Secourisme brulures gelures hemorragies. JP Geslin

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Jean-Pierre Geslin, professeur. 39
Que faire en cas de brûlure(s) ?
Définition :
Les brûlures sont des lésions de la peau ou des voies aériennes ou des voies digestives provoquées par la chaleur
(liquide bouillant, flamme, vapeur ou objet chaud …), le frottement, diverses substances chimiques, l’électricité
ou les radiations (du soleil ou ionisantes).
Statistiques :
200 000 à 400 000 personnes sont victimes de brûlures en France chaque année dont les 2/3 à la maison, 10 000 à
15 000 sont hospitalisées et 3 500 sont soignées dans des centres pour grands brûlés. 500 à 700 morts. Les enfants
de la naissance à 4 ans sont les plus touchés : 100 décèdent en France par an dans l’incendie d’une habitation.
Causes :
Les installations électriques défectueuses, les
cheminées, les appareils ménagers défectueux
alimentés au gaz, l’inflammation des aérosols
ou leur explosion lorsqu’ils sont proches
d’une source de chaleur, les briquets et les
allumettes manipulés par des enfants en
l’absence d’adultes, les portes de fours, les
plaques vitro-céramiques et les queues -
tournées vers l’extérieur - de casseroles
contenant des produits chauds.
Les fours micro-ondes sont indirectement
cause de brûlures intra buccales : le biberon
peut avoir ses parois tièdes mais le lait situé à
l’intérieur est bouillant... surtout ne pas
examiner la cavité buccale en employant un
abaisse-langue
Degré de la brûlure :
Une brûlure du 1
er
degré est une atteinte de la
couche la plus superficielle de la peau : lépiderme. Symptômes : peau
rouge, chaude, douloureuse au moindre contact. Pas de cloque. Guérison
en 2 à 3 j.
Une brûlure du 2
ème
degré est une destruction de la totalité de
l’épiderme et d’une partie plus ou moins importante du derme. Des
cloques ou phlyctènes sont présentes. Cicatrisation en 1 à 3 semaines.
Dans une brûlure du 3
ème
degré, toute la peau est détruite et la brûlure
atteint le tissu sous-cutané. Il n’existe pas de cloques et la lésion
apparaît de façon caractéristique cartonnée et de couleur blanche, brune
ou noire. Elle est totalement insensible et son aspect quasi-normal
pourrait conduire à méconnaître sa gravité. La cicatrisation spontanée est
impossible au delà de 3 cm de largeur et il est nécessaire de faire appel à
un traitement chirurgical avec ablation des tissus lésés et une greffe.
Il peut exister une atteinte respiratoire associée résultant d’une brûlure de
la face ou de l’inhalation de fumées ou encore de brûlures provoquées par des vapeurs.
La règle des 9 est un moyen rapide d’évaluation de l’étendue des lésions :
La tête = 9 % ; 1 membre supérieur = 9 %, une face du tronc = 9 % X 2, 1 membre inférieur = 9 % X 2. La paume
de la main correspond à 1 % de la surface corporelle. Une brûlure nécessite une hospitalisation quand la surface
brûlée est supérieure à 10 % de la surface corporelle.
Photographie Le Stum/Goiveaux extraite d’un article d’ « Impact
Médecin » n° 110 du 28 juin 1991 : « les brûlures ».
Les Principales causes
de brûlure
Radiation
1%
Produits caustiques
2%
Electricité
3%
Objets chauds
5%
Explosions
10%
Les incendies
14%
Liquides inflammables
20%
Liquides chauds
45%
Pour éteindre une bassine d’huile
enflammée, on étouffe le feu avec une
serpillière humide.
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Jean-Pierre Geslin, professeur. 40
Que faire en cas de brûlure(s) ? (suite)
1) Si la brûlure est simple,
on observe une rougeur peu étendue et
éventuellement une cloque unique (dont la surface est inférieure à la
moitié de la paume de la main du brûlé).
a) On supprime la cause ou on soustrait la victime à la cause.
b) On refroidit la brûlure (afin de limiter son évolution) selon la règle
dite des « 10 –15 » :
- eau à 10-15 °C (10 à 25°C pour l’AFPS 2001, en fait 8 à 25° C) appliquée
durant au moins 5 à 10 minutes d’après la plupart des manuels de secourisme (le
Dr Mathonnet et beaucoup d’autres spécialistes disent « 20 minutes »)… Les
fiches de l’AFPS 2001 se contentent de signaler que « l’arrosage peut être
poursuivi pour limiter la douleur ».
- jet à une distance de 10 15 cm en prenant soin de ne pas diriger le jet
directement sur la brûlure mais au-dessus de façon à faire ruisseler l’eau sur la
partie lésée.
- Brûlure survenue il y a 10 - 15 mn (l’action est optimale dans les 3 premières
minutes) au maximum d’après les manuels de secourisme. Le Dr Mathonnet du
centre des brûlés de Freyming-Merlebach considère que la méthode conserve
« une certaine efficacité au moins 1 heure après l’accident »
(« Le quotidien du médecin » n° 5201 du 2 juin 1993).
Attention :
Le ruissellement peut être remplacé par une immersion.
c) Surveiller comme une plaie simple. Il faut en particulier demander à la victime si elle est
vaccinée contre le tétanos…
Il ne faut pas percer la (ou les) cloque(s) mais se contenter de la (ou les) protéger par un simple pansement. Si
la cloque est déjà percée, elle sera soignée comme une petite plaie.
Ne pas appliquer de crème ou de pommade. Les crème grasses n’ont aucune vertu thérapeutique, elles
empêchent seulement que le pansement adhère à la partie brûlée mais elles présentent l’inconvénient de
masquer la zone atteinte à la vue du médecin.
Ne pas utiliser de colorants type éosine car ils masquent les lésions et, employés plusieurs jours, deviennent pro-
inflammatoires. « Les pommades antibiotiques sont également à déconseiller » (1).
Contentez-vous de protéger avec un linge de coton propre.
« Des pansements biosyn-
thétiques sont maintenant à la
disposition du corps médical. Ces
pansements ont le mérite de
supprimer la douleur. Ils sont
occlusifs et doivent être laissés en
place jusqu’à cicatrisation … Ils
nécessitent une surveillance
régulière pour dépister une
éventuelle surinfection » (1).
De nombreuses spécialités
existent : « Inerpan, Beschitine,
Lumiderm, Duoderm, Comfeel
… ».
Dr Wasserman, chef de service
des grands brûlés de l’hôpital Cochin.
Le Dr Wasserman conseille un sulfamide local en cas de surinfection : FLAMMAZINE ® = sulfadiazine
argentique sous forme de crème stérile en tube de 50 g et pot de 500 g.
d) Chez l’enfant et à fortiori chez le nourrisson, il faut toujours prendre l’avis d’un médecin.
Surface de la brûlure
inférieure à la moitié de la
paume de la main du blessé.
Dans « La gazette médicale » n° 3, le Dr B. Karcenty
testait ainsi ses collègues :
Quels gestes d’urgence pratiquez-vous au cours d’une
brûlure
thermique de la main ?
A) Vous la badigeonnez d’un corps gras.
B) Vous l’immergez plusieurs minutes dans l’eau froide.
C) Vous pratiquez rapidement un pansement au tulle gras
simple.
D) Vous pratiquez rapidement un pansement au corticotulle.
La bonne réponse était la B.
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2) Si la brûlure est grave :
- Surface de la ou des cloques supérieure(s) à la moitié de la paume du brûlé.
- Destruction plus profonde (aspect noirâtre) associée à des cloques ou à une
rougeur ± étendue.
- Localisations « particulières » de la brûlure : à la face (bouche et nez)…
risque de détresse respiratoire ou aux mains… risque de séquelles
fonctionnelles ou près d’un orifice naturel (y compris narines et bouche).
- Brûlure d’origine électrique.
- Rougeurs étendues de la peau chez l’enfant.
Que faire en cas de brûlure grave ?
On supprime la cause ou on soustrait la victime à la cause.
a) La brûlure est due à la chaleur :
* Si les vêtements sont enflammés, empêcher la victime de courir, la rouler ou
la faire se rouler par terre et étouffer les flammes avec des vêtements ou une
couverture.
* Arroser immédiatement à l’eau froide (voir précédemment), par ruissellement, pendant au moins 5 à 10 mn
(si possible plus si l’eau utilisée n’est pas trop froide… sinon risque de refroidissement de la victime) afin de
refroidir la plaie, de limiter son évolution et de calmer la douleur et le stress.
* Retirer les vêtements durant l’arrosage sauf s’ils adhèrent à la peau.
* Faire alerter les secours.
* En attendant, allonger la victime sur une région non brûlée ou la
placer en position ½ assise si elle présente des difficultés respiratoires.
* Surveiller la victime, lui parler et signaler toute aggravation en
rappelant les secours.
b) Si la brûlure est liée à un acide (ou à un autre produit chimique) :
- Enlever le plus tôt possible, sous l’eau, les vêtements imbibés
d’acide. Alerter et arroser jusqu’à l’arrivée des secours.
- « Projection de liquide chimique dans l’œil : rincer l’œil abondamment à l'eau le plus tôt possible, en
prenant soin que l'eau de lavage ne coule pas sur l'autre œil » (AFPS).
c) Si la brûlure est liée à une brûlure interne par inhalation :
- Placer la personne en position ½ assise si elle a du mal à respirer et appeler les secours.
-
Lui parler régulièrement.
D) Si la brûlure est liée à une ingestion :
Faire : Ne pas faire :
Faire hospitaliser en urgence en emportant le
produit responsable restant et son emballage. En
attendant, surveiller la victime.
Ne pas faire vomir, le caustique pourrait, en remontant par
l’œsophage produire une nouvelle brûlure.
Ne pas donner à boire
E) Si la brûlure est de nature électrique :
Prévention : protéger les prises de courant par des caches prises et ne laisser jamais traîner une rallonge qui
soit branchée. Ne pas manipuler d’appareils électriques au voisinage de l’eau.
Une brûlure électrique est toujours grave même si le point d’impact cutané apparaît minime car elle brûle les
tissus en profondeur. Des troubles du rythme cardiaque sont en outre possibles.
Ne toucher à rien temps que le courant n’est pas coupé.
Après avoir supprimé la cause, allonger puis desserrer col, cravate, ceinture.
Alerter. Surveiller la ventilation et le pouls. Parler régulièrement à la victime. Il faudra mettre le patient sous
monitoring cardiaque.
Surface de la brûlure
supérieure à la moitié de la
paume de la main du blessé.
Le refroidissement immédiat des
brûlures ou « cooling » réalise
une extraction de chaleur
bénéfique au plan local (ce qui
diminue la profondeur de la
lésion) et général, présente une
action antalgique rapide et
diminue l’œdème.
Après la cicatrisation, le soleil sera à proscrire pendant au moins une année.
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Que faire en cas de gelures ?
Attention : un froid de 0°C avec un vent de 120 km / heure correspond à un froid de - 19 °C !
Les extrémités (pieds le plus souvent) sont d’abord le siège de fourmillements puis s’engourdissent
progressivement (perte de sensibilité). Les gelures du visage sont plus rares et plus superficielles.
* Si la phase de réchauffement est douloureuse, ce n'est pas
une "gelure" mais une simple "onglée" qui guérit toujours
sans séquelles.
* Les gelures du 1er degré (pâleur lors du froid, cyanose de
quelques heures lors du réchauffement, œdème modéré, pas
de cloques) évoluent également sans complications.
* Dans les gelures du "second degré superficiel", il y a
apparition de cloques dans les 6 heures à 2 jours ou plus
après le réchauffement. Ces "phlyctènes" peuvent être
beaucoup plus importantes que sur la photographie.
Paradoxalement, le fait qu'elles soient volumineuses,
claires et d'apparition rapide évoque une évolution
favorable. Elles persisteront environ 8 jours.
* Dans le "second degré profond" les "phlyctènes" sont
hémorragiques (= séro-hématiques).
* Dans les gelures du 3
ème
degré (pas de phlyctènes), la
nécrose aboutit toujours à l'amputation.
Pendant 15 ans, il a été recommandé de réchauffer le patient lentement. Les travaux sur l'animal et la
comparaison des pratiques ont montré qu'un réchauffement rapide était préférable : voir l'article du
"Généraliste" du 12/3/1999 : "Gelures : il faut agir vite" et "Le Quotidien du Médecin" n°6394 du
7/12/41998 : Gelures : réchauffer d'urgence dans l'eau chaude à 38-40 °C et éviter le regel" :
"LA PRISE EN CHARGÉ DES GELURES A CHANGE. ON SAIT MAINTENANT QUE LE
RECHAUFFEMENT LENT AGGRAVE LES LESIONS CRYOGENIQUES…" en favorisant les
phénomènes de nécrose en profondeur… "UN RECHAUD, UNE CASSEROLE ET DE LA NEIGE
PERMETTRONT DE RECHAUFFER VITE DANS DE L'EAU À 38 °C, A CONDITION D'ETRE SUR
QUE LA PERSONNE NE VA PAS REGELER SES LESIONS".
"Généraliste" du 12/3/1999
Faire :
Réchauffer le sujet en l’enveloppant dans une couverture (ne pas réchauffer par frottement).
Desserrer ses vêtements (tout en le maintenant sous la couverture).
Lui faire boire des boissons chaudes et sucrées mais pas de l'alcool.
Aidez-le à rejoindre un lieu protégé et alerter les secours.
Faire bouger les membres jusqu’à l’arrivée des secours.
Si c’est possible, réchauffer les extrémités dans un récipient contenant de l'eau à 38-40 °C durant au
moins une 1/2 heure pour permettre le dégel (
il faut être certain que le sujet ne regèlera pas ensuite
).
Ne pas donner de bain, laissons ce soin aux services d’urgence ou aux services spécialisés qui
ajoutent à l’eau une solution antiseptique iodée ou de la liqueur de Dakin.
La prise d'aspirine (250 mg) à une action anti-inflammatoire (
elle empêche la formation d'acide
arachidonique permettant ainsi de s'opposer à l'adhésion des plaquettes à l'endothélium et à leur agrégation
).
Plus le traitement hospitalier sera débuté vite, plus il se révélera efficace. Il fait appel à des bains à
remous avec antiseptiques et à divers médicaments dont l'aspirine. Dans les cas extrêmes, on
emploie un puissant vasodilatateur : l'iloprost puis quelques jours plus tard les héparines.
Gelure du second degré superficiel.
Photographie Dr Bernard Marsigny.
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Remarques : Les français ne percent pas les phlyctènes car ils les considèrent qu'elles constituent
une barrière s'opposant à l'infection. Les américains les percent car ils pensent qu'elles contiennent
des médiateurs chimiques de l'inflammation néfastes.
L'antisepsie des lésions est essentielle (ce sont les gangrènes consécutives et non pas les gelures
elles-mêmes qui ont décimé les armées de Napoléon).
Les BOSSES et les PLAIES superficielles :
- Le meilleur produit à appliquer sur une bosse est encore la GLACE ...
- Une plaie dite « simple » est une lésion de la peau par coupure, éraflure ou piqûre avec
atteinte éventuelle des tissus sous-jacents mais ne contenant ni souillure ni corps étranger, ne
saignant pas ou peu et de surface peu étendue (inférieure à la moitié de la paume de la main de
la victime).
Les plaies par morsure et les piqûres d’origine animale ont été traitées dans un autre chapitre.
* Le secouriste commence par se laver les mains avec application à l’eau et au savon…
* puis il assure le nettoyage de la plaie au savon de Marseille.
Il est également possible d’employer un antiseptique non coloré (un antiseptique coloré masquerait
la plaie).
Le Mercryl présente l'inconvénient de contenir un dérivé mercuriel, or, on ne peut pas mettre d'iode
sur un dérivé mercuriel et l'iode, sous forme de Bétadine, est très souvent utilisé dans les services
d'urgence.
* Sécher en tam-
ponnant avec une
compresse.
* Protéger par un
pansement. Ne jamais
utiliser du coton ! Les
fibres se prennent dans
le caillot et ceci pour le
plus grand déplaisir du
patient et du médecin
lors de l'enlèvement des
dites fibres... Prendre
des compresses sté-
riles (fixées sur leurs 4
côtés par du tissu
adhésif en rouleau ou par une bande de gaze) ou encore un pansement adhésif.
* Si la plaie devient rouge, gonflée, chaude et douloureuse, il s’agit d’un début d’infection imposant
une visite médicale.
* Toute plaie, même minime peut être une porte d’entrée pour la bactérie du tétanos. Si la
vaccination est ancienne (plus de 5 ans) : consulter un médecin.
« Les premiers secours » par Didier Gateau. Éditions Nathan, 1997.
Bientôt (2002) des pans
graves - même artérielles - en 15 secondes.
Ces pansements sont constitués d'une trame de fil résorbable sur
laquelle est pulvérisée une couche de fibrinogène congelée puis
une couche de thrombine congelée. Testés chez l'animal, ils
arrêtent les hémorragies artérielles en 15 secondes.
En préparation également : une "mousse expansive" de même
nature (injectable dans des plaies par armes blanches ou par
balles) et une "poudre à vaporiser" utilisable en cas de brûlures
étendues. Cf. "Le Quotidien du Médecin " du 28/03/1999.
«
Des maladies peuvent être
transmises par le sang en cas de
plaie même minime des mains du
sauveteur. Dans ce cas, il convient :
1. de se protéger par le port de
gants,
2. de toujours se laver les mains et
les désinfecter (eau de javel, dakin)
le plus tôt possible ».
Fiche AFPS.
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