la democratie : un mode de gouvernement perfectible

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LA DEMOCRATIE : UN MODE DE GOUVERNEMENT PERFECTIBLE
AOUT 2013
Introduction Sous chap.3
LA DEMOCRATIE : UN MODE DE GOUVERNEMENT PERFECTIBLE
-
Présenter les critiques faites à la démocratie ;
Présenter ses insuffisances ou tares
Présenter ses mérites.
INTRODUCTION
La démocratie n’est jamais ni parfaite ni entière. Karl Popper a même affirmé : « Le mot
démocratie désigne quelque chose qui n’existe pas ». Le propos est peut-être quelque peu
exagéré, mais il est vrai que la démocratie est un idéal. Car, pour certains, elle est une utopie,
pour d’autres, elle comporte simplement des insuffisances même si ses mérites ne peuvent
être occultés.
I- LA NEGATION DE LA DEMOCRATIE OU LA DEMOCRATIE COMME FICTION ou les
imperfections théoriques de la démocratie
Il s’agit là d’une critique purement théorique, d’une remise en cause de l’idée même de
démocratie. Elle est l’œuvre des auteurs.
A- LE Caractère factice de la « démocratie bourgeoise » : critique
marxiste
Parallèlement à la critique des droits de l'homme, Marx, et à sa suite les marxistes, dénoncent
ce qu'ils qualifient de démocratie bourgeoise pour son caractère factice1. L'égalité politique
des citoyens que les démocraties libérales prétendent établir et garantir serait contredite par le
rapport de domination entre la classe bourgeoise et prolétarienne. Ainsi, les courants
marxistes considèrent que dans une société capitaliste, l'égalité des citoyens est
principalement fictive et illusoire, et que les droits et libertés accordés aux individus sont, au
sein des démocraties libérales, non pas concrets et effectifs, mais simplement « formels ».
Cela, principalement en ce qu'ils ne contreviennent en rien aux inégalités économiques, qui se
répercutent comme inégalité d'accès au savoir et à l'information, empêchant ainsi le prolétariat
de réellement jouir des droits et libertés qui lui sont théoriquement accordés, mais donc
matériellement inaccessibles. Marx dénonce aussi la conception bourgeoise de la liberté qui
serait contenue dans la déclaration des droits de l'homme et du citoyen en ce qu'elle garantit la
propriété privée, y compris de moyens de production
« Les droits de l’homme, la liberté, ne repose pas sur les relations de l’homme avec l’homme
mais plutôt sur la séparation de l’homme d’avec l’homme. C’est le droit de cette séparation, le
droit de l’individu limité à lui-même. L’application pratique du droit de liberté, c’est le droit
de propriété privée. Mais en quoi consiste ce dernier droit ? « Le droit de propriété est celui
qui appartient à tout citoyen de jouir et de disposer à son gré de ses biens, de ses revenus, du
1
1. qui est fabriqué pour imiter des fleurs factices
2. qui manque de naturel [Remarque d'usage: peut-être péjoratif] Synonyme: forcé Synonyme: feint on voyait
bien que sa bonne humeur était factice
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fruit de son travail et de son industrie. » (Constitution de 1793, art. 16.) Le droit de propriété
est donc le droit de jouir de sa fortune et d’en disposer « à son gré », sans se soucier des autres
hommes, indépendamment de la société ; c’est le droit de l’égoïsme »
" La démocratie ce sera quand les cuisinières pourront être chefs d'Etat."
" La démocratie (bourgeoise), c'est la possibilité pour les opprimés de choisir, tous les quatre
ou cinq ans, leurs oppresseurs." LENINE
B- Le régime représentatif, une « oligarchie libérale » plutôt qu'une
démocratie, la délégation de souveraineté qu'implique la
représentation aboutit à une confiscation de pouvoir.
Certains penseurs contemporains, tels Cornelius Castoriadis ou Jacques Rancière considèrent
que les démocraties représentatives ne sont que pseudo-démocratiques, où le peuple est dans
les faits dépossédé du pouvoir politique effectif, qui est à leurs yeux détenu par une petite
minorité d'individus (oligarchie), constitué par les politiques (représentants), les experts ou
l'élite économique. Leur critique de la représentation possède une certaine filiation avec la
critique marxiste, mais diffère cependant sur un certain nombre de points.
ROUSSEAU est le premier auteur important à insister sur le fait qu'il n'y a pas de démocratie
représentative (dans "le Contrat Social"). "Sitôt que le service public cesse d'être la principale
affaire des Citoyens, et qu'ils aiment mieux servir de leur bourse que de leur personne, l'Etat
est déjà près de sa ruine. [..] Ils nomment des députés et restent chez eux." "Dans un Etat
vraiment libre les citoyens font tout avec leurs bras et rien avec leur argent. Loin de payer
pour s'exempter de leurs devoirs, ils payeraient pour les remplir eux-mêmes. […] je crois les
corvées moins contraires à la liberté que les taxes."
"La souveraineté […] consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se
représente point. […] Toute loi que le Peuple en personne n'a pas ratifiée est nulle. […] La
Loi n'étant que la déclaration de la volonté générale, il est clair que dans la puissance
Législative, le Peuple ne peut être représenté ; mais il peut et doit l'être dans la puissance
exécutive, qui n'est que la force appliquée de la Loi.".
Pour ROUSSEAU, le peuple, le corps des citoyens est le souverain ; le pouvoir législatif lui
appartient en exclusivité, la loi étant l'attribut de la souveraineté. La France, l'Angleterre, et
finalement presque toutes les nations, n'ont pas de lois, elles ont des décrets arbitraires
imposés par un pouvoir de facto.
"Pour vous, peuple moderne, vous n'avez point d'esclaves, mais vous l'êtes : vous payez leur
liberté par la vôtre. […] à l'instant qu'un Peuple se donne des représentants, il n'est plus libre "
ROUSSEAU cite une phrase latine traduite ainsi : "mieux vaut une liberté dangereuse qu'une
servitude tranquille".
"La vraie démocratie est la démocratie directe, la démocratie représentative n'est pas la
démocratie2." "[L'] élection de représentants durables, non révocables, constitue un transfert
du pouvoir politique […]. C'est donc une aliénation, une auto-expropriation du pouvoir
politique au profit d'une catégorie particulière."
2
On peut donc considérer que l'expression "démocratie représentative" contient une contradiction dans les
termes. Elle constitue un oxymore et une mystification de plus dans la société moderne, à côté du
"développement durable", du "capitalisme à visage humain", de la "guerre propre", de la "voiture écologique",
etc.
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Pour ARISTOTE, "le petit nombre est plus facilement corruptible que le grand", corruptible
signifiant "qui vise son propre intérêt et non celui de la collectivité". Pour CC, cette remarque
d'ARISTOTE s'applique à la catégorie particulière créée dans un système représentatif.
"Dans une démocratie représentative, le pouvoir de décider passe à un groupe particulier : la
collectivité ne décide plus, elle ne se gouverne plus, elle décide seulement qui va décider."
Surtout, le reproche fondamental que CC fait à la démocratie représentative, c'est qu'elle
détruit la participation.
"Nous héritons d'un long développement historique au terme duquel il est devenu habituel de
considérer les affaires communes et publiques comme la tâche d'une certaine catégorie de
professionnels que l'on contrôle vaguement par des élections tous les cinq ans, attendu que les
intérêts essentiels de la vie sont ailleurs". "On maintient un Etat séparé […], on tient pour
acquis que les citoyens ne peuvent ou ne veulent pas, sauf exception passagère, s'occuper des
affaires publiques, et en même temps on prétend fonder là-dessus un régime qui se réclame de
la souveraineté du peuple et qui se donne le nom de démocratie".
CC voit 2 raisons au "refus moderne de la démocratie directe", 2 éléments de l'imaginaire
politique moderne :
a) Elément selon lequel il y a des experts de la chose politique, auxquels le peuple délègue
son pouvoir ; qui conduit à une contradiction dans les "systèmes soi-disant démocratiques
modernes : tous les cinq ans on demande à un peuple qui ne peut juger de rien (et auquel
d'ailleurs on enlève tout moyen de juger) de décider quels sont les meilleurs experts de la
chose publique"… ;
b) Elément formulé ainsi par Benjamin CONSTANT : "Tout ce que nous demandons à l'Etat,
c'est la garantie de nos jouissances". C'est l'idée du libéralisme individualiste évoqué plus
haut.
C- La démocratie comme dictature de la majorité
Sans refuser la démocratie, de nombreux penseurs ont mis en avant ses limites si elle n'est pas
encadrée par des règles de droit immuables. Au lendemain des expériences révolutionnaires
de la fin du XVIIIe siècle et des dérives de la Terreur ou du régime napoléonien en France,
Alexis de Tocqueville ou Benjamin Constant soulignèrent certains dangers de la démocratie.
Le philosophe franco-suisse Benjamin Constant est l'un des premiers à mettre en avant ce
risque dans ses Principes de politique (1806), tout en défendant la nécessité d'un régime
représentatif : « L'erreur de ceux qui, de bonne foi dans leur amour de la liberté, ont accordé à
la souveraineté du peuple un pouvoir sans bornes, vient de la manière dont se sont formées
leurs idées en politique. Ils ont vu dans l'histoire un petit nombre d'hommes, ou même un seul,
en possession d'un pouvoir immense, qui faisait beaucoup de mal ; mais leur courroux s'est
dirigé contre les possesseurs du pouvoir, et non contre le pouvoir même. Au lieu de le
détruire, ils n'ont songé qu'à le déplacer ». C'est entre autres pour cela qu'il défend une
démocratie censitaire, estimant qu'un minimum de propriété est nécessaire pour pouvoir
prendre part à la désignation des dirigeants de l'État.
Tocqueville, s'il considère la marche vers la démocratie comme irrésistible, note le risque à
accorder tous les pouvoirs au peuple ou à un organe représentatif. Ainsi, il écrit dans De la
démocratie en Amérique : « je regarde comme impie et détestable cette maxime, qu'en matière
de gouvernement la majorité d'un peuple a le droit de tout faire, et pourtant je place dans les
volontés de la majorité l'origine de tous les pouvoirs (…). Lors donc que je vois accorder le
droit et la faculté de tout faire à une puissance quelconque, qu'on appelle peuple ou roi,
démocratie ou aristocratie, qu'on l'exerce dans une monarchie ou dans une république, je dis :
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là est le germe de la tyrannie, et je cherche à aller vivre sous d'autres lois. Ce que je reproche
le plus au gouvernement démocratique, tel qu'on l'a organisé aux États-Unis, ce n'est pas,
comme beaucoup de gens le prétendent en Europe, sa faiblesse, mais au contraire sa force
irrésistible ». À cette dérive d'une « démocratie jacobine », il oppose la « démocratie
libérale », respectueuse des individus.
John Stuart Mill, qui avait lu Tocqueville, développe cette idée dans le chapitre introductif de
son ouvrage De la liberté : « Aussi range-t-on maintenant, dans les spéculations politiques, la
tyrannie de la majorité au nombre de ces maux contre lesquels la société doit se tenir en
garde ».
Ces remarques ont été reprises ultérieurement par le philosophe Friedrich Hayek, en
particulier dans La Constitution de la liberté
D- LA NEGATION DE LA DEMOCRATIE DIRECTE : INCAPACITE DU PEUPLE A
GOUVERNER, IGNORANCE ET INEXPERIENCE DES MASSES
Platon fut le premier à développer une analyse et théorie importante visant à dénoncer la
démocratie, en l’occurrence la démocratie athénienne, au sein de laquelle il vécut. Sa critique
ne vise donc pas à proprement parler ce qu'aujourd'hui nous avons coutume de désigner
comme régime démocratique (régime représentatif et libéral). Son opposition au partage du
pouvoir politique entre tous les citoyens s’appuie sur l'idée que pour gouverner, il faut une
certaine sagesse et un certain savoir – plus précisément, avoir accédé à la connaissance des
Idées du Vrai, du Juste et du Bien. Selon lui, les simples citoyens, ignorant de la Vérité et
réfléchissant surtout en fonction de leurs intérêts particuliers, ne sauraient diriger à bien la
cité, et par conséquent le pouvoir du peuple ne peut que conduire celle-ci vers la corruption. Il
défend ainsi au contraire l'idée que seuls devraient gouverner des philosophes rois, ou des rois
philosophes.
D'une certaine façon, cette idée de l'incapacité du peuple à diriger les affaires publiques et à
légiférer se retrouve plus tard chez d'autres penseurs occidentaux, aux États-Unis comme en
France. Le président américain Thomas Jefferson affirmait à la fin du XVIIIe siècle : « Il y a
une aristocratie naturelle, fondée sur le talent et la vertu, qui semble destinée au
gouvernement des sociétés, et de toutes les formes politiques, la meilleure est celle qui
pourvoit le plus efficacement à la pureté du triage de ces aristocrates naturels et à leur
introduction au gouvernement ».
De la même manière, John Adams et James Madison aux États-Unis, ou Emmanuel-Joseph
Sieyès ou Montesquieu en France, expriment clairement leurs critiques envers l'idée d'une
démocratie directe, lui opposant les avantages d'un régime représentatif, qu'ils concevaient
donc comme une alternative à la démocratie plutôt que comme son équivalent.
II- LES IMPERFECTIONS ou insuffisances3 DECOULANT DE LA PRATIQUE DE LA
DEMOCRATIE OU LA CRISE DE LA Démocratie
3
Point faible ou imparfait (de quelque chose ou de quelqu'un)
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La Démocratie est en crise dans nos sociétés occidentales. La désaffection vis-à-vis du
militantisme, aussi bien politique que syndical, l'absence de véritable débat, la distance entre
les décideurs et les citoyens, le retour à la sphère privée, le caractère fantoche4 des assemblées
délibératives, les élections "spectacles5", la langue de bois, la corruption…, entre autres, sont
autant de signes de cette crise.
La démocratie est fragile. Elle est sans cesse à défendre et à consolider, comme en témoignent
aujourd'hui des sujets aussi importants que le cumul des mandats électifs ou la corruption
dans les partis politiques ; car la démocratie ne peut s'accommoder de la concentration de
tous les pouvoirs entre les mains de quelques « spécialistes » de la politique ni du
détournement de l'argent public à des fins privées ou politiques. Une autre question, peut-être
encore plus grave, est celle de l'indépendance des juges à l'égard du pouvoir : les juges sont
les garants des libertés et de l'égalité devant la loi ; si un gouvernement peut ralentir ou
étouffer un procès, c'est que la démocratie ne fonctionne pas encore parfaitement.
A- Les insuffisances liées au principe d’égalité et de participation
Dans quelle mesure les démocraties respectent le principe de l’égalité et permettent à leurs
citoyens d’influer sur les décisions est un autre point qui les différencie fortement. Les plus
démunis peuvent avoir plus de difficultés à se faire entendre. Les femmes, moins présentes
sur la scène politique, peuvent avoir moins de possibilités de peser sur les décisions, même
sur celles qui les concernent tout spécifiquement. Certains groupes sociaux, comme les
enfants et les travailleurs étrangers, peuvent ne pas avoir le droit de vote. Dans le même
temps, certains peuvent avoir le sentiment que les règles leur sont imposées par des
représentants élus qui ne relaient pas leurs intérêts. Où sont alors les principes démocratiques
fondamentaux ? Dans quelle mesure pouvons-nous nous sentir « propriétaires » des lois et des
décisions de nos gouvernements ?
C’est dire que la représentation des minorités, notamment celles qui souffrent d’exclusion, est
une faiblesse de la démocratie moderne. Thomas Hammarberg, Commissaire européen aux
droits de l’homme, déclarait récemment que la pauvreté était un fléau pour ces millions
d’individus…
« … ceux qui sont déplacés ; ceux qui n’ont pas les moyens de prendre un avocat ; ceux qui se
heurtent à des barrières linguistiques lorsqu’ils recherchent de l’aide ; ceux qui subissent
l’oppression de leur propre groupe culturel ou qui sont étouffés entre deux modes de vie ;
ceux qui vivent dans la clandestinité et craignent d’être exposés ; ceux qui sont isolés par leur
handicap, et ceux qui ont tout perdu et sont trop fragiles pour repartir de zéro ; ceux qui
appartiennent à des minorités et sont la cible des xénophobes et des homophobes. »
Dans une société où les gouvernements sont élus par la majorité et où les systèmes électoraux
donnent tous les pouvoirs au gagnant, il est tout particulièrement difficile pour les minorités
4
Qui a un rôle de représentation contrôlé par une autorité extérieure et qui ne possède aucun pouvoir effectif
(péjoratif) gouvernement fantoche • un président fantoche
5
Dès les premiers pas de la Révolution, un certain nombre d'auteurs énoncent l'idée, reprise par d'autres depuis,
qu'il faut distinguer un système politique représentatif et la démocratie. Non seulement l'élection n'est pas la
garantie de la démocratie, mais elle peut même l'assassiner. Ne considère-t-on pas aujourd'hui que le premier
geste démocratique dans un pays est d'organiser des élections libres? Justement, les exemples sont nombreux
pour montrer qu'il y a dans ce geste un aspect plus symbolique, voire hypocrite, qu'une marque concrète de la
démocratisation.
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de prétendre à une représentation adéquate. La sensibilisation à l’égalité et à l’inclusion
sociale des minorités est donc une clé de la gouvernance démocratique.
B- LES insuffisances concernant LA LIBERTE DE CHOIX
Les représentants ne sont pas élus, mais se font élire. Ce n'est pas seulement une subtilité de
langage. L'électeur ne choisit pas son représentant, il vote pour un candidat déjà
présélectionné par des appareils dont le caractère démocratique est très souvent contestable,
selon des critères plus ou moins occultes. Le multipartisme qui pourrait faire contrepoids à ce
défaut est aujourd'hui réduit dans presque tous les pays à un bipartisme où le plus souvent il
ne passerait pas une feuille de papier à cigarette entre les options politiques importantes des
deux groupes en présence. La situation américaine qui a servi d'exemple est particulièrement
éclairante en ce domaine, mais l'expérience française d'alternance des dernières années n'a pas
vraiment été un contre-exemple. L'effet de cette situation c'est, aux Etats-Unis, un taux
d'abstention dépassant les 50% et en France, un vote protestataire : plus de 40% des voix se
sont portées sur des candidats hors des "partis de gouvernement" aux dernières élections
présidentielles.
Il faut ajouter que tous les représentants n'ont pas le même poids. Les grands élus, autrement
dit les personnalités politiques qui se font entendre et qui ont de véritables responsabilités, se
font très souvent élire après avoir eu des responsabilités (la caste politique lance
médiatiquement ou confie une responsabilité ministérielle à une personnalité qui va ensuite se
faire "légitimer" démocratiquement en se présentant dans une circonscription ou une mairie
taillée
sur
mesure).
Enfin, l'analyse socioprofessionnelle de ces personnalités politiques montre une grande
homogénéité du recrutement. Inutile d'insister sur le nombre d'énarques. Certains auteurs,
comme Bourdieu, parlent de "noblesse d'Etat", où l'élection sert en fait de paravent
démocratique à une aristocratie républicaine qui, en fait, se coopte et se
C- la confiscation technocratique6 du pouvoir
Les instances délibératives ne sont plus, dans le meilleur des cas que des chambres
d'enregistrement de décisions prises ailleurs par des organismes non représentatifs. La
séparation des pouvoirs, inscrite dans la Déclaration des Droits de l'Homme, se transforme en
une concentration du pouvoir entre les mains de technocrates sans le moindre mandat électif
et hors de tout contrôle démocratique ; l'homme politique n'étant plus que le "commercial"
chargé de promouvoir la décision auprès des médias. Et comme la technostructure souhaite
que ce travail soit correctement fait, elle le prend en son sein. Et pour s'assurer qu'il ne prenne
pas trop d'initiative, la langue de bois servira à cacher (mais en fait à révéler) que le
responsable politique n'est que le porte-parole, pas toujours au fait du dossier, qui a été étudié
en dehors de lui. Si, par malheur la mesure prise tourne mal, la technostructure sera protégée
et c'est l'homme politique qui sera responsable ou coupable, ou…le contraire…enfin bref, qui
paiera. Cette situation entraîne une autre déviation.
En ce début de XXIe siècle, l’inquiétude générée par l’état de la démocratie est universelle.
Dans beaucoup de démocraties européennes, l’insatisfaction et le scepticisme politiques se
généralisent, tout comme l’impression que l’élite se permet de faire fi de la volonté du peuple.
6
Spécialiste (d'un domaine) qui exerce un pouvoir politique ou administratif et donne la priorité aux aspects
techniques des problèmes en négligeant les réalités humaines
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Certains développements antinomiques de la démocratie, comme les inégalités sociales aigues
et la corruption, génèrent une frustration et une colère qui risquent d’alimenter un populisme
soutenu par les médias. L’impuissance et le découragement ressentis par les citoyens ne les
incitent guère à s’impliquer plus activement dans la société.
Malgré ces tares7, la démocratie reste et demeure du fait de ses mérites.
III- LA DEMOCRATIE : un Facteur d’eMancipatiOn de l’HOMMe
Le fondement8 de la démocratie est l'émancipation du genre humain. En effet, la démocratie
promeut entre autres l’égalité, fait jaillir la vérité du fait de la discussion qu’elle instaure, évite
les affrontements car canalise les revendications…
A- la déMOcratie institue l’égalité, sOurce de prOgrès
Hier, on accordait le droit de vote aux femmes (France, 1944) ; aujourd'hui, on souhaite
imposer un nombre égal de femmes et d'hommes parmi les représentants du peuple.
Hier, on abaissait l'âge de la majorité civile à 18 ans (France, 1974) ; aujourd'hui, on parle de
donner le droit de vote aux jeunes de 16 ans pour les élections municipales.
Hier, on admettait que les ressortissants d'autres pays de l'Union européenne votent sur le
territoire français pour les élections européennes ou municipales ; aujourd'hui, certains
plaident pour qu'on permette à tous les émigrés de voter aux élections municipales.
Le combat pour la démocratie durera tant que les droits de l'homme ne seront pas respectés
partout et par tous. La pauvreté, le sexe, la religion… ne doivent donc empêcher personne de
prendre part à la vie de la cité.
Les autres systèmes violent ces deux principes, parce que le pouvoir y est détenu par une
personne ou une classe sociale qui prend les décisions pour le reste de la population. Par
exemple, dans une oligarchie, le pouvoir est entre les mains d’un petit groupe de privilégies
qui se distinguent des autres par leur richesse, leur naissance ou leurs pouvoirs militaires.
Dans une ploutocratie, le gouvernement est contrôlé par les plus riches ; dans une dictature
par un seul individu tout puissant. Ces formes de gouvernement ne respectent ni l’autonomie
individuelle ni l’égalité.
B- par la discussiOn qu’elle instaure, la déMOcratie Fait jaillir la
vérité et fait primer la non-violence
La démocratie incite à la réflexion sur ce qui est nécessaire. Elle est donc un instrument
d'éducation des citoyens (y compris des gouvernants). La réflexion en question s'effectue sous
la forme de la discussion. En effet, la discussion forme, selon le principe de l'Etat moderne,
ce qu'Eric Weil appelle l'accès à la décision rationnelle.
La discussion, pour Eric Weil, est le fondement idéal9 du système démocratique. Elle suppose
que tout citoyen est considéré comme capable de partager les responsabilités du
gouvernement et cela comme gouvernant en puissance. En effet, l'objectif de la discussion est
7
1. défaut grave (d'une personne) (familier) [Remarque d'usage: souvent humoristique] Exemple : elle n'aime
pas nager: quelle tare!
2. défaut intrinsèque (d'un groupe ou d'un système) (soutenu) [Remarque d'usage: souvent au pluriel]
Exemple : les tares de la société
8
Raison valable ou réelle Synonyme: justification Synonyme: motif
9
M. Troper, Sur le concept d'Etat de droit, Paris, Droits, 1992, n°15,
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de faire éclater la vérité car « la discussion est le tamis de la vérité et son but ne doit pas être
la victoire, mais l'amélioration10».
Enlever à l'homme la liberté de discussion, c'est lui arracher manu militari son être d'homme.
Le droit de discussion n'est effectif qu'en passant au droit à la discussion. Le droit à la
discussion est un devoir civil et politique. Lorsqu'un chef d'Etat ou un gouvernement retire à
un individu le droit à la parole, il lui enlève de fait le droit à la discussion et
fondamentalement la liberté de pensée. Car penser, c'est réfléchir et confronter sa pensée à
d'autres pensées. Une pensée n'est valide que si elle accepte de passer par le creuset de la
critique, de la discussion et de la loi que s'est fixée l'individu.
Le problème du droit à la discussion conduit à celui de la connaissance. On discute pour
connaître, ou bien, quand on connaît on doit soumettre sa connaissance à la critique et aux lois
de sa propre raison. L'individu doit se convaincre que, pour sortir de l'erreur ou pour être utile
à sa société, il a besoin de jouir pleinement de sa liberté de discussion qui est un droit naturel
dont il devrait jouir indépendamment de l'apport spécifique de la société pour se critiquer,
pour prendre distance par rapport au vécu immédiat, et de sa liberté à la discussion relevant
des droits politiques. Cette liberté à la discussion est en fait le droit à la libre expression de la
pensée et la garantie de ce droit politique implique la tolérance, le respect de la pensée et de la
manière d'être d'autrui ainsi que du respect de l'ordre public50(*).
Si le respect de la dignité de la personne, de sa liberté responsable et de la justice à lui rendre
en tout domaine est une référence cardinale, on comprend alors que la démocratie implique
une manière de résoudre les conflits et les tensions sociales qui tentera d'écarter le plus
possible l'usage de la violence, de la séduction, de la tromperie, de la manœuvre qui écrase ou
terrorise. Autrement dit, la démocratie ne va pas sans une forte dose de non-violence. Plutôt
que de dresser les uns contre les autres ou d'écraser l'adversaire, la voie démocratique cherche
mille et un moyens de laisser s'exprimer les revendications, ce que Machiavel appelait « les
humeurs d'une société » ; et pour ce faire, elle s'ingénie à mettre en place une pluralité de
canaux permettant l'expression publique de ces humeurs : existence de partis, de syndicats ou
clubs de pensée, presse pluraliste, acceptation de la manifestation des désaccords, y compris
par la grève, en tout cas par des expressions publiques fortes, etc. Elle cherche à les laisser
s'exprimer pour tenter, au sein de ce concert de protestations et de réclamations qui constitue
le surprenant théâtre quotidien de la vie démocratique, de trouver un chemin de solution et de
parvenir à des accords satisfaisants. Autrement dit, par rapport à la lutte ou à la violence
physique, la démocratie privilégie le débat, la discussion, l'échange d'arguments, ce qui est
aussi une façon de faire prévaloir la raison sur la passion, ou plutôt de chercher à travers
l'expression des passions ou des indignations ce qui peut encore faire tenir ensemble ceux-là
mêmes qui s'opposent.
C'est ce qui permet à Eric Weil d'affirmer que la démocratie entretient un rapport essentiel
avec la vérité et la raison. Elle présuppose... qu'individus et groupes aient des opinions
différentes et des intérêts divergents, mais qu'il existe toujours une voie pour résoudre les
conflits si toutes les parties en cause déclarent ouvertement ce qu'elles visent et ce qu'elles
veulent et se soumettent à l'obligation de ne proposer que des solutions de portée universelle.
Utopie sans doute à bien des égards, mais elle entraîne à parier plutôt sur le débat raisonnable
que sur la violence, sur la confrontation d'arguments plutôt que sur l'échange de coups ou de
10
Maurice Maloux, Dictionnaire des proverbes, sentences et maximes, Larousse-Paris Montparnasse et 1960, p.
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pavés. Par là encore une forme de non-violence constitue bien une valeur de référence. Et
cette recherche de non-violence imposera toujours aussi que les « vainqueurs », qui ne sont
jamais que des vainqueurs relatifs et temporaires (ainsi dans une élection) aient le souci de
respecter la minorité, et non pas de jouer à ceux qui incarneraient seuls la raison, le bon droit
ou la justice. Ils devront donc aussi tenir compte des frustrations de l'opposition et continuer à
tendre l'oreille à ses revendications. C'est bien pourquoi l'exercice de la démocratie passe par
la recherche du compromis. Le compromis est en effet lié à une modestie de la raison
démocratique, osons le mot : à un sain relativisme qui s'oppose à toute tyrannie d'une vérité
supposée connue ou détenue par certains. Certes il est des compromis qui sont des
compromissions, des lâchetés, des fuites devant les sacrifices nécessaires, des alibis pour les
responsables incapables de prendre les mesures amères qui s'imposeraient. Mais ces
fléchissements ne doivent pas compromettre la recherche du compromis, et ils le doivent
d'autant moins que tel est bien le régime ordinaire et nécessaire de la vie démocratique, lié à
sa philosophie.
Eric Weil défend encore avec force l'idée selon laquelle toute démocratie suppose une
philosophie précise de la vérité. Il écrit à ce sujet :
Personne, proclame toute démocratie, ne possède la totalité de la vérité, et personne n'est
absolument « objectif » (ou ne pense d'une manière totalement « universelle ») ; il y'a de la
vérité et elle est le résultat de cette confrontation non-violente d'idées et d'intérêts que l'on
appelle une discussion. Personne n'est entièrement « raisonnable », mais il y'a une différence
significative entre raison et violence, entre hommes et groupes qui veulent convaincre, et
hommes et groupes qui pensent que la victoire justifie la violence51(*)
Le relativisme dont on accuse souvent la démocratie n'est pas un refus de la vérité, mais il a
partie liée avec la perception que toute vérité pratique est le fruit de débats et de
confrontations entre points de vue opposés, tout autant que tentative de parvenir à des accords
qui ne seront que provisoires, précaires, susceptibles d'être remis en cause, soumis à révision.
Et cela implique bien une conception non dogmatique de la vérité, mais une conception fort
précise et fort honorable. Il s'agit moins alors de croire que la décision prise ou le compromis
atteint répondent à la vérité absolue, mais d'admettre qu'ils cernent au plus près ou au moins
mal le bien qui nous est accessible ici et maintenant. Ces valeurs de référence essentielles à
l'exercice de la démocratie ne présupposent pas un total accord sur les fins entre les citoyens,
elles sont certes liées à un régime de la raison et à un sens de la dignité de l'homme, mais elles
ne disent rien sur le destin ultime de l'humanité.
C- La démocratie favorise le respect des décisions
Le terme de démocratie fait référence à un type de société particulier, de même qu’a une
forme de gouvernement particulier. Une société démocratique offre la méthode de
gouvernance la plus juste pour la plupart des citoyens et la plus égalitaire, la majorité des
citoyens y jouant un rôle actif plutôt que passif.
Elle est soumise à un impératif moral, celui de protéger et de promouvoir les droits de
l'homme de chaque individu, de chaque groupe et de chaque communauté de la société. Et,
parce qu’une société démocratique tente en permanence de résoudre les problèmes sociaux
dans l’intérêt du plus grand nombre, les décisions prises sont les plus susceptibles d’être
respectées par les individus.
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LA DEMOCRATIE : UN MODE DE GOUVERNEMENT PERFECTIBLE
AOUT 2013
CONCLUSION GENERALE
En raison de ses fondements et malgré ses tares, la démocratie a su résister à l’usure du temps.
Si elle est notamment appuyée sur le libéralisme, elle est aujourd’hui le meilleur garant des
libertés fondamentales.
BIBLIOGRAPHIE
Les
caractéristiques
de
l’Etat
démocratique,
http://www.memoireonline.com/10/06/217/m_analyse-etat-democratique-philosophiepolitique-eric-weil16.html
Repères juniors, La démocratie
Les principes de la démocratie, http://www.cap-concours.fr/enseignement/preparer-lesconcours/concours-de-crpe/les-principes-de-la-democratie-mas_civ_03
Jean-Claude COIFFET,
http://ccbx.free.fr/
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Démocratie
représentative
et
démocratie
participative,
LA DEMOCRATIE : UN MODE DE GOUVERNEMENT PERFECTIBLE
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AOUT 2013
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