S É Q U E N C E 9 LE DÉBAT PUBLIC Serge Erard F I C H E S 1 À 6 A N N E X E 1. Dossier thématique Avertissement Cette séquence applique les Rectifications de l’orthographe, publiées le 6 décembre 1990 par le Conseil supérieur de la langue française. Volume 4 Expression orale Argumenter Etapes Buts Activités Matériel Lecture d'une lettre Ecoute de quatre prises de position Préparation des deux débats Production des deux débats Discussion sur les deux débats Evaluation des difficultés rencontrées • enregistreur + micro (• caméra vidéo) • enregistrement 1 : quatre prises de position • fiche 1: lettre de Dylan Mise en situation et Production initiale • Clarifier l'objet du travail d'argumentation • Saisir les enjeux d'une controverse • • • • • • Module 1 « Le débat » • Ecouter et analyser un débat • Suivre et comprendre un débat en temps réel • Ecoute guidée par un questionnaire • Réponses à un questionnaire à choix double • Réponses à des questions ouvertes • enregistreur • enregistrement 2 : débat complet d'adultes sur la mixité • fiche 2 Module 2 Nuances et incertitude • Prendre en charge des arguments : – Ecouter, relever et utiliser des marques de prise en charge énonciative • Modaliser des arguments : – Ecouter, relever et utiliser des marques de modalisation • Repérage de marques de prise en charge énonciative • Classement d'énoncés selon leur degré de certitude • Observation de nuances auxquelles recourent des débatteurs experts • Transformation d'affirmations péremptoires pour les nuancer • enregistreur • enregistrement 3 : deux prises de position • fiche 3 Module 3 Reprise et développement d'arguments • Reprendre, soutenir et approfondir les arguments d'un autre : – Reprendre la parole de l'autre dans son propre discours – Intervenir à l'appui d'un débatteur – Distinguer divers types d’arguments • Observation de reprises d'experts • Anticipation d'enchainements • Reconstitution de raisonnements implicites • Ecoute et analyse d'une prise de position • Production et enregistrement de développements • enregistreur + micro • enregistrement 4 : développement d'un argument • enregistrement 5 : position de Muriel • fiche 4 Module 4 L'expression du désaccord • Exprimer son désaccord • S'opposer tout en ménageant la face d'autrui • Anticiper et produire des objections • Discuter en groupes et en classe de la pertinence des productions proposées • Reconstitution de réfutations à partir du résumé du modérateur • Comparaison avec celles effectivement réalisées par les participants à un débat • Production d'objections • Discussion de ces productions • enregistreur + micro • enregistrement 6 : quatre prises de position • fiche 5 Module 5 Les contenus thématiques • Acquérir quelques connaissances sur le thème de la coéducation • Recenser des arguments favorables ou non à la coéducation • Comprendre les enjeux et les conséquences de la coéducation • Lecture du dossier thématique • Inventaire et classement des arguments • Recours à des mots clés et à la nominalisation • annexe 1 : dossier thématique sur la coéducation Etapes Buts Activités Module 6 Constats et règles • Récapituler les constats établis au cours de la séquence • Savoir reconnaitre dans un débat les divers principes et mécanismes argumentatifs qui ont été étudiés lors des modules • Se préparer à utiliser ces moyens pour un débat formel • Révision des points abordés au cours de la séquence • Ecoute de fragments d'un débat • Elaboration de règles • enregistreur • enregistrement 7 : douze extraits de débat • fiche 6 Production finale • Participer à un débat • Mettre en pratique les règles définies pour le débat public • Préparer un enregistrement pour une autre classe qui visionnera le débat et y réagira • • • • • partie du tableau préparé au module 5 • aide-mémoire • caméra vidéo ou • enregistreur + micro • enregistrement des productions initiales Préparation de deux nouveaux débats Production de deux nouveaux débats Discussion sur les deux débats Evaluation des progrès réalisés Matériel Fi ch e 1 Mise en situation – Lettre de Dylan Bonjour, Je m’appelle Dylan. J’ai 14 ans. Depuis quelque temps, dans notre école, tout le monde discute à propos de la mixité pendant les leçons de gymnastique. Il y a tellement d’opinions différentes sur cette question que je ne sais plus quoi penser. J’ai des copains qui râlent chaque fois qu’ils entendent parler de pratiquer certains sports avec les filles. Par exemple, ils disent que les filles ne pourront jamais jouer correctement au foot avec nous. Mais d’autres garçons disent que les salles de gym ne sont pas faites pour jouer au foot et trouvent toutes sortes d’arguments pour rester ensemble, filles et garçons. Quant aux filles, elles ne sont pas toutes du même avis. Certaines pensent que l’école doit être la même pour les garçons et les filles et qu’il faut proposer les mêmes activités pour tous. D’autres trouvent les leçons de gymnastique mixtes pénibles. D’après elles, les garçons sont trop violents. Elles se font chahuter si elles n’arrivent pas aux mêmes performances qu’eux. Que pensez-vous de ce problème ? Faut-il que les garçons et les filles restent ensemble en classe de gym ? Faut-il les séparer ? Peut-on trouver d’autres solutions ? 9 Je suis sûr que ce thème peut intéresser d’autres écoliers. Je vous propose donc d’organiser un débat dans votre classe, de l’enregistrer et de l’envoyer à une autre classe. Merci d’avance de votre collaboration. S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 Dylan 9. Le débat public 1/1 Fi ch e 2 1/2 Vous allez écouter une ouverture puis un débat d’adultes dans son intégralité. Après avoir écouté chacune des interventions l’une après l’autre, cochez la bonne réponse. Attention, la bande défile et ne s’arrête pas, comme cela est le cas quand vous écoutez des gens échanger entre eux. Participants : Mme Patricia DAFFLON (Pa), Mme Muriel WACKER (Mu), M. Christian HOSTETTLER (Ch) ; M. François de PIETRO (Fr) mène le débat (modérateur). Le numéro qui suit les initiales des intervenants indique les tours de parole ; ne vous en inquiétez pas ! Pa3 Pa est-elle pour ou contre la mixité ? ❏ POUR ❏ CONTRE Se réfère-t-elle à son expérience personnelle ? ❏ Mu4 OUI ❏ NON Mu est-elle pour ou contre la mixité ? ❏ POUR ❏ CONTRE Se réfère-t-elle à son expérience personnelle ? ❏ Ch5 OUI ❏ NON Ch est-il pour ou contre la mixité ? ❏ POUR ❏CONTRE Se réfère-t-il à son expérience personnelle ? ❏ Mu6 S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 ❏ FAUX VRAI ❏ FAUX VRAI ❏ FAUX VRAI ❏ FAUX VRAI ❏ FAUX A l’école, il est plus important de former les élèves à la coopération que de former des supergénies. ❏ Ch13 VRAI Ce sont les filles qui profitent le plus de la solidarité en classe. ❏ Pa12 FAUX La mixité n’empêche pas les filles de bien apprendre. ❏ Mu11 ❏ Le meneur de jeu (modérateur) reformule la position de Mu. ❏ Ch10 VRAI Supprimer la mixité à l’école serait aller dans le sens du progrès de l’humanité. ❏ Fr9 9 NON Ce qui est important, c’est de rendre le plus possible les activités mixtes. ❏ Pa8 ❏ Mu dit que les gens n’aiment pas du tout avoir des activités où filles et garçons sont séparés. ❏ Ch7 OUI VRAI ❏ FAUX Si on met les bons élèves ensemble, il y a automatiquement un mélange filles/ garçons. ❏ VRAI ❏ FAUX 9. Le débat public Fi ch e 2 Mu14 Les filles sont plus concentrées quand elles sont avec des garçons. ❏ Ch16 ❏ FAUX VRAI ❏ FAUX VRAI ❏ FAUX Ch dit qu’il est d’accord avec de tels regroupements mais à titre d’exceptions. ❏ Fr20 VRAI Sans revenir aux écoles séparées de nos grands-parents, ce serait bien qu’il y ait des regroupements de filles ou de garçons pour certaines activités. ❏ Ch19 FAUX L’école doit être une image de la réalité et donc être mixte comme la vie. ❏ Mu18 ❏ A l’école, c’est plus important d’apprendre l’allemand et les maths que d’apprendre à vivre ensemble. ❏ Pa17 VRAI VRAI ❏ FAUX Le modérateur pense que les élèves n’ont pas à donner leur avis sur la question de la mixité. ❏ VRAI ❏ FAUX Questions ouvertes 9 1. Qui avez-vous trouvé le plus convaincant ? _________________________________________ Pourquoi ? _________________________________________________________________________________ 2. Quel argument vous a le plus convaincu ? _________________________________________________________________________________ Pourquoi ? S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 _________________________________________________________________________________ 3. Y a-t-il un argument qui vous a choqué ? Lequel ? _________________________________________________________________________________ Pourquoi ? _________________________________________________________________________________ 4. Qui avez-vous trouvé le plus habile à défendre sa position ? _________________________________________________________________________________ Pourquoi ? _________________________________________________________________________________ 9. Le débat public 2/2 Fi ch e 3 1• Lisez attentivement les extraits de la réplique de M. Wacker. Mu/11 [tronqué] • 1. je pense que les filles pourront aller plus rapidement 2. c’est vrai qu’elles sont quand même souvent freinées par l’indiscipline des garçons 3. il me semble que la solidarité entre filles et garçons est plus souvent à sens unique 4. j’observe plus souvent des filles qui aident des garçons dans certaines circonstances plutôt que l’inverse 5. spontanément je sais pas si réellement ils se brassent comme ça 6. est-ce que les garçons ne ne trouvent pas les filles intéressantes justement quand elles peuvent les aider les encourager dans un travail ? 7. je crois que les filles peuvent aussi être agressives entres elles 8. les filles souvent font un peu office de tampon dans l’agressivité entre garçons 9. les garçons régulent un peu l’agressivité qui peut régner entre les garçons Reprenez un à un tous les énoncés en éliminant les traces de modalisation, comme dans les deux exemples 1 et 5. 1. les filles iront plus rapidement ________________________________________________________ 2. _______________________________________________________________________________________ 3. _______________________________________________________________________________________ 4. _______________________________________________________________________________________ 5. dans les faits, ils ne se brassent pas spontanément comme ça _________________________ S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 6. _______________________________________________________________________________________ 7. _______________________________________________________________________________________ 8. _______________________________________________________________________________________ 9. _______________________________________________________________________________________ • 1/2 Observez en quoi cette tirade a changé. Que constatez-vous ? ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ 9. Le débat public 9 Fi ch e 3 2• Lisez la fin de la dernière intervention de C. Hostettler (Ch 19). Ch/19 • Comparez-la avec le début de sa première intervention (Ch 5). Ch/5 • et euh la mixité à mon avis doit perdurer mais c’est vrai que j’abonde un tout petit peu dans ton sens quand même en disant que peut-être qu’à un moment ou un autre on peut on peut peut-être privilégier un groupe particulier momentanément mais il ne faudrait pas que ce soit la règle générale alors personnellement je suis farouchement opposé à la séparation des garçons et des filles dans les classes A quel moment du débat son opinion est-elle plus nuancée ? Comment expliquer cela ? ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ 3• 9 Lisez la fin de la dernière intervention de M. WACKER (Mu 18). Mu/18 • Comparez-la avec le début de sa première intervention (Mu 4). Mu/4 S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 • mais c’est pas forcément mon propos de dire recréons les écoles comme autrefois mais c’est peut-être de penser à prévoir des des espaces des moments où les filles puissent se retrouver ensemble et les garçons ensemble et pas forcément dans des activités de gymnastique uniquement mais peut-être aussi dans d’autres moments alors moi personnellement je suis radicalement opposée à la mixité Que pensez-vous de l’évolution de son opinion sur la mixité ? ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ • Comment expliquez-vous ce changement ? ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ 9. Le débat public 2/2 Fi ch e 4 1• Lisez attentivement l’extrait ci-dessous. Mu/11 • 1/2 alors ça c’est peut-être euh aussi quelque chose que j’ai observé c’est que les filles souvent font un peu office de tampon dans l’agressivité entre garçons les garçons se régulent un peu le l’agressivité qui peut régner entre les garçons En entendant de tels propos, si vous étiez pour la mixité, comment enchaineriezvous pour aller dans le même sens ? ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ 2• Lisez attentivement l’extrait ci-dessous et observez comment l’exemple de la mixité à l’armée est exploité par Christian. Ch/7 • je prends même un exemple le plus évident l’armée suisse hein par exemple longtemps n’a été l’affaire que des hommes et bien maintenant petit à petit on arrive à y introduire des femmes qui font du service militaire avec les hommes même si si même dans l’armée suisse on arrive à avoir la mixité à mon avis c’est un signe comme quoi on doit pouvoir arriver à se mélanger le plus possible Tentez ensuite de reconstituer le raisonnement implicite sous-jacent dans cet extrait en complétant : auparavant dans l’armée _________________________________________________________________ S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 actuellement dans l’armée _______________________________________________________________ ce qui prouve que ________________________________________________________________________ Dans l’expression … « …si même dans l’armée suisse on arrive à … » … qu’indique ici la présence de même ? que l’argument de l’armée est plus faible que l’argument de l’armée est plus fort que l’argument de l’armée n’amène rien de plus 9. Le débat public 9 Fi ch e 4 3• Lisez attentivement l’extrait ci-dessous : Pa/8 • il y a des tas d’activités même à l’armée peut-être qu’on va avoir une armée mixte on va de plus en plus dans le sens d’une mixité et même d’une société éclatée où il aura des tas de races mélangées donc ça me parait c’est vrai aberrant au niveau du progrès de l’humanité de voir revenir à l’école primaire et puis se retrouver les garçons d’un côté et puis les filles de l’autre côté de la rue par exemple souvent dans les villages ou dans les petites villes une école d’un côté où il y avait les filles et puis en face ou deux pâtés plus loin des garçons ça me parait complètement un non-sens Tentez de reconstituer le raisonnement implicite décelable dans l’extrait ci-dessus (Pa 8) en complétant : même à l’armée __________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ même dans la société ____________________________________________________________________ 9 ____________________________________________________________________________________ donc ça me parait aberrant de ____________________________________________________________ S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 ____________________________________________________________________________________ 9. Le débat public 2/2 Fi ch e 5 1• Prenez connaissance de cette intervention de Muriel. Mu/14 • j’ai retrouvé ce que je voulais dire en fait les filles travaillent mieux lorsqu’elles sont ensemble mais quand j’observe les élèves moi j’ai des élèves de 6 e mes filles ont une grande déperdition d’énergie parce qu’elles passent beaucoup de temps à séduire les garçons elles se préoccupent beaucoup de ce que les garçons pensent d’elles de l’apparence qu’elles ont et cetera il peut y avoir des rivalités entre filles des chichitages par rapport à des garçons et je me dis si il y avait pas de garçons dans la classe et bien on est concentré sur le travail et on peut aller de l’avant et inversement les garçons passent aussi du temps à ça Lisez attentivement ce que le modérateur dit un peu plus loin. Fr/17 • je crois que nous touchons là au problème central hein nous arrivons à deux conceptions finalement de l’école peut-être une école qui correspond à la vie normale qui est proche de ce que les enfants et les élèves vont connaître ensuite ou bien une école qui essaie de vraiment favoriser de créer les meilleures conditions pour que les filles d’un côté les garçons de l’autre apprennent Entre ces deux interventions, Christian intervient par deux fois pour réfuter la position de Muriel. En vous servant du résumé du modérateur (ci-dessus Fr/17), essayez de reconstituer la première réfutation de Christian. « certes à l’école… » ______________________________________________________________________ « mais je crois qu’il n’y a pas seulement… » _______________________________________________ ____________________________________________________________________________________ « mais je crois qu’il y a aussi… »___________________________________________________________ S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 ____________________________________________________________________________________ • 1/2 Essayez de reconstruire la deuxième réfutation de Christian qui n’est qu’une reprise en d’autres termes du contenu de la première. « je suis assez d’accord avec vous quand vous dites que effectivement… » ____________________________________________________________________________________ « mais comme il n’y a pas que… » _________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ « mais y a aussi… » _______________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ 9. Le débat public 9 Fi ch e 5 • Lisez maintenant l’intervention effective de Christian ci-dessous. Ch/16 • non ce que je voulais dire c’est que bon l’école certes à l’école on est les enfants sont là pour apprendre mais je crois qu’il n’y a pas seulement le but d’apprendre des choses en mathématiques en français ou en environnement mais je crois qu’il y a aussi toute la vie sociale les enfants doivent apprendre à vivre ensemble à se supporter ensemble donc euh là madame Wacker je suis assez d’accord avec vous quand vous dites qu’effectivement peut-être pour l’apprentissage des maths hein ou bien l’enseignement de l’allemand elles sont elles iraient plus vite mais comme il n’y a pas que l’enseignement à l’école mais il y a aussi toute l’éducation heu je crois qu’il faut que les gens apprennent à se découvrir mutuellement même si ça passe par peut-être des petites bagarres des petits taquinements au niveau je sais pas vestimentaire ou la coupe de cheveux qui plait pas à l’autre et cetera je sais pas moi parce que ce sont des choses qui existent c’est la réalité tout ce que côté social est est important il faut qu’il se passe dans la salle de classe comme à la salle comme à la gym comme dans la à la récréation comme en course d’école comme sur le terrain de basket Constatez-vous des différences avec votre proposition ? Lesquelles ? ____________________________________________________________________________________ 9 ____________________________________________________________________________________ 2• Lisez attentivement l’intervention de Patricia ci-dessous. S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 Pa • c’est clair qu’à l’école primaire on est dans une école dans un système où tout le monde est mélangé je pense pas qu’il faille opter vers une école qui devienne une école superperformante pour moi le fait que tout le monde soit mélangé filles comme garçons avec des effectivement des enfants qui travaillent à des rythmes différents pour l’instant ça me parait tout à fait quelque chose de convenable ce qui se passe maintenant dans nos écoles à Genève Imaginez à quels arguments elle s’oppose. Notez deux propositions. 1. A propos des filles surdouées _________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ 2. A propos du fonctionnement actuel de l’école ___________________________________________ ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ 9. Le débat public 2/2 Fi ch e 6 1/1 Le débat : SYNTHESE 1• Qu’est-ce qu’un débat ? Que faut-il pour faire un débat ? ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________________ 2• • Tu vas entendre douze extraits d’un débat qui traite de la mixité à l’école. Quels sont les extraits qui correspondent aux principes suivants ? Relie les deux colonnes à l’aide de flèches • intervention contre la mixité – opposition par rapport à une intervention antérieure • type d’argument : recours aux faits extraits 1 et 2 extrait 3 • intervention pour la mixité S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 – appui par rapport à une intervention antérieure extrait 4 • type d’argument : le principe de causalité extraits 5 et 6 • apprendre à nuancer sa position initiale grâce à l’apport des autres extrait 7 • gradation dans les exemples utilisés (société de musique, école, scouts, armée) extrait 8 • réfutation qui consiste à exprimer d’abord un certain accord pour mieux marquer son opposition ensuite extraits 9 et 10 • type d’argument : l’expérience personnelle extrait 11 • reprendre, en la formulant, l’idée d’un autre extrait 12 9. Le débat public 9 Annex e 1 LA MIXITÉ EST REMISE EN CAUSE DANS L'ENSEIGNEMENT L'ÉCOLE DES FILLES On efface tout et on recommence! Vingt ans après l'introduction de la mixité à l'école, les défenseurs de l'égalité se demandent s'il ne faut pas rétablir des classes séparées de filles et de garçons. Motif : le mélange nuit aux filles… Réunis à Zurich, samedi, 400 enseignants se sont posé la question. Avant 1970, tout était simple : les filles apprenaient la couture pendant que les garçons taillaient le bois, le tout dans des écoles bien distinctes. Seulement, au nom de l'égalité des sexes, on a voulu faire tomber les barrières. C'était l'époque où Simone de Beauvoir s'époumonait : « On ne naît pas femme, on le devient ». L'époque, aussi, où la mixité s'est généralisée en Suisse. Les garçons se sont mis à enfiler le tablier et les filles à tâter des travaux manuels. La grande communauté. Et voilà que, vingt ans plus tard, le dogme est remis en question: on entre dans l'ère du séparatisme. Partout dans le monde, des voix s'élèvent pour réclamer des écoles « spécial-filles ». « Les profiteurs » 9 Aux Etats-Unis, d'abord, une centaine d'universités américaines se battent bec et ongles, pour rester « entre filles », brandissant des résultats à couper le souffle : par exemple, trois fois plus de chances d'obtenir un diplôme en économie que dans une école mixte. La remise en cause de leur bastion féminin, en 1990, a d'ailleurs failli tourner à l'émeute : les filles défilaient avec des banderoles « Better dead than co-ed », mieux vaut être mortes que mélangées. Une bataille qui a récemment franchit l'Atlantique avec la mobilisation des femmes du Oxford Collège pour défendre leurs classes séparées. La Suisse n'échappe pas au mouvement : réunis samedi par le Syndicat suisse des services publics, près de 400 enseignants zurichois se sont demandé s'il ne fallait pas abolir la mixité… Au centre des arguments : la fameuse égalité des sexes. Les filles sont considérées comme plus mûres à l'âge de 10-13 ans, plus adaptées à l'école et donc meilleures que les garçons. Le séminaire zurichois relevait que les filles sont plus nombreuses dans les classes à options exigeantes au niveau secondaire. Résultat : elles font monter le niveau et les garçons en profitent. Le problème, c'est qu'ils ne leur rendent pas la politesse. A la fin de l'école obligatoire tout se gâte : la carrière professionnelle des femmes n'est pas à l'image de leur réussite scolaire! Deuxième motif pour tordre le coup à la mixité : les filles se sous-estiment. Dans le livre « Allez les filles !» publié récemment, deux chercheurs français, Christian Baudelot et Roger Establet, montrent qu'à résultats scolaires égaux, les filles se trouvent moyennes ou médiocres tandis que les garçons s'estiment excellents. « Il est vrai que les filles sont plus nerveuses avant un examen, elles ont tendance à se dévaloriser », témoigne Christine Kübler, présidente de la commission pédagogique de la Conférence suisse des directeurs de l'Instruction publique. Mais l'argument le plus important est peut-être que l'école sape la motivation des filles pour les branches scientifiques et techniques, perpétuant le vieux cliché de la répartition des rôles. Des préjugés soulignés dans une étude de l'Université de Zurich, selon laquelle les professeurs et les parents estiment que les filles ne sont « pas douées pour ces branches ». « Nulles en maths! » Un exemple édifiant : l'étude comparative de l'OCDE, publiée au début février, sur les résultats obte- nus en mathématiques par les différents pays d'Europe. Verdict : la Suisse est bien notée, mais l'écart entre les filles et les garçons est trop important dans cette branche. « Combien de fois n'ai-je pas entendu des filles dire qu'elles étaient nulles en maths! Elles font un blocage à un certain âge », s'exclame Christine Kübler. Mixité assouplie La solution pour combler le fossé ? Peut-être un enseignement différencié. A Lucerne, une expérience vient d'être réalisée pour les cours d'informatique. La présidente de la commission pédagogique explique : « Les filles ont bénéficié d'un cours spécial où elles pouvaient poser toutes les questions sans appréhension. Ensuite, on a remis tous les élèves ensemble. Les résultats sont plutôt bons ». L 'idée fait son chemin. A Zurich, les enseignants ont d'ailleurs conclu que s'il ne faut pas abolir la mixité, on peut l'assouplir. Pourquoi ne pas imaginer, à l'avenir, des classes de mathématiques séparées ? Christine Kübler précise : « On peut réfléchir à des aménagements, mais renvoyer les filles chez les nonnes n'est pas une solution, ce n'est plus d'époque. Il faut chercher d'autres moyens pour mieux réaliser l'égalité des sexes sur les bancs d'écoles ». Jacques-André Tschoumy, directeur de l'Institut romand de recherche et de documentation pédagogiques renchérit : « L'école est un lieu d'apprentissage de la vie, or la vie est mixte. On ne peut pas renverser le cours de l'histoire sous prétexte d'obtenir de meilleurs résultats. On doit bien vivre ensemble! » Béatrice GUELPA S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 La Suisse, 16.03.1992. Fin des classes mixtes A l’essai en Californie En Californie, un programme pilote s’essaie à la suppression des classes mixtes. Il est reproché aux garçons de faire beaucoup de bruit et d’accaparer ainsi l’attention des professeurs. Selon certaines études, il apparaît que les écoliers américains, dès lors qu’ils ne sont plus distraits par le sexe opposé, prennent leurs études plus au sérieux. L’expérimentation des classes séparées pour garçons et filles s’inscrit dans la vague des réformes qui déferle sur le système scolaire américain, treize ans après la publication d’un rapport décriant la médiocrité de l’école publique. (Le Matin 20.10) Résonances no 3, nov. 1997. 9. Le débat public 1/5 Annex e 1 2/5 Les victimes de la mixité Bonne place de la Suisse au palmarès, mais les Suissesses piétinent. Il y a vingt ou trente ans, les pédagogues progressistes n’en doutaient pas : la mixité scolaire, à savoir une formation commune des filles et des garçons, devait concourir à l’égalité des femmes et des hommes. Aujourd’hui, il faut bien se rendre à l’évidence ; la coéducation est loin d’avoir donné les résultats espérés. S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 Dans le peloton de tête Les conclusions d’une récente étude comparative internationale sont flatteuses pour la Suisse. En mathématiques et en sciences naturelles, les jeunes Helvètes du secondaire supérieur et des écoles professionnelles se classent dans le peloton de tête des vingt pays analysés. Mais les connaissances des gymnasiennes et des apprenties se situent très en dessous de celles de leurs camarades masculins. Faut-il imputer ce retard à l’apprentissage précoce de rôles spécifiques au sexe, un apprentissage qui interviendrait très tôt au sein de la famille ? C’est la conviction des féministes pour qui les comportements différents selon le sexe ne sont pas innés mais acquis. Les plus récents travaux de pédagogues et de psychologues, notamment ceux effectués dans le cadre du Programme national de recherche 35 sur l’égalité, montrent que la réalité est probablement plus complexe. Actuellement plus personne ne conteste une distribution égale de l’intelligence entre les sexes. Pourtant les filles, à partir de 10 ans, manifestent une capacité d’expression plus développée que les garçons, alors que ces derniers maîtrisent mieux le langage mathématique dès 13 ans. Une politique d’égalité ne peut ignorer cet état de fait. C’est là précisement que pèche la coéducation qui, au nom de l’égalité, a tablé sur une formation et une pédagogie identiques pour garçons et filles. Or qu’observe-t-on dans les classes mixtes ? Des élèves masculins actifs, prenant des initiatives, alors que leurs compagnes se montrent plus passives, plus disposées à manifester leur approbation. A l’évidence la coéducation ne tient pas suffisamment compte de ces différences de comportement et de manière de communiquer. Cet égalitarisme simpliste ne sert pas la cause de la promotion de l’égalité. Alors faut-il préconiser le retour à la bonne vieille séparation des sexes ? Certainement pas. Mais des mesures compensatoires et un traitement différencié selon le sexe, respectueux des différences, pour réussir à mieux les surmonter. Et peut-être, pour un temps limité, des cours de mathématiques et de sciences naturelles spécialement destinés aux filles. JD Basler Zeitung, 20 février 1998, « Koedukation benachteiligt die Mädchen ». E. Grünewald-Huber, Koedukation und Gleichstellung, Chur/Zürich, 1997, Verlag Rüegger. Mathematics Achievement in de Middle School Years, et Science Achievement in de Middle School Years, IEA, Boston : TIMSS International Study Center, 1996. Domaine Public no 1334, 5 III 1998. 9. Le débat public 9 Annex e 1 Jura : garçons et filles en salle de gym Pour promouvoir l'égalité des sexes, mieux vaut mélanger filles et garçons. Même pour le basket chez les ados. Les Jurassiens prennent le contrepied des critiques alémaniques sur la mixité à l'école : « Est-ce que les difficultés rencontrées dans l'éducation mixte ne proviennent pas tout simplement de l'absence d'une vraie mixité dans l'enseignement ? », se demande Marie-Josèphe Lachat, responsable du bureau de la condition féminine. Depuis un an et demi, Madame Egalité s'est attaquée à la dernière branche ségrégationniste, la gymnastique à l'adolescence. Ils ont osé mélanger des gaillards avec de bons biceps et trois poils au menton avec des minettes qui se plaignent de mal au ventre et ont peur d'un ballon. Les enseignants n'ont pas tous approuvé la mini-révolution. L'un deux ne s'est pas gêné pour rétorquer à Marie-Josèphe Lachat : « Si on nous impose des classes mixtes, je ferai jouer mes garçons avec la main gauche. » Madame Egalité le regrette et remarque qu'avec des « réactions aussi sexistes » la mixité va à l'envers du but recherché. Il s'agit donc de mettre en condition les enseignants. Depuis un an et demi, des classes testent la formule de l'exercice physique jeune homme-jeune fille, justement important à la puberté : « Les adolescents surmontent les tabous sexuels et la gêne à se tenir, à s'entraider pour un exercice de barre fixe », explique Marie-Josèphe Lachat. Bien sûr les garçons sont plus forts que les filles. Raison de plus pour innover, selon les Jurassiens. Il ne s'agit plus seulement de reproduire les règles de la compétition dans un violent match de foot ou de basket mais d'inventer de nouveaux codes favorisant la complémentarité plutôt que la performance. « Les écoliers apprennent ainsi que leur force peut devenir violence et les écolières sont poussées à ne pas se restreindre physiquement. » La société est mixte, que l'école le veuille ou non. Marie-Josèphe Lachat peut ainsi conclure : « L'éducation doit réussir la mixité sinon j'aurais très peur que la société n'y arrive pas non plus. » S. Z. S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 9 La mixité a été mise en œuvre au sein d'une politique d'éducation dominée par le principe de l'égalité juridique entre les citoyens. Cette égalité devant l'éducation revendiquée par les féministes, s'est réalisée sous la forme d'une assimilation des enseignements puis d'une fusion des établissements qui garantit l'égalité formelle en terme de sexe comme en terme de classe. Or ce principe d'égalité-assimilation, par opposition à l'idée de coéducation 1, occulte toute réflexion sur les conditions de réalisation de la mixité scolaire et en particulier les résistances à cette confrontation entre les sexes. Du refus de la promiscuité sexuelle à la peur de la concurrence féminine en passant par la défense d'une identité de genre, d'une « culture masculine » de métier, on voit bien les lignes de défense des hommes face à la montée de l'expression sociale des femmes. Côté femmes, côté dominées, on ne peut pas parler de stratégies de sexe, la revendication fondamentale d'égalité faisant passer au second plan l'analyse des conditions d'apprentissage. On voit toutefois se dessiner des clivages de classe dans les réponses des filles à la politique d'égalité-fusion : pour un certain nombre de jeunes filles, la voie de la 1. E. Breuze, La coéducation dans les écoles mixtes, PUF, 1970. réussite sociale passe par la revendication d'assimilation face aux résistances des hommes, pour la masse des autres, on peut penser que le choix de filières féminines constitue une conduite d'évitement par rapport à des formes de mixité « sauvage » où elles ne peuvent jouer une nouvelle construction identitaire. L'interrogation formulée par des femmes du MLF et reprise dans des travaux récents 2 pose le problème des gains respectifs des femmes et des hommes dans cette imposition d'une norme culturelle historiquement forgée sous domination patriarcale qui s'exprime tant dans les contenus que dans les modes d'apprentissage ou encore le système des relations sociales au sein des classes et des établissements. Les nouvelles perspectives d'avenir pour une lutte des femmes se jouent alors, me semble-t-il, sur deux plans : faire reconnaître la valeur sociale des métiers de la reproduction, faire reconnaître l'apport jusqu'alors nié ou déformé des femmes à la culture. On sort du domaine de la mixité scolaire pour promouvoir une véritable mixité sociale et culturelle qui suppose la transformation radicale des rapports de sexe. 2. Nicole Mosconi, La mixité dans l’enseignement secondaire, un faux-semblant ?, PUF, 1989. « Mixité scolaire, mixité sociale ? Les résistances de la mixité », Claude Zaidman in : Egalité entre les sexes, éd. l’Harmattan. 9. Le débat public 3/5 Annex e 1 4/5 Séminaire à Zurich sur la mixité des classes Les garçons freinent les filles! La mixité à l’école est remise en question par les défenseurs de l'égalité des sexes. Elle ne profite qu'aux garçons et freine le développement des filles, généralement plus mûres et « meilleures » scolairement parlant. Un séminaire sur l'égalité dans les écoles, organisé samedi par les enseignants zurichois du Syndicat suisse des services publics, a réuni plus de 400 personnes de Suisse alémanique. La coéducation s'est généralisée depuis plus de vingt ans en Suisse. Longtemps considérée comme un progrès pour la réalisation de l'égalité des sexes, la mixité nuit au développement des filles, selon nombre de féministes. Face à cet échec, faut-il abolir la mixité dans les écoles ? Non, répondent les enseignants zurichois. Mais il s'agit d'assouplir le principe de la mixité pour mieux préparer filles et garçons à une société où le partage des rôles se bouleverse. Par exemple en séparant écolières et écoliers pour certains cours, comme cela se fait déjà pour la gymnastique. Il faut tenir compte des différences liées au sexe : garçons et filles en sorti- ront gagnants, a estimé l'animatrice d'un atelier de réflexion sur la coéducation. Là où le bât blesse Théoriquement, toutes les portes sont ouvertes aux filles. Et, au niveau de l'école obligatoire, les filles sont même plus nombreuses dans les classes secondaires aux options les plus exigeantes, a indiqué Silvia Grossenbacher, du Centre suisse de coordination pour la recherche en matière d’éducation. Pourtant le bât blesse une fois terminées les classes obligatoires. La carrière professionnelle des filles n'est en rien à l'image de leurs succès scolaires, comme l'a montré le séminaire zurichois, s'appuyant sur de nombreuses études effectuées en Suisse et à l'étranger. Les enseignants accordent plus d'attention aux garçons qu'aux filles. Ils les louent et les réprimandent plus souvent, telles sont les conclusions d'études menées en Allemagne et en Grande-Bretagne. En règle générale, les filles sont plus tranquilles, elles s'adaptent mieux et pren- nent une part active à l'enseignement. Ces qualités sociales sont d'ailleurs exploitées par les enseignants pour assurer un climat propice à l'étude dans les classes. Bref, les filles tirent les garçons vers le haut. Elles se sous-estiment Autre constat mettant en exergue une discrimination : l’école sape la motivation des filles dans les branches scientifiques et techniques. Une étude de l'Université de Zurich a montré que non seulement les enseignants, mais aussi les parents étaient imprégnés du préjugé selon lequel les filles n'étaient tout simplement « pas douées » pour ces branches. Ce manque de soutien n'est pas pour aider les écolières, qui ont une forte tendance à se sous-estimer. Dans « Allez les filles! », les chercheurs français Christian Baudelot et Roger Establet constatent qu'à résultats scolaires égaux, les filles s'estiment moyennes ou mauvaises, les garçons excellents. Les mêmes ont d'ailleurs constaté qu'en France, les filles sont aussi douées pour les mathématiques et les sciences exactes que les garçons. (Zurich/ATS) Tribune de Genève, 16 III 1992. S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 Le tricot et les doigts froids « Vous trouvez normal que les garçons tricotent ? » Les élèves de Rose-Marie Demierre ouvrent de grands yeux. Silence. « Sont-ils impressionnés ? N'ont-ils pas compris la question ?» Diverses explications se bousculent dans ma tête. Jusqu'à ce que je comprenne. « Ma question tombe comme un cheveu sur la soupe, ils ne se la posent tout simplement pas. » Ce mardi matin, une dizaine d'enfants d'une classe de 5e de l'école de Vignettaz à Fribourg participent aux activités sur textile. Ils tricotent une pomme, puis apprendront à faire des applications à la machine à coudre sur une trousse avant de passer au cerf-volant ou au sac. Les quatre filles se sont assises ensemble à une table. Les garçons, entre eux également, sont dispersés sur deux tables. Le silence règne, tout le monde est concentré sur son tricot. L'activité ne semble guère enthousiasmer, ni les uns, ni les autres. « Il faut faire la même chose longtemps », dit Pierre-André qui aimerait pouvoir fabriquer des gants de boxe « pour boxer son frère ». « On a les doigts trop froids, ça fait mal », dit Phong. François trouve que « ça passe le temps ». Quant à Fanny, elle dit « ça va » dans une moue désabusée. Les filles sont ensemble, « parce qu'on aime bien discuter », explique Monika. Quand ils passent à la couture, la classe s'anime. Les filles sont-elles plus douées ? « Il y a des bons et des mauvais dans les deux groupes », constate Rose-Marie Demierre, qui a plus de dix ans d'expérience de cet enseignement. Mais il y a des différences : « Les filles sont plus pastel ; elles osent moins les couleurs vives. Les garçons sont plus décidés, surtout à la machine à coudre ». Les élèves sont regroupés par sexe, surtout parce qu'en 5 e et 6e, les sujets de conversation sont très différents entre filles et garçons, pense-t-elle. Avec la mixité, l'ambiance des classes a changé. Les décibels ont grimpé. « Les garçons demandent plus de disponibilité, il faut aller plus vite, ils n'aiment pas attendre », remarque Mme Demierre. « Dans les premières années, ils rouspétaient. Certains papas acceptaient mal et leurs fils ne faisaient pas une ligne de tricot à la maison. Pour les arabes, c'était un véritable tabou culturel », raconte-t-elle. Aujourd'hui que les grands frères ont ouvert la voie, il n'y a plus à se poser la question si c'est normal que les garçons tricotent. AW La Liberté, 18 XII 1992. 9. Le débat public 9 Annex e 1 LE MYTHE DES MATHS MARYELLE BUDRY Malgré le développement de l'égalité entre les sexes à l'école et aux études, on observe actuellement dans notre culture européenne une nette différence d'orientation, les filles prenant des voies « littéraires » et les garçons des voies techniques et scientifiques. Ces différences se retrouvent à tous les niveaux (école obligatoire, enseignement secondaire, université 1). 9 Dans ma consultation d'orientation professionnelle (étudiant-e-s de l'université et adultes), je suis frappée du nombre de femmes qui déclarent avec véhémence « je suis nulle en maths » et ne veulent pas entendre parler d'une reprise d'études dans ce domaine, alors qu'elles peuvent parfaitement réfléchir sur leurs autres faiblesses scolaires. Or, toute poursuite d'études exige de passer par les maths : maturité, école de commerce, économie, sciences, médecine, techniques, etc., voire même histoire et linguistique. Par conséquent, les femmes qui refusent de poursuivre ou de reprendre des études « avec des chiffres » se condamnent aux voies de garage. Il m'apparaît donc comme une hypothèse valable que l'étude des mathématiques constitue un « nœud » bloquant l'accès des femmes aux professions de haut niveau. Avec l'aide d'une amie, Irène Schwob, du Service de la recherche pédagogique de Genève, j'ai cherché des ouvrages traitant du rapport des filles aux mathématiques. Il n'était pas facile de trouver de la littérature traitant de ce sujet! On voit combien la recherche féministe est encore peu développée. Voici cependant quelques thèses relevées dans les ouvrages cités ci-après. S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001 Dès la petite enfance, les jeux sportifs et mécaniques, favorisés chez les garçons, aident à mieux maîtriser l'espace, ce qui représente selon Piaget une bonne base de compréhension des mathématiques (les jeux de poupée développant plutôt l'imagination). Les femmes sont singulièrement absentes des livres de mathématiques et de sciences : dans l'histoire on ne cite guère que Marie Curie et sa fille Irène, dans les illustrations seuls les hommes sont revêtus de la blouse blanche magistrale, dans les énoncés des problèmes seuls les garçons sont mis en scène, les exceptions étant plutôt défavorables aux filles (« Jean explique à sa voisine… »), les verbes ne sont conjugués qu'au masculin pluriel. Les mathématiques sont devenues l'instrument de sélection priviligié de notre Société 2, l'objet idéalisé de la toute-puissance sur le plan 1. Exemple à Genève : 78 % de filles en moderne au Cycle 72% de filles en moderne au Collège 72 % de filles en Faculté de lettres 66 % de garçons en scientifique au Cycle 71 % de garçons en scientifique au Collège 70 % de garçons en Faculté des sciences (Annuaire statistique de l'éducation, Genève, 1984-1985). social, scolaire et narcissique, la source de projections de réussite. Par exemple, en France, la section C (maths) aspire les meilleur-e-s professeur-e-s, les meilleur-e-s élèves, et conduit aux meilleurs débouchés. On parle de « don des mathématiques », un don inné, absolu, sans penser qu'il s'agit du fruit d'efforts, d'une bonne pédagogie, d'un milieu familial stimulant, des relations affectives de l'enfant avec le pédagogue et la matière. Dans notre société, tout se passe comme s'il était évident que les filles n'avaient pas ce don. Ce préjugé est répandu autant dans les familles que chez les professeur-e-s et les jeunes eux-mêmes. Dans ce contexte, peu de jeunes filles ont la liberté d'esprit leur permettant de réussir en maths, et leurs efforts pour appréhender cette matière ne sont pas autant soutenus que ceux des garçons puisqu'elles sont « moins fortes ». La mixité nuirait donc aux bons résultats des filles, puisque inconsciemment elles s'effacent devant les garçons « plus doués ». Dans les classes de filles, libres de se sentir compétitives, elles arrivent à de meilleurs résultats. La preuve nous en fut magnifiquement donnée au cours de l'atelier, puisqu'une enseignante d'un collège de filles à Martigny nous révéla qu'aux examens cantonaux de maturité 1985, c'est une classe de filles qui a obtenu la meilleure moyenne de mathématiques du Valais! Dans des enquêtes portant sur plusieurs pays, on a prouvé que, soumises à certaines circonstances culturelles et à certains enseignements, les filles réussissent autant ou mieux que les garçons en mathématiques. Se trouver rivales de garçons pose un gros problème aux jeunes filles dans les écoles. On voit généralement leur rendement scolaire accuser une baisse au moment de la puberté. Les femmes qui ont continué sur la voie des sciences « mâles » avouent volontiers qu'elles cachaient à leurs flirts leur domaine d'étude de peur d'être accusées de manquer de féminité et de les faire fuir… 3. ÉLÉMENTS DE BIBLIOGRAPHIE Barruk, Stella, Echecs et maths, Seuil, Paris, 1973. Barruk, Stella, L'âge du capitaine, Seuil, Paris, 1977. Crabbé, Brigitte, et al., Les femmes dans les livres scolaires, Pierre Mardaga, Bruxelles, 1985 (chapitre Sciences). Nimier, Jacques, Mathématique et affectivité, Stock, Paris, 1969. Pénélope, publication du Groupe d'études féministes de l'Université Paris VII, Les femmes et la science, no 4, printemps 1981. Terlon, Claire, Filles et garçons devant l'enseignement scientifique et technique. Recherches anglo-saxonnes, Revue française de pédagogie, no 72, septembre 1985. Tobias, Sheila, Le Mythe des maths, Paris-Montréal, Etudes vivantes, 1980, collection Axes. 2. Autrefois ce rôle était joué par les langues anciennes: on pourrait très bien imaginer qu'un autre domaine d'études prenne le relais. 3. Article paru dans l"Educateur, février 1986. in « Vers une éducation non sexiste », Moreau & Ricci, Réalités Sociales, 1987, Lausanne. 9. Le débat public 5/5