De la Charte de la diversité à la labellisation
L’etat et les entreprises dans la négociation d’une politique de la diversité
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INTRODUCTION
L’évolution de l’action publique est ponctuée par « la démographie galopante des acteurs
pertinents dans les politiques publiques » qui contribuent à retirer à l’Etat le monopole auquel il
prétendait. « Leur existence n’est pas nouvelle, mais leur capacité à faire valoir à la fois leurs
ressources (financières, expertes…), leurs points de vue (représentations du monde, hiérarchie
des priorités…) ou encore leur logique d’action (marché, solidarité,…) ne va qu’en se
renforçant »1. L’idée d’un pilotage centralisé par le haut se trouve remise en cause au profit
d’une approche où l’Etat reste un acteur essentiel, mais néanmoins un acteur parmi d’autres co-
producteurs de l’action publique. La société civile est de plus en plus associée à la conception et
à la mise en œuvre des politiques publiques, via les habitants, les associations, mais également
les entreprises. La sphère étatique est elle-même constituée d’une pluralité d’acteurs répartis
entre les différents ministères et leurs services déconcentrés, mais également les nombreuses
agences liées à l’Etat. Les collectivités territoriales réunissent les régions, les départements, et,
au niveau plus local, les communautés urbaines et les communes.
Pour mobiliser les entreprises, l’acteur public peut avoir recours à différents instruments :
l’usage ou la menace de coercition, la persuasion, l’incitation financière ou encore la
négociation. Or l’acteur public ne souhaite pas, ou n’a pas toujours les moyens de punir. Et il n’a
plus forcément les ressources financières pour mener des politiques réellement incitatives
compte tenu des enjeux économiques des entreprises. De plus en plus, il s’inscrit dans une
démarche pragmatique et tente de négocier avec les entreprises des contrats plus ou moins
formalisés, plus ou moins contraignants, ayant des contenus plus ou moins opérationnels, afin
de favoriser un engagement de leur part. De fait, bien que les entreprises défendent des points
de vue particuliers et s’inscrivent dans des logiques d’actions spécifiques, le succès des
politiques publiques dépend pour partie étroitement de la réception qu’en font les entreprises.
Analyste des politiques publiques et des formes d’action de l’Etat, le département Évaluation des
Politiques Publiques du CRÉDOC s’intéresse depuis plusieurs années aux interactions entre les
acteurs publics et les acteurs privés, aux modes de régulation co-produits par ces acteurs aux
intérêts et logiques différents – si ce n’est antagonistes –, et aux formes de mobilisation des
entreprises dans les politiques publiques. Cette réflexion a été menée sur des champs aussi
différents que les politiques de déplacements urbains et les politiques de l’emploi (lutte contre
les discriminations raciales, égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, …) 2.
1 Gilles MASSARDIER [2003], Politiques et actions publiques, Paris, Armand Colin, p. 76.
2 Bruno MARESCA, Anne DUJIN [2008], « Les logiques d’action des entreprises à l’égard des salariés atteints
du cancer : une comparaison France-Allemange », Cahiers de Recherche du CREDOC , 248 ; Isabelle VAN
DE WALLE, Marianne BRITTON [2007], « La mobilisation des entreprises dans la politique de
développement économique des zones urbaines sensibles », Cahiers de Recherche du CREDOC , n°244 ;
Isabelle VAN DE WALLE [2006], Etat, collectivités territoriales et entreprises face à la mixité fonctionnelle.
L’exemple de l’agglomération nantaise, sur un financement du Ministère de l’Ecologie, du développement
et de l’aménagement durables, Isabelle VAN DE WALLE, [2005], « Commerce et Mobilité - L’activité