129Revue des Sciences Sociales de la France de l’Est, 1995, n° 22
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Notes
1. DURKHEIM, Émile: La science sociale et
l’action Paris, PUF 1970 p. 120
2. ARON, Raymond : Les étapes de la pensée
sociologique : Paris, Gallimard, 1967 p. 84
3. COMTE, Auguste : Cours de Philosophie
Positive : Paris, Schleicher Frères éditeurs, 1907-
1908 (5° édition) T.VI p. 358
4. DURKHEIM, Émile: Les règles de la méthode
sociologique : Paris, PUF, 1937 (22° éd.
1986) p. 15
5. idem p. 45
6. bid p. 4
7. ibid p. 109
8. ibid p. 50
9. BACHELARD, Gaston: La formation de
l’esprit scientifique : Paris, Vrin, 1938 (12° ed
1983) p. 22
10. BOURDIEU, Pierre et al. : le métier de socio-
logue : Paris-La Haye, Mouton Bordas, 1968 (4°
éd. 1983) p. 28
11. DURKHEIM, Émile op. cit. p. 106
12. BOURDIEU, Pierre et al. op. cit. p . 12
13. BOURDIEU, Pierre 1991 cité GAULEJAC,
Vincent (de) et ROY, Shirley : Sociologies cli-
niques: Paris, Epi 1993, p 314
14. TOURAINE, Alain: La voix et le regard : Paris,
Seuil, 1978
15. Sur la question des formes que peuvent revêtir
les différentes figures de l’intervention (avec,
sur, pour et contre son client) voir DUBOST,
Jean: typologie et pratiques d’intervention in
Revue de l’Education permanente vol. 113,
1993
16. CALLON, Michel et LATOUR, Bruno (sous la
dir.): la Science telle qu’elle se fait : Paris, la
Découverte, 1991
17. BACHELARD, Gaston op. cit.
18. CALLON, Michel: la science et ses réseaux -
genèse et circulation des faits scientifiques :
Paris, la Découverte, 1991
19. Etudiant les réseaux électriques, la vidéo, la
physique... M.Callon, B. Latour et leurs colla-
borateurs du C.S.I ont multiplié les exemples
attestant de cette thèse.
20. MORIN, Edgar: Sociologie : Paris, Fayard,
1984 pp. 169-179
21. MORIN, Edgar: Commune en France - la méta-
morphose de Plozevet : Paris, Fayard, 1971
(réed LGF 1984)
22. DUBOST, Jean: art. cit.
23. Comme le soulignent GAULEJAC, Vincent
(de) et ROY, Shirley : op. cit. , l’Association
Internationale de Sociologie a consenti, au
début des années 90, à reconnaître ce carrefour
(pour ne pas parler d’école) d’expériences que
constitue la posture clinique en sociologie.
24. MORIN, Edgar Sociologie op. cit. p. 12
25. CROZIER, Michel et FRIEDBERG, Ehrard
L’acteur et le système Paris, Seuil, 1977 p. 257
26. DUBET, François : Sociologie de l’expérience :
Paris, Seuil, 1994 p. 257
27. idem p. 258
28. ibid. p.253
29. voir, notamment, DESMAREZ, Pierre : La
sociologie aux États-Unis Paris, A. Colin 1986
30. TOURAINE, Alain op. cit.
31. SAINSAULIEU, Renaud : L’Entreprise, une
affaire de société : Paris, Presses de la Fondation
Nationale des Sciences Politiques, 1992
p. 191
32. Cité par NISBET, Robert A. La tradition socio-
logique Paris, PUF, 1984 pour la traduction
française
33. COMTE-SPONVILLE, André : Petit traité des
grandes vertus : Paris, PUF, 1995 p.
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comme si on faisait des révérences au «ter-
rain humain», comme le dirait Edgar Morin,
pressentant le potentiel d’une telle sociolo-
gie qu’on se contente d’approcher sur la
pointe des pieds par crainte, peut-être, de
perdre le souvenir des racines incarnées par
les pères fondateurs.
Quelles que soient les réticences, la so-
ciologie clinique doit maintenir son projet.
Oeuvrer en sociologue et dans une perspec-
tive clinique revient à accepter la logique de
l’intervention sociologique et par voie de
conséquence à s’interroger sur la méthodo-
logie d’intervention du sociologue. L’inter-
vention sociologique n’est certes pas récen-
te(29)(Desmarez 1986), la sociologie de
l’intervention (pas nécessairement sociolo-
gique) a déjà été maintes fois esquissée
(Hess, 1981). Mais une sociologie de l’in-
tervention sociologique qui contribuerait à
l’élaboration d’une méthodologie de l’inter-
vention et à une théorie sociologique sur la
question reste un chantier ouvert. Les tra-
vaux d’Eugène Enriquez, de Max Pages, de
Didier Anzieu, qui ont déjà inspiré le dispo-
sitif actionnaliste d’Alain Touraine(30), de de
Gaulejac constitueraient un bloc dont le té-
lescopage avec les raisonnements stratégi-
ques, conventionnalistes ou bien encore
l’école de la sociologie de l’innovation
pourrait être productif.
Le statut hybride du sociologue
Avec la sociologie de l’intervention se
pose également la question de la redéfini-
tion de la place du chercheur. L’entreprise,
l’organisation deviennent à la fois objets et
partenaires pour la recherche, notamment
dans une période de modernisation rapide et
dans un contexte de crise et d’interrogation
sur l’avenir comme celui que nous connais-
sons aujourd’hui. Ainsi, chercheurs et en-
treprises sont de plus en plus étroitement
associés, passant des recherches sur l’entre-
prise à des recherches dans et pour l’entre-
prise.
Cette présence tierce, provenant de l’ex-
térieur - qu’elle soit issue de centres de re-
cherches, des universités ou de cabinets pri-
vés - pour accompagner une dynamique
d’innovation, pour mettre en place des struc-
tures d’organisation nouvelles, pour mener
une conduite sociale du changement.... est
de plus en plus sollicitée .Les anciens débats
bipolaires (négociations patronat-syndicats
ou d’autres oppositions classiques, hiérar-
chiques-exécutants, opérationnels-fonction-
nels) apparaissant inopérants, la médiation
d’un tiers introduit la possibilité de jeux so-
ciaux différents. Sa présence active permet
d’engager «une dynamique d’objectivation,
de distanciation et de simulation de formules
alternatives et le consensus entre partenaires
du changement qui en résulte peut ainsi ne
plus être vu comme le compromis répétitif
des forces en place»(31).
Ce faisant, le sociologue pratiquant l’in-
tervention sociologique accumule par ses
expériences de terrain un ensemble de
connaissances et de savoir-faire pouvant
produire à terme une véritable méthodolo-
gie du développement institutionnel et de
l’entreprise et plus généralement un savoir
sociologique, aux enjeux sociétaux.
Pratiquer l’intervention sociologique en
même temps que de travailler à une socio-
logie de l’intervention, c’est accepter non
seulement le terrain, mais aussi le fait d’être
commandité, d’avoir une dépendance fi-
nancière, de se confronter à des acteurs qui
adressent des demandes, ont des attentes.
Participer à l’analyse d’un système c’est
être (se mettre) avec les acteurs de ce systè-
me - que ce soit en alliance, en compromis
ou en opposition, c’est donc «se compro-
mettre». Positionné en consultant, perçu en
expert, oeuvrant en chercheur, éventuelle-
ment universitaire, le sociologue pratiquant
l’intervention ne peut pas se réfugier derriè-
re la pureté de son statut, celle-ci est ficti-
ve. L’hybridation est incontournable, elle
doit donc être gérée; il y a là un objet de re-
cherche supplémentaire.
Conclusion
L’infidélité à l’égard d’une tradition po-
sitiviste qui n’accorde guère de crédit à la
posture clinique en sociologie est ici claire-
ment revendiquée. La sociologie clinique
ne parvient pas à se «couler dans les mou-
les»(32) légués par les fondateurs de la disci-
pline mais ses tenants se souviennent de la
belle formule de R. Nisbet dans son épilo-
gue à la Tradition Sociologique: «Tôt ou
tard, il se produit une révolte, un abandon
des «chrysalides» du concept et de la mé-
thode». La sociologie clinique est encore
obstruée par les couches de la convention
qui la considère comme l’enfant un peu
bohème, un peu têtu, d’une discipline forte-
ment institutionnalisée, elle est contrainte
d’emprunter les chemins de traverse; ainsi
mûrit-elle, pour partie, à l’extérieur de la
«citadelle» dont parlait Keynes en visant les
partisans de la théorie économique stan-
dard.
Cette infidélité n’est toutefois pas sans
rappeler la position qui était celle de la
sociologie des origines à l’égard des
«humanités» classiques; elle heurtait les
idées arrêtées de son époque, revendiquant
tout à la fois sa part de vérité et sa pertinence
par rapport au réel. Là où le philosophe
prône la «Fidélité au vrai d’abord, puis au
souvenir de la vérité (à la vérité gardée)» 33,
nous suggérons simplement aux socio-
logues de se souvenir qu’avec la seule fidé-
lité au «vrai» et à la «vérité» il n’y aurait pas
de sociologie.