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UN PEU D’HISTOIRE
Dom Juan est créé le 15 février 1665 au théâtre du Palais-Royal. La pièce remporte
un très grand succès. Mais obéissant probablement à des ordres venus d'en haut,
elle est censurée dès le deuxième jour et disparaît de l'affiche au bout de quinze
représentations. Dom Juan ne sera pas rejouée avant 1841, au théâtre de l'Odéon,
puis en 1847 à la Comédie-Française : pendant plus d'un siècle et demi, c'est la
transcription en alexandrins du texte de Molière, réalisée en 1677 par Thomas
Corneille, qui fut jouée sous le titre de Dom Juan.
La pièce ne fut pas imprimée du vivant de Molière. Elle ne paraîtra qu'en 1682,
dans le tome VII des Œuvres posthumes de Molière, mais dans une version déjà
"adoucie" par La Grange, comédien interprète de Dom Juan et responsable de
l'édition de ses œuvres complètes. La censure interviendra encore, ce qui fait que
le texte de Dom Juan nous est parvenu dans deux états, datant tous deux de 1682 :
le premier correspond à l'édition de La Grange précédant la censure, le second
présentant le texte modifié.
Théâtre
PRINCIPALES mises EN SCENE
1947. La mise en scène de Louis Jouvet à l’Athénée réhabilite une pièce que la
critique avait pris l’habitude de trouver mal ficelée, ou trop compliquée. Jouvet
qui interprète lui-même le séducteur a alors 60 ans.
1953. Bertold Brecht adapte le Dom Juan de Molière pour le Berliner en
supprimant tout ce que les lectures romantiques du mythe de Don Juan ont
ajouté à la pièce. Cette lecture entend revenir au Molière original strictement
comique, sans rien de tragique. Moins libertin qu’épicurien, Don Juan n’est plus
qu’un parasite social, et tous les personnages viennent à la fin passer devant le
trou qui l’a englouti
1953. Jean Vilar monte Dom Juan au festival d’Avignon. Il est « un Don Juan
silencieux », écrira Roland Barthes, « et c’est ce silence de Vilar qui fonde
l’athéisme de Don Juan ».
1969. Patrice Chéreau habille Dom Juan de cuir et, voulant recréer en esprit la
surprise du spectateur de 1665 devant le merveilleux à machines, le confronte
simultanément à deux statues du commandeur.
1978. Philippe Caubère (le Molière du film d’Ariane Mnouchkine) met en scène et
joue Dom Juan au théâtre du Soleil, poussant le comique de la pièce, dans la
tradition des tréteaux et de la farce à laquelle Molière avait été formé.
1979. Antoine Vitez met en scène un Dom Juan malade, intellectuel au bord de la
crise de nerfs (tel Hamlet, il entre un livre à la main), d’emblée marqué par le Ciel.
1980. La mise en scène de Roger Planchon forme un diptyque avec celle d’Athalie
de Racine qui se termine également par un deus ex machina. Une pièce sur
l’impiété, l’autre sur une foi sans faille, pourrait-on croire : Roger Planchon
rassemble les deux volets et met en scène la religion mortifère du XVIIe siècle
dans un même décor, en une unique série de tableaux hantés par la mort et la
souffrance.
1993. Mise en scène de Jacques Lassalle à Avignon, puis à la Comédie Française.