o La délimitation au rôle d’intermédiaire, quitte à reprendre le papier émis si elle ne
trouve pas d’acquéreur (i.e. en cas d’insuffisance de liquidité sur le marché),
Le décloisonnement est la suppression des divisions classiques entre banques de dépôt et
banque de retrait (i.e. entre compte à vue et compte à terme, entre banques et assurances,
entre marché de court et long terme); d’où une concentration et un repositionnement des
acteurs traditionnels. Au niveau international, cela se traduit par la libre circulation des
capitaux permis par l’abolition du contrôle des changes et la suppression des mesures qui
éviteraient la mondialisation des banques.
L’élimination de certaines barrières structurelles entre banque d’investissement et banque de
dépôt a favorisé la fluidité du crédit, des initiateurs de prêts aux émetteurs de titres de dette et il
en est résulté une concurrence accrue au sein du secteur financier et une stimulation de
l’innovation financière. Les innovations financières qui captent la liquidité oisive fragilisent les
structures financières vu que le nombre d’engagements s’élève alors que la quantité de monnaie
demeure inchangée; cette situation augmente le risque d’une propagation en chaîne de défauts
(Brossard [1998]). Ce qui amplifie l’ampleur de la crise est le recours de la banque aux
innovations financières, à la marchéisation de son bilan (Nasica [1997], Brossard [2001], Sinapi
[2004]). En effet, le caractère « entreuprenariale » de l’institution financière va l’inciter à créer
de nouveaux produits afin de réaliser des profits: « L’idée retenue ici est qu’à mesure que les
institutions financières innovent, le système financier évolue, en imaginant de nouvelles façons
de financer le comportement maximisateur des autres institutions » (Nasica [1997]).
Suite à la crise des crédits hypothécaires américains en Août-Septembre 2008, Bourguinat et
Briys (2009) recommandent de s’attacher au « génome de la finance » au sens de
« l’enchaînement des maillons élémentaires du matériel génétique de ce secteur » du fait de sa
sophistication croissante et des chaînes d’opérations longues et arborescentes
. Ces techniques
souvent généralisées en dehors même du secteur immobilier sont très puissantes mais elles sont
fragilisées dès que se posent des problèmes de liquidité qui en perturbent le refinancement. Dans
ce cas, les risques classés hors-bilan remontent dans les livres des banques et en compromettent
la solvabilité; les chaînes d’opérations sont si longues et compliquées qu’on ne sait plus in fine
qui porte le risque. Elles créent du risque moral ou moral hazard--les banques qui pensent
pouvoir fragmenter et transférer le risque peuvent être moins attentives. Tout cela milite pour
une mise à plat du mécanisme et pour le séquençage d’un génome de la finance qui devient lui-
même de moins en moins aisément contrôlable.
La titrisation a permis aux banques de rendre liquides les actifs financiers et elle leur a offert de
nouvelles opportunités (de l’octroi de crédits, à leur reconditionnement puis à leur cession sous
forme de titres)
. La titrisation a donné aux banques la possibilité de ne plus faire apparaître le
risque de crédit à leur bilan mais de le transférer à d’autres investisseurs: la valorisation
d’instruments structurés complexes est devenue un véritable défi.
Ce génome crée un nouveau risque de système (apparu en 2007) qui tient aux formes extrêmes prises par la titrisation
de la 2ème génération: à partir notamment des dérivés de crédit synthétiques (CDOs ou Colletarized Debt Obligations)
et qui permet aux établissements hypothécaires et aux banques de transférer le risque de crédit en les fragmentant
presque à l’infini. Pour ce faire, ils compactent ces créances par blocs qui servent d’adossement à des portefeuilles
d’obligations (qui eux-mêmes sont démembrés par tranches classées par ordre de risque croissant); ce sont ces
obligations qui sont ensuite souscrites par les banques, les fonds spéculatifs, les OPCVM un peu partout dans le monde.
BANQUE DE FRANCE (2010), « Crise financière: origines et dynamiques », Les grandes étapes de la crise
financière, Chapitre 1, janvier, p. 9.