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LA DEMOCRATIE : UN MODE DE GOUVERNEMENT PERFECTIBLE
Pour ARISTOTE, "le petit nombre est plus facilement corruptible que le grand", corruptible
signifiant "qui vise son propre intérêt et non celui de la collectivité". Pour CC, cette remarque
d'ARISTOTE s'applique à la catégorie particulière créée dans un système représentatif.
"Dans une démocratie représentative, le pouvoir de décider passe à un groupe particulier : la
collectivité ne décide plus, elle ne se gouverne plus, elle décide seulement qui va décider."
Surtout, le reproche fondamental que CC fait à la démocratie représentative, c'est qu'elle
détruit la participation.
"Nous héritons d'un long développement historique au terme duquel il est devenu habituel de
considérer les affaires communes et publiques comme la tâche d'une certaine catégorie de
professionnels que l'on contrôle vaguement par des élections tous les cinq ans, attendu que les
intérêts essentiels de la vie sont ailleurs". "On maintient un Etat séparé […], on tient pour
acquis que les citoyens ne peuvent ou ne veulent pas, sauf exception passagère, s'occuper des
affaires publiques, et en même temps on prétend fonder là-dessus un régime qui se réclame de
la souveraineté du peuple et qui se donne le nom de démocratie".
CC voit 2 raisons au "refus moderne de la démocratie directe", 2 éléments de l'imaginaire
politique moderne :
a) Elément selon lequel il y a des experts de la chose politique, auxquels le peuple délègue
son pouvoir ; qui conduit à une contradiction dans les "systèmes soi-disant démocratiques
modernes : tous les cinq ans on demande à un peuple qui ne peut juger de rien (et auquel
d'ailleurs on enlève tout moyen de juger) de décider quels sont les meilleurs experts de la
chose publique"… ;
b) Elément formulé ainsi par Benjamin CONSTANT : "Tout ce que nous demandons à l'Etat,
c'est la garantie de nos jouissances". C'est l'idée du libéralisme individualiste évoqué plus
haut.
C- La démocratie comme dictature de la majorité
Sans refuser la démocratie, de nombreux penseurs ont mis en avant ses limites si elle n'est pas
encadrée par des règles de droit immuables. Au lendemain des expériences révolutionnaires
de la fin du XVIIIe siècle et des dérives de la Terreur ou du régime napoléonien en France,
Alexis de Tocqueville ou Benjamin Constant soulignèrent certains dangers de la démocratie.
Le philosophe franco-suisse Benjamin Constant est l'un des premiers à mettre en avant ce
risque dans ses Principes de politique (1806), tout en défendant la nécessité d'un régime
représentatif : « L'erreur de ceux qui, de bonne foi dans leur amour de la liberté, ont accordé à
la souveraineté du peuple un pouvoir sans bornes, vient de la manière dont se sont formées
leurs idées en politique. Ils ont vu dans l'histoire un petit nombre d'hommes, ou même un seul,
en possession d'un pouvoir immense, qui faisait beaucoup de mal ; mais leur courroux s'est
dirigé contre les possesseurs du pouvoir, et non contre le pouvoir même. Au lieu de le
détruire, ils n'ont songé qu'à le déplacer ». C'est entre autres pour cela qu'il défend une
démocratie censitaire, estimant qu'un minimum de propriété est nécessaire pour pouvoir
prendre part à la désignation des dirigeants de l'État.
Tocqueville, s'il considère la marche vers la démocratie comme irrésistible, note le risque à
accorder tous les pouvoirs au peuple ou à un organe représentatif. Ainsi, il écrit dans De la
démocratie en Amérique : « je regarde comme impie et détestable cette maxime, qu'en matière
de gouvernement la majorité d'un peuple a le droit de tout faire, et pourtant je place dans les
volontés de la majorité l'origine de tous les pouvoirs (…). Lors donc que je vois accorder le
droit et la faculté de tout faire à une puissance quelconque, qu'on appelle peuple ou roi,
démocratie ou aristocratie, qu'on l'exerce dans une monarchie ou dans une république, je dis :