Le Roi dans la Constitution de 1791, par Guy AUGÉ (1991)
fut si grande sur la genèse du nouveau droit public [2], proposait la théorie de la souveraineté nationale comme
moyen terme entre l'absolutisme royal et l'absolutisme démocratique ; il entendait faire entreprendre la refonte
des institutions par les seuls représentants de la Nation.
• D'autres tenaient que le Roi fût associé aux réformes : dans leur esprit il ne s'agissait que de rétablir l'harmonie
entre le Roi et ses sujets par une sorte de pacte.
La question était donc de savoir s'il fallait créer une Constitution entièrement nouvelle ou simplement rétablir, dans
son authenticité, celle léguée par les siècles, dont les principes auraient été méconnus et oubliés.
Il ne fallut pas moins de trois comités de Constitution pour débattre et élaborer le texte au cours des années
1789, 1790 et 1791.
Du jour où les États généraux se proclamèrent Assemblée nationale, puis se déclarèrent constituants, la Révolution
était faite dans les principes.
L'Assemblée, écrit Talleyrand dans ses Mémoires, se déclare constituante, c'est-à-dire investie du droit de
détruire tout ce qui existe, et d'y substituer tout ce qui lui plaira. [3]
Le maintien de la forme monarchique de l'État, même pour ceux qui réclamaient une Constitution entièrement
nouvelle [4], était indiscuté ; car, disait le rapporteur du second comité, Clermont-Tonnerre,
c'est une forme qu'il est dans les coeurs de tous les Français de chérir et de respecter [5].
Elle fut donc confirmée par acclamations.
Restait à trancher la question du concours du Roi et de l'Assemblée, ainsi que celle de leurs rapports respectifs.
Un comité de Constitution à majorité « monarchienne »
Le second comité, élu le 14 juillet, comprenait 8 membres à majorité modérée, avec Mounier, le célèbre avocat
dauphinois, mais aussi l'idéologue Sieyès, qui introduisit la distinction entre le « pouvoir constituant » (du souverain)
et les « pouvoirs constitués », parmi lesquels le Roi.
En conséquence, Sieyès affirmait que le Roi ne pourrait ni discuter le texte constitutionnel que les représentants de
la Nation lui imposeraient, ni disposer d'un veto législatif susceptible de paralyser la loi, expression de la volonté
générale, puisqu'« un pouvoir d'empêcher est analogue à un pouvoir de faire ».
Sieyès s'insurgeait contre l'idée d'un statut politique fondé sur une tradition, sur « un droit historique » ; il
dénonçait les « prétendues vérités historiques » et voulait se fier aux seules lumières de la raison.
Mounier, pour sa part, proposait un veto royal sur les lois ordinaires, pas sur les lois constitutionnelles, ce qui était
une première capitulation des monarchistes. Il défendait deux chambres, à l'anglaise, et des prérogatives royales
encore substantielles, dont un droit de dissolution de la chambre basse.
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