Photo Richard Drew, Archives AP
Le mot est sur bien des lèvres à Wall Street ces dernières semaines. Mais qu'est-ce qu'un krach? Au sens large, cette
expression décrit toute baisse soudaine et précipitée des actions sur une place financière. De fait, selon le profil
d'investisseur et l'exposition au risque de son portefeuille, un krach éclair de 4% ou une correction de 10% sur plusieurs
séances peut faire aussi mal qu'une cassure profonde de 20%.
S'il n'y a pas de définition précise, les économistes s'accordent néanmoins à dire qu'il y a krach quand l'indice perd plus de
10% en une séance, ou 20% en quelques jours. Cela n'est arrivé que deux fois au cours du XXe siècle, en 1929 et en
1987. Même en 2008 au plus fort de la crise financière, nous n'avons pas assisté à un krach boursier, mais simplement à
une très forte volatilité des cours.
La principale caractéristique est l'effet de panique: tous les investisseurs vendent en même temps, donnant l'impression
d'une spirale infernale. C'est ainsi qu'un krach peut déboucher sur une crise financière, s'il se propage et que la confiance
disparaît.
«De façon presque systématique, chaque fois que le marché monte de façon importante sur quelques mois, les clients
nous posent la fameuse question: est-ce le temps de retirer nos billes avant de tout reperdre? Plusieurs ont cette tendance
à croire que les gains réalisés dans le passé sont éphémères. Peut-on vraiment leur en vouloir? Avec la «décennie
perdue», nombreux sont ceux qui n'ont pas fait d'argent en Bourse depuis le début du millénaire», raconte Carl Simard,
président de MEDICI Gestion de Portefeuille Stratégique, de Saint-Bruno.
Sur un plan pratico-pratique, voici 10 conseils d'experts pour éviter de graves erreurs et minimiser les dégâts à la veille d'un
possible plongeon des Bourses.
Lundi le 3 septembre 2013
Guide de survie antikrach
Paul Durivage
LA PRESSE
1.Libérez des liquidités
«Cash is king», rappelle Michel Doucet, vice-président, Groupe conseil en portefeuilles, Valeurs mobilières Desjardins, qui
rejette par ailleurs le scénario d'un krach. Reste que pour profiter des opportunités de marché, il n'y a rien de tel qu'un bon
gros coussin d'argent. Augmentez les liquidités et les titres à revenu fixe à court terme de votre portefeuille, de façon à
pouvoir rempiler sur vos titres favoris ou sauter sur les aubaines en vue du rebond. Des titres jusqu'alors dispendieux seront
éventuellement soldés. Comme il est impossible de savoir quand le fond sera touché, une approche progressive est
recommandée.
2.Connais-toi toi-même
Un krach boursier ou une sévère correction mettra votre répartition d'actif à l'épreuve. Peut-être votre portefeuille est-il mal
construit ou peut-être est-il trop risqué pour vous? Une étude de l'association américaine des petits investisseurs a
démontque ceux qui ont fait faillite lors de l'éclatement de la bulle techno en 2002 et la crise financière de 2008 étaient
plus surexposés aux actions que ce qu'ils pouvaient tolérer. «Si on n'a pas les moyens de ses convictions, mieux vaut se
retirer», lance Michel Doucet, de Valeurs mobilières Desjardins.
3. Ajustez votre portefeuille à votre profil
La répartition d'actif est capitale. La majeure partie de votre rendement en dépend. Dans un premier temps, revoyez votre
répartition d'actif stratégique à l'égard de votre profil d'investisseur, conseille le gestionnaire de portefeuille Michel Doucet.
Un investisseur dont le portefeuille est composé à 70% d'actions et de 30% de revenus fixes aura intérêt à ajuster cette
composition de façon tactique, le temps que la crise passe. Comme les valeurs sont en baisse, vous devez trouver une
façon de générer du rendement. En misant sur les titres à revenus, vous recevrez des revenus réguliers tout en diminuant la
volatilité de votre portefeuille.
D'autres voudront passer en mode "comptant" en maximisant les liquidités.
4. Misez sur les gagnants
Il est avisé de toujours avoir en portefeuille des titres d'entreprises de consommation et même d'augmenter leur poids,
lorsque le climat économique devient incertain. Évitez cependant les produits de consommation coûteux et cycliques, tels
que l'automobile. Si les consommateurs doivent réduire leurs dépenses, c'est là qu'ils commencent. La pharmacie, les
entreprises de service et de télécommunications se tirent également bien d'affaire même en temps de crise. Par ailleurs,
les secteurs de la technologie et des matières premres sont les premiers à tomber, si l'on se rappelle bien l'expérience
de 2007.
5. Conserver ou vendre?
Ce n'est encore que la rentrée des classes, mais pour les investisseurs boursiers, l'heure est déjà à la révision avant
l'épreuve. Chaque titre en portefeuille doit être étudié. Selon Carl Simard, un choix de valeurs judicieux tiendra bien la route.
«Il est tout à fait normal que des sociétés bien dirigées qui augmentent constamment leur performance économique
s'apprécient à long terme», affirme le président de MEDICI. Il cite notamment la firme canadienne Constellation Software
qui a vu ses revenus de licences augmenter de 50% au dernier trimestre, et la société pharmaceutique Laboratoires
Paladin, de Laval, qui multiplie les acquisitions. «Ces entreprises s'apprécient plus rapidement parce qu'elles sont bien
nichées et croissent par gains de parts de marchés. Elles sont relativement peu corrélées avec l'état de l'économie en
général, mais suivent plutôt une dynamique particulière».
6.Réévaluez votre endettement
S'endetter est dangereux. L'a-t-on oublié en cette période d'argent facile? Si vous avez succombé à la tentation du crédit, il
serait préférable de réévaluer votre niveau d'endettement en imaginant divers scénarios pessimistes. Si votre marge
devient disproportionnée par rapport à la valeur de votre portefeuille, vous serez forcé de vendre des actions au mauvais
moment. En diminuant votre stress sur le plan financier, vous traverserez plus sereinement n'importe quelle crise.
7. Prenez vos pertes en capital
Les petites blessures ont tendance à empirer en période de crise. L'occasion est propice de prendre vos pertes en capital.
Les pertes en capital sur les placements enregistrés à l'extérieur du REER ou du FERR peuvent être déduites des gains en
capital aux fins fiscales. Dans un premier temps, vos pertes doivent être appliquées à l'encontre des gains accumus sur
les titres revendus en 2013. Si vos pertes en capital dépassent largement vos gains en capital, vous pouvez ensuite
reporter l'excédent de ces pertes sur les trois années précédentes ou sur les années futures. Rappelez-vous que les
petites sociétés sont en première ligne lors d'un krach boursier, les investisseurs se réfugiant dans les grandes
capitalisations, jugées plus liquides et moins risquées. Pire, les titres de moins d'un dollar passent rapidement «au cash»
lors d'appels de marge.
8. Soyez patient
Le lundi 19 octobre 1987, le Dow Jones s'effondre de 23% sur une seule séance, la plus forte jamais enregistrée sur cette
place à ce jour. Mais ce krach, aggravé par des problèmes de traitement informatique des ordres, fut sans lendemain. Les
indices rebondirent rapidement et deux ans plus tard le Dow Jones avait récupéré tout le terrain perdu. Cela peut prendre
du temps, mais, quelle que soit l'ampleur de la correction, le marché finit toujours par se relever.
9. Relisez vos classiques
«Assis derrière mon écran, j'ai assisté à quelques-unes des plus fortes glissades du Dow Jones. Pas une fois, je n'aurais
pu prédire ces catastrophes, même si ma vie en avait dépendu. Au cours de l'été 1987, je n'ai averti personne, ni
moi-même, de la chute vertigineuse de 1000 points qui allait suivre...», raconte Peter Lynch, enfant chéri de la Bourse de
New York et l'un des gestionnaires de fonds les plus respectés du monde, dans son best-seller Et si vous en saviez déjà
assez pour gagner en Bourse. Dans les moments de grande agitation, quand tout semble basculer, il est utile de prendre
du recul et de réfléchir. Relisez les classiques de Peter Lynch, Warren Buffett ou Stephen Jarislowsky. Ces investisseurs
célèbres ont toujours su dénicher des occasions en or même en temps de crise.
10. Profitez du beau temps
«Plusieurs études ont démontré dans le passé qu'il était inutile d'essayer de timer le marché. Les prévisions à court terme
sur les cours boursiers sont inutiles. Et lorsque nous l'avons testé dans le marché à certaines occasions, les performances
des portefeuilles se sont avérées déficientes comparativement à leurs semblables», rappelle Carl Simard.
Bref, soyez liquide, révisez votre portefeuille et profitez bien de l'été. Si vous savez ce que contient votre portefeuille et
êtes à l'aise avec cela, vous devriez survivre à une correction ou même à un krach. Si ce n'est pas le cas, retournez au
point 1.
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