettent en place un processus de sélection de variants non-immunogéniques. 75 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale En ce qui concerne la phase de reconnaissance, on compte entre autres, parmi les différentes stratégies d’ « immunoediting » qui affectent la fonction CTL, l’extinction de l’expression du HLA de classe 1, la sous-régulation de l’expression des antigènes tumoraux et de leur machinerie de « processing » et d’adressage à la membrane, l’altération de l’expression des molécules d’adhésion et le masquage des antigènes tumoraux par la mucine (165, 178). Schéma 29 : Illustration des stratégies d’ « immunoediting » spécifique de la réponse antitumorale T D’après Zitvogel et al., Nature Reviews Immunology 6, 715-727 (October 2006) 2.1.3 Interactions entre cellules T et cellules de LLC-B Dans la LLC-B, il existe une expansion anormale du compartiment lymphocytaire T CD8+, suggérant l’existence d’une réponse immunitaire spécifique envers les cellules leucémiques (179). En faveur de cet argument, l’existence de populations T oligoclonales spécifiques de la population leucémique autologue a été mise en évidence (180). Cette population T reste cependant fonctionnellement déficiente comparée à des populations T normales : elle prolifère peu sous stimulus mitogène et présente une altération d’expression de molécules de surface (Lymphocyte Function-associated Antigen 1 (LFA-1), Inter-Cellular Adhesion Molecule 1 (ICAM-1), CD28, CD25…), du profil cytokinique (IL-2) et une augmentation de molécules inhibitrices de la signalisation cytotoxique (Killer cell Ig- like Receptor (KIRs) et CD94) (179, 181). Plus précisément, l’analyse de la signature transcriptomique de ces cellules révèle un défaut de formation du cytosquelette, du transport des vésicules et de la cytotoxicité (182). 76 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale De plus, les cellules de LLC-B surexpriment le CD200, molécule immunosuppressive qui induit, dans des modèles animaux, l’incapacité des cellules T à contrôler le développement tumoral (183). 2.2 Immunité innée ou naturelle anti-tumorale L’immunité innée constitue la première barrière aux agents pathogènes. L’immunité innée anti-tumorale compte trois acteurs principaux : les cellules dendritiques, les cellules NK et les cellules Tγδ. Les cellules NK et Tγδ sont à la frontière entre immunité innée et adaptative et représentent les armes cytotoxiques de la branche naturelle de l’immunité. Les cellules dendritiques ont une action principalement de CPA et par cette fonction initient, dans des contextes de cancer, les réponses immunitaires spécifiques à médiation cellulaire. Ce sont également des cellules sécrétrices de cytokines et présentatrices de signaux co-stimulateurs qui permettent d’amplifier et de coordonner les réponses CTL et NK anti-tumorales. Compte tenu de leur potentiel cytotoxique, seules les cellules Tγδ et NK seront abordées dans les prochains paragraphes. 2.2.1 Les cellules Tγδ Récemment identifiées et en marge des cellules Tαβ, les cellules Tγδ correspondent à une fraction mineure de la population T, présentant un TCR hétérodimérique composé de deux chaînes γ et δ, générées par recombinaisons somatiques au niveau des segments VDJ. La diversité combinatoire limitée du répertoire Tγδ confère à ces lymphocytes T une reconnaissance antigénique restreinte, qui les place à la frontière entre immunité innée et acquise (184). Dans le sang périphérique des individus sains, la population Tγδ représente 1 à 10% des cellules T circulantes. Dans d’autres sites anatomiques tels que l’épithélium du petit intestin, la peau, l’œsophage, les poumons ou encore la trachée, les cellules Tγδ sont représentées de façon plus abondante. Deux sous-groupes majoritaires de lymphocytes Tγδ ont été décrits : l’un exprimant les régions variables du TCR Vγ9 et Vδ2, composant la majorité de la fraction Tγδ circulante (50-95%) et étant impliqué dans la surveillance immunitaire des cancers hématologiques. 77 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale l’autre, Vδ1, marquant une population résidente des tissus épithéliaux et fournissant une défense anti-tumorale et anti-pathogène au niveau de ces sites (185, 186). En faveur de la thèse d’une constante activation in vivo, les cellules Tγδ circulantes expriment des marqueurs de cellules T mémoires et peuvent être divisées en différentes souspopulations basées sur l’expression du CD16 (FcγRIII), du CD27 et du CD45RA. De façon fonctionnelle, les cellules Tγδ utilisent des mécanismes de lyse semblables aux cellules Tαβ tels que les systèmes perforine/granzyme et les récepteurs/ligands de mort (Fas/FasL). Les cellules Tγδ sécrètent une variété de chimiokines pro-inflammatoires (MIP, RANTES) et de cytokines (interferon γ, TNFα) et prolifèrent sous l’action de l’IL-2. Très récemment, une fonction de CPA a été attribuée aux cellules Tγδ, démontrant un nouveau rôle de ces cellules dans l’initiation de l’immunité Tαβ (185, 186). Schéma 30 : Distribution et rôle des différents sous-groupes de cellules Tγδ D’après Ferrarini et al., Trends in Immunology 23 (1), 14-18 January 2002 78 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale La reconnaissance antigénique des cellules Tγδ est unique. Indépendamment du CMH et des CPA, les cellules Tγδ reconnaissent des antigènes non-conventionnels de faible poids moléculaire, de nature lipidique ou correspondant à des métabolites microbiens nonpeptidiques phosphorylées, regroupés sous la dénomination commune de phosphoantigènes. Plus précisément, il est clairement établi que les TVγ2δ9 reconnaissent de façon dépendante du TCR des intermédiaires phosphorylés de la voie de biosynthèse de l’isoprenoïde. Cette voie de synthèse semble être amplifiée dans des cas de cancers et peut être modulée par administration d’aminobiphosphates (185, 186). Schéma 31 : Surveillance immunitaire menée par les cellules Tγδ Modifié d’après Zitvogel et al., Nature Reviews Immunology 6, 715-727 (October 2006) En plus de cette liaison atypique du TCR, l’activation des cellules Tγδ est subtilement modulée par un panel de récepteurs activateurs (NKG2D) ou inhibiteurs (KIR) communs aux cellules NK. En ce qui concerne les signaux activateurs, les ligands du NKG2D, MICA/B (MHC class I related proteins A et B), ULBP1 à 4 et RAET1G (UL16-binding protein family), sont induits dans des contextes de stress génotoxiques et dépendant des protéines « heat shock ». Ces ligands marquent la surface de cellules épithéliales ainsi que d’une large diversité de tumeurs (187). De plus et toujours par analogie avec les cellules NK, l’expression du CD16 par les cellules Tγδ confère à ces cellules une fonction effectrice de l’ADCC en présence d’anticorps. 79 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale Schéma 32 : Récepteurs des cellules Tγδ D’après Rey et al., Trends in Molecular Medecine 15 (6), 275-284 2.2.1.1 Preuve de l’immunosurveillance des Tγδ La démonstration la plus évidente du rôle des cellules Tγδ dans la surveillance anti- tumorale réside dans les modèles délétés de la chaîne γ du TCR. Ces animaux TCR-γ -/- , injectés avec des cellules d’une lignée de carcinome ou des carcinogènes chimiques (MCA, TPA, DMBA), ont une sensibilité accrue au développement de tumeurs en comparaison avec les souris sauvages. Il apparaît clairement que les cellules Tγδ ont un rôle unique dans le contrôle immunologique des tumeurs puisque dans ces modèles murins dépourvus de cellules Tγδ, les cellules Tαβ et NK ne compensent pas, en termes de formation de tumeur, l’absence de cellules Tγδ (175). Les données cliniques, qui tendent à consolider les expériences murines, démontrent que la stimulation in vivo des cellules Tγδ induit un effet anti-lymphome (188). 80 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale De façon corrélative, il apparaît que les patients atteints de LAM ne montrant pas de maladie résiduelle après transplantation allogénique de moelle osseuse présentent un taux de cellules Tγδ particulièrement élevé (189). 2.2.1.2 « Immunoediting » et interactions avec les cellules de LLC-B Etant donné la quantité de similitude entre cellules Tγδ et cellules NK dans la reconnaissance des cellules tumorales, les stratégies d’immuno-échappement mises en place par les tumeurs spécifiques de ces couples ligands/récepteurs seront abordées dans le paragraphe NK, qui compte une littérature plus abondante en la matière. Néanmoins, de façon très intéressante, un des seuls exemples spécifiques d’immunoéchappement Tγδ est fourni par la LLC-B. En effet, il apparaît que la stimulation par aminobisphophate ne soit efficace en termes d’expansion Tγδ que sur une fraction de patients. Les patients non-répondeurs présentent d’une part un pronostic péjoratif (Ig-NM) et d’autre part un profil phénotypique spécifique de leur compartiment Tγδ. Ces résultats suggèrent l’existence d’un mécanisme atypique d’immunosubversion induisant la différenciation et l’inhibition des cellules Tγδ (190). De plus, une proportion non-négligeable de patients LLCB présente un taux élevé de lymphocytes Vδ1 circulants qui représentent majoritairement, chez les sujets sains, une population résidente des tissus. Ces lymphocytes Vδ1 sont capables dans des systèmes de lyse autologue d’induire la mort des cellules leucémiques de façon dépendante de NKG2D. Le suivi clinique de ces patients démontre l’absence de progression tumorale pour les patients présentant initialement une proportion élevée de lymphocyte Vδ1 (191). Enfin, la stimulation des cellules TVγ9δ2 de patients LLC-B par phosphoantigène démontre, dans des système autologues, une augmentation de la lyse des cellules leucémiques de LLC-B en présence de Rituximab (192). 2.2.2 Les cellules NK La première description des cellules NK s’est faite, en 1975, sur la base fonctionnelle de la capacité de ces cellules à lyser de manière spontanée certaines cellules tumorales in vitro. Les cellules NK représentent une classe unique de lymphocytes, distincts des cellules T et B, qui participent à la protection anti-pathogènes et à la surveillance anti-tumorale (193). 81 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale La définition phénotypique des cellules NK humaines repose sur la négativité du CD3 conjointe à la positivité du marqueur CD56. On distingue cependant deux sous-groupes de cellules NK : CD56bright CD16dim, pourvues de propriétés immunorégulatrices conférées par une activité productrice de cytokines (Interferon-γ (IFN-γ), Tumor Necrosis Factor (TNF) et Granulocyte Macrophage Colony Stimulating Factor (GMCSF)). Cette population représente 10% des cellules NK circulantes et pratiquement 100% des cellules NK résidentes au niveau des tissus lymphoïdes secondaires à proximité des composants de l’immunité, tels que les cellules T et les CPA sur lesquelles elles exercent leurs fonctions immunorégulatrices. CD56dim CD16bright, pourvues d’une forte activité cytotoxique, qui représentent la quasi-totalité des cellules NK circulantes (194). Certaines études suggèrent que ces deux sous-classes de cellules NK correspondraient à deux niveaux de différenciation distincts du développement NK, avec une progression du phénotype CD56bright vers le phénotype « mature » CD56dim (194). L’activité cytotoxique des cellules NK s’effectue de façon semblable aux cellules T par l’exocytose de granules lytiques contenant un cocktail de perforine, de granulysin et de membres de la famille granzymes. Alternativement, les cellules NK expriment et sécrètent des molécules, telles que TRAIL et FasL, engageant les récepteurs de mort à la surface des cellules cibles et induisant l’apoptose de celles-ci (193). Il existe tout un panel de cytokines (IL-2, IL-12, IL-15, IL-18, IL-21, IL-23 et IFNαβ) pouvant activer, de façon indépendante de la reconnaissance immunologique, la prolifération et les fonctions cytotoxiques et immunorégulatrices des cellules NK. Enfin, des rapports relativement récents pointent de façon élégante l’ambiguïté de la fonction NK qui apparaît spécifique et pourvue d’une forme de mémoire, dans des modèles murins exempts de cellules T et soumis à une exposition d’haptens (195). 82 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale 2.2.2.1 Cytotoxicité La caractérisation récente des récepteurs activateurs et inhibiteurs des cellules NK, codés de façon germinale, a mené à la découverte de la complexité des mécanismes moléculaires gouvernant la reconnaissance NK des cellules tumorales. L’émergence de ces connaissances se sont initiés avec l’établissement du concept unique de reconnaissance des cellules NK : « missing-self recognition ». En effet, dans ces articles pionniers, la perte d’expression des molécules du CMH de classe I par des cellules tumorales entraîne une cytotoxicité NK à l’encontre de celles-ci (196-198). Ce profil de reconnaissance jusqu’alors unique a mené à l’identification des récepteurs inhibiteurs que sont les KIRs et NKG2A/CD94. Les KIRs sont extrêmement polymorphes et leur spectre d’expression au niveau clonal est très varié. Cette diversité permet de créer pour chaque individu une population hétérogène de cellules NK. Les KIRs reconnaissent HLA-A, HLA-B et HLA-C et CD94-NKG2A est spécifique de HLA-E. La caractéristique commune de ces récepteurs inhibiteurs est qu’ils sont pourvus d’une séquence ITIM (immunoreceptor tyrosine inhibitory motif) au niveau de leur extrémité cytoplasmique. La phophorylation de ces motifs induit le recrutement et l’activation des phosphatases SHP-1 et SHP-2 qui empêche l’activation NK. Parmi la variété de récepteurs inhibiteurs présents à la surface des cellules NK et listés sur le schéma 35, le récepteur inhibiteur KLGR1 se fixe spécifiquement à la E-cadhérine, dont l’absence marque l’initiation de la migration des cellules tumorales vers des sites métastatiques. Il est possible que la spécificité de ce récepteur confère aux cellules NK la capacité de contrôler l’émergence de métastases (199) Schéma 33 : Le principe de reconnaissance « Missing-self » D’après Ljunggren et al., Nature Reviews Immunology 7, 329-339 May 2007 83 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale En ce qui concerne la composante moléculaire activatrice, le récepteur le plus étudié reste NKG2D (CD314) qui appartient à la famille des lectines de type C. Ce récepteur homodimérique est également présent sur les cellules Tαβ et Tγδ. Au niveau moléculaire, NKG2D s’associe avec la protéine adaptatrice DAP10 et permet la transduction d’une cascade de signalisation spécifique. L’impact de l’engagement unique (récepteur primaire) de ce récepteur sur l’induction d’une réponse cytotoxique reste encore controversé (199, 200). Cependant, l’intégration des signaux positifs du NKG2D induit une cytotoxicité dans des contextes d’expression normale du HLA-ABC, suggérant une potentielle prévalence de cette signalisation activatrice (199). Les ligands de NKG2D sont multiples et comprennent les molécules du CMH non-classiques (MICA et MICB) et les protéines de la famille des « UL16 binding proteins » (ULBP1 à 4 et RAET1G). Les ligands de NKG2D marquent la surface de cellules ayant subit un stress génotoxique, oxidatif ou encore dépendant des protéines « heat shock ». De fait, dans des contextes tumoraux, la présence constante d’atteintes génotoxiques et l’activation perpétuelle des réponses de dommage à l’ADN dans la progression du cancer (due à la prolifération anarchique) est potentiellement une des raisons pour laquelle certaines tumeurs expriment ces ligands (200). Schéma 34 : Le principe de reconnaissance « Induced-self » D’après Gasser and Raulet, Cancer Research 66 (8), 3959-62 April 2006 84 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale D’autres récepteurs activateurs sont connus aujourd’hui tels que NKp44, NKp30, NKp46, CD16, CD244 (199). En plus de ces récepteurs spécifiques au signal cytotoxique NK, les molécules intervenant dans la synapse immunologique telles que les molécules d’adhésion joue un rôle primordial dans le contact cellulaire effecteurs/cibles. La liste exhaustive de ces récepteurs est donnée sur le schéma 35. Schéma 35 : Récepteurs des cellules NK D’après Rey et al., Trends in Molecular Medecine 15 (6), 275-284 Même si le degré de coopération et de hiérarchie qui s’opère entre ces récepteurs n’est pas complètement élucidé, il est clairement établi que c’est la balance entre signaux activateurs (induced-self) et inhibiteurs (missing-self) qui détermine l’engagement d’une réponse biologique. 85 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale 2.2.2.2 ADCC L’expression du CD16 (également connu sous le nom de FcγRIIIa), qui se lie au fragment Fc des IgG, confère aux cellules NK la capacité d’être des effecteurs privilégiés de l’ADCC. L’expression du CD16 n’est pas restreinte aux seules cellules NK, puisque certains macrophages, cellules Tαβ et Tγδ expriment ce récepteur. La complexité de la biologie d’activation des cellules NK, manifestée par la variété de signaux inhibiteurs et activateurs de la cytotoxicité, semble être secondaire dans les phénomènes d’ADCC. En effet, la cytotoxicité induite par l’engagement du CD16 est activement dépendante de la liaison de LFA-1 à ICAM1. Cette dépendance aux signaux induit par LFA-1 est fondée sur les données obtenues à partir d’individus LFA-1 déficients et d’expériences utilisant des anticorps anti-LFA-1 bloquants (199). Cependant, il apparaît dans des expériences utilisant des anticorps activateurs, que le CD16 est le seul récepteur NK dont l’engagement unique permet d’induire une réponse biologique cytotoxique (199). En ce qui concerne l’implication des ligands de NKG2D et des molécules de MHC classe I, les données majoritairement corrélatives et rarement fonctionnelles ne permettent pas d’établir la fonction de ces signalisations de la cytotoxicité naturelle dans la régulation du signal ADCC (201). En comparaison avec la cytotoxicité naturelle, la signalisation induite par le CD16 génère un effet cytotoxique puissant qui augmente significativement le pourcentage et la fréquence de cellules lysées (202). Schéma 36 : Le phénomène d’ADCC D’après Wayne et al., Nature Reviews Immunology 3, 304-316 (April 2003) 86 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale 2.2.2.3 Preuve de l’immunosurveillance anti-tumorale NK La déplétion in vivo de cellules NK, (par anticorps NK1.1 ciblant les cellules NK et NKT murines) dans des modèles murins sauvages et mutés (dépourvus de cellule NKT) inoculés avec des cellules tumorales, démontre le rôle clé des cellules NK dans le contrôle de l’initiation tumorale et de l’apparition de métastases (203). De plus, les cellules NK présentent un potentiel thérapeutique en clinique notamment dans l’effet greffon versus leucémie ou greffon versus tumeurs recherché par les transplantations allogéniques dans des contextes de « HLA mismatch ». Enfin, le rôle positif des cellules NK dans la surveillance immunitaire est également démontré dans la LAM, par la corrélation qui existe entre l’activité NK et la survie sans rechutes (190). 2.2.2.4 « Immunoediting » spécifique NK En relation directe avec les modalités d’activation des cellules NK, les exemples d’échappement immunitaire NK les plus documentés dans la littérature concernent l’axe NKG2D. L’expression des ligands de NKG2D est fortement dérégulée dans de nombreux types de cancers et notamment dans les stades agressifs de LAM (190). Par contraste, l’expression du récepteur NKG2D est sous-régulée à la surface des cellules NK de la LMC, résultant potentiellement du fort niveau d’expression et de sécrétion de MICA et MICB qui caractérise ces cellules leucémiques (190). En effet, l’exposition chronique du récepteur NKG2D à ses ligands provoque une diminution de la cytotoxicité NK (165). De même, la présence de ligands de NKG2D solubles dans de nombreux cancers (LAM, LMC, LLC-B,….) induite par une dégradation protéolytique assurée par les MMPs, entraîne une internalisation et une dégradation du récepteur NKG2D par les voies lysosomales. Toujours en faveur de la progression tumorale, la présence de ligands solubles du NKG2D induit également l’expansion de cellules NKG2D+CD4+ immunosuppressives (204). Liant immunosubversion et « immunoediting », la sécrétion de la protéine immunosuppressive TGF-β par les cellules tumorales entraîne la diminution conjointe du récepteur NKG2D et de ses ligands à la surface des cellules (200). En ce qui concerne l’axe du HLA/KIR, il est démontré, dans le Myélome Multiple, que l’expression du HLA augmente en parallèle de la progression tumorale (190). 87 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale De même, l’altération de l’expression du HLA est un phénomène peu observé dans les hémopathies malignes, témoignant potentiellement de la faible menace que représente l’immunité T (181). L’expression de HLA-G par les cellules tumorales, engendrant une signalisation négative sur la cytotoxicité NK, est une stratégie d’immuno-échappement additionnelle qui existe dans certains types de cancer (205). En marge des mécanismes dépendant du NKG2D, certaines hémopathies malignes (LAM) démontrent un défaut de l’activation NK, attestée par la sous-expression des récepteurs NKp30 et NKp46, et suggérant la présence de mécanismes d’ « immunoediting » et d’immunosubversion sous-jacents (190). Dans la LMC, l’expression de Bcr-Abl par les cellules NK augmente l’expression des KIRs et influe ainsi sur le seuil d’activation de ces cellules NK (181). HLA-G Schéma 37 : « Immunoediting » permettant d’échapper à la surveillance anti-tumorale NK Modifié d’après Zwirner et al., Cytokine & Growth factor Review, 2007 88 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale 2.2.2.5 NK « immunoediting » et interactions avec les cellules de LLC-B La LLC-B est un parfait modèle récapitulatif de l’ensemble des mécanismes qui rendent les cellules cancéreuses invisibles aux cellules NK. L’importance de la surveillance NK dans la progression leucémique est démontrée par la valeur prédictive du ratio NK : MBC (malignant monoclonal B-cell) sur l’évolution de la maladie (206). La LLC-B est très résistante à la lyse spontanée des effecteurs de l’immunité innée dans des tests de cytotoxicité menés in vitro (207, 208), dans un effet qui semble être dépendant de l’expression du HLA de classe I (208). Les cellules NK de patients LLC-B présentent une diminution de leur activité cytotoxique, en termes de production et de sécrétion de granules cytotoxiques, comparés à des cellules NK de donneurs sains (209, 210). De fait, il a été démontré que le surnageant de cultures primaires de LLC-B altérait fortement l’activité cytotoxique des cellules NK issues de donneurs sains. De plus, les cellules de LLC-B expriment des niveaux très faibles des ligands du NKG2D, mais cette faible expression semble être modulable par traitement à l’acide rétinoïque (191). Récemment, il a été démontré que les cellules de LLC-B sécrètent des formes solubles de MICA, MICB et ULBP2, et que le niveau de ces sécrétions corrèle avec la survie sans traitement. Dans cette étude, il apparaît que les niveaux d’ULBP2 soluble en parallèle d’autres facteurs pronostiques conventionnels apporte une valeur prédictive de la survie sans traitement (211). De même, l’expression de HLA-G, signal inhibiteur, permet la protection des cellules leucémiques à la lyse NK (211). 2.2.2.6 Impact de la chimiothérapie sur les cellules NK Etant donné l’implication fondamentale des cellules NK dans l’effet du Rituximab, troisième bras du « gold standard » du traitement de la LLC-B, il est important de considérer dans ce chapitre l’effet de la chimiothérapie sur la cytotoxicité NK. L’oncologie clinique conventionnelle prend rarement en compte l’impact délétère des traitements chimiothérapeutiques sur le système immunitaire. De plus, le degré d’immunosuppression induit par la chimiothérapie affecte significativement le risque de rechute (166). L’étude de l’évolution des populations immunitaires post-chimiothérapie démontre que les cellules NK sont les premières cellules à se reconstituer après chimiothérapie dans la LAM (166). 89 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale De la même façon, les cellules NK sont les premières cellules à émerger après transplantations autologues ou allogéniques de cellules souches dans la LAM. La lymphocytose NK post-transplantation apparaît même comme un élément prédictif de l’efficacité de l’effet greffon versus leucémie (166). Cependant, l’effet délétère des chimiothérapies peut s’avérer bénéfique, lorsque cellesci modulent le rapport effecteurs/cibles en faveur des cellules effectrices. De plus, certaines chimiothérapies permettent une immunomodulation de la fonction NK. A cette fin, une étude récente a permis de répertorier les composants chimiothérapeutiques ayant une action sur la cytotoxicité NK. Ces composés peuvent être inhibiteurs : Chlorambucil, MG-132, Docetaxel, Cladribine, Paclitaxel, Bortezomib, Gemcitabine et Vinblastine. D’autres composés n’affectent pas la cytotoxicité et apparaissent même pour certains activateurs : Bevacizumab, Bleomycin, Doxorubicin, Epirubicin, Vinorelbine, Carboplatin, Methotrexate, Ifosphamide, Etoposide, Hydroxyurée, Asparaginase, 5-Fluorouracil, 6-Mercaptopurine, Streptozocin et Cyclophosphamide (212). Concernant les modalités thérapeutiques de la LLC-B, seul le cyclophosphamide est présent dans cette étude et démontre un effet bénéfique sur la cytotoxicité NK. En revanche, les analogues de purines présents, qui représentent la classe d’agent chimiothérapeutique de la Fludarabine, sont délétères pour l’activité cytotoxique NK (Cladribine, Gemcitabine) (212). Cependant, il est démontré que la Fludarabine affecte peu la viabilité NK et active la cytotoxicité de ces cellules dans un contexte de LLC-B (213). Il est également démontré que de petites doses de Cyclophosphamide inhibent de façon sélective les Treg pro-tumoraux et restaurent les fonctions cytotoxiques des cellules NK et T (165). De même, l’imatinib mesylate, un inhibiteur de tyrosine kinase, active l’activité cytotoxique NK et cet impact sur la fonction NK, en termes de production d’IFN-γ, corrèle avec la survie de patients atteints de tumeurs gastro-intestinales (165, 214). L’action des taxanes dans le cancer du sein démontre une augmentation de la cytotoxicité NK comparée aux patients non-traités (215). En plus d’un effet direct sur la fonction immunitaire NK, certaines chimiothérapies contrecarrent les stratégies d’ « immunoediting » mises en place par les tumeurs en les rendant immunogéniques. En ce qui concerne la surveillance NK, cet effet s’est majoritairement illustré dans la littérature par une expression des ligands de NKG2D. Les agents genotoxiques (Radiations ionisantes, 5-Fluorouracil, Cisplatin et UVC) ainsi que l’action d’inhibiteurs de histone déacetylase et de topoisomérase engendrent la surexpression des molécules MICA et MICB et permettent la lyse NK (165, 166). 90 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale En effet, l’expression des ligands NKG2D est liée au niveau moléculaire à l’activation des voies de signalisation de dommage à l’ADN, dépendantes de ATM et Chk1 (216). En parallèle de la lyse par exocytose de granules, la mort engendrée par l’expression des ligands de mort par les cellules NK est également augmentée par certaines chimiothérapies, telles que la Mitomycine, 5-Fluorouracil, la Doxorubicine et le Cisplatine, qui induisent l’expression des récepteurs de mort (166). L’ensemble de ces données tende à démontrer le potentiel clé des cellules NK dans les réponses anti-tumorales post–chimiothérapie. 91 INTRODUCTION : Surveillance immunitaire anti-tumorale CONCLUSION La surveillance anti-tumorale joue un rôle clé dans le contrôle de l’apparition de cancers. Cependant, l’expansion tumorale est caractérisée par un échappement aux réponses immunitaires anti-tumorales qui témoigne d’un processus d’immunosélection des cellules cancéreuses. Cette immunosélection de variants tumoraux non-immunogéniques exerçant une immunosubversion de la surveillance immunitaire des cancers permet d’atteindre l’étape d’immuno-échappement essentielle au développement anarchique et exponentiel des tumeurs. L’ensemble de ces stratégies mises en place par les tumeurs peut être rompue par la chimiothérapie. Cependant, le point d’équilibre qui existe entre immunosuppression et restauration de l’immunocompétence reste un élément fondamental du bénéfice apporté par la chimiothérapie. 92 Objectifs de l’étude IV. Objectifs de l’étude La nouvelle vision de la LLC-B, basée sur l’activité proliférative d’une sous-population nichée au niveau des centres prolifératifs, permet aujourd’hui d’ébaucher de nouvelles théories sur l’hétérogénéité intra-clonale des cellules de LLC-B. Cependant, l’ensemble des processus qui conduise cette population à devenir réservoir de la maladie reste à définir. Plus spécifiquement se pose la question d’une spécificité intrinsèque de migration et de prolifération de ces cellules leucémiques ou d’une spécificité dictée par le microenvironnement spécifique de la LLC-B à ces sites anatomiques ? Au-delà de ces considérations fondamentales sur la maladie, l’évolution clinique des patients après traitements où la résurgence de la maladie apparaît inexorable révèle le besoin de cibler thérapeutiquement les cellules leucémiques chimiorésistantes et persistantes post-thérapies. A cette fin, les cellules immunitaires ont le potentiel de contrôler la maladie résiduelle après thérapie et ce, en dépit de l’inhérente immunodéficience qui caractérise la surveillance anti-tumorale de la LLC-B. En effet, des données scientifiques émergeantes démontrent que la chimiothérapie peut rétablir une surveillance immunitaire efficace en annihilant les mécanismes d’immunosélection mis en place par les tumeurs. Se pose alors la question de la première étude : La compétence du système immunitaire de la LLC-B est-elle restaurée par le traitement FCR et permet-elle un contrôle de la maladie résiduelle ? La réémergence quasi-constante des cellules leucémiques post-thérapie suggère d’autre part une nouvelle hétérogénéité, potentiellement hiérarchique, du clone leucémique en termes de chimiorésistance. L’immunophénotypage étant trop variable et restreint, la recherche de techniques alternatives d’identification des cellules souches et des cellules initiatrices de cancer a permis de développer des méthodes d’identification fonctionnelles de ces compartiments « immatures ». La chimiorésistance est une caractéristique intrinsèque des cellules souches qui peut être mise en évidence par l’efflux du Hoechst 33342 dépendant de l’activité d’ABCG2. De ce fait, se pose la question à l’origine de notre deuxième étude : Est-il possible de révéler une hétérogénéité cellulaire du potentiel chimiorésistant éventuellement hiérarchique dans la LLC-B en identifiant et caractérisant une population SP dans la LLC-B ? 93 RESULTATS & DISCUSSION RESULTATS ET DISCUSSION : La reconstitution immunitaire après traitement FCR dans la LLC-B : Perspectives d’immunomodulation NK post-thérapie RESULTATS ET DISCUSSION I. La reconstitution immunitaire après traitement FCR dans la LLC-B : Perspectives d’immunomodulation NK postthérapie. 1. Introduction Les protocoles thérapeutiques sont connus pour la profonde immunosuppression qu’ils entraînent. Cette dernière peut s’avérer fatale en cas d’infection opportuniste. Cette immunosuppression compromet également le bénéfice de l’impact de la chimiothérapie sur la masse tumorale, puisqu’elle annihile le contrôle immunitaire de la maladie résiduelle. Il est cependant clairement établi dans la LLC-B, qu’en l’absence de tous traitements, le système immunitaire est déficient (217) et présente un défaut des fonctions Tαβ et NK (37). Conformément à la théorie de régulation extrinsèque des tumeurs (165), ce constat supporte la thèse que la LLC-B pourrait être la résultante de l’expansion et de la sélection d’un clone non-immunogénique capable d’immunosubversion de l’immunité environnante (218). De plus, des données bibliographiques récentes tendent à nuancer l’impact des chimiothérapies sur la surveillance anti-tumorale et démontrent un effet bénéfique de celles-ci via l’inhibition de phénomène d’immunosubversion et d’ « immunoediting » (165). Dans ce contexte, se posa la question suivante : Quel est l’impact du gold standard thérapeutique de la LLC-B (FCR) sur l’immunité de patients atteints de LLC-B ? Cette étude tend à répondre à cette question au travers de quatre objectifs majeurs : Quantifier en parallèle de la maladie résiduelle leucémique, les populations immunitaires effectrices de la surveillance anti-tumorale NK, T CD8, T CD4, Tγδ, et monocytaire. Evaluer la cytotoxicité naturelle de PBL (Peripheral Blood Lymphocyte) post-thérapie. Evaluer les capacités ADCC de PBL post-thérapie. Déterminer de façon corrélative l’impact, en termes de proportion ou d’activité cytotoxique, des différentes populations immunitaires sur le contrôle de l’évolution de la maladie résiduelle. 94 RESULTATS ET DISCUSSION : La reconstitution immunitaire après traitement FCR dans la LLC-B : Perspectives d’immunomodulation NK post-thérapie 2. Article I. Gross E, Ysebaert L, Kühlein E, Blanc A, Corre J, Fournié JJ, Laurent G, And Quillet-Mary A. Immune recovery after fludarabine-cyclophosphamide-rituximab treatment in Bchronic lymphocytic leukemia: implication for maintenance immunotherapy. Leukemia. 2010 24(7):1310-6. 95 Leukemia (2010) 24, 1310–1316 & 2010 Macmillan Publishers Limited All rights reserved 0887-6924/10 www.nature.com/leu ORIGINAL ARTICLE Immune recovery after fludarabine–cyclophosphamide–rituximab treatment in B-chronic lymphocytic leukemia: implication for maintenance immunotherapy L Ysebaert1,2,3,6, E Gross1,2,6, E Kühlein4, A Blanc1,2, J Corre5, JJ Fournié1,2, G Laurent1,2,3 and A Quillet-Mary1,2 1 Inserm U563, Toulouse F-31300, France; 2Université Toulouse III Paul-Sabatier, Centre de Physiopathologie de Toulouse Purpan, Toulouse F-31300, France; 3CHU Toulouse, Hopital Purpan, Service d’Hématologie, Toulouse F-31300, France; 4CHU Toulouse, Hopital Rangueil, Laboratoire d’Immunologie, Toulouse F-31300, France and 5CHU Toulouse, Hopital Purpan, Laboratoire d’Hématologie, Toulouse F-31300, France Thirty B-cell chronic lymphocytic leukemia patients were treated with fludarabine–cyclophosphamide–rituximab (FCR) and immune cell counts (natural killer (NK) cells, CD4, CD8, Tcd and monocytes) were monitored from the end of treatment (EOT) up to 36 months (M36). Moreover, nonleukemic peripheral blood lymphocyte cytotoxicity (PBL/CTC) as well as rituximab (RTX)-dependent PBL/CTC was also measured at the initiation of therapy, EOT and M12. These parameters were correlated with post-FCR monitoring of the minimal residual disease (MRD) level in blood using a four-color flow cytometry technique. FCR induced a profound and sustained depletion of all T-cell populations, Tcd being the most affected, whereas NK cells were relatively preserved. Both basal and interleukin-2stimulated nonleukemic PBL/CTC against MEC-2, a CLL cell line, increased during the post-FCR period. There was no correlation between immune recovery parameters and MRD progression profile, except that patients with high post-FCR CD4 þ counts experienced rapid MRD progression. MRD at M12 predicts clinical relapse. The limited data show RTX-mediated LBL/CTC activity against autologous B-cell cells in individuals with o1% residual disease at M12, opening avenues for immunomodulation post-FCR with anti-CD20 antibodies. To conclude, our study suggests that MRD increase at M12 precedes disease evolution post-FCR, and should be assessed as a surrogate marker for proactive management of CLL relapse. Leukemia (2010) 24, 1310–1316; doi:10.1038/leu.2010.89; published online 13 May 2010 Keywords: FCR; MRD; immune recovery; NK; antibody-dependent cellular cytotoxicity; RTX Introduction Recent therapeutic successes in B-cell chronic lymphocytic leukemia (B-CLL) management were achieved by combinations of purine analogs, alkylating agents and monoclonal antibodies.1 In this regard, the fludarabine, cyclophosphamide, rituximab (FCR) schedule is now generally considered as one of the best first-line regimens, yielding a 95% overall response rate and 52% complete response (CR). Moreover, FCR induces a molecular response rate as high as 66%.2 However, FCR therapy results in a profound immunosuppression, mainly due to neutropenia during the treatment, but also related to severe and sustained B- and T-cell depletion over the 2-year posttreatment period. FCR-mediated immunosuppression is reflected by a significant rate of opportunistic infections, which occur Correspondence: Dr L Ysebaert, CHU Toulouse, Service d’Hématologie, Hopital Purpan, Toulouse F-31300, France. E-mail: [email protected] 6 These authors contributed equally to this work. Received 16 September 2009; revised 11 March 2010; accepted 30 March 2010; published online 13 May 2010 during the post-treatment period.1 It has also been proposed that immunosuppression could also contribute to the emergence of second malignancies, including leukemia and Richter’s syndrome, which has been observed in the setting of both B-CLL and Waldenström’s disease.3–5 Whether FCR therapy could affect some specific immune cell population and natural effector cell function is unknown. This question is still of interest based on two considerations. First, it is conceivable that host immune function may contribute to the control of the disease; for example, B-CLL relapse reflects escape to innate immunity through proper deficit in natural killer (NK) or Tgd cell function, which can be further worsened by treatment.6–8 Second, in the perspective of maintenance therapy with monoclonal antibodies,9 including rituximab (RTX), it is important to know whether antibody-dependent cellular cytotoxicity (ADCC) capacity of natural effector cells is preserved during the post-FCR period. For this reason, we have measured at different times immune cell counts (NK, CD4, CD8, Tgd), in vitro nonleukemic peripheral blood lymphocyte (PBL) cytotoxicity with or without interleukin (IL)-2, reflecting NK and lymphokine activated killer (LAK) function, respectively, as well as RTX-dependent PBL ADCC against autologous leukemic cells. Finally, these values were correlated with post-FCR monitoring of the minimal residual disease (MRD) level in blood used in this study as a parameter of disease control. Patients and methods Patients and treatment From December 2005 to December 2008, 30 patients with B-CLL referred to our University Hospital who received FCR as their frontline treatment were prospectively evaluated on informed consent (according to the local ethics board recommendations). Treatment initiation was based on the National Cancer Institute-International Workshop on Chronic Lymphocytic Leukemia (NCI-IWCLL) criteria, and associated fludarabine (40 mg/m2 at days 1–3, per os), cyclophosphamide (250 mg/m2 at days 1–3, per os) and RTX (375 mg/m2 at day 1 for course 1, and then 500 mg/m2 at day 1 for courses 2–6, intravenously). Response was assessed 3 months after the last FCR course, and patients were classified according to the NCI-IWCLL criteria, except for bone marrow biopsy (patients with clinical and biological evidence of CR are therefore considered as CR or nodular PR patients). Bone marrow cytological and phenotypical studies were only provided to PR patients, to stratify them as CRi (incomplete bone marrow recovery) or PRd (disease related), as described elsewhere.1,10 Immune cell recovery and MRD follow-up post-FCR L Ysebaert et al Immunological studies At different times following treatment completion (end of treatment, EOT), fresh whole blood was used for immune cell counts and immunophenotype profile. PBLs were stained with two combinations of monoclonal antibodies: CD3-FITC/CD8PE/CD45-PerCP/CD4-APC in trucount tubes and TCRVg9d2FITC/CD56-PE/CD3-PerCP-Cy5.5/CD16PE-Cy7/CD45-APC-H7, purchased from BD Biosciences (Becton-Dickinson France SAS, Le Pont de Claix, France), gated on CD45/SS, and acquired on a FACSCANTO II BD. The lymphocyte absolute counts were obtained directly with the CANTO software on the trucount tube. MRD flow cytometry MRD monitoring after FCR was made according to published international recommendations.11 MRD levels are given according to this consensus, as the percentage of positive cells among total leukocytes with the two four-color combinations proposed: CD43-FITCint/CD79b-PElo/CD5-PerCP-Cy5.5/CD19APC and CD81-FITClo/CD22-PElo/CD5-PerCP-Cy5.5/CD19-APC. Monoclonal antibodies were purchased from BD Biosciences.11,12 All MRD data were obtained from fresh blood samples using a FACSCalibur BD. Acquisition was stopped when all leukocytes in samples had been processed (a median of 115 000 events were analyzed). The sensitivity of this assay is one CLL cell among 104 leukocytes. These combinations allowed a distinct determination of B-CLL and normal B cells. Cell- and antibody-mediated cellular cytotoxicity The natural cytotoxicity and ADCC function of effector cells from CLL patients were tested using the classical chromium release assay. Briefly, PBL from CLL patients were stimulated or not with recombinant glycosylated IL-2 (10 ng/ml, a kind gift from Sanofi-Aventis, Toulouse, France) during 3 days in RPMI 10% fetal calf serum at 37 1C, 5% CO2 and used as effector cells. Target cells (MEC-2 or B cells from autologous patients, and frozen before treatment) were incubated in RPMI 1% fetal calf serum for 1 h at 37 1C with 51Cr (Sodium Chromate, Perkin Elmer, Courtaboeuf, France) (100 mCi for 106 cells). Cells were then washed and incubated or not with RTX (10 mg/ml) for 15 min at room temperature. Cells were washed again and plated at 104 cells per well in round-bottom 96-well plates. Increasing amounts of effector cells were added to triplicate wells as an NK/target ratio ranging from 0.1:1 to 2:1 depending on the patients. This ratio was calculated from the NK percentage obtained by flow cytometric analysis. Control wells contained only target cells (pre-coated or not with RTX) to measure spontaneous release or target cells with 0.1% Triton X-100 to measure maximal release. After centrifugation, plates were incubated for 4 h at 37 1C with 5% CO2. Then 50 ml were collected from each well and counted in a gamma counter. The percentage of specific lysis was calculated as follows: ((sample release–spontaneous release)/(maximal release–spontaneous release)) 100. Statistical methods Student’s t-test was used for comparison of independent samples, and Mann–Whitney U-test for comparison of nonparametric variables. All statistical tests were two-sided and used a P-value of 0.05 for statistical significance. Survival data were carried out using Statistica software (Statsoft, Tulsa, OK, USA) according to the Kaplan–Meier method, data being measured 12 1311 months after the completion of FCR treatment (to classify patients into MRD group A or B). Events relevant for the end point event-free survival were clinical progression, disease recurrence or death from any cause, transformation of any kind (one Richter’s syndrome, one secondary acute myeloid leukemia due to treatment). Data were analyzed as of September 2009. Results Patients and clinical follow-up Patient demographics are described in Table 1. FCR yielded CR þ nodPR rate as high as 80%, with 10% CRi and 10% PRd rate (no stable disease or progressive patient). Response rate was correlated with stage C but not with other clinical or biological parameters. At 3 months after the last FCR course (EOT), fourcolor flow cytometry peripheral blood MRD level o104 was obtained in 16 of 30 (53.3%) patients. During follow-up (ranging from 12 to 46 months with a median of 30 months), 8 disease progressions occurred (disease-free survival (DFS) for the entire cohort was 67% at 26 months). In all cases, increase in MRD 4102 was detected at 3–6 months before clinical relapse. On molecular progression, three patients died (one from Richter’s syndrome, two from severe sepsis), one needed re-treatment and four remained treatment-free (owing to Binet stage A disease, with discrete hyperlymphocytosis and palpable lymph nodes). Collectively, these results suggest that in the first year post-FCR, an MRD increase 41% of total leukocytes predicts clinical relapse. Table 1 Characteristics of 30 patients treated with FCR as a frontline regimen Characeristics n Percentage of patients Binet stage A B C Median age (years) Gender (M/F) Median leukocytosis per ml 2 19 9 30 30 30 6.7 63.3 30 57 (36–69) 70/30 84500 FISH Del13q alone/normal Del11q Tri12 17 8 2 63 30 7 IgVH MUT/UNMUT 20 40/60 CD38 420% 26 50/50 Response ORR CR+nod PR CRi PRd MRD o104 after FCR 30 24 3 3 30 100 80 10 10 53.3 Abbreviations: CR, complete response; CRi, incomplete bone marrow recovery; Del13q/11q, deletion 13q/11q; F, female; FCR, fludarabine– cyclophosphamide–rituximab; FISH, fluorescent in situ hybridization; IgVH, immunoglobulin variable heavy chain gene status (MUT, mutated; or UNMUT, unmutated); M, male; MRD, minimal residual disease; nod, nodular; ORR, overall response rate; PR, partial response; PRd, disease related; Tri12, trisomy 12. Leukemia Immune cell recovery and MRD follow-up post-FCR L Ysebaert et al 1312 MRD level (% of leucocytes) MRD group A (n=81) MRD group B (n=12) 100% 100% 10% 10% 1% 1% 0.1% 0.1% 0.01% 0.01% <0.01% <0.01% EOT M6 M12 M18 M24 EOT M6 M12 M18 MRD FU MRD Group B 50% 42% 55.5% 40% 50% p= A B C no del11q del11q MRD group A 50% 58% 44.5% 60% 50% MUT UNMUT 54.5% 50% 45.5% 50% ns 46% 58% 54% 42% ns 75% 25% 0.014 MRD group A Percent surviving Binet stage Log-rank p<0.01 FISH : IgVH MRD group B CD38 months M24 >20% <20% MRD <10-4 EOT ns ns Figure 1 Minimal residual disease (MRD) kinetics after completion of FCR therapy. (a) Groups A and B are defined at 1 year of follow-up as having MRD levels below (a) or above (b) 1% of total leukocytes (set up as a clinically relevant relapse value, represented by a black thick line), each curve depicting the MRD monitoring from one patient. The value o0.01% symbolizes the threshold of MRD detectability with our flow technique, and MRD-negative patients are therefore plotted at this value for graphic representation purposes. (b) Disease-free survival (DFS) postFCR according to MRD group. After 1 year of follow-up, MRD groups A and B have statistically different DFS by Kaplan–Meier analysis (log-rank Po0.01). (c) Correlation between MRD control and disease characteristics. MRD kinetics between EOT and M12 is only correlated with the quality of molecular response after FCR (MRD EOT o0.01%), not with baseline CLL risk factors. EOT: end of treatment; FCR: fludarabine, cyclophosphamide, rituximab; M6–24: months 6–24 post-FCR; MRD FU: minimal residual disease follow-up; P ¼ NS: not significant. Flow cytometry follow-up MRD was assessed every 6 months for at least 1 year after FCR completion. At 1 year, 30 of 30 patients were informative. From EOT, different MRD profiles were observed, but we chose to classify patients according to the MRD outcome after 1 year into two groups (Figure 1a). Group A patients had MRD levels below 1% of total leukocytes (n ¼ 18 of 30), and group B patients had progressive MRD levels 41% of total leukocytes (n ¼ 12 of 30) at 12-month (M12) evaluation. Interestingly, two patients in group A showed progressive decrease in MRD levels (without receiving any treatment). From M12, group B had significantly shorter DFS (18 months vs not reached in group A, log-rank Po0.01) (Figure 1b). Group A and group B showed no significant differences for Binet stage, del11q, IgVH mutational status and CD38 expression (data not shown). However, undetectable MRD at EOT evaluation was predictive of a favorable molecular outcome over the first year after treatment (P ¼ 0.014) (Figure 1c). These data indicate that patients with MRD levels remaining o1% of leukocytes did not experience clinical relapse, suggesting the occurrence of some immunomodulating events. Immune subset recovery after FCR NK, monocytes, T CD4/CD8 and Tgd lymphocyte counts reconstitution are presented in Figure 2a. FCR induced a sharp and prolonged decrease in values for all lymphoid subpopulations, compared with the pre-FCR period. The median time to reach CD4 þ 4200 cells per ml was 6 months (but up to 24 months to reach 400 cells per ml), and the median CD8 þ levels reached the normal range after 12 months. T Vg9d2 lymphocytes showed profound and sustained depletion. Leukemia NK cells were relatively preserved, although they remained below the normal range (Figure 2). From EOT to M12, NK cells accounted for up to 32% of PBL, endowed with potential ADCC, because they express CD16 (Figure 2b). Normal B cells (Figure 2c, calculated from MRD dot plot analyses) rapidly increased, to reach almost normal ranges (2–3% of leukocytes, instead of 3–6%) in the first year post-immunochemotherapy. The only patient with decreased B cell numbers is the patient who required second-line treatment at 15 months after FCR. Altogether, these findings showed that Tgd and CD4 þ T cells were much more sensitive to FCR than NK cells. NK function recovery As NK cells are believed to be important immune effectors for both disease control and defenses against pathogens, we investigated whether FCR could have influenced intrinsic NK function. For this reason, we measured at different times the natural PBL lysis capacity against MEC-2, a CLL-derived cell line, at the low effector/target ratio of 0.4:1. As shown in Figure 3a, we found that resting PBL from healthy donors showed a modest activity against MEC-2 (4.7±3.5%), the latter being dramatically boosted when PBLs were stimulated by IL-2 (LAK activity) (24.8±14%). As shown in Figure 3a, when tested at the overt phase of the disease, resting B-CLL PBL showed similar cytotoxicity against MEC-2, compared with healthy donors (1.4±1.1%). However, when IL-2 was used, LAK activity was much lower, compared with normal healthy donors (6.5±4.3%, P ¼ 0.004), suggesting that LAK function was indeed depressed in B-CLL samples (Figure 3a). Moreover, as depicted in Figure 3b, LAK activity progressively increased and was totally restored at M12 compared with EOT in eight Immune cell recovery and MRD follow-up post-FCR L Ysebaert et al 1313 Absolute count/mm3 Absolute count/mm3 CD4 NK n= 22 25 EOT 17 M6 8 M12 8 M18 M24 8 n= M36 27 26 19 13 9 7 EOT M6 M12 M18 M24 M36 23 M12 10 10 8 M18 M24 M36 n= 24 25 21 9 9 8 EOT M6 M12 M18 M24 M36 T NK/CD16 EOT R2= 0,9564 350 Absolute cell number 24 M6 CD8 Mono n= 24 EOT 300 250 200 150 100 50 n= 21 EOT 0 0 50 100 150 200 250 300 24 19 11 10 7 M6 M12 M18 M24 M36 M6 M12 M18 350 Absolute cell number NK/CD16 M12 R2= 0,9158 10 700 Normal B cells (% of leucocytes) Absolute cell number 800 600 500 400 300 200 1 0,1 0,01 100 EOT M24 0 0 100 200 300 400 500 600 Absolute cell number Figure 2 Time kinetics of absolute numbers of different cellular subsets in the blood of CLL patients following FCR treatment. (a) Each box shows the median value () and the 25–75% percentiles, and bars represent the range of values. The gray zone within each category represents our laboratory’s normal values for each cellular subset. (b) Correlation between CD16-expressing cells and CD3CD56 þ NK cells (results shown are EOT and M12, but are also true at M18 and M24). (c) Normal B-cell recovery (four-color flow cytometry) is rapid and almost reaches the normal range within 6–12 months). Same representation is used as for MRD kinetics data, and the results shown are percentage of B lymphocytes among total leukocytes. n: the number of patients analyzed at each time point during follow-up; EOT: end of treatment; M ¼ months. paired samples (19.9±15.2% vs 4.6±2.4% at EOT, P ¼ 0.02), as the results were comparable to what was seen with healthy donors. This result suggests that, whereas the NK function was altered in B-CLL at the overt phase of the disease, FCR restored LAK activity (using IL-2) within 1 year after therapy completion. Correlation between MRD and immune recovery On the basis of the above results, we investigated whether immune recovery could influence disease control attested by the MRD level remaining below 1%. For this reason, we have compared group A and group B patients for CD4, CD8, NK, Tgd, Leukemia Immune cell recovery and MRD follow-up post-FCR L Ysebaert et al 1314 p=0.004 p=0.02 50 p=0.002 -IL-2 + IL-2 40 30 p=0.02 20 10 0 Normal donors CLL before FCR CD4+ ber absolute numb % specific cytotoxicity p=0.03 p p=0.02 % specific cytotoxicity 50 p=0.01 -IL-2 + IL-2 MRD n= 40 group B 12 Figure 4 Low median CD4 þ T-cell count at EOT is predictive of good disease control during the first year post-FCR (MRD remaining below 1% of total leukocytes), according to the Mann–Whitney analysis in 26 available patients (P ¼ 0.02). EOT: end of treatment. 30 20 p=0.002 10 EOT M12 Figure 3 Natural cytotoxic capacities of CLL patients’ PBL recovered after FCR. (a) Comparison of natural cytotoxicity (IL2) or LAK ( þ IL2) activity of PBL taken from 8 CLL patients (just before receiving FCR) or 10 healthy donors against the MEC-2 cell line. Effector/target ratio shown is always 0.4:1, and lysis experiments were carried out as stated in the Patients and methods section. (b) LAK activity against MEC-2 is restored in the first year post-FCR treatment. PBL from eight CLL patients were collected at EOT and M12, and lysis experiments were carried out. Paired t-test analyses indicate a significant recovery of LAK activity at M12 post-FCR. EOT: end of treatment; FCR: fludarabine, cyclophosphamide, rituximab; IL-2: interleukin-2; M12: 12 months after FCR. PMN counts, as well as for NK and LAK activities against MEC-2, measured at EOT, M6 and M12. As illustrated in Figure 4, group A showed significantly lower CD4 þ counts at EOT (median ¼ 133 vs 225 per ml, n ¼ 26, P ¼ 0.02), and a slow CD4 þ T-cell recovery during the first year post-FCR (median at M12: 233 vs 419 per ml, n ¼ 25, P ¼ 0.02). We found no correlation with the other parameters at any other time point, including NK or LAK function (data not shown). Best CD4 count cutoffs to predict DFS were o150 per ml at EOT (DFS 30 vs 16 months, P ¼ 0.008), and o300 per ml at M12 (DFS from M12 post-FCR: 19 vs 7 months, Po0.01). PBL cellular cytotoxicity against autologous B-CLL cells after FCR On the basis of the above findings, which indicated that the NK/LAK function was improved during the first year post-FCR, we speculated that PBL from CLL patients treated with FCR could exert potent RTX-mediated ADCC against autologous leukemic cells. From unpaired analyses, we first compared RTX-ADCC ±IL-2 from CLL patients before and 12 months after FCR, but detected no statistical difference (mean RTX-ADCC þ IL-2 was 8.1±4% at baseline vs 18±12% at M12, n ¼ 6). We then focused on these six patients at M12 (three from each MRD % specific cytotoxicity 0 Leukemia group A 14 40 MRD group A (M12) p=0.03 MRD group B (M12) 30 20 10 0 CLL CLL RTX CLL RTX IL-2 Figure 5 Rituximab-mediated ADCC against autologous CLL cells. PBL from six patients (three in group A, and three in group B) were collected 1 year after completion of FCR, and assessed for natural cytotoxicity (control) and ADCC with RTX with or without IL-2, against autologous CLL cells (frozen before FCR treatment) as targets. Results shown are mean cytotoxicity (±s.d.) at a calculated effector/target ratio of 0.4:1. group, A and B). Against autologous B-CLL cells, group A patients show statistically different RTX-ADCC (28.8±7% vs 8.1±2.8% in group B, P ¼ 0.03, Figure 5). These results suggest that although the LAK function was dramatically improved by FCR therapy, NK remained ineffective against the leukemic clone, unless being used in association with RTX, which may redirect intrinsically efficient NK cells toward their targets, or trigger secondary signals resulting in boosting their cytolytic function. Discussion Although FCR has become one of the major standards for B-CLL, scarce information is available on long-term immune reconstitution after therapy. Recently, concerns about FCR-induced immunosuppression were raised about the relatively high rate of opportunistic infection during the post-FCR period.1 We also Immune cell recovery and MRD follow-up post-FCR L Ysebaert et al 1315 addressed the kinetics of MRD levels after FCR, and its relevance for the prediction of clinical relapse. Correlative studies between both recovery data (immune cells and MRD) point toward a putative role of the immune system in the control of CLL post-FCR. Unsurprisingly, we have found that FCR induced a severe and prolonged depletion of all T-cell subsets. Previous studies have largely documented the sensitivity of CD4 and CD8 T cells to fludarabine.13,14 However, the impact of the drug on Tgd subset has not so far been reported. These cells were found to be even more sensitive than Tab cells. The extent to which severe Tgd depletion contributes to FCR-associated opportunistic infection remains to be determined. This question is of interest because of the introduction of phosphoantigen-based preparations able to expand in vivo Tgd cell population.9 Interestingly, NK cells were relatively preserved. This observation is in sharp contrast with alemtuzumab therapy, which was found to be harmful toward NK cells.15 PBLs derived from B-CLL patients have much lower cellular cytotoxic capacity, compared with those from healthy donors. As NK cells support most, if not all, PBMC natural cytotoxicity,16 this observation suggests that, before treatment, NK basal function is profoundly altered in B-CLL. Decrease in NK-mediated B-CLL lysis has been largely described. However, it remains unclear whether CLL cell natural resistance or decreased function of B-CLL patient NK cells has the more important role. Our study shows that NK activity in autologous RTX-ADCC improved during the post-FCR period in some patients (who could benefit from RTX maintenance treatment), but remained very low in others, suggesting that these latter patients are endowed with highly NK-resistant CLL cells. MRD eradication during and post-FCR is predictive of better outcome in the CLL8 trial. Extensive data on MRD monitoring post-FCR are lacking. Such data collected after bone marrow grafting procedures indicated MRD increase as a good predictive marker for clinical relapse.17–19 In our cohort of 30 patients, 8 out of 12 patients from group B (MRD 41% at M12) suffered a relapse, with increasing levels of MRD 41% being always detected 3–6 months before clinical relapse. MRD monitoring at 12 months after FCR identified patients with a high relapse risk, who could benefit from investigational treatments aiming to prevent overt relapse. The choice of MRD threshold is nonetheless questionable. Using a 0.05% threshold (as proposed recently in the post-allograft setting19), four patients from group A would fall into group B, none with overt clinical relapse (despite 424 months of follow-up). Thus, the size of our cohort may limit the significance of a 1% threshold: the main message is clearly that MRD monitoring should be implemented in the follow-up of FCR patients because of its relevance in predicting clinical evolution of the disease. Another interesting result suggests a negative impact of CD4 þ cell recovery on molecular disease control. This observation is in agreement with another study presented very recently.20 The significance of these observations remains unclear. They may simply reflect a surrogate biomarker of FCR efficacy against lymphocytes. Characterization of these CD4 þ cells was beyond the scope of this study. It seems unlikely that these cells are CD4 þ Treg, which could have thus facilitated tumor cell escape. Indeed, Treg cells are exquisitely sensitive to fludarabine and indeed efficiently depleted by this drug.14 Alternatively, it is possible that these CD4 þ cells correspond to an expansion of cytokine-producing cells, which may exert a direct helper function toward tumor cells, as for example CD4 þ CD154 þ cells, a subset that was found to facilitate proliferation, survival and immuno-escape of CLL cells.21 CD4 monitoring cannot be considered as a surrogate marker for MRD evolution of course, but future strategies aiming at modulating CD4 þ subsets (Tregs, Th17) may prove of interest in CLL. In a view of immunomodulation strategies early post-FCR, we present data indicating that natural effectors, presumably NK cells, exert in the presence of RTX cellular cytotoxicity against autologous leukemic cells. Interestingly, such RTX-mediated ADCC of patient PBL improved during the post-FCR period and reached levels comparable to that of normal healthy donors (data not shown). We believe that ADCC increase is due to enhanced NK function during the same period of time. This finding is important to consider because ADCC is the major mechanism by which RTX exerts its anti-leukemic effect. This consideration, combined with the observation that MRD control during the 1-year post-FCR period seems to be critical for future clinical outcome, argues for the use of RTX as maintenance or consolidation therapy during the first year following FCR completion. RTX-based maintenance therapy is currently being tested in the setting of FCR-treated B-CLL (French collaborative CLL2007-SA phase III trial). Whether these studies will confirm our hypothesis is still unknown. Our study also suggests that this strategy should benefit from co-administration of NK-stimulating cytokines such as IL-2,22 IL-1523 or IL-2124 or drugs susceptible to enhance NK function, such as Lenalidomide.25 To conclude, our study shows that FCR therapy induces a severe and prolonged T-cell depletion; however, NK cells are less affected and NK function even increases 1 year after treatment, with potential autologous RTX-ADCC restoration. We also provide evidence that MRD monitoring the first year post-FCR is of clinical importance to predict relapses and manage preemptive therapeutic strategies. Altogether, these results support the use of anti-CD20-based maintenance therapy in B-CLL to maintain low levels of MRD, prolong PFS and perhaps improve survival. Conflict of interest The authors declare no conflict of interest. Acknowledgements We are grateful to the patients who participated in the study and their referring physicians. We also thank Pr C Récher for a critical reading of the paper. This work was supported by grants from INSERM and Association Laurette Fugain (ALF/No 07-05). We thank F Hoffmann-La Roche Ltd for providing rituximab used in our experiments. EG is the recipient of a grant from Ministère délégué à l’Enseignement supérieur et à la Recherche. References 1 Tam CS, O’Brien S, Wierda W, Kantarjian H, Wen S, Do KA et al. Long-term results of the fludarabine, cyclophosphamide, and rituximab regimen as initial therapy of chronic lymphocytic leukemia. Blood 2008; 112: 975–980. 2 Hallek M, Fingerle-Rowson G, Fink A, Busch R, Mayer J, Hensel M et al. Immunochemotherapy with fludarabine (F), cyclophosphamide (C), and rituximab (R) (FCR) versus fludarabine and cyclophosphamide (FC) improve response rates and progressionfree survival (PFS) of previously untreated patients (pts) with advanced chronic lymphocytic leulemia (CLL). Blood 2008; 112 abstract no. 325. 3 Milligan DW, Kochethu G, Dearden C, Matutes E, MacConkey C, Catovski D. High incidence of myelodysplasia and secondary leukaemia in the UK medical research council pilot of autografting Leukemia Immune cell recovery and MRD follow-up post-FCR L Ysebaert et al 1316 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 Leukemia in chronic lymphocytic leukaemia. Br J Haematol 2006; 133: 173–175. Cheson BD, Vena DA, Barrett J, Freidin B. Second malignancies as a consequence of nucleoside analog therapy for chronic lymphoid leukaemia. J Clin Oncol 1999; 17: 2454–2460. Tam CS, Seymour JF, Miles Prince H, Kenealy M, Wolf M, Januszewicz EH et al. Treatment-related myelodysplasia following fludarabine combination therapy. Haematologica 2006; 91: 1546–1550. Ravandi F, O’Brien S. Immune defects in patients with chronic lymphocytic leukemia. Cancer Immunol Immunother 2006; 55: 197–209. Burton JD, Weitz CH, Kay NE. 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Au cours de cette étude, nous démontrons le bénéfice de la chimiothérapie sur la fonction immunitaire NK au travers de la persistance des cellules NK post-thérapie, de la restauration de leur potentiel cytotoxique et de l’amplification de ce phénomène par l’ADCC du Rituximab. Néanmoins, en faveur d’un rétablissement précoce des phénomènes d’immunosubsersion par les cellules leucémiques réémergentes, l’augmentation de l’ADCC en présence d’IL-2 apparaît partiellement inhibée. Nous révélons également que la présence accrue de cellules CD4+, potentiellement à l’origine de ces événements immunosubversifs, accompagne la réémergence des cellules leucémiques progressantes. 3.1 La reconstitution immunitaire post-FCR est marquée par une prédominance du compartiment NK. De façon attendue, toutes les populations lymphocytaires T sont fortement touchées par le traitement FCR. En effet, l’immunosuppression des cellules Tαβ induite par le Cyclophosphamide et la Fludarabine est largement documentée dans la littérature (219-221). La reconstitution immunitaire post-FCR des cellules TVγ9δ2 circulantes reste cependant sans précédent bibliographique. Etant donné la prévalence et l’importance biologique du sousgroupe TVδ1 (191), il aurait été intéressant de déterminer également l’influence du traitement FCR sur cette population impliquée de façon atypique dans la surveillance immunitaire de la LLC-B. De façon très intéressante, les cellules NK et monocytaires sont relativement bien préservées. Cette reconstitution précoce des cellules NK est également documentée dans des cas de lymphoablation par chimiothérapie et lors de transplantation de cellules souches hématopoïétiques (166). 96 RESULTATS ET DISCUSSION : La reconstitution immunitaire après traitement FCR dans la LLC-B : Perspectives d’immunomodulation NK post-thérapie Dans ce dernier cas, les cellules NK reconstituées de façon précoce émergent de progéniteurs CD34+, présentent un phénotype immature et sont essentiellement sécrétrices de cytokines (166). Dans des cas de chimiothérapies immunosuppressives, il est possible que cette population de cellules NK immatures soit sélectionnée et que leur statut primitif leur permettent de résister à l’action des agents chimiothérapeutiques. Supportant la thèse d’une résistance innée aux traitements chimiothérapeutiques contenue dans le compartiment NK, il est décrit que les cellules NK murines issues de la rate surexpriment le transcrit d’ABCG2, un transporteur impliqué dans l’efflux de drogues chimiothérapeutiques (140). L’expression protéique de ce transporteur pour les NK humains circulants, conférant une chimiorésistance multiple reste à être démontrée cependant. Quelque soit le mécanisme de résistance du compartiment NK, effecteur majoritaire de la cytotoxicité naturelle PBL, l’expérience de la chimiothérapie associée à la résistance de la population NK permettent d’établir, in vivo, de nouveaux rapports effecteurs/cibles en faveur de la population effectrice. 3.2 La chimiothérapie permet de restaurer les compétences cytotoxiques NK La cytotoxicité naturelle des PBL issus de patients LLC-B est, à l’état basal (avant chimiothérapie), significativement inférieure à la cytotoxicité naturelle des PBL issus de donneurs sains, et cela même en présence d’une stimulation préalable à l’IL-2. Le défaut d’activité cytotoxique qui caractérise ces cellules NK issues de patients LLC-B est corroboré par de nombreuses études (209, 210, 222, 223). En s’inspirant de la thèse d’immunosélection, ce défaut est probablement la résultante de l’immunosubversion exercée par les cellules leucémiques via la sécrétion de facteurs solubles qui engendrent l’inhibition de la cytotoxité NK (209). Dans notre étude, on observe cependant la réversion de ce phénomène 12 mois post-FCR. Trois hypothèses interconnectables et cumulables sont envisageables pour expliquer cette restauration de l’activité cytotoxique NK : (i) la mort des cellules leucémiques a rompu les dialogues immunosubversifs entre cellules leucémiques et cellules NK et/ou cellules NK et cellules immunosuppressives du microenvironnement (ii) l’expérience de la chimiothérapie traduite par la mort ou la modification de l’immunogenecité des cellules leucémiques engendre un effet immunostimulant (iii) les agents chimiothérapeutiques induisent de façon directe une augmentation de l’activité cytotoxique NK. 97 RESULTATS ET DISCUSSION : La reconstitution immunitaire après traitement FCR dans la LLC-B : Perspectives d’immunomodulation NK post-thérapie En ce qui concerne les stratégies d’immunosubversion, la sécrétion de facteurs immunosuppressifs tels que le TGF-β, les ligands du NKG2D, l’IL-10 et l’IL-6 par les cellules leucémiques est clairement établie dans la LLC-B (169-171, 211). L’étude de l’expression de surface des récepteurs activateurs et inhibiteurs NK pourrait être indicatifs de la présence de tels phénomènes. Dans ce contexte, des études préliminaires au sein du laboratoire démontrent que le TGF-β présent dans le sérum des patients LLC-B induit une diminution du NKG2D à la surface des cellules NK. De plus, la perte de composants cellulaires non-tumoraux immunosuppressifs de l’activité NK (Treg) est également une thèse possible, notamment en présence de Cyclophosphamide (165). Bien que cette étude se concentre en particulier sur les fonctions effectrices, la chimiothérapie a le potentiel de moduler l’immunogénicité des cellules leucémiques résiduelles. En effet, les études élégantes ménées par Raulet et al., démontre que les dommages à l’ADN induits par les agents génotoxiques conduisent à la surexpression de ligands du NKG2D (216). Afin de valider cette hypothèse, l’étude de l’expression des ligands majeurs de la cytotoxicité NK (MICA, MICB, ULBP1-4, LFA-1, HLA-ABC, HLA-E) à la surface des cellules leucémiques appartenant à la maladie résiduelle validerait cette hypothèse. Cependant, le nombre limité de cellules et la définition du temps après traitement relevant pour cette étude rend cette hypothèse complexe à valider expérimentalement. Enfin, la thèse d’une action directe bénéfique des agents chimiothérapeutiques sur l’activité NK repose en partie sur la démonstration qu’in vitro des doses thérapeutiques de certains agents chimiothérapeutiques n’affectent pas la viabilité des cellules NK et améliorent leur activité cytotoxique (Methotrexate, 6-Mercaptopurine, Etoposide, Fludarabine) (212, 213). Bien que ces études démontrent que le Cyclophosphamide n’affecte pas la fonction NK, l’effet conjoint des trois composants du FCR in vivo n’apparaît pas délétère sur la cytotoxicité naturelle dans notre étude. 3.3 Implication des cellules CD4+ dans la rechute post-thérapeutique Le groupe de patients testé dans l’étude a été divisé en deux sur la base de la MRD < 1% à la fin du traitement. Ce seuil prédit l’absence de rechute dans les deux années consécutives au traitement. 98 RESULTATS ET DISCUSSION : La reconstitution immunitaire après traitement FCR dans la LLC-B : Perspectives d’immunomodulation NK post-thérapie De façon intéressante, les patients présentant ce pronostic favorable sont caractérisés par un faible nombre absolu de cellules CD4+ et une reconstitution lente de cette population. A l’inverse, la progression leucémique, qui caractérise le groupe de patients au pronostic défavorable (MDR>1%), est accompagnée d’une reconstitution rapide et d’une présence accrue des cellules CD4+. Afin de déterminer le rôle exact de ces cellules CD4+ dans le pronostic péjoratif de la progression leucémique post-traitement, il est nécessaire de mener une étude approfondie de leur phénotype. Quantité de données contenue dans la littérature décrive le rôle ambigu des différentes populations CD4+ et permette de définir quelques hypothèses sur l’identité potentielle de ces cellules CD4+ favorisant la rechute dans notre étude. Les plus documentées sont les cellules CD4+CD25+ T régulatrices (Treg) qui exercent une immunosuppression des effecteurs de l’immunité anti-tumorale dans divers cancers. Cependant, leur extrême sensibilité à l’action du Cyclophosphamide (165) tend à infirmer cette hypothèse, bien qu’il ait été démontré récemment que les Treg issus de patients LLC-B sont plus résistants à l’apoptose induite in vitro que les Treg issus de donneurs sains (224). De façon analogue aux T régulateurs, les cellules CD4+ NKG2D+, qui apparaissent dans des microenvironnements riches en ligands solubles du NKG2D, tel celui de la LLC-B, entretiennent également une immunosuppression (223). L’action pro-tumorale des cellules CD4+ ne s’exerce pas uniquement au niveau de l’immunosuppression. Ces cellules mènent également une action favorisant la survie, la prolifération et la migration des cellules cancéreuses. Les cellules Th17, récemment décrites, font partie de cette dernière catégorie en exerçant un rôle double dans l’immunité anti-tumorale (activation des effecteurs de la surveillance des cancers) et pro-tumorale (sécrétion de facteurs permettant la progression tumorale) (225). Potentiellement promotrices de la leucomogenèse post-FCR, leur interaction avec les cellules de LLC-B n’a jamais été décrite. En revanche, il existe un sous-groupe de cellules T accessoires CD4+CD154+ qui au niveau des centres prolifératifs, est un composant essentiel du microenvironement de la LLCB. Par extrapolation de ces connaissances sur le microenvironnement de la LLC-B, il est envisageable que les cellules CD4+ accessoires, telles celles que l’on retrouve au niveau des ganglions, assurent la survie du clone leucémique survivant post-FCR dans la fraction circulante en fournissant des signaux IL-4 et CD40L (44-46). 99 RESULTATS ET DISCUSSION : La reconstitution immunitaire après traitement FCR dans la LLC-B : Perspectives d’immunomodulation NK post-thérapie L’impact connu de ces signaux sur la progression, la survie et l’acquisition d’un profil antiapoptotique chimiorésistant par les cellules leucémiques laisse suggérer l’importance de ces cellules CD4+ dans la réémergence du clone leucémique post-chimiothérapie (86-88, 90). Cette présence augmentée de cellules CD4+ qui accompagne la progression leucémique post-thérapeutique fait sens avec l’étude de N. Chiorazzi qui démontre que l’expansion d’une population T autologue (dont le phénotype n’est pas mentionné dans l’étude) est nécessaire à la xénogreffe de cellules de LLC-B (47). 3.4 Perspectives d’immunomodulation par l’ADCC du Rituximab Dans notre étude, l’ajout de Rituximab dans des systèmes autologues de lyse augmente considérablement la lyse des cellules leucémiques avec des PBL obtenus post-FCR. Ces données ADCC combinées à l’amélioration de la lyse spontanée post-chimiothérapie justifie l’intérêt thérapeutique de moduler la fonction NK post-chimiothérapie. Les anticorps monoclonaux, les inhibiteurs du protéasome, les agents deméthylants, les inhibiteurs d’histone déacetylase et les IMIDS sont des agents immunomodulateurs utilisés en thérapie ou en essais de phase clinique. Les inhibiteurs du protéasome, agents déméthylants et inhibiteurs d’histone déacétylase permettent d’amplifier l’immunogénicité des cellules tumorales en augmentant notamment l’expression des ligands du NKG2D. Cependant, leur activité négative directe sur la fonction NK reportée dans certaines études dicte une approche plus globale de réflexion, en définissant des doses suffisamment faibles pour être sans effet sur la fonction effectrice tout en conservant la modulation de l’immunogénicité des cellules cibles (190). Les IMIDs stimulent les fonctions effectrices anti-tumorales, notamment NK (190). Leur utilisation en conjonction avec le Rituximab est cependant contre-indiquée par l’étude de Lapalombella et al. (2008) qui démontre un effet négatif du Lenalinomide sur l’expression du CD20 et l’ADCC des cellules de LLC-B (226). Enfin, les anticorps monoclonaux, tels que le Rituximab ou encore les anti-CD20 « nouvelle génération », dotés d’une propension plus forte à générer de l’ADCC, sont des agents immunomodulateurs très efficaces puisqu’ils ont la possibilité de cibler le compartiment leucémique uniquement et qu’ils engagent la signalisation cytotoxique NK la plus puissante (CD16 dépendante) (36). Enfin, la possibilité d’accroître la population effectrice TVγ9δ2 par administration de phosphoantigène représente une option d’immunomodulation et d’amplification de l’ADCC dans la LLC-B (192). 100 RESULTATS ET DISCUSSION : La reconstitution immunitaire après traitement FCR dans la LLC-B : Perspectives d’immunomodulation NK post-thérapie Dans notre étude, une disparité de réponse persiste, cependant, entre groupe A (MRD <1%) et groupe B (MRD>1%) au niveau de l’activité ADCC en présence d’IL-2. Celle-ci est amplifiée fortement pour le groupe A et quasiment sans effet pour le groupe B. La thèse de phénomène d’immunosubversion est encore valable pour expliquer ce phénomène. Cette perte de réponse à l’IL-2 peut-être expliquée, à partir des éléments obtenus dans cette étude, par une activité immunosuppressive conjointe ou non des cellules CD4+ survivantes et/ou du clone leucémique progressant. 3.5 Facteurs influents la MRD Dans cette étude, le facteur MRD<1% à la fin du traitement est l’unique paramètre qui détermine l’absence d’évolution clinique (survie sans progression) dans les deux années qui suivent le traitement. Dans la LAM, il est clairement établi que ce sont les cellules NK, en termes de proportion et d’activité, qui sont garantes de la rémission post-chimiothérapie et de l’absence de rechute (166). Exceptée une corrélation avec une présence élevée de cellules CD4+ discutée préalablement, la présence de MRD >1% n’est pas corrélée à un défaut quantitatif de reconstitution immunitaire. Cependant, au niveau fonctionnel, la perte de réponse à l’IL-2 des cellules NK du groupe progressant suggère l’importance de la surveillance immunitaire de la MRD. Dans ces travaux, la preuve de concept du bénéfice que peut apporter la chimiothérapie FCR à la surveillance immunitaire de la LLC-B est introduite. En plus d’un établissement nouveau de rapport effecteurs/cibles en faveur de la fraction effectrice, la restauration de la cytotoxicité NK et la reconstitution rapide du compartiment NK après traitement permettent d’envisager l’immunomodulation NK post-thérapie. Cependant, la progression leucémique réémergeante post-thérapie semble déjà dotée d’un potentiel immunosubversif comme l’atteste la perte de réponse des cellules NK en présence d’IL-2. L’identification des dialogues cellulaires immunosuppressifs dans la LLC-B liés ou non à la présence augmentée de cellules CD4+ est essentielle pour permettre l’élaboration de stratégies d’immunothérapie efficaces sur les patients en rechute. 101 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises II. La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises. 1. Introduction En dépit de progrès thérapeutiques constants, la LLC-B reste une maladie incurable caractérisée par l’invariable résurgence du clone leucémique post-thérapie. Ce constat purement clinique suggère l’existence d’un compartiment leucémique chimiorésistant dont l’éradication a le potentiel de conditionner les succès thérapeutiques futurs. L’état actuel de la littérature concernant la chimiorésistance des cellules de LLC-B repose sur la signature cytogénétique, les défauts d’apoptose intrinsèques, l’activation de voies de survie modulées par les composants du microenvironnement, et l’activité enzymatique naturelle et acquise de MDR1/ABCB1. L’ensemble de ces études tende à déterminer de façon globale des mécanismes cellulaires représentés de façon homogène au sein du clone leucémique. Dans cette étude, nous avons émis l’hypothèse que la résurgence post-thérapeutique du clone leucémique résulte de la dynamique de régénération d’une sous-population chimiorésistante. Dans cette théorie, la chimiorésistance de la LLC-B est basée sur l’identification d’une hétérogénéité, potentiellement hiérarchique, du clone leucémique, où une sous-population multi-résistante « réservoir » maintient la pérennité de la progression leucémique en assurant la reformation du compartiment majoritaire chimiosensible après traitements. Combinant chimiorésistance, hiérarchie et hétérogénéité cellulaire, les cellules SP représentent un compartiment cellulaire naturellement chimiorésistant dont le déterminisme moléculaire dépend de l’activité d’ABCG2 (140). Ce compartiment mineur, représenté dans divers tissus sains et tumoraux, enrichi la fraction cellulaire immature des tissus bien que certains exemples de types cellulaires différenciés dérogent à cette règle (227). Dans ce contexte, trois questions fondamentales s’imposent : Existe-t-il une hétérogénéité du clone leucémique révélable par le phénotype SP ? La SP LLC-B est-elle chimiorésistante ? Quelle est la dynamique des cellules SP à générer des cellules non-SP ? Cette étude tend à apporter des éléments de réponses à ces trois questions aux travers de six objectifs de recherche : Evaluer l’existence et quantifier la proportion de cellules SP sanguines chez des patients n’ayant jamais été traités. 102 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises Définir, par le phénotype et la recherche d’anomalies cytogénétiques, le statut leucémique et clonal de la population SP. Définir un marqueur de surface et/ou une signature moléculaire spécifique(s) de la population SP. Evaluer la résistance du compartiment SP aux traitements conventionnels de la LLC-B in vitro. Evaluer la relevance du modèle de chimiorésistance par l’étude d’échantillon de patients après traitement. Etablir la capacité des cellules SP à générer des cellules non-SP (compartiment majoritaire de la maladie). 2. Article II. Gross E, L’Faqihi-Olive FE, Ysebaert L, Brassac M, Struski S, Kheirallah S, Fournié JJ, Laurent G, And Quillet-Mary A. B-Chronic Lymphocytic Leukemia (B-CLL) chemoresistance involves innate and acquired leukemic Side Population (SP) cells. Leukemia 2010, 24(11):1885-92. 103 Leukemia (2010) 24, 1885–1892 & 2010 Macmillan Publishers Limited All rights reserved 0887-6924/10 www.nature.com/leu ORIGINAL ARTICLE B-chronic lymphocytic leukemia chemoresistance involves innate and acquired leukemic side population cells E Gross1, F-E L0 Faqihi-Olive2, L Ysebaert1,3, M Brassac1, S Struski4, S Kheirallah1, J-J Fournié1, G Laurent1,3 and A Quillet-Mary1 1 INSERM, U563, Toulouse, F-31300 France and Université Toulouse III Paul-Sabatier, Centre de Physiopathologie de Toulouse Purpan, F-31300 France; 2IFR150-BMT, Toulouse, F-31300, France; 3CHU Toulouse, Hôpital Purpan, Service d’Hématologie, Toulouse, F-31300 France and 4CHU Toulouse, Hôpital Purpan, Laboratoire d’Hématologie, Toulouse, F-31300 France B-cell chronic lymphocytic leukemia (B-CLL) therapy remains unsatisfactory due to repeated resurgences of the chemoresistant disease. In this study, we investigated the basis of this chemoresistance by applying the ‘side population’ (SP) analysis to blood samples from B-CLL patients. We report the existence of few natural SP cells, which harbors phenotypic and cytogenetic hallmarks of B-CLL in most patients with this disease (n ¼ 22). SP cells appeared resistant to conventional B-CLL treatments, such as Fludarabine, Bendamustin or Rituximab. Indeed, treatment with Fludarabine (16/18 cases) or Bendamustin (5/7 cases) resulted in complete elimination of non-SP, whereas cells displaying the SP phenotype were the only surviving. Although some B-CLL SP cells were innately chemoresistant, chemotherapy by Fludarabine selected not only innate SP cells but also induced some acquired SP cells, which arose from non-SP by drug-driven evolution. This SP selection by chemotherapeutic treatments is further supported by the overall increase of the SP percentage in patients who experienced chemotherapy in the preceding year. Functionally, proliferative stimulation of SP cells was able to partially replenish in vitro the non-SP cell compartment of the B-CLL disease. The chemoresistance of B-CLL relies, in our model, on the cellular heterogeneity of B-CLL SP cells and on their regenerating dynamics. Leukemia (2010) 24, 1885–1892; doi:10.1038/leu.2010.176; published online 9 September 2010 Keywords: ABC transporters; B-CLL; chemoresistance; side population Introduction B-cell chronic lymphocytic leukemia (B-CLL) is a quite unique cancer characterized by a progressive accumulation of quiescent CD19 þ CD5 þ CD23 þ B-cell clones in the blood, bone marrow and lymphoid tissues. This disease is still considered as incurable, despite the introduction of Fludarabinebased combinations. Indeed, Fludarabine yields high response rates when combined with monoclonal antibodies or other drugs as first-line therapy,1–3 but does not avoid the mostly invariable relapses4 due to progressive outgrowth of B-CLL cells increasingly resistant to the successive lines of therapy. A complete eradication of the leukemic clone is therefore mandatory to definitively stop the striking evolution of the B-CLL disease. To this aim, a better knowledge of the innate and acquired cellular pathways leading to B-CLL chemoresistance is warranted. Correspondence: Dr A Quillet-Mary, CPTP, INSERM U563, CHU Purpan, BP3028, Toulouse 31024, France. E-mail: [email protected] Received 18 May 2010; revised 24 June 2010; accepted 6 July 2010; published online 9 September 2010 In the past, B-CLL chemoresistance has been attributed to intrinsic apoptotic defects5,6 and to both genuine and adaptive (drug-induced) activity of the MDR1/ABCB1 protein.7 In this study, we hypothesized that the progressive development of B-CLL chemoresistance might result from dynamics of heterogeneous chemoresistant cell subsets in addition to the mere acquisition of an enzymatic activity. More precisely, posttherapeutic B-CLL relapse could uncover a hierarchical organization of the whole B-CLL cell population, in which a discrete and multiresistant leukemic cell compartment repeatedly replenishes the main chemosensitive B-CLL cell population after treatment(s). A very minor cell compartment from various tumors8–13 and normal tissues14–17 comprises naturally chemoresistant (ABCG2 þ ) cells, with high dye-efflux capacity, that are referred to as ‘side population’ (SP) cells.14,18 Although sorting the SP cells usually enriches for a subset displaying stemness features,8,9–13,14,18 this phenotype is not only exclusively restricted to stem cells19 but also shared by some differentiated cells.20,21 In this study, we tracked chemoresistant subsets of B-CLL cells by the SP technique to clarify the dynamics of chemoresistance in this disease. Our study confirms the existence of Fludarabine-resistant leukemic SP cells in B-CLL, as established recently by Foster et al.22 In addition to uncovering both innate and acquired cell compartments with SP phenotype, this report addresses the question of polyresistance displayed by the B-CLL SP cells and demonstrates the prevalence of this population in post-therapeutic B-CLL samples. Finally, this study attempted to characterize SP cell dynamics underlying successive B-CLL relapses with progressive chemoresistance. Thus, both innate and acquired SP cells represent as major actors of the B-CLL pathogenesis and important therapeutic targets. Methods B-CLL samples and culture Peripheral blood samples were collected from 22 untreated and 5 previously treated B-CLL patients after obtaining informed consents and approval from the Toulouse University Medical Center Ethic Committee. B-CLL diagnosis was carried out by morphology and immunophenotype (Matutes score of 4/5). Briefly, mononuclear cells were separated by Ficoll centrifugation and analyzed or purified for SP by flow cytometry. For western blotting experiments, B-leukemic cells were purified by magnetic separation according to the manufacturer’s instructions (Stem cell Technologies, Grenoble, France). For in vitro treatments, cells were cultured in RPMI containing 10% fetal calf serum at 1 106 cells/ml in the presence or absence of Innate and acquired chemoresistant B-CLL SP cells E Gross et al 1886 Fludarabine (2 mg/ml) (Schering SA, Loos, France) during 7 days, Bendamustin (50 mg/ml) (Sigma, Saint Quentin Fallavier, France) during 3 days or Rituximab (Hoffmann La Roche Ltd, Basel, Switzerland) 10 mg/ml during 7 days. For proliferation assay, cells were labeled with 1 mM of carboxyfluorescein succinimidyl ester (Invitrogen, Cergy Pontoise, France) at 37 1C during 10 min and were subsequently treated or not with 250 nM of DSP30 (CpGODN) (Sequence: 50 -TCGTCGCTGTCTCCGCTTCTTCTTGCC-30 ) (TIB MOLBIOL, Berlin, Germany) in combination with 50 ng/ml of recombinant glycosylated interleukin (IL)-2 (kind gift from SanofiAventis, Toulouse, France) in RPMI containing 10% fetal calf serum during 7 days.23,24 were obtained by treatment with Fludarabine during 7 days and subsequent sorting of 7-amino-actinomycin D/CD56/CD3/ Hoechst 33342-negative phenotype. Cells were then washed with cold phosphate-buffered saline and resuspended into Laemli buffer 1. The protein extracts were processed according to western blot standard procedure. The different antibodies used in this study were as follows: anti-BMI-1 (Ozyme, Saint-Quentin en Yvelines, France), anti-ABCG2 (Abcam, Paris, France) and a-tubulin (Sigma). Horseradish peroxidaseconjugated secondary antibodies against rabbit, rat or mouse immunoglobulins were from Jackson Immunoresearch Laboratories (Jackson Immunoresearch Laboratories, Suffolk, UK). Flow cytometry On the basis of the protocol designed by Goodell et al.,14 primary B-CLL cells were stained with 5 mg/ml of Hoechst 33342 dye (Invitrogen) with or without pre-incubation with ABC transporter inhibitors (Verapamil, Fumitremorgin C and Reserpine) (Sigma) during 90 min at 37 1C under agitation. Subsequently, cells were incubated on ice with anti-CD19-FITC (Beckman Coulter, Roissy, France) and anti-CD5-PC7 (Clinisciences, Montrouge, France) antibodies in combination with one of the following phycoerythrin-labeled antibodies: anti-k light chain, anti-l light chain (from DakoCytomation, Trappes, France), anti-CD38, anti-CD34, anti-CD3, anti-CD56 (all from Beckman Coulter) and anti-CD23 (Clinisciences). Before fluorescent-activated cell sorting analysis, cells were stained with 2 mg/ml of 7-amino-actinomycin D (BD Pharmingen, Le Pont de Claix, France). Data acquisitions were performed on a BD LSR II cytometer (BD Bioscience, Le Pont de Claix, France). Flow cytometry acquisitions were analyzed using BD FACSDiva (BD Bioscience) and FlowJo softwares (Treestar, Ashland, OR, USA). Cell sorting Cell sorting was performed with Hoechst 33342-stained B-CLL peripheral blood cells treated or not with Fludarabine and subsequently labeled with anti-CD56, anti-CD3 and 7-aminoactinomycin D. After high discrimination on FSC-H/FSC-W (Forward scatter) and SSC-H/SSC-W (Side scatter) parameters, gating on CD56, CD3, 7-amino-actinomycin D and Hoechst 33342 negative cells was used to enable B-CLL-derived SP cells sorting. Sorted SP cells were subsequently analyzed by fluorescence in situ hybridization or cultivated in the presence of DSP30/IL-2 or Fludarabine. When sorting non-SP cells, B-CLL cells were stained with 1 mg/ml of Hoechst 33342 to avoid the high toxicity engendered on primary non-SP cells by the original 5 mg/ml concentration. Cell-sorting experiments were performed on a FACS ARIA Sorp (BD Bioscience). Interphasic fluorescence in situ hybridization Fluorescence in situ hybridization experiments were performed with P53/SE17, DLEU(13q14)/13qter and SE12(D12Z1) probes (Kreatech, Amsterdam, The Netherlands) on cytospin of SP and non-SP/Bulk cells, according to the manufacturer’s recommendations. Western blot Primary B-leukemic cells (Bulk B-CLL) for western blotting were obtained by negative purification with magnetic beads (Human B-cell enrichment kit without CD43 depletion, Stem cell technologies, Grenoble, France). SP cells (SP Fludarabine) Leukemia Statistical analysis Student’s paired t-test was used to determine differences between paired samples, with cutoff a ¼ 5%. Values were expressed as means±s.d. Results Characterizing B-CLL-derived innate SP cells We assessed the percentage of cells with SP phenotype in blood samples obtained from several (n ¼ 22) newly diagnosed (previously untreated) B-CLL patients by measuring Hoechst 33342 efflux through ultraviolet laser-based flow cytometry. This analysis evidenced a minor proportion of SP cells in every sample (median rate of SP cells among total cells ¼ 0.035%, range: 0.01–0.39%) (Figure 1a, Table 1). The SP phenotype was abrogated on cell treatment with the ABC transporter inhibitors verapamil (80 mM) (Figure 1a), fumitremorgin C (5 mM) and reserpin (50 mM) (not shown). Total SP cells in every sample contained a CD19 þ CD5 þ , CD19 þ CD23 þ and CD19 þ clonal immunoglobulin light chain þ cells, which phenotypes are characteristic of B-CLL leukemic cells (Figure 1b). In most of the patients, total SP cells also comprised non-leukemic CD19CD5 cells (not shown). Of note, there was no correlation between clinical characteristics and the rate of SP among whole blood cells. In the aim of identifying a specific marker of B-CLL SP cells, we compared the leukemic fraction (CD19 þ CD5 þ -gated cells) of SP and non-SP cells in each sample for expression of markers typically characterizing poor prognosis in B-CLL (CD38) and immature phenotypes (CD34). Expression of CD38 was analyzed separately on CD38 þ (more than 30% of positive cells) and CD38 patients. For CD38 þ patients only, SP cells displayed an overall increase of CD38 expression compared with their non-SP counterpart. This trend was reproducible for the three patients tested, although no significance was found (Figure 1c). No differences were observed for CD34 expression (Figure 1c) and CD127 (not shown). The phenotype of SP cells strongly suggested their leukemic nature. Nevertheless, to check for clonality of B-CLL SP cells, the SP cells sorted from (del 13q14, del p17 and þ 12) B-CLL patients were analyzed by fluorescence in situ hybridization. We found identical cytogenetic alterations in both bulk and SP leukemic cells in all patients tested (Figure 1d), confirming that SP cells belongs to the leukemic clone. Together, these data indicated that in the absence of any treatment, all B-CLL samples comprise a minorFyet sizeableF proportion of natural SP cells, which display the same phenotypic and cytogenetic profiles as the whole B-CLL population, suggesting that they are innate B-CLL SP cells. Innate and acquired chemoresistant B-CLL SP cells E Gross et al 1887 B-CLL treatments select SP cells We next asked whether the B-CLL chemotherapy selects for SP cells, by treating B-CLL blood samples with either Fludarabine (2 mg/ml, 7 days, n ¼ 18), Bendamustin (50 mg/ml, 3 days, n ¼ 7), or Rituximab (10 mg/ml, 7 days, n ¼ 3) before measuring their CD19 þ CD5 þ SP fraction. All treatments caused a clearcut enrichment in CD19 þ CD5 þ 7AAD SP cells (Figure 2a), on average of B2.5-fold with Rituximab and 1000-fold with Fludarabine or Bendamustin (Figure 2b). We noticed a global chemoresistance of the whole B-CLL cells (both SP and non-SP) in 2/18 and 2/7 patients for Fludarabine and Bendamustin respectively (not shown). Nevertheless as expected, Fludarabine and Bendamustin induced a massive destruction of the vast majority of B-CLL cells, although SP phenotype analysis of the few drug-surviving cells evidenced a highly Hoechst Blue + verapamil 100K 100K 50K 50K 0.01% 0.13% 50K 100K 50K 100K CD19 Hoechst Red 105 105 105 10 4 4 104 10 3 3 10 103 102 102 102 101 101 10 1 2 3 4 10 10 10 10 10 CD5 4 5 p=0.16 101 1 2 3 4 10 10 10 10 10 Kappa Light Chain 5 p=0.08 101 102 103 104 105 CD23 p=0.30 3.5 Relative MFI 3 Values Median 2.5 2 1.5 1 0.5 0 Non-SP SP Non-SP SP Non-SP CD34 CD38 CD38+ patients CD38- patients n=5 n=3 NSP or Bulk selective destruction of the non-SP compartment by all treatments (Figure 2a). Molecular validation of this exclusive SP phenotype was given by the overexpression of ABCG2 by Fludarabine-resistant SP cells, in complete accordance with the described SP phenotype.20 In addition, Fludarabine-resistant SP cells had strongly upregulated BMI-1 expression (Figure 2c). To check whether non-SP cells evolved by an adaptive switch toward SP cells under the selective pressure of these treatments, sorted non-SP cells (purity 499%) were treated as above (2 mg/ml Fludarabine for 7 days) before the analysis of the SP phenotype. A minority of cells (initially exhibiting a non-SP phenotype) survived in these experiments, and virtually all the drugsurviving cells exclusively displayed the SP phenotype (Figure 2d). To validate further, our in vitro-based concept of chemoresistant B-CLL SP cells, we analyzed the CD19 þ /CD5 þ SP percentage of five patients before and within 1 year after Fludarabine-based therapy (Table 2). These patients were either relapsing or showing incomplete response after treatment. Except for one patient showing decreased SP percentages after therapy, a global increase of the SP percentage was observed for the four remaining patients, who experienced therapy within the year preceding analysis (Table 2 and Figure 2e). The median leukemic SP percentage in post-therapeutic patients reached a level considerably higher than what was observed for untreated patients (0.43 versus 0.04%, before therapy). Together, these results highlight the high level of resistance of SP cells toward multiple chemotherapeutic agents. These in vitro data are further supported by the significant amount of SP cells present after chemotherapy in patients undergoing relapse or displaying persistent leukemic cells. In addition, n=5 SP del13q14 76% 52%* 84.5% 87% 90% 71%* delp17 +12 SP Figure 1 Characterizing B-cell chronic lymphocytic leukemia (B-CLL)-derived innate side population (SP) cells. (a) Peripheral blood cells from B-CLL patients were stained with Hoechst 33342 and analyzed by ultraviolet laser-based flow cytometry. The left panel shows the SP phenotype from a representative B-CLL patient peripheral blood sample (case 3). The SP cells are outlined and shown as a percentage of the total cell population. The right panel shows inhibition of the SP phenotype in the presence of 80 mM verapamil. A total of 22 patients were tested as described above. (b) Leukemic phenotypic characteristics of the SP cells for one representative patient (case 3). B-CLL cells were loaded with Hoechst 33342 dye subsequently immunolabeled with anti-CD5 anti-CD19 anti-CD23 and anti-k light chain and finally stained with 7-aminoactinomycin D. Nineteen patients were tested for the leukemic phenotype on the SP fraction. (c) B-CLL SP-specific cell surface markers. B-CLL cells were loaded with Hoechst 33342 dye and subsequently immunolabeled with anti-CD38 and anti-CD34 in combination with anti-CD19 and anti-CD5 antibodies. The relative MFI (mean fluorescent intensity) (MFI of the marker of interest/MFI of the isotype control) for each cell surface marker is represented for the CD19 þ CD5 þ non-SP fraction and SP fraction. Respectively five CD38 patients and three CD38 þ patients were tested for CD38 expression in both populations. Five different patients were tested for CD34 expression. Horizontal bars indicated the median values. (d) Cytogenetic features of B-CLL SP cells from B-CLL patients with identified chromosomal abnormalities. Pictures show positive hybridization patterns (fluorescence in situ hybridization, FISH) for the known chromosomal aberration (del 13q14 del p17 and þ 12) for purified SP and non-SP/Bulk compartments. The results of FISH are given as percentages of 200 sorted peripheral blood cells for either SP or non-SP fractions. *Two patients had fewer than 200 analyzable nuclei: SP cells from patient with del13q14 (50 cells) and SP cells from patient with trisomy 12 (38 cells). Del stands for deletion and þ 12 means trisomy 12. Leukemia Innate and acquired chemoresistant B-CLL SP cells E Gross et al 1888 Table 1 Side population (SP) fraction and clinical characteristics of untreated B-CLL patients Patient no. 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 Sex/age a Stage b WBC c Percentage of total SP F/73 F/68 F/69 M/78 F/75 M/59 M/78 M/74 F/61 M/44 M/71 M/75 M/75 M/64 F/54 M/78 F/69 M/65 F/72 M/88 M/76 F/66 A A B A A B C A A B B C A B A A B A A A B A 83 600 74 600 131 000 21 700 52 300 83 000 42 000 32 300 120 600 95 000 83 700 63 500 58 000 187 000 102 000 56 000 58 000 47 800 59 600 32 200 64 200 79 300 0.16 0.13 0.03 0.19 0.05 0.01 0.01 0.03 0.06 0.03 0.39 0.02 0.03 0.04 0.05 0.04 0.02 0.015 0.05 0.015 0.065 0.01 Abbreviations: B-CLL, B-cell chronic lymphocytic leukemia; WBC, white blood cell count. a Sex was defined: M, male; F, female, and age was expressed in years. b Staging was according to Binet staging system. c WBC was expressed as cells/ml of blood. these results demonstrated that the selective pressure exerted by B-CLL chemotherapy induced both survival of innate SP cells and an adaptive switch of non-SP cells, leading to a stringent selection of both innate and adaptive (acquired) SP cells. B-CLL SP and non-SP cell dynamics We finally aimed at characterizing the dynamics of SP and nonSP populations in B-CLL. More precisely, we asked whether proliferating SP cells could refuel the main compartment of nonSP cells. B-CLL cells are inherently quiescent and their proliferation in vivo is a finely tuned process.25 In order to investigate the refuelling capacity of SP cells, we used the powerful proliferative trigger DSP30 (CpG-ODN) and IL-223,24 as a molecular tool to induce B-CLL proliferation in vitro. First, we tested the ability of this combination to induce proliferation of B-CLL SP cells. B-CLL cells loaded with carboxyfluorescein succinimidyl ester were induced to proliferate by DSP30 and IL-2. The cells were cultured in vitro for 7 days before measuring the division by flow cytometry in conjunction with detection of SP and non-SP fractions. This method enabled us to assess division through carboxyfluorescein succinimidyl ester dilution in both CD19 þ CD5 þ SP and non-SP cells from six B-CLL patients. As expected, the bulk of B-CLL cells, which is essentially composed of non-SP, proliferated vigorously on stimulation with DSP30 þ IL-2, whereas untreated cells did not divide at all. Most importantly, the stimulus had also triggered division of the SP cells (Figure 3a). Sorted SP cells (from n ¼ 3 B-CLL patients) were then induced to divide as above and then analyzed for SP phenotype after in vitro culture. After 7 days of stimulation, the phenotype of all samples of SP-sorted cells revealed both SP and non-SP cells (Figure 3b). Varying proportions of these compartments were observed with the different samples (non-SP median ¼ 15.9%, range: 4.25–29%), Leukemia suggesting that proliferating SP cells refuelled the non-SP compartment on division. Finally, once stimulated as above, the Fludarabine-induced SP cells were also able to regenerate non-SP cells (non-SP median ¼ 71%, range: 56,4–99%) (Figure 3c). Together these observations indicated that in B-CLL, both mitotic division and chemotherapeutic adaptive evolution can drive a bidirectional dynamics refuelling both SP and non-SP cell compartments. Discussion This study aimed at elucidating the cellular basis of B-CLL chemoresistance. Confirming a recent publication,22 here we reported the existence of few natural SP cells in virtually all B-CLL patients, which harbors phenotypic and cytogenetic hallmarks of the disease. Although they are chemoresistant, B-CLL SP cells are present in patients before any treatments. In our in vitro model, the SP phenotype appeared as an essential feature to survive drug treatment, making chemotherapy a potent screening for such cells. Indeed, B-CLL highly depleting therapies, inducing a massive cell death of the overall B-CLL population, selected exclusively for acquired and innate SP cells. Supporting this in vitro cellular pathway of B-CLL chemoresistance, most post-therapeutic samples, from patients either relapsing or showing an incomplete response, exhibit a high percentage of leukemic SP cells. Finally, both mitotic division of innate SP cells and chemotherapy-induced emergence of acquired SP cells are able to refuel both SP and non-SP cell compartments of the B-CLL disease. Three issues are raised by these findings. First, the stemness of cancer SP cells has long been debated,26 although this question had not been addressed in B-CLL so far. Here, the specific phenotype of B-CLL SP cells, which was formally validated by ABCG2 and BMI-1 expressions,20,27 was nevertheless quite incomplete as lacking typical cell surface markers of immaturity (for example, CD34, CD127).28 However, B-CLL is a malignant disease of phenotypically mature B cells, in which clonal progeny naturally lacks expression of immaturity antigens.25 Likewise, SP cells from other mature B-cell malignant hemopathies, such as multiple myeloma, also present phenotypes inherent to the differentiation status of their non-malignant counterpart.21 The increased level of CD38 expression, which here typified B-CLL SP cells from CD38 þ patients, is usually observed for highly proliferating B-CLL cells29 and correlates with a poor clinical outcome,30 supporting the view that B-CLL SP cells are important for progression of the disease. The fact that whether in vitro SP cells exposed to pertinent stimuli and microenvironmental cells31 actually undergo more mitosis than the bulk of quiescent B-CLL cells remains elusive, although likely. There is now a large amount of scientific evidence suggesting that the proliferating pool of B-CLL cells is localized into specialized structures in the lymph nodes called the proliferation centers. In this specific surrounding microenvironment, the B-CLL cells contained in the proliferation centers display high proliferative capacity (Ki67 þ ) and increased expression of antiapoptotic proteins.32 We are planning to investigate the SP phenotype of the leukemic cells present in the proliferation centers ‘feeding’ the B-CLL population in the peripheral blood. Demonstrating the leukemic-initiating activity of human B-CLL SP cells in vivo; however, for example, by regenerating the whole human disease in mice models xenografted with human SP cells still remains out of reach. Related experiments, Innate and acquired chemoresistant B-CLL SP cells E Gross et al 1889 Hoechst Blue a Day 7 + Fludarabine Day 7 Day 3 + Bendamustin Day 3 125 125 125 125 100 100 100 100 75 75 75 75 50 50 50 50 25 25 25 25 0.09% 98.73% 0.07% 25 50 75 100 125 25 50 75 100 125 25 50 75 100 125 Day 7 + Rituximab Day 7 250 250 200 200 150 150 100 100 50 95.05% 50 0.37% 0.17% 50 100 150 200 250 50 100 150 200 250 25 50 75 100 125 Hoechst Red b SP cells (%) 0.001 0.1 0.01 1 10 0.07 Day 7 *** Day 7 + 2μg/ml of Fludarabine 92.78 Day 3 0.07 ** Day 3 + 50μg/ml of Bendamustin 78.06 Day 7 0.13 Day 7 + 10μg/ml of Rituximab 0.33 e BMI-1 α-Tubulin Sorted non-SP cells + Fludarabine Day 7 250K 250K 200K 200K 150K 150K 100K 100K 50K 50K 0.0% 50 10 K 0K 15 0K 20 0 25 K 0K ABCG2 Hoechst Blue ud Fl SP Bu lk B- C ar LL ab in e Sorted Non-SP cells Day 7 99.90% Hoechst Red Percentage of SP cells d 50 10 K 0 15 K 0K 20 0K 25 0K c 100 100.00 Median Patients 10.00 1.00 0.10 0.01 Before therapy Post-therapy Figure 2 B-cell chronic lymphocytic leukemia (B-CLL) treatments select for acquired side population (SP) cells. B-CLL cells were either treated with 2 mg/ml of Fludarabine during 7 days or with 50 mg/ml of Bendamustin during 3 days or Rituximab 10 mg/ml during 7 days. (a) The dot plots show the representative SP phenotype of untreated versus drug treated of CD19 þ CD5 þ -gated B-CLL cells. (b) Histograms represent the mean percentage (±s.d.) of SP cells among the CD19 þ CD5 þ population in treated and untreated conditions. (Fludarabine n ¼ 18; Bendamustin n ¼ 7; Rituximab n ¼ 3) (**Po0.01 and ***Po0.005). (c) Western blot analysis of the chemoresistant B-CLL SP cells. After 7 days of treatment with Fludarabine (2 mg/ml), SP cells were sorted in order to exclude the 7-amino-actinomycin D-positive cells and the CD3 þ /CD56 þ cells, whereas bulk leukemic B cells were purified by magnetic sorting. Western blot analysis of ABCG2 and BMI-1 proteins represented on the cropped blots is representative of seven different experiments performed with seven distinct patients. a-Tubulin was used as a loading control. (d) The dot plot shows the representative SP phenotype of sorted non-SP cells cultivated 7 days in the presence or the absence of Fludarabine. This dot plot represents gated CD19 þ CD5 þ cells and is representative of the four different patients analyzed. (e) The results are reported as percentage of CD19/CD5-positive SP cells among CD19/CD5-positive total cells. Five patients were tested before and within 1 year after therapy. Horizontal bars indicated the median values. Table 2 therapy Patient no. Leukemic SP fraction of B-CLL patients before and after CD19+/CD5+ SP percentage before therapy 23 0.04 24 25 26 27 0.049 0.19 0.07 0.02 Therapy Fludarabine/ cyclophosphamide/ Rituximab Fludarabine/Campath Fludarabine Fludarabine/Rituximab Fludarabine/ cyclophosphamide/ Campath CD19+/CD5+ SP percentage after therapy 4.48 0.02 5.14 0.34 0.52 using drug-surviving cells, have successfully been performed for human lung cancer xenografts,33 but the human B-CLL dependence to local immune microenvironments for survival and growth cannot be met or adequately reconstituted in immunodeficient mice. New murine models deleted for miR-15a/16-1, which develop a B-CLL-like pathology,34 might represent a new option to fully validate the leukemic-initiating potential of B-CLL SP cells in vivo. Second, this study uncovered the heterogeneity of the SP compartment, by evidencing two distinct subsets of chemoresistant SP cells; the innate pool, which exists in patients before treatment, and its acquired counterpart, which differentiates on chemotherapeutic pressure. These compiled findings and the increased proportion of SP cells observed in post-therapeutic patients suggest that current therapeutic options are ineffective Leukemia Innate and acquired chemoresistant B-CLL SP cells E Gross et al 1890 DSP30 + IL-2 Non-treated 0.1% 750 Non-SP 200 Hoechst Blue 6 5 4 3 2 1 0 1000 250 500 250 150 0 2 10 100 SP 50 50 100 150 103 104 105 15 12.5 10 7.5 5 2.5 0 200 102 103 104 Sorted SP cells + DSP30/IL-2 Day 7 Sorted SP cells Day 0 Hoechst Blue 105 CFSE 250 250 200 200 150 150 100 100 50 50 100 29.6% 3 102 10 104 105 Hoechst Red 50 3 102 10 104 105 30 25 20 15 10 5 0 0% 250 84.3% 150 200 Non-SP: 29% 250 50 150 100 200 250 Hoechst Red Hoechst Blue DSP30 + IL-2 Fludarabine 7 days + 7 days of culture - + 250 250 200 200 150 150 0.1% 100 100 50 50 50 100 150 200 250 71% 50 100 150 200 250 Hoechst Red Figure 3 B-cell chronic lymphocytic leukemia (B-CLL) side population (SP) and non-SP cell population dynamics. (a) Proliferation of SP and non-SP compartments. DSP30 and interleukin (IL)-2-induced proliferation was assessed by carboxyfluorescein succinimidyl ester (CFSE) dilution for SP and non-SP cells. The B-CLL cells were CFSE labeled and then treated or not with 250 nM of DSP30 and 50 ng/ml of IL-2 during 7 days. The cells were then subjected to Hoechst 33342 and antibody stainings. CFSE dilution of both CD19 þ CD5 þ -gated non-SP (upper panel) and SP (lower panel) cells was determined for unstimulated (left panel) and stimulated cells (right panel) in terms of percentage of dividing cells. The fluorescent-activated cell sorting data shown are representative of six patients tested. (b) Non-SP cells generation from sorted SP cells. The left panel shows the SP phenotype of freshly sorted SP cells. The right panel shows the SP and non-SP cells after 7 days of culture in the presence of 250 nM of DSP30 and 50 ng/ml of IL-2. The data shown are representative of three SP-sorting experiments performed with three different patients. (c) Non-SP cells generation from Fludarabine-induced SP cells. The graphs show SP phenotype of CD19 þ CD5 þ -gated unstimulated and DSP30/ IL-2-stimulated Fludarabine-resistant cells. B-CLL cells were treated with Fludarabine 2 mg/ml during 7 days. Subsequently, B-CLL cells were washed and cultured for 7 days in the absence (left panel) or in the presence of DSP30 (250 nM) and IL-2 (50 mg/ml) (right panel), and subjected to Hoechst 33342 and anti-CD19/anti-CD5 stainings. The dot plot is representative of three experiments performed with three different patients. The Hoechst 33342-positive cells are outlined and expressed as a percentage of the total CD19 þ CD5 þ population. toward a significant fraction of leukemic cells. Large amount of literature have evidenced, as their first identification, the multiresistant potential of SP cells toward a wide spectrum of genotoxic insults such as ionizing radiation,35 anthracyclines derivatives8 and platinium.33 In complete accordance with our findings, ABCG2 ectopic expression has been shown to mediate Fludarabine resistance,36 and B-CLL SP cells have been shown to resist Fludarabine treatment.22 Our study is the first report which, to our knowledge, extends SP resistance to Bendamustin, Leukemia an alkylating agent, and Rituximab, a monoclonal antibody. Although we assume that the molecular basis of chemoresistance to Fludarabine and Bendamustin is relying on activity of ABC transporters, which efflux drugs and Hoechst 33342 dye,36 resistance to Rituximab rather involves additional drug-resistance mechanisms, such as the inhibition of the apoptotic process. This study also demonstrated that some non-SP may switch to SP under chemotherapy, generating what we referred here to as adaptive SP cells. Indeed, this presumably Innate and acquired chemoresistant B-CLL SP cells E Gross et al 1891 corresponds to the well-established, classical mode of chemotherapeutic resistance based on the upregulation of ABC transporters by cells escaping to apoptosis. Under such circumstances, the expression of ABCB1 mRNA was known to globally enhance among surviving cells7,37,38 by adaptation to the drug. From our above data, we now conclude that B-CLL chemoresistance not only relies on the mere upregulation of efflux pump by some evolving cells, but also involves the cellular heterogeneity reflected by both natural and acquired subsets of SP cells. Third, we uncover here a dynamics of B-CLL sub-populations regeneration susceptible to account for repetitive B-CLL posttherapeutic relapses. Untreated B-CLL patients comprise at diagnostic a bulk of circulating CLL cells composed of non-SP plus rare innate SP cells. Mitotic divisions of this bulk, either induced by DSP30/IL-2 in vitro or by physiological stimuli extrapolated in vivo,31 do self-perpetrate this heterogeneity observed in all patients. By contrast, chemotherapy massively destroys most non-SP cells and selects SP cells only, which are either innately resistant SP or newly adapted SP cells. Furthermore, the downstream proliferation of chemoresistant SP cells regenerates partially the non-SP compartment of the B-CLL disease. To conclude, this report pinpointed two SP cell subsets as critical determinants of B-CLL chemoresistance. Hence, future studies identifying means to eradicate these populations will bring significant progress to improve the efficiency of B-CLL therapy. Conflict of interest 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 The authors declare no conflict of interest. Acknowledgements We are grateful to the patients who participated in the study and their referring physicians. We thank Amandine Blanc, Emilie-Fleur Gautier, Catherine Trichard, Emilie Laprévotte, Cyril Broccardo, Julien Familiades and the cytometry platform of IFR150-BMT (Toulouse, France) for helpful discussion and technical assistance. Acknowledgements are also made to Cécile Demur and HIMIP (Hémopathies Inserm Midi-Pyrénées) for cellular banking. EG and AQM designed, performed research, analyzed, interpreted data and wrote the article. F-E L0 F-O designed research and collected data. MB and SS performed research, analyzed and interpreted data. LY provided patient’s samples. SK analyzed and interpreted data. JJF analyzed and interpreted data and wrote the article. GL designed research and wrote the article. This study was supported by grants from INSERM and Association Laurette Fugain (ALF/ N1 07–05). Emilie Gross is a recipient of a grant from le Ministère délégué à l’Enseignement Supérieur et à la Recherche and la Fondation pour la Recherche Médicale. Samar Kheirallah is a recipient of a grant from le Ministère délégué à l’Enseignement Supérieur et à la Recherche and l’Association pour la Recherche sur le Cancer. References 1 Montserrat E. Further progress in CLL therapy. Blood 2008; 112: 924–925. 2 Dighiero G, Hamblin TJ. Chronic lymphocytic leukaemia. Lancet 2008; 371: 1017–1029. 3 Castro JE, Sandoval-Sus J, Bole J, Rassenti L, Kipps TJ. Rituximab in combination with high-dose methylprednisolone for the treatment 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 of fludarabine refractory high-risk chronic lymphocytic leukemia. Leukemia 2008; 22: 2048–2053. Byrd JC, Lin TS, Grever MR. Treatment of relapsed chronic lymphocytic leukemia: old and new therapies. Semin Oncol 2006; 33: 210–219. Olsson A, Norberg M, Okvist A, Derkow K, Choudhury A, Tobin G et al. 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Nous démontrons que la chimiothérapie in vitro sélectionne exclusivement les cellules SP et que la pression exercée par le stress génotoxique induit une fraction des cellules non-SP à acquérir le phénotype SP, qui apparaît déterminant pour la survie. Sous stimulus prolifératif, les cellules SP innées et chimiorésistantes sont capables de reformer partiellement le compartiment majoritaire Hoechst positif non-SP. L’ensemble de ces données, chimiorésistance et potentiel prolifératif, tende à apporter des éléments de réponse sur la base cellulaire des rechutes de la LLC-B : les SP innées et acquises. 3.1 Caractérisation de la SP innée leucémique de la LLC-B 3.1.1 Universalité du phénotype SP, SP « physiologique » et SP leucémique Confirmant l’étude récente de Foster et al. (2010), notre étude démontre l’existence d’une SP chez tous les patients atteints de LLC-B jamais traités auparavant (162). L’universalité de la présence d’une SP (100%, n=22) sur l’ensemble des patients dans notre étude contrastant avec l’étude américaine (85%, n=21) ainsi que la variabilité de la fourchette des pourcentages de SP entre les deux études (0,01% à 0,39% vs 0,02% à 2,17%) peuvent être aisément attribuées aux stratégies de fenêtrage (notamment CD19+/CD5+ pour Foster et al. vs totaux dans notre étude), à l’appareillage, aux échantillons de patients et aux variantes de nos deux protocoles Hoechst (par exemple dans l’utilisation de l’iodium propidium (IP) à la place du 7-amino-actinomycin D (7AAD)). 104 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises Un point majeur de divergence entre nos deux études réside également dans la présence de cellules non-leucémiques capables d’effluer le Hoechst 33342 que nous retrouvons dans des échantillons de sang périphérique de patients. Bien que la SP des patients de l’étude américaine ne soit pas exclusivement leucémique en termes de phénotype (66%), Foster et collègues infirment l’hypothèse de l’existence d’une SP totale dans des échantillons de donneurs sains. Cependant, l’étude du phénotype SP dans des échantillons de moelle osseuse normales et issues de patients atteints de LAM démontre qu’il existe des SP des populations lymphocytaires matures T, B et NK (228). De même, Zhou et al. (2001), démontrent que l’expression du gène ABCG2, déterminant moléculaire du phénotype SP, n’est pas uniquement restreinte aux compartiments immatures et apparaît pour les cellules NK normales et les progéniteurs érythrocytaires (140). De façon similaire (résultats non montrés), nous observons une SP « normale » du sang périphérique de patients LLC-B qui contient de façon variable des cellules Hoechst négatives CD19-CD5+ (probablement d’origine T) et CD19-CD5-. Bien que le sang périphérique contienne une SP non-leucémique probablement physiologique, nous montrons par la détection d’anomalies chromosomiques spécifiques de la LLC-B et par phénotypage CD19+CD5+, CD19+Ig light chain+, CD19+CD23+ le statut leucémique d’une proportion non-négligeable des cellules de la SP. De fait, l’ensemble des études suivantes s’effectue sur la fraction CD19+CD5+ de la SP. Certaines études montrent une prévalence du compartiment SP dans les stades ou grades les plus avancés de cancers (151, 161). Cependant, aucune corrélation entre stade de la maladie, facteur pronostique, lymphocytose et proportion de SP n’a été formellement identifiée dans notre étude. 3.1.2 La surexpression du CD38 : relevance physiopathologique Afin de définir phénotypiquement la SP leucémique et d’identifier un marqueur membranaire exclusif et alternatif à l’exclusion du Hoechst, une pléiade de marqueurs de surface a été testé de façon comparative entre les compartiments CD19+CD5+ SP et non-SP. Dans cette recherche, nous observons qu’une augmentation de l’expression du CD38 marque le compartiment SP des patients CD38+. Dans la littérature clinique, il est clairement établi que l’expression de ce marqueur sur plus de 30% des cellules leucémiques est associée à un pronostic péjoratif et prédit une maladie progressive (229). 105 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises Le ligand du CD38 est la protéine CD31 qui marque la surface des cellules nurses, endothéliales et également des cellules de LLC-B (9, 230, 231). Probable reflet de sa valeur clinique défavorable, cette protéine marque au niveau du sang périphérique une population de cellules de LLC-B enrichie en cellules proliférantes (Ki-67+) (232) ou ayant récemment proliféré (cellules marquées aux 2H) (233). En plus d’un lien avec la prolifération des cellules de LLC-B, les cellules leucémiques CD38+ présentent un profil transcriptomique spécifique caractérisé par une surexpression de voies de signalisation impliquées dans la survie (VEGFR2, IL-1β, VEGF et Mcl-1) (234). L’expression du CD38 est plus élevée à la surface des cellules leucémiques nichées au niveau des microenvironnements spécifiques de la LLC-B (9, 235). De façon plus précise, le CD38 marque les cellules leucémiques contenues dans les centres de prolifération à proximité des cellules CD4+CD154+ (9, 236). De fait, l’axe CD38/CD31 permet un « nichage » (homing) des cellules LLC-B au niveau de microenvironnements riches en signaux prolifératifs et antiapoptotiques et son activation in vitro induit la prolifération et la différenciation des cellules leucémiques (237). Bien que l’impact biologique de cet axe pour la LLC-B est actuellement controversé (230), une étude récente démontre que la signature génétique de l’interaction CD38/CD31 touche des voies de signalisation impliquées dans la prolifération, la migration et le « homing » (238). L’ensemble de ces travaux conduit aujourd’hui à proposer la théorie globale selon laquelle l’expression du CD38 forte pendant les processus de prolifération au niveau des centres prolifératifs permet aux cellules un « nichage » au niveau de ces structures. La sorties des cellules ayant proliféré, vers le sang périphérique par un processus dépendent de CXCR4 (63) s’accompagnerait d’une perte progressive de l’expression du CD38. La valeur pronostique du CD38 réside, au sein de cette théorie, dans la prédiction que plus la proportion de cellules CD38+ dans le sang est élevée, plus le taux de renouvellement cellulaire et de prolifération au niveau des ganglions est intense. Dans ce contexte encore théorique, l’expression élevée du marqueur CD38 dans la SP leucémique amène à proposer deux hypothèses : (i) ces cellules ont subi des évènements prolifératifs plus intenses ou plus récents que leur homologue non-SP (ii) une activité de nichage au niveau des centres prolifératifs est plus forte pour les cellules SP. Néanmoins, il est important de considérer que l’ensemble de ces hypothèses ne reste valide que pour les patients CD38+ et que la significativité de l’augmentation de l’expression de ce marqueur reste à être confirmée. 106 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises 3.1.3 Statut mutationnel du BCR des cellules SP leucémiques En parallèle du CD38, le statut mutationnel du BCR est un facteur pronostique qui traduit deux histoires cellulaires et deux origines potentielles différentes. Bien que l’expérience du centre germinatif fasse débat dans l’explication de ces deux sous-types de LLC-B, l’étude du statut mutationnel et de la spécificité antigénique du BCR des cellules SP leucémiques issues de patients informerait sur la monoclonalité de cette population (même séquence IgVH) en comparaison avec la fraction non-SP. Sur la base de cette information, il serait alors possible d’émettre des hypothèses sur une histoire cellulaire et immunologique commune ou non aux deux populations, SP et non-SP. 3.2 La chimiothérapie permet de sélectionner les cellules SP leucémiques 3.2.1 Un enrichissement spectaculaire La chimiorésistance de la population SP est traduite par l’enrichissement exclusif de cette population après monochimiothérapie conduite in vitro. Deux agents chimiothérapeutiques distincts ont été testés : la Fludarabine (analogue de purines) et la Bendamustine (agent alkylant), les deux drogues résultant en un enrichissement exclusif du compartiment SP leucémique. Une telle concentration du potentiel chimiorésistant dans les seules cellules pourvues d’un phénotype SP n’a jamais été observée. En effet, l’étude de la chimiorésistance dans la littérature SP démontre généralement un enrichissement notable du compartiment SP avec cependant une nette persistance du compartiment non-SP (149, 161, 163). De même, l’étude américaine des cellules SP de la LLC-B démontre un enrichissement compris entre 2 et 22 fois avec des taux de SP ne dépassant pas les 0,22% après traitement à la Fludarabine (162). Cette divergence expérimentale s’explique par les différences fondamentales existant entre nos deux protocoles de traitement (dose et temps d’incubation). L’enrichissement que nous présentons dans ce manuscrit est sans précédent et offre une méthode alternative pour obtenir le compartiment chimiorésistant de la LLC-B pour une grande majorité des patients. En effet, quelques patients (n=2) se sont montrés réfractaires à cette tendance. Le seul patient démontrant une résistance croisée aux deux agents chimiothérapeutiques démontre un profil très atypique de son compartiment non-SP. En effet, pour ce patient, la disparition de la fraction non-SP est quasiment inexistante. 107 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises Le phénotype de la population leucémique non-SP est CD19+CD5+CD34+ et, mise en présence de cellules OP-9 (cellules médullaires murines) et d’IL-7, ces cellules leucémiques prolifèrent de façon significative (dilution du CFSE) (résultats non montrés). Bien que cet unique résultat reste en marge de la globalité des patients LLC-B, il apparaît que, dans certain cas exceptionnels, la chimiorésistance ne soit pas confinée au seul compartiment SP. Cependant, on notera que, ce soit via le phénotype Hoechst négatif ou la positivité du CD34, l’expression de la chimiorésistance dans la LLC-B est accompagnée de caractéristiques fonctionnelles ou phénotypiques d’immaturité. 3.2.2 Mécanismes moléculaires de la multi-résistance du compartiment SP Le mécanisme moléculaire à l’origine de cette chimiorésistance multiple apparaît instinctivement dépendant de l’activité d’efflux d’ABCG2. En effet, la Fludarabine est un substrat de la pompe ABCG2 (141). Cependant, la Bendamustin ne fait pas partie de la liste des substrats d’ABCG2 et la résistance des cellules SP n’a jamais été décrite pour ce composé chimiothérapeutique. Cependant, on ne peut pas exclure, qu’additionnellement aux mécanismes généraux d’efflux via ABCG2, les cellules SP de la LLC-B concentrent un arsenal de défenses impliqué dans la chimiorésistance tel que la présence d’enzymes détoxifiantes, la surexpression de protéines anti-apoptotiques ou une réponse amplifiée aux dommages à l’ADN. Dans cet esprit, nous avons étudié le potentiel recouvrement entre populations Hoechst- et ALDH+. L’ALDH est une enzyme impliquée dans la détoxification du Cyclophosphamide (239) qui est exprimée préférentiellement à des stades immatures de l’hématopoïèse (240). Cependant, il apparaît qu’au sein des cellules de LLC-B, l’ALDH présente une activité homogène sans permettre la définition d’un compartiment distinct caractérisé par de fort niveau d’activité d’ALDH (résultats non montrés). Outre l’efflux des drogues via ABCG2, la présence de mécanismes additionnels de résistance est supportée par la résistance des cellules SP aux radiations ionisantes (163) ainsi que nos données concernant la résistance au Rituximab. 108 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises 3.2.3 Mécanismes de résistance au Rituximab En présence de Rituximab, on obtient un enrichissement bien plus modeste directement lié à la mort cellulaire marginale que celui-ci entraîne sur l’ensemble des cellules leucémiques. L’explication moléculaire et cellulaire de la résistance au Rituximab dans ce test est plus discutable que pour la chimiorésistance induite par la Fludarabine ou la Bendamustine. En effet, le Rituximab dans nos tests in vitro, réalisés en l’absence de complément et en présence de cellules CD16+, est capable d’induire la mort des cellules leucémiques via l’ADCC et l’apoptose. L’induction directe d’apoptose par le Rituximab est faible dans la LLC-B, en partie à cause de la faible expression du CD20, déterminante dans l’effet direct du Rituximab, qui caractérise cette hémopathie maligne (226). L’ADCC, en revanche, est le mécanisme majeur d’action du Rituximab. Nos données d’enrichissement de la fraction SP par le Rituximab suggèrent que la SP est résistante à l’ensemble de ces deux mécanismes (ADCC et apoptose directe). On peut imaginer cependant, qu’en dehors des mécanismes d’inhibition de la mort qui peuvent être mis en jeu pour échapper à l’ADCC et à l’apoptose directe, la probabilité de rencontre entre cellules SP et cellules NK est nettement inférieure à celle d’une rencontre entre cellules non-SP et cellules NK. Ce mécanisme de résistance basé sur la rareté de la population SP est extrapolable in vivo et permet aux cellules SP d’être invisibles aux cellules immunitaires. 3.2.4 Relevance physiopathologique de la chimiorésistance des cellules SP L’ensemble de nos résultats fait état d’une résistance vis-à-vis d’agents thérapeutiques conventionnels de la LLC-B. En lien avec le gold standard thérapeutique de la LLC-B (FCR), l’action simultanée de ces trois drogues sur le phénotype Hoechst des cellules survivantes reste à être défini. Cependant, les résultats obtenus in vivo pour des patients traités l’année précédant l’analyse du phénotype SP, valident d’une part la résistance aux trois drogues et d’autre part l’ensemble du concept de l’importance de la SP dans les mécanismes cellulaires de chimiorésistance et de rechute post-thérapeutique. De façon similaire, l’étude de la LAM démontre une augmentation spectaculaire de la proportion de cellules SP dans les échantillons de patients en rechute ou résistants aux protocoles thérapeutiques (160). 109 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises 3.2.5 Mécanismes cellulaires de survie sous stress chimiothérapeutique Quelques soient les mécanismes moléculaires déterminants ces diverses résistances, les phénomènes cellulaires à l’origine de l’enrichissement post-chimiothérapie peuvent être expliqués de façon non-exhaustive par quatre hypothèses : (i) une éradication complète de la fraction non-SP, (ii) une éradication complète de la fraction non-SP combinée à une prolifération du compartiment SP, (iii) la survie des cellules SP et la conversion de cellules non-SP en cellules SP et (iv) l’unique conversion de cellules non-SP en cellules SP. La mort massive des cellules en culture démontre que l’enrichissement induit par les drogues provient en partie de la destruction sélective du compartiment non-SP. De plus, la survie préférentielle des cellules SP innées est en partie confirmée par les résultats de Foster et al. qui démontrent une induction inférieure de l’apoptose pour le compartiment SP, en présence de Fludarabine, en comparaison avec les cellules non-SP (162). Cependant, la démonstration formelle de la chimiorésistance de la SP innée ne peut être établie qu’en traitant les cellules SP innées triées avec la Fludarabine. Le nombre limité de cellules SP innées obtenues après tri rende ces expériences particulièrement difficiles. Dans le but d’infirmer ou de confirmer une conversion potentielle des cellules non-SP en cellules SP sous pression chimiothérapeutique conformément aux hypothèses (iii) et (iv), les cellules non-SP marquées au Hoechst 33342, de façon non-toxique, ont été purifiées et cultivées en présence de Fludarabine. On observe pour tous les patients testés, une conversion d’une proportion mineure de cellules non-SP en cellules SP sous pression chimiothérapeutique. Ce processus cellulaire d’acquisition de chimiorésistance n’a encore jamais été documenté au travers du phénotype SP. En conclusion, deux compartiments chimiorésistants co-existent dans la LLCB : les SP innées ou naturelles et les SP acquises ou adaptatives. 3.2.6 Bases moléculaires de l’acquisition du phénotype SP L’explication moléculaire de ce phénomène repose sur l’induction de l’expression et/ou de l’activité d’ABCG2 dans une sous-population privilégiée du compartiment non-SP. En effet, la chimiothérapie a le potentiel de réactiver épigénétiquement l’expression d’ABCG2 par déméthylation des séquences promotrices (241). 110 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises Une autre explication moléculaire réside dans l’étude récente de Liang et al. (2010) qui suggère que l’instabilité génomique inhérente des cancers et son amplification par stress génotoxiques permet d’accroître la proportion de cellules SP (242). Dans notre modèle, les deux composantes innées et acquises forment la SP chimiorésistante obtenue par traitement Fludarabine. La SP chimiorésistante surexprime les protéines ABCG2 et BMI-1. La surexpression d’ABCG2 au niveau protéique valide le phénotype Hoechst 33342 négatif. La surexpression de BMI-1, une protéine impliquée dans la maintenance de l’état d’immaturité des compartiments primitifs de l’hématopoïèse tend à suggérer le statut immature des cellules SP de la LLC-B. Dans la littérature SP, la surexpression de BMI-1 est une caractéristique des cellules SP issues de cancers épidermoïdes oraux (243), du cancer de la vessie (244) et du cancer de l’œsophage (245). Peu d’articles reporte une implication de cette protéine dans des mécanismes de chimiorésistance. Cependant dans le mésotheliome, les protéines BMI-1 et ABCG2 confèrent une chimioresistance vis-à-vis du Cisplatine et du Premetrexed dans des contextes cancéreux uniquement (246). Afin de déterminer si les surexpressions protéiques d’ABCG2 et de BMI-1 sont des caractéristiques intrinsèques de la SP leucémique et non l’effet du choc chimiothérapeutique, l’expression des gènes BMI-1 et ABCG2 au sein des SP innées a été quantifiée par QPCR. Aucune augmentation de l’ARN messager de ces deux protéines d’intérêt n’a été révélée dans ces expériences (résultats non montrés). Il est concevable que la SP innée ne surexprime pas la protéine ABCG2, dont il est fondamental de dissocier expression et activité (153). Dans ce sens, l’étude de Foster nous informe sur une hétérogénéité de l’expression d’ABCG2 par les cellules SP issues de différents patients LLC-B, certains présentant une expression faible de la pompe (162). Au-delà d’une régulation post-transcriptionnelle et post-traductionnelle d’ABCG2, la possibilité d’une régulation dépendante de l’action des drogues reste envisageable conformément aux travaux précédemment cités (241). Pour BMI-1, la thèse d’un effet dépendant de la chimiothérapie est également recevable. Néanmoins, l’exemple de la LMC montre qu’en présence de niveau de transcrits équivalent aux différents stades de la maladie, une régulation post-transcriptionnelle s’opère et entraîne une surexpression de la protéine à certains stades (247). Enfin, bien que l’acquisition de la protéine ABCG2 soit le mécanisme potentiel prédominant de la conversion non-SP en cellules SP, il est concevable que l’acquisition de BMI-1 par la pression thérapeutique participe à la conversion des cellules non-SP. 111 RESULTATS ET DISCUSSION : La base cellulaire de la chimiorésistance de la LLC-B repose sur l’existence de cellules SP innées et acquises Cependant, l’action de BMI-1, majoritairement activatrice de la prolifération dans les contextes cancéreux (119, 132, 133), suggère que l’activation de son expression permet un maintien et une régénération de la progénie leucémique après chimiothérapie (121). 3.3 La prolifération permet aux cellules SP de générer des cellules non-SP Afin de tester la capacité de la population SP innée et induite par la Fludarabine à régénérer le « bulk » leucémique, différents stimuli ont été testés tels que TPA/IL-2, antiCD38/IL-2, CD40L/IL-2, DSP30/IL-2 et IgM/LPS (lipopolysacharride). Le plus puissant et efficace, en termes de nombre de patients répondeurs mais également le plus éloigné de la physiopathologie de la maladie est le DSP30 (CpG-ODN) combiné à l’IL-2. Cette combinaison permet aux cellules de LLC-B de proliférer par induction de voies de signalisation de danger dépendantes de l’engagement du TLR9 (Toll-like-réceptor) (248, 249). Dans la pathogenèse LLC-B, la prolifération des cellules leucémiques est finement régulée par un microenvironnement spécifique et intervient au niveau des centres de prolifération qui concentrent les signaux moléculaires et les acteurs cellulaires nécessaires à la division. Par ce stimulus DSP30/IL-2, totalement artificiel, nous observons la capacité des cellules SP innées et chimiorésistantes à générer des cellules Hoechst 33342 positives. Afin de ne pas écarter la possibilité qu’une fraction de cellules d’intérêt puisse être contenue dans le compartiment non-SP, la fraction non-SP purifiée a été soumise au stimulus prolifératif DSP30/IL-2. Cependant, bien que la concentration de Hoechst 33342 contenue dans les cellules ne soit pas toxique, il n’a pas été possible de conclure sur la capacité des cellules nonSP à régénérer le compartiment SP par division mitotique en raison d’un blocage du cycle induit par la présence de Hoechst 33342 dans les cellules. L’ensemble de ces résultats démontre une nouvelle hétérogénéité cellulaire de la LLCB. Cette hétérogénéité combinant phénotype SP et chimiorésistance apparaît être impliquée dans les évènements cellulaires à l’origine des rechutes post-thérapeutiques de la LLC-B. Bien que le potentiel initiateur de leucémie de ce compartiment reste à être prouvé scientifiquement au moyen de modèles murins, cette étude souligne l’intérêt du ciblage thérapeutique de ce compartiment leucémique chimiorésistant. 112 « Ce n'est pas dans la science qu'est le bonheur, mais dans l'acquisition de la science » Edgar Allan Poe - Le Pouvoir des mots DISCUSSION GENERALE DISCUSSION GENERALE DISCUSSION GENERALE La LLC-B est une maladie incurable. La base cellulaire de cette incurabilité réside dans l’apparition constante de rechutes après traitement. Ce constat clinique traduit l’inefficience des thérapies à éradiquer de façon exhaustive une fraction non-négligeable et chimiorésistante du clone leucémique. Une meilleure compréhension des mécanismes cellulaires et moléculaires qui permettent la résurgence du clone leucémique post-thérapie est essentielle à l’élaboration de thérapies indépendantes de l’action cytotoxique des chimiothérapies. Les données accumulées sur la chimiorésistance (acquise et innée) exclusive des cellules SP de la LLC-B in vitro et leur forte persistance in vivo post-thérapie suggèrent l’implication des cellules SP dans les phénomènes de régénération du clone leucémique après traitements. Une ébauche des capacités de repeuplement de cette population uniquement sanguine a été effectuée en présence d’un stimulus prolifératif artificiel éloigné de la physiopathologie de la LLC-B. En effet, la prolifération des cellules de LLC-B se déroule dans un microenvironnement ganglionnaire spécifique au sein de structures particulières que sont les centres de prolifération. Afin de replacer ces données de régénération dans des modèles les plus proches possibles de la physiopathologie, l’enjeu serait de reconstituer in vitro l’environnement ganglionnaire des cellules de LLC-B, tel qu’il l’est décrit dans les publications de Plander et al. (2009) et de Kater et al. (2004) (45, 87). Dans ces systèmes de prolifération plus « physiopathologiques », la prolifération des cellules SP ainsi que leur capacité à générer des cellules non-SP pourraient être définies. De plus, l’impact de ce microenvironnement sur la conversion des cellules non-SP en cellules SP pourrait être également étudié et permettrait de répondre à la question du rôle de la pression microenvironnementale dans la modification du phénotype des cellules de passage au niveau des ganglions. Enfin, l’étude d’échantillons ganglionnaires de patients LLC-B, qui fait l’objet d’un projet collaboratif au sein du laboratoire, combinée à l’étude du sang périphérique de ces mêmes patients permettra de définir la proportion de cellules leucémiques pourvues d’un phénotype SP au niveau de ces structures réservoirs de la maladie. Ces expériences permettront de replacer l’importance du phénotype SP non seulement dans la prolifération post-thérapeutique mais également dans l’ensemble de la physiopathologie de la maladie qui permet l’expansion du clone leucémique. De fait, se pose la question : les cellules SP de la LLC-B peuvent-elles représenter le compartiment initiateur de leucémie de la LLC-B ? 113 DISCUSSION GENERALE Trois données majeures de nos travaux tendent à indiquer que la SP de la LLC-B correspond à un compartiment immature de la maladie : le phénotype Hoechst négatif, la chimiorésistance exclusive et multiple, et la surexpression de BMI-1. Afin de valider cette hypothèse de hiérarchisation du clone leucémique, il est nécessaire d’établir le potentiel initiateur de leucémie de la population SP par transplantations sérielles dans des modèles murins. Cependant, la quiescence des cellules de LLC-B et leur dépendance aux composants du microenvironnement font que les modèles de xénogreffe de cellules de LLC-B restent peu accessibles techniquement. Le modèle développé par l’équipe de N. Chiorazzi qui requiert l’injection combinée de cellules du microenvironnement et d’une grande quantité de cellules leucémiques apparaît comme le plus pertinent pour la recherche de cellules initiatrices de LLC-B (47). Une option alternative aux modèles de xénogreffe réside dans les modèles transgéniques tels que les souris Eµ-TCL1, NZB ou encore les MDR-/- et miR-15a/16-1 -/- récemment développées. Cette stratégie requiert d’effectuer une étude complète du phénotype SP dans ces modèles de pathogenèse qui ne reflètent que partiellement l’oncogenèse LLC-B humaine. Une fois l’existence de cellules SP avérée dans ces modèles murins, le potentiel initiateur de leucémies des cellules SP sera déterminé par transplantations sérielles dans des souris syngéniques de même fond génétique. Ce protocole expérimental est valide avec les cellules leucémiques issues de souris Eµ-TCL1 qui lorsque qu’injectées à des souris syngéniques engendrent le développement d’une leucémie létale (250). Il est néanmoins possible qu’il n’existe pas de compartiment initiateur dans les modèles murins de pathogenèse LLC-B, de façon similaire à l’étude controversant l’hypothèse des cellules souches dans des modèles murins de lymphomes B (Eµ -myc) et T (Eµ-N-RAS) ainsi que de LAM (PU.1-/-) (125). Même si pour l’exemple de la transplantation de cellules leucémiques issues des souris Eµ-TCL1, les cellules proviennent uniquement de compartiments prolifératifs tels que la rate et les ganglions, on ne peut pas exclure la possibilité d’une équipotence, contrastant avec l’hétérogénéité, en termes d’initiation de LLC-B qui ne reflète pas la leucémogenèse humaine. Bien que l’étude du potentiel initiateur de la maladie soit essentielle dans la démonstration de l’importance de la fraction SP de la LLC-B, une question fondamentale persiste : la SP estelle une cause ou une conséquence de la carcinogenèse ? Plus précisément, la population SP est-elle à l’origine de la maladie ou est ce que son occurrence reflète une petite proportion du clone formée post-transformation leucémique pour assurer la pérennité de l’expansion cancéreuse dans des conditions de stress comme l’expérience de la chimiothérapie. 114 DISCUSSION GENERALE Une expérience potentielle pour répondre à cette question pourrait l’étude du phénotype Hoechst de la MBL, le stade pré-leucémique de la LLC-B. Cependant, il reste possible que l’acquisition du potentiel de chimiorésistance traduit par le phénotype SP soit dépendante du processus de transformation leucémique. Notre étude révèle une hétérogénéité de la LLC-B basée sur le phénotype SP, une population connue dans la littérature pour être enrichie en cellules initiatrices de cancer. De plus, la chimiothérapie permet de sélectionner cette population, initialement représentée de façon infime, dans un processus qui comprend l’induction du phénotype SP sous stress génotoxique. Dans des concepts plus globaux de hiérarchisation du cancer, la chimiorésistance est une caractéristique fondamentale des cellules initiatrices de cancer. Certains exemples dans la littérature utilisent cette propriété de chimiorésistance pour démasquer la fraction souche de lignées cancéreuses hétérogènes. De fait, un variant tumorigénique de la lignée de cancer du sein SK-BR3 a été généré par passages sériels de la lignée parentale dans des souris NOD-SCID traitées à l’Epirubicin (251). De même, Levina et collègues (2008) dans une étude très élégante démontre, dans un modèle de cancer du poumon, que les cellules survivantes à une thérapie – drug surviving cells (DSC) - (trithérapie composée de Doxorubicin, Etoposide et de Cisplatine) récapitulent toutes les caractéristiques inhérentes aux cellules souches cancéreuses (149). De façon analogue à la pression chimiothérapeutique, les conditions extrêmes de survie telles que l’absence de sérum et l’hypoxie permettent de sélectionner cette composante souche des cancers (127). Cependant, à l’instar de nos résultats sur l’acquisition du phénotype SP sous chimiothérapie, se soulèvent les questions suivantes : Dans quelle mesure favorisons-nous la « dédifférenciation » des cellules ? Ce potentiel de « dédifférenciation » est t-il contenu dans l’ensemble des cellules ou uniquement confiné à une élite présentant une plasticité génomique aux stress ? Ce potentiel de « dédifférenciation » ou d’immaturité dans la carcinogenèse peut-il exister de façon inhérente, en l’absence de stress, dans des populations cancéreuses matures ? La LLC-B est une maladie du compartiment mature de la lymphopoïèse B, aussi est-il plutôt atypique de concevoir un compartiment immature au sein d’une population déjà avancée dans la différenciation. Supportant ce fait, les marqueurs canoniques d’immaturité tels que le CD34 et le CD127 n’ont pas été retrouvés à la surface des cellules SP leucémiques (résultats non montrés). 115 DISCUSSION GENERALE Similairement, l’étude menée par Matsui et al. démontre que pour le Myélome Multiple, correspondant à la transformation néoplasique du stade final de la lymphopoïèse B, les cellules initiatrices de cette hémopathie présentent le phénotype « immature » CD138- (150). En effet, l’expression du CD138 est acquise lors du stade terminal de différenciation et caractérise les cellules du Myélome multiple. Ces cellules initiatrices de Myelome Multiple présentent également un phénotype CD20+ CD27+, associé à des stades plus précoces mais mature de la lymphopoïèse B. Ce phénotype récurrent dans la recherche de cellules initiatrices d’hémopathies B matures caractérise les cellules B mémoires (252, 253). De fait, l’autorenouvellement des cellules mémoires B et T est une caractéristique unique du système immunitaire adaptatif qui permet la maintient de l’immunité tout au long de la vie d’un individu (254). En effet, contrastant avec les systèmes neuronaux et myéloïde de hiérarchisation cellulaire où l’auto-renouvellement est restreint au seul compartiment primitif, l’auto-renouvellement est maintenu à des stades multiples dans la lymphopoïèse B afin de permettre la génération de clones produisant des anticorps pourvus de la plus haute affinité. Supportant cette thèse, les cellules T mémoires sont capables de division asymétrique (255) et les cellules B et T mémoires partagent avec les cellules souches hématopoïétiques une signature moléculaire commune impliquée dans l’auto-renouvellement (256). Concernant le modèle LLC-B qui est caractérisé par une positivité du marqueur CD27 (53), de plus en plus d’éléments scientifiques démontrent que les cellules de LLC-B Ig-NM et Ig-M pourraient être issues de la transformation leucémique de cellules B mémoires, dotées d’une capacité d’autorenouvellement (2, 257). De plus, en faveur de la cellule SP initiatrice, BMI-1 apparaît comme étant un trait de la signature moléculaire commune entre les cellules B mémoires et les cellules souches hématopoïétiques (256). Il est donc possible d’émettre la thèse, qu’une population initiatrice B mémoire, initialement dotée d’une capacité d’auto-renouvellement inhérente à sa fonction immunologique et soumise à une stimulation antigénique chronique, soit le précurseur de la LLC-B. La théorie de compartiments initiateurs, pourvus de fonctions primitives, au sein de compartiments B matures peut être également expliquée par les concepts récents de reprogrammation cellulaire. En effet, les lymphocytes B présentent une grande plasticité, traduite par une capacité de reprogrammation. 116 DISCUSSION GENERALE Cette capacité de reprogrammation, induite ex vivo, soit par l’expression ectopique de protéines impliquées dans la pluripotence (Oct4, Sox2, Klf4 et c-myc) soit par l’inhibition du garant du lignage B (Pax5), engendre une « dédifférenciation » de ces lymphocytes B vers respectivement la pluripotence ou un stade progéniteur capable de générer des cellules T (258, 259). Si l’occurrence de ces concepts de reprogrammation cellulaire à partir de stades matures n’est toujours pas avérée dans des cas de physiologie normale ou de carcinogenèse, il l’est cependant au niveau des compartiments progéniteurs de l’hématopoïèse (121, 260). Néanmoins, l’étude de l’inactivation de pax5 démontre l’apparition de lymphomes agressifs présentant un phénotype immature. Bien que dans notre étude l’implication du gène pax5 soit écartée puisque l’on conserve l’identité B dans la population SP, il est possible que l’inactivation ou l’activation de certains gènes durant le processus de transformation leucémique conduise à une reprogrammation partielle des lymphocytes qui acquièrent un phénotype plus immature et plus résistant. Dans cette logique, l’expression de BMI-1 pourrait être garante de l’état d’immaturité associé à la chimiorésistance des cellules SP de la LLC-B. L’inactivation des trois gènes cibles de BMI-1 (p16ink4a, p19Arf, Trp53) conduit des progéniteurs multipotents à acquérir une capacité de régénération de l’hématopoïèse à long terme (121). De façon très spéculative, l’hétérogénéité de l’expression de BMI-1, reflétée par une surexpression de celle-ci dans la population SP, est potentiellement indicative de son potentiel à générer le clone leucémique ou encore d’une activité de reprogrammation cellulaire. En résumé, bien que la capacité initiatrice de la population SP LLC-B soit loin d’être démontrée, sa chimiorésistance ainsi que son potentiel à régénérer le compartiment non-SP soulignent l’intérêt de son ciblage thérapeutique de façon indépendante de l’usage de la chimiothérapie. Le potentiel de certaines immunothérapies à participer à l’éradication de la fraction SP a été en partie étudié dans la LLC-B (162, 261). Par stratégie de vaccination de cellules leucémiques LLC-B modifiées pour exprimer le CD40L et l’IL-2, les auteurs démontrent une diminution de la SP dans la circulation sanguine, dont la réémergence rapide est dépendante du déclin de l’immunité T. De plus, des stratégies de vaccination plus spécifiques semblent être envisageables car les cellules SP stimulées par le CD40L expriment de façon différentielle certains antigènes tumoraux dont RHAMM (Receptor for hyaluronan-mediated motility). 117 DISCUSSION GENERALE Enfin, cette stratégie thérapeutique démontre à l’occasion d’un « short report » (261), l’éradication du compartiment SP suivie d’une disparition progressive du compartiment nonSP d’un patient LLC-B présentant un stade leucémique avancé. Cependant, le double rôle du CD40L dans les phases de prolifération/survie des cellules leucémiques n’est pas dénué d’un risque d’expansions leucémiques aggravantes (46). La spécificité de l’immunothérapie T (dépendante d’une expression cellulaire potentiellement hétérogène), l’ensemble des mécanismes d’ « immunoediting » qui couvre l’expression antigénique ( cf. introduction paragraphe § III 2.1.2 ), la rareté des cellules SP (qui compromettent les probabilités de synapse immunologique) et l’immunodéficience T CD8 dans la LLC-B (179) dictent le besoin d’alternatives immunothérapeutiques plus globales (indépendante des CPA et des signaux co-stimulateurs). Dans ce contexte, plusieurs stratégies d’immunociblage de cette population SP indépendamment de la fonction T cytotoxique peuvent être envisagées. Dans un premier temps, il apparaît essentiel d’identifier des cibles moléculaires spécifiques au travers de la définition du transcriptome complet des populations SP innée et chimiorésistante, en comparaison avec le transcriptome de la population non-SP. Une telle approche avec une attention particulière, au moment de l’interprétation, sur les marqueurs de surface permettra potentiellement de définir des anticorps spécifiques de cette population. La génération d’anticorps thérapeutiques, dont l’épitope serait restreint exclusivement aux SP leucémiques, pourrait permettre une éradication de cette population chimiorésistante, de façon alternative à la chimiothérapie. Cette stratégie d’identification s’est avérée efficace pour définir des cibles thérapeutiques des cellules initiatrices de mélanomes malins (anti-ABCB5) (145) et de Myélome Multiple (anti-CD20, Rituximab) (150). Le cas du mélanome malin montre que le ciblage par anticorps anti-ABCB5 réduit considérablement la formation de tumeurs et le volume tumoral dans des modèles murins de xénogreffe. Outre l’identification de nouvelles cibles, il est possible à l’instar de nos travaux sur la reconstitution immunitaire post-FCR de définir des stratégies efficaces, indépendantes de l’apport de nouveaux outils thérapeutiques spécifiques du compartiment SP. En effet, l’impact du Rituximab sur la population SP n’a été testé que dans un contexte où l’ensemble du clone leucémique était présent. En plus de l’inhérente déficience des fonctions NK dans la LLC-B, la rareté des cellules SP a pu constituer un mécanisme efficace d’échappement à l’action de l’anticorps monoclonal. 118 DISCUSSION GENERALE Cependant, si on extrapole in vivo nos données d’enrichissement, le fait que la chimiothérapie démasque et sélectionne exclusivement les cellules SP constitue potentiellement l’étape requise à l’efficacité d’une stratégie d’immunothérapie par Rituximab. De plus, la modification de l’immunogénicité des cellules survivantes au choc chimiothérapeutique dans des lignées cellulaires de leucémie (262) combinée à la résistance des cellules NK post-traitement que nous reportons, suggère la possibilité d’une réponse immunitaire NK anti-SP. Cependant, l’existence et l’efficacité d’un tel contrôle immunologique des cellules LLC-B survivantes post-chimiothérapie par les cellules NK sont infirmées par la constance du phénomène de rechute qui caractérise la LLC-B. Supportant cette hypothèse, la reconstitution d’un environnement immunosélectif post-thérapie, potentiellement par la reconstitution des cellules CD4+, semble être un pré-requis à la réémergence du clone leucémique. L’enjeu des stratégies d’immunociblage réside ici dans l’identification et l’inhibition des mécanismes d’immunosubversion et d’ « immunoediting » spécifiques de la population leucémique résurgente et de son microenvironnement protumoral (cellules CD4+). De même, il est possible que, lors de la chimiothérapie, certaines cellules échappent aux stress en migrant au sein de niches, fournissant des signaux antiapoptotiques et immunosubversifs, et inhibant le recrutement des cellules effectrices de l’activité anti-tumorale. L’identification des dialogues cellulaires et des processus de recrutement des cellules leucémiques et des cellules de la surveillance anti-tumorale au sein de ces niches chimiorésistantes, est donc essentielle pour cibler cette stratégie de résistance extrinsèque. A cette fin, l’utilisation d’anticorps bloquant les interactions entre cellules initiatrices et microenvironnement a démontré une efficacité dans la LAM (anti-CD44) (127). Enfin, les ratios effecteurs/cibles en faveur des populations effectrices NK obtenus post-FCR, la restauration des compétences cytotoxiques NK et la présence accrue de cellules SP chimiorésistantes après thérapie préludent le potentiel thérapeutique de stratégies d’immunomodulation de la fonction NK post-thérapie. Indépendamment des approches immunothérapeutiques, les signaux, engageant la différenciation des cellules initiatrices avec perte des fonctions inhérentes à leur statut (chimiorésistance, quiescence, auto-renouvellement), offrent une alternative thérapeutique récemment explorée. En effet, les cytokines différenciantes, telles que l’IFN-α dans la LMC, ouvrent de nouvelles perspectives thérapeutiques (227) dans l’inhibition du potentiel immature et le ciblage des populations différenciées par les thérapies conventionnelles. 119 DISCUSSION GENERALE CONCLUSION En conclusion, une nouvelle hétérogénéité potentiellement hiérarchique de la LLC-B a été découverte au cours de ces travaux via l’identification de la SP leucémique chimiorésistante. Cette nouvelle compréhension de l’hétérogénéité du clone leucémique tend à apporter des éléments de réponse sur la base cellulaire des rechutes post-thérapeutiques. Une nouvelle vision thérapeutique de la LLC-B, où cette hétérogénéité du clone leucémique est intégrée et utilisée, est suggérée dans l’ensemble des travaux de cette thèse. L’immunociblage par les cellules NK post-chimiothérapie, de cette population impliquée dans la rechute, apparaît être une option thérapeutique prometteuse au travers de la reconstitution et de la restauration des capacités cytotoxiques NK après thérapie. 120 « Le paradoxe de la science est qu'il n'y a qu'une réponse à ses méfaits et à ses périls : encore plus de science… » Romain Gary – Charge d’âme BIBLIOGRAPHIE BIBLIOGRAPHIE BIBLIOGRAPHIE 1. Hanahan D, Weinberg RA. The hallmarks of cancer. Cell 2000; 100: 57-70. 2. Zenz T, Mertens D, Kuppers R, Dohner H, Stilgenbauer S. From pathogenesis to treatment of chronic lymphocytic leukaemia. Nat Rev Cancer 2010 ; 10: 37-50. 3. Linet MS, Schubauer-Berigan MK, Weisenburger DD, et al. Chronic lymphocytic leukaemia: an overview of aetiology in light of recent developments in classification and pathogenesis. Br J Haematol 2007; 139: 672-86. 4. Dighiero G, Hamblin TJ. Chronic lymphocytic leukaemia. Lancet 2008; 371: 1017-29. 5. 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We review here the current literature which nevertheless suggests hierarchical organizations of the tumor clone for mostly incurable B-cell cancers such as multiple myeloma, lymphomas and B-chronic lymphocytic leukemia. We propose two models accounting for cancer stem cells in these contexts: a “top-to-bottom” clonal hierarchy from memory B-cells and a “bottom-to-top” model of clonal reprogramming. Selection pressure on the growing tumor can drive such reprogrammings and increase its genetic diversity. 135 ANNEXE Introduction Pioneer work by John Dick and Dominique Bonnet has initiated a new vision of carcinogenesis by demonstrating the hierarchy of the AML malignant clone [1]. By showing that AML comprised a minor immature compartment, whose properties recapitulate those of the normal hematopoietic stem cell (HSC), they demonstrated a new model of leukemogenesis and defined the first cancer stem cell. By analogy with hierarchical organization of hematopoiesis, this concept implies that a discrete fraction of cells with stem cell features (asymmetric division) is able to indefinitely sustain the malignant progeny through self-renewing and differenciation processes. Since this initial report in the mid 90’s, there has been a great enthusiam for this concept as evidenced by the number of identified “cancer stem cells” (CSC) in varied hematological and solid tumors (chronic myelogenous leukemia (CML), acute lymphoblastic leukemia (ALL), breast cancer, brain cancer, prostate cancer….). Methods to identify putative cancer stem cells were initially based on defining the immature phenotype of cancer-initiating cells. The variability of cell surface phenotypes in various conditions, as well as the lack of applicability in every malignant settings, led investigators to devise novel methods of identification based on stem cell properties [2]. The side population (SP) phenotype mediated by the activity of ABCG2, an ABC transporter involved in hematopoietic stem cell biology, and detected by efflux of the Hoechst 33342 dye defines “stem cell-like cells” with drug resistant potential [3-5]. Similarly, activity of ALDH, an enzyme involved in detoxification of a variety of compounds including active metabolites of cyclophophamide [6] and preferably expressed in primitive cell compartment [7], permits the identification of putative stem cell compartment [8, 9]. Although these methods allow definition of specific primitive cell compartments, definitive proof of cancer-initiating potential is provided by serially transplanting (self-renewal) these cells and recapitulating the initial cancer heterogeneity (differentiation) in xenografted or transgenic mice models. With the cancer stem cell concept, a new era of cancer therapy has emerged. The conventional therapies destroy differentiated cancer cells but leave intact the highly chemoresistant cancer stem cells. After eradication of the tumor progeny by therapy, the “cancer stem cells” able to switch on their mitotic division/differentiation program can drive the reemergence of the initial tumor heterogeneity [10]. Thus, full eradication of the malignant clone requires the integration of tumor heterogeneity for the design of efficient therapeutics. The cancer stem cell concept has been fully validated in AML, ALL and some solid cancers, since the cell that received the initial oncogenic hit was a stem cell itself in such pathologies. By definition indeed, no such stem cell exist in mature lymphopathies, even if long lasting, self renewing memory cells exist. So what should be the definition of a CSC? From a clinician viewpoint it is a cell that resists to all therapies and drives subsequent relapses, while a more formal definition implies a cell that is able to self-renew, migrate, differentiate and reconstitute the heterogeneity of the initial tumor. Since relapses are always part of the natural 136 ANNEXE history of low grade lymphomas and myeloma, these diseases involve stem cells according to the first definition, although scientific data that validating this conclusion based on the second definition are completely lacking. We chose to blunt the strict CSC definition to its more clinical version such as to take in account the evidences for cancer-initiating cells in hematopoietic B mature malignancies which are now emerging from the literature. Here we review and discuss the studies which support the CSC theory in multiple myeloma (MM), lymphomas and B-chronic lymphocytic leukemia (B-CLL) (Figure 1). Figure 1: B-cell malignancies and their progenitor cells Multiple Myeloma (MM) Along with elevated serum immunoglobulin and osteolytic bone disease, multiple myeloma (MM) is characterized by the clonal expansion and accumulation of mature and quiescent CD45CD138+ antibody secreting neoplasic plasma cells in the bone marrow. Despite initial clinical responses induced by a wide range of cytotoxic agents, MM remains incurable with almost constant reconstitution of the malignant clone after each therapeutic round. Such a clinical scenario is usually attributed to the underlying activity of CSCs. The hierarchy of an MM-stem cell whose progeny replenishes the MM clone was proposed long time ago [11, 12]. In these early works, malignant plasma cells derived from Balb/c mice with chronic peritoneal inflammation were engrafted in syngeneic animals with a tumorigenic cell frequency as low as ~1/1,000 cells. The self-renewal capacity of these MM-initiating cells was then formally demonstrated by their subsequent engraftment in secondary recipients. Thus the MM population was heterogeneous, as it encompassed both self-renewing, highly proliferative stem cells and their more 137 ANNEXE quiescent progeny [11-13]. A related clonogenic potential was uncovered in few MM cells from primary human MM samples [14]. When anti-MM-idiotype antibodies were used to detect a phenotypically distinct -more immature- compartment of proliferating MM B cells, they revealed its presence in both blood and bone marrow from patients with MM and monoclonal gammopathy of unknown significance (MGUS, a premyeloma state) [15]. The Ig gene rearrangements and chromosomal abnormalities of such clonotypic MM B-cells were characterized, together with the demonstration of their ability to differentiate into plasma cells in vitro [16-19]. In addition, MM cells are malignant counterparts of the terminal stage (CD138+) of B cell lymphopoiesis. Accumulating -yet controversed- evidences from studies with xenografted mice suggest that the MM-initiating cells are confined within a small CD19+CD138- subset differing from the CD20-CD138+ malignant bulk [20-22]. Further phenotypic definition of these clonotypic MM B cells delineated the myelomagenic potential to CD19+/CD138-/CD27+/CD20+ cells, a phenotype characteristic of memory B cells. Such CD138- cells displayed not only chemoresistance but also stem cell characteristics such as ALDH+ and SP phenotype, constitutive Hedgehog signaling and self-renewal in serially transplanted mice [23, 24]. Obviously, a highly specific targeting of this MM clonotypic B cell population is therefore likely to validate the CSC concept in MM, in addition to unveil new therapeutic options for this disease. B-Lymphomas The generic denomination of B-cell lymphoma encompasses a variety of entities (>70 in WHO classification) which pathogenesis relies on B-cell neoplasic transformation and accumulation within the lymphatic tissues. B-cell lymphomas are divided into Hodgkin lymphomas (HL) and Non-Hodgkin lymphomas (NHL), which consist in 30 different malignant entities. The most prevalent malignancies of this second group are Diffuse Large B cell lymphoma (DLBCL, 35%), Follicular Lymphoma (25%) and Mantle Cell Lymphoma (5-10%). The first formal evidence for lymphoma-initiating cells came from the detection of few transplantable lymphoma cells in mice [25]. Since then, the lymphoma stem cell hypothesis has remained largely unexplored in these diseases, although the following lines of evidence now suggest their existence in Hodgkin’s, Follicular and Mantle Cell lymphomas (see below). Hodgkin Lymphoma Hodgkin Lymphoma (HL) is a very unique cancer in which neoplasic cells (Hodgkin Reed-Sternberg / HRS cells) account for 0.1%-1% of the total cells in a biopsy. These morphologically atypical tumor cells from the hematopoietic B lineage express CD30 and CD15 and lack typical sIg markers of B-cell identity. However, their B-cell origin is evidenced by the occurrence of clonal Ig heavy chain gene rearrangement and somatic mutations [26]. As for MM, HL cell lines (L428 and KM-H2) comprise a 138 ANNEXE small fraction of B-cells harboring the CD20+ CD27+ memory phenotype as well as the ALDH activity involved in stemness [7]. When sorted, such CD20+ CD27+ memory B cells were able to durably generate HRS cells in vitro and they displayed high clonogenic and self-renewal potentials. Related clonotypic B-cells in peripheral blood samples from most HL patients were detected by light chain restriction among the CD27+ ALDHhigh cells [27]. Although these evidences suggest that clonotypic B cells could represent HL precursors, the lymphoma-initiating capacities of this B cell population remains to be formally proven. Follicular Lymphoma The hallmark of Follicular Lymphoma (FL) is the t(14;18) translocation which causes overexpression of the anti-apoptotic Bcl-2 gene. Although this chromosomal rearrangement constitutes a founding step for FL oncogenesis, additional molecular and cellular events are required for full blown malignant transformation. FL remains an incurable disease, with frequent relapses replenishing the initial tumor bulk after chemotherapies. As for HL, very few studies investigated a potential hierarchy in the FL clone. The first element concerning the cellular origin of FL is the presence of a pre-malignant cell subset in peripheral blood from healthy adults. This subset is composed of oligoclonal and long-lived normal B-cells which harbour the t(14;18) translocation and a CD27+IgD+ phenotype. Together with some unusual features of memory B cells (such as allelic paradox), these characteristics are typical of the FL genome and phenotype [28]. Little is known on the genesis of such premalignant clones, except that they progressively expand in farmers exposed to pesticides epidemiologically linked to NHL [29]. Investigations of this atypical “memory-like” and pre-malignant FL seed in murine models are nevertheless required to validate its FL stemness. The second element suggesting a FL hierarchy is the persistence of a t(14;18)+ cell subset in lymph nodes from most FL patients in remission [30]. In line with the clinical course of FL, these remission-relapses episodes might thus reflect post-therapeutic replenishment of the malignant clone. Whether the t(14;18)+ cell persistence is mediated by intrinsic chemoresistance (due to stemness features such as ALDH+ and SP+) or by environment-mediated drug resistance remains controversial. In favor of the intrinsic chemoresistance however, preliminary data revealed that some FL cell lines and biopsies displayed an ABCG2+ SP+ subset that was highly chemoresistant to gemcitabine [31]. In conclusion, the hierarchy concept is still in its infancy for FL, and many scientific evidences are still lacking to formally validate this hypothesis. They comprise, inter alia, the characterization of the stemness signature of the pre-FL cell population and the identification of second hits leading to FL pathogenesis. 139 ANNEXE Mantle Cell Lymphoma Mantle Cell Lymphoma (MCL) is characterized by the expansion of neoplastic CD5+, cyclin D1+ (due to a t(11;14) translocation) cells which accumulate in the lymph nodes, bone marrow, spleen, gastrointestinal tract and to a lesser extent in blood. The sole report suggesting a hierarchical organization of the MCL clone described SP cells in (IL14α x c-Myc) double transgenic mice which developed MCL. The surprisingly large MCL SP compartment in this model exhibited both cytogenetic hallmarks and stemness features of MCL . These stem cell characteristics included longer telomeres, clonogenic potential and MCL-initiating capacities in xenografted mice [32]. To fully extrapolate this concept to the pathogenesis of human MCL however, it remains to be validated in MCL biopsies. Chronic Lymphocytic Leukemia B-cell Chronic Lymphocytic Leukemia (B-CLL) is characterized by the clonal expansion and accumulation of CD19+ CD5+ malignant -though quiescent- lymphocytes in the blood, the bone marrow and the lymphoid tissues. Accumulating evidences suggest that the proliferative compartment of this malignancy resides in specialized structures from lymphoid tissues called proliferation centres [33, 34]. This unique feature of B-CLL reflects its strong dependence to microenvironmental signals and precludes most classic mice models. Among the various factors involved in B-CLL prognosis, the mutational status of BCR defines two types of disease: B-CLL with mutated (associated with a good prognosis) or with unmutated Ig (associated with a poor prognosis) [35]. Although previous attempts to evidence the involvement of HSC in B-CLL have been refuted [36, 37], a hierarchical organization of the B-CLL leukemic clone remains to be validated [38]. In line with the CSC concept in B-CLL, this cancer remains incurable due to post-therapeutic re-emergence of the leukemic cell clone. As for MM and FL, this clinical evolution could result from a “B-CLL stem cell” clone with high drug-resistant and post-therapeutic replenishing potentials. This intraclonal heterogeneity of the B-CLL clone was tracked by monitoring its SP phenotype. We and others demonstrated the existence of few drug-resistant CD19+CD5+ SP cells in virtually all patients [39, 40]. Their identical cytogenetic abnormalities indicated that such SP were clonally related to the rest of the B-CLL cells. Furthermore, the post-therapeutic amplification of these SP suggested their implication in the relapse. Of note however, the chemotherapeutic pressure selected an evolutive conversion of some non-SP cells into SP cells over-expressing both ABCG2 and the stem cell marker BMI-1 [41]. These recent studies of the B-CLL disease uncovered an hitherto unattended heterogeneity of the leukemic clone regarding stem cell-like features such as the SP phenotype, multi drug resistance 140 ANNEXE and BMI-1 over-expression. Whether this heterogeneity is hierarchical remains to be determined, for example through investigation of the B-CLL-initiating potential of its SP fraction. Memory B cells : the usual suspects In search for cancer-initiating cells, memory B-cells are usual suspects for the pathogenesis of differenciated B-cell malignancies (MM, HL, FL, mutated B-CLL) [28, 34, 42] (Figure 1). Likewise, unmutated B CLL cells as well as MCL are orthopically related to long-lived and self-replenishing CD5+ murine cells [42]. Although self-renewal is confined to the primitive stem cell compartment in most tissues, adaptive immunity maintains life-long protection through self-renewal of memory B and T lymphocytes [43]. Supporting this parallel, memory T cells can undergo asymmetric division [44] and self-renewal programs represent a gene signature shared by memory B and T lymphocytes as well as by HSC [45]. Of note, BMI-1 over-expression is also shared by both memory B cells and HSC [45]. Here, we propose that memory B cells represent a cancer stem cell compartment in most mature B malignancies. These cells represent an expanded and self-renewing reservoir refueling tumor growth through a hierarchical paradigm matching the HSC concept in AML and CML. Transformation of the B-cell memory compartment by chromosomal translocation (for FL) and additional events (e.g. microenvironmental or chronic antigenic stimuli) [29, 34] might drive the generation of malignant progenies. In such a paradigm, the type of transforming molecular event targeting the same memory B cell might contribute to determine the various malignant entities produced (FL, CLL, HL, MM). Whether this “transformed” memory B cells possesses a drug-resistant phenotype remains to be demonstrated. We speculate that the stemness of memory cells involves their drug-resistance transcriptional programs. Molecular reprogramming Although consistent evidences tend to make memory B-cells good candidates for mature B CSC, accumulating data demonstrate the impressive plasticity of B-cell lineage differentiation. Illustrations of such reprogramming events in cancer are provided by AML and CML pathogenesis, where committed progenitors can acquire stem cell properties [46, 47]. Although the natural occurrence of such B-cell differentiation reprogramming has never been documented, the bioactivity of reprogramming transgenes has formally demonstrated the extraordinary plasticity of lymphocytes. Differentiated B cells were reprogrammed into macrophages upon introduction of CEBPα/β combined to extinguished expression of Pax5, a B-cell identity gene [48]. Furthermore, conditional mutant Pax5 gene triggered the retro-differentiation of mature B-cell into uncommitted lymphoid progenitors in mice. In addition to the development of immature and aggressive lymphoma, it also triggered an efficient Bto-T cell conversion when transplanted in mice lacking lymphoid cells [49]. Along studies of induced pluripotent stem cells (iPS), terminally differentiated B cells were reprogrammed to pluripotency 141 ANNEXE through ectopic expression of Oct4, Sox2, Klf4 and c-MYC in conjunction with interruption of B-specific transcriptional program by specific knockdown of Pax5 or exogenous expression of CEBPα/β [50]. Although the occurrence of reprogramming phenomenon in mature B cell lymphoma remains unknown, specific gene expression may confer stemness properties. This might occur during malignant progression or initiation, enabling the fraction of cancer-initiating cell to gain, independently of their inherent differentiation, self-renewal and replenishing activities. For instance, Bmi-1 overexpression could represent such a reprogramming event in B-CLL. Supporting this hypothesis, mimicking BMI-1 activity by deleting its target genes in multipotent progenitors allowed these cells to acquire a long-term hematopoietic repopulating ability that was otherwise the HSC compartment’s privilege [51]. In addition, the c-Myc oncogene, which is frequently deregulated in B-lymphoma, is also involved in controlling the balance between self-renewal and differenciation in HSC [52]. As a plausible proof of concept for the function of c-Myc in lymphoma stem cells, Eµ-MYC lymphoma cells were almost homogenously able to initiate lymphomas in transplantation experiments [53]. It is thus possible that c-Myc was a reprogramming factor which conferred stemness to the malignant cells in these mice. Conclusion The CSC concept established in AML has yielded a new understanding of carcinogenesis and relapses. The underlying mechanism was based on a hierarchical structure of the malignant clone from this highly primitive compartment of hematopoiesis. With malignancies of the differentiated B lymphocytes however, this concept still remains to be validated, although the lines of evidence reviewed here do support its validity. These studies recurrently point to the putative involvement of memory B cells as CSC in differentiated B-cell malignancies as diverse as NHL, MM, HL and CLL. Although in these diseases, the hierarchical model implies that CSC generates tumor heterogeneity through the developmental plasticity of memory B-cells, other models of tumor clone organization can also be proposed. We infer that cellular reprogramming can disrupt the initial clone pyramid and initiate the tumor in a reverse, “bottom-to-top” fashion. This does not necessarily refute the hierarchical paradigm of CSC, but rather requires a secondary, inducible “bottom-to-top” reprogramming of new clonal hierarchies. Although such “bottom-to-top” reprogramming has already been demonstrated for AML [54], the fludarabine-induced switch of some non-SP cells into SP cells in B-CLL [39] extends such a reprogramming plasticity to malignant mature B cells. This induced reprogramming might not be restricted to responses to chemotherapeutic exposure however, since different selective pressures usually edit oncogenesis and cancer progression. Immunity as well as hypoxia, competition for 142 ANNEXE metabolites, stromal support or cell migration (e.g. epithelial-mesenchymal transition) might also induce “bottom-to-top” reprogramming. Since most diagnosed cancers have already been exposed to these pressures for growth, reprogramming within the malignant clone is most likely to have occurred and yielded a heterogeneous and diversified cell progeny. However, classic (top-to-bottom) hierarchical reprogramming from the same upstream CSC is less prone to diversify this organization than reverse (bottom-to-top) reprogramming from daughter cells (Figure 2). Although recent reports yet support this concept [53], future studies from our and others laboratories will explore the pressure-induced reprogramming of highly differentiated cells into cancerinitiating cells within the context of mature B-cell lymphomas. Figure 2: models of clonal progenies in normal and malignant contexts. Note the difference between bottom to top models 1 and 2 is the target of the oncogenic hit. 143 ANNEXE References cited: 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22. Bonnet, D.; Dick, J. E., Human acute myeloid leukemia is organized as a hierarchy that originates from a primitive hematopoietic cell. Nat Med 1997, 3, 730-737. Quesenberry, P. 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B-cell Chronic Lymphocytic Leukemia (B-CLL) is defined by the clonal expansion and accumulation of malignant B lymphocytes in blood, bone marrow and lymph node compartments. This atypical cancer, characterized by peripheral blood accumulation of quiescent lymphocytes, displays a proliferative potential concentrated within the proliferative centers, in the lymph nodes. This unique feature of B-CLL renders elusive its leucemogenesis mechanisms and justifies the current lack of scientific evidences regarding hierarchy of the leukemic clone. In the clinic, the constant and invariable resurgence of the leukemic clone post-therapy makes B-CLL an incurable disease. Elucidation of the cellular heterogeneity mediating chemoresistance as well as the elaboration of novel therapeutic options are essential to eradicate durably the leukemic clone. As a result of the inherent inefficiency of current therapeutic regimens, immunotherapy constitutes a promising and alternative therapeutic approach. However, efficacy of immunotherapeutic strategies are highly dependant on preliminary disruption of immunosubversive dialogues between leukemic cells and actors of anti-tumor immunity. In this context, chemotherapy has the potential to reverse the immunoselection phenomenon engendered by tumor cells. In B-CLL, we show that, in addition to a selective survival of NK cells, the FCR protocol (Fludarabine Cyclophosphamide Rituximab) restores natural cytotoxic capacities of peripheral blood lymphocytes (PBL), which can be further enhanced by Rituximab implementation. Nevertheless, in the case of evolving minimal residual disease (MRD) characterized, here, by high CD4+ cells levels, NK function appeared inhibited, suggesting the occurrence of early immunoselective events post-therapy. Although immunological control of disease relapse remains an important parameter, unraveling the cellular heterogeneity that allows a specific leukemic population to escape cytotoxic effects of therapies, remains crucial. With the aim of uncovering this cellular basis of chemoresistance, we used the Side Population (SP) phenotype in order to define a new intra-clonal heterogeneity of B-CLL cells from peripheral blood. Present before therapy and amplified in post-therapeutic samples, the minor SP compartment recapitulates phenotypic and cytogenetic characteristics of the B-CLL clone. Furthermore, in vitro Fludarabine and Bendamustin treatments select exclusively leukemic cells harboring the SP phenotype. At the cell level, this enrichment involves partially the acquisition of the SP phenotype by a minor proportion of non-SP cells under chemotherapeutic pressure. Proliferation of sorted or chemotherapy-induced SP cells allow partial reconstitution of main non-SP compartment. These data suggest, with a non physiological proliferative trigger, the potential of SP cells to promote expansion of the leukemic clone post-therapy. In perspective, the favorable effector/target ratio post-therapy and the increased cytotoxic function of PBL combined to the chemoresistance strongly suggest the therapeutic potential of NK immunomodulation. 146 147 AUTEUR : GROSS Emilie LIEU ET DATE DE SOUTENANCE : Amphithéâtre de Télémédecine de Purpan, le 26 Octobre 2010 à 13h30 TITRE : Impact des composantes cellulaires de la Leucémie Lymphoïde Chronique de type B dans les rechutes post-thérapeutiques : de la Side Population leucémique chimiorésistante aux cellules immunitaires. SPECIALITE : CANCEROLOGIE DIRECTEUR DE THESE : Dr. QUILLET-MARY Anne MOTS-CLES : Leucémie Lymphoïde Chronique de type B, Side Population, Chimiorésistance, Reconstitution immunitaire. LABORATOIRE : U563, Centre de Physiopathologie de Toulouse Purpan, Equipe Immunité innée et hémopathies malignes. La Leucémie Lymphoïde Chronique de type B (LLC-B) est définie par l’expansion clonale de lymphocytes B malins de phénotype mature au niveau des compartiments sanguin, médullaire et ganglionnaire. Ce cancer atypique, caractérisé par l’accumulation sanguine de lymphocytes quiescents, présente un potentiel prolifératif concentré au niveau des ganglions dans la fraction leucémique des centres prolifératifs. Ces particularités uniques de la LLC-B rendent énigmatique son processus de leucémogenèse et justifient l’absence de preuves expérimentales concernant la hiérarchisation du clone LLC-B. Au niveau clinique, la résurgence constante et invariable du clone leucémique post-thérapie fait de la LLC-B une maladie incurable. La compréhension de l’hétérogénéité cellulaire à la base de la chimiorésistance et l’élaboration d’options thérapeutiques alternatives sont essentielles pour éradiquer durablement le clone leucémique. Devant l’inhérente inefficacité des protocoles thérapeutiques actuels, l’immunothérapie constitue une approche alternative et prometteuse. Cependant, l’efficience des stratégies d’immunothérapie est dépendante de la rupture préalable des dialogues immunosubversifs qui existent entre cellules leucémiques et acteurs de la surveillance anti-tumorale. Dans ce contexte, la chimiothérapie a le potentiel de reverser les phénomènes d’immunosélection mis en place par les cellules tumorales. Dans la LLC-B, nous montrons qu’en plus d’une survie privilégiée des populations NK, le protocole FCR (Fludarabine Cyclophosphamide Rituximab) restaure les capacités cytotoxiques naturelles des lymphocytes du sang périphérique (PBL), qui se retrouvent amplifiées par la présence de Rituximab. Néanmoins, en présence d’une maladie résiduelle évolutive caractérisée par un taux élevé de cellules CD4+, la fonction des cellules NK apparaît inhibée, laissant présager l’occurrence d’évènements immunosélectifs précoces post-thérapie. Bien que le contrôle immunologique des cellules en rechute constitue un paramètre important, l’élucidation de l’hétérogénéité cellulaire, qui permet à une population leucémique d’échapper à l’effet cytotoxique des thérapies, reste fondamentale. Afin d’étudier cette base cellulaire de la chimiorésistance, nous avons utilisé le phénotype Side Population (SP) pour définir une nouvelle hétérogénéité intra-clonale des cellules de LLC-B du sang périphérique. Présent avant thérapie et amplifié dans des échantillons post-thérapeutiques, le compartiment mineur SP récapitule les caractéristiques phénotypiques et cytogénétiques du clone leucémique. De plus, les traitements Fludarabine et Bendamustine in vitro permettent de sélectionner exclusivement les cellules pourvues d’un phénotype SP ABCG2+BMI-1+. Incidemment, cet enrichissement implique en partie l’acquisition du phénotype SP par une proportion mineure de cellules non-SP sous pression chimiothérapeutique. La prolifération du compartiment SP trié ou obtenu par sélection chimiothérapeutique permet la reconstitution partielle du compartiment majoritaire non-SP. Ces données suggèrent, à l’aide de conditions prolifératives non physiologiques, le potentiel des cellules SP à participer à l’expansion du clone leucémique post-thérapie. En perspective, le ratio effecteurs/cibles favorable post-thérapie ainsi que la restauration des fonctions cytotoxiques PBL combinés à la chimiorésistance de la fraction SP, suggèrent fortement le potentiel thérapeutique de l’immunomodulation NK.