La culture Humaniste : le Moyen Age
ISFEC Jacques Sevin 2012 / 2013 Céline Laignel Page 3 sur 19
Des résistances externes s'opposent à l'influence de la papauté, parce que les pouvoirs laïcs
entendent s'immiscer dans les affaires de l'Église et diriger celle-ci dans leur aire d'influence : les
rois lombards, tout d'abord, veulent soumettre l'Église romaine. Aussi, le pape fait appel aux
Carolingiens (milieu du VIIIe siècle), mais ces derniers, comme leurs prédécesseurs, ne se privent
pas pour distribuer les terres de l'Église à des laïcs. Lorsque l'Empire chrétien renaît en Occident
(800), le rapport entre les pouvoirs de l'Empereur et du pape ne sont pas définis autrement qu'en
termes de rapport d'influences. Il tourne dans un premier temps au détriment de la papauté, alors
que l'Église, mais aussi le pouvoir impérial traverse à tous points de vue une crise grave, au
Xe siècle, et il faut attendre la réforme grégorienne (seconde moitié du XIe siècle – premier tiers du
XIIe siècle) pour que le pape n'affronte l'Empereur germanique, lors de la querelle des Investitures.
Cette dernière, qui s'achève sur un compromis, est déterminante pour assurer l'indépendance du
siège apostolique. Au XIIIe siècle, enfin, la papauté triomphe, grâce à son arme principale :
l'excommunication, à son rôle dans l'essor de la chrétienté, à travers la croisade, mais aussi grâce à
son pouvoir temporel et grâce à ses richesses. Le pape Innocent III applique lors de son « règne »
(1198 – 1216) les principes de la théocratie pontificale, qu'avaient formulés pour la première fois
les Dictatus Papæ du pape Grégoire VII en 1075).
1.2. Christianisation de l'Europe occidentale
L'essor de l'Église ne peut être dissocié de l'effort de christianisation de la société et des
consciences : cette dernière demeure un combat constant durant tout le Moyen Âge.
Selon le modèle des apôtres dans les Évangiles, l'Église conçue comme l'assemblée des fidèles unis
dans la foi doit se répandre « jusqu'aux confins de la terre ». Pour cela, elle peut s'appuyer sur le
soutien de ses membres influents — comme en Germanie, où elle accompagne le conquérant
franc — mais surtout, elle doit reposer en principe sur un acte d'adhésion volontaire : en cela, elle
ne peut compter que sur les effets de la prédication. Saint Augustin justifie cependant l'usage légal
de la violence pour contraindre les hérétiques et les schismatiques à revenir au sein de l'Église,
interprétant notamment l'ordre du Christ, « Force-les à entrer! » (Luc, XIV, 23) comme un appel à la
conversion forcée. Le prosélytisme qui accompagne l'expansion du christianisme durant le haut
Moyen Âge ne se résume « ni à une évangélisation pacifique ni à un brutal rapport de forces » (B.
Dumézil, 2007 15): si les persécutions massives sont rares, certains cas de persécution des Juifs
étant cependant recensés, de même que plusieurs conversions de force, l'Église s'appuie largement
sur les propriétaires fonciers (le possessor) pour encourager la conversion de ses serfs ou esclaves
au christianisme, à travers des contraintes économiques (un tel baissant le loyer des terres des
paysans chrétiens, l'autre congédiant les paysans païens de son domaine, ou un autre proposant
l'affranchissement à ses 250 esclaves à condition qu'ils acceptent le baptême).
1.3. Diffusion du christianisme pendant le haut Moyen Âge
Durant le haut Moyen Âge, les missions chrétiennes de prédicateurs isolés, appuyés par Rome
lorsqu'elle le peut, repoussent avec succès les limites politiques de la chrétienté en amenant à la
conversion des rois barbares et en s'appuyant sur l'influence des rois chrétiens — comme les rois
francs, dont l'adhésion au christianisme remonte à Clovis (496 ou 498) — mais leur préoccupation
dernière, qui est de faire entendre le message du Christ aux peuples des derniers, demeure un
objectif des plus difficiles à quantifier. Elles sont le plus souvent l'œuvre de moines, comme saint
Colomban en Gaule, saint Augustin de Canterbury dans le Kent ou saint Boniface en Frise.
À cette fin, l'Église se heurte également à des résistances à l'intérieur même de la chrétienté, où le
clergé séculier est à la tête de l'encadrement des fidèles, surtout dans les campagnes :
symptomatique, le mot « païen » — paganus , celui qui habite la campagne — désigne celui qui
pratique l'ancienne religion polythéiste avant de désigner tout ce qui n'est pas chrétien. Le respect
de la morale chrétienne, en particulier, fait l'objet d'injonctions des conciles, des synodes