N Burgaud, CPC
Inspection Académique de l’Oise – IEN Maternelle
2.2.2. Les variables à prendre en compte
2.2.2.1. Les objectifs poursuivis
Les compétences langagières des enfants sont meilleures en réception qu’en production. Par
conséquent, le parler du maître peut être relativement soutenu à condition, comme on l’a vu plus haut, d’être
étayé ou accompagné. C’est l’observation attentive des réactions des élèves qui permet à l’enseignant
d’ajuster son propos à leurs capacités en réception.
En revanche, quand l’enseignant vise précisément l’appropriation par un élève d’une structure
langagière type, il veille à lui proposer un modèle accessible dont l’enfant puisse se saisir. Si l’enfant ne parle
pas, l’enseignant attentif joue le rôle d’amplificateur et met en mots son langage non-verbal. À un élève qui lui
dit « poupée », le maître renvoie une phrase correcte mais simple comme « Tu veux jouer à la poupée.»
2.2.2.2. Les circonstances
Lors de la passation de consignes, cependant, le parler du maître sera simple, précis et sans
équivoque. De plus, la consigne doit être identifiable par sa « mise en scène » ainsi que par sa structure
syntaxique et son lexique relativement standardisés. L’objectif n’est pas, dans ce cas, l’appropriation par les
enfants des tournures employées mais de les amener à une représentation exacte de ce qui est attendu, de
les « entraîner » dans la tâche.
Le parler de l’enseignant s’inscrit aussi dans la progressivité des démarches d’apprentissage. Par
exemple, en phase de découverte, l’enseignant accepte l’emploi de mots justes mais proches du quotidien
des enfants (Exemples : beaucoup, trop, pas assez). Plus tard, la conceptualisation de la notion entraîne
l’introduction du vocabulaire technique correspondant (Exemples : plus que, moins que, autant que),
Le parler professionnel des enseignants prend également en compte les situations de communication.
Ainsi, les élèves doivent constater que leur enseignant adapte son parler aux circonstances et ils découvrent
alors l’existence des niveaux de langue et leur usage. L’enseignant doit aussi considérer que plus un enfant
est jeune et plus le « brouillage » occasionné par la présence du groupe risque d’être important. La durée du
discours, son organisation et la charge affective du sujet abordé influent aussi sur la manière dont les élèves
se saisissent de ce qui est dit. Enfin, leurs capacités langagières, leur connaissance du sujet et l’étayage
disponible ont une influence sur la quantité d’implicite employé.
2.2.3. Un parler ambitieux
La nécessité d’être compris ne doit pas amener l’enseignant à simplifier à l’extrême le vocabulaire et
les tournures syntaxiques qu’il emploie. L‘école est un lieu de savoirs où l’enfant acquiert des compétences
« extraordinaires ». Un contexte très évocateur, un étayage bien pensé peuvent permettre aux élèves de
comprendre et de se saisir, quel que soit leur âge, de mots (relativement) « savants » ou de tournures
élaborées. Par exemple, accompagnée d’un geste et d’un regard « parlants » ainsi que d’une illustration-
support, la phrase « Quel gâteau préférez-vous ? » peut être comprise par des enfants de petite section,
même peu coutumiers d’un langage soutenu. Par ailleurs, la langue est un instrument de la pensée. En
proposant en modèle à ses élèves une langue suffisamment riche et précise, un enseignant leur offre un outil
permettant de développer leur intelligence. Le maître ne devrait donc pas se priver de donner à entendre à
ses élèves, dans la mesure de leurs capacités et en leur fournissant l’étayage adéquat, une langue riche,
colorée, belle. Un élève se souviendra et s’emparera d’autant plus volontiers d’un mot, d’une expression,
d’une tournure qu’ils suscitent en lui une émotion positive.
Le parler est au cœur du métier d’enseignant. Le parler professionnel des enseignants témoigne donc
d’une réflexion et d’une préparation à la mesure des ambitions de leur mission.