RIONS BEAUCOUP : QUÉBEC ET LA CRISE Texte de Léo-Paul Lauzon, professeur au département des sciences comptables et titulaire de la Chaire d’études socio-économiques de l’Université du Québec à Montréal Janvier 2010 La crise financière, dont est responsable le privé, avec sa recherche de profits à court terme à tout prix et sa cupidité légendaire, a occasionné au pays des milliers de pertes d’emplois et des centaines de milliards en fonds publics, provenant des poches des victimes versés aux responsables souvent milliardaires. Et comme ce n’est pas suffisant pour éradiquer les effets dévastateurs de la crise, on va exiger des dindons de la farce de payer en sus pour les dommages collatéraux en hausses de taxes à la consommation et en tarification accrue des services publics afin d’endiguer le déficit, réduire la dette et verser de nouveau d’autres milliards aux coupables afin de les aider à s’en sortir et de rémunérer «décemment» leurs dirigeants. Comme le disait l’ex-président narcissique Henri-Paul Rousseau à propos des 40G$ de pertes encourues par «sa» Caisse de dépôt sur des investissements spéculatifs et pourris : «Nous avons été frappés par une tempête parfaite». Voilà, c’est bien ça l’économie de marché avec ses lois naturelles. Il y a eu un tsunami économique que personne n’a pu voir venir, même pas les grands bonzes du privé, ceux qui, à titre d’experts, nous disent comment gérer l’État «efficacement». En somme, les affairistes n’y sont absolument pour rien dans cette crise financière mondiale. La nature s’est tout simplement déchaînée. Un «act of God» en quelque sorte découlant de la main invisible du marché naturel. Rien à voir avec la main visible des créateurs de richesse. Esprits tordus, va! En fin de compte, cette crise qui va vous appauvrir n’a que du bon comme l’a dit Raymond Bachand, le «positif» ministre libéral du Développement économique : «Une occasion de renouveau. Plus les Québécois seront solidaires, mieux ils traverseront cette crise économique exceptionnelle, pour laquelle nous allons trouver des solutions nouvelles et exceptionnelles. Il n’en tient qu’à nous, ensemble…». Par «ensemble», l’honorable ministre fait allusion à la classe moyenne et non au gratin et aux compagnies. Il demande au monde ordinaire de payer et au privé et aux nantis d’avoir l’insigne bonté de recevoir. C’est ça pour lui être solidaire. Et pour les solutions novatrices et courageuses, lui et le parti libéral du Québec accoucheront de hausses de la TVQ et de tarifs des services publics. Vraiment génial et audacieux comme solutions. Pas comme Obama aux États-Unis qui va plutôt augmenter l’impôt sur le revenu des riches et des compagnies, diminuer celui de la classe moyenne, couper dans plusieurs abris fiscaux et l’évasion fiscale dans les paradis fiscaux des bonzes et taxer davantage les banques comme en France et au Royaume-Uni. Voyons donc, ce sont là des mesures socialistes éculées et lâches que de vouloir s’en prendre ainsi à nos bienfaiteurs. Pour les libéraux et les lucides autoproclamés, les politiques d’Obama vont faire fuir les cerveaux, anéantir la compétitivité des States, décourager l’investissement et l’épargne et créer du chômage. Monsieur Obama, «Shame on you». On s’ennuie déjà des républicains, de George Bush et de Sarah Palin. «Plan pour revenir à l’équilibre budgétaire : Québec lance une consultation élargie» que titrait La Presse. Consultation élargie peut-être mais très encadrée, comme le laisse voir ces deux articles : «Hausses des tarifs : le projet de loi est déjà prêt» et «Double hausse de la TVQ envisagée pour 2011». Allô consultation! Pour élargir sa consultation, Charest vient de nommer deux autres personnes à son comité d’experts, soit les très lucides universitaires Claude Montmarquette et Pierre Fortin, deux enragés des taxes à la consommation et de la tarification des services publics. On consulte ses propres experts d’abord qui pensent comme vous et une fois les décisions arrêtées et votées, vous serez alors consultés. C’est comme ça que ça marche. Trouvez-vous ça drôle? Tiens, tiens, fini la consultation élargie et place plutôt à «un forum intime sur l’économie du Québec que titrait Le Devoir du 9 janvier 2010 avec comme «sages» de dignes représentants de la Banque Nationale, de Power Corp., de Desjardins, de l’Industrielle-Alliance, des organismes favorables à la santé, aux autoroutes, à l’eau, aux pensions de retraite, à HydroQuébec, etc… privés. «La ministre Blais prend le parti des clowns dans les CHSLD» que titrait Le Devoir. Pour réduire un peu le déficit, à titre bénévole, j’enverrais des ministres et leurs bouffons de service dans les CHSLD déballés leurs sornettes. Les personnes âgées vont se tordre de rire. Le ministre Béchard pourrait leur répéter ce qu’il a déjà affirmé afin de neutraliser les hausses des tarifs d’électricité : «Baissez le thermostat et ouvrez vos rideaux». J’ajouterais, «et habillez-vous chaudement à la maison». Ma dernière drôle vient de Charest, qui a dit sans rire : «Il faut réformer le capitalisme». Pas trop monsieur Charest, sinon on va basculer dans le socialisme.