Communiquer Revue de communication sociale et publique 2 | 2009 Varia La société de l’information et l’extension du domaine de la pub The information society and the extension of the field of advertising Suzy Canivenc Éditeur Département de communication sociale et publique - UQAM Édition électronique URL : http://communiquer.revues.org/347 DOI : 10.4000/communiquer.347 ISSN : 2368-9587 Édition imprimée Date de publication : 1 septembre 2009 Pagination : 13-30 Référence électronique Suzy Canivenc, « La société de l’information et l’extension du domaine de la pub », Communiquer [En ligne], 2 | 2009, mis en ligne le 01 février 2015, consulté le 30 septembre 2016. URL : http:// communiquer.revues.org/347 ; DOI : 10.4000/communiquer.347 Ce document est un fac-similé de l'édition imprimée. © Communiquer Ri C S P Revue internationale Communication sociale et publique www.ricsp.uqam.ca La société de l’information et l’extension du domaine de la pub Suzy Canivenc Docteure, PREFics (EA 3207/UMR CNRS 8143), Université Européenne de Bretagne - Rennes 2, France [email protected] Résumé : Cet article s’intéresse aux liens qui unissent la société de l’information au précédent régime « de la consommation ». Nous développerons l’hypothèse selon laquelle la société de l’information s’inscrit moins en rupture de cette dernière que dans son prolongement. Les phénomènes contemporains semblent même témoigner de l’extension du régime de la consommation qui, dans une étrange mise en abîme, fait retour sur son point d’origine en infiltrant le monde de l’entreprise. En nous appuyant sur différents travaux des sciences humaines et l’étude communicationnelle de deux entreprises caractéristiques de la société de l’information, nous soulignerons ainsi les nombreuses similitudes qu’entretiennent la société de l’information, la société de consommation et le management contemporain, se nourrissant d’un même mythe et usant des mêmes techniques pour finalement assurer la reproduction d’un même système. Cette extension du domaine de la pub rencontre cependant de vives critiques mais dont la capacité de résistance semble s’amoindrir. Mots-clés : société de l’information ; société de consommation ; management contemporain ; mythe ; pratiques ; critique. This article deals with the links which join information society with the previous “consumption” regime. We shall develop the hypothesis according to which the society of information registers less in break of the consumption society than in its extension. Contemporary phenomena even seem to manifest the extension of the consumption regime which, in a strange recursive curl, makes return on its point of origin by infiltrating firms. Based on several studies in human sciences and the communicational analysis of two characteristic firms of information society, we shall underline lots of similarities which maintain the information society, the consumption society and contemporary management. They all feed on the same myth and use of the same techniques in order to reproduce the same system. However, this phenomenon meets a strong criticism but its capacity of resistance seems to diminish. Keywords: information society ; consumption society ; contemporary management ; myth ; practices ; critic. Dans les années 1970, alors que la société de consommation fait face à une contestation galopante, une nouvelle « nomination » (Jeanneret, 2005) émerge pour qualifier les sociétés occidentales : « la société de l’information ». Issue conjointement de la révolution économique Certains droits réservés © Suzy Canivenc (2009). Sous licence Creative Commons (by-nc-nd). 13 14 | S. Canivenc RICSP, 2009, n. 2, p. 13-30 qui accompagne l’expansion du secteur tertiaire et de la révolution technologique qui voit naître l’ordinateur, la société de l’information nous annonce des bouleversements majeurs : « démocratisation, autonomie des individus, mobilisation, contraction de l’espace-temps (Neveu, 2006, p. 51) ». La société de l’information nous ferait ainsi entrer dans une nouvelle ère, au plus grand profit de tous. Ce changement de « nomination » nous semble cependant occulter une question centrale : quelle relation, au juste, entretient la notion de « société de l’information » avec celle qui la précédait : la « société de consommation » ? Fait-elle réellement rupture ou incarne-t-elle son simple prolongement voire, plus encore, son extension ? C’est cette question que nous cherchons à éclairer dans cet article en privilégiant cette dernière hypothèse. Nous tenterons ainsi de montrer tout au long de ce texte les nombreuses similitudes qu’entretiennent la société de consommation et la société de l’information, se nourrissant d’un même mythe et opérant selon les mêmes modalités pour finalement assurer la reproduction d’un même système. Nous nous appuierons pour ce faire, sur les grands auteurs ayant étudié les discours accompagnant l’émergence de ces deux « mythes » : Jean Baudrillard (1970) et Stuart Ewen (1983) d’un côté ; Erik Neveu (2006) ou encore Yves Jeanneret (2005) de l’autre. La société contemporaine nous paraît toutefois marquer une étape supplémentaire dans le déploiement de la société de consommation. Ce processus d’expansion prend cependant la forme étrange d’une boucle récursive : après avoir envahi notre quotidien, la société de consommation semble faire retour sur son point d’origine, l’espace de production. La société de l’information qui émerge dans les années 1970 s’accompagne en effet d’une idéologie managériale elle aussi très proche du mythe de la consommation et qui va directement s’inspirer des techniques façonnées par les publicitaires pour les appliquer au monde de l’entreprise. Pour « mettre à l’épreuve » cette hypothèse, nous nous baserons sur l’étude de deux entreprises caractéristiques de la société de l’information du fait de leur activité centrée sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) : l’agence régionale d’une SSII1 (que nous nommerons SI) et un éditeur de logiciels (que nous nommerons Log). La procédure d’enquête qui a guidé ces analyses se base sur une étude conjointe des discours et des pratiques de ces deux organisations. L’étude des discours repose sur une analyse qualitative des chartes d’entreprise, site Internet et Intranet, vidéos, articles, revues et ouvrages réalisés par ces deux entreprises. L’objectif de ce premier travail d’analyse sera de déterminer « de quelles(s) conception(s) des entreprises et des organisations ils sont porteurs (Le Moënne, 2006) » pour souligner leur inscription dans le mythe de la société de consommation. L’étude des pratiques s’inspire quant à elle du champ de la communication organisationnelle prenant place au sein des sciences de l’information et de la communication (SIC). Observations et entretiens ont ainsi accordé une place centrale aux thématiques informationnelles et communicationnelles (telles la circulation de l’information, l’organisation des réunions, les relations internes) que nous appréhendons comme des « indices » (Taylor, 1988), des traces des phénomènes organisationnels renseignant sur le 1. Société de services en ingénierie informatique La société de l’information et l’extension du domaine de la pub | 15 style de leadership des encadrants et dirigeants, la nature des liens interhiérarchiques ou encore la « culture » de l’entreprise. Ces études ont débuté par une période d’immersion d’un mois dans les locaux de ces deux entreprises, qui ont ensuite été suivies pendant un an. Les entretiens réalisés ont porté sur un échantillon large et représentatif de l’ensemble des membres. À Log (composée de treize membres), dix personnes réparties dans les trois pôles de l’entreprise (technique, commercial et administratif) on été interrogées, dirigeant et directeur technique compris. À l’agence régionale de SI (composée de onze membres), sept personnes ont été interviewées, soit le directeur d’agence et six ingénieurs. Un ensemble de données empiriques que nous ferons ici « dialoguer » avec divers travaux en sciences humaines et sociales portant sur les nouvelles formes d’organisation, pour mieux appréhender la portée des discours étudiés et des pratiques observées. Ces deux terrains nous permettront ainsi d’accéder à la traduction empirique du mythe contemporain de « la société de l’information » et de « l’idéologie managériale » pour analyser concrètement les multiples liens qu’ils entretiennent avec celui de la consommation. Ils nous permettront également de constater les réactions que suscite cette extension du « domaine de la pub » et les formes de résistance qui s’y opposent. Le mythe d’une société égalitaire et pacifique Les discours accompagnant l’émergence de la « société de l’information » et de l’idéologie managériale qui lui est consubstantielle semblent entretenir d’étranges similitudes avec le mythe de la « société de consommation ». De part et d’autre, s’offre en effet l’image d’une société égalitaire, pacifique et démocratique puisant au cœur de la critique libertaire. La fin des inégalités Les discours entourant le mythe de la consommation et de l’information ont tout d’abord pour point commun d’« euphémiser » (Brunel, 2004) les inégalités et les conflits existant au sein de la société. Un phénomène d’euphémisation que l’on retrouve en entreprise avec l’idéologie managériale contemporaine. Jean Baudrillard présente en effet le « mythe du bonheur », au fondement de la société de consommation, comme l’héritier de la « révolution qui érige en principe l’égalité des hommes (Baudrillard, 1970, p. 60) ». La société de consommation offre ainsi la promesse d’une « plus large satisfaction des besoins humains en abolissant les barrières de classe entre les ’’possédants’’ et les ’’prolétaires’’ » grâce à une « homogénéisation sociale au plus haut niveau (Baudrillard, 1970, p. 89) ». Désormais, les inégalités sociales peuvent se résorber grâce à la consommation qui offre ainsi une « explication pacifique et dépolitisée » (Ewen 1983, p. 58) du monde social. Jean Baudrillard attribue ainsi au mythe du bonheur et du bien-être « une puissante fonction idéologique de résorption, d’effacement des déterminations objectives, sociales et historiques de l’inégalité (Baudrillard, 1970, p. 61) ». Ce mythe se retrouve parfaitement dans les discours contemporains sur la société de l’information étudiés par Erik Neveu mettant en scène une « société plus égalitaire », une « société pacifiée (…) moins fracturée par les idéologies et les antagonismes sociaux » grâce à la réduction « des inégalités de savoir, de pouvoir, de responsabilité (Neveu, 2006, p. 65, p. 81) » qui accompagne la diffusion des NTIC au sein du tissu social. 16 | S. Canivenc RICSP, 2009, n. 2, p. 13-30 Ici encore, les facteurs sociohistoriques déterminant les inégalités sont totalement évacués, au profit cette fois-ci d’un déterminisme technophile survalorisant la capacité des technologies de la communication à résoudre pacifiquement les dysfonctionnements et conflits. À la devise selon laquelle « tout problème trouve sa solution dans la consommation » s’adjoint celle où « tout problème trouve sa solution dans la communication ». Un mythe qui se traduit aujourd’hui directement dans une idéologie managériale qui « tente de masquer les divisions et les écarts existants au sein de l’entreprise » pour faire de l’entreprise un lieu « harmonieux, sans trace de dysfonctionnement interne, de division, de conflit (Le Goff, 2000, p. 35) ». Ici encore, nous est offerte une « vision édulcorée de la vie sociale, dont l’état normal reposerait sur l’harmonie et l’intégration » et qui fait totalement abstraction des « problématiques organisationnelles, économiques ou sociales (Brunel, 2004) ». Si dysfonctionnement il y a, il sera désormais « traduit en termes de manque de compétences individuelles et relationnelles (Brunel, 2004) », de déficit de compétences communicationnelles. À travers ces discours, les intérêts auparavant divergents convergent miraculeusement. Dans la société de consommation, « en revendiquant le droit de mieux consommer, le travail verrait ses aspirations rejoindre celles du capital, pour le plus grand bénéfice de tous (Ewen, 1983, p. 41) ». On retrouve ici trait pour trait les propos de Valérie Brunel (2004) sur l’idéologie managériale contemporaine où « le bonheur de l’homme et le profit sont deux finalités conciliables et même convergentes », où « non seulement il n’y a plus d’opposition entre des logiques individuelles, sociales, politiques et économiques, mais celles-ci vont de pair ». On pourrait cependant se demander avec Catherine Loneux (2007, p. 112) si, dans ces deux cas, cette miraculeuse convergence ne traduit pas en réalité l’extension de « l’application des normes professionnelles et marchandes à l’ensemble de la société ». En effet avec la société de consommation, « la logique marchande s’est généralisée, régissant aujourd’hui non seulement les procès de travail et les produits matériels mais la culture entière, la sexualité, les relations humaines jusqu’aux phantasmes et aux pulsions individuelles » (Baudrillard, 1970, p. 308). De même, face à la société de l’information, Gaëtan Tremblay (1996) s’interroge : « le modèle de la société de l’information affirme que la nouvelle hégémonie de l’information transforme la société industrielle. Ne faudrait-il pas se demander, à l’inverse si ce n’est pas plutôt l’expansion de la logique capitaliste, plus que jamais triomphante, qui transforme le monde de l’information et de la communication ? Le changement majeur ne réside-t-il pas dans l’intégration de plus en plus poussée de l’information et de la communication au fonctionnement de l’économie et de la société, dans la soumission de l’information et de la communication aux règles qui régissent la société industrielle, bref dans la marchandisation de l’information, de la culture et de la communication ? ». L’intégration de la critique libertaire Les discours qui accompagnent ces trois mythes (de la consommation, de l’information, du management) ont également pour particularité de puiser au cœur de la critique libertaire. Comme l’explique Stuart Ewen, le déploiement de la publicité dans les années 1920 aux États-Unis est directement corrélé à l’épidémie de grèves de 1919 avec laquelle « les débats sur l’autonomie et l’autogestion arrivaient en premier plan (Ewen, 1983, p. 191) ». Face à cette « envahissante critique de la vie industrielle moderne », la publicité va alors proposer « un monde de plaisirs et d’émotions, qui faisait concurrence aux remèdes drastiques La société de l’information et l’extension du domaine de la pub | 17 proposés par les libertaires » : « par une ironie de l’histoire, le capitalisme trouva dans ces discours qui souvent lui étaient hostiles les pierres qui devaient lui permettre de construire un monument à sa gloire (Ewen, 1983, p. 190, p. 183, p. 194) ». Comme en miroir de ces analyses portant sur le début du XXe siècle, Luc Boltanski et Eve Chiapello ont magistralement démontré la place centrale qu’occupe actuellement la critique, notamment autogestionnaire, dans le renouvellement de l’« esprit du capitalisme » à la suite des événements de mai 1968 : les thèmes et postures venus de la gauche contestataire ont pu être interprétés de façon à être compatibles avec les nouvelles exigences du management. Cela vaut particulièrement pour le thème gauchiste de l’autogestion (…) Mais, ces thèmes associés dans les textes du mouvement de mai à une critique radicale du capitalisme, se trouvent, dans la littérature du management, en quelque sorte autonomisés, constitués en objectifs valant pour eux-mêmes et mis au service des forces dont ils entendaient hâter la destruction. (Boltanski et Chiapello, 1999) Des propos qui ne sont pas sans rappeler ceux de Jean Baudrillard identifiant une substitution à usage interne, dans le cadre d’un processus général et d’un système inchangé dans l’essentiel, d’un système de valeurs à un autre devenu (relativement) inefficace. Ce qui pouvait être finalité nouvelle est devenu, vidé de son contenu réel, médiation forcée de la reproduction du système (Baudrillard, 1970, p. 116). La société de consommation pourrait ainsi se lire comme le véritable point d’origine du « nouvel esprit du capitalisme » puisqu’elle vise clairement à « change[r] les dimensions sociales et culturelles de la vie industrielle », à « rendre l’ambiance culturelle du capitalisme aussi efficace que sa production (Ewen, 1983, p. 190) ». Un objectif qu’elle tente d’atteindre en « [reflétant] l’esprit de la résistance sans en avoir l’impact », en « nous [interpellant] dans la langue de notre propre critique, tout en la niant puisqu’elle propose les solutions de la grande entreprise aux problèmes de la grande entreprise (Ewen, 1983, p. 210) ». Ce mouvement d’intégration de la critique libertaire autogestionnaire est également perceptible dans les discours qui accompagnent l’émergence de la société de l’information. Ce nouveau régime technico-socio-économique offre en effet la promesse d’une « altérité politique radicale (Commission nationale française pour l’Unesco, 2005) » marquant « le dépassement des “vieux clivages” (Neveu, 2006, p. 35) » entre « ceux qui produisent et ceux qui gèrent la société (…) entre ceux qui ont le monopole de la pensée et ceux qui en sont toujours exclus (Lojkine, 1992, p. 9) ». On retrouve ici parfaitement la prétention autogestionnaire à éradiquer l’antique séparation qui distingue les dirigeants des dirigés. Loin de représenter une rupture quant à la société de consommation, la société de l’information semble donc plutôt s’inscrire dans son prolongement en s’inspirant du même mythe égalitariste directement emprunté à la critique libertaire, et plus particulièrement autogestionnaire. Plus encore, couplée à l’idéologie managériale qui lui est consubstantielle, la société contemporaine de l’information semble représenter l’extension de la société de consommation à de nouvelles sphères du monde vécu. La société de consommation semble ainsi opérer un étrange retour sur son point d’origine : l’espace de production. Une hypothèse que nous allons tenter de « mettre à l’épreuve » à travers l’étude de deux entreprises contemporaines caractéristiques de la société de l’information : l’agence régionale d’une SSII (que nous nommerons SI) et un éditeur de logiciels (que nous nommerons Log). 18 | S. Canivenc RICSP, 2009, n. 2, p. 13-30 Du mythe aux pratiques : l’exemple de deux entreprises de la société de l’information Les discours institutionnels Née dans les années 1970, à la suite des événements de mai 1968 qui mirent à mal les fondements « spirituels » du capitalisme, la communication institutionnelle est clairement le fruit de cette nouvelle « idéologie managériale » proclamant la démocratisation des entreprises. C’est précisément elle qui est chargée de rendre « les thèmes et postures venus de la gauche contestataire […] compatibles avec les nouvelles exigences du management (Boltanski et Chiapello, 1999) ». A priori, la communication institutionnelle se démarque clairement de la communication publicitaire de par son objet même. Comme l’expliquent Michel Gomez et Jean François Trinquecoste, elle « se différencie de la publicité produit en ce que l’entreprise y communique sur elle-même et non sur ses produits ou sur ses marques (Gomez et Trinquecoste, 1993) ». Ces discours dits « institutionnels » à portée générale semblent en effet s’éloigner de la communication publicitaire pour s’ancrer dans une approche plus politique de la publicité telle que défendue par Jürgen Habermas dans la lignée d’Emmanuel Kant. À la communication publicitaire visant à vendre des produits s’opposerait la communication institutionnelle visant à défendre les intérêts publics qu’incarnent les entreprises. Toutefois, notent Michel Gomez et Jean François Trinquecoste, « les frontières entre communication institutionnelle et communication sur les produits ne sont peut-être pas aussi triviales, ni aussi nettes qu’on pourrait le croire d’emblée (Gomez et Trinquecoste, 1993) ». Une équivoque que nous allons tenter d’éclairer à l’aide de l’exemple concret que nous offrent SI et Log. La communication institutionnelle de ces deux entreprises est très développée. SI, groupe formé de plusieurs agences et composé de 900 personnes, dispose d’un service dédié à cette tâche. Log est beaucoup plus petite (treize personnes) mais son dirigeant appartient à un groupement de dirigeants d’entreprise (que nous nommerons GDE) assez important, disposant lui aussi d’un « département communication ». L’analyse conjointe de ces deux entreprises nous permet ainsi d’accéder aux deux types de récits d’entreprise identifiés par Nicole D’Almeida (2001, p. 97) : • « Les récits de la maisonnée », récits particuliers d’entreprises particulières « destinés à un public principalement interne qu’ils ont pour mission de souder (D’Almeida, 2001, p. 97) ». Tel est le type de récit que nous étudierons à travers les discours tenus par l’entreprise SI sur ses sites Internet et Intranet, dans ses communiqués de presse ainsi que sur une vidéo postée sur Internet pour sa campagne de recrutement ; • « Les récits de l’engagement » qui « mettent en scène des valeurs universelles renvoyant à une identité universelle, à l’humanité et au bien commun (D’Almeida, 2001, p. 98) ». Tel est le type de récit que nous étudierons à travers les multiples ouvrages, rapports et revues du GDE. Le mythe d’une entreprise égalitaire et pacifique Si ces deux types de discours diffèrent dans leur portée (le premier étant à visée interne, le second à prétention universelle), ils sont assez similaires dans leur contenu. Tous deux La société de l’information et l’extension du domaine de la pub | 19 donnent à voir l’entreprise comme un lieu harmonieux débarrassé des traditionnels conflits qui opposent les dirigeants aux dirigés, l’économie au social et où les salariés sont considérés comme des acteurs libres et autonomes. À en croire ces discours, ces deux entreprises seraient en effet passées « d’une logique d’obéissance à une logique de responsabilité », pour reprendre une expression du GDE. Autonomie, responsabilité et liberté sont ainsi des thèmes clés de leurs discours. SI explique ainsi vouloir « bâtir une équipe à fort potentiel (…) concernée et impliquée dans le projet d’entreprise » et cherche pour ce faire « des hommes et des femmes qui souhaitent grandir avec nous ». Le GDE, quant à lui, incite les dirigeants d’entreprise à appréhender tout individu comme un « acteur et [un] auteur », « un décideur et un leader », un « co-entrepreneur » qui mériterait « la qualité pleine et entière d’associé ». Le GDE va même jusqu’à prôner « la fin du lien de subordination ». SI, quant à elle, s’appuie sur le témoignage d’un ingénieur expliquant avoir « toujours eu un sentiment de liberté, liberté de m’exprimer, liberté de choix ». Ces discours nous proposent ainsi une nouvelle conception de la place du travailleur dans l’entreprise, quasiment considéré à place égale avec le dirigeant. Une nouvelle donne qui transforme les ennemis d’hier en alliés. Les anciens conflits qui marquaient naguère le monde de l’entreprise ne semblent en effet plus avoir lieu d’être. Cette déconflictualisation du monde de l’entreprise se traduit cependant de manière différente dans ces deux discours. Dans les discours de l’engagement du GDE, à prétention universelle, elle prend la forme d’une « coopération harmonieuse » qui rend totalement caduque « les luttes d’intérêts que nous avons connues dans le monde de la production et du travail » : « l’économie de demain ne peut plus se construire sur des rivalités directes […]. Elle se fonde plutôt sur la recherche de coopération et de partenariat où toutes les parties ont un rôle à jouer dans la réussite globale ». Dans les discours de la maisonnée de SI, à visée simplement interne, elle s’exprime sous la forme de la « convivialité » et de la « bonne ambiance ». Mais dans les deux cas, on retrouve une même prétention à concilier harmonieusement les problématiques économiques et les préoccupations sociales. Comme l’explique le directeur des opérations de SI « notre vision aujourd’hui est de concilier l’économique et l’humain ». Un pari réussi au regard du témoignage de deux salariés dont l’un affirme « l’importance de la dimension humaine au sein de notre entreprise » et l’autre se félicite d’avoir trouvé « dans les valeurs [SI] réconciliant l’économique et l’humain toutes les conditions réunies pour élaborer et réussir mon projet professionnel ». Le GDE souhaite quant à lui offrir « la définition d’une entreprise qui sera, parce que compétitive sur le plan humain, plus compétitive également sur le plan économique », ses membres « entendent construire des entreprises performantes parce qu’au service de l’homme ». Économisme et humanisme ne s’opposent plus mais deviennent conciliables, voire même interdépendants. L’intégration de la critique libertaire, qui caractérise tant le mythe de la consommation que celui de l’information, est particulièrement prégnante dans les discours du GDE. Ce mouvement entrepreneurial qui cumule soixante-dix ans d’existence a en effet vécu les événements de mai 1968 et y a réagi dès 1974 dans un ouvrage où il se livre à un véritable plaidoyer pour l’autogestion : « aujourd’hui l’entreprise est l’affaire de quelques-uns, propriétaires de capitaux, cadres dirigeants qui emploient, qui louent les hommes. Demain, inéluctablement, l’entreprise sera l’affaire du groupe de tous ceux qui y travaillent ». On en 20 | S. Canivenc RICSP, 2009, n. 2, p. 13-30 retrouve les traces dans des textes plus récents datant de 2004 et 2006 où le GDE réaffirme sa volonté d’« entreprendre autrement » et prône « un pouvoir partagé ». Il est par ailleurs à noter que la société de l’information semble former un milieu très porteur pour le développement de ce type de discours. Comme l’explique le GDE : l’idée fondamentale du [GDE] c’est bien celle d’une entreprise ’’au service de l’homme’’ […] Des décennies durant, les [membres du GDE] ont paru bien isolés sur ce thème. Et puis ils ont été quelque peu rattrapés par l’Histoire. Avec l’essor des services, des technologies nouvelles et de la production immatérielle, avec l’apparition des entreprises dites de ’’matière grise’’, l’idée a commencé à germer que l’intelligence humaine constituait désormais le premier capital de l’entreprise et sa principale source de création de valeur ajoutée. Ces deux discours se coulent ainsi parfaitement dans le mythe égalitariste et pacifique de la société de consommation repris par la société de l’information. Plus encore, ils semblent également user des mêmes modalités d’exercice, directement issues des techniques publicitaires. Communication institutionnelle et extension du domaine de la pub Si ces discours tendent à donner une image idyllique du monde de l’entreprise, leur enjeu n’est ici pas tant de « se donner à voir » sous un angle attractif que de « travailler » les représentations. Comme le souligne Catherine Loneux (2007, p. 112) : les conséquences voulues de ces formes de communication vont au-delà d’un résultat en matière d’image pour l’entreprise qui se contenterait de simplement ’’se donner à voir’’. Ces formes de communication ’’travaillent’’ véritablement l’organisation. Ces discours visent donc moins à décrire le réel qu’à produire du réel, leur objectif n’est pas tant de travestir la réalité que d’« imposer un système de représentations pour induire des comportements et des attitudes conformes à l’intérêt de ceux qui le produisent(Olivesi, 2006) ». Cette prétention à influer sur les représentations pour produire du réel se retrouve au cœur des techniques publicitaires. On la retrouve ainsi dans l’ouvrage de Baudrillard reprenant l’expression publicisée par Robert K. Merton de « selffulfilling prophecy », « la parole qui se réalise de par sa profération même (Baudrillard, 1970, p. 197) ». Ainsi, « comme la publicité (et comme les totems des tribus), la communication managériale produit un monde vécu (Floris, 1996, p. 178) ». La société de l’information semble d’ailleurs fonctionner de la même manière selon Yves Jeanneret. Cet auteur souligne en effet l’importance du rôle joué par le « processus de nomination » dans l’institutionnalisation de « la société de l’information », phénomène qu’il rapproche directement de la publicité. Ces « dispositifs de très grande ampleur consacrant ’’la société de l’information’’ comme figure de mot imposée » sont ainsi pour lui le symptôme d’un « transfert des techniques de communication du marketing à la politique (Jeanneret, 2005, p. 74-75) ». Communication institutionnelle et publicité ont pour autre point commun d’étendre la logique gestionnaire aux dimensions purement symboliques. Baudrillard définit ainsi la société de consommation comme un « ordre de manipulation de signes », un régime basé sur « une analyse des codes et des systèmes symboliques (Baudrillard, 1970, p. 30) ». Un phénomène qu’Ewen rattache directement à l’émergence de « nouvelles techniques ’’scientifiques’’ applicables à la gestion sociale (Ewen, 1983, p. 188) ». La communication institutionnelle renvoie elle aussi à un « ensemble de démarches d’ingénierie sociale et symbolique » comme l’a bien montré Bernard Floris (1996, p. 11). La société de l’information et l’extension du domaine de la pub | 21 Une idée que l’on retrouve chez Stéphane Olivesi (2006) qui parle pour sa part de « gestion rationalisée du symbolique ». Des techniques dont on attribue souvent la paternité aux psychosociologues d’entreprise, le plus célèbre restant Elton Mayo avec ses travaux menés aux ateliers Hawthorne de la Western Electric Company de Chicago à la fin des années 1920, à la même époque où la réclame commerciale se transforme en publicité. Cette coïncidence historique souligne ainsi les liens profonds qui unissent communication institutionnelle et publicité, qui toutes deux usent de techniques quasi centenaires visant à étendre l’emprise de la gestion aux domaines symboliques. Mais communications publicitaire et institutionnelle vont plus loin encore en cherchant également à investir la sphère politique. La société de consommation assimile ainsi allègrement « la consommation des biens à la liberté politique » et associe directement « le mouvement de libération à celui de la croissance (Ewen, 1983, p. 96, p. 194) ». De même, en faisant de l’entreprise un lieu épanouissant transcendant sa vocation économique, la communication institutionnelle opère une « confusion entre les registres de l’entreprise, du travail, la sphère professionnelle et le registre de la vie privée, de convictions personnelles, des valeurs individuelles, politiques, culturelles (Loneux, 2007, p. 27) ». Un processus également à l’œuvre dans la société de l’information, dont les discours associent directement la révolution technologique initiée par l’informatique et la révolution économique du tertiaire à des bouleversements sociaux, culturels et politiques sans précédent tels l’éradication de l’extrême pauvreté et de la faim, l’éducation primaire pour tous, l’égalité hommefemme et l’autonomie des femmes, la lutte contre le VIH/SIDA, le paludisme et d’autres maladies, la durabilité de l’environnement propice à l’instauration d’un monde plus pacifique, plus juste et plus prospère (SMSI, 2003, p. 341). La communication institutionnelle qui émerge avec la société de l’information apparaît ainsi comme le prolongement direct de la communication publicitaire de la société de consommation. Elle puise à la source du même mythe égalitariste et consensuel tout en s’inspirant des mêmes techniques : selffulfilling prophecy, gestion rationalisée du symbolique et dislocation des frontières qui, auparavant, séparaient le domaine économique du domaine politique. Avec elle, le capitalisme ne fait plus seulement l’apologie de ses produits mais de l’entreprise elle-même comme dans une mystérieuse mise en abîme. Un phénomène de marchandisation inédit mais qui se vend toujours selon les mêmes modalités. La communication institutionnelle participe ainsi directement à étendre l’emprise des techniques publicitaires du mode des produits à celui de l’entreprise, de l’homme en tant que consommateur à l’homme en tant que travailleur. Le monde de la publicité semble ainsi avoir désormais colonisé l’ensemble des sphères du monde vécu, qu’elles soient privées, publiques ou professionnelles. Des discours qui ne « marchent pas » Malgré l’image consensuelle et égalitariste que se donnent nos deux entreprises, on constate cependant la persistance de virulentes critiques chez certains salariés qui fustigent ces discours enchantés. À Log, parmi les quelques salariés qui ont connaissance du GDE et de sa raison d’être, une forte majorité estime ses discours séduisants mais « pas assez pragmatiques : « je trouve [ça] très bien, mais je me demande si c’est pas un doux rêve ». Certains, comme 22 | S. Canivenc RICSP, 2009, n. 2, p. 13-30 le directeur technique, les jugent carrément démagogiques et hypocrites : « je trouve que c’est clairement faux-cul de dire ’’l’homme au centre de l’entreprise’’ ». D’autant plus que les principes affichés ne se retrouvent pas toujours dans les pratiques des entreprises de ce mouvement : « j’ai fait deux trucs au [GDE] et les propos que j’ai entendus m’ont choqué, ils faisaient des blagues sur leurs employés en disant ’’mais pourquoi tu la vires pas ?’’, de la blague de patron ». À SI, c’est principalement ce décalage entre discours et pratique qui provoque la critique ironique et cynique des ingénieurs de l’agence. Les préoccupations de la direction sont en effet, à leurs yeux, clairement tournées vers le chiffre, la rentabilité et la croissance, loin de l’univers convivial et solidaire véhiculé par les discours du service de communication. L’un des ingénieurs manifeste ainsi son « désintérêt total de toutes les valeurs énoncées au niveau groupe, je n’y vois souvent qu’une vaste hypocrisie du patron, qui ne semble s’intéresser qu’à l’aspect économique ». Une attitude critique répandue chez la majorité des ingénieurs, principalement ancrés dans la gauche altermondialiste et pour qui « ça n’a pas de sens le chiffre ». La totalité des ingénieurs de l’agence interrogés fustige ainsi ces discours institutionnels qu’ils assimilent à des « discours de communicant », « creux » mais « dans l’air du temps ». Leurs témoignages révèlent ici le lien direct qu’ils établissent entre les techniques publicitaires et ce type de discours, dont les promoteurs « vivent dans un monde merveilleux bercé par la pub » et transforment les campagnes de recrutement en « pub de lessive ». Tout comme nous le conseille Nicole D’Almeida (2001), nous n’avons pas ici à nous prononcer sur le fait que ces discours soient vrais ou faux. Nous pouvons cependant constater qu’ils ne « marchent pas ». Les pratiques managériales Les pratiques de dialogue et de proximité Parallèlement à ces discours idylliques, les encadrants et dirigeants de ces deux entreprises semblent pourtant expérimenter des pratiques managériales inédites réellement propices au développement de formes organisationnelles plus égalitaires et pacifiques en privilégiant le dialogue et la proximité. Les encadrants et dirigeants de SI et Log se revendiquent ainsi explicitement d’un management « démocratique » consistant à solliciter la parole des ingénieurs avant d’arrêter leurs décisions. Comme l’explique le directeur d’agence de SI : « je commence toujours par en parler au collaborateur avant de proposer quoique ce soit au client (…) il n’y a rien de coercitif dans ma façon de manager », ce que confirme l’un des ingénieurs : « il n’impose jamais par la force et n’hésite pas à dialoguer et à solliciter l’avis de chacun ». Le directeur technique de Log est lui aussi apprécié des ingénieurs pour sa capacité à « temporiser le client, il lui dit ’’non, ça faut que je vois d’abord avec mes ingénieurs’’ ». Il explique ainsi ne pas être « très dirigiste, je préfère échanger avec [les ingénieurs] pour qu’ensemble on trouve la meilleure solution aux problèmes ». Le dirigeant de cette entreprise semble avoir opté pour les mêmes pratiques, comme en témoigne une salariée : « c’est quelqu’un avec qui on peut échanger et discuter (…) on peut dire ce qu’on a à dire assez facilement, il ne crée pas de ’’bulle’’, il a une facilité d’accès, c’est quelque chose d’important ». La société de l’information et l’extension du domaine de la pub | 23 Managers et dirigeants entretiennent également une forte proximité relationnelle avec les salariés qui se traduit de multiples façons : tutoiement réciproque, emploi des prénoms, humour, proximité générationnelle, hobbies communs (sport, jeux vidéos), tenues décontractées similaires, relations extraprofessionnelles. Les relations professionnelles hiérarchiques semblent ainsi devenir plus égalitaires et amicales, comme en atteste bien ce témoignage d’un des ingénieurs de SI quant à son directeur d’agence : « c’est notre responsable et en même temps c’est un copain aussi ». Ces pratiques managériales semblent ainsi concrétiser empiriquement ce mythe égalitariste et pacifique qui est à la base tant de la société de consommation que de la société de l’information. Pratiques managériales et techniques publicitaires Loin du tableau idyllique qui vient d’être dépeint de ces relations hiérarchiques, nombre d’auteurs interprètent ces pratiques comme une extension du domaine du management à des dimensions purement subjectives visant à renforcer l’emprise du pouvoir managérial sur les individus. Bernard Floris (1996) parle ainsi d’un « management de la subjectivité », Vincent De Gaulejac (2005) d’une « mobilisation psychique et affective », Eugène Enriquez (1997) d’une « domination affective », Évelyne Jardin (2005) d’une « psychologisation du pouvoir », Eva Illouz (2006) d’un « capitalisme émotionnel », Maurizio Lazzarato (2004) d’une « économie des affects » ou encore d’une « économie du sensible ». Des techniques qui semblent directement empruntées à la publicité. Comme l’explique Stuart Ewen, la publicité vise en effet à « modifier et contrôler notre économie mentale », elle a pour « fonction la création de désirs et d’habitudes (Ewen, 1983, p. 48, p. 50) ». Une idée que l’on retrouve bien chez Jean Baudrillard notant une « intégration généralisée du niveau ’’privé’’ individuel (’’besoins’’, sentiments, aspirations, pulsions) comme forces productives (Baudrillard, 1970, p. 105) » au sein de la société de consommation. Les pratiques managériales qui ont cours dans ces deux entreprises s’inspirent ainsi elles aussi du mythe de la société de consommation et de ses techniques publicitaires. Des pratiques critiquées de toute part Mais, ici encore, ces pratiques sont parfois virulemment dénoncées, et ce par les managers eux-mêmes. Si les ingénieurs de SI apprécient fortement les pratiques consultatives de leur manager, celui-ci est en revanche beaucoup plus critique. Il craint en effet le désavantage concurrentiel que pourrait entraîner ce « style managérial »: les indicateurs qui devraient me guider dans mes prises de décision devraient être des indicateurs de gestion pure et dure…je suis un faible en terme de management : face à des ’’méchants’’ je ne ferais pas le poids car ils prendront des décisions, quitte à s’aliéner leurs propres collaborateurs, qui seront sur le marché à un moment t plus efficaces … moi je ne peux pas faire ça à mes collaborateurs. Les ingénieurs de SI sont en revanche beaucoup plus critiques envers leur direction avec laquelle ils n’ont quasiment pas de contact, contrairement aux relations conviviales et chaleureuses mises en scène dans leurs discours. Au contraire, à Log, le dirigeant est très apprécié pour son « accessibilité ». Il est cependant critiqué par son manque d’écoute. Il s’attache ainsi à solliciter des avis qu’il ne prend pas forcément en compte, ce qui engendre une forte frustration chez certains : « il y a parfois un paradoxe entre l’implication qu’on peut te demander dans la construction d’une réflexion et la décision qui va être prise […] des fois tu ne comprends pas […] des fois 24 | S. Canivenc RICSP, 2009, n. 2, p. 13-30 c’est difficile », « il sollicite beaucoup l’avis des autres mais il n’en tient pas compte…c’est absolument pas participatif…et c’est un dur retour à la réalité derrière ». La proximité exacerbée qu’il tente d’instaurer avec ses salariés est également vue d’un mauvais œil par certains qui y voient une forme de manipulation : « j’ai l’impression qu’il joue trop sur les émotions […] j’ai l’impression d’une manipulation quelque part, je trouve pas ça très sain », « il met trop de sensibilité dans son approche, trop d’affects…il faut savoir rester à sa place de dirigeant ». Certains salariés ont ainsi pleinement conscience du phénomène d’ « euphémisation » des rapports hiérarchiques à l’œuvre dans ces pratiques et souhaiteraient que leur dirigeant fasse preuve de plus de « fermeté » en sachant « rester à sa place de dirigeant ». La proximité du directeur technique de Log semble en revanche unanimement appréciée, et ce au-delà du pôle des ingénieurs. Celui-ci regrette en revanche les non-dits ou les malaises que ses pratiques peuvent engendrer : « je connais beaucoup de personnes à l’extérieur du travail, ça c’est un peu bâtard comme relation […] quand ça va bien c’est idéal, quand ça va mal et que tu as une critique à exprimer c’est extrêmement délicat ». Ces propos rejoignent ici parfaitement les constats opérés par Jean-Pierre Le Goff (2000, p. 92-93) sur les cadres dont certains se montrent fort critiques à l’égard de nouvelles tendances modernes du management qui valorisent certaines formes de rapprochement et de familiarité entre les membres du personnel […] Une trop grande familiarité peut introduire la confusion des genres entre le travail et le privé, aboutir à des situations où les choses qui doivent être dites clairement ne le sont plus. Ses pratiques consultatives sont quant à elles plus sujettes à controverses chez certains ingénieurs, qui voient en lui un « fin manipulateur » « orientant les réponses à son avantage » : « il dit toujours que c’est pour toi qu’il le fait, mais globalement y’a toujours une arrière-pensée derrière »…ce que le directeur technique reconnaît d’ailleurs de lui-même facilement : « le consensus il peut être faussé par la façon dont tu présentes les choses. Ce n’est pas très sain mais c’est ma façon de faire ». Persistance et mutation de la critique dans la société de l’information Au vu des réactions qu’ils suscitent, force est donc de constater que ces discours et pratiques directement issus des techniques publicitaires pour être implantés dans le monde de l’entreprise ne « marchent pas ». La logique instrumentale de ces pratiques, les phénomènes d’euphémisation du pouvoir et de brouillage des frontières qu’elles impliquent semblent par ailleurs parfaitement décelés par certains salariés. Nous ne pouvons cependant nous arrêter à de tels constats. Philippe Breton (2000, p. 21) nous met en effet en garde contre ces interprétations qui nuancent la puissance de ces techniques manipulatoires sous prétexte que « celles-ci sont pratiquement sans effet car immédiatement ’’décodées’’ par les auditoires qui en sont la cible ». Pour cet auteur, on ne peut réduire le problème à l’alternance selon laquelle ces techniques « marchent » ou non : « la manipulation peut avoir d’autres effets, peut-être plus dévastateurs pour la parole et le lien social que lorsque celle-ci est simplement ’’efficace’’ (Breton, 2000, p. 22) ». La résignation Malgré la virulence des critiques qui s’expriment à SI envers le groupe et sa « logique business », on constate un niveau de résignation assez élevé chez les ingénieurs, comme La société de l’information et l’extension du domaine de la pub | 25 en témoigne bien l’un d’eux : « ça fait partie du jeu quand tu travailles dans une grosse boîte (…) t’acceptes c’est tout, sinon…ben tu vas ailleurs ». On semble ici percevoir le double phénomène de « recul critique et [d’] adaptation contrainte » débouchant sur une « résignation doublée d’amertume » décrit par Jacqueline Palmade (2003, p. 29, p. 205). Les ingénieurs semblent ainsi « ne pas pouvoir se révolter » et subir « un sentiment de souffrance, d’hostilité rentrée et d’impuissance face à la domination économique et technocratique (Palmade, 2003, p. 29, p. 188) ». L’un d’eux exprime la profonde lassitude qui s’est installée dans ce collectif de travail de nature pourtant très critique. Il fustige sévèrement la logique « business » qui domine à SI : cette logique l’exaspère (« ça m’énerve, ça me vanne »), elle ne lui ressemble pas (« je suis loin de ça ») mais, à la longue, elle le rend de plus en plus indifférent (« j’ai même plus envie de m’énerver pour ça »). Les ingénieurs rennais de SI se rapprochent ainsi de ces « désengagés de l’intérieur » dont parle Juliette Ghiulamila (2008), un phénomène en plein développement selon cet auteur qui s’interroge « devant l’ampleur de la désaffectation. Plus personne ou presque n’y croit, plus personne ou presque n’est dupe. Pourtant, personne, ou presque, ne le dit… ». Cette situation ne reflète cependant pas forcément le désarmement de la critique à en lire les propos de Jean Baudrillard au sujet des « événements » de mai 1968, qui ne peuvent s’expliquer selon lui que par « cette hypothèse : ce qu’on prenait pour une anomie, une désaffectation, une passivité généralisée était en fait un potentiel de forces actives dans leur résignation même (Baudrillard, 1970, p. 294) ». À suivre Jean Baudrillard, la résignation dont font preuve les travailleurs des NTIC ne signifierait donc pas l’achèvement des luttes mais leur ferment. Derrière la résignation apparente, la contestation continue de gronder. Une idée que l’on retrouve dans le célèbre ouvrage de James C. Scott, Domination and the Arts of Resistance, avec la notion de « hidden transcripts ». La résignation dont font preuve les « dominés » ne signifie pas nécessairement l’acceptation de l’idéologie dominante mais renvoie bien plus souvent à un consentement apparent qui cache la persistance d’une forte contestation. L’ironie mordante et parfois cynique dont font preuve les ingénieurs de SI à l’égard de leur direction, notamment lors des « pauses cigarettes » qui se tiennent à l’extérieur des bureaux, en sont des parfaites illustrations. De quoi nuancer quelque peu l’hypothèse de Stéphane Olivesi (2006) constatant un « phénomène de captation de la parole au profit des seules directions » qui en auraient désormais le monopole légitime, idée que l’on retrouve également chez Maurizio Lazzarato (2004) reprenant à Mikhaïl Bakhtine la notion de « monolinguisme » par opposition à celle de plurilinguisme. L’individualisation Cette résignation se double cependant ici d’une individualisation forte qui semble éloigner cette hypothétique révolte prochaine des formes de mobilisation collective de 1968. L’individualisation des relations hiérarchiques est en effet une caractéristique forte des métiers des NTIC dont la culture est maquée par « un refus de la délégation, un souci de régler soi-même et directement avec l’interlocuteur intéressé les problèmes éventuels. C’est l’univers du temps réel, de la vitesse, de la relation directe (Vendramin et Guffen, 2005, p. 60) » …qui plus est lorsque l’entreprise est petite (comme à Log) ou découpée en « business units » à « taille humaine » (comme à SI). Elle est également largement favorisée par les pratiques managériales individualisant le suivi, le salaire et la carrière des salariés qui atteignent leur paroxysme avec l’Entretien Annuel pratiqué par ces deux entreprises 26 | S. Canivenc RICSP, 2009, n. 2, p. 13-30 où le salarié se retrouve seul face à son manager pour évaluer l’année écoulée et fixer les objectifs de celle à venir. Moins qu’à un désarmement total de la critique et à une déconflictualisation du monde de l’entreprise, on constate donc plutôt un maintien parfois très fort de la critique mais un affaiblissement des conflits du fait de la résignation des salariés et de l’individualisation de leurs revendications. Comme le souligne Jean-Pierre Le Goff (2000, p. 22-23) : « beaucoup ont cru que le silence des salariés était synonyme d’acceptation et de consensus » alors qu’il n’est que le signe de « la déstabilisation des individus et des collectifs de travail », de leur « mal-être » et de leur « désarroi ». Ces analyses semblent ainsi confirmer la thèse de Philippe Breton (2000) selon laquelle les stratégies actuelles de défense face à l’influence provoquent ou renforcent le repli sur soi. Si la parole critique persiste, elle devient ainsi « individuelle, personnelle » et pourrait empêcher de « franchir le fossé qui, désormais, dans les sociétés individualistes, sépare les êtres ». Le statu quo Ces nouvelles modalités d’expression de la critique entravent donc sérieusement l’émergence de toute alternative collective capable de faire face aux mécanismes de pouvoir contemporains directement inspirés des techniques publicitaires. Cette nouvelle donne engendre également un renversement des revendications traditionnelles pour le moins surprenant. L’absence totale d’alternative à opposer est patente dans ces deux entreprises, comme l’illustre parfaitement ce témoignage du directeur technique de Log dénonçant les discours démagogiques du GDE : « une entreprise c’est quoi ? Elle a pour vocation première de rapporter de l’argent à ses actionnaires ». Ces constats semblent ici rejoindre l’hypothèse de Bernard Floris constatant l’incrédulité des salariés face à l’image idyllique de l’entreprise que leur propose les « dircoms » sans pour autant que la crédibilité du « management symbolique » s’effondre totalement. Il est, selon lui, « probable que beaucoup de salariés se doutent que leur direction travaille d’abord pour son propre intérêt et que les appels à l’intérêt général sont des arguties. Mais en même temps, ils sont aussi persuadés qu’il n’existe pas d’autre moyen que le marché, l’entreprise privée et le patronat pour développer l’économie, sortir de la crise et vivre en démocratie (Floris, 1996, p. 207) ». De ce point de vue, on ne peut que souscrire à l’hypothèse de Stéphane Olivesi (2006) concernant le monopole de la parole légitime — la victoire du « monolinguisme » capitaliste dirait Maurizio Lazzarato (2004) — que nous avions précédemment tenu à nuancer : l’impossibilité de tout contre-discours ne repose pas sur un quelconque interdit, mais sur l’instauration d’un régime discursif suffisamment contraignant pour qu’aucun discours alternatif sur l’organisation du travail ou les rapports sociaux dans l’entreprise ne puisse voir le jour et se développer. Certains semblent même vouloir réhabiliter les relations hiérarchiques. Comme nous l’avons évoqué, certains salariés de Log réclament explicitement plus de « fermeté ». Par ailleurs, les statuts hiérarchiques semblent ici scrupuleusement respectés par les salariés qui tiennent à maintenir une certaine distance avec leurs supérieurs statutaires. Plus encore, certains souhaiteraient voir les échelons hiérarchiques de leur entreprise s’agrémenter d’un niveau supplémentaire avec l’arrivée d’un directeur administratif et financier, d’un directeur des ressourceshumaines ou d’un directeur général pour compenser les absences régulières de leur dirigeant. La société de l’information et l’extension du domaine de la pub | 27 Ainsi, là où traditionnellement les salariés aspirent à plus d’autonomie et de liberté, ils en viennent à réclamer un retour à l’autorité et à la hiérarchie. Si l’idéologie managériale contemporaine paraît donc à première vue « ne pas marcher », elle semble sous cet angle avoir trouvé « mieux que la répression [du désir], pour que la répression, la hiérarchie, l’exploitation, l’asservissement soient eux-mêmes désirés (Deleuze et Guattari, 1972, p. 138) ». Conclusion La « société de consommation », la « société de l’information » ainsi que l’idéologie managériale qui l’accompagne puisent donc dans le même mythe (celui de l’égalité), opèrent selon les mêmes modalités d’action (propres aux techniques publicitaires) pour, finalement, assurer la reproduction d’un même système économique. Les phénomènes contemporains semblent ainsi s’appuyer sur une idéologie et des techniques de pouvoir qui se sont développées tout au long du XXe siècle et se sont progressivement diffusées dans l’ensemble du corps social pour venir toucher l’homme dans ses différents rôles sociaux - consommateur, citoyen, travailleur — et contaminer l’ensemble des sphères — publiques, privées et professionnelles. Loin d’incarner le bouleversement civilisationnel annoncé, les phénomènes contemporains témoignent au contraire du renforcement de la « rationalisation du monde vécu » diagnostiquée par Max Weber puis combattue par Jürgen Habermas. Loin d’instaurer une rupture quant à la société de consommation, la société contemporaine semble bien plutôt accompagner son extension. Le mythe managérial se conjugue aujourd’hui à celui du consumérisme, mariage parfait pour assurer la légitimité de ces deux systèmes idéologiques profondément liés : la société de consommation et le système de production capitaliste. Tous deux ont par ailleurs pour modalité d’action centrale la communication -publicitaire d’un côté et institutionnelle de l’autre - dont la fonction « est, outre sa mission d’information, une fonction d’ordre, de pacification, de prévention et de lissage des conflits (D’Almeida, 2001) ». Communications institutionnelle et publicitaire se conjuguent ainsi aujourd’hui pour célébrer l’homme libre et heureux : libre et heureux de consommer ce qu’il veut (en masse) et de travailler comme il veut (dans une entreprise capitaliste). Comme nous l’avons vu, l’intégration de la critique libertaire est au cœur de ce processus presque centenaire. Un regard rétrospectif qui a de quoi nuancer la « nouveauté » de l’ « esprit du capitalisme » décrit par Luc Boltanski et Eve Chiapello (1999). Nos études empiriques nous ont également montré la capacité de résistance critique que les individus opposent à ce phénomène, dont ils décèlent les paradoxes et les effets pervers. Une critique locale persiste donc face à cette irrésistible montée de la rationalisation du monde vécu opérée par la publicité. Cette critique s’exprime cependant sous de nouvelles formes qui hypothèquent sérieusement l’émergence d’une alternative forte à l’idéologie capitaliste dans le monde des entreprises. Pour conclure, nous souhaiterions également souligner le rôle central que jouent les sciences humaines et sociales (SHS) dans ce processus historique. Celui-ci a en effet débuté dans les années 1920 avec la mutation de la réclame commerciale en publicité moderne et l’arrivée des psychosociologues dans les entreprises. Il s’est poursuivi dans les années 1950 avec les spécialistes des sciences du comportement et de la recherche des motivations. Il connaît une nouvelle étape de consolidation dans 28 | S. Canivenc RICSP, 2009, n. 2, p. 13-30 les années 1970 avec l’arrivée des « conseillers en communication » « issus des champs journalistique et économique, en particulier de la publicité et du management. C’est par leur intermédiaire que la forme marketing publicitaire s’est rapidement diffusée dans tout le champ de la communication et dans toutes les institutions sociales (Floris, 1996, p. 77) ». Ce phénomène renvoie directement aux dispositifs de « savoir-pouvoir » étudiés par Foucault (2004) avec la « naissance de la biopolitique ». Une « pratique gouvernementale » qui semble aujourd’hui étendre son emprise sur l’homme, non plus seulement appréhendé comme être physique (comme avec les statistiques et l’hygiène) mais également social et psychique à la faveur du développement des SHS. De nombreuses branches des SHS sont aujourd’hui sollicitées dans les entreprises : l’anthropologie depuis l’ouvrage de Peters et Waterman, Le prix de l’excellence, célébrant les vertus de la « culture d’entreprise » ; la psychologie comme l’ont montré Eugène Enriquez (1997) ou Valérie Brunel (2004) ; mais également les sciences de l’information et de la communication, qui cristallisent des préoccupations majeures tant en interne qu’à l’externe des entreprises. Savoir et communication apparaissent donc effectivement comme des enjeux centraux de la « société de l’information » (qui aime également user de ces deux qualificatifs pour se définir). Ces deux facteurs semblent cependant moins alimenter un mouvement inédit de démocratisation — comme le sous-entendent certains discours — que le développement de pratiques coercitives déjà anciennes. La société de l’information et l’extension du domaine de la pub | 29 Références Baudrillard, Jean (1970). La société de consommation. Paris : Editions Denoël, 318 pages Boltanski, L. et Chiapello, E. (1999). Le nouvel esprit du capitalisme. Paris, France : Gallimard. Breton, P. (2000). La parole manipulée. Paris, France : La Découverte. Brunel, V. (2004). Les managers de l’âme. Le développement personnel en entreprise, nouvelle pratique de pouvoir ? Paris, France : La Découverte. Commission Nationale Française pour l’UNESCO (2005). La « société de l’information » : glossaire critique. Paris, France : La documentation française. D’Almeida, N. (2001). Les promesses de la communication. Paris, France : Presses Universitaires de France. De Gaulejac, V. (2005). 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