La Légende Dorée source d`inspiration inépuisable

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Catholique
86 e année - Hebdomadaire
n° 3221 -
16 juillet 2010
3€
ISSN 0015-9506
france-catholique.fr
FRANCE
La Légende Dorée
source d’inspiration
inépuisable
Le peintre Augustin Frison-Roche à St-Émilion
BRÈVES
FRancE
PolitiquE : Un rapport de l’Inspection générale des Finances, présenté le 12 juillet, affirme qu’Éric Woerth n’est jamais intervenu en quelque manière dans le dossier fiscal de la milliardaire Liliane Bettencourt. Ce rapport, s’il a réjoui l’UMP, a été accueilli avec scepticisme par la gauche.
Nicolas Sarkozy devait s’exprimer devant les Français ce même 12 juillet. Le président de la République, interviewé par David Pujadas sur France 2, devait traiter des « affaires » et de la réforme des retraites.
élEctionS : Le 11 juillet, avec 51,72% des suffrages, la candidate écologiste Anny Poursinoff a battu JeanFrédéric Poisson (48,28%) dans la circonscription des Yvelines où il avait succédé à Christine Boutin comme député. La participation est restée très faible : 29,42%.
JuSticE : Sylvie Andrieux, députée PS des Bouches–duRhône, a été mise en examen le 8 juillet dans le cadre d’une affaire de détournement de fonds publics dans laquelle 22 personnes ont déjà été mises en cause. 700 000 euros de subventions auraient été distribués à des associations participant à un système de clientélisme alors qu'elle était vice-présidente du Conseil régional de Pro vence-AlpesCôte d'Azur qui est présidé par Michel Vauzelle, l'ancien ministre PS de la Justice.
Le ministre Éric Woerth a annoncé le 7 juillet qu’il déposait plainte auprès du tribunal de Nanterre pour dénonciation calomnieuse après les accusations de finan cement illégal de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007.
L’ancien dictateur du Panama, Manuel Noriega, a été condamné le 7 juillet à Paris à sept ans de prison pour blanchiment d’argent du trafic de la drogue.
BuRqa : Jean-François Copé a créé la surprise le 7 juillet en annonçant la saisine, à son initiative, du Conseil constitutionnel sur l’interdiction du port du voile intégral pour s’assurer de la légitimité de a présenté le 8 juillet au gouvernement 21 propositions pour améliorer la qualité des soins et l’efficacité des dépenses, en vue de réaliser 2,2 milliards d’économies en 2011.
On a appris le 8 juillet que la première greffe totale du visage (bouche et paupières comprises) avait été réalisée fin juin avec succès à l’hôpital Henri-Mondor de Créteil par le professeur Lantiéri, sur un homme de 35 ans atteint d’une maladie génétique.
monde en 2015.
L’OCDE a estimé pour sa part dans une note du 7 juillet que le pic du chômage a été atteint en France et que le taux de chômage devrait commencer à baisser lentement.
FootBall : Le nouveau sélectionneur de l’équipe de France, Laurent Blanc, a tenu le 6 juillet sa première conférence de presse ; son objectif est de faire revenir l’équipe en deux ans dans le « gotha » du football mondial.
mondE
cette interdiction.
collEctiVitéS localES : Le Sénat a rejeté le 6 juillet deux mesures essentielles de la réforme territoriale, le mode d’élection des conseillers et la répartition des compétences entre communes, départements et régions ; les centristes ont à cette occasion voté avec la gauche.
taBac : Deux marques de cigarettes et une marque de tabac ont procédé à une baisse surprise de leurs prix le 5 juillet, provoquant la colère de la ministre de la Santé, R. Bachelot ; celle-ci envisage une augmentation compensatoire des taxes.
Santé : L’assurance–maladie 2 FRANCECatholique n°3221 16 juillet 2010
EmPloi : Lors d’un comité central d’entreprise, le 5 juillet, la direction d’Air France a évoqué la possibilité d’un sureffectif de 4 100 personnes en 2013 ; ce sureffectif devrait être absorbé par les départs naturels et le gel des embauches ; il concerne essentiellement les pilotes et le personnel au sol. Au total, les réductions d’emplois auront atteint 10 000 postes sur cinq ans.
Au cours d’une conférence de presse, le directeur général de France Telecom a annoncé le 5 juillet le recrutement de 10 000 personnes entre 2010 et 2012 ; l’entreprise vise 300 millions de clients dans le ESPacE : Le satellite européen Planck, lancé en 2009, a permis d’obtenir une première image complète du ciel dans laquelle le rayonnement résiduel du Big Bang est désormais perceptible ; mais il faudra attendre 2012 pour qu’une image précise de ce qu’on appelle « le visage de Dieu » soit rendue publique ; elle apportera de précieux renseignements sur la naissance de l’univers et le rythme de son expansion.
PRéhiStoiRE : Selon une étude archéologique britannique publiée le 7 juillet dans la revue Nature, les premiers hommes se sont adaptés au climat de l’Europe du Nord il y a 800 000 ans, 100 000 ans plus tôt que ce que l’on croyait possible.
diPlomatiE : Le Parlement européen a approuvé le 8 juillet la création d’un service diplomatique qui doit regrouper progressivement 6 000 fonctionnaires, diplomates et experts, et permettre à l’Union de parler d’une seule voix.
intERPol : L’organisation policière internationale ba - SUITe eN page 7
ÉDITORIAL
SOMMAIRE
ACTUALITÉ
4
AFFAIRE BETTENCOURT
5
MONNAIES
La Russie et l'euro
6
SOCIÉTÉ
Embryon de fronde
Feuilleton de l'été
Alice Tulle
Yves La Marck
Tugdual Derville
DOSSIER
8
ÉGLISES D'ORIENT
En attendant le synode
Catherine Baumont
ESPRIT
16
7
24
16e dimanche ordinaire
LECTURES
Père Michel Gitton
Georges Colomb
M.E.P.
R.A.
COMMUNAUTÉ SAINT-JEAN
Ordinations à Ars
Frère Arnaud-Charbel
MAGAZINE
18
PHILOSOPHIE
19
A.E.D.
Soutenons nos prêtres !
A.E.D.
Le paradoxe égyptien
A.E.D.
Les prêtres boursiers
A.E.D.
Église de Cuba
20
21
22
Tonne de plomb
Bertrand Souchard
Marc Fromager
23
LIVRES
Sélection spiritualité
26
DÉBATS
Nouvelle évangélisation
28
EXPOSITIONS
31
CINÉMA
32
FESTIVALS
33
TÉLÉVISION
34
SCULPTURE
BENE et saint Jacques
35
TÉLÉVISION
Messe à St-Jean-Pied-de-Port
36
TÉLÉVISION
Sélection début de soirée
38
BLOC-NOTES
Vie associative et d’Église
Sophie Baron
Alex et Maud Lauriot-Prévost
Actualité de la Légende Dorée
Émeric de Rozières / Augustin Frison-Roche
"L'Italien","Toy Story 3",
"Predators","Tamara Drewe"
Marie-Christine Renaud d'André, Georges Collar
Période estivale
Pierre François
"La nuit du grand déluge",
"Le bonheur dans le crime",
"J'attends quelqu'un", "Françoise Hardy"
M.-C. Renaud d'André
Louis Mollaret
Louis Mollaret
M.-C. R. d'A.
Brigitte Pondaven
Photo de couverture © AUGUSTIN FRISON-ROCHE
"Saint Christophe" est un géant qui désire se mettre au service du roi
le plus puissant. D'abord au service d'un grand roi, il quitte sa cour
pour suivre le diable que craint ce dernier. Apprenant que le diable
craint lui-même le Christ, il se met à sa recherche. Mais le Christ
ne se manifeste pas immédiatement. Sur les conseils d'un ermite,
Saint Christophe utilise sa grande taille pour aider les voyageurs à
traverser un cours d'eau périlleux. Lorsque le Christ se présente sous
les traits d'un enfant désirant atteindre l'autre rive, Saint Christophe
ne le reconnaît pas. Pendant la traversée, le poids de l'enfant ne cesse
de croître ni les eaux de monter et de se déchaîner. "Ne t'étonne
pas, Christophe, car tu as eu non seulement le monde entier sur tes
épaules, mais tu as aussi porté celui qui a porté le monde.
Je suis le Christ, ton roi, que tu sers dans ta présente tâche."
Un Pape
de décision
B
est considéré, à juste titre, comme un théologien, et donc comme un intellectuel profond. Mais
il est avéré aujourd'hui qu'il est aussi un homme de
décision, qui sait trancher quand il le faut et procéder aux nominations nécessaires pour changer
le cours des choses. L'organisation centrale du Saint-Siège a
été récemment renouvelée par l'arrivée du cardinal quebécois
Marc Ouellet, désormais préfet d'un dicastère essentiel, la
Congrégation des évêques. Mais l'annonce de
la nomination de Mgr De Paolis, collaborateur
direct du Pape en tant que questeur du SaintSiège, à la tête des Légionnaires du Christ,
constitue une information d'une singulière
importance, si l'on sait le caractère crucial du
dossier que Benoît XVI a pris en charge depuis
plusieurs années.
L'affaire est infiniment douloureuse,
par Gérard LECLERC
puisqu'il est certain que le fondateur des
Légionnaires, le père Maciel, était un pervers,
auteur de multiples crimes, notamment sexuels, et que néanmoins un tel personnage, qui avait toujours réussi à dissimuler
la réalité aux yeux de l'autorité romaine, avait présidé à la formation d'une institution de grande envergure, avec de multiples
collaborateurs exemplaires, aux antipodes du fondateur. Le premier souci du cardinal Ratzinger avait toujours été de faire la
vérité totale sur le cas du Père Maciel. Lorsque la vérité apparut, indiscutable, la volonté de Benoît XVI de réformer radicalement les Légionnaires s'affirma de la façon la plus nette. Il
s'agissait de purifier profondément ce qui devait l'être, et de
prendre les mesures de sauvegarde à l'égard des personnes de
bonne volonté qui avaient été indignement trompées.
La nomination de Mgr De Paolis signifie que la structure
entière de l'institution malade va se trouver en quelque sorte
refondée, avec une direction qui se substitue aux anciens responsables. Cette direction aura la lourde charge de rendre courage à ceux que cette histoire effroyable a désorientés, mais
dont la bonne volonté exige qu'ils soient fermement guidés vers
un renouveau évangélique. ■
ENOÎT XVI
FRANCECatholique N°3221 16 JUILLET 2010
3
ACTUALITÉ
AFFAIRE BETTENCOURT
par Alice TULLE
Feuilleton de l'été
Dans l’affaire Woerth-Bettencourt, deux questions ne sont
pas posées : elles concernent la hiérarchie de l’information
et le rôle que joue la presse dans les scandales.
A
lors qu'on
suit
l’affaire WoerthBettencourt jour
par jour et parfois
heure par heure,
il n’est pas inutile de prendre
quelque distance par rapport
à la succession d’événements
qui passionnent les journalistes et qui intéressent (mais
dans quelle mesure ?) l’opinion
publique.
Le premier constat, déplaisant, est facile à vérifier :
comme d’habitude, la télévision ne sait traiter que d’un
seul sujet à la fois, au mépris
de l’ensemble de l’actualité.
Parfois, c’est un fait divers
sordide qui mobilise l’antenne
pendant la moitié du journal
télévisé. Il y a peu, le comportement et les défaites de l’équipe
de France de football mobilisaient les commentateurs et
les hommes politiques étaient
obligés de dire leur sentiment
sur les mésaventures des Bleus.
Puis l’affaire WoerthBettencourt a pris le relais,
qui contraint le président de
la République à s’adresser aux
Français. Tout le reste est prestement expédié : la situation
des banques européennes,
toujours préoccupante, la
crise de l’euro, qui pourrait
entraîner l’éclatement de cette
zone monétaire, la situation
(
économique aux États-Unis,
qui n’ont réglé aucun des
problèmes majeurs qui ont
déclenché la grande crise de
2008-2009. Tous ces faits ne
sont évoqués que dans les
rubriques boursières et dans
la presse écrite spécialisée…
Pourtant, ces événements
sous-jacents sont de première
importance pour l’avenir de
mais pour s’informer sur ce qui
intéresse les journalistes.
Or ce qui intéresse les
journalistes, c’est la stratégie des puissants et les intrigues nouées dans les milieux
dirigeants. C’est aussi le
romanesque des situations :
la chute du Don Juan politique Roland Dumas, bottines
hors de prix, statuettes
grecques, ou les réapparitions-surprise de l'affairiste
Bernard Tapie, entreprises
centenaires rachetées
1 franc sym bolique
et vite dépecées, procès
la France et des Français. Un
point quotidien étant fait
sur le scandale du moment,
nous aimerions être tenus
au courant des autres faits
marquants de l’actualité.
Voilà qui justifie une fois de
plus la remarque narquoise de
Pierre Bourdieu : on regarde la
télévision non pour s’informer,
perdus et gagnés… Cette
année, c’est Éric Woerth qui
risque la chute et la famille
Bettencourt est victime de
ce qu’on appelait, à l’époque
Mitterrand, l’effet de meute.
Dans ce scandale, comme
dans les précédents, les principaux journalistes se congratulent. Ils ont réaffirmé leur
La télévision ne sait traiter que
d'un seul sujet à la fois
4 FRANCECatholique n° 3221 16 juillet 2010
indépendance, et leur goût
pour l’investigation. Double
illusion : passagère ou non,
c’est la faiblesse de Nicolas
Sarkozy qui les rend courageux (sauf Marianne et le site
Médiapart qui ont toujours
été dans l’opposition) et le
« journalisme d’investigation » n’a pas changé depuis
qu’Edwy Plenel, de nouveau
célèbre comme grand accusateur, officiait au Monde : les
investigateurs attendent dans
leur bureau ou dans un café
discret qu’on leur apporte les
enregistrements clandestins
du majordome, la photocopie
des carnets de l’ex-comptable et la feuille d’impôt de
Liliane Bettencourt. Personne
ne rappelle que des enregistrements (faciles à arranger)
n’ont pas valeur de preuve,
qu’il existe un secret de l’enquête policière et un secret de
l’instruction. Mais on utilise
toute la matière disponible
(même si c’est de la boue) et
nul ne songe à rechercher et
à punir ceux qui ont livré à la
presse les dépositions faites
la veille devant un policier ou
devant un juge.
Des hommes de gauche
ont été abattus par ces
méthodes et leurs adversaires
de droite n’ont rien trouvé à y
redire. Des hommes de droite
sont menacés par les mêmes
méthodes et les dirigeants
de la gauche trouvent utile
de faire flèche de tout bois –
comme s’ils n’étaient pas sous
la menace de révélations, sur
la fameuse affaire des frégates
de Taiwan, par exemple. n
ACTUALITÉ
MONNAIES
par Yves LA MARCK
La Russie et l'euro
Le gouvernement russe tente actuellement de prévoir
et de conjurer les conséquences possibles de la crise
de l'euro sur l’économie du pays et sur le rouble.
L
a crise de la zone euro
n’est plus au centre
de l’actualité depuis
l’annonce du plan
d’aide à la Grèce.
Pourtant la Grèce continue
de vivre sous la menace des
spéculateurs, de même que
l’Espagne, le Portugal, voire
l’Italie. Sans trop se soucier
de ses statuts, la Banque
centrale européenne tente de
sauver les banques – surtout
françaises et espagnoles –
qui ont engrangé trop d’obligations émises par des États
en mauvaise posture. La
tendance à la baisse de l’euro
inquiète les États-Unis, qui
savent que la monnaie européenne est le dernier rempart
d'un dollar fragilisé par les
dettes (publiques et privées)
qui écrasent le pouvoir fédéral, les États américains et la
population durement frappée par le chômage.
À Moscou, on dit couramment que l’Union européenne
est à l’agonie et qu’il importe
de développer les relations
économiques bilatérales –
avec la France et l’Allemagne
tout particulièrement.
À Francfort et Bruxelles,
à Berlin et à Paris, les voix
officielles nous assurent au
contraire qu’il n’y a pas péril
en la demeure. Mais le point
de vue des autorités russes
est à prendre en compte
car elles sont neutres : elles
n’ont ni à défendre la zone
euro ni à l’attaquer. Même
si Vladimir Poutine appelle
officiellement au maintien
de la monnaie européenne, il
n’ignore rien des analyses des
spécialistes russes. Comme
beaucoup de leurs collègues
français, ceux-ci observent
que le plan de soutien de
750 milliards d’euros est
en grande partie (440
milliards) garanti par
des États fortement endettés :
insuffisant
en cas d’une attaque contre
plusieurs pays, le plan est une
annonce à effets psychologiques qui aurait beaucoup
de mal à se concrétiser.
D’où, à Moscou, l’étude
attentive de plusieurs scénarios de crise : zone euro réduite
à l’Allemagne et aux nations
du Nord après sortie de tous
les pays du Sud ; passage à
une monnaie commune mais
non plus monnaie unique... ;
retour chaotique à des
monnaies nationales.
Sans même envisager la
disparition de la monnaie
européenne ou son chan-
gement de statut, une forte
baisse de l’euro aurait des
conséquences négatives
pour la Russie car ses réserves
de change (450 milliards
de dollars) sont libellées à
40% en euros. Sur le plan
commercial, les exportations de gaz russe, qui sont
payées en euros, perdraient
de leur valeur.
Cependant, les entreprises russes, fortement
endettées en euros, auraient
tout avantage à une chute
de la monnaie européenne
et elles pourraient acheter à
meilleur compte des firmes
européennes et des équipements qui sont nécessaires à
la modernisation de l’industrie russe.
Ces perspectives positives
et négatives sont à inscrire
dans le problème général de
la réforme du système monétaire international. Cette
réforme n’est pas engagée,
un nouveau système n’a pas
encore été couché sur le
papier. Les Russes, comme les
Chinois, ont pris les devants
en réduisant leurs réserves
en dollars, mais le débat
demeure, au sein du pouvoir
politique russe, entre ceux qui
pensent qu’il n’y a pas d’alternative au dollar et ceux qui
souhaiteraient – à l’instar du
président Medvedev – que le
rouble devienne une monnaie
de réserve pour un certain
nombre de pays situés dans la
zone d’influence de la Russie.
Nul ne sait comment ces
débats complexes seront
tranchés. Mais le fait est que
les gouvernements russes et
chinois étudient des scénarios d’avenir alors que les
États-Unis, l’Union européenne et la zone euro sont
sur la défensive. n
Une forte baisse de l'euro aurait des
conséquences négatives pour la Russie
)
FRANCECatholique n°3221 16 juillet 2010 5
ACTUALITÉ
bIoÉThIqUe
par Tugdual DERVILLE
embryon de fronde
Alors que s’annonce à l’automne la seconde révision des lois
de bioéthique, deux parlementaires pressent le gouvernement
de libéraliser la recherche sur les embryons humains.
(
du caractère hypocrite, se
cache le malaise d’une société
qui peine à reconnaître la
pleine humanité de l’embryon.
Selon Alfred de Musset,
« il faut qu’une porte soit
ouverte ou fermée. » Pourquoi
ne pas autoriser clairement la
©HENRIk JONSSON
I
de
l’UMP et du parti socialiste, les députés JeanSébastien Vialatte et
Alain Claeys font cause
commune au sein de l’Office
parlementaire d’évaluation
des choix scientifiques et
techniques (ou Opecst) dont
ils sont les rapporteurs. Ils
viennent de publier dix-huit
propositions qui bousculent
le statu quo envisagé par
leur collègue Leonetti. Ils le
menacent même de prendre
eux-mêmes l’initiative d’une
proposition de loi.
Il faut dire que la situation actuelle est typique des
compromis intenables. Depuis
la loi de 2004, la recherche sur
l’embryon est théoriquement
interdite, mais pratiquement
autorisée. Situation d’autant
plus instable qu’un moratoire
prend fin en février 2011 :
jusqu’à cette date, l’Agence de
biomédecine peut autoriser
certains laboratoires à utiliser les embryons dits « surnuméraires », si les parents y
consentent. Et à deux autres
conditions : que la visée de ces
recherches soit « thérapeutique » et qu’il n’y ait pas de
solution « alternative ».
Derrière le principe de l’interdiction assorti de dérogations dont chacun peut juger
ssus respectivement
recherche sur les embryons
humains, demandent en substance Alain Claeys et JeanSébastien Vialatte, décernant
au passage leur satisfecit à
l’Agence de biomédecine,
créée en 2004 qui assurerait
à les en croire un « parfait
encadrement » du système
d’autorisation ? Pourtant les
mêmes avouent que le critère
thérapeutique est inopérant.
Pour Alain Claeys, « Nous
sommes trop loin des applications thérapeutiques pour
[le] retenir aujourd’hui ».
Quant au critère d’absence
de solution alternative, il ne
tiendrait pas plus. À l’instar du
Conseil d’État, les deux députés prônent d’ailleurs la poursuite simultanée de plusieurs
modalités de recherche, avec
ou sans l’embryon. Motif
invoqué : « Elles se fertilisent
(sic) mutuellement. ».
Ceux qui ont d’emblée suspecté le système
dérogatoire d’ouvrir la
boîte de Pandore en
ont la confirmation.
On peut déjà douter du
respect par l’Agence de
biomédecine du « haut
niveau d’encadrement »
des recherches sur l’embryon qu’avaient promis
les promoteurs de la loi
de 2004. Les rapporteurs
de l’Opecst estiment désormais que « ce n’est pas aux
politiques de hiérarchiser les
recherches ».
Devrait-on donner aux
chercheurs pleine liberté
pour s’autoréguler, à l’abri
du débat citoyen ? C’est la
revendication d’un Marc
Peschansky qui souhaite
affranchir la recherche scientifique des considérations
éthiques. Comment Alain
Claeys et Jean-Sébastien
Vialatte peuvent-ils prétendre
qu’il y a un « consensus en
faveur de la levée du moratoire sur la recherche sur les
Le malaise d'une société qui peine à
reconnaître la pleine humanité de l'embryon
6 FRANCECatholique n° 3221 16 juillet 2010
cellules souches embryonnaires » ? Occulter jusqu’à
l’existence d’opposants à
toute recherche qui détruit
l’embryon est révélateur. En
2004, le cardinal Philippe
Barbarin avait tout de même
parlé d’une « transgression
sans précédent ». L’Église n’a
aucunement changé d’avis et
sa voix est davantage reconnue depuis les états généraux
de la bioéthique.
Non contents de pousser les portes entrouvertes,
les deux députés veulent
qu’on autorise la conception d’embryons humains
pour la recherche, le temps
de mettre au point les techniques d’assistance médicale
à la procréation issues de la
vitrification des ovocytes.
Ils invoquent comme mobile
la limitation du stock des
embryons surnuméraires dont
ils font, ailleurs, peu de cas.
Ils autoriseraient même
la transposition nucléaire
inter-espèce, autrement dit
le clonage d’hybrides hommeanimal, à condition « d’interdire l’utilisation d’ovocytes
humains » (mais pas d’autres
cellules humaines), de ne
pas implanter les embryons
hybrides et de ne pas poursuivre leur développement
au-delà du quatorzième jour.
Pareille transgression alignerait la France sur la GrandeBretagne où l’on conçoit des
humanoïdes avec des ovocytes
de bovins, en toute légalité.
Reste à savoir quel impact
aura sur le débat cette surenchère scientiste. n
suite de la page 2
Missions étrangères de Paris
V
endredi 9 juillet, le P. Georges Colomb, 57
ans, a été élu supérieur général de la Société
des Missions Étrangères de Paris (MEP).
L’assemblée générale des MEP l’a élu pour prendre
la succession du P. Jean-Baptiste Etcharren, qui a
effectué deux mandats successifs à la tête de la
société missionnaire (1998-2004 puis 2004-2010).
Né le 15 juin 1953 à Saint-Anthème (Puy-deDôme), Georges Colomb a suivi des études de droit et d’administration
économique et sociale avant d’exercer comme inspecteur des Postes
pendant cinq ans à Lyon puis Nanterre. À l’âge de 29 ans, il change
de voie et entre au séminaire des Carmes, à Paris. Licencié en théologie à l’Institut catholique de Paris, il est ordonné prêtre au titre des
Missions Étrangères de Paris en 1987, où il reçoit le monde chinois
comme destination. Conformément à l’usage en vigueur au sein de
cette société missionnaire fondée en 1658, il part pour un temps de
formation linguistique. Le P. Colomb passe ainsi deux années à Taiwan
pour apprendre le mandarin. Il est ensuite envoyé en Chine continentale. Toute présence missionnaire en République populaire de Chine
étant interdite, il s’y rend en tant qu’« expert étranger ». Professeur
d’université, il enseigne le français et la civilisation française auprès
des étudiants, poste pour lequel il recevra les palmes académiques.
En 1998, le P. Colomb est rappelé à Paris pour siéger au conseil
qui assiste le supérieur général. Il y est plus spécialement chargé
des vocations, des séminaristes et du volontariat (envoi en Asie de
jeunes laïcs pour des missions de quelques mois à deux ans). Lors de
l’assemblée générale de 2004, il est élu vicaire général des MEP, office
équivalent à celui de n°2.
À propos des vocations sacerdotales et religieuses en France, le P.
Colomb, qui est entré au séminaire à une époque où celles-ci étaient
très peu nombreuses, se veut optimiste : « Il y a des vocations dans la
France d’aujourd’hui. Elles existent et il est important de montrer aux
jeunes que l’Église leur fait confiance. » À cet égard, l’expérience du
volontariat est positive. « Les jeunes qui partent en Asie et dans l’océan
Indien avec les MEP découvrent les défis de la mission aujourd’hui : le
dialogue – ou l’absence de dialogue – avec les grandes traditions religieuses ; dans certains pays, l’annonce de l’Évangile dans des régimes
politiques totalitaires ou autoritaires ; le défi de la pauvreté, qui n’est
pas propre à l’Asie mais qui résulte du désordre économique mondial »,
poursuit le missionnaire dont le service ‘Volontariat’ envoie chaque
année 150 jeunes en mission. Parmi les volontaires, un certain nombre
d’entre eux découvrent leur vocation missionnaire, religieuse et/ou
sacerdotale pendant leur séjour en Asie et dans l’océan Indien. Au cours
des dernières années, 28 volontaires de retour en France sont entrés au
séminaire pour les MEP et 35 autres dans des séminaires diocésains ou
des communautés religieuses. Plusieurs jeunes filles ont fait le choix
d’entrer dans des communautés apostoliques ou contemplatives.
Interrogé sur l’avenir des MEP et de leur présence en Asie, le
P. Colomb souligne que la pyramide des âges des prêtres de la société
missionnaire ressemble à celle des diocèses de France. Il note toutefois
des signes d’espérance : la présence de 21 séminaristes en formation
(20 Français, 1 Slovaque), l’ordination probable en 2011 de huit jeunes
prêtres MEP. Il conclut qu’il faut donc continuer à appeler à la mission
en Asie car « c’est important non seulement pour les MEP mais aussi
pour la vitalité de l’Église en France ».
R.A.
© M.E.P.
sée à Lyon propose aux internautes de l’aider à localiser
de façon anonyme des fugitifs à travers le monde dans le
cadre d’une opération lancée
le 3 mai dernier et concernant 450 criminels recherchés dans 29 pays.
Terrorisme : L’Union européenne a approuvé le 8 juillet
un accord autorisant le transfert aux États-Unis des données bancaires des citoyens
européens dans le cadre de la
lutte contre le financement
du terrorisme.
Bonus : Le Parlement européen a entériné le 7 juillet
un texte qui limite à partir de
l’an prochain les bonus des
traders, considérés comme
responsables des excès de la
spéculation pendant la crise.
Divorce : Dans une étude en
sciences sociales, des chercheurs américains ont montré
que le divorce avait tendance
à se propager dans l’entourage des personnes ayant déjà
rompu leur union.
sanTé : Selon une étude américaine publiée le 8 juillet, la
recherche sur le vaccin contre
le sida aurait franchi un pas
important avec la découverte
de deux anticorps capables
de bloquer le développement
du virus.
Proche-orienT : Les tensions entre la Turquie et Israël
se sont aggravées depuis
l’assaut israélien du 31 mai
contre une flottille à destination de Gaza au cours
duquel 9 Turcs ont été tués ;
la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays
était évoquée le 5 juillet.
afghanisTan : Un 45e militaire français, un sous-officier du 13e régiment de génie,
est décédé le 6 juillet après
avoir été victime de l’explosion d’une bombe artisanale
près de Kaboul.
le père georges Colomb.
Selon des sources politiques,
les forces britanniques vont
transférer aux Américains
la responsabilité d’une des
zones les plus violentes du
sud du pays.
suisse : L’avion expérimental
propulsé à l’énergie solaire
et créé par l’explorateur
Bertrand Picard a effectué
les 7-8 juillet un vol de 25
heures, donc en partie de
nuit ; un deuxième exemplaire
de cet appareil devrait faire le
tour du monde en cinq étapes
d’ici à 2013.
Le cinéaste Roman Polanski
est libre de ses mouvements
depuis le 12 juillet à midi, la
justice suisse ayant renoncé à
l'extrader vers les États-Unis.
JaPon : Le parti du nouveau
premier ministre Naoto Kan
n'a obtenu que 44 sièges sur
les 121 qui étaient en jeu aux
élections sénatoriales du 11
juillet. Même s'il garde une
majorité au Sénat et à la
chambre des représentants,
son plan de réduction de la
dette publique s'en trouve
compromis.
fooTBall : L’Espagne a remporté la finale de la Coupe du
Monde de football en battant
la Hollande par 1 à 0 lors des
prolongations, le 11 juillet.
L’Allemagne est devenue troisième en battant l’Uruguay
par 3 à 2. L'Afrique du Sud a
pleinement fait ses preuves
en tant qu'organisatrice.
J.L.
FRANCECatholique n°3221 16 juillet 2010
7
DOSSIER
ÉGLISES cathOLIquES D'ORIENt
En attendant le
Nous avons travaillé en deux groupes de 6 à
8 personnes et, parfois, avec des cardinaux, tels
que le cardinal Tauran pour les relations interreligieuses, le cardinal Kasper pour l’œcuménisme,
le cardinal Sandri pour les Églises orientales, et le
cardinal Dias, pour l’évangélisation des peuples.
À la suite de cette rencontre, les notes des
deux groupes ont été synthétisées puis adressées
au patriarche Michel Sabbah qui a retouché et
finalisé l’ensemble. Sur ses conseils, le document
comportait beaucoup de questions pour faire réagir les fidèles. Traduit en quatre langues (arabe,
français, anglais et italien), il a ensuite été adressé aux patriarches et aux évêques concernés pour
qu’ils le distribuent dans leurs paroisses.
Le 6 juin dernier, le Pape Benoît XVI a remis
aux patriarches et aux évêques orientaux
présents à Chypre, l’Instrumentum laboris
du synode qui se tiendra du 10 au 24
octobre prochain à Rome. À cette occasion,
l’Œuvre d’Orient a soumis un questionnaire
à quelques-uns d’entre eux. Qu’ils vivent au
Liban, en Syrie, en Égypte, en Turquie, en Irak,
en Terre Sainte, à Chypre ou encore en Iran,
ils nous font partager leurs témoignages,
leurs réflexions, leurs attentes par rapport
au synode mais aussi et surtout en tant
que chrétiens d’Orient.
n Vousvivezaucontactdesmusulmansettravaillez
avec les représentants des Églises pour préparer
ce synode. Pour vous, quels sont les grands défis
pourleschrétiensd’Orient?
Père Samir Khalil Samir, jésuite, professeur à l’Institut Pontifical Oriental
à Rome. L’un des organisateurs du
synode et rédacteur des lineamenta.
En septembre 2008, il y a eu une
pr emièr e r enc ontr e de s s ept
patriarches catholiques d’Orient.
Étaient également conviés deux
évêques - Mgr Ramsi Garmou,
représentant l’Iran et Mgr Padovese,
évêque latin - et moi-même, puisque Père Samir Khalil Samir
j’avais été nommé expert. À l’issue
des deux jours de réunion, l’un des patriarches a
demandé à Mgr Nikola Eterovic, Secrétaire général du Synode : « Quelle va être la suite maintenant ? » Il lui a répondu : « Le Père Samir écrira les
lineamenta… 20 à 25 pages, pas plus ! »
8 FRANCECatholique n°322116juillet 2010
© œUVRE D'ORIENT
n Comments’estpréparélesynode?
La partie des lineamenta consacrée au dialogue interreligieux est celle qui nous a le plus
préoccupés. Elle touchait les rapports particuliers
avec le judaïsme, surtout à Jérusalem, avec Israël
et la Palestine ; les rapports avec les musulmans ;
la contribution des chrétiens à la société civile, en
insistant sur deux défis qui sont posés dans nos
pays : celui de la paix et celui de la modernité.
Il n’y a que la paix qui puisse apporter une
solution à notre situation politique. Nous refusons toute forme de violence dans nos pays,
qu’elle vienne d’Israël ou des Palestiniens ou des
Arabes.
Concernant la modernité, nous faisons l’analyse que l’un des problèmes de l’islamisme, c’est
le rejet de la modernité considérée comme une
forme d’athéisme. Quelle est l’idéologie islamique ? C’est de dire qu’il y a toutes sortes
d’idéologies : le communisme, qui a échoué, le
synode
capitalisme, le christianisme qui lui-même a
échoué, il n’y a qu’à regarder l’Europe ! Qui peut
sauver notre monde actuel ? Il n’y a que l’islam.
Or, la modernité est venue combattre la religion ;
c’est le retour aux sources et à la tradition qui
permettra d’offrir au monde entier un projet
valable. En Occident, il s’agit de commencer à
ré-islamiser le monde musulman qui s’est laissé
séculariser et influencer par l’Occident depuis le
XIXe siècle. La première étape est de transformer la société musulmane en réintroduisant la
charia comme fondement total ou partiel de la
Constitution. Et cela réussit à peu près partout,
lentement.
Il nous faut proposer une modernité
« croyante » et non pas choisir dans la modernité ce qui est acceptable, ce qui est positif et
ce qui ne l’est pas. Il faut travailler sur un système de valeurs commun avec les musulmans.
Les chrétiens contribuent à la société au plan
de la culture, de l’industrialisation mais surtout
des droits de l’homme. Il ne s’agit pas de « faire
ghetto ». Tout ce qu’on peut faire ensemble - avec
les musulmans, les gouvernements, etc. - est à
préférer à tout ce que l’on ferait séparément.
Propos recueillis par Catherine BAUMONT
© œUVRE D'ORIENT
n Commentavez-voustravailléles lineamenta?
Il ne faut pas
oublier que
les chrétiens
font partie
intégrante
de la région
Dans mon éparchie (évêché), j’ai souhaité les
aborder avec toute la communauté catholique :
prêtres, religieuses, consacrés mais aussi laïcs.
J’ai fait diffuser le document à partir du site
Internet du diocèse en introduisant la méthode
de travail que je souhaitais mettre en place, fondée sur la réflexion personnelle, familiale ou
issue des groupes paroissiaux. Une conférence
et des séances de travail en groupes ont permis
l’élaboration de notre document répondant aux
questions posées par les lineamenta.
n Commentrelancerez-vousletravailaprèslapublicationdel’Instrumentum laboris ?
Nous choisirons des points importants de
celui-ci en lien direct avec la réalité de Chypre,
que nous développerons en profondeur pour arriver au synode munis de réflexions longuement
mûries.
CHYPRE
La présentation de l’Instrumentum laboris à
Chypre a pour notre Église chypriote une signification symbolique, sans oublier que notre pays
est un pont entre le Moyen-Orient et l’Europe,
l’Occident, tant sur le plan spirituel, ecclésial que
social et humain. Je dois d’autant plus mobiliser
les miens que le Saint-Père m’a personnellement
nommé Secrétaire spécial de ce synode.
Mgr Soueif
(évêque maronite de Chypre)
©L'OSSERVATORE ROMANO
Mgr Joseph Soueif, Archevêque de Chypre des
maronites et Secrétaire spécial du synode.
FRANCECatholique n°322116 juillet 20109
et sociales, politiques et concernant les droits
de l’homme, et surtout face à la vraie question de l’émigration des chrétiens, une telle
expérience synodale doit aider à l’union avec
les autres Églises. Elle doit permettre une prise
de conscience du fait que l’union est un signe
d’amour qui pousse à une ouverture aux autres
religions. Il ne faut pas avoir peur de l’autre.
n Comment préparez-vous votre éparchie à recevoir
lesconclusionsdusynode?
Il ne faut pas oublier que les chrétiens font
partie intégrante de la région, historiquement,
ethniquement, démographiquement et religieusement, et qu’ils sont aussi une nécessité pour les
non-chrétiens. Ici, s’ouvre le dynamisme du dialogue de vie, d’amour, le dialogue qui construira
la culture de la paix et des réconciliations. Dans
cette perspective, les chrétiens ont beaucoup
à donner, à partager avec leurs frères et sœurs
d’autres religions. Je prépare le diocèse à vivre en
état synodal, à recevoir au niveau personnel et
communautaire les directives du synode. C’est un
travail d’Église que l’on accomplit dans un esprit
de communauté, de solidarité et avec un sentiment de grande responsabilité.
n Pensez-vous qu’une telle initiative pontificale
puisse servir l’union entre les Églises orientales
catholiquesetlamissiondel’ÉgliseenOrient?
Comment
appeler à la
communion
si elle ne
commence
pas par
soi-même
Le synode est par excellence une expérience
œcuménique dans le sens du cheminement avec
les Églises sœurs vers la communion et le témoignage. Mais le progrès œcuménique exige d’abord
une expérience profonde et consciente de communion au niveau pastoral tout d’abord parmi
les Églises orientales catholiques et parmi les
catholiques en général. Comment appeler à la
communion si elle ne commence pas par soimême ? Il faut apprendre à travailler ensemble, à
être solidaires, à avoir l’esprit d’équipe, de communauté. Si cette méthode est nécessaire dans
la vie quotidienne, que dire au niveau spirituel et
ecclésial qui est sa nature même ? Tout ceci exige
un changement de mentalité, de l’humilité, une
profondeur. La découverte du vrai sens de la vie
en Jésus-Christ donne tout son sens à notre vie,
à notre existence et à notre mission. Quand on
est dans cette logique, on découvre la beauté de
notre mission en Orient. L’Orient, dans sa situation
actuelle, veut seulement des témoins de la résurrection ; des témoins de la joie en Jésus-Christ ;
des disciples qui s’aiment les uns et les autres.
Devant les défis et les attentes de tous les
chrétiens, surtout dans la région du MoyenOrient, devant les problématiques économiques
10 FRANCECatholique n°322116juillet 2010
Cette expérience synodale contribuera aussi,
sans doute, à consolider de bons liens avec les
musulmans, sur le plan humain, social et religieux,
dans les domaines qui créent un espace commun
de rencontre et de dialogue partant du respect
et fondé sur l’amour. Dans ce sens, il y aurait
des espaces pour bâtir la réconciliation et la
confiance entre les gens que les guerres ont séparés. Seul l’amour construit la personne humaine,
la communauté et les pays. Le fondement dans
le dialogue de vie avec les musulmans, c’est le
respect mutuel en tant que fils de Dieu, appelés à
témoigner Son amour partout dans le monde.
ÉGYPTE
Mgr Kyrillos William, évêque d'Assiout des coptes
et membre du Conseil spécial pour l’Afrique du
Secrétariat général du synode.
nCommentavez-voustravaillé?
© œUVRE D'ORIENT
n Pensez-vous que ce synode puisse faire avancer
l’union avec les autres Églises orientales (orthodoxes)?
n Vousvivezaucontactdesmusulmansquisontvos
compatriotes. Pensez-vous que le synode pourra
servirlesrelationsdesÉglisesavecl'islam?Sioui,
comment?
Mgr Kyrillos William
J’ai saisi l’opportunité de la
session de formation permanente en février dernier qui rassemblait les prêtres de l’Église
copte catholique ainsi que cinq
autres évêques qui participaient
aux carrefours et aux discussions. Puis, au sein de l’éparchie,
soixante religieuses de treize
congrégations réparties en
dix-sept missions ont travaillé
les lineamenta ainsi que deux
groupes constitués pour l’un
de laïcs en général et l’autre
de médecins. Les réponses ont
été envoyées au patriarcat pour
être unifiées avec celles des
autres éparchies.
IRAK
Mgr Louis Sako, archevêque chaldéen de Kirkuk
et l’un des initiateurs de ce Synode.
©L'OSSERVATORE ROMANO
n Commentavez-voustravailléles lineamenta ?
n Commentrelancez-vousletravail?
Je profite des sessions de formation destinées
à quatre cents jeunes - en majorité des catéchistes et des animateurs - pour les étudier avec
eux en juillet.
Nous les avons travaillés avec les prêtres,
les diacres, les religieuses, le conseil diocésain
et les responsables d’activités religieuses. Nous
avions souhaité le préparer aussi avec l’assemblée
des évêques catholiques ou le synode chaldéen.
Mais je crois qu’il y a un manque de conscience
de l’importance de ce synode, plusieurs évêques
pensant que c’est Rome qui l’organise !
Pour ce synode, nous insistons sur deux
points essentiels : communion et témoignage.
Nous nous sommes divisés et avons perdu la
dimension missionnaire de notre Église alors que
la nature de celle-ci est l’union – la communion – et la mission. Je pense que c’est pour cela
que nos Églises orientales ont perdu leur dynamisme. Nous allons travailler ces deux points :
sans l’unité, voire la communion, de nos petites
Églises, et sans un véritable témoignage, il n’y
a pas d’avenir. Nos voisins musulmans ne comprennent pas nos divisions et ils attendent de
notre part un témoignage différent du leur !
Les Églises
affrontent un
n Comment préparez-vous votre éparchie à recevoir grand danger
lesconclusionsdusynode?
en passant à
Nous évoquons assez souvent le synode. «l'ethnicitén Comment vous préparez-vous à recevoir les
Ce fut encore le cas dernièrement, lors de la
conclusionsdusynode?
nationalisme
»
célébration de la Journée éparchiale qui regroupait tous les prêtres, plusieurs religieuses et des
représentants de toutes les paroisses. Les curés
en parlent également.
n Pensez-vous que ce synode puisse faire avancer
l’unionaveclesautresÉglises?
L’idée de ce synode ayant été lancée par
moi, je suis donc tout à fait engagé pour traduire dans le concret ses directives. Le dernier
dimanche de Pentecôte, nous avons eu l’ordination d’un diacre, de six jeunes sous-diacres et le
baptême de trois adultes…
Je l’espère bien, même si je suis réaliste.
Ce ne sera pas facile en Égypte, la position de
l’Église copte orthodoxe étant très rigide vis-àvis de notre Église copte catholique.
n Pensez-vous qu’une telle initiative pontificale
puisse servir l’union entre les Églises orientales
catholiquesetlamissiondel’ÉgliseenOrient?
nEtaveclesmusulmans?
L’Instrumentum laboris suggère des propositions pratiques concernant le respect mutuel et
la collaboration entre citoyens d’un même pays
appartenant à différentes religions. Je suis sûr
que les Pères synodaux présenteront des propositions concrètes dans ce domaine même si la
situation varie d’un pays à l’autre.
S.B. Antonios Naguib
(Patriarche d’Alexandrie
des coptes catholiques)
©L'OSSERVATORE ROMANO
Catholiques ou pas, les Églises affrontent un
grand danger en passant à l’« ethnicité-nationalisme » au lieu de rester ouvertes à tous. L’unité
est une urgence pour survivre en Orient. Les différences sont liturgiques ou linguistiques. Avoir cinq
évêques catholiques dans la même ville pour des
petites communautés est un handicap. Nous traduisons généralement nos rites en arabe pour la
compréhension de nos fidèles. Il est donc important de repenser la structure de nos diocèses !
FRANCECatholique n°322116 juillet 2010 11
laissent guider et inspirer par l’Esprit Saint
durant les travaux du synode, qu’ils écoutent avec beaucoup de docilité et d’humilité ce que l’Esprit dit à chacune de
leurs Églises. L’Église est née le jour de la
Pentecôte par la grâce et la puissance de
l’Esprit Saint ; elle a reçu de lui sa vie et
sa mission. Depuis deux mille ans, elle ne
cesse de faire l’expérience de sa présence
efficace en elle. J’espère que le prochain
synode nous donnera encore l’occasion de
faire cette joyeuse expérience.
n Et l’union avec les autres Églises orientales?Etledialogueaveclesmusulmans?
© œUVRE D'ORIENT
Avec les Églises apostoliques non catholiques, le problème est l’ecclésiologie : il
faut avoir le courage de faire tomber les
formalités et viser le concret. J’ai parfois le
sentiment que les relations entre les Églises
relèvent plutôt de la diplomatie. L’union des
Églises sœurs renforcera le christianisme
oriental qui est menacé dans son existence.
C’est la même chose avec l’islam : pour
construire la confiance, il faut dire sincèrement nos différences et aussi nos peurs
mutuelles. Il faut apprendre à travailler dans
un monde pluraliste. Il faut aider les musul- Mgr Louis Sako
mans à oublier le désir d’imposer la charia.
Le monde a changé, la religion est un choix personnel et non une obligation politique.
Je pense profondément que le prochain
synode pourra rendre plus profonde et plus
féconde la communion entre catholiques orientaux à condition de vivre cet événement important dans un esprit de conversion et de retour
aux racines de notre vocation et de notre mission
ecclésiales qui sont définies par l’Évangile et l’enseignement de l’Église.
IRAN
Mgr Ramzi Garmou, archevêque de Téhéran des
chaldéens.
n EtaveclesautresÉglisesorientales(orthodoxes)?
12 FRANCECatholique n°322116juillet 2010
©L'OSSERVATORE ROMANO
J’ai réfléchi avec mes prêtres et j’ai envoyé
nos conclusions au Secrétariat du synode, en vue
de préparer l’Instrumentum laboris.
Le plus important est d’inviter les fidèles
à prier pour les Pères synodaux afin qu’ils se
S.B. Cardinal Sfeir
(Patriarche maronite Antioche)
©L'OSSERVATORE ROMANO
De même, je crois que le synode peut favoriser et accélérer l’union entre tous ceux qui
portent le beau nom de chrétiens à condition
que notre désir d’unité tire sa force et son énergie du désir même de notre Seigneur JésusChrist, qui, en priant pour l’unité de ses disciples, a dit : « Que tous soient un comme toi,
n Commentavez-voustravailléles lineamenta ?
S.B. Fouad Twal
(Patriarche latin de Jérusalem)
n L’union entre les Églises orientales catholiquesva-t-elleprogresser?
S.B. Nerses Bedros Tarmouni
(Patriarche de Cilicie des Arméniens catholiques)
LIBAN
Cet islam
dans lequel
nous sommes
submergés
comme une
goutte d'eau
dans l'océan
Mgr Joseph Kallas, Métropolite grec melkite
catholique de Beyrouth et Byblos.
n Commentavez-voustravaillé?
Les 30 prêtres de deux districts sur six se
sont concertés avec leurs fidèles pour étudier
les différents sujets et répondre d’une manière
dense et concise. Un groupe laïc de 8 personnes engagées, regroupant des représentants
de toutes les Églises catholiques a aussi rédigé ses réponses. Leurs trois contributions ont
été envoyées au Secrétariat central du synode
à Rome. Malheureusement, les lineamenta ont
été rédigés par des personnes savantes à Rome
même, loin du contexte des peuples du Moyen-
S.B. Emmanuel 3 Delly
(Patriarche de Babylone des Chaldéens)
©L'OSSERVATORE ROMANO
Quant à nos relations avec cet islam dans
lequel nous sommes submergés comme une
goutte d’eau dans un océan, je pense que le
prochain synode peut être très utile, à condition de regarder la réalité dans laquelle nous
vivons avec les yeux de la foi et non de la peur
ou de la méfiance. Surtout, essayons de découvrir la signification théologique et spirituelle
du « Petit Reste » auquel Jésus s’adresse en
disant : « N’ayez pas peur. » Selon l’Évangile et
la Tradition vivante de l’Église, ce qui fait que
l’Église est missionnaire et que son message est
crédible, ce n’est pas sa grandeur visible, c'està-dire le nombre de ses fidèles, ni ses institutions ou ses richesses matérielles, mais c’est la
qualité du témoignage qu’elle donne du mystère
caché en elle et la vie de foi de ses fidèles qui la
rendent vivante et attirante.
Aussi, il faut donner une importance particulière au dialogue de vie avec l’islam, qui, à
mon avis, est plus fructueux que celui des idées
et des dogmes qui est souvent sans issue.
S.B. Ignace Youssif III Younan
Patriarche d’Antioche des Syriens,
©L'OSSERVATORE ROMANO
n Etlesrelationsavecl'islam?
©L'OSSERVATORE ROMANO
Père, tu es en moi et je suis en toi, qu’ils soient
en nous eux aussi afin que le monde croie que
tu m’as envoyé. » C’est un désir authentique de
rendre témoignage à Jésus mort et ressuscité
qui doit animer le dialogue œcuménique et non
le désir de rester accrochés jalousement à nos
sièges épiscopaux et patriarcaux dans le but
de conserver quelques privilèges mondains qui
nuisent terriblement à la cause de l’unité chrétienne.
FRANCECatholique n°322116 juillet 201013
Orient. L’Église latine de Jérusalem a fait le vœu
de tenir un synode général ; mais ce n’est pas la
masse du peuple chrétien du Liban, de la Syrie, de
l’Irak, de la Jordanie, de la Palestine, de l’Égypte
ou du Golfe, qui a manifesté ses craintes par l’intermédiaire d’un sondage préparé, ciblé et interprété socialement.
De plus, dans de pareils synodes, on remonte
au déluge et on traite de tous les sujets de la foi.
N’y a-t-il pas des sujets actuels et brûlants qui
mériteraient une étude appropriée ? Seul un sondage savamment élaboré pourrait le dire.
Toujours est-il qu'à la publication de l’Instrumentum laboris, tout le groupe diocésain
invité au synode devra s’atteler à l’étude d’une
façon plus précise. Alors, nous pourrons évoquer
quelques problèmes non encore posés, ou occultés. Y réussirons-nous ? Aurons-nous le temps et
la possibilité de le faire alors que nous sommes
pris par des soucis pastoraux nullement indiqués
dans les lineamenta, comme par exemple : le
déplacement des chrétiens dans des régions chrétiennes par souci de sécurité.
La réaction au synode dépendra de ses orientations, si elles sont appropriées. Dans la mesure
où il répond à nos besoins actuels, circonstanciés,
adaptés à notre pays et à nos cultures orientales
et arabes, sa réception se fera avec enthousiasme.
J’ai l’impression que le synode pour le Liban
était plus attendu que l’actuel : il a orienté bien
des énergies et bien des courants de pensée. Bien
sûr, tous ses souhaits n’ont pas été réalisés. Mais
il continue, cependant, à passer pour une date et
une référence dans notre vie ecclésiastique.
On ne s’attend pas à grand-chose du synode
pour les chrétiens d’Orient, à moins qu’on ne
concentre les études sur les relations entre les
chrétiens eux-mêmes, qu’ils soient catholiques ou
non, et sur les relations entre chrétiens et musulmans. Même si on le fait, il restera que les situations changent suivant les pays : les problèmes sont
très différents, qu’il s’agisse de la Palestine proprement dite, de l’Égypte, de la Jordanie, de l’Irak, de
la Syrie, du Liban, de l’Arabie Saoudite ou des pays
du Golfe. Chaque pays a ses problèmes.
nautés, dans l’une ou l’autre région, ont fait barrière à une véritable coopération pastorale. Ce
n’est pas l’initiative pontificale qui portera des
fruits. C’est la détermination des Églises catholiques à s’épauler qui fera plus d’effet. Plus l’initiative vient de l’intérieur, sans être imposée par
une décision étrangère, meilleurs seront les résultats. Cela suppose une profonde formation spirituelle des laïcs, administrateurs des paroisses.
Cela suppose aussi une unité organique entre les
facteurs de la pastorale : à savoir les moines et
les prêtres diocésains. Cela pose aussi en profondeur l’étude du grave problème des « exemptions
pontificales » (cas des religieux relevant directement de Rome), dans des communautés restreintes, atteignant à peine un million de fidèles.
Un seul
Seigneur,
une seule foi,
un seul
baptême... n Etaveclesorthodoxes?
...sans trop de Ce synode n’avancera pas l’union avec les
complications Églises orthodoxes, tant que le fondement d’unité
ne sera pas établi. Le fondement ne
théologiques théologique
peut pas être tout le développement théologique
du dogme survenu en Occident (et à quel prix !).
On a traité de schismatiques ou d’hérétiques
des fidèles qui ont toujours vécu sous le régime
des persécutions depuis deux mille ans et ont été
fermement attachés à leur foi en Jésus-Christ, au
prix de leur sang. Seraient-ils accusés d’être sortis
de l’Église parce qu’ils ont suivi leurs pasteurs ?
Faut-il continuer à les considérer comme des
chrétiens de seconde zone ?
Nos chrétiens d’Orient sont tous attachés à la
foi, telle qu’exprimée par saint Paul, spécialement
en Éphésiens 4 .4-6 (« Il y a un seul Corps et un
seul Esprit, de même que votre vocation vous a
appelés à une seule espérance ; un seul Seigneur,
une seule foi, un seul baptême ; un seul Dieu et
Père de tous, qui règne sur tous, agit
Mgr Joseph Kallas par tous, et demeure en tous ») sans
trop de complications théologiques.
Tous croient fermement à l’ensemble
du Credo de Nicée-Constantinople. Ce
n’est pas pour une interprétation de
ceci ou de cela, qu’il faut en venir à les
diviser en Églises rivales. Il faut plutôt prier le Saint Esprit pour les aider
à garder leur unité, malgré certaines
divergences d’opinions (Phil 3.15).
Les Églises catholiques particulières ont amélioré leur coopération depuis le synode pour le
Liban. Mais les résultats sont minimes. Le triomphalisme des uns, la volonté d’amalgame des
autres, au risque d’éliminer les petites commu-
14 FRANCECatholique n°322116juillet 2010
© œUVRE D'ORIENT
n Oùenestl'unitéentrelesÉglisesorientalescatholiques?
nPensez-vousquelesynodepourraservir
lesrelationsdesÉglisesavecl'islam?
Dans nos relations avec l’islam,
nous attendons un soutien de l’Oc-
cident pour que les droits de
Le travail que nous entreprenl’homme, concernant la liberté de
drons après la publication de l’Insconscience et l’égalité des droits,
trumentum laboris, au niveau du
soient respectés dans le monde
diocèse, préparera bien l’éparchie à
musulman. Là aussi, les situations
recevoir les conclusions du synode.
di vergent beaucoup, que l’on
soit au Liban, en Égypte ou en
n Cela servira-t-il l’union entre les
Palestine.
Églisesorientalescatholiques?
Sur un autre plan, nos prières
Les Églises orientales prendront
et notre enseignement théolosûrement en considération la situagique devraient être spécialement
tion des chrétiens dans les pays du
adaptés à nos milieux musulmans.
Moyen-Orient ainsi que les défis qui
Malgré un effort spécial déjà réainfluent beaucoup sur leur présence
lisé au Moyen Âge par nos Églises,
et leur rôle ; elles consolideront entre
nous devons davantage nous
elles les liens de communion et de
plonger dans la culture arabe, un
collaboration ; elles s’engageront
peu étrangère à nos différentes
à remplir la mission de l’Église en
langues liturgiques.
Orient, en offrant leur témoignage
Faut-il signaler les injustices
en actions. Cette initiative pontififlagrantes commises depuis un
cale qui implique la participation de
siècle à l’égard de nos frères
S.B. Grégoire III Laham
représentants des Églises orthodoxes
palestiniens, autant musulmans
(Patriarche grec-melkite d’Antioche)
et protestantes et de ceux des comque chrétiens ?
©L'OSSERVATORE ROMANO
munautés musulmanes et juives, incitera les Églises
Tant qu’elles existeront, tant que l’insécurité
orientales à prendre de leur côté des initiatives
prévaudra dans la région, la discrimination domiœcuméniques et à relancer le dialogue interreligieux.
nera. Qu’on donne la paix aux pays musulmans et
les idées pacifistes et fraternelles pourront alors
trouver un terrain favorable parmi eux. On ne
n Etaveclesorthodoxes?
changera pas le monde musulman en le matant
L’union entre les Églises ne dépend pas de ce
mais en le développant socialement et culturellesynode. Elle est travaillée au niveau des comment. Bref, développer la fraternité avant d’exiger
missions internationales mixtes. Cependant, le
l’unité de la foi ou celle de l’administration.
synode offrira l’occasion d’une plus large collaboration sur le plan tant pastoral que social et
Mgr Bechara Raï, évêque de Jbeil, Byblos des
culturel. Il aidera les Églises à donner un meilleur
maronites.
témoignage de vie dans la Charité et la Vérité.
n Commentavez-voustravaillé?
Les trois chapitres des lineamenta ont été
distribués à trois comités formés de prêtres,
religieux et laïcs. Une lecture finale unitive des
réponses au questionnaire après chaque chapitre
a été faite par moi-même.
Une commission d’évêques, de prêtres,
de religieux et de laïcs a été formée dans
l’Église maronite pour relancer le travail après
la publication de l’Instrumentum laboris.
Personnellement, je relancerai le travail selon un
plan que j’établirai avec le Conseil presbytéral
du diocèse et avec les responsables des mouvements apostoliques. En outre, je relancerai aussi
le travail dans mon programme hebdomadaire
d’une heure, « Formation chrétienne », diffusé par
la chaîne de télévision Télélumière/Nour Sat et
par la radio Voix de la Charité.
Développer
la fraternité
avant
d'exiger
l'unité
n Etlesrelationsaveclesmusulmans?
Je suis sûr que le synode servira les relations
des Églises avec l’islam. La participation des
délégués musulmans établira des points religieux, sociaux et culturels qui sont communs au
christianisme et à l’islam ; les musulmans auront
une meilleure compréhension des problèmes des
chrétiens, ainsi que de leur rôle dans les sociétés
musulmanes tant sur le plan religieux que sur le
plan économique, social et de développement ;
les musulmans et les chrétiens feront ensemble
la lecture des défis énoncés dans les lineamenta
et qui seront sûrement développés dans l’Instrumentum laboris et élaboreront ensemble une
stratégie apte à relever ces défis ; le dialogue
interreligieux sera relancé avec de nouvelles
visions et de nouveaux horizons. n
FRANCECatholique n°322116 juillet 2010 15
lectures
16e DIMANCHE ORDINAIRE
(année C)
Adimpleo
© LA BIBLE DES PEUPLES / ÉD. DU JUBILÉ
par le Père Michel Gitton
Marthe et Marie
10. 38 En cours de route, Jésus entra dans un village et une femme nommée
Marthe le reçut chez elle.
39 Elle avait une sœur, du nom de Marie, qui s’était assise aux pieds du
Seigneur et restait à écouter sa parole. 40 Marthe, pendant ce temps, était
absorbée par tout le service. À la fin elle se tourne vers Jésus et lui dit :
« Seigneur, ne vois-tu pas que ma sœur me laisse seule avec le service ? Dislui donc de m’aider ! »
41 Mais le Seigneur lui répond : « Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites
pour tant de choses ! 42 Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure
part, elle ne lui sera pas retirée. »
J
ean-Paul
II écrivait en 1983
au moment du Jubilé de la
Rédemption décidé cette annéelà : « La Rédemption ouvre
devant nous le livre magnifique
de notre solidarité avec le Christ
souffrant et, en lui, nous introduit
dans le mystère de notre solidarité
avec nos frères souffrants. Ce Jubilé
de la Rédemption nous fera vivre plus
intensément la communion des saints.
Les souffrances humaines sont le lot
commun à tous : chacun a sa propre
part à donner à la Rédemption qui,
bien qu’ayant été accomplie une fois
pour toutes, a besoin de ce mystérieux
complément, de l’offrande du si lourd
fardeau constitué par les maux et les
souffrances de l’humanité » et il citait
à l’appui la phrase de saint Paul que
nous trouvons dans la lecture de ce
dimanche : « Adimpleo : j’accomplis
dans ma propre chair ce qu’il reste à
souffrir des épreuves du Christ, pour
son corps qui est l’église » (Colossiens
1, 24).
Pas facile d’expliquer ce « mystérieux complément ». Le Christ n’auraitil pas tout donné ? Son offrande
aurait-elle encore besoin de nos
petits sacrifices et de nos faibles
mortifications ? Pouvons-nous faire
mieux que lui ? Pourtant, saint Paul
16 FRANCECatholique n°3221 16 juillet 2010
est formel, il y a bien quelque chose
à ajouter, il parle même du Corps qui
« complète la plénitude du Christ »
(éphésiens 1,23), un joli paradoxe !
C’est qu’en fait la plénitude du Christ,
ce n’est pas un résultat tout près qui
nous tomberait dessus par hasard,
une délivrance qui, ne nous ayant
rien coûté, nous resterait extérieure,
c’est une promotion qui met en branle
notre liberté, un nouveau statut
dans lequel Jésus nous prend comme
collaborateurs, et daigne prendre au
sérieux nos efforts encore infirmes
pour les associer à sa force à lui !
C’est tout le fondement de la
communion des saints, nous explique
le Pape : nous sommes bel et bien
connectés les uns avec les autres. Là
où le péché nous tenait isolés et de
Dieu et de nos frères, renfermés en
nous-mêmes, nous réapprenons à ne
pas être seuls, nous nous découvrons
membres du Christ qui, ayant mérité
pour nous le salut, nous fait bénéficier
de sa justice surabondante et nous
permet en conséquence d’œuvrer avec
lui, mais de plus nous voyons que
cela s’étend à nos frères, membres du
même corps : nous devenons à même
de bénéficier des dons des autres et
nous pouvons à notre tour contribuer
à leur avancée.
16e semaine du
Semaine de la garde
des commandements
par le Père Michel Gitton
XVIe Dimanche
1. Jésus qui s’offre à notre prière et
à notre adoration, avec le Père et le
Saint-Esprit (lecture de la Genèse).
➤ Adorons le Fils dans l’éblouissement
de la vie divine.
Point spi : Soyons généreux si nous
voulons que Dieu s’arrête chez nous.
2. Jésus dont le mystère a été longtemps
tenu caché (lecture de la lettre aux
Colossiens).
➤ Adorons le Verbe incarné révélé à la
plénitude des temps.
Si nos prières et nos actes de
renoncement peuvent servir à nousmêmes et à autrui, ce n’est pas que
nous aurions à payer quelque chose
en plus de la rédemption par la croix,
c’est parce que, bénéficiant du don
surabondant du Seigneur, nous sommes
élevés à une certaine ressemblance
avec lui, capables de donner (un peu)
notre vie avec lui, pour lui. Et c’est
une bonne nouvelle et un programme
exaltant.
On a découvert après sa mort que
Jean-Paul II ne se payait vraiment pas
de mots en ce domaine. On savait déjà
ses nuits de veille, ses longues prières
prosterné par terre, mais on découvrait
en plus ses gestes de mortification,
qui nous font un peu peur, mais nous
prouvent le sérieux de son amour.
N’aurait-il pas, sans cela, changé la
face de notre monde ?
à chacun de nous d’entendre cet
appel selon ses forces et sa grâce, mais
aucun de nous n’est dispensé d’achever
en sa chair le travail commencé par
Jésus, pour son Corps qui est l’église. n
Dimanche 18 juillet.
Première Lecture : Genèse 18.1-10
Psaume 15.2-5
Deuxième Lecture : Colossiens 1.24-28
Évangile : Luc 10.38-42.
lectures
temps ordinaire
Point spi : Entrons dans une communion
vitale avec Jésus par la prière et la pénitence.
3. Jésus qui donne double part à celle
qui se tient là et qui écoute (lecture de
l’évangile de Saint Luc).
➤ Adorons l’Hôte de nos cœurs.
Point spi : Ne nous laissons pas détourner de l’essentiel.
Lundi : le signe de Jonas
(Matthieu 12, 38-42)
1. Jésus qu’on provoque à donner un
signe, qu’on met au défi de répondre à
l’attente des hommes.
➤ Adorons le Dieu Sage qui sait ce qui
est bon pour nous et que nous n’avons
pas à « tenter ».
Point spi : N’exigeons pas de Dieu la
réponse qui nous arrange.
2. Jésus qui est le vrai signe donné au
monde, dont toute la vie est un signe
parlant à qui sait voir.
➤ Adorons Celui qui est bien plus que
Salomon, celui vers qui ont marché
tous les chercheurs de Dieu.
Point spi : Ne soyons pas aveugles aux
signes que Dieu a déjà mis sur notre
chemin.
3. Jésus dont la résurrection cachée
est le vrai signe donné aux hommes,
lui qui a connu la plus prodigieuse
intervention de Dieu qui soit.
➤ Adorons le Ressuscité qui déjoue
tous les calculs des hommes.
Point spi : Redisons sans nous lasser la
bonne nouvelle : Il est vivant !
Mardi : la vraie parenté de Jésus
(Matthieu 12, 46-50)
1. Jésus que revendiquent les siens,
Jésus sur qui les proches estiment avoir
des droits.
➤ Adorons le Verbe incarné qui s’est lié
à une famille humaine.
Point spi : Soyons solidaires des nôtres
mais gardons notre liberté spirituelle.
2. Jésus qui ne se laisse pas arrêter dans
sa mission, qui va de l’avant, oubliant le
chemin parcouru.
➤ Adorons l’Envoyé du Père, qu’aucun
canton du monde ne peut enfermer.
Point spi : élargissons nos horizons audelà de nos premières expériences.
3. Jésus fondateur d’une nouvelle
famille, où on entre par la foi et le
baptême.
➤ Adorons le grand frère, qui veut
vraiment partager notre vie.
Point spi : Sentons-nous proches de tous
les vrais chrétiens.
Mercredi : la parabole du semeur
(Matthieu 13, 1-9)
1. Jésus qui nous enseigne beaucoup de
choses en paraboles.
➤ Adorons la Sagesse qui se dit en
images, que nous pouvons atteindre à
travers mille figures.
Point spi : Prenons le temps de nous
laisser conduire, ne demandons pas des
explications faciles et immédiates.
2. Jésus qui nous parle du risque fou
pris par Dieu, de la prodigalité infinie
de son œuvre, où sa grâce est répandue
sans mesure.
➤ Adorons le Fils témoin de l’immensité
du Don de Dieu.
Point spi : Nous aussi ne travaillons pas
à l’économie, dépensons sans compter
nos efforts pour le salut de nos frères.
3. Jésus qui nous dit l’échec premier
d’une bonne partie des semailles.
➤ Adorons le divin Semeur qui accepte
de voir une partie de son œuvre devenue
inutile.
Point spi : Ne nous arrêtons pas aux
échecs et aux rebuffades.
Jeudi : Fête de
Sainte Marie Madeleine
1. Jésus qui en toute pureté de cœur
a accepté les marques d’affection de la
pécheresse.
➤ Adorons Celui qui accepte notre
amour et y trouve sa joie.
Point spi : Sachons quelquefois recevoir
ce que les autres ont à nous donner.
2. Jésus qui a éduqué Marie en lui
permettant un don toujours plus grand
et plus vrai.
➤ Adorons le Maître qui nous apprend
à aimer.
Point spi : Apprenons à l’école de Jésus
le détachement nécessaire.
3. Jésus qui a fait de Marie l’ « apôtre
des apôtres ».
➤ Adorons Celui qui donne à chacun
une vocation.
Point spi : Ne nous dérobons pas à la
mission que Dieu veut pour nous.
Vendredi : explication
de la parabole du semeur
(Matthieu 13, 18-23)
et Sainte Brigitte
(Fête en Europe)
1. Jésus qui se fait lui-même l’exégète
de ses propres paroles devant ses
disciples incompréhensifs.
➤ Adorons le divin Rabbi qui nous
explique la Parole.
Point spi : N’ayons pas peur de redire et
d’expliquer.
2. Jésus qui nous révèle l’aventure mystique que constitue cet accueil de la
Parole (la « parole semée dans vos
cœurs »).
➤ Adorons Celui qui est plus grain que
semeur, qui se glisse dans nos cœurs.
Point spi : Gardons une intériorité au
milieu de ce monde qui veut nous la
ravir.
3. Jésus qui sait nos tentations, notre
inconstance, mais qui nous amène à
cette écoute fidèle et confiante de sa
Parole.
➤ Adorons le Conseiller intime qui
nous connaît si bien.
Point spi : N’en restons pas à une écoute
routinière et blasée.
Samedi : la parabole de l’ivraie
(Matthieu 13, 24-30)
1. Jésus pour qui le Royaume est affaire
de croissance, de germination ; qui ne
connaît aucun arrêt, aucune sclérose.
➤ Adorons le Prince de la Vie.
Point spi : Ne nous posons pas de
questions insolubles, attendons l’heure
de Dieu.
2. Jésus qui n’a pas peur de nous dire
que quelque chose a pu perturber
l’œuvre du Père, que tout n’est pas écrit
d’avance.
➤ Adorons l’Innocent désarmé devant
le mal.
Point spi : N’attribuons pas à Dieu la
responsabilité du mal.
3. Jésus qui est sûr de la victoire finale,
de la grande clarification des derniers
temps
➤ Adorons le Juge des derniers temps,
témoins de la victoire de Dieu.
Point spi : Aidons les plus faibles à tenir,
en attendant la délivrance. n
FRANCECatholique n°3221 16 juillet 2010
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