définition de la faute pour laquelle il était poursuivi, et de ne plus
permettre au public de s’indigner qu’un médecin ne puisse être
poursuivi dès lors que la faute n’était que “simple”.
La teneur de cet arrêt VERGOZ a encore été confirmée par un
nouvel arrêt du Conseil d’État du 27 juin 1997.
La responsabilité sans faute et l’aléa thérapeutique
Initiée en 1990 par l’arrêt GOMEZ, de la cour administrative
d’appel (CAA) de Lyon, la notion de responsabilité sans faute
sera reprise trois ans plus tard par l’arrêt BIANCHI. Dans ce pre-
mier arrêt, la CAA expose que “l’utilisation d’une thérapeutique
nouvelle crée, lorsque ses conséquences ne sont pas encore entiè-
rement connues, un risque spécial pour les malades qui en sont
l’objet lorsque le recours à une telle thérapeutique ne s’impose pas
pour des raisons vitales, et les complications exceptionnelles et anor-
malement graves qui en sont la conséquence directe engagent,
même en l’absence de faute, la responsabilité du service public
h o s p i t a l i e r ” . L’arrêt BIANCHI, le 9 avril 1993, se prononce sur
les conséquences dramatiques (tétraplégie) d’une “simple” arté-
riographie cérébrale, complication apparue en l’absence de toute
faute dans l’indication, la réalisation ou la surveillance de l’explo-
ration. “Considérant que, lorsque l’acte médical nécessaire au
diagnostic ou au traitement présente un risque, dont l’existence
est connue, mais dont la réalisation est exceptionnelle, et dont
aucune raison ne permet de penser que le patient y soit exposé,
la responsabilité du service public est engagée.”
Ce nouvel arrêt constitue donc un pas de plus vers la notion de
responsabilité sans faute, si controversée par ailleurs. Il est dans
le même esprit que l’arrêt du 21 mai 1996 sur la présomption de
responsabilité en matière d’infection nosocomiale.
Il faut rappeler toutefois également les critères imposés par l’arrêt
GOMEZ, nécessaires pour pouvoir engager la responsabilité de
l’hôpital en l’absence de faute :
que les suites possibles n’aient pas été entièrement connues ;
que le recours à cette méthode n’ait pas été imposé par des rai-
sons vitales ;
que les conséquences dommageables directes de cette méthode
aient eu un caractère exceptionnel et anormalement grave.
Dans la pratique, il est bien rare que ces trois éléments soient réunis,
ce qui permet de ne pas craindre que le juge administratif soit
entré dans la logique de réparation systématique de l’aléa au pro-
fit du patient et/ou aux dépens du médecin.
Car il faut rappeler que la juridiction administrative, tout comme
la juridiction judiciaire, exclut du contrat passé entre médecin et
patient la notion d’aléa thérapeutique (Cour de cassation,
8 novembre 2000).
En l’absence de ces éléments, la responsabilité de l’hôpital ne
pourra être recherchée que sur la base d’une faute.
Les infections nosocomiales hospitalières
C’est l’un des terrains de choix de la notion de présomption de
f a u t e : survenue chez un patient d’un événement dommageable sans
aucun lien avec la raison pour laquelle il était venu à l’hôpital.
La présomption de faute pèse alors sur l’hôpital, ce qui est bien
sûr sévère, puisqu’il est en pratique quasi impossible de maîtriser
toutes les sources possibles de contamination. Dans ce même cas,
le juge judiciaire a fait le même choix, par son arrêt de la Cour
de cassation du 21 mai 1996 : “(...) Une clinique est présumée
responsable d’une infection contractée par un patient lors d’une
intervention pratiquée dans une salle d’opération, à moins de prou-
ver l’absence de faute de sa part”. Ce chapitre concerne en fait
tant les infections bactériennes que les infections virales et, de
fait, la question du dossier du sang contaminé par le VIH. La cour
administrative d’appel de Paris a, par un arrêt du 12 février 1998,
renforcé la nécessité du lien de causalité.
Le devoir d’information
L’obligation d’information vient, outre une simple question de
bon sens et d’honnêteté vis-à-vis du patient, du Code de déonto-
logie, qui rappelle que le médecin doit à son patient une infor-
mation loyale, adaptée et aussi complète que possible.
L’information s’exerce à trois niveaux : état de santé du patient,
nature exacte des traitements, risques inhérents aux explorations
complémentaires ou aux traitements.
Le médecin doit informer son patient de tout risque grave, quelle
que soit sa fréquence, comme l’ont clairement précisé deux arrêts
du Conseil d’État du 5 janvier 2000 : “Lorsque l’acte médical envi-
sagé, même accompli dans les règles de l’art, comporte des risques
connus de décès ou d’invalidité, le patient doit en être informé
dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement
éclairé, (que) si cette information n’est pas requise en cas d’urgence,
d’impossibilité ou de refus du patient d’être informé, la seule cir-
constance que les risques ne se réalisent qu’exceptionnellement
ne dispense pas les praticiens de leur obligation (d’information)”.
Cette obligation d’information se calque en fait depuis ces arrêts du
5 janvier 2000 en matière de responsabilité hospitalière sur les exi-
gences de la responsabilité en matière de droit civil, comme l’avait
établi la Cour de cassation dans son arrêt du 7 octobre 1998.
C’est à l’hôpital d’établir que le médecin a procédé à cette infor-
mation, cette position du Conseil d’État (9 juin 1998) se calquant
là aussi sur la position de la Cour de cassation (25 février 1997).
La définition de la gravité du risque se pose pour définir la limite
au-delà de laquelle ce risque “grave”, même s’il n’est qu’“excep-
tionnel”, doit être mentionné. Nous mettrons à part les impéra-
tifs très spécifiques de la chirurgie esthétique, qui ne seront pas
détaillés ici.
Rappelons également pour mémoire la question du consentement,
indispensable à obtenir dans notre activité professionnelle, notam-
ment hospitalière, consentement qui sera éventuellement écrit, en
particulier dans le cadre d’expérimentations.
CONCLUSION
Cette responsabilité hospitalière est plus protectrice pour le méde-
cin que la responsabilité civile. Mais pour autant, à travers toutes
ses particularités, elle tient compte de l’évolution récente de la
société à travers la jurisprudence de ces dernières années, notam-
ment concernant l’abandon de la faute lourde, l’aléa thérapeutique
ou le devoir d’information. On a vu combien la notion de faute
détachable, qui peut donner lieu à de sévères discussions, reste
malgré tout cantonnée dans des domaines très spécifiques, et a
priori sur des chemins “peu fréquentés”.
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La Lettre du Pneumologue - Volume VII - n
o
5 - septembre-octobre 2004