X - Psycho-Ressources

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CAHIER
Janvier
2010
n°
89
scientifique
SOMMAIRE
Transplantation
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• Annonce de la mort
Docteur Morgan LE GUEN, Département d’Anesthésie-Réanimation - Salle de Surveillance Post-Interventionnelle
et d’Accueil des Polytraumatisés - CHU Pitié-Salpêtrière – Paris
> p.
• Don d’organes et Religion
Marie-Hélène RENAULT, Directeur Adjoint du Département Conseil et Stratégie - Hospices Civils - Lyon
X
• « Le frère venu d’ailleurs, approche transculturelle du don d’organes ». À propos d’un programme
d’accompagnement à la communication des coordinations de prélèvements d’organes et de tissus
> p.
Guy LESOEURS, Ethno-Psychologue, Anthropologue de la santé, coach et animateur de projets en santé – Socramed –
Paradou, Docteur Taïeb FERRADJI, Psychiatre, Docteur en Sciences Humaines - Service de Psychopathologie du Pr.Moro,
Hôpital Avicenne – Bobigny, Daniel MAROUDY, Chargé de projet éducation - Direction médicale et scientifique Agence de la biomédecine - Saint-Denis. Et le groupe de travail «Problématique transculturelle du don d’organes»
> p.
x
• Le prélèvement de reins sur donneurs décédés après un arrêt cardiaque
Docteur François MOUREY, Médecin coordonnateur de prélèvement d’organes et de tissus Hôpital Saint Louis, AP-HP – Paris
> p.
• Critères de qualité pour une transplantation dans de bonnes conditions
Professeur Marie ESSIG, Service de Néphrologie, CHU – Limoges
> p.
• Accompagnement du transplanté et de ses proches après la transplantation
Emilie MALLET, Infirmière – Service de Neurologie – CHU – Kremlin Bicêtre
> p.
x
• Comment mettre en place une consultation infirmière dans un service de transplantation rénale ?
Lorsque les compétences des équipes se regroupent pour le bénéfice des patients.
Christelle RUDZKY, Formatrice/Consultante - Ed’ Innov Santé
> p.
• Facteurs prédictifs de l’observance précoce en transplantation rénale chez des patients
ayant accès au logiciel SITO (Systeme d'Information en Transplantation d'Organes)
Lionel COUZI, Néphrologue – Hôpital Pellegrin – Bordeaux
> p.
• Éducation thérapeutique en transplantation rénale
Caroline CANCIANI, Infirmière, Frank MARTINEZ, Néphrologue - Service de transplantation rénale Hôpital Necker - AP-HP – PARIS
> p.
• Éducation thérapeutique en transplantation rénale
Marie Pierre DECOOL, Infirmière – Service de Transplantation rénale – CHRU – Lille
> p.
• Transplanté rénal - équipe soignante, vers une éducation optimisée
Nathalie BOEHLER, Infirmière pré-greffe, Bégonia DEL HUERTO, Infirmière - service d’hospitalisation secteur greffe,
Régine DEMIZIEUX, Infirmière - service de suivi post-greffe, Sophie CAILLARD, Praticien Hospitalier,
Dominique SCHMITT, Cadre de Santé - Service de Néphrologie – CHRU - Strasbourg
> p.
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> p.
X
• Comment mettre en place une consultation infirmière dans un service de transplantation rénale ?
Dominique ASSOGBA, Sylvie LANE, Infirmières, Martine JEAN, Cadre Supérieur de Santé –
Service de Transplantation rénale – Hôpital de la Pitié Salpétrière – Paris
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ANNONCE
DE LA MORT
Docteur Morgan LE GUEN, Département
d’Anesthésie-Réanimation - Salle de Surveillance PostInterventionnelle et d’Accueil des Polytraumatisés CHU Pitié-Salpêtrière - Paris
CRITÈRES DIAGNOSTIQUE DE MORT
La mort peut être prononcée dans 2 circonstances qu’il
convient de connaître.
Dans le premier cas, il s’agit classiquement de la mort par
arrêt cardiaque. Sa constatation repose sur l’association d’un
certain nombre de critères tels : l’absence de conscience et l’absence de respiration correspondant au diagnostic de « mort apparente », suffisante pour initier une réanimation cardio-pulmonaire
en attendant la venue d’un médecin.
Pour qualifier finalement le décès, s’ajoute le caractère d’arrêt
circulatoire irréversible (absence de pouls et d’activité cardiaque) et
par conséquent arrêt des fonctions d’organes nécessaire au maintien de la vie.
L’irréversibilité de l’arrêt cardiaque peut précéder toute réanimation et concerne notamment les patients victimes d’arrêt
cardiaque sans témoin en pré-hospitalier et présentant des critères
de « no-flow » prolongé c'est-à-dire d’absence de circulation
sanguine prolongée comme l’hypothermie, la rigidité ou lividité
cadavérique, l’initiation de mécanismes de putréfaction…
A l’inverse, l’irréversibilité peut intervenir après un échec d’une
réanimation cardio-pulmonaire bien conduite pendant 30
minutes, ou après un arrêt cardiaque survenant dans un contexte
de limitation de thérapeutiques actives. Dans ces différentes situations, le primum movens à la déclaration de décès est l’arrêt du
cœur.
La seconde situation, plus récente au regard de l’histoire de
la médecine, correspond à la mort encéphalique décrite par
Mollaret et Goulon en 1959 et qui traduit l’irréversibilité de la
destruction du cerveau aboutissant naturellement à l’arrêt
cardiaque en l’absence de suppléance réanimatoire.
La définition de la mort encéphalique associe un certain
nombre de critères cliniques et de critères paracliniques.
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Cahier scientifique AFIDTN
Ainsi, cliniquement il existe une abolition de toute relation au
monde externe avec une absence de réaction corticale (coma
profond, aréactif et hypotonique) et une absence de réflexes du
tronc cérébral (mydriase bilatérale, disparition de réflexe oculomoteur, oculo-vestibulaire, oculo-cardiaque et de toux). Ces
éléments traduisent donc la « destruction » de l’ensemble de l’encéphale : tronc cérébral et cortex.
Une fois obtenu ces différents éléments, on parle de mort
clinique qui suffit à la déclaration de décès éventuelle mais qui est
complétée d’examens paracliniques obligatoires dans le cadre
particulier du don d’organe potentiel puisqu’une suppléance peutêtre maintenue pour l’ensemble des autres organes.
Dans ce cas, il faut réaliser une épreuve d’apnée (absence de
mouvements ventilatoires perçu pendant 20 minutes après
débranchement du ventilateur) complétée de 2 électroencéphalogrammes de 30 minutes à 4 heures d’intervalle lesquels doivent
être plats ou d’une artériographie cérébrale 4 axes validant ainsi
l’absence de toute circulation sanguine intra-cérébrale.
ANNONCE DE LA MORT
Quelque soit la circonstance de survenue (arrêt cardiaque ou
mort encéphalique), la mort reste un événement brutal et irréversible pour les proches du défunt et ceci doit conduire à une
réflexion concernant l’annonce.
La première des conditions d’annonce est l’authentification
du décès avec dans la mesure du possible la détermination de son
étiologie.
Ensuite, il convient de vérifier l’identité du défunt et des interlocuteurs notamment dans toutes les circonstances de survenue de
mort brutale (arrêt cardiaque inopiné, traumatologie...).
L’environnement de l’annonce est primordial bien que des
études tendent à montrer que seules des impressions concernant
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l’annonce subsistent. Cet environnement comprend le lieu de
rencontre entre les proches (quelque soit leur nombre après avis
auprès de la famille proche) et les soignants (médecin et représentant soignant : infirmier, cadre, coordinateur de prélèvement)
qui doit être dans la mesure du possible dédié avec un cadre
neutre, calme, lumineux et permettant l’accès aisé à un point
d’eau ou à des toilettes.
Il convient à notre avis de limiter le nombre de soignants
présent de sorte qu’il n’excède pas le nombre d’interlocuteurs, ce
notamment dans le cadre de l’entretien concernant le don potentiel d’organes afin de limiter la pression ressentie par les proches.
Au cours de l’annonce réalisée par le médecin, et après la
présentation des différents interlocuteurs, il est nécessaire
de prononcer les termes de mort ou décès et d’éviter toute
périphrase.
Il s’agit aussi de ménager des temps e silence et d’écoute
des proches. Une des attentes des familles concerne notamment la douleur potentiellement éprouvée par le défunt qu’il
convient de rassurer.
De même, il reste important de prendre mesure et de
réduire les fréquents sentiments de culpabilité exprimés.
L’équipe soignante doit dans tous les cas vérifier la compréhension de l’annonce notamment dans le cadre de la mort
encéphalique dont la présentation clinique avec un corps
chaud, respirant et dont le c?ur bat constitue souvent une
barrière à l’intégration du décès.
Différentes mesures s’imposent alors comme la reformulation, la traduction en cas de difficultés de langage et les explications laissées parfois au soin de l’infirmière en dehors de la
présence médicale.
Le personnel soignant doit aussi être formé à la détection de
réactions pathologiques consécutives à l’annonce du décès et de
prévenir toute mise en danger parfois après hospitalisation aux
urgences (état de stress dépassé : sidération, agitation incoordonnée, actes automatiques…).
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restriction potentielle des visites en chambre mortuaire, au transfert du corps à l’institut médico-légal et la remise tardive du corps
et du permis d’inhumer à la famille.
Enfin, une assistance peut aussi être proposée qu’il s’agisse
d’un soutien psychologique (enfant…), d’un soutien social…
La situation de la mort encéphalique constitue une annonce
de décès très particulière puisqu’elle doit être associée au questionnement concernant la position du défunt face au don et
qu’elle doit recherchée rapidement l’assentiment ou le refus au
don d’organes sans induire de crise intra-familiale ou de sentiment de culpabilité chez les proches.
Au total, le moment de l’annonce d’un décès reste une
période émotionnellement marquante pour tout soignant et doit
être si possible préparée, construite voire débriefée pour éviter
l’installation de syndrome de type Burn-out ou dépressif.
Critères de mort par arrêt cardiaque
et par mort encéphalique :
> Arrêt cardiaque :
• Absence de conscience
• Absence de ventilation
• Absence d’activité cardiaque
> Mort encéphalique :
> Critères cliniques :
• Absence de réponse à la douleur
• Absence de réflexes du tronc cérébral
• Absence de mouvement ventilatoire (épreuve d’apnée)
> Critères paracliniques :
• Réalisation de 2 EEG à 4 heures d’intervalle
• Ou réalisation d’une artériographie cérébrale
Conditions de l’annonce d’un décès :
> Certifier le décès
La présentation du corps du défunt est également un
moment intense émotionnellement et doit être soigneusement
préparé et ce même en préhospitalier. Il s’agit de s’informer
préalablement de la confession du défunt pour assure une
présentation en adéquation avec les différentes croyances, de
préparer un espace intimiste dans la mesure du possible avec
éclairage tamisé, sièges à disposition et de ne pas limiter le
nombre et le temps de visite initialement.
> Authentifier le défunt et l’interlocuteur
En parallèle, l’ensemble des soignants doit connaître les
démarches administratives qui vont concerner les proches dans
les jours suivants pour pouvoir répondre à leur question et dédramatiser la situation.
> Connaître les réactions pathologiques consécutives
à l’annonce
> Se présenter (accompagnement paramédical requis)
> Environnement :
• Le lieu d’annonce
• Les mots importants à prononcer : mort, décès
• Vérifier la compréhension
• Cas particulier de l’annonce par téléphone
> Connaître les démarches à suivre : livret dédié
> Présentation du corps
La remise d’un livret résumant ces démarches s’avère
indispensable car les proches ne sont pas dans des conditions
permettant de retenir des informations délivrées oralement.
Les démarches d’ordre médico-judiciaire doivent être précisées à ce moment là pour limiter les désagréments liés à une
> Entourage présent
> Proposer aide éventuelle (assistance sociale, psychologue…)
> Proposition de don d’organe éventuelle
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« LE FRÈRE VENU D’AILLEURS,
APPROCHE TRANSCULTURELLE
DU DON D’ORGANES ».
À PROPOS D’UN PROGRAMME D’ACCOMPAGNEMENT
À LA COMMUNICATION DES COORDINATIONS DE
PRÉLÈVEMENTS D’ORGANES ET DE TISSUS »
Joséphine COSSART, Coordinatrice de prélèvement d’organes et de tissus - CHU Cochin – Paris, Guy LESOEURS,
Ethno-Psychologue, Anthropologue de la santé, coach et animateur de projets en santé – Socramed – Paradou,
Docteur Taïeb FERRADJI, Psychiatre, Docteur en Sciences Humaines - Service de Psychopathologie du Pr.Moro,
Hôpital Avicenne – Bobigny, Daniel MAROUDY, Chargé de projet éducation - Direction médicale et scientifique Agence de la biomédecine - Saint-Denis. Et le groupe de travail «Problématique transculturelle du don d’organes»
Le personnel des coordinations de
prélèvements d’organes et de tissus peut
éprouver des difficultés de communication
avec les familles migrantes qui, souvent, par
manque d’information préalable ou par
incompréhension, refusent le don d’organes d’un parent décédé.
Un groupe de travail pluridisciplinaire
(coordinateurs de prélèvements d’organes,
psychiatre, ethno-psychologues, médecins
réanimateurs et néphrologues) en collaboration avec l’Agence de la biomédecine a
fait procéder à une enquête qualitative et à
un groupe de discussion afin
de recueillir les besoins des
coordinateurs en face de
telles situations.
DIVERSITÉ CULTURELLE ET SOINS
La diversité, le multiculturel sont une
réalité de tous les jours dans nos pays et la
communication interpersonnelle doit en tenir
compte. Comme les professionnels de l’éducation et des services sociaux, les professionnels de la santé sont confrontés à la gestion
de la diversité culturelle. Les immigrés
peuvent venir de pays où la langue et la
culture française sont connues (Maghreb,
Afrique…) mais aussi de pays où celles-ci
peuvent être complètement ignorées (pays de
l’Est, Extrême Orient...).
De plus, notre système de soins normé à
l’occidentale, avec son discours dominant institutionnel et médical, s’il apporte excellence et
égalité des soins, peut être vécu par les patients
migrants et leurs familles confrontés à la
maladie, à la douleur et à la mort comme un
monde incompréhensible, déshumanisé voire
effrayant. Le discours technique, le jargon
médical peut générer chez le migrant, face à «
l’inquiétante étrangeté » des lieux et des
soignants de l’angoisse, de l’incompréhension
et une légitime envie de fuir.
Ainsi, le discours «égalité des soins, espace
laïque», loin de rassurer les migrants, peut être
interprété comme dénué d’attention particulière vis-à-vis de leurs
habitudes socioculturelles
(réception de la famille élargie,
co-épouses, alimentation, rites
religieux…) et, en tout cas, pour
ce qui est de l’écoute et de la
prise en charge, dépourvu de
dispositif spécifique.
Les professionnels de la santé
sont confrontés à la gestion
de la diversité culturelle
A partir des attentes
exprimées par les coordinateurs, un programme
d’accompagnement à la
communication transculturelle avec les
familles migrantes a été élaboré sous la
forme d’un kit de formation avec jeux de
rôles filmés et des ouvrages didactiques.
Ce programme se déroule en 2009
auprès des centres hospitaliers sous la
forme de réunions animées par un membre
du groupe de travail.
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Comme tout le monde, les soignants
réagissent avec leurs propres représentations
face à cette diversité culturelle qui peut les
déranger par maints aspects. Les incompréhensions et les malentendus qui résultent
d’une communication déficiente de part et
d’autre peuvent avoir des conséquences
préjudiciables à la bonne prise en charge des
malades et contribuer à entretenir un certain
malaise chez les soignants.
Pour un soignant, apprendre à mieux
communiquer avec les patients et les familles
migrantes est donc une nécessité mais le
chemin n’est pas facile, ce d’autant qu’il s’agit
d’établir une relation lors de la mort d’un
proche. Il nous a semblé important, avant de
construire un programme d’accompagnement, de vérifier les besoins des coordinateurs
par le moyen d’une enquête spécifique.
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MÉTHODOLOGIE ET OBJECTIFS
DE L’ÉTUDE
Il s’agit d’une étude qualitative exploratoire réalisée par le CerPhi (Centre d’Etudes
et de Recherche sur la Philanthropie), à la
demande de notre groupe de travail. Cette
étude a été réalisée par téléphone début
2007, auprès de 30 coordinateurs sur 22
établissements en France métropolitaine.
L’objectif était d’explorer le vécu des équipes
hospitalières de prélèvements d’organes et
de tissus afin de :
• faire ressortir leurs difficultés éventuelles
de relation avec les familles de migrants en
vue d'un prélèvement d'organes ou de tissus,
• d’identifier les bonnes pratiques de
communication,
• et leurs attentes en matière d'information
et de formation.
Cette étude avait aussi pour objectif de
répertorier les causes des refus des familles
de migrants afin de faire émerger des pistes
pour améliorer la relation, la communication
des coordinateurs et l'accompagnement des
familles. En complément, un groupe de
discussion de 10 coordinateurs de la région
parisienne a été animé par l’institut KeruX
International.
RÉSULTATS DE L’ÉTUDE
Les résultats détaillés de cette recherche
ont été présentés à la Société Francophone
de Transplantation à Paris en décembre
2 0 0 7 e t a u x c o o rd i n a t i o n s r é u n i e s à
Strasbourg à l’AFCH en juin 2008 et publiés
dans différentes revues notamment dans
Uropractice, numéro de novembre 2008.
Les entretiens individuels et le groupe
ont confirmé que les coordinations hospitalières sont souvent démunies face aux refus
de dons d’organes par les familles de
migrants, refus que les coordinateurs et
c o o rd i n a t r i c e s d o i v e n t a c c e p t e r s a n s
toujours les comprendre ou pouvoir les
discuter, d’où le double déficit d’une attente
prolongée pour les personnes en attente
d'une greffe et du sentiment des familles
d'avoir été incomprises bien qu'ayant pris
leur décision.
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Retenons de cette recherche que :
• Les coordinateurs interrogés confirment
leurs difficultés de communiquer avec les
familles migrantes et le faible taux de don d’organes chez ces familles.
• Les coordinateurs (qui montrent tous une
forte implication dans une fonction difficile
mais voulue et choisie), insistent sur leurs difficultés en présence des familles en raison du
rapport permanent à la mort, de la douleur des
familles, de l’urgence, du stress du résultat et
de la frustration des refus que des considérations culturelles majorent.
• Le refus des familles du don d’organes,
migrantes ou non, semble s’opposer à la
conception positive du soignant concernant le
prélèvement, associé à des valeurs fortes de
vie, de progrès, de solidarité et de citoyenneté.
• Les coordinateurs sont, pour la plupart,
réticents à évoquer le cas des migrants comme
spécifique par crainte d’accentuer la différence
par rapport à l’universalité des soins et à la
laïcité de l’hôpital.
• Les motifs de refus des familles de migrants
semblent liés, pour les coordinateurs, à la
crainte du délabrement du corps, aux doutes
sur la réalité de la mort du proche et aussi à un
rapport problématique avec la société d’accueil.
• Les raisons de refus dites « culturelles »
apparaissent aux coordinateurs en lien avec la
religion, les croyances, les interdits ou les obligations de chaque culture.
• Les refus appuyés sur des repères culturels
seraient particulièrement observés auprès de
populations migrantes restées fidèles à leur
culture d'origine et dans les communautés où
la norme religieuse règle la réflexion et l'action.
• Le choix de l'interlocuteur à privilégier pour
recueillir le consentement du don d’organe
semble lié au mode d’organisation familiale
(prééminences du père, du frère ou de l’oncle).
• Les coordinateurs constatent un déficit
important de sensibilisation en amont des
familles migrantes et des communautés à la
nécessité du don d’organe.
• Ces résultats ont donc confirmé la nécessité d’aider les coordinateurs à acquérir une «
posture transculturelle » pour mieux entrer en
relation, pour gérer leur éventuel malaise
devant les migrants et ce, pour éviter les
malentendus et les frustrations des familles et
celles des coordinateurs eux-mêmes.
Ce sont les objectifs qui ont été à la base
de la réalisation du kit de d’accompagnement
que nous allons vous présenter maintenant.
PROGRAMME
D’ACCOMPAGNEMENT
L’objectif du programme et de son
animation est de sensibiliser les soignants à la
démarche transculturelle, dans des réunions
ad hoc, en les faisant discuter de leur expérience et de leur pratique chez les populations dites migrantes à partir de l’une et/ou
des deux séquences filmées du DVD « Le
frère venu d’ailleurs ».
Les bénéficiaires sont, en priorité, les
équipes de coordination hospitalière de
prélèvements d’organes et de tissus et par
extension tous les personnels soignants et/ou
sociaux concernés par le don d’organes.
Le module comprend notamment le film
« Le frère venu d’ailleurs, don d’organe et
communication », réalisé par Guy Lesoeurs
et le Docteur Taïeb Ferradji, un numéro
spécial de Métisse « Approche transculturelle
du don d’organe » AIEP, Juin 2008, l’ouvrage
« L’annonce transculturelle de la maladie »
de Guy Lesoeurs, Editions Téraèdre, 2007 et
le tout dernier ouvrage d’Isabelle Lévy «
Soins, Cultures et Croyances », Editions
ESTEM.
Avant de vous montrer un extrait du film,
il nous faut clarifier certains concepts notamment ce que nous entendons par « démarche
transculturelle ».
LA POSTURE TRANSCULTURELLE
Selon le préfixe accolé à « culturel », intra
(à l’intérieur), inter (entre) et trans (au travers)
se définissent trois démarches qui correspondent à une attitude et un comportement
conscient et actif du soignant et qui, étant de
difficulté croissante, demandent un apprentissage de plus en plus spécifique:
Démarche intra-culturelle : la famille du
donneur potentiel et le coordinateur appartiennent à la même culture, mais le coordinateur tient compte des dimensions socioculturelles dans l’échange.
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Démarche interculturelle : la famille du
donneur potentiel et le coordinateur sont de
cultures différentes, le coordinateur connaît
bien/ou pense connaître la culture de la population voire du groupe à laquelle appartient la
famille et utilise cette connaissance comme
levier dans l’échange.
Démarche transculturelle : la famille du
donneur potentiel et le coordinateur sont de
cultures différentes. Le coordinateur ne
connaît pas la culture de la population ou du
groupe de la famille mas il a été formé (par la
psychologie, l’anthropologie, la sociologie
etc.) à comprendre le concept de culture et il
utilise cette connaissance dans l’interaction.
Le terme de transculturel nous indique, en
tout cas, qu’il s’agit d’une démarche transversale, qui dépasse, tout en tenant compte, la
notion de culture pour trouver le fonctionnement psychique de l’individu avec ses pensées
propres et ses affects.
Retenons que la démarche transculturelle
aboutit à donner le même statut et la même
valeur que les siennes à la production culturelle, affective et psychique de L’autre, à ses
manières de vivre et de penser même si elles
sont différentes, voire déconcertantes.
Quand on parle d’étranger et de personne
de culture différente, on ne peut s’empêcher
d’utiliser des clichés, des stéréotypes (généralisations ou représentations abstraites) voire
des préjugés (jugements a priori et attitudes
concrètes). Ainsi penser que telle population
est « déterministe» est un stéréotype (une
représentation) qui se transforme en préjugé
lorsque je fais preuve d’une attitude (« je ne
pourrais rien faire car ils croient que tout est
écrit») et d’un comportement (de retrait voire
d’évitement). Ce processus cognitif peut faire
le lit d’une discrimination, synonyme de stigmatisation et d’exclusion.
Les stéréotypes et les préjugés n’épargnent
pas les soignants, médecins ou infirmières.
Ainsi, comme le propose Marie Rose
Moro (Psychiatre et responsable de la consultation transculturelle à l’Hôpital Avicenne de
Bobigny), le thérapeute doit faire l’effort
d’une « décolonisation de soi-même », c’està-dire travailler sur ses préjugés et ses
défenses qui ont été forgées par sa propre
culture. Dans son esprit, L’autre ne devient
pas une cible, mais un partenaire de négociation et l’interaction se meut en une alliance,
ce qui change la nature de l’échange et en
modifie les enjeux, surtout dans la difficile
relation sur le don d’organe.
La posture transculturelle n’est donc pas
tant dans l’apprentissage de la culture de
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L’autre que dans le façonnage, au fur et à
mesure, d’une attitude destinée à mieux
communiquer quelle que soit la culture de la
personne avec laquelle on est en présence.
C’est pourquoi, plus que des tableaux
théoriques, il peut être enrichissant d’observer
le jeu des interactions en simulé pour en tirer
des enseignements comme le permettent les
séquences du film « Le frère venu d’ailleurs ».
PRÉSENTATION DU FILM
Le film s’appelle « Le frère venu d’ailleurs,
don d’organe et communication transculturelle » que Guy Lesoeurs et Taïeb Ferradji,
tous les deux membres du groupe de travail
et spécialistes de la démarche transculturelle,
ont réalisé en 2008. Il s’agit d’un DVD de
sensibilisation et de formation destiné aux
coordinateurs et coordinatrices de prélèvements d’organes et de tissus.
Le film comprend 2 séquences filmées de
jeux de rôles entre de vrais coordinateurs et
des stagiaires en psychiatrie transculturelle
qui jouent respectivement leur propre rôle et
celui de la famille. Après chaque jeu de rôle,
on trouve une discussion filmée entre les
membres du Groupe de Travail.
Les réalisateurs du film ont souhaité que les
séquences ne soient pas jouées selon un texte
appris afin de laisser faire l’interaction, de
manière à ce que les gens demeurent authentiques dans leurs émotions et dans leurs réactions. C’est un point essentiel à savoir avant de
visionner le film.
L’objectif du film n’est pas d’apporter des
recettes toutes faites pour aborder telle ou telle
famille de migrant selon sa culture mais plutôt
de faire réfléchir et de faire prendre conscience
d’une posture dite transculturelle.
Les séquences du film offrent une occasion
unique pour un coordinateur de se décentrer
puisqu’il peut se voir à l’œuvre à travers le
comportement de son collègue filmé et observer
en même temps les réactions de la famille.
Il est bien évident que le film ne peut
reprendre l'intégralité du processus des divers
entretiens de la coordination avec la famille mais
les deux séquences illustrent le moment très
précis de la demande de non opposition au don
d'organes.
CONCLUSION
Le film montre que l'opposition éventuelle des familles migrantes au don d'organe du
parent décédé n'est pas uniquement liée aux aspects culturels ou religieux mais, le plus
souvent, constitue la résultante d'une incompréhension devant le concept de prélèvement
et d'une peur sur le devenir du corps prélevé.
Nous avons préféré montrer les difficultés plutôt que de donner des recettes qui auraient
pu sembler factices et manipulées. En fait, il s’agit d’un instant dans le processus. Qui sait si
l’issue est favorable ou défavorable ? Le doute est permis.
Nous avons vu que la posture transculturelle est dans le façonnage, au fur et à mesure,
d’une attitude destinée à mieux communiquer quelle que soit la culture de la personne avec
laquelle on est en présence.
Il nous semble que ce travail de décentrage et de définition du cadre peut faire partie des
chantiers de communication transculturelle à ouvrir par les coordinations hospitalières, et
nous sommes heureux que notre groupe de travail ait pu y apporter sa contribution.
Nous rappelons que ce programme se déroule en 2009 auprès des centres hospitaliers
sous la forme de réunions animées par les membres du groupe de travail.
BIBLIOGRAPHIE
1. Boileau C., Statut et disponibilité des éléments du corps : la question des dons d'organes en France,
Face à Face, n°1, pp.7-11, SSD, 1999.
2. Crenn C., La prise en compte de la diversité sociale et culturelle des malades à l'hôpital. Actes du
colloque : "Savoirs et enjeux de l'interculturel", coll. espace interculturel, l'Harmattan, mai 2000.
3. Ferradji T., Lesoeurs G. (sous la coord.) Approche transculturelle du don d’organe, numéro spécial de
Métisse AIEP, Juin 2008,
4. Lesoeurs G., Babany G., Pons L. (sous la dir.). L’annonce transculturelle de la maladie, Editions Téraèdre, 2007
5. Lévy I., Soins, Cultures et Croyances, Editions ESTEM, Paris 2008.
6. Moro M.-R. et Coll., Manuel de psychiatrie transculturelle, Editions, La pensée sauvage,
Grenoble, 2004.
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DON D’ORGANES
ET RELIGION
La religion est un facteur socioculturel déterminant
dans la vie de tous les jours et, à plus forte raison,
dans les questions liées au prélèvement d’organes
et à la greffe. Elle est encore souvent opposée par
des équipes soignantes et les familles de patients
confrontées à la question du don d’organes.
Les Hospices Civils de Lyon ont organisé en
2007 un colloque avec des représentants des
cultes catholique, protestant, judaïque et
musulman à destination des personnels hospitaliers et du public. Une publication interne a
ensuite permis de préciser chacune des doctrines,
présentées ci après :
LES CATHOLIQUES : «UNE CHARITÉ
QUI INVITE AU DON ENVERS LES
FRÈRES SOUFFRANTS»
En tous domaines, la position officielle de
l’Eglise catholique romaine est formulée par le
collège des évêques sous la primauté du Pape. Lui
seul est autorisé à parler au nom de l’Eglise
entière.
La position de l’Eglise en faveur du don d’organes est donc facilement identifiable. Dès 1956,
Pie XII s’est prononcé en faveur des dons de tissus
ou d’organes au nom de la «charité qui invite au
don envers les frères souffrants».
Le don est reconnu méritoire sans toutefois
qu’il en soit fait un devoir. Cette position a été
confirmée à plusieurs reprises par Jean-Paul II.
Le don n’est moralement acceptable que si le
donneur ou ses proches ont donné leur consentement explicite. Cette position est plus restrictive
que celle prévue par la loi française qui fait de
l’absence d’opposition un consentement.
Il ne doit pas y avoir discrimination entre les
receveurs.
La vie humaine est un don du Créateur et
l’homme a le devoir d’estimer et de respecter son
corps, tout en se souvenant que la souveraineté
sur le corps appartient à Dieu.
Les modalités du prélèvement doivent témoigner de la conscience de la dignité du corps et
l’apparence humaine doit être restaurée du
mieux possible.
Les évêques de France se sont prononcés en
faveur du critère neurologique de la mort et
l’Eglise ne prend pas position sur les moyens
techniques de la constater, mais s’en remet aux
connaissances médicales les plus récentes.
LES PROTESTANTS : «C’EST AU
SEIN DE LA MORT, AFFIRMER
ENCORE LA VIE»
Diverses Eglises, très différentes les unes des
autres, constituent le protestantisme et toutes
accordent une place importante au corps,
façonné par Dieu et confié à l’homme qui en est
responsable.
Le corps mort n’a pas de caractère sacré, il
n’empêche pas la résurrection promise. Aucune
objection n’est opposée au prélèvement pour
autant qu’il n’ait pas de visée marchande et que
le corps soit traité avec respect.
France Quéré, théologienne, écrit : «C’est au
sein de la mort, affirmer encore la vie, et, au
destin qui a tout saccagé, répondre par une
offrande salvatrice».
Quelques mouvements évangéliques
peuvent, ponctuellement, être plus réticents.
Dans leur immense majorité, les Eglises
protestantes admettent le critère de la mort cérébrale et s’en remettent au corps médical pour sa
définition. Le consentement du donneur, de son
vivant, est recherché et en cas de silence, l’opposition de ses proches devra être respectée.
Marie-Hélène RENAULT,
Directeur Adjoint du
Département Conseil
et Stratégie Hospices Civils - Lyon
LES JUIFS : « SAUVER LA VIE EST UN
COMMANDEMENT RELIGIEUX »
Le judaïsme exige des siens la pratique des
commandements écrits dans la Torah et des principes des maîtres du Talmud.
L’absence d’autorité unique suprême permet
la coexistence de nuances, voire de divergences
dans l’expression des maîtres. Toutefois, l’évolution des techniques, les progrès en médecine, les
a amenés à reconsidérer et adapter certaines
positions religieuses.
Dans le judaïsme, corps et esprit forment un
tout indissociable et il est interdit de procéder à
un acte de dégradation du corps car celui-ci
conserve après la mort son caractère sacré.
De même, il est interdit de tirer profit d’un
corps. En revanche, intervenir pour sauver une vie
(pikouah Nefesh) prend valeur de bonne action.
La primauté de la vie et la reconnaissance de
sa valeur suprême ont conduit à des aménagements religieux et lèvent des interdits : les soins
prodigués pendant le shabbat et le prèlèvement
d’organes sont des exemples parlants. Sauver la
vie est un commandement religieux (mitswa).
Il a pu exister un décalage important entre la
tradition juive et la pratique du prélèvement d’organes lié à la détermination du moment de la mort.
La mort encéphalique et le maintien artificiel
de la vie ne correspondaient plus à l’exigence de
l’arrêt des fonctions respiratoires et cardiaques
jusque-là signes de la mort.
L’irréversibilité de l’état de mort encéphalique
est aujourd’hui admise par les autorités religieuses juives comme autorisant le prélèvement.
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L’acte de prélèvement doit être réalisé dans le respect du corps.
L’obligation d’inhumer sans retard le défunt pourra être
adaptée aux délais nécessaires au prélèvement.
L’accord du donneur de son vivant, ou à défaut d’expression, l’autorisation de la famille sont indispensables. Dans la
tradition juive, le don d’organes correspond à un acte de générosité que chacun est en droit d’accorder ou non.
LES MUSULMANS : «LE DON EST CONSIDÉRÉ
COMME UNE BONNE ACTION ET MÊME
COMME UNE AUMÔNE»
Il n’existe pas une voix unique officielle de l’Islam, mais de
nombreux juristes musulmans et des lectures différentes des
sources de l’Islam : le Coran, la Sunna (recueil des actes et
des paroles du prophète Mohammed et de ses compagnons),
l’ijtihad (effort intellectuel créatif permettant de trouver une
solution à des problèmes non résolus ou non mentionnés par
le Coran ou la Sunna), les fatwas (consultations auprès de
jurisconsultes afin de connaître la position de la religion vis-àvis d’un acte).
même comme une aumône (dadaka). Pour l’Islam, l’homme
est seul responsable de ses actes devant Dieu, en cas d’accord comme de refus du don, refus qui ne peut se justifier
toutefois sur des seules considérations religieuses.
Les dons et des greffes sont pratiqués dans les pays musulmans depuis plusieurs décennies avec l’approbation des autorités religieuses. La première fatwa en ce sens date de 1952
(grand mufti Egypte) et concernait le prélèvement et la greffe
de cornée.
Le consentement du donneur doit être recherché. En cas
de silence, la famille doit être consultée (à Koweit, une fatwa
avait permis le prélèvement que le défunt ait été d’accord ou
pas de son vivant. Elle n’a jamais été appliquée).
La mort est l’arrêt total et jugé irréversible par les médecins, soit des contractions cardiaques et des mouvements
respiratoires, soit des fonctions vitales cérébrales (3e conférence des juristes islamiques, Jordanie 1986). Le diagnostic
de la mort encéphalique est laissé aux médecins, au nombre
minimum de trois.
Les différentes religions se rejoignent
toutes sur un point essentiel : le prélèvement et le don d’organes sont possibles, dans le respect du consentement
du donneur, de l’intégrité de son corps,
de la gratuité et de l’anonymat du don.
Le corps humain est le lieu de la manifestation du Créateur.
Les règles éthiques sont claires et la préservation de la vie prime
sur tous les interdits.
Le Coran permet que le principe de nécessité (darur) lève
l’illicite dans certains cas, et sauver une vie humaine en est une.
«Dieu vous a indiqué ce qui vous est interdit, à moins que
vous n’y soyez contraints par nécessité. Ton Dieu connaît mieux
que quiconque les transgresseurs» S6V119.
Ce principe rejoint celui de la bienfaisance (maslaha). Le
don est considéré comme une bonne action (hassana) et
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Le respect de l’intégrité
physique du corps est
indispensable.
UN CONSENSUS EN
FAVEUR DE LA VIE
ET DU DON
Les différentes religions se
rejoignent toutes sur un point
essentiel : le prélèvement et le
don d’organes sont possibles,
dans le respect du consentement du donneur, de l’intégrité de son corps, de la
gratuité et de l’anonymat du
don. Le prélèvement sur donneur
vivant ne doit jamais mettre sa propre santé en danger. La
définition de la mort encéphalique est plus nuancée dans le
judaïsme, mais en réalité et au final, la primauté du maintien
de la vie justifie le prélèvement.
Les représentants religieux intervenant dans les hôpitaux
acceptent sans difficulté le contact direct sur ces questions
avec les patients, les familles ou les équipes soignantes. Ils
sont régulièrement sollicités dans l’urgence et aident les
familles à porter le poids de leur décision, qu’elle soit en
faveur du prélèvement ou pas.
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LE PRÉLÈVEMENT DE REINS
SUR DONNEURS DÉCÉDÉS
APRÈS UN ARRÊT CARDIAQUE
Docteur François MOUREY, Médecin coordonnateur de prélèvement
d’organes et de tissus - Hôpital Saint Louis, AP-HP - Paris
Chaque année de nombreux patients en
insuffisance rénale terminale ne peuvent recevoir l’organe qu’ils attendent. Afin d’augmenter le nombre de greffons rénaux disponibles, l’agence de la biomédecine a initié à
partir de 10 centres hospitaliers volontaires
une procédure de greffe rénale à partir de
greffons prélevés sur des donneurs décédés
après un arrêt cardiaque (DDAAC). Devant les
résultats satisfaisants des équipes étrangères,
cette activité a débuté en septembre 2006
après modification de la législation [décret
n°2005-949 du 02/08/05 et arrêtés du
02/08/05]. Elle est réalisée dans le cadre d’une
convention signée entre les centres hospitaliers et l’Agence de la biomédecine.
La procédure établie nationalement par
les équipes pilotes hospitalières et pré-hospitalières repose sur 4 volets.
• La sélection du donneur
• La sélection du receveur
• La réduction des facteurs pouvant altérer
la fonction des greffons (ischémie chaude et
ischémie froide)
• L’utilisation d’innovations technologiques
(machine à masser, machine à perfusion
pulsatile rénale)
La présence de pathologies vasculaires
(HTA, diabète…) doivent être activement
recherchées car elles diminuent de façon significative la durée de vie du greffon et contre indiquent le prélèvement [4].
Les circonstances du décès doivent être
connues et certaines causes d’arrêt cardiaque
pouvant bénéficier d’une réanimation
prolongée ou de techniques particulières (hypothermie, intoxication médicamenteuse) sont
exclues du processus de don et pris en charge
par des services hospitaliers spécialisés [5].
Bien que pratiqué dans de nombreux pays,
le don d’organes sur un sujet en arrêt cardiaque
dans le cadre d’un arrêt ou d’une limitation
thérapeutique (Maastricht 3) n’est pas retenu.
Seuls sont pris en compte les décès survenant
dans les catégories 1, 2 et 4 de Maastricht.
Il existe un risque de mauvaise perfusion
rénale des sujets ayant subi un traumatisme
avec décélération violente et arrachement de
pédicules vasculaires. Certaines équipes françaises ont décidé de ne pas les prendre en
charge en vue de prélèvement.
Le bilan biologique est réduit à l’essentiel : seuls seront prélevés à l’arrivée du
donneur les examens indispensables au
choix du receveur (groupe sanguin et HLA)
et à la sécurité sanitaire (sérologies).
LA SÉLECTION DU RECEVEUR
Il s’agit d’une première greffe chez un
receveur de moins de 60 ans non immunisé
afin de limiter les risques de rejet et de ne pas
attendre les résultats du cross match si les
délais d’ischémie froide l’imposent.
Ce receveur est prévenu de l’origine de
son greffon et consentant. Bien que les
résultats dans la littérature internationale
montrent des résultats égaux voire supérieurs à ceux rencontrés avec des donneurs
en mort encéphalique, il persiste un risque
majoré de retard à la reprise de fonction du
greffon voire à une non fonction primaire
imposant une poursuite de l’épuration extra
rénale post greffe pour un période de 15
jours environ.
Tableau 1 : Classification de Maastricht
LA SÉLECTION DU DONNEUR
Il s’agit d’une personne en arrêt cardiaque
réfractaire (AC) qui a bénéficié d’une réanimation cardio-respiratoire précoce sur une durée
minimale de 30 minutes selon les recommandations françaises actuelles [1].
Le constat de décès, signé par un médecin,
est établi selon les termes des articles R 1232-1
et R 1232-3 du Code de la santé publique.
C’est un sujet jeune de moins de 55 ans.
Plusieurs études montrent une survie du
greffon plus courte chez les donneurs âgés [2,3].
CLASSE 1
Personnes faisant un arrêt cardiaque en dehors de tout contexte de prise en charge médicalisée et pour lesquelles le prélèvement d’organes ne pourra être envisagé que si la mise
en œuvre de gestes de réanimation de qualité a été réalisée moins de 30 minutes après
l’arrêt cardiaque.
CLASSE 2
Personnes faisant un arrêt cardiaque en présence de secours qualifiés, aptes à faire un
massage cardiaque et une ventilation mécanique efficaces mais dont la réanimation ne
permettra pas une récupération hémodynamique.
CLASSE 3
Personnes pour lesquelles une décision d’arrêt de soins est prise en raison de leur pronostic.
CLASSE 4
Personnes décédées en mort encéphalique qui font un arrêt cardiaque irréversible au cours
de la prise en charge en réanimation.
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Le protocole d’immunosuppression
tentera de diminuer le risque rénal de ces
thérapeutiques. Une étude récente montre
malgré tout que l’introduction précoce de la
ciclosporine n’est pas délétère sur la fonction
rénale du receveur [6].
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Fig 1 : Schéma de la réfrigération par une sonde de Gillot
La réduction des durées d’ischémie et la
réduction de leurs conséquences sur l’organe
L’agression combinée de l’ischémie
chaude et de l’ischémie froide est le facteur le
plus dommageable pour le greffon. La durée
de ces périodes d’ischémie doit être strictement limitée et l’utilisation de système
permettant d’en diminuer les conséquences
sur l’organe doit être utilisée.
L’ischémie chaude
La réduction de la durée d’ischémie
chaude par la mise en place rapide (moins de
150 minutes après l’arrêt cardiaque) d’un
système de préservation des reins in situ est
requise. Il convient de connaître avec précision l’heure exacte de la survenue de l’arrêt
cardiaque et de la mise en route des secours.
Fig 2 : Principe de la circulation régionale normo-thermique
Le délai apporté à la mise en route de la
réanimation cardio-respiratoire ne doit jamais
excéder 30 minutes. La machine à masser,
bien que n’ayant pas montré de supériorité
dans la survie de l’arrêt cardiaque récupéré [7]
trouve ici un intérêt pour le maintien continu
d’une perfusion d’organes suffisante. Il
n’existe pas de différence prouvée entre les
deux systèmes existant sur le marché en
termes d’efficacité.
Des traumatismes hépatiques voire
pulmonaires ont été rapportés lors de l’utilisation de ces techniques.
La sonde de Gillot est un système simple
de réfrigération rénale in situ, peu onéreux et
rapidement mis en place (15 minutes en
moyenne). Il a été choisi par la plupart des
équipes ne disposant pas d’un circuit de circulation régionale normo-thermique (CRN).
Certaine études montrent une supériorité
de la CRN sur la sonde de Gillot en termes de
qualité de la fonction rénale post greffe et de
survie du greffon rénal [8] . Ces systèmes
doivent être mis en place par des équipes
entraînées et disponibles. Des essais de pose
percutanée se sont soldés par des échecs avec
dépassement des délais et perte de greffons.
Nous préconisons donc la pose par dénudation des vaisseaux dans le triangle de Scarpa.
L’utilisation de fibrinolytique est recommandée associée à une héparinisation pour la
durée de la perfusion. L’irrigation intra abdominale de liquide froid préconisée afin d’amé-
10
Cahier scientifique AFIDTN
liorer la réfrigération rénale n’est pas étayée
par des études concluantes. Elle semble
dangereuse car elle expose à la perforation
d’organes creux.
L’ischémie Froide
L’ischémie froide est un facteur connu de
mauvais fonctionnement des greffons [9]. La
réduction de la durée d’ischémie au dessous
de 18 h est une nécessité. Elle impose que les
greffes se fassent en urgence.
Le pronostic des greffes rénales à partir
de DDAC a été transformé par l’utilisation de
machine à perfusion rénale [10]. Elle a un triple
intérêt : elle améliore le lavage du rein et la
circulation périphérique, permet par la
surveillance des résistances intra rénales
l’étude de la viabilité des greffons et l’amélioration de leur qualité par l’adjonction de
produits diminuant les effets délétères de l’ischémie re-perfusion [11].
Des études récentes montrent que l’utilisation de cette technique est un facteur indépendant de diminution de retard de fonction
du greffon par rapport à la conservation en
container et ceci aussi bien pour les donneurs
en mort encéphalique que pour les DDAAC.
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LES RÉSULTATS À 2 ANS
Neuf centres pilotes répartis sur le territoire ont pu
débuter cette activité. En 2 ans 66 donneurs ont été
prélevés parmi les 200 donneurs recensés.
Il s’agissait essentiellement d’hommes (90%) exclusivement recensés en pré hospitalier et pour 70% d’entre
eux dans la catégorie 1 de Maastricht.
Le taux de refus sur cette période était de 20% (sur
le nombre d’entretien réalisés) semblant donc légèrement inférieur à ce qui est rencontré lors de la ME
98 greffes rénales ont été réalisées pendant ces 2
premières années. Le taux de retard de reprise de greffons (DGF) est plus élevé que celui rencontré dans la
greffe réalisée à partir de donneurs en ME mais peu différent de celui rencontré dans les études étrangères.
La durée de DGF est de 15 jours en moyenne, nécessitant 6 séances de dialyse. A un an, la créatininémie
moyenne est de 165 mmol/l.
Les résultats ont été jugés satisfaisants lors de la
dernière réunion du comité de pilotage (février 2009)
permettant l’extension de cette technique à d’autres
centres volontaires. S’il semble prématuré de se
prononcer sur l’importance du nombre de greffons
supplémentaires en France (1,4% des greffes rénales
réalisées en France en 2007), la greffe réalisée à partir de
DDACC a représenté 15% des greffes réalisées dans
notre centre (Hôpital Saint Louis) sur cette période.
L’AVENIR
La procédure de prélèvement hépatique est actuellement finalisée. Elle impose la mise en place d’une CRN
pour garantir une bonne conservation de l’organe ainsi
que des durées d’ischémie plus courtes. Actuellement
utilisée essentiellement chez le DDAAC, les machines à
perfusion d’organes ont certainement vocation a se développer dans les prochaines années et à être utilisées chez
tous les donneurs limites (Donneurs en ME ou DDAAC).
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BIBLIOGRAPHIE
1. Prise en charge de l’arrêt cardiaque : Recommandations formalisées d’experts SFAR-SRLF-SAMU de France-SFMU septembre 2006
2. Use of marginal organs from non-heart beating cadaveric kydney donors:
Katzuo Mizutani, Yoishinari Ono, Tsueno Kinukawa, Ryohei Hattori, Naoki
Nishiyama, Osamu Kamihila,Shinichi Ohshima Transplantation Vol 72, 13761380 N° 8 october 27, 2001
3. Outcome of kydneys from donors after cardiac death : implications for allocation and preservation : J.E. Locke, D.L. Segev, D.S. Warren, F. Dominici, C.E.
Simpkins, R.A. Montgomery American Journal of Transplantation 2007;7; 17971807
4. Mutivariate analysis of donor risk factor for graft survival in kidney transplantation: F. Pessione, S. Cohen, D. Durand, M. Hourmant, M. Kessler, C Legendre,
G. Mourad, Ch. Noel, M.N. Péraldi, C. Pouteil-Noble; Ph. Tuppin, Ch. Hiesse:
Transplantation Vol 75,361-367 N°3 February 15, 2003
5. Emergency feasibility in medical intensive care unit of extracorporeal life
support for refractory cardiac arrest: B. Megarbane, P. Leprince, N. Deye, D.
Résière, G. Guerrier, S. Rettab, J. Théodore, S. Karyo, I. Gandjbakhch, F. Baud
Intensiv Care Med (2007) 33: 758-764
6. Renal function with delayed or immediate cyclosporine microemulsionin
combinaisonwith enteric-coated myclophenate sodium and steroïds: results of
follow up to, 30months post transplant: G. Mourad et al Clin. Transplant. 2007:
21 (3) 295-300
7. Manual chest compression vs use of an automated chest compression device
during resuscitation following out of hospital cardiac arrest. A randomized trial:
A. Hallstrom, T. Rea, M. sayre, J. Christenson, A. Anton, V. Mosesso, L.Van ottingham, M. Olsufka, S. Pennington, L White, S. Yahn, J. Husar, M. Morris, L. Cobb:
Jama, June 14, 2006 – Vol 295, N° 22, 2620 – 2628
8. Normothermic recirculation reduce primary graft dysfunction of kidneys
obtained from non-heart-beating-donors: R. Valero et al. Transpl. Int. 2000: (13
(4)): 303-10
9. A good alternative to reduce the kidney shortage: kidneys from nonheartbeating donors: C. Gonzalez-Segura et al.: Transplantation 1998 Jun
15;65(11):1465-70
10. A trouble with kidneys derived from the non-heart-beating donor: a single
center 10-year experience. S. Balpuri et al.: Transplantation Vol 69(5) 842-846
15march 2000
11. Pulsatile machine perfusion with vasosol solution improves early graft function after cadaveric renal transplantation: J. Guarrera et al. Transplantation vol 77,
1264-1268 N° 8 april 27, 2004
CONCLUSION
Le prélèvement sur DDAAC est une procédure lourde
impliquant tout particulièrement les équipes pré hospitalières. Les délais courts expliquent en partie le faible taux de
donneurs prélevés. Les premiers résultats encourageants
sont le fait d’un suivi strict de la procédure. Des améliorations sont à attendre avec le développement des techniques
de CRN et de perfusion d’organes.
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CRITÈRES DE QUALITÉ POUR
UNE TRANSPLANTATION DANS
DE BONNES CONDITIONS
Envisager une transplantation rénale dans de bonnes conditions, c’est
analyser chaque période qui jalonne la transplantation rénale pour un
définir les contraintes particulières et donc les mesures préventives à mettre
en place dès l’initiation de la démarche de transplantation.
Professeur Marie ESSIG,
Service de Néphrologie, CHU – Limoges
Ces recommandations portent entre autre sur la qualité de la dialyse,
La phase initiale de la transplantation rénale, la période opératoire, est
dominée par la problématique cardiovasculaire et chirurgicale. Le geste le contrôle de la volémie, la prise en charge de l’anémie, du métabolisme
opératoire est en effet accompagné d’un remplissage vasculaire important phosphocalcique et l’apport nutritionnel. Elles sont disponibles sur le site
suivant : http://www.ndt-educational.org/guidelines.asp.
pour optimiser la reprise de fonction du greffon.
Ce remplissage peut décompenser la fonction cardiaque
qui est parfois précaire chez les patients insuffisants rénaux.
L’anastomose vasculaire peut aussi être difficile lorsque les
vaisseaux présentent des calcifications importantes, situation
qui a été récemment reconnue comme un facteur de risque
propre de mortalité des patients insuffisants rénaux.
Le tableau ci-dessous en résume quelques points :
Qualité de dialyse
Apport Oral de NaCL
Hémoglobine et Fer
Phosphate et Calcium
PTH et vitamine D
Apport protidique
Apport énergétique
Albuminémie
Le contrôle de la volémie tout au long de la progression
de l’insuffisance rénale, le traitement des facteurs de risque
cardiovasculaire, la prise en charge de l’anémie pour en
éviter un retentissement cardiaque et le contrôle des désordres du métabolisme phosphocalcique sont donc des
points fondamentaux pour amener le patient en situation optimale du point
de vue opératoire.
La période post-opératoire immédiate est marquée par une immunosuppression importante qui augmente le risque infectieux et par un hypercatabolisme probable, dont l’importance est mal connue et les mécanismes
peu élucidés.
Cet hypercatabolisme est cependant responsable d’une perte musculaire qui paraît fréquente et qui complique le retour à domicile. Lors de la
prise en charge en épuration extra-rénale, l’apport protéique alimentaire et
l’apport calorique doivent donc être optimisés pour éviter l’arrivée à la
transplantation dans une situation de « malnutrition » qui compliquerait la
prise en charge de cette période post-opératoire.
Cet état de « malnutrition » associe une masse musculaire faible, du
fait des carences protidiques et énergétiques, et une masse grasse élevée,
le tout dans un fréquent contexte d’hypervolémie qui complique la mise en
évidence de la perte musculaire.
Plus à distance de la greffe, le pronostic est dominé par les risques de
rejet ou de néphropathie chronique d’allogreffe et le risque tumoral. En
termes de traitement, une bonne observance thérapeutique est primordiale mais il est souvent difficile d’apprécier correctement ce point en
dehors de consultations spécialisées d’éducation thérapeutique.
La tolérance psychologique à la greffe est aussi un domaine peu abordé
dans le cadre du suivi habituel en consultation de transplantation alors que
l’acceptation psychologique de la greffe est probablement un élément déterminant de la réhabilitation complète du patient après la greffe.
Pour améliorer la prise en charge globale des patients en épuration
extra-rénale et amener les patients en situation optimale à la greffe, des
critères de qualité de dialyse ont récemment été définis par les organismes
européens et américains(1).
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Kt/V > 1,2
Inférieur à 6g/j (en dehors de situations particulières)
Hb : [11 – 12 g/dL], Ferritine > 100 µg/L
Phosphate < 1,8mmol/L, Pi*Ca < 4,5 mM2
PTH: [150 – 300 pg/mL], 25(OH) vitamine D > 30ng/mL
Au minimum: 1,1 g de protéine / kg de poids idéal /j
30 – 40 kcal/ kg de poids idéal/j
> 40 g/L
Les résultats des études observationnelles de suivis de cohorte de
patients hémodialysés, telles que l’étude DOPPS, montrent malheureusement qu’il existe encore de grandes disparités dans la prise en charge avec
dans l’étude DOPPS 2, réalisée de 2002 à 2004, près de 13% des patients
avec une valeur de KT/V inférieure à la dose recommandée de 1,2. De
même le rapport rein 2006 montre que seulement 54% des patients ont
une hémoglobine située entre 11 et 13 g/dl. Cependant, il existe une
amélioration globale des pratiques entre l’étude DOPPS1 (effectuée de
1996 à 2000) et l’étude DOPPS 2(2).
Aborder une transplantation dans de bonnes conditions, c’est en
premier lieu suivre les recommandations pour la réalisation de l’épuration
extra-rénale avec en particulier le contrôle de la volémie et de l’hypertension artérielle, le contrôle de l’anémie et du métabolisme phosphocalcique
et la mise en place d’un support nutritionnel permettant un apport calorique et protidique optimal pour éviter les problèmes de « malnutrition ».
C’est aussi une approche globale du patient pour apprécier les éventuelles
difficultés psychologiques ou sociales qui pourraient survenir après la
greffe et retentir sur l’observance du traitement. C’est enfin une action
permanente vers une réhabilitation complète du patient. Une telle prise en
charge n’est envisageable qu’avec la participation de tous les membres de
l’équipe soignante, néphrologue, infirmière, diététicienne, kinésithérapeute et psychologue, qui doivent tous prendre part au projet thérapeutique mené avec le patient(3).
BIBLIOGRAPHIE
1. Canaud B. Recommandations européennes de bonnes pratiques (EBPG)
en hémodialyse. Deuxième vague. Néphrologie & Thérapeutique, 2008, 115.
2. Canaud B. Gain de vie potentiel pour les patients hémodialysés français
attribuable aux modifications des pratiques et la mise en conformité avec les
cibles recommandées : une estimation permise par l’étude DOPPS.
Néphrologie & Thérapeutique, 2008, 256.
3. Coustere O. La préparation au traitement de suppléance : le point de vue
du patient. Néphrologie & Thérapeutique, 2007, 214.
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ACCOMPAGNEMENT DU
TRANSPLANTÉ ET DE SES PROCHES
APRÈS LA TRANSPLANTATION
Emilie MALLET, Infirmière – Service de Neurologie – CHU – Kremlin Bicêtre
L’accompagnement du patient transplanté et de ses
proches est nécessaire pour une meilleure adhésion au traitement mais aussi pour un meilleur confort de vie. Le changement est brutal entre la dialyse et la transplantation aussi
bien pour le transplanté pour ses proches. Notre accompagnement permet un soutien continu. Il évite certaines
angoisses qui peuvent mettre le doute au retour à domicile et
à chaque nouvelle étape (déménagement, vacances, grossesse, formation, nouveau travail…).
Notre accompagnement permet de rendre autonome le
patient et le responsabiliser face à son traitement.
L’équipe de Néphrologie donne au patient tous les
moyens pour apprendre et comprendre son traitement
(médicaments, régime alimentaire, effets secondaires,
complications, conduites à tenir,…) à l’aide d’outils tels que
des exposés, des entretiens et des ateliers. Une évaluation est
réalisée tout au long de la greffe en particulier à chaque
changement de traitement. Le patient et ses proches connaissent l’existence d’une consultation infirmière complémentaire à celle du néphrologue pour les aider. Ils savent aussi qu’ils peuvent
appeler la consultation pour prendre rendez-vous ou seulement avoir un entretien téléphonique avec une infirmière.
L’accompagnement des patients et de leurs proches est nécessaire vis-à-vis du traitement mais aussi pour un suivi sur l’acceptation
du greffon et des changements de vie. Le patient tout comme un de ses proches peut passer par plusieurs phases : de l’euphorie à la
dépression.
Le transplanté peut avoir de grosses difficultés à prendre en charge son traitement ou encore les nouveaux changements de vie
qui en découlent. Dans ce cas, l’équipe infirmière fait appel à un de ses proches. Le plus souvent, le proche référent est le conjoint
mais il peut être aussi un membre de la famille (fratrie, enfant, parent) ou encore un ami. Cette aide a ses avantages mais aussi ses
inconvénients.
Tout d’abord, le soutien d’un proche permet une meilleure observance du traitement de la part du patient. Il lui rappelle la nécessité de prendre ses médicaments pour accomplir un projet de vie, tout comme les horaires de prises pour éviter des oublis. Le proche
référent du transplanté sera alors accompagné par l’équipe infirmière. Il recevra le programme d’éducation thérapeutique avec le
patient. L’aide d’un proche permet d’éviter de recourir à une infirmière à domicile. Dans ce cas où le proche est une personne qui ne
vit pas au domicile du transplanté, son aide devient plus limitée. Il faut le prendre en considération et éviter de le surcharger de tâches
qu’il ne pourra pas toujours accomplir. La personne aidante doit être disponible et être proche géographiquement. Le choix du proche
doit être réalisé avec le patient. Il doit se sentir en confiance mais éviter qu’il soit infantilisé en faisant à sa place. Le proche reste une
aide partielle pour éviter que le patient se sente perdu. Quand le tiers n’est pas disponible, le risque de non observance augmente.
L’accompagnement du patient et de ses proches est primordial pour une adhésion optimale du traitement. Les proches ne doivent
pas être écartés du programme d’éducation thérapeutique mais au contraire, intégrer pour faire perdurer l’observance du patient face
à son traitement tout en respectant l’autonomie du transplanté.
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COMMENT METTRE EN PLACE UNE
CONSULTATION INFIRMIÈRE DANS
UN SERVICE DE TRANSPLANTATION
RÉNALE ?
Dominique ASSOGBA, Sylvie LANE, Infirmières, Martine JEAN,
Cadre Supérieur de Santé - Service de Transplantation rénale –
Hôpital de la Pitié Salpétrière - Paris
La transplantation constitue un
traitement substitutif de choix à l’insuffisance rénale car elle est génératrice de qualité et de quantité de vie.
Pour la société cela représente un coût
moins important que la dialyse.
Mais malgré le renforcement de
l’activité de prélèvement en 2001 et
l’élargissement des possibilités de
prélèvement sur donneur vivant les
besoins sont loin d’être couverts. Au
cours d’une année le nombre de greffons disponible est plus de 3 fois moins
important que le nombre de candidats
à la greffe. La pérennité du greffon est
donc précieuse. Pour la personne
transplantée d’une part car le retour en
dialyse correspond à une détérioration
de la qualité de vie et à des difficultés
accrues pour obtenir un nouveau
greffon compatible, mais aussi pour la
société qui devra supporter le surcoût
du retour en dialyse.
Il convient donc de prolonger le plus
possible la vie du greffon. Notamment
en essayant d’améliorer l’observance
thérapeutique car on sait que les pertes
de greffon sont en lien direct avec des
problèmes d’observance.
• Les patients sont submergés d’informations ce qui génère de l’angoisse.
• Nous n’adaptions pas le contenu de
l’information à chaque patient.
• Le moment choisi n’était pas
toujours opportun.
• La durée d’hospitalisation est courte
(10 à 15 jours quand tout va bien)
pour une information dense
• Les patients sont fatigués du fait de l’intervention subie et des soins fréquents
• La consultation pré greffe est parfois
très éloignée du moment où ils vont
être greffés
• Il n’y a pas de temps spécifique dédié
à ce soin relationnel qu’est l’éducation
thérapeutique
• Il y a un savoir partagé par tous les
membres de l’équipe mais il n’y a pas de
pas de coordination des actions de chacun
• Nous étions plus souvent entraînés à
informer, à donner des conseils plutôt
qu’à éduquer par manque de temps,
de personnels et de formation.
LA MISE EN PLACE DE
LA CONSULTATION DU
TRANSPLANTÉ
dans la politique d’établissement dans
la mesure où cette consultation
permettrait de mieux répondre à l’attente des malades et de leur famille. De
plus il est en en adéquation avec les
politiques de santé publiques.
(Certification v2, recommandations de
l’HAS pour le suivi des patients greffés
rénaux, plan national pour l’amélioration de la qualité de vie des personnes
atteintes de maladies chroniques
recommandations de l’HAS en éducation thérapeutique…)
Christelle Rudzky, formatrice/
consultante, Ed’ Innov Santé, et le laboratoire ROCHE nous accompagnent
dans la mise en place du projet « consultation du transplanté » grâce à un
programme de formation « PRET ».
Cet accompagnement nous a
permis dans un premier temps de
recenser toutes nos difficultés de
préciser nos objectifs et nos besoins. Il
nous a apporté des connaissances théoriques relatives à l’éducation thérapeutique et nous a amené à nous interroger
sur nos représentations et nos pratiques.
Nous avons précisé le public
concerné par cette consultation
(patients en attente de greffe et patient
greffés) et les intervenants qui y participeront. Le déroulement de ces consultations est également évoqué, notamment qui oriente le patient vers la
consultation infirmière, à quel moment
ces consultations doivent elles avoir lieu,
leur durée, sous quelle forme et dans
quel cadre. Les courriers de convocation
et d’information sont élaborés, et une
première grille d’entretien est encours
d’élaboration. Nous estimons nécessaire
la tenue de staffs multidisciplinaire pour
évoquer ensemble les problèmes
rencontrés et essayer d’apporter une
solution adaptée à chaque patient.
Le coût de la mise en place de cette
consultation a été évoqué. Il n’y aura
pas de surcoût de personnel, car
malgré la volonté des autorités de
mettre en place ce type de service au
patient il n’y a pas de création de poste
envisagée. Cette formation pour la
mise en place de cette consultation est
financée par le laboratoire Roche®.
Cependant il nous semble nécessaire
de bénéficier de formations complémentaires (conduite d’entretien, relation d’aide approche culturelles et
cultuelles, formations scientifiques).
En s’appuyant sur les textes régleCe constat nous conforte dans l’idée
Ces considérations générales, le de la nécessité d’un accompagnement mentaires et les recommandations de
vécu de situation conduisant à des personnalisé du patient pour lui donner l’HAS nous avons donc défini la
arrêts de traitement et des pertes de toutes les chances de réagir de façon consultation infirmière et l’éducation
greffon ont conduit notre équipe de à adaptée aux difficultés qu’il va rencontrer thérapeutique en fonction de nos
propres représentations. Nous avons
Nous comptons évaluer les outils
s’interroger sur la qualité de l’informa- tout au long de sa vie de transplanté.
réaffirmé notre volonté de travailler en qui vont être mis en place et l’efficacité
tion délivrée au patient et sur la
Ce projet de consultation infirmière partenariat avec les différents acteurs de la consultation du transplanté pour
manière d’améliorer cette information. L’enquête de satisfaction menée qui nous tient à cœur depuis long- de soin et personnes ressources du pouvoir réajuster si besoin.
en 2001 auprès de 100 patients temps, est rendu possible aujourd’hui patient et en partenariat avec le
car il s’inscrit dans le patient, dans le respect et l’écoute de
Toute notre activité doit être retransgreffés, notre
projet médical mais aussi la personne soignée.
crite dans un souci de traçabilité et de
pratique quoticoordination entre les différents
CONCLUSION
dienne nous
acteurs de soins, mais aussi en
ont permis
vue de l’évaluation de cette actilister un certain
Le premier objectif de cette consultation du transplanté est d’améliorer la qualité de vie et
vité et dans l’optique de la certifin o m b re d e
l’autonomie du patient transplanté ou en attente de greffe et de permettre ainsi un allongement
cation et d’une future rémunéradifficultés :
de la vie des greffons. Mais en plus valorise notre travail en mettant en avant notre expertise
tion de cette activité.
soignante et en nous permettant d’exercer pleinement notre rôle propre.
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COMMENT METTRE EN PLACE
UNE CONSULTATION INFIRMIÈRE
EN TRANSPLANTATION RÉNALE ?
LORSQUE LES COMPÉTENCES DES
ÉQUIPES SE REGROUPENT POUR
LE BÉNÉFICE DES PATIENTS
Christelle RUDZKY, Formatrice/Consultante - Ed’ Innov Santé
«L’indiscipline des patients coûte très
cher» titrait un article du journal Le Monde
dans son édition du 3 janvier 2008. Le journaliste, Yves Mamou, décrit là un problème
de santé publique international où, d’après
l’unité de surveillance des médicaments de
l’université de Dundee (Ecosse), seulement
un tiers des patients respecteraient leur prescription médicamenteuse. Les laboratoires
pharmaceutiques, s’intéressant de très près
à cet écueil majeur, souhaiteraient mettre en
place, à l’instar d’expérimentations américaines, des aides personnalisées à type de
programmes d’observance qui serait un
service offert aux patients, aux assureurs
santé et à eux-mêmes.
La prise en charge de l’insuffisance
rénale terminale constitue un véritable enjeu
de santé publique compte tenu du coût de sa
prise en charge et de la qualité de vie associée. La transplantation rénale pose le
problème de l’adéquation entre le nombre
de patients en attente de greffe et le nombre
de greffons disponibles. La rareté du greffon
et les contraintes de la dialyse imposent que
tout soit mis en œuvre pour protéger le
greffon et éviter tout rejet. Les préoccupations des patients atteints de maladie chronique et l’évolution des politiques de santé
publique (Plan national pour l’amélioration
de la qualité de vie des patients atteints de
maladies chroniques, Rapport Berland,
Commission Larcher, Réflexions sur le
système L.M.D., Recommandations de la
HAS en matière d’éducation thérapeutique,…) nous amènent à nous pencher sur
une expertise soignante au travers de consultations infirmières. Cette pratique, bien que
n’ayant toujours pas de cadre légal en
France, est désormais de plus en plus
répandue dans les établissements de soins
mais de façon assez disparate et sans reconnaissance financière. Pourtant la consultation infirmière améliore la prise en charge
des patients, est un complément naturel à la
consultation médicale, s’inscrit dans une
logique de travail d’équipe et valorise les
pratiques infirmières.
La T2A vise à ce que les budgets soient
alloués en fonction de l'activité produite,
dont la valorisation s'appuie largement sur le
P.M.S.I. (Programme de Médicalisation des
Systèmes d'Information).
Le projet que nous vous présentons a
retenu, outre l’attention des équipes infirmières pour qui il représente un espoir et un
souffle nouveau pour la profession, une
attention toute particulière de la part des
équipes médicales qui ont décidé de le
porter activement au côté des équipes para
médicales.
• Accréditation version II 2007
L’objectif est d’aider, à partir de nos
expériences, les équipes à la mise place
d’une consultation infirmière utilisant les
techniques d’éducation thérapeutique afin
d’améliorer la prise en charge multidisciplinaire du patient en attente de greffe rénale
ou transplanté.
LE CONTEXTE GÉNÉRAL
Les actes ne relevant pas d’une nomenclature spécifique sont alloués, sur demande,
dans le cadre des MIGAC ou autres.
Introduite au sein du système de santé
français par l’ordonnance n° 96-346 du 24
avril 1996 portant réforme hospitalière et
précisée par le décret n° 97-311 de 7 avril
1997, la procédure d’accréditation des
établissements de santé a pour objectif de
porter une appréciation indépendante sur la
qualité d’un établissement ou, le cas
échéant, d’un ou plusieurs services ou activités d’un établissement, à l’aide d’indicateurs, de critères et de référentiels portant
sur les procédures, les bonnes pratiques
cliniques et les résultats des différents
services et activités de l’établissement.
Les références 24 et 36 notamment, traitent de l’éducation thérapeutique du patient
et de sa prise en charge.
Les contraintes hospitalières
• La tarification à l’activité1
La tarification à l'activité (dite aussi T2A)
est un nouveau mode de répartition des
budgets des établissements de santé, mis en
place en France à partir du 1er janvier 2004
dans le cadre du plan de réforme Hôpital
2007.
Le plan national visant à améliorer la
qualité de vie des personnes atteintes de
maladie chronique :
La loi de santé publique du 9 août 2004
prévoyait 5 plans stratégiques dont le plan
national visant à améliorer la qualité de vie
des personnes atteintes de maladie chronique qui a été annoncé le 24 avril 2007.
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Ce plan est jugé indispensable2 car :
1. plus le patient est impliqué dans les
soins et la gestion de sa maladie, plus la
prise en charge est efficace ;
2. nombre de complications peuvent être
évitées, si le patient est conscient des
risques attachés à la maladie chronique
dont il souffre et si on l’aide à acquérir les
bons réflexes ;
3. du fait de l’allongement de l’espérance
de vie et des progrès de la médecine, il y a
et il y aura de plus en plus de personnes
vivant de nombreuses années avec ce type
de maladie ;
4. notre système de santé doit s’y adapter ;
5. dans bien des cas, on peut réduire considérablement les effets négatifs des maladies
chroniques sur la vie des patients, les incapacités qu’elles engendrent, les contraintes
qu’occasionne leur traitement ;
6. on a besoin de mieux mesurer l’impact
des maladies chroniques sur la vie des
personnes qui en sont atteintes en France,
et on manque d’indicateurs précis pour
mesurer l'effet des prises en charge.
Pour répondre à ces exigences, le plan
a 4 objectifs :
1. Aider chaque patient à mieux connaître
sa maladie pour mieux la gérer ;
2. Elargir la pratique médicale vers la
prévention ;
3. Faciliter la vie quotidienne des malades ;
4. Mieux connaître les conséquences de la
maladie sur leur qualité de vie.
Ce plan intègre également les
réflexions menées lors des «expérimentations Berland», où il est question d’un suivi
personnalisé par des «infirmières expertes,
en quelque sort, on parle de consultation
infirmière mais le terme n’est toujours pas
lâché !
Parallèlement, on entend parler de la
réforme de nos études d’infirmiers
(système LMD), de la commission Larcher,
des recommandations en éducation thérapeutique… Bref, on se dit que çà y est,
notre expertise va enfin être reconnue à sa
juste valeur… on espère, mais le temps
passe et passe… Alors chacun s’organise
de façon logique et intelligente pour
démontrer que la consultation infirmière
n’est pas qu’une vue de notre esprit mais a
un réel intérêt.
La consultation infirmière, bien que
n’ayant toujours pas de cadre légal en
France, est désormais de plus en plus
répandue dans les établissements de soins
privés et publics.
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Elle améliore la prise en charge des
patients, est un complément naturel à la
consultation médicale, s’inscrit dans une
logique de travail d’équipe et valorise les
pratiques infirmières.
Ces études ont consisté à mettre en
place une consultation infirmière pour les
adolescents transplantés rénaux et à en
évaluer les bénéfices en termes d’observance thérapeutique.
L’insuffisance rénale
dans le contexte actuel
Nous avons ainsi montré, lors de la
première étude (régionale) que la
mauvaise observance thérapeutique des
adolescents était liée :
D’ici à la fin 2020, l’OMS prévoit que
les maladies chroniques seront la principale cause d’incapacité physique, mentale
et sociale dans le monde. Leur mortalité
actuelle est de 45% et devrait passer à
60% à l’échéance précitée 3 . Elles sont
associées à un fort taux de morbidité
puisque 85% des années vécues le sont
avec un handicap.
Dans ce contexte général, l’insuffisance rénale chronique terminale tient une
place particulière. La prise en charge de
l’insuffisance rénale terminale constitue un
véritable enjeu de santé publique, compte
tenu du coût de sa prise en charge sur la
durée de vie du patient.
Une étude récente4 montre ainsi que
l’initiation d’une dialyse rénale coûte en
moyenne sur un an entre 49500 € et
86000 € selon la modalité technique de
dialyse utilisée.
Le coût de la greffe de rein, de son
implantation à la fin de la durée de vie du
greffon est, pour sa part, moins documenté. Le seul chiffre communément
retenu est de 8000€ par an5. Cependant,
il apparaît que la greffe de rein constitue
une alternative économiquement valide
par rapport au traitement par dialyse.
L’avantage de la transplantation rénale
ne se limite du reste pas aux seuls aspects
économiques : en effet, un certain nombre
d’études conduites chez l’adulte montrent
que les patients greffés présentent une
meilleure qualité de vie que ceux traités
par dialyse6.
Nous comprenons alors aisément l’intérêt d’une consultation infirmière, auprès de
la consultation médicale, pour les patients
atteints d’une pathologie chronique, en
général, et transplantés, en particulier.
JUSTIFICATION DU PROJET
Durant les années 2002, 2003 et 2004,
j’ai réalisé deux recherches en soins infirmiers7.
• pour 10% d’entre eux à une mauvaise
compréhension du traitement,
• pour 25% à une période de relâchement du suivi médical pendant les
grandes vacances,
• pour 65%, elle était la manifestation
d’un conflit familial, social ou d’un mal
être.
Cette étude a montré une efficacité
quant à l’amélioration des connaissances
des jeunes sur la transplantation et l’acceptation de leur traitement, la nécessité d’une
préparation à la greffe et l’importance
d’une infirmière référente dans le suivi des
maladies chroniques, telle que la transplantation rénale, afin de mieux établir des
soins personnalisés en coordonnant les
actions de l’équipe pluridisciplinaire.
La dynamique du travail d’équipe mise
en place a donc permis une prise en charge
de ces enfants efficiente avec un nombre
d’adolescents non observants revu à la
baisse selon les années (6 en 2000, 5 à 6 en
2001, 2 en 2002 et 1 en 2003).
La réflexion menée à Toulouse a intéressé de nombreux centres.
Lors de la première recherche, nous
avons été amenés à plusieurs reprises
durant les années 2000, 2001 et 2002 à
collaborer avec les équipes soignantes et
médicales des hôpitaux Armand
Trousseau, Necker-Enfants Malades et
Robert Debré à Paris.
Nos réflexions communes nous ont
permis de dégager une problématique
identique quant à la non adhésion aux traitements des adolescents transplantés
rénaux, avec des taux de rejet allant de 12
à 13%, dont 7,25% de ces enfants ont
p e r d u l e u r r e i n ( 3 à N e c k e r- E n f a n t s
Malades et 1 à Robert Debré) sur l’année
2002 et sont retournés en dialyse, les
autres ayant gardé une dégradation irréversible de leur fonction rénale qui a
amputé une partie de vie du greffon.
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Grâce au soutien de la C.N.A.M.T.S., de la D.R.R.C
du CHU de Toulouse et du laboratoire ROCHE, nous
avons étendu notre première étude à ces trois centres
pédiatriques parisiens.
Nous avons pu démontrer qu’une organisation
où la prise en charge globale de l’enfant est établie
apparaît plus cohérente et efficiente ; c'est-à-dire,
lorsque la consultation infirmière regroupe l’accueil
de l’enfant et de sa famille, les bilans sanguins et
urinaires, les prises de constantes (poids, taille, pression artérielle) et l’entretien infirmier. Cette organisation, qui nécessite une proximité de la consultation médicale, permet à l’équipe de suivre très
régulièrement l’adolescent transplanté sur son état
de santé physique mais également psychologique.
De plus elle limite les intervenants auprès de l’adolescent sur une même journée et contribue donc à
«l’humanisation» des soins à l’hôpital. C’est une
même infirmière qui fait, si besoin, l’interface avec
les autres membres de l’équipe.
La consultation infirmière couplée à la consultation médicale s’est imposée comme le lien de l’équipe
pluridisciplinaire.
Nous avons également décrit le profil de l’adolescent non observant (données des centres de Toulouse,
Armand Trousseau, Necker-Enfants Malades et Robert
Debré à Paris) :
• 65,5% étaient des garçons
• moyenne d’âge : 15 ans (avec des extrêmes de
111/2 ans à 20 ans)
• transplantés depuis 1 à 5 ans pour 65,5%
d’entre eux, de 5 à 9 ans pour 27,6% et de 11 à 14
ans pour les 6,9% restants
• 93% des adolescents avaient reçu un rein
provenant d'un donneur cadavérique
• tous étaient sous trithérapie associant prednisone, azathioprine, ciclosporine ou tacrolimus
• il s’agissait d’une 1ère transplantation pour
89,7% d’entre eux
• 86,3% d’entre eux avaient déjà été dialysés
avant la greffe
Sachant que pour la plupart, la mauvaise observance thérapeutique était liée à un conflit familial,
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social ou d’un mal être, elle peut alors être comparée
à une intoxication volontaire, traduisant une détresse
psychique, un appel au secours.
La consultation infirmière a permis de diminuer
de 75% le nombre de rejets pour inobservance
thérapeutique dans les 4 centres étudiés.
J’ai été amené à communiqué largement sur les
résultats de ces travaux afin de partager avec d’autres professionnels nos réflexions.
De nombreux centres hospitaliers m’ont alors
contacté afin que je puisse les aider à mettre en place
une telle organisation dans leur structure.
Mon statut ne me permettait pas de les accompagner à la hauteur de leur espérance ; j’ai alors monté
un projet d’accompagnement que j’ai présenté au
laboratoire ROCHE et qu’il a accepté de développer.
MÉTHODE
Accompagnement d’un projet de service sur 6 à 8
mois sous forme de formation / action / coaching :
• Rencontre avec l’équipe, recueil de leurs attentes,
• Audit du personnel et de la structure afin
d’identifier les points forts et ceux à améliorer,
• Aide à la rédaction du projet afin d’obtenir
une reconnaissance institutionnelle,
• Formation du personnel médical et para
médical sur la consultation infirmière et l’éducation thérapeutique
• Elaboration d’outils personnalisés
• Aide à l’évaluation de l’organisation et de la
satisfaction des usagers.
Un suivi de l’équipe est ensuite possible.
CENTRES PILOTES EN COURS
• Service de transplantation du Pr. BARROU,
Hôpital Pitié Salpêtrière, AP-HP.
• Service de néphrologie, polyclinique bordeaux
Nord et 4 pavillons.
CONCLUSION
La consultation infirmière est une
réponse adaptée aux besoins de
prise en charge des patients atteints
de maladie chronique, qui est intégrée dans le plan national destiné à
améliorer la qualité de vie de ces
derniers.
La consultation infirmière est un
lieu privilégié d’éducation thérapeutique (dont la HAS vient d’éditer les
recommandations) dont la reconnaissance est prévue dans le cadre
des M.I.G.A.C., et qui est rendu obligatoire pour la certification des
établissements. Sa mise en place
nécessite d’être pensée en équipe
afin de la formaliser et de la structurer au mieux. Outre la motivation
des infirmières, elle nécessite le
soutien actif du côté médical et
administratif, c’est pourquoi le projet
doit être écrit en coopération avec
les médecins et les administratifs en
s’appuyant sur les textes législatifs
existants.
A l’heure des réformes budgétaires hospitalières contraignantes,
la consultation infirmière peut être
perçue comme une politique d’attractivité du patient due à la plus
value certaine qu’elle apporte pour
le malade.
A l’aube d’un profond bouleversement pour notre profession, la consultation infirmière est aux croisements
des attentes de tous les acteurs du
système de santé : les malades, les
soignants non médicaux et médicaux
et les institutions. Préparons nous à
relever ce défi.
BIBLIOGRAPHIE
1. La tarification à l’activité d’après www.wikipedia.org
2. Ministère de la santé et des Solidarités, «Plan pour l’amélioration de la
qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques 2007-2011»,
avril 2007.
3. Selon des statistiques américaines «Insuffisance rénale, une augmentation de 60% attendue pour 2020», 40ème Congrès de l’American Society of
Nephrology, San Francisco, APM du 05/11/2007.
4. Benain JP, Faller B, Briat C, et al. «Coût de la prise en charge de la dialyse
en France», Néphrologie & Thérapeutique 2007 ; 3 : 96-106.
5. D'après «La greffe, un don pour une vie», Etablissement Français des
Greffes, octobre 2001.
6. Cogny-Van-Weydevelt F., Ngohou C., Bacquaert-Dufour K., Riberi P., «Insuffisance
rénale terminale : analyse et comparatif des coûts et qualité de vie des traitements par
hémodialyse et transplantation», Gestion hospitalière, 1995 ; 701-706.
7. Recherches en soins infirmiers régionale et multicentrique, annexée au document de
synthèse des travaux, novembre 2005 - du groupe 4 «Coordination et qualité de la prise en
charge», dans le cadre du Plan National pour l’amélioration de la qualité de vie des
personnes atteintes de maladies chroniques. Christelle Joffroy-Rudzky, avec l’équipe de
Néphrologie pédiatrique, Hôpital des Enfants, Jean-François Zimmermann, Simone Delon,
Catherine Arnaud, Stéphane Decramer, CHU de Toulouse, et les équipes médicales et paramédicales d’Armand Trousseau, de Necker Enfants Malades et de Robert Debré, AP-HP,
Paris, «Bénéfices escomptés d’une consultation infirmière sur la compliance thérapeutique
de l’adolescent transplanté rénal» ; 2003 et 2004.
Cahier scientifique AFIDTN
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FACTEURS PRÉDICTIFS DE L’OBSERVANCE
PRÉCOCE EN TRANSPLANTATION RÉNALE
CHEZ DES PATIENTS AYANT ACCÈS AU
LOGICIEL SITO (SYSTEME D'INFORMATION EN TRANSPLANTATION D'ORGANES)
Lionel COUZI, Néphrologue – Hôpital Pellegrin – Bordeaux
LA NON-OBSERVANCE EN
TRANSPLANTATION
La non-observance (ou la non-adhérence)
est définie par l'OMS de la façon suivante : il
s'agit de la mesure du comportement du
patient (prise de médicaments, suivi d'un
régime, changement de mode de vie)
correspondant aux recommandations de santé
fournies par son centre de soin, recommandations préalablement acceptées par celui-ci1.
Plusieurs stratégies sont utilisées dans la
littérature pour évaluer la non-observance chez
les patients : l'interview directe, l'interview d'un
proche, le questionnaire donné au patient, le
comptage des blisters utilisés, le pilulier électronique ou le dosage urinaire ou sanguin du
médicament2. Toutes ces méthodes pouvant
être prises en défaut, aucune ne peut donc être
considérée comme infaillible3.
L'idéal serait donc de cumuler plusieurs
méthodes et de les recouper mais l'outil le
plus communément utilisé reste quand
même le questionnaire du patient bien que
fondé sur de seules déclarations car il a
l'avantage d'être simple et peu coûteux4.
La non-observance s'observe plus
fréquemment au cours des maladies chroniques et la transplantation n'échappe pas à
cette règle. Plusieurs facteurs de risque sont
identifiés en transplantation d'organes5. Ceux
liés au patient sont les suivants : les enfants et
les adolescents, le sexe féminin, la transplantation préemptive, le niveau d'éducation, le
niveau socio-économique, une pathologie
psychiatrique préexistante, une dépendance à
l'alcool ou à des drogues et un antécédent de
non-observance. Les facteurs de risque de nonobservance liés au traitement ne sont pas spécifiques à la transplantation : fréquence des
doses journalières, nombre de médicaments
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Cahier scientifique AFIDTN
pris, coûts des produits et importance des effets
secondaires. L'intensité du suivi mis en place par
l'équipe de transplantation après la greffe
semble elle aussi jouer un rôle important, ainsi
que l'éducation mise en œuvre par le centre
pour aider son patient dans sa transplantation.
Le problème de la non-observance constitue un problème majeur actuellement. En
effet, une méta-analyse récente montre que
22% (18%-26%) des patients recevant une
transplantation rénale sont non observants6.
Ce phénomène est donc commun dans les
cohortes de transplantés rénaux et ne parait
pas régresser. En effet, Hillbrands en 1995,
montrait qu'au cours de la première année de
greffe, le pourcentage de non-observance
était de 23% pour la ciclosporine, 13% pou
l'azathioprine, et 23% pour la prednisone7.
LA NON-OBSERVANCE A UN
IMPACT IMPORTANT SUR
LA SURVIE DU GREFFON
Ce phénomène reconnu a malheureusement pour conséquence de diminuer la survie
du greffon rénal. Dans une cohorte de 146
patients, 21.2% des non-observants ont
présenté un épisode de rejet aigu de greffe
tardif contre seulement 8% chez les patients
observants. Ces patients ne prenant pas leur
traitement ont donc dans cette série 3.2 fois
plus de risque de développer un rejet aigu tardif
et ont de façon logique une augmentation de
leur créatininémie au long cours supérieure à
celle des observants8. Le rejet aigu tardif est en
effet un facteur de mauvais pronostic. Des
lésions de néphropathie chronique d'allogreffe
surviennent chez 63% des patients qui ont
présenté un rejet aigu tardif contre 36% chez
les patients présentant un rejet aigu plus
précoce9 (Butler et al). Dans sa méta-analyse a
des résultats encore plus alarmants. Il trouve
que 36% des pertes de greffons sont reliées à
un antécédent de mauvaise observance et qu'il
y a 7 fois plus de risque de perte de greffon chez
les patients non-observants6.
L'amélioration de l'observance pourrait
ainsi avoir un meilleur impact sur la santé des
populations de patients atteint de pathologie
chronique, que l'amélioration de certains traitements spécifiques10.
LE SYSTÈME D'INFORMATION EN
TRANSPLANTATION D'ORGANE
Environ un quart des patients transplantés
rénaux sont donc non-observant, et ce
comportement est un facteur de risque majeur
de rejet aigu tardif qui conduit généralement à
la néphropathie chronique d'allogreffe et à la
perte du greffon. Il est donc indispensable d'intervenir sur cette population de patients pour
améliorer la survie des greffons.
Les raisons pour lesquelles un patient ne
prend pas son traitement sont connues : 30%
oublient, 16% ont d'autres priorités, 11%
refusent, 9% manquent d'information, 7%
évoquent des problèmes psychologiques et
27% ne fournissent aucune raison spécifique11. Une des façons d'aborder ce problème
pour les équipes de transplantation, est de
mettre l'accent sur l'éducation du patient, en
expliquant la transplantation, le traitement et
en mettant en évidence l'intérêt de celui-ci.
L'amélioration de l'observance par l'éducation reste discutée. Teixeira-de-barros et
col. concluent dans leur étude que l'augmentation des connaissances sur le traitement n'a
pas d'influence sur l'adhérence du patient12.
Cependant, certains programmes éducatifs
ont quand même abouti à des résultats
positifs13.
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C'est pour cette raison que le Laboratoire
Roche a développé le logiciel SITO (Système
d'Information en Transplantation d'Organe).
Cet outil informatique a pour vocation
d'aider les équipes de transplantation rénale
dans l’éducation thérapeutique des patients.
Il comporte 2 modules consacrés aux traitements, 1 module sur les complications et un
module généralités (ou module retour domicile). Cet outil a donc été proposé à plusieurs
services de transplantation, en complément
de l'éducation déjà délivrée dans chaque
centre. L'objectif était de permettre d'aider
les équipes à informer les patients sur leur
transplantation et surtout sur leur traitement.
Cet outil présente de plus l'avantage de délivrer un message complet et reproductible.
Enfin, il était supposé qu'au travers de ce
logiciel, soit améliorée la communication
entre l'équipe soignante et le patient, facteur
reconnu pour améliorer l'observance14.
JUSTIFICATION ET OBJECTIF
DE L'ÉTUDE
Les facteurs influençant la non observance du traitement ont été déjà étudiées
dans la population générale des transplantés
rénaux5. L'apport notamment d'un système
d'information tel que le logiciel SITO est
cependant susceptible d'améliorer l'observance du traitement même s'il n'a pas été
montré à ce jour de façon rigoureuse qu'un
tel outil pouvait avoir un impact positif dans
une population de transplantés rénaux et il
apparaît donc intéressant d'évaluer l'impact
d'un tel système d'information sur l'observance du traitement.
Nous avons donc réalisé une étude observationnelle afin de décrire en situation réelle
l'observance du traitement et de rechercher
les facteurs prédictifs d'observance chez des
patients transplantés rénaux de novo ayant
accès au logiciel SITO. L'objectif était de
décrire la réalité le plus fidèlement possible,
afin de ne pas perturber les comportements
habituels de prises médicamenteuses15.
L'étude s'adressait à des patients venant
de bénéficier d'une transplantation rénale
dans un centre de soins où le logiciel SITO
était disponible.
PATIENTS ET MÉTHODES
Une étude observationnelle nationale,
prospective, multicentrique (8 centres français), a été mise en place pour évaluer l'observance au traitement des patients transplantés
rénaux (évaluée grâce au questionnaire MAQ),
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en fonction de l’utilisation de ce logiciel SITO.
Le niveau de satisfaction des patients vis-à-vis
de ce logiciel a été aussi évalué. Les résultats
intermédiaires sur une partie des données à 3
mois (M3) sont présentés ici.
RÉSULTATS
Deux cent vingt cinq patients transplantés
rénaux ont été inclus à ce jour dans les
premiers jours post-greffe (300 devront être
inclus), les données à M3 étant disponibles
pour 198 d’entre eux.
L’âge moyen des patients à la greffe était
de 49.5 ± 13.1 ans avec un sex ratio (M/F) de
156/69. Il s’agissait d’une première transplantation pour 81.5% des patients. 72.9% des
patients recevaient du tacrolimus, 23.6% de
la ciclosporine, et 93.3% du mycophenolate
mofetil. A M3, la créatininémie était à 134.8
± 41.9 µml/l, l’incidence du rejet aigu à 7.1%.
Dans les 10 premiers jours de la greffe, 93.1%
des patients ont abordé au moins un module
du logiciel SITO. Sur cette période, 44.5%,
47%, 37% et 22.4% des patients ont
consulté entièrement, les deux modules traitement, le module complication et le module
retour domicile. D’une façon plus globale,
18.6% ont consulté entièrement le logiciel
SITO, c'est-à-dire les 4 modules. 94% des
patients ont déclaré être satisfait par le logiciel SITO et 95% l’ont considéré comme un
support éducatif d’information permettant
d’être largement informé.
A M3, 19.6% de patients étaient nonobservants. Les patients non-observants
présentaient plus d’effets secondaires
génants ou très génants que les patients
observants (p=0.02). L’analyse univariée puis
multivariée a mis en évidence que la prise
d’anxiolytique (OR = 3.02, p = 0.04) et la
consultation complète du logiciel SITO (OR=
16.8, p=0.01) étaient des facteurs prédictifs
d’observance précoce (M3) au traitement
immunosuppresseur.
CONCLUSION
Les données préliminaires de cette
étude ont démontré que le logiciel
SITO avait été abordé juste après la
greffe par plus de 90% des patients
avec un taux de satisfaction excellent.
La consultation complète de ce logiciel
juste après la greffe est associée à une
bonne observance précoce 3 mois
après la transplantation rénale.
BIBLIOGRAPHIE
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12. Teixeira-de-barros C, Cabrita j, Pena JR: A pharmacist point of view over complianceon kidney
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14. Misdrahi D, Llorca PM, Lancon C, Bayle FJ.
Compliance in schizophrenia: predictive factors, therapeutical considerations and research implications.
Encephale 2002; 28: 266-72.
15. Vray M, Szafir D, Jaillon P. et les participants à la table
ronde n°3 de Giens XVI. Pharmaco-épidémiologie :
identification des besoins, bases de données, critères de
qualité des études. Site internet. Disponible sur :
http://www.ateliersdegiens.org/upload/TR3G16.pdf.
Cahier scientifique AFIDTN
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ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE POUR
UNE MEILLEURE OBSERVANCE EN
TRANSPLANTATION RÉNALE
Caroline CANCIANI, Infirmière, Frank MARTINEZ, Néphrologue Service de transplantation rénale - Hôpital Necker - AP-HP – PARIS
Depuis maintenant quelques années,
l’éducation thérapeutique (ET) fait partie des
pratiques soignantes et médicales dans le
domaine des pathologies chroniques.
Cette démarche prend un tournant
majeur et officiel tant dans son organisation
que sa pratique. Ainsi en travaillant auprès
des patients transplantés rénaux, l’équipe du
service de transplantation rénale adulte du Pr
Legendre à l’hôpital Necker AP-AP à Paris
réfléchit sur comment optimiser la prise en
charge de ces patients.
L’ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE,
ENFIN UNE PLACE OFFICIELLE
Aujourd’hui l’éducation thérapeutique
devient une préoccupation commune pour les
différentes Autorités de Santé.
En effet, l’OMS la qualifie comme suit :
« L’éducation devrait rendre le patient capable
d’acquérir et maintenir les ressources nécessaires pour gérer de façon optimale sa vie avec
la maladie », « le processus vise à aider le patient
et ses proches à comprendre la maladie et le
traitement, coopérer avec les soignants, vivre le
plus sainement possible et maintenir ou
améliorer la qualité de vie ».
L’HAS (Haute Autorité de la Santé) donne
des recommandations très précises sur
comment élaborer et structurer un programme
d’éducation thérapeutique dans le champ des
maladies chroniques1.
Et enfin l’ET s’inscrit dans les nouvelles directives de la loi « Hôpital, Patients, Santé, Territoire
» affirmant l’enjeu national de santé publique.
Il est important également de rappeler
que dans l’exercice de la profession infirmière,
elle relève de notre décret de compétence du
29 juillet 2004, article 5 : « Dans le cadre de
son rôle propre, l’infirmier accomplit les actes
ou dispense les soins suivants visant à identifier les risques et à assurer le confort et la
20
Cahier scientifique AFIDTN
sécurité de la personne et de son environnement et comprenant son information et celle
de son entourage ».
De ce même décret relatif aux parties IV ET V
(dispositions règlementaires) du code de la santé
publique : Exercice de la profession d’Infirmier «
l’exercice de la profession d’infirmier ou infirmière comporte l’analyse, l’organisation, la réalisation de soins infirmiers et leur évaluation, la
contribution au recueil de données cliniques et
épidémiologiques et la participation à des
actions de prévention, de dépistage, de formation et d’éducation à la santé ».
UNE DÉMARCHE ÉDUCATIVE, UNE
NOUVELLE APPROCHE DU SOIN
Dans notre pratique soignante quotidienne,
nous avons tous à notre manière de prés ou de
loin participé à l’éducation du patient et particulièrement auprès des patients atteints de pathologie chroniques. Notre profession évolue et ne
cesse d’évoluer, il nous faut trouver une harmonie
entre notre savoir être et notre savoir faire.
En effet, en cherchant à approfondir cette
dimension relationnelle et éducative cela peut
remettre en question parfois notre enseignement. Accompagner le patient dans une
démarche éducative, où il devient le principal
acteur de sa santé répond sans aucun doute à
des valeurs soignantes profondes.
LE PROJET D’UNE CONSULTATION
INFIRMIÈRE D’ACCOMPAGNEMENT
ET D’AIDE À L’OBSERVANCE
THÉRAPEUTIQUE :
De cette réalité, une vraie réflexion est née.
Il s’agit d’agir pour essayer d’améliorer la santé
et la qualité de vie des patients transplantés
rénaux.
Partager notre savoir, éduquer pour l’autonomie, la gestion du quotidien, la prévention
des complications. Et aussi par notre écoute
active, la prise en compte globale du patient
avec ses attentes, ses priorités, et ses besoins,
mais également par le transfert d’expertise l’action devient possible pour le patient.
Il s’approprie les objectifs de son traitement,
il choisit d’agir, il prend les commandes de sa
santé avec l’attention des soignants.
Afin d’offrir un accompagnement de qualité,
nous tentons de mettre en place une consultation infirmière dont l’objectif principal est d’optimiser la prise en charge des patients transplantés
rénaux et plus spécifiquement d’améliorer l’observance thérapeutique, car nous savons par
certaines études qu’en transplantation rénale la
non-observance est retrouvée chez 22% des
adultes et à 40 à 60% des enfants et adolescents
et que 36% des pertes de greffon sont liées à
une mauvaise observance2.
Mais aussi de rendre le patient autonome
dans la prise en charge de son traitement et
dans la maitrise des effets secondaires.
Cette consultation permettra de mieux
connaître l’environnement socio familial
(soutien et/ou difficultés) du patient, éléments
utiles et nécessaires pour un meilleur suivi.
Enfin, de s’assurer de la compliance du
patient aux consultations médicales et suivi
biologique et donc de réduire le nombre de
patients « perdus de vus ».
LA CONSULTATION INFIRMIÈRE,
UNE ORGANISATION, UN
PROGRAMME , UNE ÉQUIPE
Un poste infirmier détaché 5 jours par
semaine assure les consultations individuelles
avec un système de rendez- vous programmés.
Des box de consultations sont prévus pour recevoir les patients. Les entretiens durent en
moyenne 45 minutes.
Notre projet d’éducation thérapeutique se
déroulera en plusieurs étapes.
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La première consiste à élaborer le
diagnostique éducatif du patient, elle est
organisée en parallèle de la première
consultation médicale post hospitalisation.
Puis dans un second temps une consultation éducative dont l’objectif est d’évaluer les connaissances et les acquisitions du
patient sur la greffe rénale.
Le but est d’évaluer les objectifs sécuritaires. En fonction des objectifs atteints ou
non par le patient, il sera proposé des
consultations de suivis (objectifs plus spécifiques) ou des consultations de reprises
éducatives.
Il semble important d’accompagner le
patient lors de survenue ou évolution d’une
complication ou évènement de vie.
Ce travail ne repose pas sur une seule
personne. En effet en fédérant nos compétences, nous permettons aux patients de
devenir acteur de sa santé.
Il s’agit d’un travail en collaboration
avec différents acteurs pour une meilleure
coordination, orientation, et prise en
charge du patient. Le projet est suivi et
soutenu par un médecin référent.
L’ensemble de l’équipe, médecins, infirmiers, cadre de soins, aides soignants,
hôpital de jour, diététicienne, assistante
sociale doit être impliqués.
UN PROJET D’AVENIR EN
PERPÉTUELLE ÉVOLUTION
Notre projet est le fruit d’une réflexion
d’une année, il continue d’évoluer. Une
évaluation de notre travail sera prévue ainsi
que la satisfaction des patients de bénéficier de cette consultation.
La mise en place d’un tel projet
demande une réelle motivation des
équipes.
Ainsi, il est nécessaire de se former et
de développer de nouvelles compétences, d’enrichir ses expériences, d’approfondir notre réflexion sur notre relation soignant-soigné toujours dans une
perspective d’évolution et de recherche.
BIBLIOGRAPHIE
1. Recommandations 2007 HAS
2. Transplantation 2004, 77 ; 769776.70 ;711-716 Butier J. A, Bunzel B.
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ÉDUCATION
THÉRAPEUTIQUE EN
TRANSPLANTATION
RÉNALE
Marie Pierre DECOOL, Infirmière –
Service de Transplantation rénale – CHRU - Lille
La définition de l’éducation thérapeutique du Patient selon l’Organisation Mondiale de la Santé
(OMS) 1996 : « L’éducation thérapeutique du patient vise à aider les patients à acquérir ou
maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une
maladie chronique ».
LES CANDIDATS À LA GREFFE RÉNALE
Le patient candidat à la greffe est adressé par le néphrologue qui le prend en charge, dans la région.
L’équipe médicale, en collaboration avec l’équipe soignante, veille à ce que le patient soit adressé en
consultation dans le centre de transplantation avec les examens nécessaires. Pour certains patients, des
examens spécifiques pourront être réalisés au CHRU (exemple : diabétiques, poly vasculaires…). Ces différents examens sont indispensables à l’évaluation des candidats pour la greffe. C’est l’infirmière référente
du centre de néphrologie, qui veille à envoyer un dossier complet.
Chaque patient sera reçu par un néphrologue transplanteur. Cette consultation individuelle dure en
moyenne 45 minutes. La présence d’un accompagnant familial proche est vivement souhaitée.
L’inscription sur liste de transplantation ne sera effective qu’après avis favorable du néphrologue, mais
également du chirurgien et de l’anesthésiste, que le patient rencontrera lors d’une consultation ultérieure.
LA CONSULTATION INFIRMIÈRE PRÉ TRANSPLANTATION
Il est parfois demandé une consultation infirmière avant une éventuelle inscription sur liste, pour
les personnes en difficultés biopsychosociales et culturelles (barrière linguistique, problème d’observance thérapeutique…
Lors de cette consultation infirmière la présence d’un référent familial est nécessaire.
Le nombre de consultation peut varier de 3 à 6, selon les difficultés rencontrées.
Cette consultation infirmière est actuellement réalisée par l’infirmière d’éducation du réseau
NEPHRONOR, en collaboration avec l’infirmière référente de suivi de greffe. La collaboration d’autres
membres de l’équipe peut être demandée (infirmières d’hôpital de Jour, psychologue, assistante sociale…)
A l’issu de ces consultations, un rapport est adressé au néphrologue transplanteur qui en avait fait la
demande, au néphrologue référent, et parfois au patient. Ce dernier figure dans le dossier du patient.
L’ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE DU PATIENT PENDANT L’HOSPITALISATION
Au moment de la greffe, le patient est hospitalisé pendant une période variable de 10 à 15 jours
postopératoire, parfois plus longtemps. Cette période d’hospitalisation correspond au début de
l’éducation thérapeutique post-greffe. Celle-ci est principalement centrée sur la prise des médicaments immunosuppresseurs : nom, dose, mode d’administration… Il est impératif que le patient ou
l’aidant familial impliqué avant la greffe, sache préparer correctement le traitement immunosuppresseurs. Les consignes de sortie sont données au patient (conduite à tenir en cas de problème de prise
de médicaments, fièvre …), le déroulement de la consultation en hôpital de jour…
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L’EDUCATION THÉRAPEUTIQUE DU PATIENT EN HÔPITAL DE JOUR
Le suivi en hôpital de jour s’effectue de façon rapprochée pendant les 6 à 12 premiers mois.
Le patient vient en consultation 2 fois par semaine, puis 1 fois par semaine, puis tous les 10 jours. Les consultations seront espacées en fonction de l’état de santé du greffé, de ses résultats biologiques.
Le programme d’éducation sera mis en place :
• Le travail sur les médicaments,
• Le retour à domicile : différentes conduites à tenir en fonction des difficultés rencontrées,
• Le classeur de suivi : un classeur est remis à chaque patient lui permettant de noter ses résultats de biologie, d’avoir ses différents comptesrendus. Ce dossier est un lien avec les différents professionnels de santé. Le greffé va s’approprier progressivement ce classeur et utiliser les
fiches thérapeutiques et biologiques qu’il contient.
Ce programme d’éducation est mis en place à l’aide d’ateliers collectifs ou de consultations individuelles, réalisés par les infirmières
d’hôpital de jour.
L’éducation thérapeutique du patient porte sur les immunosuppresseurs.
Le patient sera capable de donner les noms, les doses, les différents modes et heures de prise de ses différents médicaments.
•
•
•
•
Des points importants sont abordés avec le patient :
Les interactions médicamenteuses, interaction avec tous les aliments à base de pamplemousse,
Préciser à l’équipe de néphrologie toute prise médicamenteuse, et demander l’avis du néphrologue pour la prise d’un nouveau traitement,
Les effets indésirables et la manière d’y pallier si nécessaire,
Le traitement est à prendre à vie du greffon.
Les outils utilisés sont le pilulier, les fiches thérapeutiques, un logiciel d’information du patient greffé.
L’éducation thérapeutique porte sur la diététique.
Chaque patient transplanté est vu par la diététicienne.
•
•
•
•
•
Les règles essentielles sont répétées par les infirmières d’hôpital de jour :
Limiter l’apport de sel de table et privilégier les aliments à teneur réduite en sel,
Limiter la consommation de sucres rapides surtout si le traitement est à base de corticoïdes,
Limiter les graisses saturées,
Le plus souvent l’apport en potassium est libre,
L’apport hydrique est libre.
Les outils utilisés sont les fiches diététiques et les entretiens individuels.
La vie au quotidien avec le nouveau rein :
• L’importance d’une bonne hygiène corporelle et dentaire : Les consignes de surveillance sont expliquées, ainsi que les précautions pour
tout soin dentaire (antibioprophylaxie),
• L’exposition solaire : les précautions à effectuer (crème solaire indice 50 à appliquer très régulièrement), le suivi annuel chez le dermatologue (en raison de l’apparition de cancers sous traitement immunosuppresseur),
• Le travail : Un arrêt de travail est préconisé pendant environ 3 mois, selon l’activité professionnelle. Il est important de favoriser la reprise
de l’activité professionnelle,
• Les activités de loisirs : Des conseils sont prodigués pour la pratique d’une activité sportive et pour un départ en vacances,
• Les vaccinations : Les vaccins vivants atténués sont proscrits (exemple : fièvre jaune),
• La contraception : Un traitement contraceptif adapté doit être prescrit si nécessaire. Le suivi régulier doit être organisé : consultation gynécologique, frottis, mammographie.
Une grossesse peut être envisagée avec le couple sur certaines conditions, en accord avec l’équipe de néphrologie. Il est parfois nécessaire
de faire des modifications thérapeutiques des immunosuppresseurs.
Après 6 mois à 1 an de greffe, le suivi peut être effectué par l’équipe de néphrologie initiale. Le patient viendra en consultation au moins une
fois par an au CHRU (centre de transplantation).
L’éducation thérapeutique du patient transplanté nécessite un dialogue avec les patients et leur famille, les équipes de néphrologie. Elle s’effectue tout au long de la vie du transplanté.
Le patient est au centre du suivi, c’est lui qui assure l’interface entre les professionnels de santé et devient autonome et acteur de sa santé.
L’éducation du patient transplanté nécessite une réorganisation de l’unité d’hôpital de jour. Actuellement, l’équipe réfléchit à l’amélioration
du classeur de suivi patient, la réorganisation des ateliers collectifs et à la mise en place d’une consultation infirmière post greffe.
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TRANSPLANTÉ RÉNAL
ÉQUIPE SOIGNANTE, VERS
UNE ÉDUCATION OPTIMISÉE
Nathalie BOEHLER, Infirmière pré-greffe, Bégonia DEL HUERTO, Infirmière - service d’hospitalisation
secteur greffe, Régine DEMIZIEUX, Infirmière - service de suivi post-greffe, Sophie CAILLARD, Praticien
Hospitalier, Dominique SCHMITT, Cadre de Santé - Service de Néphrologie – CHRU - Strasbourg
NOTRE SERVICE DE TRANSPLANTATION ET
L’ORIGINE DE NOTRE TRAVAIL
Notre objectif prioritaire au retour du transplanté dans notre
service, est l’éducation.
Dés que son état physique et psychique le permet, nous le
guidons vers l’autonomie pour la prise en charge du traitement
médicamenteux.
L’infirmière responsable de l’éducation met à sa disposition
une panière comportant :
• sa fiche de traitement actualisée avec les
horaires de prise des médicaments
• des sachets avec les comprimés nécessaires à
la préparation
• un pilulier.
En tenant compte des capacités, des acquis
du patient, elle détaille avec lui chaque médicament en expliquant leur rôle, leur modalité de
prise, leurs effets secondaires. Le patient prépare
lui-même sa plaquette pour la journée et avant
chaque prise, la préparation, le respect des
horaires de prise du traitement et le respect des
consignes données sont vérifiés.
Les infirmières du suivi post-greffe vont rencontrer le patient
avant sa sortie. Lors de ce premier contact, elles lui présentent
l’organisation mise en place pour le suivi post-greffe. Elles effectuent avec lui une visite des locaux, le présentent à l’équipe et lui
donnent des informations pratiques telles que la périodicité et
les modalités des bilans sanguins et des consultations, les coordonnées téléphoniques des différents services… Dans un
premier temps, le patient est revu en consultation deux fois par
semaine pendant au minimum un mois. Ensuite, les visites
s’espacent progressivement. Suivant le lieu d’habitation, un suivi
en alternance dans les centres périphériques peut être proposé
au patient.
L’objectif prioritaire au retour du
transplanté est l’éducation. Dés
que son état physique et psychique
le permet, il est guidé vers l’autonomie pour la prise en charge du
traitement médicamenteux.
L’infirmière complète son éducation par des
recommandations sur la transplantation, l’immunosuppression, l’hygiène de vie et les conduites à tenir.
Dans un deuxième temps, le logiciel informatique SITO créé
par le laboratoire Roche est installé au patient. Nous restons à sa
disposition pour toutes ses questions, ses doutes et ses interrogations.
La sortie du patient est conditionnée par :
• La récupération de la fonction rénale
• Son autonomie par rapport au traitement médicamenteux
• L’activité du service du moment.
ÉDUCATION DU TRANSPLANTÉ RÉNAL :
PROBLÉMATIQUES ET RÉFLEXIONS
Depuis janvier 2004, date de la fusion des listes d’attente
de greffe rénale à Strasbourg, le nombre de transplantés
rénaux suivis dans notre service a triplé. Nous gérons une
population de patients plus importante, plus variée, et nous
devons faire face à une moyenne actuelle d’environ 100
nouveaux greffés par an.
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Malgré tous les moyens déjà mis en place, nous
sommes confrontés à de nombreuses difficultés lors des
éducations thérapeutiques et du suivi post-transplantation. Ces dernières engendrent insatisfaction, dysfonctionnement, perte de temps et d’énergie pour l’équipe
médicale et paramédicale. Tout à fait conscientes de la
relation entre compliance et survie du greffon, nous
avons à cœur chacune dans notre activité d’améliorer
notre pratique quotidienne afin de donner à nos patients
une éducation personnalisée et optimisée. Nous avons
donc décidé de nous concerter pour : cibler, analyser et
comprendre l’origine des problèmes rencontrés, rechercher sur quels éléments nous pouvons agir et dans
quelles limites. Notre réflexion s’est faite sans oublier les
fondements éthiques de la greffe :
• Accessibilité à la greffe pour tous
• Engagement moral du receveur et de l’équipe vis-à-vis
du donneur et de sa famille.
• L’âge
Dans notre panel de 277 patients étudiés, l’âge au moment de la
greffe varie entre 18 et 75 ans. La figure suivante indique la répartition
par catégorie d’ âge.
Figure 1 : Age des 277 patients au jour de la transplantation
De plus, nous tenons à préciser que cette analyse est
subjective : elle correspond à notre ressenti d’infirmière
et notre vécu au sein du service.
Nous nous sommes intéressées à la cohorte des 277
patients greffés et suivis dans notre service entre le 01
janvier 2005 et le 10 avril 2008. Dans un premier temps,
nous avons recherché les greffés pour qui l’éducation
avait été difficile. Une liste de 64 patients a été établie, ce
qui représente 23 % de la population étudiée. Puis, pour
chacun d’entre eux, nous avons recherché ce qui pouvait
être à l’origine des difficultés d’apprentissage. Nous
avons recensé différents facteurs que nous avons classés
en 3 catégories avant de les analyser :
Recherche des facteurs prédominants
Des facteurs liés au patient lui même
et à son environnement
• La langue d’origine
Pour les 277 patients étudiés, 13,7 % sont de nationalités étrangères. Certains ne parlent pas ou très peu le
français. De ce fait, la communication est restreinte,
l’éducation devient plus difficile. Malgré le recours à un
interprète ou à la famille pour traduire les informations
et la mise à disposition de supports adaptés (carton de
médicaments personnalisé avec les photos des médicaments), nous n’avons malheureusement pas la certitude
que le message que nous voulons faire passer soit bien
compris et surtout traduit fidèlement.
Nous avons de plus constaté que les familles s’engagent facilement et participent activement au début de la
greffe. Cependant, elles n’ont pas forcément à l’esprit qu’il
s’agit d’un investissement au long cours et se montrent
souvent moins présentes par la suite pour des raisons
personnelles, familiales ou professionnelles… Quant au
patient, secondé par un traducteur ou sa famille depuis le
début de sa greffe, il ne fait pas suffisamment d’efforts
pour progresser dans la compréhension de la langue.
Lorsqu’il n’est plus accompagné, il se trouve désemparé.
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Nous avons relevé que l’âge aux deux extrêmes (jeunes ou au
contraire plus âgés) pouvait engendrer difficultés au moment de l’éducation :
Les sujets jeunes, selon leur milieu social et leur maturité, n’ont pas
toujours conscience des exigences et de l’enjeu de la greffe. Certains
ont beaucoup de difficultés à se prendre réellement en charge. Par
exemple, ils ne viennent pas régulièrement en consultation, échelonnent à leur guise les bilans sanguins post-greffe…
Les sujets plus âgés ont parfois des capacités d’adaptation moindres. Ils nécessitent une prise en charge plus soutenue et une attention
particulière. Nous avons retrouvé chez un grand nombre d’entre eux,
une asthénie postopératoire importante qui engendre une récupération physique lente et difficile.
LE MILIEU SOCIO-ÉCONOMIQUE ET CULTUREL
Nous rencontrons des patients d’origines et de cultures diverses, de
milieux sociaux différents. Cette population variée implique lors des
éducations une adaptation permanente. Nous avons constaté que la
majorité des problèmes étaient liés à un milieu social « défavorisé » ou
déstructuré.
LE NIVEAU DE COMPRÉHENSION ET LES FACULTÉS
INTELLECTUELLES PROPRES AU PATIENT.
Nous avons observé deux cas de figure :
Certains patients qui ont une capacité intellectuelle plus limitée ont
besoin de plus de temps pour intégrer les informations données et
demandent une attention beaucoup plus soutenue.
Inversement, nous avons rencontré des patients qui malgré un
potentiel intellectuel plus important se sont trouvés démunis hors de
leur contexte habituel et ont eu du mal à s’adapter à cette nouvelle
situation.
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LE PROFIL PSYCHOLOGIQUE DU PATIENT
L’histoire personnelle du patient, son manque de confiance
en lui, sa manière d’être, ses antécédents de vie, la chronicité de
la maladie rénale, ses autres antécédents médicaux peuvent le
fragiliser et de ce fait rendre sa perception ainsi que la compréhension des enjeux de la greffe plus difficile.
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Répartition de la population en fonction de ces différents facteurs
La figure 2 analyse l’origine des difficultés rencontrées par les
64 patients. A l’examen de ce graphique, on constate que le facteur
« compréhension » est déterminant pour 50 % d’entre eux.
Figure 2 : Origines des Difficultés pour les 64 patients étudiés
Des facteurs inhérents au vécu
de l’hospitalisation par le patient
• La perception de l’hospitalisation :
Différents paramètres nous semblent importants à relever :
• L’hospitalisation peut engendrer une diminution ou une perte
de repères et perturber les moyens intellectuels.
• Le vocabulaire médical de la transplantation peut déstabiliser
les patients non initiés.
• Quand la reprise du greffon se fait de façon différée ou tardive,
ou lors de complications, l’hyper médicalisation amène un état
de stress et d’anxiété pour le patient. Ses facultés d’adaptation
et de compréhension sont altérées et diffèrent son assimilation.
L’éducation dans ce cas de figure, n’est pas une priorité pour
l’équipe du fait de l’incertitude qui règne autour de la greffe.
Nous avons alors tendance à suppléer le patient notamment
pour la préparation des médicaments.
• Lors de l’hospitalisation, les patients sont guidés progressivement vers l’autonomie ce qui peut engendrer chez certains :
stress, angoisse, peur de l’avenir…
• La configuration de notre activité greffe amène nos patients à
rencontrer deux équipes et deux services différents lors de leur
éducation. Ils doivent, eux aussi, faire preuve d’adaptation, ce
qui peut engendrer des difficultés supplémentaires.
Certains des 64 patients cumulent plusieurs difficultés comme l’indique la figure 3 : Plus de 59 % cumulent au moins deux facteurs.
Figure 3 : Nombre de facteurs cumulés par les 64 patients
• Les contraintes hospitalières
Le turn-over généré par les nouvelles contraintes hospitalières (notion de rentabilité avec la tarification à l’acte (T2A), plan
de retour à l’équilibre budgétaire avec pression de la direction)
limite la durée du séjour des patients. Nous sommes contraints à
éduquer plus rapidement les nouveaux greffés. L’équipe
soignante est insatisfaite et déplore cette situation. A distance
de la greffe, certains patients limités dans la compréhension ont
tout de même réussi à s’adapter, à gérer eux même leur traitement et leur suivi. Ce qui prouve que la notion de temps reste un
facteur déterminant dans l’apprentissage.
Des facteurs liés aux effets indésirables des traitements
immunosuppresseurs et corticoïdes.
Plusieurs patients ont subi une décompensation psychique à
l’introduction des corticoïdes à fortes doses, rendant la communication et l’éducation difficile voir impossible dans un premier
temps.
Certains effets secondaires des traitements immunosuppresseurs comme l’apparition d’un diabète amènent le patient à faire
un double apprentissage occasionnant un stress supplémentaire.
D’autres facteurs tels que diarrhées, infections…. fatiguent
le nouveau greffé et le rendent moins réceptif.
CONSULTATION DU DOSSIER PRÉ GREFFE
Notre objectif a été de voir si nous retrouvions une corrélation entre
les problèmes rencontrés lors des éducations, l’histoire antérieure du
patient, et sa gestion de la maladie chronique. Nous avons procédé en
deux temps :
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Lecture et analyse du compte rendu de
la consultation psychiatrique pré greffe.
Pour les 64 patients concer nés, nous avons
retrouvé et consulté 50 comptes-rendus de la consultation psychiatrique. Dans trois autres cas, nous
n’avons retrouvé que des lettres de médecins (chirurgien ou néphrologue) mentionnant des difficultés,
voire une non-observance du traitement en dialyse.
Deux autres patients enfin sont suivis régulièrement en
psychiatrie.
Pour les 50 comptes-rendus psychiatriques étudiés,
nous avons constaté que les problèmes évoqués lors de
cette consultation persistaient en post-greffe dans la
grande majorité des cas comme le montre la figure 4.
(Conflits familiaux, familles déstructurées, angoisse,
anxiété, peur par rapport à la greffe…)
Figure 4 : Concordance entre les éléments du compte-rendu
de la consultation psychiatrique et le vécu post-greffe
Toujours sur les 50 comptes-rendus de la consultation psychiatrique étudiés, la figure 5 répertorie le nombre de cas où
un soutien psychothérapique a été demandé par le patient lui-même, le nombre de cas où le médecin a proposé un tel
soutien à l’issu de l’entretien, et celui où le patient était déjà suivi par un psychiatre
Figure 5 : Résultats de la consultation psychiatrique (pour 50 comptes-rendus)
Nous avons cherché à savoir si le soutien psychothérapique demandé par le patient ou proposé par le psychiatre avait
été réellement effectué. Malheureusement, nous n’avons eu que deux réponses et il semble que les patients n’ont pas bénéficié du suivi demandé ou préconisé.
Rencontre avec une des psychiatres du service
Nous avons tenu à rencontrer une des psychiatres attachées à notre service pour savoir comment était orientée la
consultation psychiatrique. Elle se déroule sur un mode semi directif et aborde différents items tel que la transplantation, le
mode de vie, la maladie rénale. Elle explore entre autres :
• Les troubles de la personnalité
• Les motivations
• Les craintes
• La représentation par rapport à la greffe
• L’évaluation des risques de dépression post-greffe
• L’évaluation de l’aptitude à l’autonomie après la transplantation
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Concertation avec les équipes qui prenaient en charge le patient avant sa greffe.
Dans la majorité des cas étudiés, nous avons pu faire une corrélation entre ce que nous vivions avec le patient au moment de la
greffe et ce que vivaient les équipes qui le prenaient en charge en hémodialyse ou en dialyse péritonéale. Les mêmes problèmes
étaient évoqués : difficultés d’apprentissage, non compliance au traitement, difficultés de compréhension, barrière de la langue…
Figure 6 : Analyse comparative du vécu des équipes de dialyse et de post-greffe
Nous avons voulu vérifier, avec l’aide d’un médecin de notre service, si les constatations précédentes avaient un impact sur le
bon fonctionnement et la survie du greffon.
IMPACT DES DIFFICULTÉS D’ÉDUCATION SUR LA FONCTION DU GREFFON
Avec tous ces éléments, nous nous sommes concertées pour mettre au point des moyens d’actions visant à améliorer les situations. La plupart des facteurs sont inhérents au patient et à son mode de vie. Il nous semble donc très important d’avoir une
meilleure connaissance du patient en pré-greffe afin de pouvoir anticiper les difficultés.
PROPOSITIONS D’ACTIONS POUR UNE ÉDUCATION OPTIMISÉE
Nous ne pourrons évidement pas agir sur un certain nombre de facteurs comme l’âge, le niveau de compréhension, les
facultés intellectuelles ou le milieu culturel, mais pour tout le reste nous avons à cœur de préparer au mieux nos patients à la
transplantation.
Dans les centres périphériques
• Mise en place d’une feuille de transmissions pré-greffe
A ce jour, les centres périphériques nous adressent les patients à la fin du bilan pré-greffe juste avant l’inscription sur liste d’attente. C’est donc tardivement que nous avons un premier contact avec les patients et que nous prenons connaissance de leurs
éventuelles difficultés.
Les premiers maillons de la chaîne sont les équipes médicales et paramédicales des centres périphériques. Elles ont en effet des
contacts réguliers, privilégiés, avec les dialysés et connaissent en général bien leur mode de vie. Par leur intermédiaire, nous
souhaiterions avoir des renseignements sur les patients au cours du bilan pré-greffe. Nous proposons de mettre en place une
feuille de transmissions pré-greffe qui nous permettra de dépister précocement les facteurs pouvant être un frein à l’éducation.
Cette dernière nous permettrait :
• De mieux connaître le patient
• De cibler précocement certaines difficultés
• D’agir en amont de la greffe afin de mieux le préparer et d’optimiser son éducation
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Lors de nos réunions pré-greffe trimestrielles, les médecins des centres périphériques rapporteront cette feuille de transmissions pré-greffe préalablement remplie par les équipes soignantes. L’équipe pluridisciplinaire réfléchira et proposera les actions à
mettre en place :
• cours d’alphabétisation pour le patient ne maîtrisant pas correctement la langue française afin de favoriser la communication, de l’inciter à devenir un partenaire de soins et de le guider vers l’autonomie. Une meilleure compréhension de la langue
française lui permettra peut-être de mieux canaliser le stress.
• Rencontre avec la famille pour les patients nécessitant l’aide d’une tierce personne. L’objectif étant de leur donner un
maximum d’informations sur la transplantation et le suivi post-transplantation. D’autre part, il nous paraît important de les sensibiliser au fait qu’un investissement sera parfois nécessaire sur une longue période.
• Proposition d’un entretien avec une assistante sociale pour régler les problèmes financiers, sociaux, et si nécessaires proposer
un éventuel reclassement professionnel pour permettre au patient d’envisager sa greffe le plus sereinement possible.
• Pour concrétiser ce projet, nous envisageons d’aller à la rencontre des équipes médicales et paramédicales des centres périphériques afin de leur présenter notre travail. Nous aimerions les sensibiliser à l’importance de nous faire parvenir les informations spécifiques recueillies par la feuille de transmission pré-greffe et à la réactualiser régulièrement en fonction de l’évolution de
la situation du patient.
• Remise du guide du transplanté rénal avant la consultation pré-greffe
Un guide a été rédigé pour donner les modalités générales et pratiques des différentes étapes de la transplantation au sein de
notre service.
Actuellement, le patient rencontre le même jour en consultation pré-greffe le médecin et l’infirmière qui lui donnent de
nombreuses informations sur la greffe et lui remettent le guide du transplanté. Beaucoup d’éléments sont à assimiler rapidement
et les interrogations surviennent souvent dans un deuxième temps. Il serait préférable que le patient ait déjà lu le guide du
transplanté avant la consultation pré-greffe, peut-être même avant de débuter le bilan. Le patient pourra y réfléchir tranquillement et poser toutes les questions lors de la consultation médicale ou infirmière. Le but de cette action étant de permettre une
prise de conscience et une réflexion face aux enjeux majeurs de la greffe.
De plus, l’infirmière pré-greffe pourra évaluer le cheminement du patient, sa compréhension des informations données dans
le guide et sa motivation par rapport à la greffe.
• Programmation de la consultation psychiatrique
La consultation psychiatrique se fait parfois à la fin du bilan pré-greffe, il nous parait souhaitable de la programmer dès le
début du bilan. Nous avons l’impression que les problèmes psychologiques, mis en évidence et non gérés par le patient, ont une
répercussion sur sa disponibilité au moment de l’éducation. Les personnes nécessitant un suivi psychologique devraient le
débuter avant l’inscription sur la liste d’attente afin de se « libérer » et de faciliter sa propre prise en charge.
Propositions internes au service
• Consultation pré greffe médicale et infirmière
Le médecin et l’infirmière de pré greffe insisteront sur l’importance, les enjeux et le suivi de la greffe. Il est primordial que les
patients comprennent que la greffe ne se limite pas à l’acte chirurgical mais demande de leur part de nouveaux apprentissages et
un investissement au long cours. La coopération soigné-soignant est fondamentale pour mener à bien un projet commun.
• Pendant l’hospitalisation (en postopératoire)
Au vu des nouvelles dispositions en matière de contraintes hospitalières et des moyens alloués, une nouvelle réflexion s’impose.
Nous espérons que très prochainement la consultation infirmière en matière d’éducation thérapeutique sera reconnue et
validée par la T2a.
Dans l’immédiat, il nous paraît important qu’au sein de notre service, l’équipe médicale et paramédicale relise ensemble les
recommandations en matière d’éducation thérapeutique formulée par la Haute Autorité de Santé. Cette collaboration permettrait d’élaborer un projet commun d’éducation thérapeutique afin de la reconnaître comme un soin à part entière, et ainsi tendre
vers une éducation adaptée, optimisée pour chaque patient malgré le turn-over du service.
A ce jour, dans le profil de poste de l’infirmière chargée des éducations, il est mentionné qu’à partir de 10 heures du matin elle
doit se consacrer à l’éducation des nouveaux greffés. Néanmoins, la charge de travail actuelle dans le service impose sa participation aux soins au delà des horaires prévus. C’est pourquoi, nous aimerions qu’elle soit détachée des soins quotidiens et qu’elle
dispose d’un local et de créneaux horaires dédiés exclusivement à l’éducation. Le patient aura une consultation infirmière pour
un projet éducatif. La rencontre se fera en dehors de sa chambre, ce qui nous l’espérons, mettra l’accent sur l’importance de son
implication personnelle dans le projet. Avant de débuter son accompagnement dans le projet éducatif, l’infirmière prendra
connaissance de la feuille de transmission pré-greffe pour orienter sa consultation et adopter une attitude empathique.
Comme nous avons pu le constater, les sujets plus âgés ou plus limités intellectuellement ont souvent besoin de plus d’encadrement lors de leur apprentissage. Il nous parait capital de pouvoir les prendre en charge en tenant compte de leur potentiel, en
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respectant leur rythme pour leur donner un maximum de repères. Lorsque le patient n’a pas de possibilité de se prendre en charge
de façon temporaire ou définitive, les actions éducatives entreprises pourront se poursuivre à domicile avec les partenaires de
soins extérieurs ou la famille pour tenter de rendre le patient le plus autonome possible. L’infirmière d’éducation aura pour rôle de
coordonner et d’informer les différents partenaires de soins.
Certains sujets plus jeunes, au contraire, désirent sortir très rapidement du milieu hospitalier, avant même que l’éducation
thérapeutique soit terminée (surtout lorsqu’il s’agit d’une seconde greffe). Là encore, il semble essentiel d’obtenir la collaboration
du patient en passant par un partenariat entre lui et l’équipe.
Nous aimerions créer une fiche d’évaluation permettant à l’infirmière de faire le point sur les connaissances et les acquis des
patients en matière d’éducation pour suivre sa progression. Cette dernière sera remise aux infirmières de post-greffe qui pourront
l’utiliser pour réajuster, compléter et réévaluer les connaissances du patient.
• En post-greffe
Nous travaillons actuellement à la réalisation d’un document qui sera remis au patient à sa sortie d’hospitalisation. Nous avons
prévu de lui remettre un classeur personnalisé comportant :
• Des informations pratiques le concernant (fiche d’identité, personne à contacter, son numéro de téléphone personnel mais
aussi celui de sa pharmacie, de son laboratoire, fiche allergie, suivi du diabète, des AVK….)
• Des fiches techniques pour chaque médicament immunosuppresseur qui seront réalisées en collaboration avec le pharmacien
attaché à notre service. Elles pourront également servir de support et de base de travail au moment de l’éducation dans l’unité
mais le patient pourra s’y référer en cas de doute à domicile.
• Une fiche de liaison avec les partenaires extérieurs (IDE, famille, équipe médicale des centres de suivi périphériques….)
• Toutes les informations sur le suivi post-greffe :
- rythme des bilans sanguins et urinaires avec un rappel des consignes à respecter
- organisation et déroulement des consultations
- planning des différents examens à réaliser (consultation dermatologique, cardiologique, DFG, ablation de la sonde JJ…)
- le suivi en alternance
• Un rappel des recommandations en cas de problèmes à domicile avec la conduite à tenir (diarrhées, hyperthermie, décalage
horaire pour les médicaments…)
Ce document sera une aide précieuse pour le corps médical et paramédical, il favorisera les relations avec les partenaires extérieurs et permettra au patient de trouver les informations dont il a besoin rapidement puisque tout sera regroupé.
Bien sûr, nous accompagnerons le patient dans son projet d ‘éducation thérapeutique, nous réévaluerons les actions entreprises lors de l’hospitalisation et nous les réajusterons si nécessaire.
BILAN ET PERSPECTIVES DE NOTRE TRAVAIL
Ce travail a été, pour nous une source de motivation supplémentaire pour améliorer la prise en charge du patient en pré, per
et post-greffe.
Il nous a permis de regrouper nos idées, nos insatisfactions, de réévaluer nos actions et de les ajuster. Cette démarche nous a
sensibilisé à la nécessité de mieux connaître le patient dés le pré-greffe pour pouvoir lui proposer une éducation thérapeutique
adaptée et optimisée en post-greffe. Tout au long de notre cheminement nous avons élaboré un projet visant à réduire les difficultés liées aux éducations dans notre service.
Nos objectifs prioritaires sont de mettre en place les différentes actions proposées dans le travail :
• Mise en place de la feuille de transmissions pré-greffe dans les centres périphériques ce qui permettra une rencontre et un
échange avec les équipes.
• Distribution du guide du transplanté en amont de la consultation pré-greffe.
• Mise en place d’un projet d’éducation thérapeutique dans le service d’hospitalisation et en post-greffe.
• Concrétisation du classeur personnalisé post-greffe
• Evaluation de l’efficacité de toutes les actions mises en œuvre.
Cette approche rejoint les directives de la Haute Autorité de Santé.
Ce travail a été pour nous très enrichissant formateur et constructif. Il reste cependant subjectif et personnel par rapport au
vécu dans le service. Vous vivez vraisemblablement les mêmes difficultés dans vos pratiques, peut-être avez-vous déjà réfléchi et
travaillé pour trouver d’autres solutions, nous vous invitons à les partager avec nous.
REMERCIEMENTS
Nous aimerions remercier Madame Legendre, psychiatre et les équipes des centres périphériques pour leur collaboration
précieuse.
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