journal des Débats - Bibliothèque de l`Assemblée nationale du

journal
des
Débats
Le vendredi 21 octobre 1977
Vol. 19 —No 105
Table des matières
Questions orales des députés
Exode éventuel d'employés du Reader's Digest 3607
Construction navale au Québec 3608
Emission des plaques d'immatriculation 3610
Grève à la traverse Berthier-Sorel 3612
Exode de diplômés en art dentaire de l'Université McGill 3613
Subvention à la municipalité de Saint-Féréol 3614
Travaux parlementaires 3615
Débat sur le programme de relance économique du gouvernement du Québec
M. René Lévesque 3615
M. Gérard-D. Levesque 3624
Motion de censure 3627
M. Rodrigue Biron 3627
M. Fabien Roy 3633
M. Raymond Garneau 3635
M. André Raynauld 3637
M. Bernard Landry 3638
M. Maurice Bellemare 3639
Ajournement 3640
3607
(Dix heures treize minutes)
M. Richard (président): A l'ordre, mesdames
et messieurs!
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les
projets de loi privés.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de projets de loi au nom du gou-
vernement.
Présentation de projets de loi au nom des-
putés.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
Période de questions orales.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Exode éventuel d'employés du
Reader's Digest
M. Lalonde: Ma question pourrait s'adresser
au ministre de l'Industrie et du Commerce. Il y a
quelques jours, le président de Reader's Digest,
M. Edward Paul Zimmerman, déclarait, lors de la
tenue de l'assemblée générale des actionnaires de
la compagnie, que celle-ci avait suspendu son pro-
jet d'expansion au Québec depuis le 15 novembre
1976, et je rapporte la citation du Devoir du jeudi
20 octobre 1977, sous la signature de M. Michel
Vastel, "tant que l'incertitude politique demeurera
au Québec"; deuxièmement, que la compagnie a
décidé de déplacer trois services plus volatiles, et
je cite aussi l'article, "à cause de la politique
linguistique du gouvernement". En tout, 150 ca-
dres et 450 emplois indirects quitteront le Québec.
M. le Président, ma question est la suivante:
Le ministre a-t-il été tenu au courant? Dans l'arti-
cle, on dit: Le gouvernement Lévesque a été tenu
au courant de cette éventualité. Le ministre de
l'Industrie et du Commerce est-il au courant? Ses
services ont-ils été tenus au courant de ce départ
éventuel, et quelles sont les dispositions qu'il en-
tend prendre?
M. Tremblay: M. le Président, on conçoit faci-
lement qu'une publication comme Reader's Digest
ne soit pas une entreprise de type industriel de
sorte que la réponse à la question du député est
que le ministre de l'Industrie et du Commerce n'a
pas été tenu au courant par Reader's Digest.
M. Lalonde: M. le Président, parmi les nom-
breux ministres que nous avons ici pour le débat
d'urgence du gouvernement, parmi ces nombreux
ministres, est-ce qu'il y en a, peut-être le premier
ministre a-t-il été tenu au courant, ou son bureau
ou le ministre d'Etat au développement culturel?
M. Lévesque (Taillon): Je crois que le ministre
d'Etat au développement culturel ou le ministre
d'Etat au développement économique pourrait-
pondre. Le ministre d'Etat au développement cul-
turel est prêt à le faire rapidement.
M. Laurin: M. le Président, nous sommes te-
nus au courant; mon collègue également suit le
dossier de très près. Il semble bien que les autori-
s du Reader's Digest n'ont pas compris le sens
exact de la loi 101 et que leurs inquiétudes sont
mal fondées car si elles avaient lu correctement
l'article 145 du projet de loi qui demande à l'Office
de la langue française de tenir compte dans les
programmes de francisation de la situation parti-
culière des entreprises qui s'occupent de biens
culturels, elles auraient vu que cet article leur
donne toute la possibilité de poursuivre leurs acti-
vités dans la ligne qu'elles avaient déjà commencé
de suivre.
Nous avons pris des mesures pour que les au-
torités du Reader's Digest puissent rencontrer la
haute direction de l'Office de la langue française
afin que la situation leur soit expliquée. Nous at-
tendons, en ce moment, les réactions de la
compagnie. Je ne sais pas si mon collègue au-
veloppement économique va ajouter quelque
chose à l'information que je viens de vous donner.
Le Président: M. le ministre d'Etat au déve-
loppement économique.
M. Landry: M. le Président, mes services sont
également en contact avec la direction du Read-
er's Digest. Ce que le député de Marguerite-
Bourgeoys appelle une éventualité est véritable-
ment une éventualité. Il n'y a pas de décision de
prise. J'ajouterais, par ailleurs, très clairement, M.
le Président, que le gouvernement du Québec, ni
pour cette entreprise, ni pour aucune autre n'a
l'intention de se mettre à genoux devant quicon-
que, étant donné que ce pays a des virtualités
économiques suffisamment importantes en soi et
est un endroit de localisation, pour des motifs de
pure rationalité économique, suffisamment inté-
ressant pour que nous n'en soyons pas réduits,
comme certains de nos partenaires commerciaux,
à la sollicitation d'entreprises.
Le Président: M. le député de Marguerite-
Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, avec une telle at-
titude on se demande pourquoi les gens quittent
le Québec. M. le Président, ni l'intransigeance, ni
le manque de modestie de ce gouvernement vont
nous servir.
Je voudrais réagir, poser une question addi-
tionnelle au ministre d'Etat au développement cul-
turel et attirer son attention sur l'article que j'ai
mentionné tantôt où on dit que "le chapitre qui
occasionne le plus de difficultés à l'éditeur serait
3608
celui qui se rapporte à l'accès au système d'ensei-
gnement anglo-protestant ; ceci pour indiquer au
ministre que l'article 145 ne semble pas régler le
problème qui se pose. Est-ce que le ministre est
d'avis que les dispositions de la loi 101, qui sont
contenues au chapitre de la langue d'enseigne-
ment, ne sont pas de nature justement à causer le
départ de cadres qui ne peuvent plus continuer ici
et surtout de services qui ne peuvent plus amener
de cadres de l'extérieur? N'est-ce pas là une illus-
tration que les dispositions de la loi 101 sont insuf-
fisantes pour régler le problème?
M. Laurin: M. le Président, c'est là un vieux
débat qui a été fait à profusion et en profondeur
au mois d'août. Je me contenterais de rappeler,
pour le moment, au député de Marguerite-
Bourgeoys que cette compagnie, comme les au-
tres, pourrait profiter de l'article 81 et du règle-
ment afférent à l'article 81, et qu'elle serait peut-
être bien avisée d'en explorer toutes les possibili-
tés.
Quant à l'autre partie de la question qu'il me
pose, ce qu'il en dit est exactement au fond de la
position que nous avons prise et de l'espoir que
nous continuons d'avoir quant à la conclusion
d'accords de réciprocité avec les autres provinces
du Canada en ce qui concerne l'accès au système
d'enseignement.
Le Président: M. le député de Pointe-Claire.
M. Shew: Une question additionnelle. I would
like to take this opportunity to make my first inter-
vention in English since the passage of bill 101.
M. Bertrand: It is possible.
M. Shaw: Oh, yes! I am recognizing that.
But I would also like to take advantage to
follow the question because Reader's Digest
situation only represents a thin piece of a large
wedge of continuing exodus associated with the
implication of the injustices to the anglophone
community by bill 101. And my question to the
minister responsible for cultural development is:
Do you really feel that there can be any "relance
économique" in the province of Québec until we
reconcile the injustices between the English and
French-speaking people in this province?
M. Laurin: Ce n'est pas là une question; c'est
la continuation du plaidoyer que mène le député
de Pointe-Claire depuis plusieurs mois. Je lui en
laisse la responsabilité.
Le Président: M. le député de Jean-Talon.
Construction navale au Québec
M. Garneau: Ma question s'adresse au minis-
tre de la Fonction publique. Le printemps dernier,
le ministre de la Fonction publique avait annoncé
l'intention du gouvernement de créer une marine
marchande au Québec.
M. Levesque (Bonaventure): L'amiral!
Des Voix: L'amiral!
M. Lalonde: Vous n'avez pas assez d'être ami-
ral, vous êtes le dictateur.
M. Garneau: Les journaux d'hier nous rappor-
tent les déclarations faites par la Fédération de la
métallurgie de la CSN qui lance un appel pressant
du Québec au gouvernement fédéral afin que ce
dernier se penche, d'une façon très sérieuse, sur
la situation des chantiers de construction de ba-
teaux au Québec. Ma question s'adresse au minis-
tre de la Fonction publique: Est-ce que le gouver-
nement a mis au point et terminé les éléments es-
sentiels de la mise en place d'une marine mar-
chande au Québec?
M. de Beileval: Je vois que...
Une Voix: C'est lui, l'amiral?
M. de Beileval: ... le sous-chef du référendum
fédéral...
M. Lalonde: Un peu plus fort!
M. de Beileval: ... a l'ironie plutôt grossière
aujourd'hui. Il a, ce matin, recevoir un
déjeuner-causerie du chef intérimaire à la suite de
son intervention à Toronto. Je laisserai, par
conséquent, le soin à mon collègue le ministre des
Transports de répondre à cette question s'il la juge
suffisamment sérieuse.
M. Garneau: M. le Président...
M. Lessard: M. le Président, nous n'envisa-
geons pas, en tout cas pour le moment, une ma-
rine marchande à pavillon québécois; cependant,
nous avons l'intention de présenter une politique
pour essayer de sauver les petits caboteurs qué-
bécois, au moins.
Une Voix: Les quoi?
M. Lessard: Les caboteurs québécois.
M. Lalonde: Un cabotin et un caboteur!
M. Garneau: Si le ministre de la Fonction pu-
blique veut me donner, comme sous-chef, tous les
pouvoirs que sa loi 53 donne aux sous-chefs, je
serais très heureux parce que je pourrais diriger le
Parti libéral.
Une question additionnelle au ministre de
l'Industrie et du Commerce. Depuis déjà quelque
temps, dans le domaine de la construction navale,
des rumeurs circulent quant à la difficulté qu'a la
Société générale de financement, via Marine In-
dustrie, dans son contrat avec les bateaux grecs.
Est-ce que le ministre de l'Industrie et du
Commerce pourrait nous dire si le problème du fi-
nancement de ces bateaux, qui sont toujours à la
3609
disposition de Marine Industrie et qui ne veulent
pas être pris par les armateurs grecs.
Est-ce que le problème de financement de la
Société générale de financement a été réglé à cet
égard? Si oui, de quelle façon?
M. Tremblay: M. le Président, en réponse à la
question du député de Jean-Talon, je suis heureux
de dire que les problèmes de construction, les
problèmes financiers de Marine ont été effective-
ment réglés. La direction de l'entreprise Marine a
d'ailleurs convoqué une conférence de presse,
pour aujourd'hui à quatre heures, où elle annon-
cera l'opération de refinancement d'une partie des
contrats qu'elle a présentement dans ses carnets.
L'entreprise Marine est, parmi les chantiers
maritimes du Canada, celle qui a le carnet de
commandes le mieux rempli et, au plan internatio-
nal, elle tient une position très favorable. Au-deià
de six bateaux de type marindhus doivent être
construits. Elle a des commandes pour trois pétro-
liers, en provenance de Cuba, et quatre comman-
des de bateaux additionnels en provenance de la
Pologne.
Mais je laisserai la direction de l'entreprise
faire de plus amples commentaires lors de la
conférence de presse qu'elle a convoquée pour
cet après-midi.
M. Garneau: M. le Président, sur le même su-
jet, je trouve difficilement acceptable que le minis-
tre responsable de la Société générale de finan-
cement ne veuille pas informer en priorité cette
Chambre, de ces décisions, alors que nous sié-
geons. Ma question additionnelle est la suivante:
Est-ce que le ministre de l'Industrie et du
Commerce pourrait nous dire si les bateaux en
question seront effectivement achetés par les
Grecs ou s'ils devront être financés et conservés
par la SGF en attendant de trouver un nouveau
preneur?
M. Tremblay: M. le Président, il s'agit d'une
question très complexe. Dans le cas de ces
commandes de bateaux de la part d'un grossiste
grec, lesquelles commandes ont été faites en
1973, pour un nombre de 18 bateaux, un certain
nombre a été livré à l'armateur grec, un certain
nombre a été vendu à la France, un certain nom-
bre a été vendu à l'Algérie, et il restait six bateaux
en commande. Il y a eu une renégociation de ces
contrats, étant donné que ces contrats internatio-
naux sont relativement souples et que la baisse du
marché international a forcé à la fois ('armateur et
l'entreprise à renégocier ces contrats.
Tout ceci se fait dans un effort de vente qui
est patronné par la société fédérale d'expansion
des exportations, en collaboration avec quelques
grandes banques canadiennes, de sorte qu'il y a
un programme de vente de ces bateaux, par le
truchement de l'armateur principal.
Mais il ne s'ensuit pas nécessairement que
l'armateur principal soit l'acheteur définitif de ces
bateaux. Ce sont toutes ces questions techniques
qui vont être expliquées par la direction de Ma-
rine.
M. Garneau: Dernière question, M. le Prési-
dent. Est-ce que le ministre pourrait nous confir-
mer de façon plus précise si c'est effectivement la
société pour l'aide à l'exportation du fédéral qui
assumera la grande partie du financement de ces
bateaux en attendant qu'ils soient revendus?
M. Tremblay: M. le Président, sur cette ques-
tion de financement il faut faire une distinction en-
tre le financement de la construction et le finan-
cement des ventes. Le financement de la cons-
truction se fait en collaboration entre Marine, la
SGF et le gouvernement du Québec en collabora-
tion avec la société d'expansion fédérale.
En ce qui concerne, par contre, les ventes, el-
les sont financées uniquement par la société d'ex-
pansion des exportations fédérales parce que la
société fédérale d'expansion des exportations ne
finance pas habituellement la production comme
telle. Elle finance les ventes. Ajoutons à cela une
contribution du ministère fédéral de l'Industrie et
du Commerce qui accorde une subvention de 17%
à la construction pourvu que ce soient des ventes
faites à l'étranger, de sorte qu'il y a un ensemble
d'intervenants dans ce dossier. Ceci se fait en très
grande collaboration, je dois le dire, M. le Prési-
dent.
M. Garneau: Après la réponse qu'a donnée le
ministre, j'aurais une question additionnelle. Est-
ce que le gouvernement a dû donner sa garantie
pour le financement auprès des banques ou si le
prêt dont parle le ministre a été simplement ga-
ranti par l'inventaire des bateaux?
M. Tremblay: Dans le cas de la construction
comme telle, compte tenu de l'importance du
montant il s'agit d'un montant d'environ $110
millions en dollars américains qui crée environ
2000 emplois au chantier maritime de Marine,
étant donné cette importance, la SDI, avec l'auto-
risation du gouvernement, participe à la garantie
du prêt auprès de la société d'expansion fédérale
et des grandes banques canadiennes.
Le Président: M. le député de Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, question addi-
tionnelle à celle du député de Jean-Talon. J'écou-
tais tantôt le ministre des Transports qui disait sa
volonté d'aider les caboteurs québécois à moder-
niser leur flotte. Il a dit dans le même souffle qu'il
ne croyait pas à une marine marchande. Je pense
que c'est assez sensé en raison des salaires qui
sont payés dans le Québec en comparaison des
salaires versés aux marins qui viennent de Hong
Kong, du Japon ou d'ailleurs. Ma question est la
suivante: Est-ce que devant le marasme que
connaissent les chantiers maritimes du Québec, il
ne serait pas logique que le gouvernement...
Quel que soit le ministre à qui je m'adresse,
devant le développement éventuel des mines de
sel des Iles-de-la-Madeleine, que nous aurons à
transporter des Iles-de-la-Madeleine vers l'inté-
rieur du Saint-Laurent et possiblement vers le
marché d'exportation de la Nouvelle-Angleterre et
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