approches modernes en cardiologie

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ISSN 0769-0819
FM
N°386 – NOVEMBRE 2015
APPROCHES MODERNES
EN CARDIOLOGIE
À PARTIR DE CAS CLINIQUES
Coordination : Jean-Louis Gayet
INFARCTUS
MYOCARDIQUE
ET PRÉVENTION
DE L’ISCHÉMIE
DE REPERFUSION
C. DE SAINT-ETIENNE,
D. ANGOULVANT (TOURS)
R ÉPARATION
ENDOVASCULAIRE
D’UN ANÉVRYSME DE
L’AORTE ABDOMINALE
PH. CHATELARD (LYON)
REMPLACEMENT
VALVULAIRE MITRAL
PERCUTANÉ
D. HIMBERT (PARIS)
www.lecardiologue.com
cardiologue
presse
DBRIL 7326 - 2014/10
14/09/61958462/PM/012
En association avec l’acide acétylsalicylique (AAS), dans la prévention des évènements
athéro-thrombotiques chez les patients adultes ayant un syndrome coronaire aigu (angor
instable, infarctus du myocarde sans sus-décalage du segment ST [AI/NSTEMI] ou infarctus
du myocarde avec sus-décalage du segment ST [STEMI]), incluant les patients traités
médicalement et ceux traités par une intervention coronaire percutanée (ICP) ou un pontage
aorto-coronaire (PAC).
Les mentions légales sont disponibles à l’adresse suivante :
http://base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr
N°386 – NOVEMBRE 2015
EDITORIAL
■■Jean-Louis Gayet
DE PETITS CAS CLINIQUES
ET DE GRANDS PAS
POUR LA CARDIOLOGIE
La finalité de la présentation de cas cliniques a considérablement évolué au fil des ans. Cette forme
rédactionnelle s’est surtout développée à partir de l’entre-deux-guerres. Les cas de l’époque étaient
souvent des raccourcis entre un tableau clinique mystérieux, souvent réduit à des descriptions sémiologiques détaillées, faute d’examens complémentaires adaptés et fiables, et des données histopathologiques qui n’apportaient pas toujours la solution. Ces cas cliniques représentaient alors une contribution
importante à la diffusion de la connaissance des maladies. Le cas clinique a souvent, par la suite, permis
de décrire des pathologies rares ou des modes de présentation inhabituels (« moutons à 5 pattes »),
de ceux auxquels on risque souvent de ne pas penser spontanément. Certains y ont trouvé des sujets
de thèse ou l’opportunité de voir leur nom apparaître, comme auteur, dans des revues plus ou moins
prestigieuses…
Si ces aspects de la présentation de cas cliniques perdurent encore un peu, ils sont surtout devenus
aujourd’hui, sur des bases plus scientifiques et élaborées, de remarquables outils de formation et, désormais, de contrôle des connaissances.
Les trois cas cliniques présentés dans ce numéro en sont une bonne illustration et le mérite de leurs
auteurs doit être souligné. Le cas d’un syndrome coronaire aigu, présenté par C. Saint-Etienne, illustre à
la fois les nouvelles possibilités techniques des cardiologues interventionnels (ici l’OCT) et l’importance
du traitement médical qui est, dans certains cas, une alternative à une mauvaise indication de traitement
interventionnel. L’approche de P. Chatelard illustre bien, pour un anévrysme de l’aorte abdominale, la
nécessité d’anticiper les difficultés spécifiques auxquelles expose le traitement endovasculaire. Enfin, si
certaines procédures interventionnelles comme le remplacement valvulaire percutané semblent entrer
dans la routine, D. Himbert nous montre parfaitement les difficultés de cette procédure dans d’autres
contextes que celui du traitement du RA dégénératif.
Il y a longtemps que le réflexe « oculo-sténo-dilatateur » a cessé de ternir l’image des cardiologues interventionnels et nous avons la preuve ici qu’un pas encore plus grand est en train d’être franchi.
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
III
Prévention de l’accident vasculaire cérébral (AVC) et de l’embolie systémique (ES) chez les patients adultes atteints de fibrillation atriale
non valvulaire (FANV) et présentant un ou plusieurs facteur(s) de risque tels que : antécédent d’AVC ou d’accident ischémique
transitoire (AIT) ; âge ≥ 75 ans, insuffisance cardiaque (classe NYHA ≥ II), diabète, hypertension artérielle.
Compte tenu de l’absence d’antidote et en l’absence de possibilité de mesure du degré d’anticoagulation en pratique courante, la
prescription des anticoagulants oraux non AVK n’est préconisée qu’en 2ème intention, à savoir dans les cas suivants :
- chez les patients sous AVK, mais pour lesquels le maintien de l’INR dans la zone cible (entre 2 et 3) n’est pas habituellement assuré
malgré une observance correcte ;
- chez les patients pour lesquels les AVK sont contre-indiqués ou mal tolérés, qui ne peuvent pas les prendre ou qui acceptent mal
les contraintes liées à la surveillance de l’INR (1).
VOYAGE
EN ITALIE
MARIAGE
DE MON FILS
MON
ANNIVERSAIRE
ALLER
AU THÉÂTRE
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1- HAS. Commission de la Transparence. Avis. 17 décembre 2014. www.has-sante.fr.
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LA CONFIANCE
VIENT DE
L’EXPÉRIENCE
N°386 – NOVEMBRE 2015
SOMMAIRE
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APPROCHES MODERNES
EN CARDIOLOGIE
À PARTIR DE CAS CLINIQUES
Coordination : Jean-Louis Gayet
EDITORIAL
IV
DE PETITS CAS CLINIQUES ET DE GRANDS PAS
POUR LA CARDIOLOGIE
Jean-Louis Gayet
VI
INFARCTUS MYOCARDIQUE ET PRÉVENTION
DE L’ISCHÉMIE DE REPERFUSION
C. de Saint-Etienne, D. Angoulvant. Tours
XITRAITEMENT
ENDOVASCULAIRE DES AAA :
UN EXERCICE D’ANTICIPATION
Ph. Chatelard. Lyon
XVI
A TOUTE CHOSE, MALHEUR EST BON !
D. Himbert. Paris
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Mensuel réservé au corps médical
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Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
V
DE PETITS CAS CLINIQUES ET DE
GRANDS PAS POUR LA CARDIOLOGIE
PARTIE
1
I NFARCTUS MYOCARDIQUE
ET PRÉVENTION DE L’ISCHÉMIE
DE REPERFUSION
C. de Saint-Etienne, D. Angoulvant. Tours
MONSIEUR H., ÂGÉ DE 37 ANS, A POUR FACTEURS DE RISQUE CARDIOVASCULAIRES UN TABAGISME ACTIF ET UNE
HÉRÉDITÉ CORONARIENNE. IL N’A PAS D’ANTÉCÉDENT CARDIOVASCULAIRE NOTABLE.
Le 22 février 2014 à midi, il présente une douleur rétrosternale irradiant dans les deux bras et cédant
spontanément en quelques minutes. Il décide de consulter de lui-même aux urgences générales vers 16h00.
A l’admission, la douleur a complètement disparu, la fréquence cardiaque est régulière à 50/min, la tension
artérielle est à 130/70 mmHg. Il n’y a pas de signe d’insuffisance cardiaque.
L’ECG est disponible en Figure 1.
L
’ETT montre une FEVG conservée à 60 % avec une discrète hypokinésie antéro-septo-basale. Il n’y a pas de valvulopathie significative. Les cavités droites ne sont pas dilatées avec une bonne
fonction systolique VD. Le reste du bilan montre une élévation de la
troponine à 0,18 mg/L avec une créatininémie à 78 mmol/L.
QUESTION 1. Vous disposez sur site d’un plateau technique avec
salle de cathétérisme cardiaque. Pensez-vous qu’il existe une indication à réaliser une coronarographie ? Si oui, dans quel délai ?
Selon les recommandations de l’ESC 2015, [1] la prise en charge des
patients admis pour SCA ST- doit comporter une évaluation du pronostic par le score de GRACE et GRACE 2. Le score de GRACE est
calculé à 66 et le score GRACE 2 estime la mortalité à 1 an à 0,6 %.
Il s’agit donc d’un risque individuel bas (figure 2).
Il existe une indication à la réalisation d’une coronarographie
compte tenu d’une douleur thoracique suspecte chez une homme de
37 ans avec élévation enzymatique, celle-ci doit être réalisée dans
les 72 h (figure 3).
Dans le cas clinique présent, le patient ayant consulté un samedi,
la coronarographie a été réalisée le lundi matin soit à 48 h de la
douleur.
FIGURE 1
ECG à l’admission
VI
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
FIGURE 2
Death/MI
Time
1 year
% risk (score)
0,2
0,6-0,7 (43)
0,6-0,7
1,1
% risk (score)
3,0
Histograms
Not available
Not available
Graph
Graph
Pateints (n)
Death
Time
In hospital
6 months
1 year
3 years
Histograms
Graph
4000
80 %
3000
60 %
2000
40 %
1000
20 %
Risk of death at 1 year
Calcul du score GRACE 2 chez ce patient à partir du site www.gracescore.org. Le tableau de droite montre les taux de mortalité hospitalière,
à 6 mois, 1 an et 3 ans et le taux de mortalité/infarctus du myocarde à 1 an. Le graphique de gauche place le risque de décès à 1 an chez ce
patient par rapport à une population GRACE. Un taux de O,6 % correspond donc à un risque faible.
0%
0
Distribution of risk in GRACE population
Area plot: distribution (log scale) of risk based on the entire GRACE
population of 102 341 patients.
Line: risk of death or death/MI
Vertical bar: individual risk of death of death/MI.
• low – • intermediate – • high
FIGURE 3
D’après les recommandations de l’ESC 2015. Stratégie de traitement et des délais des patients présentant un SCA sans élévation du segment
ST selon la stratification du risque.
Symptoms Onset
First medical contact
NSTE-ACS diagnosis
PCI center
EMS or Non-PCI center
Therapeutic strategy
Risk stratification
Immediate transfer to PCI center
Very high
Very high
Same-day transfer
High
High
Transfer
Intermediate
Low
Immediate
Invasive
(< 2 hr)
Early
Invasive
(< 24 hr)
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
Invasive
(< 72 hr)
Transfer
optical
Intermediate
Low
Non-Invasive
testing if
appropriate
EMS = emergency medical services
PCI = percutaneous coronary intervention
VII
DE PETITS CAS CLINIQUES ET DE
GRANDS PAS POUR LA CARDIOLOGIE
QUESTION 2. Voici une image extraite de cet examen (figure 4).
FIGURE 5
Coupe OCT au niveau de l’IVA moyenne
FIGURE 4
Coronarographie en incidence caudale.
FIGURE 6
Coupe OCT au niveau de l’IVA proximale
Comment l’interprétez-vous ? Quelle prise en charge proposez-vous ?
Le segment proximal de l’IVA (flèche) est le siège d’une lésion hétérogène possiblement thrombotique. Il existe aussi un doute sur une
dissection associée avec une image ressemblant à un flap intimal.
A ce stade 2 prises en charge sont possibles :
■■ angioplastie avec thromboaspiration et mise en place d’un
stent pour le traitement de la dissection éventuelle. Cette prise en
charge est cependant à risque emboligène important vu la taille du
thrombus ;
■■ traitement médical par anticoagulation efficace et double anti-aggrégation plaquettaire. Cependant en cas de dissection coronaire,
cette prise en charge est à risque d’occlusion coronaire.
Dans le contexte une imagerie endocoronaire peut aider pour le
choix entre ces deux attitudes.
QUESTION 3. Une imagerie endovasculaire par technique
OCT a été réalisée. Comment interprétez-vous cette image
(figures 5 et 6) ?
L’imagerie OCT est en faveur d’un large thrombus plaquettaire occupant au moins 50 % de la lumière de l’IVA proximale et s’étendant
sur environ 4 cm jusque dans l’IVA moyenne. Par ailleurs, la paroi de
VIII
l’IVA visible ne semble pas atteinte d’athérome. Bien que la place de
l’OCT notamment dans la coronarographie en urgence reste encore
à définir, [3] ce cas clinique illustre bien son apport en montrant l’absence de dissection et le risque emboligène important compte tenu
d’un thrombus s’étendant jusque dans l’IVA moyenne ce qui n’était
pas visible en angiographie.
Vu le résultat de l’imagerie OCT, il est décidé, dans un premier
temps, d’une prise en charge médicale avec un traitement associant prasugrel, aspirine, enoxaparine curative, atorvastatine et
atenolol.
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
INFARCTUS MYOCARDIQUE ET PRÉVENTION DE L’ISCHÉMIE DE REPERFUSION
QUESTION 4. Un contrôle coronarographique est réalisé une
semaine plus tard avec une vérification par OCT. Comment
interprétez-vous ces images (figures 7, 8 et 9) ?
FIGURE 8
Coupe OCT au niveau de l’IVA moyenne
La coronarographie en figure 7 montre une diminution de l’image en
demi-teinte du segment proximale de l’IVA.
FIGURE 7
Contrôle coronarographique à J7
FIGURE 9
Coupe OCT au niveau de l’IVA ostiale.
Le contrôle OCT (figures 8 et 9) montre la persistance d’un thrombus
ayant nettement diminué en 7 jours. La figure 9 au niveau de l’ostium
de l’IVA montre une possible érosion de plaque (flèche) au sein d’une
plaque lipidique avec la présence d’un petit thrombus.
QUESTION 5. Pensez-vous qu’un traitement par angioplastie
± stenting aurait dû être réalisé à la phase aiguë ou lors du
contrôle à 7 jours ?
Bien que peu de données soient disponibles sur l’évolution à moyen/
long terme du traitement médical de ce type de lésion, le choix de
notre équipe, vu la bonne évolution au contrôle OCT, a été de poursuivre le traitement médical.
Cette attitude est soutenue par des travaux de recherche récents
comme l’étude de N. Amabile et al. [3] montrant la non-dangerosité
des OCT dans le contexte de phase aiguë et la régression du thrombus au contrôle OCT du 4e jour.
De la même manière, l’étude française SUPER MIMI évalue l’intérêt d’un traitement différé de la période aigue prothrombotique des
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
patients ayant un SCA. Dans cette cohorte de 115 patients environ
un tiers de ceux qui ont reçu un traitement médical ont vu la régression complète des lésions. Les résultats définitifs de cette étude sont
à paraître prochainement.
Concernant le patient de ce cas clinique, l’évolution a été favorable
avec un pic de troponine à 6,27 mg/L et une normalisation des
troubles de cinétique.
IX
DE PETITS CAS CLINIQUES ET DE
GRANDS PAS POUR LA CARDIOLOGIE
QUESTION 6. Un nouveau contrôle coronarographique a été réa-
Les figures 10 et 11 montrent une régression complète du thrombus
et une cicatrisation de la plaque responsable du SCA sans sténose
résiduelle. La figure 11 se situe au niveau de la bifurcation IVA-Cir-
conflexe, on peut voir au centre de la lumière un artefact de flux lié
à un défaut d’opacification par le produit de contraste de l’ensemble
de la lumière artérielle. L’endothélium de l’IVA visible apparaît sain.
Le traitement médical a donc été poursuivi.
Au 12e mois le prasugrel a été interrompu. Actuellement nous
sommes à 20 mois de suivi et aucun événement cardiovasculaire
n’est survenu.
FIGURE 10
FIGURE 11
Coupe OCT au niveau de l’IVA moyenne montrant une régression
complète du thrombus coronaire
Coupe OCT au niveau de la bifurcation IVA-CX. Disparition de l’image
d’érosion de plaque visible en figure 9 page précédente.
lisé à 6 semaines dont voici l’imagerie OCT. Comment analysezvous cette imagerie ? Quelle prise en charge proposez-vous ?
CONCLUSION
n La question du traitement du SCA après rétablissement ou en présence d’un flux TIMI 3 et d’une charge thrombotique importante est
débattue. Dans tous les cas une attitude au cas par cas éventuellement aidée par de l’imagerie OCT est une alternative possible à une angioplastie systématique. Dans le cas clinique présent une angioplastie à la phase aiguë de l’IVA proximale était à risque emboligène important
sans compter que la rupture de plaque se situait au niveau de l’ostium de l’IVA et donc difficile à couvrir par un stent sans déborder dans
la lumière du tronc commun. Pour ses raisons, le traitement médical semblait donc moins risqué qu’une angioplastie à la phase aiguë. Les
résultats de l’étude SUPER MIMI permettront d’apporter des éléments de réponses. A suivre…
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
[1] Authors/Task Force Members, Roffi M, Patrono C, Collet J-P, Mueller C, Valgimigli M,
et al. 2015 ESC Guidelines for the management of acute coronary syndromes in patients
presenting without persistent ST-segment elevation: Task Force for the Management of
Acute Coronary Syndromes in Patients Presenting without Persistent ST-Segment Elevation of the European Society of Cardiology (ESC). Eur Heart J. The Oxford University Press;
2015 Aug 29;ehv320.
[2] Authors/Task Force Members, Windecker S, Kolh P, Alfonso F, Collet J-P, Cremer J, et
al. 2014 ESC/EACTS Guidelines on myocardial revascularization: The Task Force on Myo-
X
cardial Revascularization of the European Society of Cardiology (ESC) and the European
Association for Cardio-Thoracic Surgery (EACTS)Developed with the special contribution
of the European Association of Percutaneous Cardiovascular Interventions (EAPCI). Eur
Heart J. 2014 oct 1;35(37):2541-619.
[3] Amabile N, Hammas S, Fradi S, Souteyrand G, Veugeois A, Belle L, et al. Intra-coronary thrombus evolution during acute coronary syndrome: regression assessment by
serial optical coherence tomography analyses. Eur Heart J Cardiovasc Imaging. The Oxford
University Press; 2015 Apr;16(4):433-40.
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
PARTIE
2
TRAITEMENT ENDOVASCULAIRE
DES AAA :
UN EXERCICE D’ANTICIPATION
Ph. Chatelard. Lyon
M. T. POS…, 67 ANS, A POUR ANTÉCÉDENTS CHIRURGICAUX UNE OSTÉOSYNTHÈSE DE L’OLÉCRANE DROIT
(PARÉSIE CUBITALE SÉQUELLAIRE). Il présente comme facteurs de risque cardiovasculaire, tabagisme (20 paquetsannée), HTA et dyslipidémie. Il présente une artériopathie chronique oblitérante des membres inférieurs pour
laquelle il a bénéficié d’une revascularisation par angioplastie endoluminale iliaque bilatérale avec stent (2007). Il
a aussi une myocardiopathie ischémique avec infarctus inaugural à 35 ans (topographie inférieure). Un angor par
lésions du territoire antéro-latéral a motivé une revascularisation (pontages mammaire interne de l’IVA et de la
circonflexe) en 2005. Il reste asymptomatique depuis cette revascularisation. Il s’est vu découvrir à cette époque,
lors d’un examen systématique (échographie de débrouillage), un anévrysme de l’aorte abdominale (AAA) sousrénale d’un diamètre de 35 mm).
L
a surveillance régulière montre une croissance lente de l’AAA qui
reste asymptomatique, mais dont la dimension échographique
est désormais de 53 mm de diamètre maximal avec anévrysmes des
artères iliaques communes (37 mm et 33 mm) (figure 1).
QUESTION 1. La surveillance de l’AAA vous semble–t-elle
rétrospectivement justifiée ?
L’aorte abdominale est considérée comme anévrysmale lorsque son
diamètre est augmenté de 50 % et atteint ainsi plus de 30 mm dans
l’un de ses diamètres (sagittal ou frontal). [1]
Si les taux de prévalence varient selon l’âge, le sexe et l’origine géographique, les facteurs de risque le plus souvent associés sont le sexe
masculin, le tabagisme et les antécédents familiaux d’AAA. [1,2] Si de
nombreuses variations sont rapportées, il est habituellement convenu de retenir une croissance moyenne annuelle de 2 mm à 3 mm
pour des AAA compris entre 30 et 55 mm de diamètre. A diamètre
plus important, la croissance devient plus rapide (Loi de Laplace), le
diabète pouvant avoir un rôle plutôt « protecteur » (Ca ++ ?) et le
tabac un rôle aggravant. [1,2]
La rupture constitue le risque essentiel et létal de l’AAA. Si le diamètre maximal de l’AAA constitue un facteur de risque indépendant
de rupture, il existe d’autres facteurs de risque comme le tabac, le
sexe féminin, l’HTA, la rapidité de croissance (> 5 mm par an) et
l’aspect sacciforme plutôt que fusiforme. [1,2]
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
FIGURE 1
Scanner abdominal
de M. T. POS…
XI
DE PETITS CAS CLINIQUES ET DE
GRANDS PAS POUR LA CARDIOLOGIE
QUESTION 2. Quelle est la place du dépistage des AAA dans
la prévention du risque de rupture?
Le dépistage est réalisé essentiellement par échographie. La surveillance en échographie-Doppler, avec mesures répétées du diamètre
de l’anévrysme, permet d’anticiper le risque de rupture. La sensibilité
et la spécificité sont proches de 100 %. La Société Française des Maladies Vasculaires [3] recommande un dépistage chez les apparentés
de plus de 50 ans porteur d’un AAA, ou chez les hommes ou femmes
fumeurs de plus de 60 ans. Une surveillance doit être pratiquée tous
les deux ans pour un diamètre de 30 à 40 mm et tous les 6 mois –
1 an entre 40 et 50 mm.
QUESTION 3. Quel est le bilan souhaitable avant de poser
l’indication thérapeutique ?
Un scanner avec injection pourra toujours être réalisé, y compris
chez l’insuffisant rénal, sous le couvert d’hydratation et d’arrêt temporaire des diurétiques. Cet examen avec réalisation de coupes fines
(3 à 5 mm), portant jusqu’à l’artère fémorale commune est à même
de préparer au mieux un traitement endovasculaire si celui est retenu. Le temps dit de « sizing » réalisé sur une station de travail avec
logiciel adapté (Endosize®, 3mensio®, Osirix® ou Terarecon®) établit
le type de prothèse à adapter à l’anatomie aorto-iliaque, la taille
de ses différents composants mais aussi permet d’anticiper les problèmes potentiels lors de la pose et les solutions prévues (figure 2).
La faisabilité d’un traitement endovasculaire découle donc de l’étude
du collet proximal sous rénal, sa longueur, sa qualité endoluminale
(thrombus pariétal, calcifications), des accès vasculaires iliaques
(montée de l’endoprothèse) et l’origine de l’artère iliaque interne
(dont il convient d’étudier la préservation) et/ou des artères viscérales de naissance inhabituelle.
M. T. POS… est porteur de deux artères rénales droites qui naissent
en amont de l’anévrysme et de deux artères rénales gauches d’un
diamètre de plus de 4 mm, la plus bas située naissant dans l’anévrysme même.
Le bilan d’extension de la maladie athéromateuse comporte l’étude
par écho-doppler des troncs supra aortiques, des artères viscérales
et des artères des membres inférieurs. L’évaluation coronarienne,
indispensable avant tout traitement, comporte au moins un test de
dépistage d’insuffisance coronaire latente (imagerie non invasive
couplée à une épreuve de stress).
Outre l’évaluation cardiaque (ETT) et coronarienne (cf. ci-dessus), un
bilan d’opérabilité est indispensable tant l’AAA est une pathologie
survenant chez le patient âgé souvent porteur de comorbidités non
négligeables (non seulement cardiaques, mais aussi respiratoires et
rénales). Après une exploration fonctionnelle respiratoire (EFR), la
fonction respiratoire peut être optimisée par kinésithérapie favorisant les exercices expiratoires et surtout l’arrêt du tabac, mesures qui
ont montré un bénéfice en termes de réduction des complications
postopératoires. [4] Un traitement bêtabloquant est recommandé
chez les patients porteurs de cardiopathie ischémique. Le traitement
FIGURE 2
Sizing préopératoire d’un AAA (Endosize®)
49,2°
Aortic neck angle
(< 60°)
18,9 mm
Proximal aortic
neck diameter
(18 mm to 32 mm)
P2
16 mm
21,6 mm
P3
Aortic neck length
(> 15 mm)
Distal aortic
neck diameter
(18 mm to 32 mm)
150 mm
206 mm
Lowest renal
to right internal
iliac length
Lowest renal
to aortic
bifurcation
length
67,6 mm
Aneurysm
diameter (> 50 mm)
30 mm
P4
Aortic bifurcation
diameter (> 20 mm)
56 mm
13 mm
Right iliac
sealing length
Right distal landing
(> 10 mm) zone diameter (< 20 mm)
7,2 mm
Minimum right
access diameter (> 7,5 mm)
XII
12,6 %
Neck growth
(< 25 %)
P5
P6
16,5 mm
Left distal landing
zone diameter (< 20 mm)
8,2 mm
211 mm
Lowest renal
to left internal
iliac length
61 mm
Left iliac
sealing
length
(> 10 mm)
Minimum left
access diameter (> 7,5 mm)
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
TRAITEMENT ENDOVASCULAIRE DES AAA : UN EXERCICE D’ANTICIPATION
FIGURE 3
Classification des endofuites. Schéma A : type I dite d’ancrage proximal ou distal ; Schéma B : type II dite de collatéralité ; Schéma C : type III
de déconnection de pièce ; Schéma D : type IV de porosité ; Schéma E : type V dite par endotension.
Source : Becquemin JP, Cochennec F, Marzelle J. Chirurgie endovasculaire des anévrismes de l’aorte abdominale. EMC - Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire 2008:1-30 [Article
43-154-L].
antiagrégant plaquettaire chez les patients coronariens ou porteurs
d’artériopathie chronique oblitérante des membres inférieurs (ACOMI) peut être poursuivi ou, si nécessaire, institué dans la période
périhospitalière.
M. T. POS… présente une ACOMI, stade II faible de Leriche et Fontaine, avec un résultat durable des angioplasties iliaques. Il a aussi
des lésions athéromateuses sous-inguinales bien compensées avec
notamment une thrombose poplitée gauche. Les index de pression
systolique distaux sont de 0,95 à droite et 0,75 à gauche. Il existe
un athérome non hémodynamiquement significatif des troncs supra
aortiques. La scintigraphie myocardique d’effort montre une cicatrice
de thrombose coronaire droite non dominante et un bon fonctionnement des pontages du réseau gauche (absence d’ischémie antérieure ou latérale). L’échocardiographie ne montre pas d’anomalie
cavitaire ou valvulaire et la FEVG est de 43 %. La fonction rénale
est normale et l’exploration fonctionnelle respiratoire est considérée
comme normale.
QUESTION 4. Quelles sont les indications actuelles de traitement chirurgical devant un AAA ?
Les indications thérapeutiques de l’AAA dépendent de la balance
entre le risque de rupture (lié étroitement à la taille de l’AAA) et
la mortalité opératoire du traitement. Un diamètre élevé (> 50 mm
en France ou 55 mm dans les pays anglosaxons) ou une augmentation de plus de 10 mm en un an font discuter cette ihérapeutique,
d’autant qu’il existe des facteurs supplémentaires de rupture (sexe
féminin, BPCO, tabagisme actif, HTA). [1,2] De la même façon, il est
convenu de traiter un anévrysme iliaque lorsqu’il mesure plus de 30
mm de diamètre. Il persiste des incertitudes concernant les AAA de
plus petite taille chez la femme, chez les patients jeunes ou ayant
une espérance de vie limitée. [5]
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
QUESTION 5. Quelles sont les modalités thérapeutiques actuelles ?
Deux types d’intervention peuvent être discutés avec le patient qui
doit rester maître dans le choix de la technique appliquée :
1) chirurgie conventionnelle avec mise à plat, greffe prothétique aorto-aortique ou aorto-bi-iliaque ;
2) chirurgie endovasculaire par voie bifémorale avec exclusion endovasculaire (EVAR : EndoVAscular Repair of aneurysm).
L’option endovasculaire est préférée, à ce jour, pour des AAA à morphologie favorable en raison des résultats précoces statistiquement
meilleurs surtout chez les patients symptomatiques.
La chirurgie conventionnelle peut être menée par voie transpéritonéale (laparotomie médiane ou transversale) ou rétro-péritonéale
(lombotomie) selon la localisation de l’AAA et la préférence des
équipes chirurgicales. La réalisation du geste sous cœlioscopie (avec
ou sans robot) est parfois proposée par les rares équipes rompues à
cette modalité technique.
Le taux de mortalité à 30 jours rapporté dans la littérature, variable
selon le type d’étude et la sélection des patients, est compris entre 1
et 8 %. La mortalité à 30 jours d’une chirurgie élective était de 1,2 %
dans l’étude d’Hertzer (1 135 cas consécutifs) qui montrait par ailleurs le caractère délétère, précoce et tardif, de l’association d’une
insuffisance rénale, respiratoire et/ou cardiaque lors du traitement
chirurgical conventionnel de l’AAA. [6]
Quant à l’expertise en matière de chirurgie aortique, la Haute Autorité de Santé (HAS) recommande un traitement des AAA dans les
centres hospitaliers publics ou privés avec chirurgiens expérimentés
qui réalisent annuellement plus de 50 de ces interventions.
EVAR : ce traitement, moins invasif, consiste à mettre en place une
endoprothèse couverte (stent recouvert d’un tissu étanche) dans le
XIII
DE PETITS CAS CLINIQUES ET DE
GRANDS PAS POUR LA CARDIOLOGIE
sac anévrysmal ainsi exclu de la circulation systémique. Il doit cependant respecter les contraintes anatomiques pour assurer une étanchéité proximale aortique et distale iliaque.
Les avantages de l’EVAR sont nets dans la période précoce avec
diminution statistiquement significative de la morbi-mortalité. Le
taux de mortalité post opératoire est en moyenne de 4 à 5 % pour
la chirurgie conventionnelle et de 1 à 2 % pour l’EVAR. Le bénéfice
s’estompe avec le temps et s’efface à 3 ans. Toutefois, cette modalité
endovasculaire présente un risque potentiel d’évolution de l’étanchéité avec apparition secondaire d’endofuites (figure 3) justifiant
suivi scannographique régulier et prolongé. [7-10]
L’utilisation de systèmes de fermeture percutanée permet dans des
cas sélectionnés (contre-indications calcifications et petit diamètre)
de réaliser la procédure sans abord chirurgical de l’artère fémorale
commune (technique de préclosing).
En cas de collet proximal trop court ou morphologiquement défavorable (angulation marquée par exemple), rendant impropre l’utilisation d’une endoprothèse standard, il y a lieu de discuter l’implantation d’une prothèse fenetrée (fenêtres viscérales rénales, mésentérique supérieure ± tronc coeliaque) (figure 4).
FIGURE 4
Contrôle d’une endoprothèse aortique “quatre fenêtres“
QUESTION 6. L’anatomie vasculaire particulière de ce patient
conditionne-t-elle une option thérapeutique ?
La naissance très basse de l’artère rénale gauche, située dans l’anévrysme, pose le problème de sa conservation (artère de 5 mm de
diamètre). Un traitement endovasculaire ayant été choisi, une prothèse adaptée avec une fenêtre rénale a été confectionnée (délai de
6 semaines). Ce délai de fabrication explique que les endoprothèses
fenêtrées ne peuvent être utilisées en cas d’AAA symptomatique et/
ou de taille trop importante. [11]
QUESTION 7. Quel type de suivi à adopter après le traitement
de son AAA ?
Quel que soit le traitement appliqué pour AAA, tous les patients
traités doivent bénéficier, s’il est toléré, dans le cadre d’une prévention secondaire du risque cardiovasculaire du meilleur traitement
médical comportant antiagrégant plaquettaire, statine, inhibiteur de
l’enzyme de conversion et bêtabloquant.
Un suivi régulier semestriel clinique et échographique est de mise
et sera complété en cas d’anomalie. Toutefois la surveillance après
EVAR est plus contraignante et un scanner de contrôle est requis
de façon précoce et pendant deux ans, même en l’absence d’anomalie. Il faudra rechercher par écho-Doppler une croissance de plus
de 5 mm du sac résiduel, des endofuites, ou encore des sténoses ou
thromboses de jambage. Un thrombus intra-sac hétérogène et un sac
pulsatile sont des très bons signes indirects d’endofuites. De même,
une radiographie de l’abdomen sans préparation pourra compléter
le scanner en cas de suspicion de mobilisation de la prothèse ou d’un
de ses composants.
XIV
Les endofuites secondaires, pas tant de type I (proximale ou distale)
signant un défaut d’étanchéité et un risque de rupture à court terme
que de type II sont les complications fréquentes survenant chez un
patient sur quatre. Le plus souvent, ces endofuites de type II correspondent à une entrée-sortie entre collatérales de l’aorte (lombairelombaire ou mésentérique inferieure-lombaire) sans augmentation
du sac anévrysmal. Toutefois, elles peuvent entraîner une augmentation du volume du sac et de la pression intrasacculaire rendant
ainsi compte d’un risque de rupture. Ce dernier fait discuter des techniques de fermeture des collatérales (embolisation radiologique par
voie artérielle ou par voie directe sacculaire, ligature chirurgicale par
lombotomie, voire parfois une conversion chirurgicale avec ablation
totale ou partielle de l’endoprothèse et mise en place d’une prothèse
conventionnelle.
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
TRAITEMENT ENDOVASCULAIRE DES AAA : UN EXERCICE D’ANTICIPATION
EPILOGUE
M. T. POS… a été revu régulièrement cliniquement et en échoDoppler à 1 mois, puis tous les six mois pendant deux ans et en TDM
injecté (figure 5) à la date anniversaire jusqu’à 2 ans. L’endoprothèse
est parfaitement perméable, sans problème de fixation proximale ou
distale (pas d’endofuite de type 1). Le sac s’est rétracté et la fenêtre
rénale gauche est perméable avec une parenchymographie complète. En l’absence d’évolution anormale, le suivi est désormais clinique et avec un écho-Doppler annuel. Sa pathologie athéromateuse
globale (notamment l’ACOMI) fait l’objet d’un suivi parallèle avec
la poursuite d’un traitement médical optimal et la correction de ses
facteurs de risque. Le sevrage tabagique n’a malheureusement pas
pu être obtenu.
FIGURE 5
Reconstruction 3D du contrôle scannographique postopératoire
avec injection de M. T. POS…
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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1998. J Vasc Surg 2002;35:1145-54.
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of patients with an abdominal aortic aneurysm : executive summary. J Vasc Surg
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XV
DE PETITS CAS CLINIQUES ET DE
GRANDS PAS POUR LA CARDIOLOGIE
PARTIE
3
A TOUTE CHOSE,
MALHEUR EST BON !
D. Himbert, Paris
M. L. C., 46 ANS, EST HOSPITALISÉ POUR PRISE EN CHARGE D’UN RÉTRÉCISSEMENT MITRAL (RM) RADIQUE EN
INSUFFISANCE CARDIAQUE RÉFRACTAIRE. Ses antécédents sont lourds, avec une chirurgie de scoliose à l’âge de 10
ans, une insuffisance respiratoire restrictive, une maladie de Hodgkin en 1996, traitée par radio- et chimiothérapie,
une cirrhose éthylique non sevrée, déjà compliquée de décompensation oedémato-ascitique et d’encéphalopathie
hépatique, avec varices œsophagiennes de grade 1. Son état fonctionnel s’est considérablement dégradé au cours
des derniers mois, malgré un traitement médical optimal.
A
l’admission, M. L. C. est orthopnéique, avec une auscultation de
maladie mitrale à sténose prédominante associée à un rétrécissement aortique lâche, des signes d’insuffisance cardiaque globale
à prédominance gauche, une ascite de moyenne abondance, des
angiomes stellaires. A l’ECG, le rythme est sinusal avec une hypertrophie auriculaire gauche. La radiographie thoracique montre une
cyphoscoliose majeure avec matériel d’ostéosynthèse rachidienne et
des calcifications annulaires mitrales massives bien visibles sur le
cliché de profil (figure 1). Il n’y a pas d’insuffisance hépatocellulaire,
les plaquettes sont à 110 G/L.
A l’échographie cardiaque transthoracique et transœsophagienne,
le ventricule gauche est de taille normale mais avec une fraction
d’éjection abaissée à 45 %. La valve mitrale est le siège de calcifications annulaires circonférentielles, avec des feuillets rigides et calcifiés sans fusion commissurale, un gradient moyen de 10 mmHg, une
surface calculée à 0,7 cm² par continuité, une insuffisance mitrale
centrale 2/4 (figure 2). La valve aortique est également calcifiée avec
un gradient moyen à 7 mmHg et une surface fonctionnelle à 1,2cm².
L’oreillette gauche est dilatée sans thrombus, la pression artérielle
pulmonaire est estimée à 50 mmHg sur une IT minime.
FIGURE 1
Radiographie thoracique
Face et Profil. Noter les
calcifications mitrales
bien visibles sur le Profil
(flèches).
XVI
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
FIGURE 2
Echographie transœsophagienne 3D préimplantation.
comme en position aortique. Plusieurs cas et une série ont été publiés et un registre international comportant près de 70 patients est
en cours. [3] Dans tous les cas, des prothèses Edwards Sapien XT ou
Sapien 3 déployées par ballon ont été utilisées.
QUESTION 3. Le calcul de l’EuroSCORE permet-il de prédire
ici le risque chirurgical ?
QUESTION 1. Ce patient est-il candidat à une commissurotomie mitrale percutanée ?
Ici, la sténose mitrale est consécutive à la radiothérapie reçue pour la
maladie de Hodgkin. Les séquelles radiques combinent fibrose, rigidité
et calcifications valvulaires, mais il n’y a pas de fusion commissurale
contrairement aux séquelles rhumatismales. La commissurotomie
mitrale percutanée ne peut donc pas être proposée pour traiter les sténoses mitrales dont le mécanisme est la rigidité valvulaire, comme dans
le cas présent ou dans les sténoses dégénératives des sujets âgés. [1]
D’autre part, la présence d’une fuite mitrale modérée (2/4) est en ellemême une contre-indication à ce geste et son apparition lors d’une
commissurotomie percutanée constitue un critère formel d’arrêt.
QUESTION 2. Quelles sont les autres options thérapeutiques
envisageables ?
La mortalité prédite par l’EuroSCORE logistique est de 3,7 %, et par
l’EuroSCORE II de 1,7 %. Le profil de risque n’est donc pas reflété par
ces scores qui, dans ce cas particulier, ne prennent pas en compte les
pathologies contre-indiquant la chirurgie. [4] C’est l’illustration de
leur peu d’intérêt à titre individuel. Les dernières recommandations
européennes ne les mentionnent pas dans l’évaluation des candidats
au TAVI, qui doit être guidée par le jugement clinique d’une « heart
team ». A l’échelle d’une cohorte, l’EuroSCORE garde un intérêt
malgré ses limitations dans les populations à haut risque, peu améliorées par les scores plus récents. En effet, même si l’EuroSCORE II
permet une bonne discrimination, sa capacité de calibration reste
médiocre chez les patients dont la mortalité prédite est > 30 %. [5,6]
QUESTION 4. Dans l’optique d’une implantation valvulaire
mitrale percutanée, quel est l’examen indispensable en complément de l’échographie cardiaque transthoracique et transœsophagienne ?
Comme pour les implantations en position aortique, c’est le scanner
cardiaque, de préférence avec injection (figure 3). Il précise au mieux
l’importance des calcifications, leur localisation circonférentielle ou
non, les diamètres de l’anneau, pour juger des possibilités d’ancrage
FIGURE 3
Scanner préimplantation.
La poursuite d’un traitement médical seul est vouée à l’échec. Le
traitement est déjà optimal, le patient en classe IV de la NYHA et il
s’agit d’une valvulopathie gauche sténosante. Il n’y a donc aucune
marge thérapeutique. La principale question est celle de l’opportunité d’une chirurgie de remplacement valvulaire mitral. Mais le patient
cumule les contre-indications chirurgicales liées à ses comorbidités :
1) thorax hostile (cyphoscoliose extrême et irradiation thoracique) ;
2) insuffisance respiratoire restrictive sévère ;
3) cirrhose éthylique compliquée.
D’autre part, indépendamment des comorbidités, la présence de calcifications annulaires massives représente en soi une contre-indication technique. [2]
Pour les mêmes raisons, une transplantation cardiaque ne peut être
envisagée dans ce contexte, malgré le jeune âge du patient.
Reste la possibilité d’une implantation valvulaire mitrale percutanée. La présence des calcifications annulaires, qui contre-indique la
chirurgie, permet au contraire l’ancrage d’une prothèse percutanée,
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
XVII
DE PETITS CAS CLINIQUES ET DE
GRANDS PAS POUR LA CARDIOLOGIE
de la prothèse. Il apporte aussi des renseignements indispensables à
la sécurité de l’intervention, dont le risque principal est l’obstruction
de la chambre de chasse par la prothèse. Les facteurs prédictifs en
sont : un angle aigu entre le plan de l’anneau aortique et celui de
la mitrale, la présence d’un bourrelet septal (même non obstructif à
l’état basal), une petite cavité ventriculaire gauche, une grande valve
et un appareil sous-valvulaire épaissis, rigides ou calcifiés.
FIGURE 4
Fluoroscopie : Implantation par voie transseptale d’une prothèse
Sapien 3.
QUESTION 5. Quelles sont les voies d’abord discutables pour
une implantation valvulaire mitrale percutanée et laquelle est
préférable chez ce patient ?
Les voies utilisables sont les voies transapicale et veineuse transseptale. La voie apicale a pour elle sa simplicité et le caractère direct,
axial et stable de l’accès à la valve. Mais il s’agit d’une voie invasive,
chirurgicale, avec les inconvénients et les complications potentielles
de la thoracotomie et de l’abord ventriculaire (douleur, épanchement
pleural, retentissement sur la fonction ventriculaire, saignement…).
La voie veineuse transseptale a pour elle son caractère non invasif
et très confortable pour le patient, mais elle est techniquement difficile et l’abord de la mitrale est moins axial et moins stable. Dans le
cas présent, la sévérité de la déformation thoracique et de l’insuffisance respiratoire contre-indiquent l’approche transapicale. La voie
transseptale est donc obligatoire, malgré la difficulté accrue liée à la
modification des repères anatomiques. Cependant, le guidage ETO
par un échographiste expérimenté permet de surmonter ces difficultés et de réaliser la ponction en bonne position.
L’implantation d’une prothèse Edwards Sapien 3 de 29 mm est réalisée par voie transseptale (figure 4), avec un bon résultat immédiat
en salle de cathétérisme (gradient moyen 5 mmHg, microfuite périprothétique ¼).
QUESTION 6. Y a-t-il d’autres investigations nécessaires
avant la sortie du patient ?
Ce type d’intervention reste rare et le recul est faible. Il est donc
nécessaire de documenter ces observations le mieux possible. L’ETO
sous anesthésie générale en fin d’intervention ne suffit pas, car les
conditions de charge ne reflètent pas celles du patient éveillé.
De même l’échographie transthoracique peut méconnaître ou sous-
FIGURE 5
Scanner postimplantation.
XVIII
Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
A TOUTE CHOSE, MALHEUR EST BON !
estimer les fuites périprothétiques, souvent très localisées et directionnelles. Il est donc souhaitable de refaire une ETO avant la sortie
pour établir avec précision les caractéristiques anatomiques et fonctionnelles de la prothèse et servir de référence pour les contrôles
ultérieurs.
D’autre part, la réalisation d’un scanner postimplantation est également souhaitable (figure 5) pour définir précisément la position
de la prothèse au sein des calcifications et pouvoir détecter d’éventuels déplacements ultérieurs (des migrations secondaires ont été
décrites).
QUESTION 7. Préconisez-vous un traitement antithrombotique et si oui lequel ?
Sur une base empirique, il est conseillé de proposer aux patients qui
n’ont pas d’indication à une anticoagulation au long cours au moins
3 mois de traitement antivitamine K en association à un antiagrégant plaquettaire qui sera poursuivi. En effet, des cas de thromboses
de prothèses percutanées implantées en position mitrale ont été
décrits. Les autres recevront des AVK et un antiagrégant plaquettaire au long cours.
CONCLUSION
n En médecine comme ailleurs, il faut chercher à tirer profit d’une malchance ou d’un handicap. L’empierrement mitral qui, en soi, contreindiquait la chirurgie de ce patient par ailleurs inopérable, lui a offert la zone d’ancrage indispensable à l’implantation d’une valve par voie
percutanée. A toute chose, malheur est bon !
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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interventions in 2014. EuroIntervention. 2014;10 Suppl U:U101-5.
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Le Cardiologue 386 – Novembre 2015
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