2. Description des phénomènes mutuels
Les quatre satellites galiléens sont en orbites quasi coplanaires autour de Jupiter. Au cours de leur
rotation, il arrive (généralement à chaque tour) que ces satellites passent derrière la planète ou dans
l'ombre de celle-ci. Un observateur terrestre peut alors voir le satellite disparaître derrière Jupiter, ou bien
s'éteindre à côté de la planète. Ce sont les phénomènes classiques d'occultation et d'éclipse par la planète
elle-même ou son ombre. Des phénomènes analogues, entre satellites, peuvent également se produire,
mais de façon bien plus rare. Tous les six ans, nous voyons les orbites des satellites galiléens "par la
tranche". La Terre et le Soleil passent dans le plan des orbites : c'est alors que les phénomènes mutuels
peuvent se produire (cf. Note Technique PHEMU n°1). Il s'agit donc d'un alignement de deux satellites
avec le Soleil ou la Terre, selon qu'il s'agisse d'une éclipse ou d'une occultation mutuelle. Dans le premier
cas, un satellite pénètre dans l'ombre projetée par un autre satellite, et dans le deuxième cas, un satellite
passe derrière un autre satellite par rapport à un observateur terrestre.
3. Qu'observe-t-on pendant ces phénomènes ?
Avant une occultation mutuelle on peut observer un rapprochement apparent des deux satellites
concernés. Puis, à partir d'un instant qui dépend du pouvoir séparateur de l'instrument d'observation
utilisé, les deux satellites deviennent confondus en une seule tache dont la luminosité va décroître
rapidement, passer par un minimum et revenir à la valeur initiale avant que les deux satellites ne se
séparent de nouveau. Pendant une éclipse mutuelle, le satellite éclipsé sera observé seul. Comme
précédemment son éclat variera en passant par un minimum qui peut d'ailleurs être beaucoup plus
profond que dans le cas d'une occultation où le satellite occultant ne disparaît bien entendu jamais.
La durée de cette variation d'éclat est de l'ordre de quelques minutes en général mais elle peut atteindre
une heure ou même, exceptionnellement plus. L'amplitude de cette variation dépend des positions
relatives des satellites et de leurs rayons ; on peut ainsi observer des phénomènes partiels, annulaires ou
totaux. En général les observations d'éclipses mutuelles sont plus faciles à observer, car la variation
d'éclat est souvent plus importante que dans le cas des occultations où l'on observe deux satellites
ensemble.
C'est l'observation de cette variation d'éclat qui fournit les renseignements intéressants. La donnée utile
pour l'astrométrie est la forme de la courbe de lumière et la date correspondant au minimum de distance
entre les deux satellites qui est proche de la date du minimum de lumière. Cette date est calculable par la
théorie et dépend des positions relatives de ces astres. L'écart entre la prédiction et l'observation sera
utilisé pour corriger le modèle théorique. De plus, l'atmosphère étant quasiment inexistante autour des
satellites galiléens, l'interprétation de la forme des courbes de lumière observées ne présentent pas les
difficultés rencontrées lors des observations d'éclipses par la planète. Dans celles-ci, en effet, la précision
est fortement dégradée par la diffusion et la réfraction de la lumière pendant son passage dans
l'atmosphère de Jupiter. C'est la raison pour laquelle les observations des phénomènes mutuels sont
astrométriquement très intéressantes.
On peut d'ailleurs se reporter à d'autres articles déjà parus pour avoir des détails supplémentaires
concernant l'observation des phénomènes mutuels (cf. Note Technique n°8).
4. Intérêt des observations visuelles
Pourquoi effectuer des observations visuelles, quand d'autres techniques peuvent prétendre à une
précision bien supérieure? Outre l'intérêt pédagogique procuré par de telles observations et leur coté
spectaculaire, l'observation visuelle peut être effectuée dans des conditions difficiles, là où les autres
techniques sont souvent impraticables: ainsi, les phénomènes se produisant durant le crépuscule, ou très
bas sur l'horizon, ou très près de Jupiter, ou enfin avec un ciel de mauvaise qualité (absorption variable),
sont observables visuellement sans trop de difficulté. Une observation visuelle peut également permettre
de lever une ambiguïté par comparaison à une autre observation douteuse d'un même phénomène,
effectuée sur un autre site. Les précédentes campagnes ont de plus montré que la précision des
observations visuelles ont un niveau honorable, comme le montre la table ci-dessous qui donne une
comparaison des précisions obtenues pour différents types d'observation. Tout cela ne peut qu'encourager
les astronomes amateurs à effectuer ces observations en y apportant un soin particulier indispensable pour
obtenir des résultats de qualité.