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Les zoonoses
Les zoonoses sont des maladies transmissibles des animaux
aux humains. La transmission de ces maladies peut se faire par
contact direct avec les animaux ou par l’intermédiaire d’un
vecteur, comme la tique ou le moustique. Ce numéro du
bulletin Vision Santé publique traite plus particulièrement de
la maladie de Lyme, de la fièvre Q et de la rage.
LA MALADIE DE LYME
Une maladie en émergence
La maladie de Lyme est une maladie à déclaration obligatoire
(MADO) en émergence au Québec. Le nombre de cas humains
déclarés annuellement a augmenté graduellement pour
passer de 2 cas en 2004 à 43 cas en 2012. En 2013, 142 cas ont
été déclarés aux Directions de santé publique de la province
(Source : Registre provincial des MADO, extraction du 30 avril 2014).
Historiquement, la grande majorité des cas avait acquis la
maladie lors d’un séjour hors du Québec. Depuis 2011, la
maladie est de plus en plus souvent acquise au Québec.
Environ la moitié des cas déclarés en 2013 ont acquis la
maladie dans la province, principalement en Montérégie.
La maladie de Lyme est causée par une bactérie, Borrelia burg-
dorferi, transmise par une tique de l’espèce Ixodes scapularis
(tique du chevreuil), vecteur principal de cette bactérie dans le
nord-est de l’Amérique du Nord(1).
Les tiques sont transportées majoritairement par des oiseaux
ou des animaux migrateurs en provenance des zones
endémiques (principalement des états du nord-est des États-
Unis). Les tiques vivent dans les régions boisées et les herbes
hautes. Elles ne sautent pas, ne tombent pas des arbres, mais
s’agrippent à un hôte quand celui-ci passe à côté d’elles.
Généralement, la tique doit demeurer attachée à la peau de
son hôte au moins 48 heures avant de transmettre la
bactérie(1).
Toutes les tiques ne sont pas infectées par Borrelia
burgdorferi. Le taux d’infection varie d’une région à l’autre. Au
Québec, en moyenne, 10,3 % des tiques reçues au Laboratoire
de santé publique du Québec (LSPQ) dans le cadre de la
surveillance passive entre 1990 et 2010 étaient porteuses de
cette bactérie(1).
Les tiques sont actives de la fin du printemps au début de
l’automne. Elles ont trois stades de développement (Figure 1).
À chacun des stades, la tique doit prendre un repas sanguin
sur un hôte, animal ou humain, pour pouvoir passer au stade
suivant. Le cycle complet dure habituellement 2 ans(2). La
tique I. scapularis est un important vecteur de zoonoses,
principalement la maladie de Lyme, mais aussi l’anaplasmose
et la babésiose(1).
Pour acquérir la maladie de Lyme, il faut être piqué par une
tique de l’espèce I. scapularis infectée par la bactérie Borrelia
burgdorferi.
Figure 1
Cycle de vie de la tique Ixodes scapularis
Source : http://canlyme.com/fr/mesures-preventives-contre-la-maladie-de-
lyme/transmission.
Numéro 13, juin 2014
BULLETIN VISION SANTÉ PUBLIQUE
BULLETIN VISION SANTÉ PUBLIQUE
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L’impact des changements climatiques
Les changements climatiques devraient déplacer vers le nord
l’expansion de l’aire de la plupart des arthropodes terrestres
de l’hémisphère nord, dont la tique I. scapularis. Le
réchauffement climatique observé au cours de la dernière
décennie a potentiellement accéléré la vitesse
d’établissement des populations d’I. scapularis. Les étés
doivent être suffisamment chauds et longs pour que les tiques
puissent compléter leur cycle de vie(3).
L’épidémiologie
Entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2013, 281 cas de
maladie de Lyme ont été déclarés au Québec, dont la moitié
(142 cas) dans la seule année 2013. Le taux d’incidence de
cette maladie est passé de 0,03 pour 100 000 en 2004 à 1,74
pour 100 000 en 2013 (Figure 2). Il est probable que des cas ne
soient pas diagnostiqués et qu’une sous-déclaration en
découle.
Figure 2
Nombre et taux d’incidence des cas déclarés de maladie de
Lyme, Québec, janvier 2004 à décembre 2013 (n total = 281
cas)
Source : Registre provincial des MADO, extraction du 30 avril 2014.
La Figure 3 montre la répartition du nombre de cas selon la
date d’épisode. Plus de la moitié des cas sont déclarés en août
et septembre.
Figure 3
Nombre de cas de maladie de Lyme selon le mois de
déclaration, Québec, janvier 2004 à décembre 2013 (n total =
281 cas)
Source : Registre provincial des MADO, extraction du 30 avril 2014.
La moyenne d’âge des 281 cas déclarés entre 2004 et 2013 est
d’un peu plus de 43 ans. Environ 40 % des cas ont entre 45 et
64 ans.
La Figure 4 présente le nombre de cas de maladie de Lyme
déclarés entre 2004 et 2013 selon la région de résidence. Avec
118 cas, la Montérégie est de loin la région la plus
représentée.
BULLETIN VISION SANTÉ PUBLIQUE
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Figure 4
Nombre de cas déclarés de maladie de Lyme selon la région
de résidence, Québec, janvier 2004 à décembre 2013
Source : Registre provincial des MADO, extraction du 30 avril 2014.
Alors qu’il y a dix ans, tous les cas étaient acquis à l’extérieur
du Québec, 71 des 142 cas déclarés en 2013 ont été acquis
dans la province (Figure 5).
Figure 5
Nombre et pourcentage des cas déclarés de maladie de Lyme
acquis au Québec, janvier 2004 à décembre 2013 (n total =
281 cas)
Source : Registre provincial des MADO, extraction du 30 avril 2014.
En Estrie, comme dans l’ensemble du Québec, le nombre de
cas de maladie de Lyme tend à augmenter.
Entre 2004 et 2013, 15 cas de maladie de Lyme ont été
déclarés à la Direction de santé publique de l’Estrie, dont 12
dans les trois dernières années. Parmi ces 15 cas, 5 ont été
acquis au Québec.
Des activités à risques
Toute activité de plein air, de loisir ou professionnelle, qui
implique un contact avec la végétation, représente une
activité à risque de piqûre de tique. Ce sont, par exemple, les
promenades en forêt, le camping, la coupe de bois, la chasse,
l’agriculture, particulièrement du mois de mai au mois
d’octobre.
Des mesures préventives simples et
efficaces
Plusieurs moyens permettent de se protéger contre les
piqûres de tique (Figure 6) :
Porter des vêtements longs et clairs,
Rentrer le pantalon dans les bas,
Porter un chapeau,
Porter des souliers fermés,
Utiliser un répulsif contenant un pourcentage efficace de
DEET.
De plus, suite à une activité à risque, il est conseillé
d’inspecter attentivement son corps à la recherche de tique. Si
une tique est trouvée, la retirer à l’aide d’une pince (Figure 7),
la déposer dans un contenant hermétique sec et consulter un
médecin. La tique pourra ainsi faire l’objet d’une
identification, le cas échéant.
Les personnes piquées par une tique doivent surveiller
l’apparition des symptômes pendant au moins un mois.
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Figure 6
Mesures de prévention des piqûres de tique
Source : Bulletin Sentinelle Volume 18, numéro 7 Juin 2012.
Figure 7
Retrait d’une tique en cas de piqûre
Source : http://sante.gouv.qc.ca/conseils-et-prevention/retrait-de-la-tique-
en-cas-de-piqure/.
Les symptômes
La maladie se présente généralement en trois stades(4) et ne
confère pas d’immunité.
Stade 1 : localisé
Dans le mois (3-30 jours) qui suit la piqûre.
Érythème migrant centré sur la piqûre chez 2/3 des cas
(Figure 8).
Disparaît en 3-4 semaines.
Symptômes associés : fièvre, myalgies, céphalées (parfois
les seuls symptômes présents chez 1/3 des cas).
Stade 2 : disséminé
Quelques jours à quelques mois après la piqûre.
Érythème multiple.
Arthrite (manifestation la plus fréquente).
Symptômes neurologiques.
Symptômes cardiaques.
Stade 3 : tardif
Plus de huit semaines, à plusieurs années.
Chronicité des symptômes.
Figure 8
Érythème migrant
Source : http://www.phac-aspc.gc.ca/id-mi/tickinfo-fra.php.
BULLETIN VISION SANTÉ PUBLIQUE
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Le traitement
En général, la maladie de Lyme répond bien au traitement
antibiotique. Celui-ci réduit le risque de progression vers des
manifestations ou des séquelles tardives de la maladie. Le
traitement approprié varie selon les stades de l’infection et les
atteintes cliniques(5).
Le diagnostic différentiel
Le diagnostic différentiel de l’infection précoce (stade 1) pose
moins de difficultés en raison de la présence de l’érythème
migrant chez les 2/3 des personnes infectées. Cette lésion
s’avère assez caractéristique, favorisant ainsi un diagnostic et
un traitement précoces. Les épreuves sérologiques ne sont
pas essentielles pour le diagnostic d’un érythème migrant à la
suite d’une exposition en zone à risque. D’ailleurs, seulement
20 % des patients avec un érythème migrant auront une
sérologie positive à ce stade.
Le diagnostic différentiel de l’infection disséminée précoce ou
tardive (stades 2 et 3) peut s’avérer plus difficile. Les
symptômes des systèmes neurologique ou locomoteur
miment ceux d’autres maladies. De plus, les atteintes peuvent
être intermittentes. La liste des maladies pouvant être
confondues avec la maladie de Lyme aux stades 2 et 3 est
longue : sclérose en plaques, lupus, polyarthrite rhumatoïde,
fibromyalgie, etc.
Le diagnostic différentiel est d’autant plus complexe qu’un
délai de quelques semaines ou de quelques mois peut s’être
écoulé depuis la piqûre de tique chez le patient non traité. Il
est alors difficile de retracer clairement l’historique de
l’exposition. Seulement la moitié des personnes atteintes de
maladie de Lyme peuvent se remémorer la piqûre d’une tique,
d’autant plus que celle-ci est non douloureuse la plupart du
temps.
Les critères diagnostiques
Le diagnostic clinique est fondé avant tout sur l’observation de
manifestations cliniques compatibles et un historique
d’exposition chez une personne ayant séjourné dans une
région à risque élevé ou encore endémique.
En pratique, le diagnostic microbiologique repose
essentiellement sur des méthodes sérologiques avec approche
diagnostique à deux paliers. En Estrie, tous les spécimens sont
d’abord analysés par une épreuve immunoenzymatique (EIA)
disponible au laboratoire de microbiologie médicale du CHUS.
Ceux qui sont positifs ou équivoques sont acheminés au LSPQ,
puis au Laboratoire national de microbiologie (LNM) pour des
analyses complémentaires et de confirmation, incluant des
tests EIA et Western blot (WB) IgM et IgG.
Cette approche à deux paliers est celle recommandée par
Santé Canada(4) et les Centers for Diseases control and
Prevention (CDC) aux États-Unis(6).
Si le résultat de laboratoire est négatif, mais que les
manifestations cliniques suggèrent une maladie de Lyme, le
jugement clinique doit guider la décision de traitement.
Un résultat de laboratoire positif confirme la présence de la
maladie chez le sujet qui présente un érythème migrant,
actuel ou récent, ou qui présente d’autres manifestations
typiques de la maladie. Il n’est d’aucune valeur diagnostique
chez une personne asymptomatique, me si elle a subi une
piqûre de tique.
Les résultats faussement négatifs se présentent durant les
premières semaines de la maladie, lorsqu’il y a peu ou pas
d’anticorps détectables chez la plupart des patients (Figure 9).
L’antibiothérapie précoce peut aussi altérer la formation
d’anticorps à court et à long terme.
Il est toutefois bon de souligner qu’une personne présentant
des symptômes de l’infection disséminée (stades 2 et 3)
devrait avoir une sérologie positive. Si le résultat demeure
négatif, un autre diagnostic devrait être évoqué pour
expliquer les symptômes.
Figure 9
Cinétique des anticorps anti-Borrelia
Source : Guide d’intervention sur la maladie de Lyme, MSSS, 2013(1).
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