Introduction
Voici la nouvelle édition du guide du remplaçant.
« Enfin ! », nous direz-vous. Nous aurions pu faire un simple tirage de la précédente édition.
Mais ceci nous est apparu impossible compte tenu du chemin parcouru depuis 2002, de
l’abondance des réformes concernant les généralistes dans leur exercice professionnel, et au
regard de l’actualité particulièrement mouvementée.
Notre métier de généraliste connaît une évolution spectaculaire. La loi du 4 mars 2002 sur le
droit des malades en constitue un point de repère évident. Elle arrive au point culminant d’une
succession de crises politico-médicales (sang contaminé, prion, arrêt Perruche) qui font alors
prendre conscience de la nécessité d’une implication forte des médecins dans les politiques de
santé publique. La loi de 2002, en formalisant un certain nombre de jurisprudences et de
textes législatifs, entend jeter les bases d’une relation de confiance équilibrée entre les
professionnels de santé et les citoyens. Elle impose de facto aux praticiens un certain nombre
de dispositions qui vont les contraindre à se remettre en question dans leur exercice quotidien.
C’est aussi l’éclatement au grand jour de la gestion jusque là calamiteuse du nombre des
médecins (moins de médecins = moins de dépenses), et du recul démographique que connaîtra
la France, avec les départs en retraite, massifs aux alentours de 2010, des médecins de la
génération « baby-boom ». Quant à lui, le mythique « trou de la sécu » n’en finit pas de se
creuser. Parce qu’il est plus facile d’agir sur les milliers de médecins prescripteurs, donc
forcément dispendieux, que sur les recettes, c’est à dire sur les électeurs, les années 1995-
1996 voient avec les ordonnances « Juppé » la naissance de la maîtrise prix-volume des
dépenses de soins. Il s’agit, à enveloppe constante, de réduire le prix des actes prescrits, quand
leur nombre augmente, afin d’induire un rétrocontrôle négatif sur le volume des prescriptions.
C’est le système des « lettres-clés flottantes ». Ce sont des mois de grève pour les internes et
résidents, qualifiés par le pouvoir en place « d’étudiants les mieux payés de France », afin
d’obtenir le fameux « repos de sécurité », permettant de ne pas travailler 72 heures d’affilée.
Et pour les médecins libéraux, près de 9 mois de grève pour obtenir une revalorisation
d’honoraires. Ce sont aussi de plus grandes contraintes médico-légales qui, si elles ne se
traduisent pas forcément par un nombre de condamnations plus fréquentes des professionnels
de santé, créent un climat de suspicion à l’égard de professionnels déjà sur la défensive. Ainsi,
en ce début d’année 2006, l’un des principaux assureurs en responsabilité civile
professionnelle décide de ne plus prendre en charge les obstétriciens à compter du 1er janvier
2007.
Au sortir de près de 50 ans d’hospitalo-centrisme d’après-guerre, faisant la part belle aux
spécialistes-mandarins, il semble que la médecine générale, construite dans leur ombre,
longtemps méprisée, et dont pourtant chaque conférence de consensus s’accorde à reconnaître
le rôle central dans la prise en charge globale des patients, semble gagner quelques galons.
Reconnue spécialité universitaire à part entière en 2004, elle ne semble pourtant pas recueillir
les faveurs des internes de la promotion 2005, près de 1000 postes restant vacants sur
l’ensemble du territoire. Pour en comprendre les causes, pourtant évidentes, il faut
comprendre les aspirations nouvelles des jeunes médecins. Nous percevons là un véritable
fossé générationnel. Nos promotions ont des aspirations désormais bien éloignées de l’image
d’Épinal du médecin cinquantenaire, travailleur isolé, en milieu rural dont il représente l’un
des riches notables, corvéable à merci, dont la compagne répond au téléphone et l’assiste dans
son exercice. La réalité sociologique est bien autre, et les carrières médicales, tout comme
d’autres corps de métiers, seront de moins en moins linéaires, alternant ou combinant
différents modes d’exercice, naviguant entre salariat et libéral.
Derrière notre diplôme omnivalent de médecin généraliste, ce n’est pas un, mais DES métiers
qui se cachent. Nous exerçons un métier passionnant, riche d’expériences humaines,
formidable observatoire de la société, qui apportera de grandes satisfactions à ceux qui
l’aborderont avec curiosité. C’est aussi un métier contraignant, et non valorisé, ni