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INTRODUCTION
Le promeneur, qui embrasse du regard le spectacle de la vie foisonnante des plantes et des
animaux, jusqu’à celui de la masse minérale de la Terre, ne réalise pas toujours que les
traces et les vestiges de la vie passée, se trouvent dans les roches et les éboulis.
Relativement peu nombreux sont les endroits, à la surface de la Terre, où l’on peut voir que
les roches contiennent des restes fossilisés d’animaux, ressemblant à des moules et à des
escargots. Ces derniers, et d’autres de forme apparentée, constituent de loin la majeure
partie de ce qui est clairement identifié comme des traces de vie. D’autre part, il est évident
que les roches contenant de telles traces de vie sont pour la plupart des calcaires ou des
« shales » (argiles compactées) calcaires, ou des marnes, ou des schistes argileux en
couches intercalées dans des calcaires.
Si l’on prend la peine d’examiner du calcaire sous un verre grossissant ou un microscope, il
est facile de constater que la majeure partie est composée de minuscules coquilles (tests) de
protozoaires (protistes), organismes qui habitent nos océans encore à ce jour. Le zoologiste
Hertwig écrit : « Aucun groupe d’animaux n’a contribué, autant qu’ils l’on fait, à la formation
de nouvelles strates, dans le présent et dans le passé ».
Nous trouvons les protozoaires dans les couches intercalées entre les gisements de charbon,
comme le calcaire à fusulines, et surtout dans le Muschelkalk, dans les calcaires jurassiques,
la craie, et les calcaires à nummulites du début de l’ère tertiaire
.
Si nous évoquons les plateaux montagneux du Jura, les falaises de craie blanche de la côte
sud de l’Angleterre, de la côte balte près de Rügen et beaucoup plus loin, les immenses
plaines centrales du continent américain qui reposent sur des milliers de mètres de craie,
nous devons réaliser que ces impressionnantes couches de calcaire sont composées en
grande partie d’organismes minuscules.
Certes, nous trouvons encore aujourd’hui dans les océans des myriades de ces petites
créatures qui déposent leurs coquilles calcaires (tests) pour former la vase des fonds marins,
mais nous ne pouvons plus observer la formation de formidables dépôts de calcaire comme
ceux du passé. À l’évidence, le foisonnement de la vie est moindre, l’intensité de ces
processus a diminué, et de plus, ces petites créatures tendent à êtres encore plus petits
qu’elles ne l’étaient dans le passé.
Toutes ces observations donnent à penser qu’à l’époque de la formation de ces calcaires, les
processus de vie étaient de loin plus étendus, que les océans où ils se produisirent
prédominaient et que la Terre, dans son ensemble, était beaucoup plus chargés d’eau. Cette
idée s’appuie sur le fait que, dans quelques-unes de ces strates calcaires, nous trouvons les
restes de grands animaux qui, d’abord, ressemblent quelque peu à des poissons, des tritons,
des crocodiles, et ensuite prennent les formes étranges de sauriens géants.
D’après le changement intervenu dans ces formes de la vie animale, nous pouvons constater
que cette époque fut une période de transition significative. La domination de la mer cessa
d’être absolu, du fait de la formation progressive de la terre ferme. Comme nous l’avons vu,
les organismes les plus menus en furent les principaux responsables, du moins en ce qui
concerne ces strates calcaires.