La prise en charge du cancer de la prostate à haut risque: chirurgie

La prise en charge du cancer de la prostate à haut risque :
chirurgie ou hormonoradiothérapie
Management of high-risk prostate cancer: surgery or radiotherapy
with hormonal treatment
M. Soulié
1
, P. Richaud
2
et les membres du sous-comité « Prostate » du CCAFU
1
Département durologie, CHU de Toulouse, université Paul-Sabatier, Toulouse, France
2
Département doncologie-radiothérapie, institut Bergonié, Bordeaux, France
Reçu le 2 novembre 2011 ; accepté le 4 janvier 2012
Abstract: Among the different
treatment options recommended
for high-risk prostate cancer
(HRPC), radical prostatectomy (RP)
is recognized along with radiothera-
py, but its role is still controversial in
monotherapy and difficult to eva-
luate in combined treatments. The
results of clinical trials combining
an external radiotherapy with a
long-term androgen deprivation in
locally advanced tumours sustain
the principle of a multidisciplinary
management in HRPC. Clinical and
histological data associated with
the MRI assessment remain
essential and enhance the preope-
rative multidisciplinary decision, es-
pecially regarding nodal and distant
metastases. An enlarged RP with an
extended pelvic lymphadenectomy
can be considered a viable alterna-
tive to radiotherapy and hormonal
therapy. Morbidity of the procedure
is similar to RP for organ-confined
tumours, despite more erectile dys-
function due to non-sparing RP is
observed in most of the cases. On-
cological results of recent studies
show 10-year and 15-year specific
survival rates to be around 85%
and 75% respectively, similar to
those with hormonoradiotherapy.
For high-risk and locally advanced
prostate cancers, combined andro-
gen deprivation and radiotherapy
improved progression-free survival
and overall survival. Local control is
always necessary, but some
patients will benefit from local
aggressive treatment (surgery,
postoperative radiotherapy or high
dose radiotherapy), some may have
a shorter adjuvant treatment, and
probably some will need an intensi-
fication of general therapy: optimi-
zation of these approaches need
further randomized trials. To cite
this journal: Oncologie 14 (2012).
Keywords: High risk prostate
cancer Radical prostatectomy
Extended pelvic lymphadenecto-
my Radiotherapy Concomitant
hormonal treatment
Résumé : Parmi les modalités thé-
rapeutiques des cancers de la
prostate à haut risque, la prosta-
tectomie totale est reconnue au
même titre que lhormonoradio-
thérapie, mais son rôle reste
controversé en monothérapie et
mal évalué dans le traitement mul-
timodal. Lassociation radiothéra-
pie et hormonothérapie de longue
durée est le traitement de réfé-
rence dans les cancers localement
avancés. Le bilan dextension pré-
thérapeutique sappuie sur les
données de limagerie et de la mé-
decine nucléaire, il vise à éliminer
les métastases ganglionnaires ou
à distance. Techniquement, la
prostatectomie totale commence
par un curage ganglionnaire éten-
du puis une exérèse tissulaire élar-
gie. La morbidité est comparable à
la chirurgie conservatrice sauf
pour la dysérection due à lab-
sence recommandée de préserva-
tion nerveuse. Les résultats des
séries intégrant la chirurgie au
traitement multimodal montrent
une survie spécifique à dix ans de
85 % et à 15 ans de 75 % compara-
bles à ceux de lhormonoradiothé-
rapie. Pour les cancers localement
avancés ou à haut risque, laddi-
tion dune hormonothérapie à la
radiothérapie externe améliore la
survie sans progression clinique
et/ou biologique et la survie glo-
bale. Le contrôle local est toujours
nécessaire, et certains patients bé-
néficieront dune attitude locale
« agressive » (chirurgicale, radio-
chirurgicale ou par escalade de
dose), dautres dun traitement
hormonal adjuvant plus court, cer-
tains probablement nécessiteront
une intensification du traitement
général : loptimisation de ces ap-
proches thérapeutiques fait ac-
tuellement lobjet dessais théra-
peutiques contrôlés. Pour citer
cette revue : Oncologie 14 (2012).
Mots clés : Cancer de la prostate à
haut risque Prostatectomie totale
Lymphadénectomie pelvienne
étendue Hormonoradiothérapie
Introduction
Depuis lutilisation régulière du PSA
en pratique courante, une migration
spectaculaire des stades et des gra-
des du cancer de la prostate (CaP)
a été observée au moment du
Correspondance : [email protected]
Mise au point
Update
Oncologie (2012) 14: 7986
© Springer-Verlag France 2012
DOI 10.1007/s10269-012-2118-4
79
diagnostic. La grande majorité des
CaP est diagnostiquée en 2011 à un
stade cliniquement localisé. Le
niveau dagressivité et le risque de
progression de ces formes locali-
sées varient selon les critères clini-
ques définis par les groupes à
risques de DAmico et al. [10].
Environ 15 à 20 % des cancers
nouvellement diagnostiqués répon-
dent aux critères de tumeurs à haut
risque de progression, définis par
un PSA supérieur à 20 ng/ml ou un
stade clinique T2c-T3a ou un score
de Gleason des biopsies de 8 à 10
[7,13,14,18,31]. Ces tumeurs sont
hétérogènes avec un risque élevé
de récidive biologique, clinique et
donc métastatique après le traite-
ment initial doù le développement
de traitement adjuvant ou de rattra-
page. Il ny a pas de consensus sur
le traitement optimal pour les CaP à
haut risque (CPHR) du fait de lté-
rogénéité de ces tumeurs. Lobjectif
dun traitement local efficace par
chirurgie ou par hormonoradiothé-
rapie est de maîtriser le risque de
progression locale et dévolution
métastatique.
La prostatectomie totale est indi-
quée pour les tumeurs de petit
volume tumoral avec un bilan dex-
tension négatif chez des hommes
de moins de 70 ans. Un traitement
complémentaire par radiothérapie
et/ou hormonothérapie sera discuté
en fonction des résultats anatomo-
pathologiques et du PSA postopé-
ratoire [16,2931]. Les patients pré-
sentant un CPHR doivent être
informés de cette approche multi-
modale décidée en RCPO. La réali-
sation dessais cliniques optimisant
la prise en charge des CPHR est en
cours tant pour la chirurgie (AFU-
GETUG 20) que pour lhormonora-
diothérapie. Pour les cancers loca-
lement avancés, ladjonction dune
hormonothérapie à une radiothéra-
pie a démontré son efficacité en
améliorant la survie globale des
patients par rapport à une radiothé-
rapie ou à une hormonothérapie
exclusive et constitue donc le stan-
dard de traitement [1].
Définitions
Les CPHR sont des tumeurs biolo-
giquement définies par lacquisi-
tion dun fort potentiel de récidive
et dévolution métastatique qui
compromet les résultats du traite-
ment de première ligne en mono-
thérapie [14]. Ces tumeurs à haut
risque de progression exposent
les patients à un risque élevé de
mortalité spécifique, évalué sur
les données cliniques du stade,
de la valeur initiale du PSA et du
score de Gleason comme défini
par DAmico et al. en 1998 [10]
(Tableau 1). La présence dun
seul des critères cliniques suivants
définit un CPHR : stade clinique
T2c-T3a ou PSA supérieur à
20 ng/ml ou score de Gleason des
biopsies de 8 à 10.
Il est admis aujourdhui que les
tumeurs cT3a (extension extra-
capsulaire limitée) font partie des
tumeurs à haut risque [16,29].
Bilan dextension
Imagerie
LIRM est devenue un examen
incontournable pour faire le bilan
dextension local de la lésion
tumorale [8]. Il est recommandé
de faire lIRM six semaines après
les biopsies, mais lIRM peut être
faite avant les biopsies si le TR est
évocateur dun stade clinique T2
ou T3a [29]. La séquence T1 per-
met de différencier un artéfact l
aux biopsies (hémorragie) dun
aspect tumoral. En séquence T2,
la tumeur de la zone périphérique
est caractérisée par un hyposignal
nodulaire. LIRM de diffusion per-
met dobtenir une image tumorale
proportionnelle à la densité cellu-
laire. Les CPHR ont un coefficient
apparent de diffusion inférieur à
celui des tissus sains (sensibilité :
85 %). La combinaison des diffé-
rentes séquences fonctionnelles
(IRM standard et diffusion) amé-
liore la fiabilité de lIRM, notam-
ment pour les CPHR [26].
Évaluation ganglionnaire
Le niveau de risque datteinte gan-
glionnaire augmente dans la classi-
fication de DAmico et al. [10]. Les
CPHR ont un potentiel denvahisse-
ment élevé au niveau des aires gan-
glionnaires ilio-obturatrices et
iliaques primitives (jusquà 30 %).
Aucun examen dimagerie permet
aujourdhui de prédire de manière
fiable cet envahissement avec
autant de précision que la lympha-
dénectomie étendue. La sensibilité
du scanner est denviron 35 %.
LIRM dynamique et la spectro-
IRM nont pas montré davantage
par rapport au scanner [8]. La
place du Pet-Scan à la
11
C-choline,
à la
18
F-fluorocholine et à de
nouveaux radiotraceurs est
encore en cours dévaluation dans
lévaluation ganglionnaire et le
bilan dextension des tumeurs à
haut risque.
Évaluation osseuse
La scintigraphie osseuse est recom-
mandée pour les CPHR, surtout si le
PSA est supérieur à 20 ng/ml et/ou
le score de Gleason est supérieur
ou égal à 8 [16,20,29]. LIRM permet
détudier la moelle osseuse du
corps entier avec une sensibilité
(100 %) et une spécificité (90 %) sup-
érieures à celles de la scintigraphie,
sauf au niveau des côtes et de la
voûte crânienne [19].
Tableau 1. Groupes à risque de progression des cancers de la prostate selon DAmico et al. [10]
?
Risque de récidive biochimique Faible risque Risque intermédiaire Haut risque
Stade clinique < T2a et T2b ou T2c ou
PSA (ng/ml) < 10 et 1020 ou > 20 ou
Score de Gleason biopsique < 7 7 > 7
Dossier
Thematic file
80
Traitement chirurgical
Lobjectif du traitement des CPHR
est de prolonger la survie qui est
conditionnée par le contrôle local
et la maîtrise du risque métasta-
tique à distance. Le contrôle local
est primordial surtout si le volume
tumoral est important et si le risque
métastatique ganglionnaire et à dis-
tance est estimé faible (absence de
grade 4 ou 5, vésicules séminales
libres). Les patients présentant un
CPHR ont un risque plus élevé de
décès spécifique imputable à la
récidive tumorale quà une autre
cause [6,13,31,34].
Le rationnel pour la chirurgie
des CPHR repose sur trois argu-
ments [14] :
elle permet un excellent contrôle
local de la tumeur primitive ;
elle définit lextension de la mala-
die permettant de guider les théra-
peutiques complémentaires ;
elle enlève les sources de pro-
duction du PSA notamment lHBP
souvent associée, permettant ainsi
didentifier rapidement la récidive
biologique et dentreprendre rapi-
dement le traitement de rattrapage.
La technique de la PT doit être
adaptée à la situation carcinolo-
gique avec une lymphadénectomie
étendue systématique puis une
exérèse élargie aux tissus péripros-
tatiques sans préservation a priori
des bandelettes neurovasculaires
[13,30,34].
Les résultats carcinologiques et
fonctionnels de la PT rapportés
depuis dix ans sont difficiles à ana-
lyser du fait de lhétérogénéité
détudes non comparatives. En lab-
sence de séries comparatives et
randomisées, les résultats de la PT
avec ou sans traitement adjuvant
apparaissent superposables, dans
une population sélectionnée de
patients, à lassociation radiothéra-
piehormonothérapie en termes de
survie sans récidive biologique et
de survie spécifique et globale
[4,6,13,14,34]. La morbidité de la
PT dans les tumeurs à haut risque
semble comparable à celle de la
PT pour les tumeurs localisées,
lorsquelle est réalisée par un chi-
rurgien expérimenté [4,6,14,30,34].
Les patients sélectionnés pour la
PT doivent être jeunes (moins de
70 ans) avec une longue espérance
de vie (au moins supérieure à dix
ans). Concernant les CPHR de
stade clinique T3, les recommanda-
tions de lEuropean Urological
Association (EAU) statuent que la
PT est envisageable chez des
patients jeunes avec les paramètres
suivants : cT3a et PSA < 20 ng/ml
et score de Gleason des biopsies
8 [16]. Les recommandations de
lAssociation française durologie
(AFU) en 2010 sont comparables
pour les paramètres préopératoires
(cT3a, N0, M0) en soulignant que
la chirurgie sintègre dans un traite-
ment le plus souvent multimodal
qui sera discuté en RCPO [29].
Curage ganglionnaire
Compte tenu du risque élevé
denvahissement ganglionnaire
dans les CPHR, la lymphadénecto-
mie iliopelvienne étendue permet
doptimiser lévaluation ganglion-
naire et donc le stade pathologique
par laugmentation (multiplié par 2)
du nombre de ganglions prélevés
et le nombre de ganglions métasta-
tiques [15]. Les limites anatomiques
recommandées de la lymphadé-
nectomie étendue doivent au
moins emporter les ganglions ilio-
obturateurs au-dessus et au-
dessous du nerf et les ganglions
recouvrant larre iliaque interne
jusquà la bifurcation iliaque
comprise.
Le taux de complications du
curage étendu est supérieur par le
risque de lymphocèles [5].
Lintérêt thérapeutique du
curage ganglionnaire extensif nest
pas démontré.
Particularités de la prostatectomie
totale dans les CPHR
La technique de la PT pour les CPHR
applique les principes de la chirur-
gie des cancers localement avancés
avec un curage ganglionnaire
étendu et une chirurgie élargie aux
tissus périprostatiques sans conser-
vation des bandelettes neurovascu-
laires, dans la majorité des cas
[6,13,14,30,34]. Le but de linterven-
tion est de tout faire pour ne pas
avoir de limites chirurgicales (mar-
ges) positives [30,34]. La majorité
des CPHR correspond à des
tumeurs palpables développées
dans la zone périprique de la
prostate et par conséquent avec
une tendance à sétendre vers les
tissus postérolatéraux et prostato-
rectaux. Les bandelettes neurovas-
culaires doivent être réséquées lar-
gement, surtout du côté de la lésion
tumorale si elle est unilatérale. La
conservation du col vésical est réa-
lisée en fonction de la localisation
tumorale et des biopsies positives.
Concernant la voie dabord de la
PT pour des CPHR, il ny a pas de
donnée scientifique tranchante
pour recommander une voie
dabord plus quune autre (ouverte,
laparoscopique ou robotisée). La PT
par voie rétropubienne est la tech-
nique utilisée dans la majorité des
séries publiées sur les CPHR,
notamment pour les tumeurs de
stade T3 [6,13,14,25,30,34,38].
Résultats de la chirurgie
des CPHR
Résultats carcinologiques
Une récente compilation de huit
séries américaines concernant
4 969 patients ayant eu une PT en
monothérapie pour un CPHR a
montré des taux de survie à dix
ans disparates [14] :
survie sans récidive biochimique :
35 à 68 % ;
survie sans métastases : 32 à
89 % ;
survie spécifique : 57 à 95 % ;
survie globale : 60 à 74 %.
Les traitements complémen-
taires par radiothérapie et/ou hor-
monothérapie nétaient pas tou-
jours précisés ou étaient
administrés dans 10 à 25 % des
cas. La série du Memorial Sloan
Kettering Cancer Center, de la Cle-
veland Clinic et de luniversité du
Michigan regroupant 1 962 CPHR
montrait des taux de mortali
Mise au point
Update
81
spécifique à 10 et 15 ans de 8 % (IC
95 % : 710) et 19 % (IC 95 % : 1424)
respectivement en utilisant les critè-
res de DAmico et al. [6].
Concernant la PT réalisée pour
des tumeurs cT3, une surévaluation
du stade clinique est retrouvée dans
20 à 36 % des cas, finalement reclas-
sés pT2 [4,6,13,37]. Les taux de sur-
vie sont proches de ceux obtenus
par lassociation hormonoradiothé-
rapie, qui est le traitement de réfé-
rence à ce stade (survie spécifique
après PT respectivement de 85 à
99 % à cinq ans, de 72 à 92 % à dix
ans et de 76 à 84 % à 15 ans)
[4,6,13,25,34].
Résultats fonctionnels
Avec lamélioration des techniques
chirurgicales incluant la voie
dabord laparoscopique, les taux
de complications de la PT pour les
tumeurs à haut risque sont sembla-
bles à ceux de la PT pour des
tumeurs moins évoles, mis à
part les séquelles sexuelles [4,6].
Les complications postopératoires
les plus fréquentes sont linconti-
nence urinaire et la dysfonction
érectile, qui apparaissent immédia-
tement après la chirurgie et samé-
liorent avec le temps [34]. Lévalua-
tion rigoureuse préalable des
patients, lexpertise opératoire et le
volume chirurgical en cancérologie
sont des facteurs qui interviennent
dans la réduction de la morbidité et
lamélioration des résultats carcino-
logiques et fonctionnels [30,34].
Traitements complémentaires
à la chirurgie
Hormonothérapie néoadjuvante
Une hormonothérapie néoadju-
vante avant la prostatectomie
totale, même pour un CPHR, nest
pas recommandée en pratique cou-
rante, aucune étude nayant montré
un bénéfice en survie spécifique et
globale entre les patients traités et
ceux non traités [16,29].
Ce sont essentiellement les
résultats anatomopathologiques
de la pièce opératoire et la valeur
du PSA postopératoire qui vont
guider la stratégie des traitements
adjuvants ou de rattrapage, décidée
en RCPO.
Radiothérapie adjuvante
et de rattrapage
Trois essais randomisés majeurs
ont montré que la radiothérapie
adjuvante à la dose de 60 à 65 Gy
permettait de prévenir ou de
différer la récidive biochimique et
clinique : EORTC 22911, SWOG
S8794 et ARO 96-02, avec un béné-
fice sur la survie globale et la survie
sans métastases démontré dans
lessai du SWOG S8794 [2,32,37].
Pour les patients pT3 R1, il nest
pas prouvé que la radiothérapie
adjuvante ait une efficacité supé-
rieure à la radiothérapie de rattra-
page à la récidive biologique.
Lessai GETUG-AFU 17 qui compare
ces deux traitements devrait répon-
dre à la question.
Dans le cas dune récidive locale
après PT, la radiothérapie de rattra-
page est une option efficace pour
améliorer le contrôle local et la sur-
vie sans récidive clinique. Il est
admis que la radiothérapie doit
être alisée avant que le PSA à la
récidive natteigne 0,5 ng/ml [16,29].
Traitement hormonal adjuvant
Pour les patients pN1-2, létude de
Messing a démontré, avec un recul
de 12 ans, quun traitement hormo-
nal immédiat par analogues de la
LH-RH était bénéfique en termes
de survie globale (72,5 versus
49 %) et de survie spécifique (87,2
versus 56,9 %) comparativement à
un traitement hormonal différé à la
progression métastatique [22].
Pour les patients pT3, létude
EPC (Early Prostate Cancer), qui a
comparé le bicalutamide 150 mg
versus placebo après PT, a montré
que le risque de progression biochi-
mique et clinique était réduit de
25 % avec un suivi moyen de
7,4 ans, mais sans impact sur
la survie globale [21]. Lessai
AFU-GETUG 20, récemment ouvert,
va comparer une hormonothérapie
adjuvante (deux ans daLHRH) à la
surveillance en situation de tumeur
pT3b et/ou de score de Gleason
pathologique supérieur à 7, R0
N0 avec PSA postopératoire
indétectable.
Hormonoradiothérapie
Lhormonoradiothérapie est actuel-
lement le traitement de référence
des tumeurs localement avancées
(T3) et par extension des CPHR
chez les patients dont lespérance
de vie est longue.
Le but de lhormonothérapie
associée à la radiothérapie est
daméliorer le contrôle local en ren-
forçant lefficacité des techniques
de radiothérapie innovantes et de
réduire les échecs métastatiques,
sans peser dun poids trop lourd
sur le confort et la qualité de vie
des patients. Depuis une vingtaine
dannées, nombre dessais théra-
peutiques ont été conduits et
publiés confirmant le bénéfice de
lassociation dune hormonothéra-
pie à la radiothérapie, mais toutes
les questions posées par cette asso-
ciation ne sont pas résolues.
Essais thérapeutiques
Les plus anciens avec les données
les plus matures concernent des
patients porteurs de CPHR intégrant
des stades T3. Quatre grandes
études randomisées ont le nombre
de patients, la rigueur méthodo-
logique et le recul suffisant
(> 10 ans) pour permettre détablir
le concept dhormonoradiothérapie
comme un standard thérapeutique
dans cette indication en comparai-
son avec la radiothérapie exclusive
(Tableau 2). Elles comportaient un
bras témoin avec une radiothérapie
exclusive (4550 Gy dans un
volume ganglionnaire pelvien, et
6570 Gy dans un volume prosta-
tique) et un bras expérimental asso-
ciant la même irradiation à une hor-
monothérapie par aLHRH. Dans les
essais du RTOG 85-31 et de lEORTC
22863, la radiothérapie était compa-
rée à une association avec un traite-
ment hormonal long (deux à trois
ans), alors que dans les essais du
RTOG 86-10 et du TROG, lhormo-
nothérapie associée était courte
(quatre à huit mois) avec un objectif
Dossier
Thematic file
82
de réduction tumorale avant radio-
thérapie et damélioration du
contrôle local [2,12,24,28]. Ces
études ont toutes mis en évidence
un bénéfice sur le contrôle local, le
contrôle biochimique et lapparition
de métastases. Les études évaluant
une hormonothérapie longue
(EORTC et RTOG) ont mis en évi-
dence un bénéfice clair supérieur à
10 % sur la survie à dix ans.
Quelle durée dhormonothérapie ?
Lagressivité biologique de la
tumeur se traduisant par un score
de Gleason élevé semble être le fac-
teur qui conditionne le plus la durée
de lhormonothérapie adjuvante.
Ainsi dans lessai RTOG 85-31, une
différence significative en termes
de survie globale na été observée
quau bout de dix ans de suivi pour
lensemble de la population, mais
dès cinq ans, pour les patients
avec un score de Gleason élevé
supérieur à 7 [24]. Dans lessai
RTOG 86-10, le bénéfice en survie
globale apporté par une hormono-
thérapie courte nétait retrouvé que
dans le sous-groupe des patients
avec un Gleason inférieur à 7 [28].
En faveur de lhormonothérapie longue
Lessai du RTOG 92-02 a comparé
une hormonoradiothérapie courte
(quatre mois) à une hormonoradio-
thérapie longue (24 mois) [17]. Les
résultats à cinq ans retrouvent en
faveur de lhormonothérapie lon-
gue une amélioration significative
de la survie sans récidive (46,4 vs
28,2 %), de la survie spécifique
(94,6 vs 91 %) et du taux de méta-
stases (11,5 vs 17 %) sans bénéfice
sur la survie globale ; cependant,
pour les patients avec un score de
Gleason 810, la survie est statisti-
quement améliorée (à cinq ans :
81 vs 70,7 % ; p= 0,044 et à dix
ans 45 vs 32 % ; p= 0,006).
Létude de lEORTC 22961 a
comparé en termes de non-
infériorité une hormonothérapie
courte de six mois à une hormono-
thérapie longue (trois ans) :
1 117 patients T1c-T2b, N1-2 ou
T2c-T4, N0-2 ont été inclus et 970
randomisés [3]. La non-infériorité
na pas pu être démontrée puisquà
cinq ans il existe une différence sta-
tistiquement significative tant en
termes de survie globale (85,3 vs
80,6 %), de survie sans progression
clinique (81,8 vs 68,9 %) que de sur-
vie sans progression biologique
(78,3 vs 58,9 %) en faveur du traite-
ment hormonal de trois ans.
Une hormonothérapie adju-
vante prolone est donc bénéfique
pour les patients à haut risque en
particulier ceux dont le score de
Gleason supérieur à 7.
En faveur de lhormonothérapie courte
Plusieurs études utilisant les ago-
nistes de la LHRH pour une durée
de trois à huit mois plaident en
faveur dune hormonothérapie néo-
adjuvante par rapport à une radio-
thérapie exclusive : létude RTOG
86-10 déjà citée a été confire
par trois autres études (Tableau 3).
Létude du Trans-Tasmanian
Radiation Oncology Group
(TTROG) comparait zéro, trois et
six mois de traitement néoadjuvant :
une hormonotrapie courte de
trois ou six mois améliore la survie
sans rechute biologique (52 et 56 vs
38 %) et la survie sans progression
clinique(19et52 vs32%) parrapport
à une radiothérapie seule [12]. La
survie spécifique est améliorée
dans lessai du TROG mais unique-
ment pour le bras comportant six
mois de traitement.
Une étude canadienne ne mon-
tre pratiquement aucune différence
entre trois et huit mois de traite-
ment hormonal sauf pour les
tumeurs à haut risque qui profitent
dun traitement plus long en survie
sans progression clinique ou
spécifique [9].
Enfin, dans un essai comportant
206 patients porteurs dun cancer
T1b-2b (UICC 1992) N0-X M0,
score de Gleason 7 ou supérieur à
7 et PSA supérieur à 10 ng/ml,
DAmico et al. ont comparé leffica-
cité dune radiothérapie conforma-
tionnelle à 70 Gy associée à une
hormonothérapie par a-LHRH de
six mois (deux mois avant, deux
mois pendant, deux mois après) à
la même radiothérapie avec hormo-
nothérapie à la rechute [11]. Avec
un recul médian de 7,6 ans, la survie
sans rechute et la survie globale
sont améliorées par lhormonothé-
rapie de six mois : le nombre de
décès toutes causes confondues
est inférieur dans le bras HT-RT
(30 versus 44 dans le bras RT ;
Tableau 2. Hormonoradiothérapie prolongée (> 2 ans) : essais randomisés
?
Études Effectif Groupe pronostique Traitements Survie
globale
Commentaires
RTOG 85-31 945 Haut risque RT
vs
RT + AS sine die
39
vs
49 %
AS survie globale des patients
traités par RT
EORTC 22863 415 Haut risque RT
vs
RT + AS 3 ans
62
vs
78 %
AS survie globale des patients
traités par RT
RTOG 92-02 1 534 Haut risque RT + AS 4 mois
vs
RT + AS 24 mois
32
vs
45 %
AS longue survie globale pour
les Gleason > 7
EORTC 22961 973 Haut risque RT + AS 6 mois
vs
RT + AS 36 mois
80,5
vs
85,3 %
AS longue survie globale
par rapport
à AS courte
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