Colloque international francophone, « Le développement durable : débats et controverses », 15 et 16 décembre 2011, Université Blaise Pascal, Clermont-Ferrand.
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Les entreprises marocaines cotées à l’épreuve du
développement durable
Loubna BARMAKI, Driss AITCHEIKH,
Université Hassan Premier – Settat, CERSS- Université Mohammed V - Rabat
"Nous n'héritons pas de la Terre de nos parents, nous l'empruntons à nos enfants"
Adage africain
Résumé
La prise de conscience que le développement économique ne rime pas parfaitement avec la
protection de l’environnement et les attentes des parties prenantes a susciune importance
ascendante accordée au développement durable tant par les chercheurs, les organisations
internationales et nationales, la société civile, les médias, les entreprises, etc. La transposition
du développement durable en entreprise se matérialise par la responsabilité sociale de celle
ci. De ce fait, l’entreprise socialement responsable n’est plus cet agent économique dont
l’objectif unique et la recherche du profit mais elle est tenue de préserver son environnement
et de se préoccuper des attentes de ses parties prenantes.
Les entreprises marocaines et surtout celles de grande taille ne sont pas à l’écart de cette
situation.
Mots clés : Développement durable, responsabilité sociale, entreprises marocaines cotées.
Le Maroc s’est engagé dans le processus de développement durable en signant plusieurs
conventions
1
et en engageant de nombreuses réformes
2
. Les entreprises marocaines de
grandes tailles ne doivent pas être à l’écart de ce processus, de ce fait, elles sont appelées
comme leurs homologues de pays étrangers de souscrire à l’idéologie de développement
1
Adhésion au protocole de Kyoto, conventions et coopérations avec la France, le Japon, l’Allemagne, les Etats-
Unis… et l’Union Européenne en matière de développement durable, des énergies renouvelables…, accueil de
la 40
ème
anniversaire de la journée de la terre.
2
La réforme institutionnelle des déplacements urbains, la gestion des déchets urbains, la charte marocaine de
l’environnement et du développement durable, normes environnementales nationales, la loi relative aux énergies
renouvelables…
Colloque international francophone, « Le développement durable : débats et controverses », 15 et 16 décembre 2011, Université Blaise Pascal, Clermont-Ferrand.
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durable et de manifester leur responsabilité sociale vis-à-vis de leurs parties prenantes et en
faveur de la protection de l’environnement. Les entreprises marocaines cotées
3
en particulier
(nous allons travailler sur un échantillon d’entreprises industrielles « activités polluantes » et
des entreprises commerciales) entant qu’acteur fondamental de développement économique,
comment perçoivent-elles le développement durable ? Si ces entreprises ont une perception
positive du développement durable, comment se manifeste leur responsabilité sociale ?
Recourent t-elles à quels indicateurs de mesure de leur responsabilité sociale ?
I. Entreprises marocaines cotées et perception du développement
durable
Selon le Rapport Brundtland (1987), le développement durable est «un développement
économique qui permet de satisfaire les besoins de la présente génération sans compromettre
la capacité des générations futures à satisfaire les leurs. Deux concepts sont inhérents à cette
notion : le concept de "besoins" et plus particulièrement des besoins essentiels des plus
démunis à qui il convient d'accorder la plus grande priorité, et l'idée des limitations que l'état
de nos techniques et de notre organisation sociale imposent sur la capacité de
l'environnement à répondre aux besoins actuels et à venir ». Le développement durable
cherche à concilier entre trois objectifs: développement économique, équité sociale et
préservation de l'environnement, tel que :
Figure : Les trois "piliers" du développement durable
4
Le développement durable est une responsabilité collective nécessitant la collaboration de
tous, notamment les entreprises. Pour notre étude de cas, nous avons travaillé sur un
échantillon composé de onze entreprises cotées à la bourse de Casablanca dont six entreprises
exerçant des activités industrielles polluantes et cinq entreprises des activités commerciales.
Nous nous sommes basés pour réaliser notre étude sur les rapports annuels des entreprises
concernées, leurs sites Internet, rapports sociaux et environnementaux
5
. Nous avons retenues
toutes les entreprises du secteur de bâtiments et matériaux de construction (6) et l’unique
entreprise opérant dans le raffinage de pétrole, ces sept entreprises ont été retenues vu qu’elles
exercent des activités industrielles polluantes, nous avons retenu aussi les deux seules
entreprises de transport cotées et l’unique entreprise fournissant des services à la collectivité
et deux entreprises de distribution
6
.
3
Le choix des entreprises cotées se justifie par le fait que ce sont de grandes structures productives, disposants
d’importants moyens et pour lesquelles nous pouvons accéder plus aisément aux informations.
4
Diemer A. (2009), Développement soutenable ou développement durable ? Etat des lieux,
Formation continue,
SES, IUFM Auvergne, Clermont Ferrand, p 5.
5
L’envoi d’e-mails aux sociétés concernées s’est révélé infructueux.
6
Les 5 autres entreprises ont été écartées de notre échantillon vu l’absence des informations utiles les
concernant.
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Tableau 1 : comparaison des onze entreprises marocaines cotées
Source : tableau élaboré par nous-mêmes sur la base des informations recueillies.
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LAFARGE MAROC est le premier cimentier au niveau national.
8
CIMENTS DU MAROC est le deuxième cimentier au Maroc et le premier opérateur dans le Béton prêt à l’emploi et les granulats.
9
SONASID est le premier industriel national des aciers de renforcement des bétons, le « rond à béton », de fil machine et de laminés marchands, SONASID travaille
essentiellement pour le marché de la construction marocaine.
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STOKVIS NORD AFRIQUE
est une société leader sur le marché marocain (matériel Agricole, Engins de travaux publics, Manutention, nettoyage et rayonnage, Climatisation
et froid industriel…)
11
LYDEC exerce son activité au niveau de la région grand Casablanca.
LAFARGE –
MAROC
7
HOLCIM –
MAROC
CIMENTS
DU
MAROC
8
SONASID
9
ALUMINIUM
DU MAROC SAMIR AUTO HALL STOKVIS
NORD
AFRIQUE
10
LYDEC
11
TIMAR CTM
Secteur
d’activité
Bâtiments et
matériaux de
construction
(ciment, béton,
granulat, chaux
et plâtre)
Bâtiments et
matériaux de
construction
(ciment,
béton,
granulat)
Bâtiments et
matériaux de
construction
(ciment,
béton,
granulat)
Bâtiments et
matériaux de
construction
(acier)
Bâtiments et
matériaux de
construction
(profilés en
alliages
d'aluminium)
Raffinage
du pétrole
Distribution
(véhicules de
différentes
catégories)
distribution
(matériels
techniques)
Services aux
collectivités
(distribution
d’eau potable,
d’assainissement
et d’électricité)
transport
internation
al tansit,
logistique
Transport
routier
(voyageurs,
touristique et
messagerie)
Chiffre
d’affaires en
milliards de
DHS (2010)
5,353 3,543 3,640 4,114 0,617 37,030 2,626 0,734 5,672 0,154 0,426
Certificat de
qualité obtenu
ISO 9001 pour
l’activité
ciment ISO 9001 ISO 9001 NM ISO 9001
ISO 9001 ISO 9001 ISO 9001 ISO 9001 ISO 9001 ISO 9001 ISO 9001
Support de
communication
en matière de
développement
durable
Rapports
annuels
Site Internet
Rapports
sociaux et
environnemen
taux
Site Internet
Rapports
annuels
Site Internet Site Internet ---
Rapports
annuels
Site
Internet
--- Site Internet
Rapports annuels
Site Internet
Site
Internet ---
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Toutes les entreprises étudiées se préoccupent de la qualité de leurs produits afin de satisfaire
leurs clients et affronter la concurrence, de ce fait, elles ont toutes obtenu le certificat ISO
9001
12
. Alors que ces onze entreprises réagissent différemment au développement durable :
Première catégorie : huit entreprises (LAFARGE MAROC, HOLCIM MAROC,
CIMENTS DU MAROC, SONASID, SAMIR, STOKVIS NORD AFRIQUE, LYDEC,
TIMAR) se servent essentiellement de leur site web pour communiquer sur leur
préoccupations environnementales et/ou sociales et les actions concrètement mener pour
préserver l’environnement et améliorer la qualité de vie de leurs parties prenantes.
Dans cette catégorie, quatre entreprises déclarent clairement leur engagement en matière de
développement durable : HOLCIM - Maroc se fixe pour vision de « contribuer à la
construction des fondations de la société de demain. Nous sommes ainsi dans l’obligation de
nous engager dans une gestion environnementale active et d'assumer un niveau élevé de
responsabilité sociale, le développement durable étant un équilibre entre la croissance
économique, l'efficacité environnementale et la responsabilité sociale»
13
. « Lafarge - Maroc a
pour ambition de créer de la valeur durablement en contribuant au progrès économique et
social des communautés s’exerce son activité, et en assurant la protection de son
environnement »
14
. Pour Lydec « De par la nature de ses métiers, Lydec inscrit naturellement
ses actions dans une logique de développement durable ».
Alors que pour STOKVIS NORD AFRIQUE, à travers sa filiale CM2D « Notre ligne de
conduite à CM2D est claire : nous nous inscrivons totalement dans cette dynamique nouvelle
et nous nous positionnons comme acteur du développement durable au Maroc, à travers une
offre de produits et services innovants, en ligne avec les perspectives du développement vert
et propre pour lequel le Maroc a opté »
15
.
Deuxième catégorie : Deux entreprises ne communiquent pas sur leurs préoccupations en
matière de développement durable ni sur la nature des actions sociales et/ou
environnementales engagées (ALUMINIUM DU MAROC et AUTO HAll) même si la
première entreprise a une certification combinée QES en 2004 « QUALITE,
ENVIRONNEMENT, SECURITE» (ISO 9001:2000, ISO 14001 et OHSAS 18001), alors que
la seconde a obtenu en 2009 le label CGEM pour la responsabilité sociale, cette entreprise ne
communique point sur ce label
16
.
Troisième catégorie : il apparaît de la consultation du site de la CTM que le concept du
développement durable est l’équivalent pur et simple de la satisfaction du client et c’est dans
ce sens qu’elle s’est faite certifiée ISO 9001, version 2008.
Par la suite, ne seront retenues que les 8 entreprises qui souscrivent à l’idéologie du
développement durable, qui mènent des actions concrètes sur la plan environnemental et/ou
social et communiquent sur la nature de ces actions.
12
L’ISO 9001 est une norme internationale qui spécifie les exigences fondamentales auxquelles doit satisfaire le
système de management de la qualité (SMQ) d’une entreprise, source : http://www.iso.org/.
13
Rapport social de HOLCIM – MAROC 2009, p 4.
14
Rapport annuel LAFARGE, 2008, p 28.
15
www.stokvismaroc.com
16
C’est la consultation du site de la Confédération générale des entreprises du Maroc qui nous a permis de
découvrir que cette entreprise a obtenu ce label.
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II. La responsabilité sociale des entreprises cotées
Le débat sur la responsabilisociale de l’entreprise remonte à 1953, date de publication de
l’ouvrage « Social responsibilities of the businessman » de Bowen. Cet auteur est considéré
comme le père fondateur de la responsabilité sociale de l’entreprise.
Il existe plusieurs finitions de la RSE dont celle de la Commission européenne : « La RSE
est l’intégration volontaire des préoccupations sociales et environnementales des entreprises
à leurs activités commerciales et à leurs relations avec les parties prenantes. Etre
socialement responsable signifie non seulement satisfaire pleinement aux obligations
juridiques applicables, mais aussi aller au-delà et investir davantage dans le capital humain,
l’environnement et les relations avec les parties prenantes»
17
(CE 2001, p 8).
Ainsi, la transposition du veloppement durable en entreprises se matérialise par la
responsabilité sociale de l’entreprise. Il s’agit d’un engagement concret et volontariste de
l’entreprise en faveur de l’environnement et vis-à-vis de ses parties prenantes
18
.
Pour les entreprises étudiées, nous chercherons à déterminer le champ de responsabilité
sociale (environnement et/ou social) et les stratégies adoptées.
Les stratégies de la RSE varient de la situation l'entreprise mène très peu d’actions à la
situation où elle agit au mieux.
La RSE cosmétique :
C’est le cas des entreprises qui pratiquent légèrement une responsabilité sociale. Cette
responsabilité prend généralement la forme d’un partenariat avec une association pour un
événement ponctuel.
La RSE annexe:
Cette responsabilité présente des actions qui affirment une RSE impliquée mais qui n’ont pas
de lien direct avec l’activité de l’entreprise.
La RSE intégrée :
Il s’agit aussi d’une RSE impliquée mais à l’encontre de la RSE annexe, Cette responsabilité
inclut des actions en relation avec les activités de l’entreprise. Elle peut même pour certaines
entreprises se manifester par sa présence dans le tableau de bord, l’intégration des indicateurs
« sociaux » en plus de ceux financiers peut contribuer à une performance globale de
l’entreprise
19
. Il est à noter que sur le plan réglementaire, les sociétés cotées à la bourse de
Casablanca ne sont pas tenues de publier des informations sur leurs actions sociales et
environnementales à l’encontre de leur homologues françaises qui se conforment aux
conditions légales de l’article 116 de la loi sur les nouvelles réglementations économiques
(NRE) de mai 2001 qui stipule l’obligation pour les entreprises cotées de fournir des
informations sur les conséquences sociales, territoriales et environnementales de leurs
activités dans leur rapport annuel.
17
Commission européenne (Livre Vert - 2001).
18
Les parties prenantes (Stakeholders) sont tous les acteurs qui affectent l’entreprise et qui peuvent être affectés
par son fonctionnement, on distingue les parties prenantes internes à l’entreprise (employés, actionnaires) et
externes (clients, fournisseurs, concurrents, organismes financiers, ONG …).
19
Martinet A-C., Payaud M-A. (2008), Formes de RSE et entreprises sociales : une hybridation des stratégies,
Lavoisier, Revue française de gestion, N° 180, 2008/1, p. 202-203.
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