Le dossier pédagogique

publicité
Fiche spectacles
Sœur, Je ne sais pas quoi frère &
Ils se marièrent et eurent beaucoup
Au Grand Bleu (Lille)
Au théâtre de l’Idéal (Toucoing)
Dossier commun à deux spectacles de la compagnie Pour ainsi dire, accueillis dans le
cadre d’un partenariat entre le Grand Bleu et le Théâtre du Nord
Grand Bleu, spectacle vivant pour les nouvelles générations
36 avenue Marx Dormoy – 59000 LILLE / 03.20.09.88.44 - www.legrandbleu.com - [email protected]
1
Sommaire
(Qu’est-ce qu’il y a dans cette fiche spectacle… ?)
Dossier réalisé à l’aide du dossier pédagogique du théâtre des Bergeries, Noisy le sec
La distribution
Qui sont les gens qui ont travaillé à la réalisation de ce spectacle ?
p.3
Les spectacles
Texte de présentation des spectacle s
p.4
La compagnie Pour ainsi dire
Présentation de la compagnie, ce qu’elle défend, ce qu’elle a déjà fait
Philippe Dorin, auteur et Sylviane Fortuny, metteuse en scène
p.5
p.6
Note d’intention de la compagnie
p.7
Prolongements autour des spectacles
1/ Un univers commun aux deux spectacles
a) Une façon d’écrire… des histoires en « enfilade »
b) Des thématiques de contes
c) Des inspirations russes
p.8
p.10
p.12
2/Autour de Sœur, je ne sais pas quoi frère
a) Jeux de construction : des histoires à reconstruire
b) Des histoires de sœurs
c) Les secrets de famille
p.13
p.14
p.16
3/ Autour de Ils se marièrent et eurent beaucoup
a) La relation à l’autre : des histoires d’amour en kit
b) Un langage particulier : russe et français
p.17
p.18
p.19
On récapitule !
Pour ceux qui ont peu de temps … quelques pistes pour travailler le spectacle rapidement avant ou
après votre venue.
Annexes
Annexe 1 : Extraits du texte de Sœur, je ne sais pas quoi frère
Annexe 2 : Extraits du texte de Ils se marièrent et eurent beaucoup
Annexe 3 : Photos des spectacles
Annexe 4 : Bibliographie de Philippe Dorin
Annexe 5 : Extrait du recueil « Et ta sœur ? »
p.20
p.23
p.25
p 27
p 28
2
La distribution
Sœur, je ne sais pas quoi frère
Ils se marièrent et eurent beaucoup
Texte : Philippe Dorin
Texte : Philippe Dorin
Mise en scène : Sylviane Fortuny
Traduction en langue russe : Rimma Genkina
Avec : Mireille Franchino, Carole Got,
Catherine Pavet, Sophie Verbeeck,
Roze Lizot ou Charlotte Sourisse
Mise en scène : Sylviane Fortuny
Costumes : Magali Murbach
Avec : Elvira Akmaeva, Pierre Derenne,
Evgeniy Kasantsev, Veronika Kim,
Déborah Marique, Evgeniy Mishechkin,
Maria Pavlova, Aliaksandra Skorynava,
Yulia Tarnikova, Vladimir Sedletskii
Musique : Catherine Pavet
Lumière : Jean Huleu
Scénographie : Sylviane Fortuny,
Kelig Le Bars, Magali Murbach
Costumes : Sabine Siegwalt
Lumières : Kelig Le Bars
Production : Cie Pour Ainsi Dire
Musique : Catherine Pavet
Photo : Frank Berglund
Coproduction : Théâtre Paul Eluard à Choisy-leRoi, Théâtre des Bergeries à Noisy-le-Sec, Théâtre
Liberté à Toulon, Pôle Jeune Public à Le Revest,
Très tôt théâtre à Quimper, Fontenay en Scènes à
Fontenay-sous-bois, Le Théâtre de Fos / Scènes et
Cinés Ouest provence – Scène nationale à
Cavaillon.
Coproduction : Théâtre Paul Éluard à Choisy-le-Roi,
MA – Scène nationale de Montbéliard.
Avec l’aide de l’ADAMI, d’ARCADI Ile-de-France
/ Dispositifs d’accompagnements, et l’aide à la
diffusion de la DRAC, de la Ville de Paris.
Avec le soutien du Ministère de la Culture de
Russie, du Centre culturel français de Moscou et de
l’Institut français.
Avec le soutien du fonds d’Insertion pour Jeunes
Artistiques Dramatiques, DRAC et Région
Provence-Alpes Côte d’Azur et l’ADAMI.
La compagnie pour ainsi dire est conventionnée
par la Drac Ile-de-France – Ministère de la Culture et
de la Communication. Elle est soutenue par le
Conseil général du Val de Marne. Elle est en
compagnonnage au Théâtre Paul Éluard de Choisyle-Roi depuis 2012.
Remerciements au Théâtre Simone Signoret à
Conflans Sainte Honorine et à la Ville de Pantin
pour l’accueil en résidence.
Production : Théâtre Durova à Moscou.
Production déléguée : Compagnie pour ainsi dire.
La compagnie Pour ainsi dire reçoit le soutien
de la DRAC d’Ile-de-France, Ministère de la
Culture et de la Communication, et du Conseil
Général du Val-de-Marne. Le Théâtre Paul Eluard
de Choisy-le-Roi est partenaire de la Compagnie
depuis 2012.
3
Les spectacles
Sœur, je ne sais pas quoi frère
Cinq sœurs et des secrets de famille dans une fable moderne et
malicieuse.
Elisabeth, Catherine, Carole, Sophie et Lili, âgées de dix à soixantequinze ans, vivent recluses dans une maison, où elles tournent en
rond, chantent et se chamaillent. Leur père n’est pas là. Dans cette
fratrie improbable, il y a des secrets et des souvenirs enfouis. Des
histoires d’hommes, de mariages, de fusil… qui se croisent et
s’emboîtent comme des poupées russes.
À travers des tranches de vie très rythmées, pleines de suspense, de
légèreté et d’humour, ce récit mystérieux se reconstitue et prend sens
peu à peu.
Ils se marièrent et eurent beaucoup
Un jeune homme pleure sa fiancée partie à l’autre bout du monde. Une
jeune fille se présente et lui dit que, comme la Terre est ronde, ça veut
dire qu’elle est juste derrière lui. Le jeune homme veut se retourner.
Mais la jeune fille le lui défend. Car la Terre ne tourne que dans un
seul sens. Elle lui propose de regarder sa fiancée plutôt dans ses yeux à
elle et lui dérobe un baiser…
La pièce de Philippe Dorin commence là où s’arrête le conte, préférant
à la grande histoire d’amour la multiplicité de nos histoires
d’aujourd’hui et la fragilité des sentiments amoureux.
4
La compagnie Pour ainsi dire
La compagnie est fondée en 1997 : Philippe Dorin est auteur, Sylviane Fortuny metteuse en scène.
A son actif, la compagnie comptabilise 9 spectacles qui ont tourné chacun 3 à 4 ans.
C’est dans le Val de Marne, au Théâtre Paul Éluard de Choisy le roi, que Sylviane Fortuny et Philippe
Dorin ont posé les fondations de la compagnie Pour ainsi dire en 1997, reprenant à leur compte la phrase
de Mattis le simplet, dans le roman de Tarjei Vesaas « Les oiseaux », qui n’arrive pas à faire entendre à son
entourage la métaphore dramatique qu’a représenté pour lui, un jour, une passée de bécasses dans le ciel.
« C’était pour la création d’un premier spectacle, Le monde, point à la ligne, réalisé à tâtons et en trois
semaines avec trois francs six sous, mais qui a retenu l’attention d’une poignée de programmateurs par la
singularité de sa forme et de son adresse à un public d’enfants. Depuis, la compagnie a créé neuf
spectacles et s’est forgée une identité forte au sein du paysage du théâtre jeune public en France. »
Elle a tissé autour de son travail un précieux réseau de théâtres sur tout le territoire et aussi hors des
frontières, en particulier au Québec, à La Réunion et en Russie.
Mais les spectacles de la compagnie gardent toujours cet esprit de quelque chose qui s’essaie, comme le
brouillon encore raturé et annoté d’un écrivain ou comme une peinture qui n’est pas encore sèche. Il y a
des bouts qui manquent et il reste toujours un peu d’encre sur les doigts. « Le texte et la mise en scène
s’appuient toujours sur les propriétés imaginatives du théâtre, comme s’il était en lui-même la source et le
lieu de toutes les histoires. Les spectacles s’adressent en priorité aux enfants mais totalement aux adultes
qui les accompagnent. »
En parallèle de ses créations, la compagnie mène un travail d’action culturelle fort autour des écritures
dramatiques destinées au jeune public dans le cadre de ses résidences à Fontenay sous-bois (94), Noisy le
sec (93) et Choisy le roi (94), et aussi autour de l’écriture en général et des arts plastiques, sous la forme
d’ateliers d’archéologie imaginaire réalisés à partir de boulettes de papier, d’encre bleue et de petits
cailloux blancs. Plus récemment, Sylviane Fortuny et Philippe Dorin ont été régulièrement sollicités pour
animer des stages dans le cadre de formations professionnelles autour de l’adresse à un public d’enfants.
5
Philippe Dorin, auteur
Philippe Dorin est né en novembre 1956 à Cluny (71). Il travaille d’abord
comme auteur et comédien au Théâtre Jeune Public de Strasbourg,
entre 1980 et 1990, sous la direction d’André Pomarat et Eric de
Dadelsen. En 1994, il rencontre Sylviane Fortuny avec qui il fonde la
compagnie Pour ainsi dire à Paris en 1997.
Il écrit également pour d’autres compagnons metteurs en scène parmi
lesquels Michel Froehly (Bouge plus ! 2004, Christ sans hache 2006,
One two one two three four 2009, A table ! 2012), Ismaïl Safwan de la
Cie Flash Marionnettes, (Babel France 1999, Les Enchaînés 2007, 2084,
un futur plein d’avenir 2010, 4M4A 2012), Thierry Roisin de la Comédie
de Béthune – CDN (Deux mots 2009), Christian Gangneron de
l’ARCAL (Les époux 2010). Ses textes sont montés en France par de
nombreuses autres compagnies.
Dernièrement, il écrit des livrets d’opéras destinés au jeune public : Courte longue vie au grand petit roi
(2014), une commande du Carrosse d’Or, musique d’Alexandros Markeas, mise en scène de Neville
Tranter, production de Ars Nova.
Patoussalafoi (2015), une commande de l’Opéra Théâtre de Saint Etienne, musique de Matteo
Franceschini, mise en scène de Johanny Bert. Il est auteur engagé au Théâtre de l’Est parisien en
2004/2005 qui accueillera la plupart de ses spectacles jusqu’en 2010.
Cf. la bibliographie de Philippe Dorin en annexe 4 de ce dossier.
Sylviane Fortuny, metteuse en scène
Sylviane Fortuny est née en avril 1951 à Casablanca au Maroc. Elle
découvre le théâtre destiné aux enfants en 1986, au Théâtre de Sartrouville
(Heyoka). Avec Kim Vinter et Bernard Sultan, pour lesquels elle travaille
d’abord comme manipulatrice de marionnettes, puis comme comédienne
jusqu’en 1993. Les draps du rêve, Le lit marine, Jardins d’enfance, Fenêtres.
En 1994, elle rencontre Philippe Dorin avec lequel elle fonde la compagnie
Pour ainsi dire à Paris en 1997. Elle travaille également comme comédienne
et manipulatrice avec plusieurs autres compagnies entre 1996 et 1998, et
réalise des mises en scène pour Françoise Pillet (Emile et Angèle,
correspondance – 2002), Joelle Rouland (L’envolé -2004) et Serge Marois
au Québec (La robe de ma mère – 2008).
6
Notes d’intention autour des spectacles
(Par Philippe Dorin, auteur des textes)
Sœur, je ne sais pas quoi frère
« Sœur, je ne sais pas quoi frère est né du désir de retrouver quatre comédiennes qui ont jalonné le
parcours de notre compagnie, de leur associer une petite fille de 10 ans, et de nous inspirer d’elles pour
écrire une histoire. Elles sont si différentes les unes des autres en âge et en esprit que, par contradiction,
nous avons décidé d’en faire les cinq sœurs d’une même famille. Ainsi, l’histoire qu’elles vont nous jouer
sera toujours invraisemblable mais en même temps commune à celle de toutes les fratries. »
Explication de la genèse de la pièce Sœur, je ne sais pas quoi frère par Philippe Dorin :
http://www.theatre-video.net/video/Soeur-je-ne-sais-pas-quoi-frere-de-P-Dorin-Le-contexte-menant-a-l-ecriture
Ils se marièrent et eurent beaucoup
« La pièce commence là où finit le conte. La dernière phrase du conte devient la phrase titre de la pièce. A
la grande histoire d'amour qu'on lit dans les contes, nous avons préféré la multiplicité des petits dialogues
d'amoureux qui reflètent davantage nos histoires d'amour aujourd'hui. La pièce se présente comme une
suite de petits duos ponctués par des petits tours de danse qui permettent de changer de lieu, d’amoureux
ou de sujet en deux temps trois mouvements. Est-ce l'amour qui passe ou les amoureux qui sont
changeants ? Uniques ou multiples, les histoires d'amour nous transportent. Ce sont elles qui font tourner
le monde. Dans notre théâtre, les rebondissements dramatiques sont d'abord des rebondissements de la
langue. Les couples se font et se défont d'abord par les mots.
Entre celui du ridicule et celui de la gourmandise, le rouge accompagne toujours les histoires d'amour. Du
rideau rouge de la scène à celui du baiser final, il sera le fil conducteur du spectacle. »
7
Prolongements autour des spectacles
1/ Un univers commun aux deux spectacles
A/ Une façon d’écrire… des histoires en « enfilade »
Dans la plupart de leurs spectacles (a fortiori dans Sœur, je ne sais pas quoi frère et dans Ils se marièrent
et eurent beaucoup), plutôt que de suivre le fil d’une histoire, Philippe Dorin et Sylviane Fortuny racontent
des histoires « en enfilade, comme le sont parfois les pièces d’une maison ».
Philippe Dorin aborde la manière dont il écrit en lien étroit avec le rapport qu’il a de l’enfance :
« Auteur, c’est la petite place que j’ai pu me trouver pour entrer dans la famille du théâtre, il y a un peu plus
de trente ans. Un peu comme lorsqu’on engage un batteur dans un groupe de rock. Ce n’est peut-être pas
le meilleur batteur du monde, mais il a très envie de faire partie du groupe.
Ce métier d’auteur, j’ai mis longtemps à l’apprendre. Je me suis trompé beaucoup. Mais comme tous les
textes que j’écrivais au cours de cet apprentissage devaient s’adresser aux enfants, on peut dire que ce
sont eux qui m’ont appris mon métier d’écrivain. Le jour ou l’adulte que j’étais et les enfants à qui je
m’adressais se sont retrouvés autour des mêmes mots, je crois que je suis devenu écrivain. Sans doute
parce qu’ils ne nous racontaient pas la même histoire, mais qu’ils étaient notre tronc commun.
Ecrire, c’est toujours la question de la métaphore.
Mon désir est toujours d’écrire une belle histoire pour les enfants, avec un début et une fin, de beaux
personnages qui traversent de grandes épreuves, avec des rebondissements, de grandes batailles et la
conquête d’un beau royaume à la fin, et peut-être même le cœur d’une jolie princesse à la clé.
Mais je n’y arrive jamais.
C’est sans doute ça qui me sauve.
Les scènes m’arrivent dans le plus grand désordre. Elles se contredisent sans cesse. Les personnages ne
racontent jamais la grande histoire. Ce sont juste des petits commentaires qu’ils font, des bavardages
inutiles sur des détails sans importance, un peu comme des enfants à qui vous voulez enseigner quelque
chose d’essentiel et qui n’arrêtent pas de faire des remarques sur la tenue que vous portez, les temps qu’il
fait dehors ou qu’est-ce qu’on va manger ce soir.
C’est peut-être ça, le détour de l’enfance, d’être toujours à côté du sujet principal, de regarder toujours
ailleurs que là où on devrait. C’est ça aussi, la métaphore, que l’essentiel ne soit jamais dit. Le résultat, c’est
que je me retrouve toujours avec un paquet de scènes surgies de nulle part, toutes hors sujet, très loin de la
belle histoire que je m’étais fixée au départ et de l’idée que je me fais du métier d’auteur. Mais ça vient du
cœur, sans préméditation, un peu comme les enfants qui disent tout haut et très fort les choses qu’on ne
doit pas dire, en tout cas pas comme ça, ni à ce moment là.
Quand on écrit pour les enfants, rien que pour les enfants, on est moins bien considéré. On est moins
regardé comme « auteur principal ».
C’est peut-être aussi ça qui me sauve.
Parce que je peux faire un peu ce que je veux. On ne m’attend pas au coin du bois. J’ai une grande liberté.
Je fais mes petites salades. Ça ne me pèse pas. Et, au bout du compte, je m’en fous un peu de l’être ou pas,
écrivain.. »
Philippe Dorin
Table ronde autour des écritures théâtrales jeunesse, Théâtre de la Ville – 17 avril 2013
8
Rencontres avec l’auteur Philippe Dorin
Deux rendez-vous avec l’auteur sont organisés au Grand Bleu, le premier est une conférence autour de
l’univers de Philippe Dorin et sa manière d’écrire, le deuxième est un temps de rencontre pour les
enseignants et professionnels de l’éducation dans le cadre d’un parcours de spectateur.
La conférence de Philippe Dorin : Dans la vie, il y aussi des longueurs
Vendredi 18/03 à 19h
Écrire pour les enfants, pour moi, la question sera toujours : comment retenir l’attention du
spectateur quand on n’a pas la trame d’une histoire ?
Un jour, on a demandé à Philippe Dorin de faire une conférence sur son théâtre. Il en a profité pour
raconter comment lui venaient ses histoires. Enfin, des histoires, c’est vite dit. Encore faut-il trouver les
mots. Et les mots, il leur arrive de se faire attendre. Il en a profité aussi pour se rappeler des réflexions
d’enfants car après tout, c’est à eux qu’il s’adresse. Il a lu des extraits de ces pièces parce qu’il aime
beaucoup lire à haute voix devant des gens, et les faire lire aussi. C’est un auteur de théâtre, ne l’oublions
pas. Il a donné aussi ses recettes : comment inventer un langage du moyen âge. Ou encore comment faire
des vers. Enfin presque.
Rencontre avec Philippe Dorin / Dispositif « L’Invitation au spectacle »
Samedi 19/03 à 18h
Pour la saison 2015/2016, Le Grand Bleu participe au dispositif «L’invitation au spectacle, De scènes en
scènes », porté par le Rectorat de l’Académie de Lille (Inspection pédagogique régionale), la direction
régionale des affaires culturelles (DRAC Nord-Pas de Calais) et le réseau CANOPÉ.
L’Invitation au spectacle propose un parcours de spectateur aux enseignants et plus largement à tous les
acteurs de l’Education (intervenants en milieu scolaire, éducateurs, agents des collectivités, cadres
associatifs, étudiants…). Il s’agit de provoquer l’envie de fréquenter les lieux de diffusion des arts vivants
(théâtre, danse, cirque, opéra…), de mieux comprendre la diversité et l’évolution du spectacle
contemporain, d’armer les acteurs de l’éducation dans le but de nourrir le parcours d’Education artistique
et culturelle, d’avoir l’occasion lors d’un moment convivial de faire naître la réflexion, les échanges entre
acteurs du monde artistique et de l’Education.
A ce titre, les acteurs éducatifs inscrits dans ce dispositif pourront participer à un temps d’échange avec
l’auteur Philippe Dorin, autour du spectacle Sœur, je ne sais pas quoi frère le samedi 19 mars 2016 à 18h
au Grand Bleu.
Réservations auprès du Grand Bleu : 03.20.09.88.44 ou [email protected]
9
B/Des thématiques de contes
a) L'enfermement, un thème du conte
Dans les pièces de Philippe Dorin, il est souvent question de personnages enfermés, embrigadés dans des
univers et des atmosphères particulières où les personnages peuvent être dans une sorte de huit clos. A
titre d’exemple, les cinq sœurs de Sœur, je ne sais pas quoi frère semblent cloisonnées dans la maison de
leur enfance. Quant aux personnages de Ils se marièrent et eurent beaucoup, ils sont entrainés dans une
ronde qui tourne sans cesse au gré des rencontres.
Proposition : débat avec les élèves
Pour quelle raison quelqu'un peut-il être enfermé? Retenu prisonnier ? Être puni ?
Pour quelle raison un père voudrait-il enfermer sa fille ? L'empêcher de commettre une bêtise, la punir, la
protéger ?
Il est possible de faire des parallèles avec la légende médiévale de la princesse enfermée dans son donjon
qui attend qu’un jeune prince la délivre. On peut également faire des liens avec des contre-exemples,
parodie de ces contes comme les dessins d’animation Raiponce ou Shrek.
b) Les emprunts aux contes traditionnels
Les personnages, leurs histoires et leurs liens peuvent faire penser à l’univers des contes traditionnels.
Proposition : trouver des liens entre le spectacle et des contes traditionnels.
A l’aide des extraits en annexe 1, laisser réagir les élèves : Y’a t’il des ressemblances/différences avec des
contes traditionnels. Lesquels ? Cela se situe-il :
- au niveau des personnages (des personnages font-ils penser à des héros connus ? )
- de l’action (l’histoire se passe-t-elle dans une époque connue des contes ?)
Par exemple, dans Ils se marièrent et eurent beaucoup (extraits 1 et 2 – Annexe 2) :
- « les grandes dents » rappellent le loup du Petit chaperon rouge de C. Perrault, le couteau fait
penser au chasseur
- le thème des bottes rappelle Le Chat botté de C. Perrault
- « La Promise » rappelle les contes dans lesquels le père veut marier sa fille au héros qui parviendra
à résoudre une énigme ou une épreuve...
Dans Sœur, je ne sais quoi frère (extraits 1 et 2 – Annexe 1) :
- L’épisode de la chaussure et du bal rappelle « Cendrillon » de C. Perrault
- L’épisode de la clé rappelle « Barbe Bleue » de C. Perrault (clé qui renferme un secret/ pièce
secrète)
10
c) Parodier les contes
Ils se marièrent et eurent beaucoup... commence là où finit le conte. La dernière phrase du conte devient
la phrase titre de la pièce. Inventer la suite de l’histoire, c’est une manière de parodier, de transformer le
conte.
Proposition : Réfléchir à la signification du titre
Le titre proche de la fin « traditionnelle » du conte (« Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants ») ici,
est tronqué.
Questionner les élèves : qu’est-ce que cela peut sous-entendre ? Ce n’est pas la fin de l'histoire mais le
début d'une autre histoire. Que se passe t-il après ? Après le mariage ? Après les enfants ?
Proposition : élaborer des hypothèses
Que s'est-il passé avant le titre ? (La princesse est sauvée par le prince ? ou autre chose….)
Que peut-il se passer ensuite ?
- Finir le titre : « et eurent beaucoup de... » ? Enfants ? Animaux ? Argent ? Bonheur ? Succès ?
Problèmes ? (trouver le plus d'idées possibles)
- Ecrire toutes les idées trouvées sur des morceaux de papier, les mettre dans un panier et faire
piocher un mot à chaque groupe (de 2/3 élèves), puis faire jouer la suite du conte
N’hésitez pas à évoquer la notion de « parodie de conte » qui peut être mise en relation avec d'autres
parodies.
Bibliographie complète de contes sur les sites du CRDP de Reims et Amiens:
http://www.cndp.fr/crdp-reims/fileadmin/documents/cddp10/contes_detournes/en_pret_cycles_1_et_2.pdf
http://crdp.ac-amiens.fr/abbeville/wp-content/uploads/file/Reseaux/Liste%20contes%20detournes%281%29.pdf
Proposition : A l’aide des exemples suivants, faire improviser ou faire rédiger une parodie de conte.
- « Les Trois Petits Loups et le Grand Méchant Cochon »
- « Le Petit chaperon Vert »
- « Le loup Végétarien
- « Barbe Rose »
- « Bouche d'or et les sept nains »...
11
C/ Des inspirations russes
Pour Sœur, je ne sais pas quoi frère, comme pour Ils se marièrent et eurent beaucoup, l’univers des
spectacles s’est inspiré de références à la Russie. En effet, depuis plusieurs années déjà, la Compagnie
Pour Ainsi Dire est attachée à ce pays. Sylviane Fortuny et Philippe Dorin y ont fait plusieurs séjours lors
de représentations de L’Hiver quatre chiens mordent mes pieds et mes mains et pour la création de Ils se
marièrent et eurent beaucoup avec des comédiens russes. Et c’est à Moscou qu’ils ont esquissé Sœur, je ne
sais pas quoi frère.
Le spectacle Ils se marièrent et eurent beaucoup a été créé en deux temps. En effet, après une série de
représentation d’un autre texte à Moscou avec des russophones, la compagnie a souhaité poursuivre
l’aventure : un workshop a donc été organisé avec l’équipe permanente du théâtre de Moscou et 8
comédiens ont été choisis pour jouer Ils se marièrent et eurent beaucoup (texte choisi par la directrice
russe pour la « vision française » de l’amour qui s’en dégagerait).
Puis afin de permettre une série de représentations en France, un couple d’acteurs français a été
« introduit » au spectacle et la traduction a donc fait complètement partie de la pièce. Le couple d’acteurs
français fait office de commentateurs, d’observateur du spectacle et petit à petit, il prend part au spectacle.
L’aller-retour entre les cultures française et russe est donc fondateur de la création du spectacle.
Le texte de Philippe Dorin a été traduit en russe. Voici le titre en langue russe :
Онипоженились, иунихбыломного
Pour Sœur, je ne sais pas quoi frère, la pièce est imprégnée d’une atmosphère où se mêlent leurs
souvenirs et leurs impressions rapportées de leur voyage moscovite, leur admiration pour la peinture
russe, leur lecture des Trois Sœurs de Tchekhov, l’histoire de ce pays (les références au tsarisme, au
communisme…) et les témoignages de femmes très fortes recueillis là-bas.
“La Russie servira de toile de fond, de trompe l’œil à ce nouveau spectacle [Sœur, je ne sais pas quoi frère].
Nous allons jouer à la Russie, à travers l’admiration que nous portons à la peinture russe de la fin du XIX
siècle, les souvenirs que nous avons du théâtre russe, et les impressions rapportées de notre voyage à
Moscou (…). Entre princesses esseulées et gardes rouges en marche, ces cinq femmes portent l’imaginaire
que nous avons des femmes russes,à la fois volontaires, clinquantes et désemparées. De la plus vieille à la
plus jeune, c’est une cascade de femmes, imbriquées les unes dans les autres comme les cinq éléments
d’une poupée Matriochka. Nous aimerions profiter de la représentation de toutes les générations sur
scène pour parler de la transmission et de la descendance. Un peu comme dans la peinture, nous
voudrions aborder l’art du portrait. Nous rapprocher de chacune de ces femmes afin de capter leur secret.
Il y a un homme dans le cœur de chacune d’elles, et ce n’est pas le même. A l’intérieur du secret commun à
toutes, il y a un secret propre à chacune.”
Sylviane Fortuny s’inspire beaucoup des arts plastiques pour créer ses spectacles. La peinture, la sculpture,
la photographie, le cinéma nourrissent son imaginaire pour créer l’univers et le décor de ses pièces. Son
travail fait parfois référence à la Russie. La manière de mettre en scène les personnages évoque également
l’art du portrait en peinture. Individuel, pour se rapprocher un peu plus de ses femmes et capter leurs
secrets, mais surtout de groupe, puisque les cinq femmes sont présentes au plateau sur toutes les scènes,
dans l’idée d’un huis clos. Les motifs graphiques et les jeux sur la lumière présents dans la pièce rappellent
également les arts plastiques.
Voici quelques-unes des œuvres qui ont accompagné Sylviane Fortuny dans la création de Soeur, je ne
sais pas quoi frère :
-
Abram Arkhipov, peintre russe, En visite, 1915
Ilya Repine, peintre russe, On ne l’attendait pas, 1884
Ilya Repine, peintre russe, Le grand-duc choisissant sa fiancée, 1885.
Valentin Serov, peintre russe, La jeune fille aux pêches, 1887
12
2/ Autour de Sœur, je ne sais pas quoi frère
A/ Jeux de construction : des histoires à reconstruire
Un fusil, une poupée, une menace extérieure… Sœur, je ne sais pas quoi frère nous plonge au cœur d’une
intrigue, tel un joueur de Cluedo en proie à démêler les fils d’une enquête policière.
“Notre idée, c’est celle d’une histoire policière, qui se déroulerait dans le huit clos d’une maison, à la
manière d’une partie de CLUEDO. Cinq pièces d’une même demeure, représentées par des chaises
disposées de manière différentes. Les cinq personnages passent de l’une à l’autre. Cinq objets qui sont les
clés du mystère qui se noue ou se dénoue au cours de leur visite. Parmi ces cinq objets, il y a la poupée
que la petite fille tient constamment dans ses bras.”
Photo 1
Photo 2
Photo 3
Photo 1, 2 et 3 : Photos du spectacle, crédits : Ludovic Bronner
Proposition : Travailler autour de la construction d’un récit policier comme un Cluedo
En amont du spectacle : Travailler sur l'univers policier.
- Chercher tous les mots liés au genre policier et les définir: enquêteur/ délit- crime/ victime/ arme du
crime/ mobile/ suspect/ mode opératoire/ coupable...
- A partir des photos de la pièce, émettre des hypothèses : Qui sont les personnages ? Où se passe l’action?
(chez elles ? Dans une chambre?) Que peut-il se passer ? (fusil) Quoi ? (pleurent ? Jouent? Quelqu'un va
mourir ?) Pourquoi ?
- Faire rédiger un dialogue entre les personnages (ex : elles établissent un plan...)
En aval du spectacle : Débat autour des « zones d'ombre » de la pièce
- Discuter autour de la chronologie bouleversée, de l’histoire à reconstruire
- A l’aide des extraits du texte en annexe 1, chercher ensemble la cause du « secret » qui unit les sœurs.
- Puis rattacher la pièce à l'univers policier (qui est la victime ? le futur époux de Carole ? De Sophie ? le
père ? Quel mode opératoire a été utilisé ? Quel est le mobile ? (mariage forcé ? colère du père...).
- Rédiger l'interrogatoire des cinq filles par le policier qui découvre le/les corps, ou faire rédiger/ jouer le
monologue de chaque fille qui donne sa version des faits (jouer sur les différents points de vue).
13
B/ Des histoires de sœurs
Dans Sœur, je ne sais pas quoi frère, on retrouve cinq sœurs assez improbables. Dans la genèse du
spectacle, c’est justement la différence de ces comédiennes (avec qui Sylviane Fortuny et Philippe Dorin
avaient envie de travailler) qui les a incités – par esprit de contradiction – à en faire des sœurs.
a) Des sœurs improbables et mystérieuses
Liste des personnages du spectacle
ELISABETH, une femme de plus de 70 ans
CATHERINE, une femme entre 35 et 40 ans
CAROLE, une femme entre 35 et 40 ans, un fusil à l'épaule
SOPHIE, une jeune fille d'une vingtaine d'années, très jolie
LA PETITE, une petite fille de 9 ans, une poupée dans les bras
Proposition : A l’aide la liste des personnages, mettre en évidence des personnages au sein de la fratrie
(semblables et différents)
En amont du spectacle :
A partir de la table des personnages ci-dessus ou de photos du spectacle (annexe 3), questionner les
enfants sur la relation improbable des sœurs (observer – préciser qu’il s’agit de sœurs et laisser réagir…) :
- Qui voit-on ? Quel lien les unit ? En quoi les sœurs semblent-elles différentes ? Décrire.
- Faire imaginer de courtes scènes à partir des images.
En aval du spectacle :
Echanger avec les élèves :
- En quoi les sœurs se ressemblaient-elles ? En quoi étaient-elles différentes ? Quels étaient leurs
traits de caractères dominants ? Quels adjectifs leur correspondraient le mieux ? (Piocher dans une
liste d'adjectifs)
- Réflexion sur le titre : « Sœur, je ne sais pas quoi frère » : quel est le sens ? Que pensez-vous du jeu
de mots : frère/ faire? Cela fait-il penser à une fratrie qui s'ennuie ? A autre chose ? Pourquoi
utiliser le mot « frère » alors qu’il n’y a que des femmes ?
- Au sujet du lieu où vivent les sœurs : Où cela se passe? Emettre des hypothèses. Pourquoi sontelles seules ? Les parents sont-ils partis ? Où ? Sont-elles orphelines ?
- Puis interpréter : Que font des frères- sœurs qui se retrouvent ensemble dans une même pièce ?
Une dispute ? Des jeux ? Des discussions ? Imaginer des scènes en lien avec les réponses des
élèves.
- Puis faire jouer les scènes : des frères et sœurs attendent leurs parents dans une pièce de la
maison : jouer l'attente et le passage d'un sentiment à un autre...
b) La fratrie, le groupe, la tribu…
Cette fratrie de cinq sœurs peut-être aussi considérée comme une sorte de groupe.
Proposition : montrer la difficulté de la prise de parole et des déplacements en groupe
- Faire écrire puis jouer des scènes à 4-5 personnages autour du thème de la fratrie/famille/relations
familiales.
- Proposer des exercices théâtraux autour du déplacement du groupe : la « bulle » : les élèves
forment un groupe, une bulle, ils se tiennent debout, serrés les uns contre les autres mais sans se
toucher. Une personne du groupe est le chef, il va avancer lentement dans l'espace et le groupe
entier, « la bulle » autour de lui, doit le suivre sans se « déformer ». Chacun doit donc rester à la
14
même distance de son voisin que lorsqu'il a commencé. Le groupe doit donner l'illusion de ne faire
qu'un → montrer la difficulté de former un groupe sur scène, de ne faire qu'un.
Proposition : Développer le travail de chœur.
- Evoquer le « chœur » dans la tragédie grecque (Eschyle puis Sophocle) : un groupe qui parle d'une
seule voix et traduit de façon excessive ses sentiments.
- A l’aide d’un texte court choisi, demander aux élèves de parler d'une seule voix. Recommencer au
début du texte si non-écoute afin de développer l’écoute, la concentration et l’esprit collectif.
- Faire jouer le court extrait (« Sœur, je ne sais quoi frère » de P. Dorin, École des Loisirs, 2013) en
annexe 5 pour travailler les répliques en chœur.
c) Inspirations et prolongements sur la fratrie
Pour préparer le spectacle, la compagnie Pour ainsi dire a interrogé des jeunes femmes diverses au sujet
de leur rapport à leur sœurs. Les entretiens (dont des extraits ont été compilés dans le recueil « Et ta
sœur ? » - cf. annexe 5) ont nourri l’écriture du spectacle.
Proposition : A l’aide des extraits de Et ta sœur ? en annexe 5, questionner les élèves sur leurs liens avec
leur(s) frère(s) et sœur(s).
- Quel est leur lien ? Bonne entente ? Dispute ? Fusionnel ?
- Quelle est leur place dans la fratrie ? Comment s’y sentent-ils ?
- Lister les impressions
- Puis à l’aide des mots, imaginer des situations mimées avec un lien entre les personnages et un
élément déclencheur qui change selon le choix des spectateurs (rivalité/fusion etc).
Prolongements :
La relation à l’autre dans le cercle familial est un thème très répandu dans des œuvres
cinématographiques ou littéraires. A titre d’exemple, le film Mustang de Deniz Gamze Ergüven (qui
raconte les vexations et l’enfermement subis par des orphelines turques destinées à être mariées), Virgin
Suicides de Sofia Coppola, ou encore 8 Femmes de François Ozon.
En littérature jeunesse, il y a des exemples tels que le livre « La légendaire histoire des douze sœurs
Flûte » de Ronan Badel, Vincent Cuvellier, « Les quatre filles du Docteur March » de Louisa May Alcott,
« Fleurs captives » de Virginia-C Andrews (en plusieurs tomes).
Proposition : trouver des œuvres (livres, films, musiques) qui traitent de la fratrie
- Noter les idées des élèves
- Comparer les histoires
- Mettre en parallèle les affiches/couvertures des œuvres trouvées et des images du spectacle (en
annexe 3).
15
C/ Les secrets de famille
Le spectacle met en avant les secrets de famille, comme le souligne Philippe Dorin :
“Notre idée, c’est de parler du secret de famille. Ignoré de tous, et pourtant au cœur de la vie de chacun, le
secret de famille intrigue, empoisonne souvent les relations familiales et se transmet d’une génération à
l’autre, sans qu’on ne connaisse plus son origine. Entre ces cinq femmes, il y a des mots qui ne doivent pas
être prononcés, des sujets qui fâchent sans qu’elles sachent pourquoi. Ce secret passe par les hommes. La
présence de ces cinq femmes fait apparaître de façon éloquente l’absence des hommes. Celle qui sait
supplie l’auteur de la faire taire. Dire ou ne pas dire, telle est la question de l’auteur et du théâtre. Et si ce
secret était caché dans la poupée que la petite fille tient constamment dans ses bras ?”
Proposition : questionner les élèves sur leur rapport au secret
- A quelle personne peut-on confier des secrets ? Pour quelles raisons ?
- Quels types de secrets peuvent exister ?
- Ont-ils des secrets ? Qu’est-ce qu’on ressent quand on garde un secret ? Est-ce une sensation
agréable/désagréable ?
- Connaissent-ils des histoires où le secret a une part importante ? une histoire avec la trahison d’un
secret?
- Qu’est-ce qu’un secret de famille ? un secret qui se transmet de générations en génération ? un
secret dont personne ne parle dans sa famille ?
- A l’aide de la citation suivante, interpréter les paroles de Philippe Dorin : Que veut-il dire ? Etesvous d’accord ?
" Ça se dit pas, les secrets. Ça se dit tellement pas que des fois on s’en rappelle même plus. Mais ils restent
là, gravés à l’intérieur de nos têtes. Pour toute la vie ! Et même encore après ! Ce sont nos enfants qui les
portent, nos secrets, sans le savoir. Comme nous aussi, on porte les secrets de nos parents, sans le savoir. "
16
3/ Autour de Ils se marièrent et eurent beaucoup
« Mon amour,
La première fois que je t'ai embrassée sur la bouche, il y eut un terrible tremblement de
terre en Amérique Centrale. Pourtant, je n'avais rien senti de particulier, si ce n'est ce léger
étourdissement que l'on a quand on embrasse une fille sur la bouche pour la première fois.
Ton bien aimé. »
A/ La relation à l’autre : des histoires d’amour en kit
Dans le spectacle, l’amour est omniprésent ; une suite de petits duos, placés dans le décor d’un dancing et
ponctués par des petits tours de danse, permettent de changer de lieu, d’amoureux ou de sujet en deux
temps trois mouvements. Est-ce l’amour qui passe ou les amoureux qui sont changeants ? Uniques ou
multiples, les histoires d’amour nous transportent. Ce sont elles qui font tourner le monde.
Proposition : définir l’amour
- Évoquer le thème du spectacle d'après le titre : Qu'est-ce que c'est l’amour ? Quels proverbes
connaît-on sur l'amour ? Comment l'amour est-il représenté ? Évoquer les clichés (offrir fleurs,
déclaration d'amour, cœurs, coup de foudre...)
- Comment sait-on qu'on est amoureux ?
- Questionner : quelles sont les manifestations physiques de l'amour (rougir, bégayer, trembler...), les
pensées obsédantes... Quelle est la première question que l’on pose quand on est amoureux ? Que
se passe-t-il après la rencontre amoureuse ? Y’a-t-il des conséquences à l’amour ? Nécessité du
mariage ? D’avoir des enfants ? Est-ce que l'amour est la fin ou le début de quelque chose ?
- Faire écrire/jouer le monologue d'un personnage amoureux, la déclaration d'amour d'un
personnage, faire jouer une rencontre amoureuse...
- Faire inventer des scènes ayant pour thème l'amour, ou les jouer de façon mimée...
- Mettre en lien avec des poèmes lyriques (Aragon, Eluard, Ronsard, Louise Labé...) ou des
déclarations d'amour (ex : Cyrano de Bergerac d'Edmond Rostand)
- Toujours à l’aide du titre, imaginer combien il y a d’histoires d’amour dans le spectacle.
Proposition : Lecture débat autour du thème de l'amour, du couple à l’aide des extraits en annexe 2)
- Faire écrire un monologue sur l'amour (qu'est-ce que c'est ?) à l'usage des plus jeunes (après
analyse de l'extrait 3 par exemple)
- Autour des petits mots d’amours qui sont dans le spectacle, les enfants doivent écrire deux petits
mots d’amour : un qui raconte une rencontre avec lequel on fait un verre en papier, un qui raconte
une rupture qu’on déchire en 1000 morceaux
- Travailler sur le langage amoureux : ce qui se dit et ce qui ne se dit pas, ce qui se fait ou pas. Vous
pouvez faire un parallèle avec des œuvres littéraires telles que Fragments du discours amoureux
ou Orsenna sur les jeux de langage.
PROLONGEMENT - Goûter philo organisé par le Théâtre du Nord
le samedi 26 mars
après la représentation de Ils se marièrent et eurent beaucoup de 14h30, au théâtre de l’Idéal
Plus d’infos : http://www.theatredunord.fr/spectacle/ils-se-marierent-et-eurent-beaucoup/
17
B/ Un langage particulier : russe et français
Créé en 2004 et joué plus de 300 fois en France, le spectacle a été recréé en 2013 dans une version en
langue russe au Théâtre Durova de Moscou.
C’est cette version qui nous revient aujourd’hui, augmentée de deux comédiens français qui, tout en
traduisant la langue russe, deviennent des observateurs, des commentateurs et eux aussi des
protagonistes de ces duos amoureux.
Une sorte de récréation en deux langues, dans laquelle on saisit tout, même si on ne parle pas le russe !
Propositions :
- Imaginez le titre de la pièce dans d’autres langues.
- En quoi la mise en scène peut-elle être particulière ? Quels types de rapports entre les personnages
implique-t-elle ?
Lorsque les comédiens parlent en russe, on comprend malgré tout beaucoup de choses.
- Travailler le langage non verbal. Rejouer par exemple une scène d’amour en n’utilisant que du
grommelot (langue inventée, sans sens). Comment fait-on passer un message ? Travailler le corps,
le ton, l’intention, le rythme.
- Quelques
exercices
théâtraux
avec
du
grommelot
sont
disponibles
ici :
https://theatrespontane.wordpress.com/2011/11/17/grommelot-langue-imaginaire-communiquer/
Par ailleurs, on peut également travailler après la représentation sur l’imaginaire de la langue russe.
- Qu’est-ce que cela évoque d’entendre des gens parler en russe ? A fortiori, parler d’amour… A-t-on
des attentes, des a priori, qui sont liés à cette langue ?
- Ecouter des phrases prononcées en russe et essayer d’imaginer ce qu’elles signifient.
On peut par exemple s’appuyer sur une vidéo de la version russe du spectacle (qui exploite le lien entre la
culture russe et la culture française) : https://www.youtube.com/watch?v=9QyF73xTY0Y
18
On récapitule !
Des idées de choses à faire en classe avant la venue au spectacle
1/A l’aide de photos du spectacle (annexe 3), questionner les enfants : qui voit-on ? Quel lien unit les
protagonistes entre eux? Décrire.
Faire imaginer de courtes scènes à partir des images et des impressions des élèves.
2/ Décrypter le titre du spectacle (Sœur, je ne sais pas quoi frère ou Ils se marièrent et eurent beaucoup).
Qu’entend-on ? Que comprend-on ? Evoquer le jeu de mots (pour Sœur) et inventer une potentielle suite
(pour Ils se marièrent). A partir de ces premières hypothèses et réflexions, imaginer de quoi le spectacle va
parler, ce qu’on va voir, entendre ? Quel type d’histoires pourrait-on découvrir ?
3/ Evoquer les thématiques des spectacles :
- quelles relations entretenez-vous avec vos frère/sœur(s) ? qu’est-ce que cela fait d’avoir une sœur ? et
cinq sœurs ? quelle histoire peut-on raconter avec cinq sœurs ?
- qu’est-ce que l’amour ? à quoi est-ce que cela sert d’aimer ?
Des idées de choses à faire en classe après la venue au spectacle
1/ Mettre des mots sur l’expérience de spectateur. Qu’avons-nous vu (couleurs, formes, objets) ? Qu’avonsnous entendu (sons, musiques, bruitages) ? Qu’avons-nous ressenti (émotions) ?
2/ Discuter de la chronologie bouleversée de l’écriture, des histoires à reconstruire. Y avait-il une histoire
dans le spectacle ? Pourquoi ne retrouvait-on pas de schéma narratif traditionnel ? Est-ce que cela
perturbait la compréhension de l’histoire ? Si oui, qu’est-ce que cela vous évoque ?
3/ Ecrire, inventer les ellipses de l’histoire.
Note : si vous produisez des choses en classe (recueil de mots, dessins, etc.), l’équipe des relations
avec le public du Grand Bleu serait très heureuse si vous pouviez nous les envoyer! Merci d’avance !
19
ANNEXES
Annexe 1 - Extraits de Sœur, je ne sais quoi frère (Théâtre l'Ecole des
Loisirs, 2013)
Extrait 1
Les voilà qui réapparaissent de l'autre côté du paravent, habillées en princesses.
Elles se précipitent vers le public, pressées de raconter leur histoire.
Sophie : Alors le Tsar nous a fait venir !
Élisabeth : Le père nous avait mis des belles robes.
Catherine : Il vait dit : « Faites pas les folles, les gars ! »
Carole : Nous : « Non non ! »
Catherine : Tu parles ! (…)
Sophie : On nous fait entrer dans un petit salon. (…)
Catherine : Le Tsar nous enfile la chaussure.
Carole : Comme par miracle, à toutes, elle nous allait.
Élisabeth : Moi, c'était pas mon genre.
Carole : Mais elle t'allait très bien, point.
Catherine : Même à la petite, ça lui allait comme un gant.
Élisabeth : Sauf à Sophie !
Catherine : Sauf à Sophie !
Sophie : Sauf à moi !
Carole : Pas moyen de faire entrer le pied de Sophie dans cette maudite tatane !
Élisabeth : Pauvre Sophie !
Extrait 2
Sophie tend la main qu'elle tient précieusement fermée depuis le début.
(...)
Élisabeth : Ouvre ta main, Sophie !
Sophie ouvre sa main. Il y a une petite clé à l'intérieur.
Catherine : Tiens, c'est pas une petite clé, ça ?
Élisabeth : Si, on dirait bien une petite clé.
Sophie : Qu'est-ce qu'elle fait là, cette petite clé ?
Élisabeth : C'est une drôle de petite clé, ça.
Catherine : Si y a une petite clé, c'est qu'y a une petite porte.
Élisabeth : Forcément, y a toujours une petite porte à qui il manque une clé.
Sophie : Ou une petite clé à qui il faut une porte.
Catherine : Forcément !
Sophie : Forcément, oui !
Élisabeth : Bien sûr, forcément !
Sophie : C'est une aubaine, ça.
Carole : Tu n'airais pas pu l'ouvrir plus tôt ?
Sophie : Je ne devais le faire sous aucun prétexte.
Élisabeth : Eh bien, elle n'attend plus que nous pour filer , cette petite clé.
20
Extrait 3
Comme si elles posaient sur une photo, face au public,
SOPHIE: C'est qui la jeune fille qui parle?
CATHERINE: C'est toi.
SOPHIE: C'est qui, celles qui se taisent, autour d'elle.
CATHERINE: C'est ses sœurs. (...)
SOPHIE: Qu'est-ce qu'elles attendent, toutes ensemble ?
CATHERINE: Un taxi!
SOPHIE : Où est-ce qu'elles doivent aller?
CATHERINE: À la mairie!
SOPHIE : Pourquoi la grande, au fond, elle porte un fusil ?
CATHERINE : Parce qu'elle va se marier.
SOPHIE: C'est qui l'heureux élu?
Silence.
C'est quoi, ce silence?
CATHERINE : C'est leur secret.
SOPHIE : Quel est le rapport avec le fusil ?
CATHERINE : Il est lourd à porter.
SOPHIE : C'est pour ça que ça rigole pas trop?
CATHERINE : Sans doute, oui !
SOPHIE : Pourquoi la scène se passe en Russie ?
CATHERINE: Parce qu'on vous pose pas de questions.
SOPHIE: Est-ce que ça veut dire que la jeune fille qui parle, elle ferait mieux de la boucler ?
CATHERINE ; Plutôt, oui !
Sophie se tait,
CAROLE: C'est tout?
SOPHIE : Oui !
CAROLE : Alors, exécution !
Elles sortent toutes en coulisse, sauf Sophie qui reste à sa place. Un temps.
CATHERINE, off: Chante, Sophie!
SOPHIE, fredonnant: Jésus-Christ se sacrifie Et demain tu te maries.
On entend un coup de fusil en coulisse. Elles reviennent toutes à leurs places.
CAROLE: Quelqu'un veut ajouter quelque chose ?
SOPHIE: Qu'est-ce qu'elle a répondu, la jeune fille?
CATHERINE : Sans commentaire !
SOPHIE : Sans commentaire !
CAROLE : Parfait !
Extrait 4
LA PETITE : Catherine, père !
Catherine se précipite vers la chaise.
CATHERINE, à la chaise : C'est pas vrai, père! C'est pas moi. J'ai rien fait, moi. Quand je l'ai vu, le
fusil, il y était déjà plus. Je vous jure, père. D'abord, moi, j'étais pour le couteau. Demandez à
Élisabeth! J'y suis pour rien, moi. J'adore les mariages, surtout à la mairie. C'est sacré, les maris. Je
vous assure, père. Y en aura pas pour tout le monde. La preuve : moi ! Quel gâchis ! (Elle pleure.)Pitié,
père! Faut pas accuser n'importe laquelle sans savoir que c'est Carole qui a fait le coup.
21
Carole attrape le fusil sous le canapé. Elle le pointe vers la chaise.
CAROLE: Sortez! Sortez d'ici tout de suite!
Elle s'approche de la chaise. Elle la renverse. Elle prend la paire de chaussons qu'elle bazarde. Elle se
tourne vers les autres.
CAROLE: C'est fini maintenant! On ne parle plus de tout ça.
Sophie sort en coulisse avec la chaise, la veste et le chapeau
Extrait 5
Élisabeth, Carole, Sophie et la Petite se mettent subitement à pleurer.
CATHERINE: Pourquoi vous pleurez?
LES AUTRES: Parce qu'on est très très très malheureuses.
CATHERINE : Pourquoi vous êtes très très très malheureuses ?
LES AUTRES: Parce qu'on est très très très méchantes.
CATHERINE : Vous n'êtes pas méchantes du tout.
LES AUTRES: Si! On est très très très méchantes.
CATHERINE: La méchante, c'est plutôt celle qui vous a dit ça. Qui c'est qui vous a dit que vous étiez
méchantes?
LES AUTRES : Très très très ! CATHERINE : Très très très ! LES AUTRES : Toi !
CATHERINE : Moi, je vous ai dit que vous étiez très très très méchantes ?
LES AUTRES: Oui!
CATHERINE: Quand c'est que je vous ai dit que vous étiez très très très méchantes?
LES A.UTRES: Tout à l'heure!
CATHERINE: Tour à l'heure, je vous ai dû que vous étiez très très très méchantes?
LES AUTRES : Non ! Tout à l'heure, tu vas nous le dire.
CATHERINE: Et pourquoi, tout à l'heure, je vous dirai que vous êtes très très très méchantes?
LES AUTRES: Parce que toi t'en auras pas.
CATHERINE: De quoi?
LES AUTRES : De mari ! CATHERINE: Ah bon?
LES AUTRES : Oui !
CATHERINE: Et pourquoi moi, j'en aurai pas, de mari?
LES AUTRES : Parce que y en aura pas pour tout le monde, des maris!
CATHERINE : Et pourquoi ça tombe sur moi ?
LES AUTRES : Parce que t'es très très très moche !
Catherine se met à pleurer à chaudes larmes. Les autres s'arrêtent aussitôt.
LES AUTRES : Pourquoi tu pleures, Catherine ?
CATHERINE: Parce que vous êtes très méchantes !
LES AUTRES : Très très ?
CATHERINE : Très très très !
Un temps.
22
Extrait 6
CATHERINE: Voilà! C'est que je suis amoureuse. J'ai rencontré un homme. D'abord, je ne le voyais
pas. Il était comme tous les autres. Et puis, sans m'en apercevoir, je n'ai plus vu que lui. Il est
communiste. J'ai aimé ce qu'il dit. Il fait très bien la cuisine. Et lui, il m'aime aussi.
CAROLE: On n'a pas entendu.
CATHERINE: Demain, à la pointe du jour, il me chercher avec sa petite auto pour me conduire en
ville, dans le petit logement qu'il a loué pour nous deux.
CAROLE: C'est drôle comme on n'entend rien
Annexe 2 - Extraits du texte Ils se marièrent et eurent beaucoup (Théâtre
l'Ecole des Loisirs, 2004)
Extrait 1
Juliette Béquette : Pour disparaître dans le monde des fées, il suffit d'enfiler des bottes, de compter
jusqu'à trois et de dire « et hop ! » sur un certain ton. Comme ça : un, deux, trois, et hop !
Elle ne disparaît pas.
Juliette: Raté ! Je recommence. Attention : un, deux, trois, et hop !
Elle ne disparaît toujours pas.
Juliette : Encore raté ! Je répète : un, deux, trois, et...
L'Autre sans les bottes revient.
Extrait 2
L'Autre : Alors, tu veux pas venir ?
La Promise : J'ai peur !
L'Autre : De quoi ?
La Promise : Et si jamais t'as le couteau entre les grandes dents ?
L'Autre : Est-ce que j'ai l'air d'avoir les grandes dents ?
La Promise : Non !
L'Autre : Alors ?
La Promise : Mais le couteau, oui !
23
Extrait 3
Au public.
JULIETTE BÉQUÊTTE: L'amour, c'est pas compliqué. Soit t'es un garçon, soit t'es une fille. : t'es un
garçon, pas de problème! Si t'es une c'est un peu plus difficile. Soit t'es belle, soit t'es moche. Si t'es
belle, pas de problème! Si moche, c'est un peu plus difficile. Soit t'es soit t'es pauvre. Si t'es riche, pas
de problème! Si t'es pauvre, c'est un peu plus difficile. Soit t'es en pantalon, soit t'es en jupe. Si t'es en
pantalon. Pas de problème! Si t'es en jupe, c'est un peu difficile. Soit tu sais parler anglais, soit tu sais
pas parler anglais. Si tu sais parler anglais, pas de problème! Si tu sais pas parler anglais, c'est un plus
difficile. Soit tu cours très très vite, soit t'es un peu longue à la détente. Si tu cours très vite, pas de
problème ! Si t'es un peu longue à la détente, c'est un peu plus difficile. Soit tu lui colles une tarte de la
main gauche, soit tu1ui en colles une de la main droite. Y a pas d'autre solution.
Extrait 4
Juliette Béquette et le Futur adossés au mur, désœuvrés.
JULIETTE: Ça y est, j'ai compris.
LE FUTUR: Hein ?
JULIETTE: J'ai compris pourquoi les histoires d'amour, c'est si difficile de les faire durer longtemps.
LE FUTUR: Ah?
JULIETTE: Parce que le nombre des amoureux n'est pas divisible par deux.
LE FUTUR : Bon !
JULIETTE: Je t'assure. Je viens de compter, là. J'ai beau tourner ça dans tous les sens, il y a toujours
une fille en plus.
LE FUTUR: Tiens!
JULIETTE: Et alors, cette fille-là, elle essaie de se trouver un garçon, comme les autres. Y a pas de
raison. Et ça bouscule toutes les histoires d'amour, jusqu'à ce qu'une autre se retrouve sur la touche.
LE FUTUR : Curieux !
JULIETTE: C'est sans arrêt comme ça. Et là, c'est mon tour.
Un temps.
Extrait 5
JULIETTE: C'est pas ta fiancée qui est partie au bout du monde. C'est toi qui lui tourne le dos.
LE FUTUR: Comment tu fais pour voir à l'intérieur des chemises, toi?
JULIETTE: Comme ça !
LE FUTUR: C'est pas que je lui tourne le dos, Juliette Béquette.
JULIETTE: C'est quoi, alors?
LE FUTUR: C'est que, ma fiancée et moi, on se parle plus ! Y en a un qu'a dit « non ! », l'autre qu'a dit
«si!», et c'était fini. C'est pas que je lui tourne le dos, Juliette Béquette. C'est que je réfléchis.
JULIETTE: À quoi?
LE FUTUR: À un mot, Juliette Béquette! Un mot que je pourrais lui dire et qui nous ferait repartir
ensemble.
JULIETTE: Quel mot ?
LEFUTUR: Je ne sais pas, Juliette Béquette. C'est toi la fille d'écrivain.
JULIETTE: Y en a tant, des mots !
LE FUTUR: II faut que tu m'en trouves un, là. Un mot que je pourrai lui offrir comme un cadeau caché
dans mon dos, quand je me retournerai.
24
Annexe 3 - Photos des spectacles
Sœur je ne sais pas quoi frère
25
Ils se marièrent et eurent beaucoup
26
Annexe 4 - Bibliographie de Philippe Dorin
À L’école des loisirs – Théâtre
Dans la vie aussi, il y a des longueurs (conférence) – 2015
Soeur, je ne sais pas quoi frère – 2013
2084 – 2012
Abeilles, habillez-moi de vous – 2010
L’hiver, quatre chiens mordent mes pieds et mes mains – 2008
Le monde, point à la ligne – 2007
Les enchaînés – 2007 (Prix de la médiathèque Armand Gatti – Cuers)
Ils se marièrent et eurent beaucoup – 2005
Dans ma maison de papier, j’ai des poèmes sur le feu – 2002
Un œil jeté par la fenêtre – 1999
En attendant le Petit Poucet – 1999
Sacré Silence -1997
Aux Solitaires Intempestifs
One two, one twothree four suivi de Deux mots – 2009
Bouge plus !suivi de Christ sans hache – 2007
Aux Editions Théâtrales – Jeunesse
Deux citrons – 2012 (dans la collection « Si j’étais grand »)
Aux Editions La Fontaine
Villa Esseling Monde – 1989
Aux Editions du CNES – « La Chartreuse » Villeneuve-lez-Avignon
Philippe Dorin : itinéraire d’auteur n°9 – 2
27
Annexe 5 - Extraits du Recueil « Et ta sœur ? », Entretiens de femmes à propos de
leurs relations avec leur(s) sœur(s), ayant servi à l’écriture du spectacle.
Lydie
Tout je connais bien de ma sœur. Il n’y a rien que je connais pas.
-
Qu’est-ce que tu adores, chez elle ?
-
Tous ses jouets !
-
Qu’est-ce que tu n’aimes pas ?
-
Qu’elle parte de sa chambre.
-
Qu’est-ce que tu lui envies ?
-
D’avoir des bouclettes, plein de bouclettes partout, devant, derrière.
-
Qu’est-ce que tu as en commun avec elle ?
-
Le D ! Le D de Lydie, et celui de Déborah !
-
Qu’est-ce que tu n’oses pas lui demander ?
-
Je peux lui poser des questions, et tous les jours.
-
C’est qui, l’homme que vous avez ensemble ?
-
C’est papa.
-
Y en a-t-il un autre ?
-
Je comprends pas.
-
Un souvenir que vous avez ensemble ?
-
Je comprends rien.
28
Laurence
Moi, mes sœurs, elles ont vécu leur vie d’adulte, j’avais trois ans. Y avait plus personne à la maison.
La maison était la même. C’était les parents qui étaient différents. Ma sœur aînée, elle a dit à ma mère
quand elle était enceinte de moi : « tu vas te balader en ville, qu’on voit bien que cet enfant, c’est le
tien. »
Moi, mon souvenir, c’est de me taper les soirées toute seule. Mes parents étaient âgés. Leurs amis
n’avaient plus d’enfant. On allait chez eux. J’ai passé des soirées entières à lire leur Tintin et Milou. Je
les connaissais par cœur.
Je disais : « j’ai pas eu de grand mère. » Et ma sœur, elle a dit : « oui, mais tu as eu des sœurs. » je
crois que je les amusais. J’allais chez elles. J’étais une enfant, mais pas la leur. Elles ont eu plus besoin
de moi que moi d’elles.
J’ai été tata à neuf ans. J’ai eu l’impression d’être dans un autre monde. Mon neveu, c’était pas rien.
L’enfance, c’est un peu à ce moment-là que je l’ai rencontrée, avec un plus petit que moi.
Mes sœurs ont un regard sur mes parents qui restera toujours un mystère pour moi. Je ne saurais
jamais comment ils étaient lorsqu’elles étaient petites. On aime tous la musique et la danse. Mes
parents devaient jouer du violon, tous les deux, le dimanche. Ils ont du faire ça, quand ils étaient plus
jeunes. Y avait pas la télévision. J’imagine que mes sœurs se levaient pour danser au son de la
musique, dans la cuisine. C’était d’autres moments de vie. Ça, je l’ai jamais connu.
Je les imagine aussi qui voyageaient tous ensemble en voiture, dans les années cinquante. Ils
s’étaient arrêtés en Italie, dans un hôtel. A cinq, il fallait deux chambres. Y avait des coursives. Mes
sœurs étaient entrées dans une des chambres. Y avait un bouquin genre « le crime était presque
parfait ». Elles ont flippé toute la nuit.
On n’a pas beaucoup de souvenirs communs, toutes ensemble. Un jour, avec ma mère. On était les
quatre sœurs avec maman. Sans mari, sans enfant. C’était dans les Landes, pendant les vacances. On
était dehors. Il faisait beau. Ma sœur nous a raconté sa nouvelle histoire d’amour. Y avait un décalage
entre l’âge et le sujet. C’est des choses dont on parle entre vingt et vingt-cinq ans. Je ne suis pas sûre
qu’on ait parlé de nos histoires d’amour avec notre mère. Là, elle avait un regard bienveillant. C’est
nous, les sœurs, qui étions plus à se poser des questions.
Mon père ! Il aimait passer du temps avec nous. Il avait envie de partager beaucoup de choses avec
nous. Moi, c’était l’humour. Avec mon père, on pensait les choses en commun. Il avait un sens de
l’humour que moi, comme j’avais été seule à la maison, j’étais habituée à comprendre. Pourtant, ma
sœur, en tant qu’aînée, s’attribuait une plus grande complicité avec lui. Mieux savoir ce qu’il fallait
faire pour lui. Surtout à la fin de sa vie. Mais c’est pas parce qu’on a vécu dix-neuf ans de plus avec lui
qu’on le connaît davantage.
Un autre homme en commun ? le mari de ma sœur aînée. Mais ce serait pas le meilleur point
commun, avec mes sœurs. Peut-être encore moins que plus que les autres ! c’est pas le grand frère que
j’aurais pu souhaiter.
29
Isabelle
Ma sœur était beaucoup plus petite que moi. Elle était très affectueuse. Elle adorait se faire prendre en
photo. Je me rappelle ses doudous, son « ninnin » qui sentait les chips, et qu’elle a toujours, malgré qu’elle
soit mère de famille. Moi, j’ai eu deux doudous, Tintin et Milou, qui ont disparu. Un grand drame de ma vie
!
Comme elle arrive à garder sa bonne humeur et son sang froid dans des situations hallucinantes, je
l’admire beaucoup pour ça. Elle qui a été si choyée dans son enfance, elle aurait pu rester complètement
bête devant la vie. C’est elle qui se laisse le moins submerger. A son adolescence, notre mère était très
malade. Notre père était complètement dépassé. Elle a su être efficace. J’admire sa capacité à réagir
positivement. Ça, je lui envie. Ma sœur, c’est l’anti dépression.
Elle oublie toujours quelque chose derrière elle, une écharpe, un briquet. C’est le Petit Poucet. « C’est
pas grave », qu’elle dit. Un exemple, tout bête. Il est onze heures trente. Elle a prévu une super recette aux
concombres. Les invités arrivent à midi. A moins le quart, elle s’aperçoit qu’elle a oublié les concombres. «
C’est pas grave ! » C’est pas grave, mais c’est pénible. Alors, c’est moi qui cours comme une folle.
Elle prend vraiment le bon côté de la vie.
On adore les jeux de société. On a toujours joué, malgré notre grande différence d’âge. Aux dés, aux
cartes, aux dames aussi, quand elle était petite. A des jeux moins connus, comme « le Carcassonne ». C’est
un jeu de plateau. Il faut créer des villes en tirant des cartes. Quand on se retrouve, on est vraiment
contente parce qu’on sait qu’on va jouer. Quand elle vient en Bretagne, on va se faire deux trois soirées.
Ou chez elle, dans le Lot et Garonne, sur les sept jours, on va au moins jouer une fois dans la journée. A
n’importe quel moment, on joue. Là, en février, le seul jour où on n’a pas joué, c’était pour aller voir
l’enregistrement du « jeu des mille euros ».
J’ai une histoire. On avait notre grand-mère qui était remariée. Lui, ce n’était pas notre vrai grand-père.
On ne lui avait jamais dit, à ma sœur. Elle l’a appris le jour de son enterrement. Le monsieur a dit : « il
avait six petits enfants. » Et ma sœur a dit : « non, il en avait onze. » « Mais non, Agnès, nous, on n’est pas
ses vrais petits enfants. » Elle nous en a beaucoup voulu. Elle a cru qu’on lui avait caché. Moi, ce qui
m’avait toujours surpris, c’est que personne n’avait le même nom. Et puis un jour, ma mère m’a dit : « cet
homme, ce n’est pas mon papa. » Ma sœur, pourquoi on ne lui en a jamais parlé ? Sans doute un oubli !
Nous, les aînées, on avait notre mère. Ma sœur, elle avait plus que mon père pour l’écouter. Elle était
très proche de mon père, puisqu’ils ont vécu au chevet de ma mère malade. Un jour, on revenait de
l’hôpital, papa et moi. Il s’est arrêté devant une pharmacie. « Pour maman ? » « Non ! » « Pour toi ? » « Non
plus ! » « Pour Agnès ? » « Oui ! » « Elle est malade ? » Mon père, un peu gêné : « c’est pour le
renouvellement de sa pilule. » moi, j’aurais jamais osé demander à mon père d’aller m’acheter ma pilule.
Ma sœur, elle n’a aucun souvenir de moi sans mon conjoint. Quand elle était petite, Stéphane et moi, on
s’était déjà rencontré. Ma petite sœur et son petit frère, on les emmenait avec nous en vacances. Tiens,
c’est marrant, ça. Avec Stéphane, on a la même composition familiale. On les emmenait au concert, à la
fête foraine, des choses qu’ils ne faisaient pas avec les parents. Ça a été un peu nos cobayes, ces deux-là.
Ils ont participé à la construction de notre couple.
Maintenant, ma sœur, elle a deux enfants. Elle n’est pas mariée. Je crois qu’elle aimerait bien. Mais
c’est lui qui ne veut pas. Je trouve ça bête. C’est mon côté grande sœur, ça. Mais lui, il est agriculteur. S’il
lui arrive quelque chose, ma sœur, elle n’a plus rien.
30
Téléchargement