Département fédéral des finances DFF Rapport concernant les défis et les chances de la place financière suisse Berne, 11.09.2009 - A la demande de la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national (CER-N), le Département fédéral des finances (DFF) a rédigé le rapport "Place financière suisse: situation et perspectives", dont le Conseil fédéral a pris connaissance lors de sa séance d'aujourd'hui. Ce rapport examine tout d'abord les effets que la crise financière a eus jusqu'à présent sur la place financière suisse. Ensuite et surtout, il analyse les changements attendus dans les réglementations nationales et internationales ainsi que les chances et les risques qui peuvent en découler pour notre place financière. La crise financière et ses conséquences ont modifié le système financier international. Dans le monde entier, les marchés financiers sont désormais soumis à une réglementation plus stricte. En outre, la concurrence entre places économiques et donc aussi entre systèmes fiscaux s'est intensifiée. Des tendances protectionnistes ne sont dès lors pas exclues et pourraient non seulement accroître la pression sur la place financière suisse, mais aussi entraîner un redimensionnement des activités pratiquées à l'étranger. Ce nouveau contexte pourrait cependant aussi permettre à la place financière suisse de renforcer sa position. Le rapport décrit la situation actuelle de la place financière tout en présentant les effets possibles de la crise sur les conditions-cadres et les conséquences de ces changements sur la concurrence internationale. Il met aussi et surtout en évidence les chances et les risques liés à cette évolution et les mesures à prendre sur le plan politique au profit de la place financière suisse. En ce qui concerne cette dernière, l'Etat doit continuer à garantir des conditions-cadres de qualité. Quant à la politique commerciale, elle relève de l'économie privée. Le rapport montre qu'une intervention politique doit permettre d'atteindre les objectifs suivants: z z z z Améliorer la réglementation et la surveillance. Il s'agit essentiellement d'améliorer le traitement des risques systémiques, de renforcer la protection des déposants et des investisseurs ainsi que de combler les lacunes du système de réglementation et d'améliorer la détection précoce des risques, tout en évitant d'élaborer une réglementation excessive et d'entraver la compétitivité du secteur. Garantir et améliorer l'accès de notre industrie financière aux marchés étrangers. Il s'agit également de lutter contre les tendances protectionnistes. Améliorer les conditions-cadres de la fiscalité grâce à la troisième réforme de l'imposition des entreprises. Celle-ci consistera à refondre les droits de timbre ainsi que l'impôt anticipé et à retoucher les régimes fiscaux des cantons (sociétés de holding, de domicile et mixtes). Garantir une infrastructure efficiente des marchés financiers et affermir la bonne réputation de la place financière suisse. La mise en oeuvre de normes internationales dans le domaine du blanchiment d'argent et de la criminalité financière permettra de renforcer l'image d'une place financière propre. Toutes les places financières s'efforcent actuellement d'élaborer des stratégies adaptées à la nouvelle donne internationale. En Suisse aussi, les travaux correspondants sont en cours. Le rapport sur la place financière sert de base pour rédiger le rapport sur une stratégie concernant la place financière qui, demandé par le postulat Graber (09.3209) et attendu pour la fin de l'année, sera le résultat d'un dialogue avec l'économie privée. D'autres rapports suivront en 2010. Le Conseil fédéral entend présenter un rapport analysant les conséquences que l'effondrement de grandes entreprises suisses pourrait avoir sur l'économie de notre pays (motion du Groupe de l'UDC, 08.3649). En outre, un autre rapport doit permettre d'examiner le rôle joué par l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) dans la crise financière, de tirer les conclusions de cet examen et de montrer quelles sont les mesures qui s'imposent (postulat David, 08.4039 et motion CER-N, 09.3010). Adresse pour l'envoi de questions: Urs Plavec, responsable de la section Politique économique et monétaire, Administration fédérale des finances, tél. 031 322 61 72 Editeur: Département fédéral des finances http://www.dff.admin.ch Département fédéral des finances DFF Contact: [email protected], autres contacts | Informations juridiques http://www.efd.admin.ch/00468/index.html?lang=fr Département fédéral des finances DFF 11 sept. 2009 Place financière suisse: situation et perspectives Rapport à l’attention de la CER-N Place financière suisse: situation et perspectives Résumé Le 14 octobre 2008, sur demande du conseiller national Paul Rechsteiner, la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national (CER-N) a chargé le Conseil fédéral, représenté par le Département fédéral des finances, de rédiger un rapport sur les perspectives de la place financière suisse. Cette requête trouve son origine dans la crise financière et économique qui sévit actuellement et qui a enregistré une nette aggravation à l’automne 2008, entraînant pour la première fois depuis les années trente une contraction de l’activité économique mondiale. On peut s’attendre à ce que cette crise engendre des ajustements structurels, notamment au sein du secteur financier, ce qui revêt une importance toute particulière pour la Suisse. Compte tenu des incertitudes actuelles, il est toutefois difficile d’évaluer concrètement l’évolution future de la situation et ses conséquences sur la place financière suisse. C’est pourquoi le présent rapport se limite généralement à représenter les effets possibles de la crise sur les conditions-cadres et leurs conséquences sur la compétitivité de la place financière. Il s’agit ici de montrer les opportunités et les risques pour la place financière suisse. De ce fait, ce rapport constitue une base pour la suite des travaux visant à l’élaboration d’une stratégie dans ce sens. Si l’Etat est responsable de la mise en place des conditions-cadres, en revanche l’organisation de la politique commerciale relève de l'économie privée. C’est pourquoi l’élaboration d’une stratégie concernant la place financière se fonde sur un dialogue avec les acteurs de l’économie privée. La crise financière et économique fait suite à une période de croissance ininterrompue et de liquidité abondante. Dans ce contexte exceptionnellement favorable, de nombreux investisseurs ont pris des risques de plus en plus élevés. A cette situation sont venus s'ajouter des facteurs aggravants, à savoir une politique monétaire durablement expansionniste, un système de surveillance et de réglementation qui n’a pas correctement pris en compte le risque systémique dans la majeure partie des pays et les déséquilibres macroéconomiques des balances des paiements à l’échelle mondiale. La croissance persistante des liquidités et des crédits sur le plan international a également donné lieu à un relâchement de la discipline de différentes institutions financières en matière de gestion du risque. Les risques liés à des placements avec des rendements attendus élevés ne pouvant résister à l’épreuve d’une crise ont été sous-estimés, tandis que des structures d’incitation mal conçues ont encouragé des comportements procycliques et favorables au risque. L’évolution des marchés financiers et les moins-values qui en ont découlé ont directement affecté le secteur financier, et en particulier les grandes banques actives à l’étranger. En outre, les conglomérats d’assurance présents dans la banque d'investissement - via l'assurance d'obligations - ainsi que d'autres compagnies d'assurances et instituts de prévoyance, ont été directement touchés à travers leurs placements financiers. L'affaiblissement de l'économie réelle, causé au moins en partie par la crise financière, affecte le secteur financier à un second niveau, par le biais d’un recul de la demande économique globale et d’une augmentation du risque de défaillance des crédits. Une concurrence accrue au sein du secteur financier et l'effondrement des volumes réduisent les marges bénéficiaires des branches d’activité concernées. En réaction à la crise financière, la collaboration internationale en matière de réglementation des acteurs des marchés financiers s’est intensifiée. A la coopération pratique des autorités de surveillance sur le plan technique s'est ajouté, en 2009 le Conseil de stabilité financière (FSB). Celui-ci remplace le Financial Stability Forum (FSF), qui a élaboré les principes d'une coopération internationale dans le domaine de la gestion de crise. Parallèlement, les organes 2 Place financière suisse: situation et perspectives de régulation ont été développés, tels que le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire. Avec l’établissement du FSB, la collaboration avec le FMI, dont les moyens seront provisoirement accrus, a également pris de l’importance. Par ailleurs, des initiatives de renforcement de la coopération fiscale ont été lancées. La pression sur la Suisse en ce qui concerne l’échange d’informations entre les autorités fiscales et de surveillance s’est encore accentuée, entraînant la reprise intégrale par la Suisse des normes de l’Organisation de développement et de coopération économiques (OCDE) en matière d’assistance administrative et d’entraide judiciaire en matière fiscale. On peut s’attendre à un élargissement ou à un remaniement de la réglementation des marchés financiers. Les principaux débats concernent les domaines suivants: - Modération des effets procycliques de la réglementation au moyen de nouvelles directives relatives aux fonds propres des banques; - ajustement de la qualité et de l’efficacité de la gestion des liquidités des institutions financières; - extension de la surveillance aux institutions qui n’y étaient pas soumises jusqu’à présent, comme par exemple les agences de notation; - aménagement d’une structure de compensation et d’une gestion du risque auprès des institutions surveillées de manière à empêcher la prise de risques disproportionnés et à sauvegarder les intérêts à long terme de l’entreprise; - contrôle des ajustements des directives comptables de manière à obtenir une meilleure transparence et à réduire les effets procycliques; - garantie d’une protection suffisante des déposants pour protéger les petits investisseurs et accroître la confiance dans le système financier; - renforcement de l’échange transfrontalier d’informations dans le cadre de l’intensification de la coopération entre autorités de surveillance; - création de «collèges de contrôleurs» au sein desquels sont représentés les principaux organes de contrôle du pays d’origine et du pays d’accueil; - amélioration du recensement des risques systémiques au moyen du renforcement de la surveillance macroprudentielle; - suppression – aussi coordonnée que possible à l’échelle internationale – des engagements des Etats sur les marchés financiers, dans l’optique de garantir un bon état de marche des mécanismes de marché (stratégies de désengagement). Les nombreuses initiatives de la communauté internationale vont également se traduire par de nouvelles réglementations au niveau national. La Commission fédérale des banques (CFB), intégrée à l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA), a d’ores et déjà pris des mesures concernant les différents domaines de discussion mentionnés, ou travaille à leur élaboration. Tel est notamment le cas pour les exigences relatives aux fonds propres, la gestion des liquidités, les systèmes de rémunération, les directives comptables et la protection des déposants. De même, il s'agira désormais de tenir compte de manière appropriée (en collaboration avec la Banque nationale suisse et le Département fédéral des finances) du point de jonction entre les risques macroéconomiques et propres aux institutions et l’ampleur du risque systémique. En outre, dans le cadre de ses activités de surveillance, la FINMA devrait procéder à davantage de tests de résistance. L’amélioration des conditions-cadres et l'adaptation de ces dernières à un nouveau contexte requièrent les interventions suivantes: en matière de réglementation et de surveillance des marchés financiers, il est prioritaire d'améliorer le traitement des risques systémiques et de renforcer la protection des déposants et des investisseurs. Ce faisant, il s’agit de combler les lacunes du système de réglementation et d'améliorer la détection précoce des risques, tout en 3 Place financière suisse: situation et perspectives évitant d'élaborer une réglementation excessive et d'entraver la compétitivité du secteur. Les conditions-cadres fiscales seront améliorées lors de la troisième réforme de l’imposition des entreprises, qui s’articule autour d'une réforme des droits de timbre et de l'impôt anticipé ainsi que de l’ajustement des régimes fiscaux des cantons (sociétés de holding, de domicile et mixtes). De même, les ajustements en matière d'assistance administrative et d'entraide judiciaire revêtent une grande importance pour les futures conditions-cadres. En outre, il convient d’améliorer l’accès aux marchés étrangers, de garantir une infrastructure efficiente et d’affermir la réputation de la place financière suisse. La crise financière actuelle peut modifier de manière déterminante la compétitivité des différents centres financiers au niveau international. On ne peut également écarter l’hypothèse d’un remodelage global du secteur. Il est encore trop tôt pour énoncer un jugement définitif. Il peut en découler tant des opportunités que des risques pour la suisse en tant que place financière internationale. L’évolution du segment de la gestion de fortune privée sera déterminante pour les perspectives d'avenir du secteur financier. Dans ce domaine, le défi consiste à se repositionner dans des circonstances dictées par la révision de la réglementation et par une pression internationale accrue en matière de coopération fiscale. La suisse doit préserver le secret bancaire visant à la protection de la sphère privée, toutefois en mettant en œuvre de manière intégrale les standards internationaux en matière de fiscalité transfrontalière. Les conditionscadres de qualité dont dispose la Suisse dans ce domaine constituent à cet égard un contexte favorable pour une stratégie d'argent propre. L’extension au niveau mondial de la portée de la réglementation peut avoir deux conséquences pour la Suisse: d’une part, du fait de ces efforts, la place financière suisse pourrait se trouver en butte à davantage de pression que d’autres, ce qui devrait notamment entraîner une révision à la baisse des activités à l’étranger; d’autre part, l’attrait de la place financière suisse pourrait s'accroître dans un nouveau contexte réglementaire. La coopération avec les instances internationales et une adoption pondérée des nouvelles réglementations présentent en effet un potentiel de renforcement des avantages concurrentiels du pays. Au printemps 2009 un groupe de travail mixte sur l'orientation stratégique de la place financière (Groupe de travail Stratégie) a été mis sur pied, avec pour mission de rassembler les éléments nécessaires pour élaborer une stratégie dans ce domaine. Ce groupe comprend des représentants des autorités (BNS, FINMA, AFC, AFF) et du secteur financier (Association suisse des banquiers, Association suisse d’assurances, Swiss Fund Association et SIX Group). Les résultats des discussions devraient permettre aux autorités de trouver une stratégie optimale pour améliorer les conditions-cadres et faciliter le positionnement de l’économie privée dans des segments d'affaires spécifiques. Les perspectives de la place financière suisse dépendent essentiellement de l’ampleur des tendances protectionnistes futures et de la garantie pour les entreprises suisses de pouvoir accéder aux marchés des autres pays. L'actuelle tendance internationale vers un élargissement des réglementations réduisent la marge de manoeuvre nationale restante. Dans le passé la suisse était disposée à accepter un certain nombre d'obstacles à un accès aux marchés de l'UE afin de bénéficier d'une réglementation propre, favorisant la position concurrentielle du secteur financier. Compte tenu de l'élargissement réglementaire actuel et du danger d'un accroissement des obstacles envers l'accès aux marchés, cette question devrait à nouveau être posée dans le cadre des relations avec l'UE. En outre, la question des effets de l'engagement – explicite ou implicite – de l’Etat, en particulier concernant des entreprises d'importance systémique est de première importance. Ce problème des entreprises trop grandes pour tomber faillite (too big to fail) doit être résolu à travers une politique structurelle satisfaisante. 4 Place financière suisse: situation et perspectives Compte tenu de ces défis fondamentaux, le législateur devra s’atteler aux domaines suivants: en matière de réglementation et de surveillance des marchés financiers, il s'agira de renforcer les prescriptions relatives aux fonds propres ainsi que la protection des déposants et des investisseurs. Parallèlement, il conviendra d'améliorer la détection précoce des risques. Les conditions-cadres fiscales seront quant à elles améliorées lors de la troisième réforme de l’imposition des entreprises. En outre, il faudra garantir une infrastructure efficiente et sauvegarder la réputation de la place financière suisse. La suite des travaux se fondera sur une analyse détaillée des forces et des faiblesses de cette dernière. Le présent rapport décrit le contexte pour la prise de décisions stratégiques et sert également de base en vue de répondre au postulat Konrad Graber (09.3209), Stratégie concernant la place financière. L’élaboration d’éléments importants pour la stratégie concernant la place financière s’effectue à travers un dialogue avec l’économie privée, dans le cadre du groupe de travail Stratégie. La problématique du rôle systémique des grandes entreprises sera traitée de manière approfondie dans un rapport séparé en réponse à la motion du groupe UDC (08.3649), Prévenir les risques démesurés pour l’économie suisse. En outre des travaux sont en cours pour répondre au postulat David Eugen (08.4039), Clarification du rôle joué par l'autorité de surveillance des marchés financiers dans la crise financière. 5 Place financière suisse: situation et perspectives Table des matières Résumé ......................................................................................................................................... 2 1. Introduction..................................................................................................................... 8 2. Importance du secteur financier suisse....................................................................... 10 3. 2.1. Création de valeur et emploi .............................................................................10 2.2. Structure du secteur financier suisse.................................................................11 2.3. Interdépendance mondiale du secteur financier avant la crise..........................13 2.4. Surveillance du secteur financier ......................................................................14 La crise financière......................................................................................................... 17 3.1. Causes de la crise financière et économique.....................................................17 3.2. Conséquences directes de la crise financière pour la place financière suisse...18 3.2.1. 3.2.2. 3.2.3. 3.2.4. 3.3. Mesures déjà prises par l'Etat pour renforcer le système financier suisse ........22 3.3.1. 3.3.2. 3.3.3. 4. Conséquences pour les marchés financiers ................................................................ 18 Répercussions sur les banques.................................................................................... 19 Conséquences pour les assurances ............................................................................. 21 Conséquences pour les caisses de pension ................................................................. 22 Train de mesures en faveur de l'UBS.......................................................................... 22 Mesures visant à renforcer la protection des déposants............................................. 23 Autres mesures............................................................................................................ 24 Nouvelles conditions-cadres ......................................................................................... 25 4.1. Evolution des structures financières internationales.........................................25 4.1.1. Modifications dans les instances financières internationales ..................................... 25 4.1.2. Réformes portant sur la surveillance et la réglementation des marchés financiers au niveau international.................................................................................................................. 26 4.2. Perspectives en matière de réglementation et de surveillance en Suisse ..........29 4.2.1. 4.2.2. 4.2.3. 4.2.4. 4.2.5. 4.3. Place financière et concurrence internationale .................................................32 4.3.1. 4.3.2. 4.3.3. 4.3.4. 4.3.5. 4.3.6. 5. Exigences en matière de fonds propres et gestion des liquidités ................................ 30 Systèmes de rémunération........................................................................................... 30 Dispositions régissant l’établissement des comptes.................................................... 31 Système global et établissements individuels .............................................................. 31 Protection des déposants ............................................................................................ 32 Atouts de la Suisse dans le contexte de la concurrence internationale....................... 32 Accès aux marchés...................................................................................................... 34 Contexte fiscal............................................................................................................. 34 Assistance administrative et entraide judiciaire ......................................................... 35 Infrastructure des marchés financiers ........................................................................ 36 Distorsions de concurrence et stratégies de désengagement...................................... 36 Perspectives : chances et risques du secteur financier .............................................. 38 5.1. Comparaison entre centres financiers internationaux .......................................38 5.1.1. 5.1.2. 5.1.3. 5.1.4. 5.2. Opportunités et risques pour la place financière suisse ....................................40 5.2.1. 5.2.2. 5.3. Généralités.................................................................................................................. 38 New York..................................................................................................................... 38 Londres ....................................................................................................................... 39 Autres centres financiers............................................................................................. 40 Défis généraux ............................................................................................................ 40 Gestion de fortune....................................................................................................... 42 Importance des grandes entreprises pour l’économie nationale .......................43 6 Place financière suisse: situation et perspectives 6. Perspectives ................................................................................................................... 44 6.1. Tendances pour le secteur financier et l’économie en général .........................44 6.2. Elaboration d’une stratégie, en dialogue avec l’économie privée ....................45 6.3. Mesures nécessaires ..........................................................................................47 Sources ....................................................................................................................................... 48 Glossaire et liste d’abréviations............................................................................................... 49 7 Place financière suisse: situation et perspectives 1. Introduction Le 14 octobre 2008, sur demande du conseiller national Paul Rechsteiner, la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national (CER-N) a chargé le Conseil fédéral (ou le Département fédéral des finances) de rédiger un rapport sur les perspectives de la place financière suisse. Selon cette requête, le Conseil fédéral, ou le DFF, était chargé de soumettre à la CER un rapport traitant des perspectives pour la place financière suisse, en proposant des alternatives le cas échéant. Ce rapport devait apporter un éclairage en particulier sur les interactions économiques et les conséquences réglementaires, sur la base des expériences de la crise financière. Amorcée en été 2007 sur le marché de l’immobilier américain, la crise financière mondiale a enregistré une nette aggravation au cours de 2008. Elle s’est étendue de plus en plus à l’économie réelle et devrait, pour la première fois depuis les années trente, se traduire par une contraction de l’activité économique mondiale, c’est-à-dire par des taux de croissance négatifs. Par conséquent, de nombreux pays ont dû mettre en place au niveau national des trains de mesures visant à stabiliser le système financier et à sauver certaines institutions financières. Ces mesures ont permis d'éviter l’effondrement de l'ensemble du système financier et de stabiliser quelque peu la situation. Lors de la rédaction du présent rapport, la crise persistait. Il faut s’attendre à ce qu’elle entraîne des ajustements structurels au sein du secteur financier. De plus, le contexte réglementaire mondial devrait connaître des modifications radicales. A l’heure actuelle toutefois, il est encore impossible d'évaluer précisément la crise financière et ses conséquences. Le présent rapport rend compte à la fois des développements les plus importants qui s’annoncent en termes de surveillance et de régulation des marchés financiers, en Suisse comme à l’étranger, et des changements qui affectent la Suisse en tant que place financière, soit directement en conséquence de la crise financière, soit indirectement, du fait de la réaction d'autres centres financiers ou des modifications de la réglementation. Il présente les modifications probables des conditions-cadres ainsi que les opportunités et les risques qui en découlent pour la place financière suisse. Ce document constitue donc une base pour la suite des travaux visant à élaborer une stratégie pour la place financière suisse. Si l’Etat est responsable de la mise en place de conditions-cadres favorables, l’organisation de la politique commerciale est toutefois du ressort de l’économie privée. C’est pourquoi l’élaboration d’une stratégie concernant la place financière nécessite un dialogue entre l’administration et le secteur privé. Sans préjuger des décisions à prendre, le présent rapport fait partie des bases nécessaires pour poser les jalons stratégiques qui permettront de lancer de nouveaux processus législatifs. Il sert également de base pour l'élaboration d'une réponse au postulat Konrad Graber (09.3209), Stratégie concernant la place financière. Les questions touchant la stratégie relative à la politique de la place financière seront ainsi abordées dans un second temps. La problématique du rôle systémique des grandes entreprises sera traitée de manière approfondie dans un rapport séparé en réponse à la motion du groupe UDC (08.3649), Prévenir les risques démesurés pour l’économie suisse. En outre des travaux sont en cours pour répondre au postulat David Eugen (08.4039), Clarification du rôle joué par l'autorité de surveillance des marchés financiers dans la crise financière. 8 Place financière suisse: situation et perspectives Le rapport s’articule comme suit: le chapitre 2 présente le secteur financier suisse avant la crise, en termes de création de valeur, d'emploi, de structure et d'importance sur le plan international. Il aborde aussi brièvement le sujet de la réglementation de ce secteur. Le chapitre 3 porte sur les causes et les effets directs à court terme de la crise financière actuelle. Il fournit également une synthèse des mesures prises par la BNS et par la Confédération pour stabiliser le système financier. Le chapitre 4 propose des réflexions sur les conséquences de la crise pour les conditions–cadres. Les changements structurels sur les marchés financiers mondiaux ont incité les instances internationales à réaliser des travaux visant à rétablir la stabilité financière et entraînent un remodelage de l'architecture réglementaire des marchés financiers, aussi bien au niveau national que mondial. Sur cette toile de fond, le chapitre 5 présente les opportunités et les risques qui s’ensuivent pour la Suisse. Enfin, le chapitre 6 comprend une vue d’ensemble des travaux d'examen et de révision de la stratégie concernant la place financière. 9 Place financière suisse: situation et perspectives 2. Importance du secteur financier suisse 2.1. Création de valeur et emploi La Suisse dispose d’un secteur financier fort, qui représente un pilier de l’économie en termes d’emploi et de création de valeur. L’industrie financière génère environ 10 % des impôts sur le revenu et sur les bénéfices des entreprises à tous les niveaux institutionnels. Outre les banques et les assurances, il convient de ne pas sous-estimer la contribution des autres prestataires de services financiers, tels que les gestionnaires de fortune indépendants ou les négociants en valeurs mobilières, qui emploient plus de 20 000 personnes. Dans le cadre de l'économie, le secteur financier joue le rôle central d’intermédiaire entre les épargnants et les investisseurs. Il remplit ce faisant une fonction de transmission importante en prenant soin de procéder à une allocation optimale du capital en tant que facteur de production. A travers une allocation efficiente du capital et des risques, ainsi qu’un approvisionnement suffisant en crédits, le secteur financier crée une condition essentielle à l’exploitation du potentiel de croissance de l’économie. Un secteur financier bien structuré présente également des avantages indirects pour l'économie réelle. Ainsi, il favorise l’implantation ou le développement de sociétés actives au niveau international. A cet égard, les compétences existantes dans les différentes spécialités de crédit et une large palette de services jouent un rôle significatif. De même, l'activité des grandes banques dans le domaine du financement des exportations et du commerce est précieux pour la Suisse en tant que pays tourné vers les échanges. La situation du secteur financier présentée ici est celle d'avant la crise. Au cours des années précédant celle-ci, ce secteur avait pris de plus en plus d’importance. Ainsi, la création de valeur du secteur financier en Suisse a progressé de 3 % en moyenne entre 1991 et 2005 (à prix constants), contre seulement 1 % en moyenne pour le reste de l’économie. Le ralentissement économique subi par la Suisse dans les années 90 n’avait donc pas touché le secteur financier. Le fort dynamisme observé en Suisse en 2005 et 2006 dépendait fortement du secteur financier. Du fait de son importance pour l’économie nationale, on peut dire que ce secteur exerce une influence déterminante sur la conjoncture de la Suisse 1 . Avec 183 000 équivalents plein temps, le secteur représentait en 2006 environ 5,8 % de l’emploi total (voir le tableau 1) 2 . Cette part est à peu près stable depuis le début des années 90. Avec près de 60 milliards de francs, la création de valeur du secteur représente environ 12 % du produit intérieur brut (PIB). Avec 40,7 milliards de francs, la première place revient au secteur bancaire, suivi du secteur des assurances (16,7 milliards). Ce dernier inclut les caisses d’assurance-maladie et la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA). Ces statistiques concernant la création de valeur reposent sur une évaluation relativement prudente de l'Office fédéral de la statistique (OFS). 1 SECO. 2006. Tendances conjoncturelles hiver 2006/2007. L’importance des activités financières dans le PIB suisse. 2 Dans les données utilisées, le total de l’emploi équivalent plein temps répond à la définition de la Statistique de l’emploi (STATEM) de l’Office fédéral de la statistique (OFS). Les calculs concernant la création de valeur et l’emploi reposent sur le classement des branches économiques de la Nomenclature générale des activités économiques (NOGA). 10 Place financière suisse: situation et perspectives Tableau 1: Emploi et création de valeur des différentes branches (2006, hors agriculture) Emploi* part en % équivalents plein temps (milliers) 879 28,0 % Commerce, restaurants et cafés, transports et communications Administration publique, enseignement, santé, autres services Industrie, énergie Location, R et D, services aux entreprises Construction Institutions de crédit et assurances Institutions de crédit Compagnies d’assurance Activités connexes Total *) Sources: OFS, STATEM (ETP) **) Sources: OFS, Comptes nationaux Création de valeur** millions part en % CHF 100'853 22,3 % 770 24,5 % 119'064 26,3 % 661 373 279 183 21,0 % 11,9 % 8,9 % 5,8 % 3,6 % 1,5 % 0,7 % 100,0 % 101'215 48'585 25'543 57'451 40'735 16'717 nd 458'153 22,4 % 10,7 % 5,6 % 12,7 % 9,0 % 3,7 % nd 100,0 % 113 48 23 3'308 La délimitation statistique précise du secteur financier n’est pas aisée à déterminer. Par exemple, les fonctions d’économie bancaire sont parfois assurées par les entreprises industrielles. De même, des méthodes de comptabilité et d'enquête différentes peuvent aboutir à des résultats divergents. 2.2. Structure du secteur financier suisse Une évaluation numérique de la structure du secteur financier suisse est effectuée dans le cadre d’un groupe de travail composé de représentants de l’administration et du secteur privé («Comité de pilotage Dialogue place financière»). Les statistiques de la BNS et des avis d'experts ont permis d’évaluer les contributions à l’emploi et à la création de valeur de toute une série de domaines d’activité (voir le tableau 2). Les données ont été vérifiées au moyen de différentes méthodes. Plusieurs inexactitudes demeurent du fait de la difficulté de l’entreprise. Des méthodes différentes étant utilisées, la création de valeur affiche environ quatre milliards de plus (61,4 milliards contre 57,5 milliards) par rapport aux comptes nationaux (CN, tableau 1). De même, le nombre d’actifs calculé selon ces méthodes s’écarte légèrement des résultats du tableau 1. 11 Place financière suisse: situation et perspectives Tableau 2: Emploi et création de valeur du secteur financier par segment (2006) Création de valeur 2006 en % du milliards total CHF Banque commerciale Banque privée Fonds de placement Fons spéculatifs et capital-investissement Retraites (banques) Autres gestion d’actifs Négoce de matières premières Banque d’investissement (dont produits structurés) Total banque Assurance vie et retraite Réassurance Assurance dommages Total assurance Total de l’ensemble de la place financière 14,9 18,1 3,0 4,1 0,8 0,5 0,8 3,1 45,3 5,4 1,7 9 16,1 61,4 24,3 % 29,5 % 4,9 % 6,7 % 1,3 % 0,8 % 1,3 % 5,0 % 73,8 % 8,8 % 2,8 % 14,7 % 26,2 % 100,0 % Emploi 2006 en % du ETP total 58'500 48'500 4'100 4'000 2'500 1'000 1'400 7'800 127'800 7'200 3'800 40'400 51'400 179'200 32,6 % 27,1 % 2,3 % 2,2 % 1,4 % 0,6 % 0,8 % 4,4 % 71,3 % 4,0 % 2,1 % 22,5 % 28,7 % 100,0 % Source: OFS / estimations ASB, ASA Au sein du secteur bancaire, on peut opérer une distinction fondamentale entre les entreprises orientées vers le marché intérieur et celles qui visent l’étranger. Les grandes banques UBS et Credit Suisse sont toutefois aussi fortement axées sur la Suisse que sur l’étranger. Parmi les établissements exerçant sur le plan international figurent notamment des institutions actives dans la gestion privée et dans la banque d’investissement (essentiellement des opérations de commissions). Sur le marché intérieur, la création de valeur émane principalement de l’écart de taux entre les crédits et les dépôts d’épargne. Tout comme dans le reste de l’Europe ou aux Etats-Unis, les activités de détail s’adressent avant tout à une clientèle nationale: les prestataires étrangers sont rares et les prestataires nationaux sont orientés vers le marché intérieur. En comparaison internationale, le secteur bancaire revêt une importance majeure pour l’économie suisse. Fin 2007, le total de ses actifs s’élevait à plus de 4700 milliards de francs et les trois quarts de ce montant étaient gérés par les grandes banques. Ces chiffres représentent plus de neuf fois le PIB de la Suisse, ce rapport étant plus important que dans les autres pays du G10. Au cours des dix dernières années, le secteur bancaire a en outre enregistré une croissance constante et rapide, presque exclusivement imputable aux activités déployées à l'étranger par les deux grandes banques. Bien que le secteur bancaire présente une structure élargie, il se caractérise toutefois par une forte concentration de l'activité entre les mains des deux grandes banques suisses, qui, même prises séparément, présentent une importance systémique. Ainsi, sur le marché intérieur, l'UBS et le CS détiennent une part de marché de plus de 40 % pour les dépôts et de près de 40 % pour les crédits. Mesurée sur le total du bilan, leur part dans le secteur global s’élevait à 70 % à fin 2008, soit près de six fois le PIB. Selon la statistique bancaire, environ quatre cinquièmes des avoirs et engagements sont imputables à l'étranger. Avec plus de 40 000 employés (fin 2007), les grandes banques jouent également un rôle important en tant qu’employeurs (cf. diagrammes 1 et 2). La taille critique des grandes banques leur permet d’être présentes dans un grand nombre de segments d'activité orientés vers l'international. L'offre de services financiers étendue qu'elles peuvent ainsi proposer contribue non seulement à une création de valeur directe sur le marché national, mais profite également à d'autres branches économiques. 12 Place financière suisse: situation et perspectives La crise financière a montré combien le secteur financier et l’ensemble de l’économie dépendaient du bon fonctionnement d'une grande banque. Si un tel établissement se trouvait rapidement et de manière inattendue dans l’impossibilité d’assumer son rôle sur les marchés nationaux des dépôts et du crédit, de nombreux ménages et entreprises ne pourraient plus effectuer de dépenses courantes et d'investissements suite au blocage de leurs comptes et à la suspension de leurs prêts, ce qui entraînerait une paralysie du système de paiement. Dans le cas de l'UBS, environ 128 000 PME seraient touchées et – particuliers compris – bien plus de trois millions de comptes. La faillite d'une grande banque déclencherait une véritable réaction en chaîne et déstabiliserait, au moins à court terme, l'approvisionnement en liquidités et le système de paiement de la Suisse. Un tel événement causerait également un tort notable au reste du secteur bancaire et affecterait la réputation de la place financière. Fig. 1: Total du bilan des banques Fig. 2: Nombre d’actifs dans les banques total du bilan des grandes banques en % du PIB total banques domestiques total du bilan des autres banques en % du PIB 1'000 grandes banques domestiques 120'000 900 800 100'000 700 600 500 80'000 60'000 400 300 40'000 200 100 20'000 2007 2006 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 2008 2007 2006 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 Source: BNS 1995 - - Source: BNS Les placements financiers des compagnies suisses pratiquant l’assurance sur la vie, l’assurance dommages et la réassurance s’élevaient au total en 2007 à 600 milliards de francs, dont 42 % de titres à revenu fixe. Entre 2003 et 2007, on comptait environ 260 entreprises, filiales étrangères comprises. Les primes totales reçues par les établissements surveillés s’élevaient à environ 120 milliards de francs en 2007. Les prestations d’assurance payées par ces mêmes compagnies atteignaient 81 milliards, dont environ 43 % au titre de l’assurance sur la vie. 2.3. Interdépendance mondiale du secteur financier avant la crise Jusqu’à présent, le secteur financier suisse était étroitement lié à l'économie mondiale, notamment par le biais des deux grandes banques du pays. Celles-ci comptent en effet parmi les plus grandes banques du monde: en total du bilan, l'UBS occupait en 2007 la première place du classement, tandis que CS se plaçait en 19e position 3 . Ces deux grandes institutions suisses faisaient donc partie des principaux acteurs sur de nombreux marchés et dans beaucoup de pays. Le domaine des assurances comprend lui aussi des compagnies exerçant leurs activités au niveau international. Le marché de la réassurance est ainsi fortement orienté vers l’étranger et les grands assureurs proposent aussi leurs services dans d’autres pays. Les données ci-après donnent une idée de l'importance internationale du secteur financier suisse en général et des grandes banques en particulier: 3 Source: The Banker, juillet 2007. 13 Place financière suisse: situation et perspectives • Gestion de fortune. Avec une part de marché de presque 10 % de la fortune gérée à l’échelle mondiale, calculée sur la base des actifs gérés par les 500 principaux acteurs de ce segment, la Suisse fait partie des principaux centres de gestion de fortune, aux côtés des Etats-Unis et du Royaume-Uni 4 . Les deux grandes banques suisses font partie des plus grandes sociétés de gestion de fortune du monde. Avec une part de marché de 27%, la Suisse était en 2007 le premier acteur mondial de la gestion de fortune offshore. • Banque d’investissement. Les banques suisses sont actives dans le monde entier dans la banque d’investissement. En 2007 et 2008, les deux grandes banques suisses occupaient ainsi le neuvième (Credit Suisse) et le dixième (UBS) rangs en matière d’émission d’actions et d’obligations 5 . Les deux établissements faisaient partie des acteurs les plus dynamiques du marché des dérivés de crédit (6e rang pour l'UBS, 8e pour le Credit Suisse) 6 . Elles étaient également des prestataires de premier rang à l'échelle mondiale dans le financement d'exportations. • Système de paiement et de règlement. Les grandes banques suisses font partie des principaux prestataires internationaux de services de paiement et de règlement. Elles figuraient parmi les participants les plus actifs tant au système de paiement SWIFT qu'au système de paiement de masse CLS. Elles constituaient en outre des dépositaires de titres (global custodians) de premier plan. • Emploi. Les banques suisses emploient un grand nombre de leurs collaborateurs à l’étranger, en particulier les grandes banques, qui sont d’importants employeurs dans les centres financiers d’autres pays. Par exemple, l'UBS emploie environ les deux tiers de ses employés à l’étranger. • Assurances privées. Dans le domaine des assurances, la Suisse revêt une importance internationale en matière de réassurance grâce à Swiss Re. Elle y occupe le quatrième rang après l'Allemagne, les Etats-Unis et les Bermudes. Selon les revenus de primes d'assurances, Swiss Re est la deuxième société dans le monde, après Munich Re. 7 En outre, plusieurs compagnies d’assurance actives sur le plan international ont leur siège dans notre pays (comme Zurich Financial Services ou Swiss Life). 2.4. Surveillance du secteur financier Avant la crise, trois organes de surveillance assumaient la surveillance et la réglementation du secteur financier: l’Office fédéral des assurances privées (OFAP), la Commission fédérale des banques (CFB) et l’Autorité de contrôle en matière de lutte contre le blanchiment d’argent (Autorité de contrôle LBA). Le 1er janvier 2009, ces trois instances ont fusionné pour donner naissance à l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers, la FINMA, et la structure institutionnelle des organes existant jusqu’alors a été améliorée. La FINMA est constituée en établissement de droit public. Elle jouit d’une indépendance fonctionnelle, institutionnelle et financière et dispose d’un organe de contrôle externe (Contrôle fédéral des finances). La nouvelle loi sur la surveillance des marchés financiers8 comprend non seulement les dispositions relatives à l’organisation de la FINMA, mais aussi les principes relatifs à la 4 Source: «Wealth Management in Switzerland», Association suisse des banquiers, janvier 2009. Chacune détenant une part de marché d’environ 5 %. Source: Thomson Reuters. 6 En nombre de transactions. Source: «CDx Survey», FitchRatings, juillet 2007. 7 Source: «Standard & Poor's Global Reinsurance Highlights» 8 RS 956.1 5 14 Place financière suisse: situation et perspectives réglementation des marchés financiers, des règles en matière de responsabilité, les bases de l'harmonisation des instruments de surveillance et un système de sanctions élargi, qui inclut par exemple l'interdiction d’exercer. En revanche, les sept lois sur la surveillance financière n'ont pas été harmonisées. La loi sur la surveillance des marchés financiers (LFINMA) constitue donc une loi faîtière des sept lois sur la réglementation des marchés financiers (voir encadré). La mission légale de la surveillance des marchés financiers est restée inchangée et les spécificités des différents organes de surveillance sont prises en compte. La loi sur les banques stipule que chaque banque doit disposer, sur une base consolidée, d'un volume suffisant de fonds propres et de liquidités. Les principes de la loi sur les banques sont précisés dans l’ordonnance sur les banques 9 et dans l’ordonnance sur les fonds propres (OFR) 10 . L'OFR établit une distinction entre différents risques (risques de crédit, risques de marché et risques opérationnels) et exige que ceux-ci soient couverts par un volume suffisant de fonds propres. Le rapport entre les risques et les fonds propres, ainsi que le calcul de ces deux éléments, sont fondamentaux. L’interdépendance des fonds propres et des risques encourus constitue également un principe central de l’accord Bâle II. Le 1er janvier 2007, le nouvel accord sur les fonds propres (Bâle II) du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire sous la direction de la CFB a été transposé dans le droit national, conformément aux prescriptions internationales. Rétrospectivement, il apparaît que la crise financière actuelle vient confirmer la constatation de la CFB selon laquelle les deux grandes banques ont un besoin nettement accru de fonds propres, et ce même après l'application conservatrice et assortie de conditions supplémentaires (Swiss Finish) des accords de Bâle II. Le 20 novembre 2008, une révision à la hausse des objectifs en matière de fonds propres a été décidée pour chacune des deux grandes banques. Le nouveau régime de fonds propres se concentre sur deux instruments complémentaires: l’augmentation des exigences de fonds propres pondérées par les risques et l’introduction du ratio d’endettement (leverage ratio), qui représente une limite nominale du taux d’endettement, indépendamment du risque. Dans le domaine des assurances, l’Office fédéral des assurances privées (OFAP) a développé, au moyen de la loi sur la surveillance des assurances en vigueur depuis 2006, le concept d’une surveillance intégrée du secteur, en vertu duquel la surveillance doit se fonder sur des éléments quantitatifs, qualitatifs et traditionnels. Les éléments quantitatifs tenant compte des aspects économiques et des risques sont représentés en particulier par le modèle de capital du test suisse de solvabilité (Swiss solvency test, ou SST), qui sera entièrement introduit d'ici à 2011. Les éléments qualitatifs comprennent l’adaptation aux principes du gouvernement d’entreprise, la gestion du risque et des exigences relatives à d’autres processus. Enfin, les éléments traditionnels concernent les indicateurs financiers disponibles à court terme, tels la Solvabilité I ou les exigences en matière de provisions actuarielles et de fortune liée. Ce concept vise à fournir une vue d'ensemble pour la surveillance, qui simplifie l'évaluation systématique de la situation des entreprises suivies aussi bien que celle du secteur de l’assurance dans son ensemble. Sept lois sur les marchés financiers coiffées par la LFINMA: − Loi du 8 novembre 1934 sur les banques (LB, RS 952.0) − Loi du 24 mars 1995 sur les bourses (LBVM, RS 954.1) 9 RS 952.02 RS 952.03 10 15 Place financière suisse: situation et perspectives − − − − − Loi du 23 juin 2006 sur les placements collectifs (LPCC, RS 951.31) Loi du 17 décembre 2004 sur la surveillance des assurances (LSA, RS 961.01) Loi du 2 avril 1908 sur le contrat d’assurance (LCA, RS 221.229.1) Loi du 10 octobre 1997 sur le blanchiment d’argent (LBA, RS 955.0) Loi du 25 juin 1930 sur l’émission de lettres de gage (LLG, RS 211.423.4) En matière de stabilité financière, les autorités de surveillance collaborent avec la BNS. En vertu de l’art. 5 de la loi sur la banque nationale 11 , cette dernière a pour tâche, non seulement de conduire la politique monétaire du pays, mais aussi d'approvisionner le marché suisse en liquidités et de contribuer à la stabilité du système financier. Cette collaboration est réglée par un mémorandum d'entente (Memorandum of Understanding). La BNS suit l'évolution du secteur bancaire du point de vue de l'ensemble du système. En cas de crise, elle peut jouer le rôle de prêteur en dernier recours. C’est en revanche la FINMA qui assure la surveillance directe des instituts financiers et la mise en œuvre des dispositions légales. De ce fait, sa mission de surveillance est plutôt orientée vers les différents établissements et groupes financiers. Parmi les domaines de compétences communs à la FINMA et à la BNS figure en particulier l’évaluation de la solidité des établissements présentant une importance systémique. Dans cette optique, les deux institutions échangent des informations et des avis, qui comprennent également des renseignements et des documents auxquels le public n'a pas accès. 11 RS 951.11 16 Place financière suisse: situation et perspectives 3. La crise financière 3.1. Causes de la crise financière et économique Les années qui ont précédé la crise se sont caractérisées par une phase de développement macroéconomique stable et par des liquidités élevées. Dans ce contexte exceptionnellement favorable, de nombreux investisseurs ont pris des risques toujours plus élevés. Cette propension au risque élevée – rétrospectivement – se manifestait notamment à travers des primes de risque inhabituellement faibles sur les obligations d’entreprises et les emprunts très risqués. En outre, les deux grandes banques suisses enregistraient également des taux de croissance inaccoutumés pour leurs activités de négoce et de crédit à l’étranger. Une des conséquences de la propension au risque élevée et généralisée a été la formation sur certains marchés de ce qui apparaît aujourd'hui comme des excès - entre autres sur le marché immobilier américain. Il convient cependant de ne pas surestimer le fait que la correction ait été déclenchée par les problèmes du segment d’emprunteurs à risque (subprime) américains. Si elle n’avait pas été provoquée par le secteur immobilier, elle serait survenue plus tard, à un autre endroit. Une cause importante de la crise a été la politique monétaire durablement expansionniste qui a suivi l'éclatement de la bulle Internet, ainsi que le niveau élevé de liquidité. A cela s'ajoutait un système de surveillance et de réglementation qui, dans de nombreux pays, ne tenait pas compte des risques systémiques de manière appropriée. Les déséquilibres macroéconomiques mondiaux sont également à l'origine de la crise, notamment le lourd taux d’endettement des ménages (surtout aux Etats-Unis) et du secteur bancaire dans le monde entier, dont le rôle a été décisif dans la formation de la bulle sur les marchés financiers et des déséquilibres internationaux. Les fortes liquidités et la propension au risque élevée ont également favorisé un relâchement de la rigueur de différentes institutions financières en matière de gestion du risque. Les risques des placements n'étant pas à l'épreuve d'une crise et assortis d’importantes attentes de rendement ont été sous-évalués, tandis que des politiques incitatives mal conçues ont entraîné des comportements risqués et procycliques 12 . Les facteurs ci-après ont particulièrement contribué à la transformation des troubles du marché américain du crédit subprime en une crise financière mondiale: Premièrement, la part élevée de financement par l’emprunt des banques internationales s’est révélé problématique. En général, les banques internationales ne disposent que de fonds propres limités en rapport avec leur total de bilan. Les pertes réalisées par divers établissements internationaux dans certaines activités – notamment dans la banque d'investissement et aux opérations pour compte propre – ont suffi pour réduire à néant une bonne part des fonds propres des banques concernées et nécessiter l'approvisionnement en nouveaux capitaux. Deuxièmement, le manque de transparence s’est révélé handicapant. Les opérations des banques internationales étaient largement opaques pour les régulateurs et les investisseurs. Les banques publiaient généralement des informations insuffisantes ou difficilement compréhensibles sur les risques encourus – parfois en se fondant sur les normes comptables en vigueur. La comptabilisation de différents risques hors bilan ou la titrisation de risques de crédit à travers des instruments complexes ont notamment contribué à véhiculer une image faussée de la situation. Les participants au marché ont ainsi rencontré pendant la crise de grandes 12 Cf. également l’exposé de Jean-Pierre Roth devant le Schweizerisch-Deutschen Wirtschaftsklub à Francfort le 2 mars 2009 intitulé: «Crise mondiale: dans quelle mesure la Suisse est-elle touchée?». 17 Place financière suisse: situation et perspectives difficultés à évaluer rapidement et avec suffisamment de précision la solvabilité de leurs contreparties alors que ce risque avait justement été laissé de côté pendant bien longtemps. Le fort niveau d’endettement s’est révélé extrêmement déstabilisant, en particulier en combinaison avec le manque de transparence. Ces circonstances ont eu pour conséquence que la solvabilité de nombreuses banques n'allait plus de soi, surtout après la faillite de Lehman Brothers en septembre 2008. Sur le marché interbancaire, cette situation s’est traduite par une crise de confiance persistante. Troisièmement, les limites de la gestion du risque sont devenues patentes. Au cours de la crise actuelle, on a remarqué en particulier que les banques ne tenaient pas assez compte des événements extrêmes. En matière de risques de marché, on a recensé des pertes que les modèles employés considéraient comme extrêmement improbables. En ce qui concerne les risques de liquidité également, il s’est avéré clairement que de nombreux participants au marché s'étaient trouvés en difficulté parce qu'ils n'avaient pas escompté une évolution aussi exceptionnelle de la situation. 3.2. Conséquences directes de la crise financière pour la place financière suisse 3.2.1. Conséquences pour les marchés financiers Les difficultés du secteur financier et la dévalorisation des valeurs mobilières ont entamé la confiance des participants au marché et des investisseurs. Des institutions suisses étaient également exposées à des placements dont la valeur intrinsèque a dû être revue à la baisse. L’ampleur des amortissements a réveillé des craintes quant à la solvabilité de certains établissements financiers. Le net repli des cours des actions en 2007 et en 2008 a eu notamment des répercussions sur la capitalisation des entreprises. La figure 3 représente l’évolution de la capitalisation boursière des principales sociétés suisses cotées (indice des actions suisses, ou SPI). Elle montre clairement qu’à la fin de l'année 2008 celle-ci, mesurée en pourcentage du PIB, était retombée à peu près à son niveau de 2002. Figure 3: Capitalisation boursière du SPI capitalisation boursière du SPI, en % du PIB 350% 300% 250% 200% 150% 100% 50% Source: BNS 18 2008 2007 2006 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 1991 1990 0% Place financière suisse: situation et perspectives L’effondrement des cours des actions au cours de 2008 a eu une influence négative sur les revenus de différents secteurs d’activité. Ceci, ainsi que les efforts de réduction des coûts s'est traduit par une diminution de la part du secteur financier dans la création de valeur et dans l’emploi. Les volumes de transactions boursières constituent un indicateur significatif de la création de valeur du secteur bancaire puisqu’ils constituent la base des opérations de commissions et des activités subséquentes. Les volumes de transactions boursières renseignent également sur l’ampleur des liquidités au sein d'un marché. La figure 4 montre bien que, en comparant plusieurs années, cet indicateur se situe encore aujourd'hui à un niveau relativement élevé. Figure 4: Volumes des transactions boursières SIX Volumes des transactions sur actions négociées à la Bourse suisse, en % du PIB 500% 450% 400% 350% 300% 250% 200% 150% 100% 50% 2008 2007 2006 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 0% Source: BNS 3.2.2. Répercussions sur les banques Jusqu'à présent, les banques suisses axées sur le marché intérieur ont surmonté la crise actuelle sans pertes importantes, alors que les deux grandes banques ont été plus fortement touchées. Celles-ci ont enregistré des pertes records et ont dû renforcer plusieurs fois leur dotation en fonds propres. Une mesure de soutien de l'Etat a même été nécessaire à l'automne 2008 dans le cas de l'UBS. 13 Durant la crise, le marché a considérablement réévalué le risque des grandes banques, comme le montre l'évolution des primes de risque de crédit (Credit default swaps) à la figure 5. 13 Cf. ch. 3.3.1. 19 Place financière suisse: situation et perspectives Figure 5: Credit Default Swaps (CDS) de l'UBS et du Credit Suisse UBS CS 400 Points de base 300 200 100 0 01.2002 01.2003 01.2004 01.2005 01.2006 01.2007 01.2008 01.2009 Source: SNB Markets Analysis Platform, Bloomberg Comme dans tous les autres espaces monétaires majeurs, les effets de la crise ont également été ressentis sur le marché interbancaire suisse: après l'annonce, en septembre 2008, de l'insolvabilité de la banque américaine Lehman Brothers, les incertitudes sur la situation des établissements financiers se sont encore sensiblement accrues. Cette annonce a suscité de grandes craintes dans le monde entier quant à la solvabilité des banques. La méfiance mutuelle des intermédiaires financiers a conduit à une hausse massive des primes de risque pour les crédits interbancaires non couverts, comme le montre la figure 6 à partir de juillet 2007. La situation en termes de liquidités demeure depuis longtemps tendue pour la plupart des grandes banques internationales. Et bien que les primes de risque aient de nouveau baissé courant 2009, elles restent à un niveau nettement supérieur à celui de juillet 2007. Figure 6: Prime de risque sur le marché interbancaire 14 180 160 Points de base 140 120 Points 100 de base 80 60 40 20 0 07.2007 01.2008 07.2008 01.2009 Source: Bloomberg Durant la première phase de la crise, les banques de petite et moyenne taille, dont l'activité est principalement axée sur le marché intérieur, ont été peu touchées par les turbulences qui secouaient les marchés. Certains établissements, notamment PostFinance et les banques 14 Dans le graphique, la prime de risque sur le marché interbancaire correspond à la différence entre le Libor à trois mois (taux d'intérêt pour les crédits non couverts entre banques) et le «Tom/Next Indexed Swap» (TOIS) à trois mois (taux d'intérêt sans risque). 20 Place financière suisse: situation et perspectives cantonales disposant d'une garantie de l'Etat ainsi que le Groupe Raiffeisen, ont même tiré parti des inquiétudes liées aux grandes banques et enregistré un afflux important de nouveaux capitaux. La propagation de la crise financière à l'économie réelle a entraîné une récession globale, qui se répercutera également sur les rendements des banques dans un deuxième temps. Le taux de défaillance des crédits ainsi que les risques de solvabilité des emprunteurs augmenteront, donnant lieu à de nouvelles corrections de valeurs. Cette seconde phase concernera aussi des établissements qui, jusqu'à présent, avaient peu subi les effets directs de la crise Avant la crise, l'emploi dans les banques suisses en Suisse et à l'étranger se caractérisait principalement par une hausse des embauches dans les grandes banques à l'étranger. Bien que les statistiques disponibles (cf. figure 2, chiffres jusqu'en 2007) ne montrent encore aucune baisse, il faut s'attendre à un repli les années suivantes. 3.2.3. Conséquences pour les assurances En plus des banques, les turbulences sur les marchés financiers ont également affecté les assureurs, notamment ceux qui opèrent sur les marchés des capitaux. Depuis l'automne 2008, les primes de risque de crédit de Swiss Life et de Swiss Re, les deux grands assureurs suisses, ont considérablement augmenté et sont même nettement supérieures à celles des deux grandes banques. Les primes de risque de Swiss Re ont diminué au cours du premier semestre, alors que celles de Swiss Life se sont maintenues à un niveau élevé (cf. figure 7). Les assureurs ont surtout été confrontés à la crise par l'intermédiaire de leurs placements financiers et ils ont dû procéder à des corrections de valeurs plus importantes que les banques d'investissement, notamment sur les Credit Default Swaps (CDS). A prestations d'assurances égales, la baisse des rendements du capital pèse sur les marges bénéficiaires, ce qui accroît la pression financière dans le secteur des assurances. Figure 7: CDS des groupes d'assurances 04.2009 03.2009 02.2009 01.2009 12.2008 Swiss Life 11.2008 10.2008 09.2008 08.2008 07.2008 Zurich FS 06.2008 05.2008 04.2008 03.2008 02.2008 1200 1100 1000 900 800 700 600 500 400 300 200 100 0 01.2008 Points de base Basispunkte Swiss Re Source: Bloomberg De plus, le ralentissement conjoncturel a eu d'importantes répercussions sur les assureurs, car les volumes des biens d'investissement et des actifs assurables ont baissé. Les entreprises qui proposent des assurances-crédit ont dû faire face à un risque de défaillance élevé. Enfin, la persistance des taux faibles représente une gageure pour les assureurs-vie, car ils doivent continuer à remplir leurs obligations contractuelles en termes de rendement. 21 Place financière suisse: situation et perspectives 3.2.4. Conséquences pour les caisses de pension La chute mondiale des cours des actions touche d'autres entreprises et institutions fortement exposées aux marchés financiers. Les placements des institutions de prévoyance, en particulier dans les 2e et 3e piliers, sont particulièrement concernés. Les institutions de prévoyance du 2e pilier doivent présenter leur situation financière et d'éventuelles mesures correctrices selon les prescriptions en vigueur de l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS). Une enquête préliminaire de l'OFAS a révélé qu'à fin mars 2009, près de 43 % des caisses de pensions avaient un taux de couverture d'au moins 100 % (aucun découvert). Dans 39 % des cas, le taux de couverture estimé se situait entre 90 % et 100 %, tandis qu'à peine 18 % des caisses de pensions comptaient un taux de couverture inférieur à 90 %. En général, la loi fédérale du 25 juin 1982 sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP) 15 prévoit un délai de 5 à 7 ans pour la mise en œuvre de mesures correctrices. Les caisses de pensions sont donc tenues d'agir pour remédier aux effets de la crise financière. Dans le cas des caisses de pensions, il convient de tenir compte du fait que le taux de conversion dépend des rendements escomptés du capital. Si ceux-ci sont plus faibles, le taux de conversion doit baisser pour assurer l'équilibre financier des caisses et éviter des transferts financiers entre les actifs et les retraités. 3.3. Mesures déjà prises par l'Etat pour renforcer le système financier suisse 3.3.1. Train de mesures en faveur de l'UBS Parmi les banques suisses, l'UBS est celle qui a le plus souffert de la crise financière, principalement en raison de son engagement élevé dans des titres adossés au marché hypothécaire américain. Depuis le début de la crise, en été 2007 (période entre le troisième trimestre 2007 et le premier trimestre 2009 inclus), les révisions à la baisse des valeurs et les pertes sur crédit 16 de l'UBS se montent à 63,5 milliards de francs au total. En 2008, la banque a dû lever 34,6 milliards de francs en fonds propres supplémentaires. La perte de capital social par la banque en l'espace de 18 mois a atteint une ampleur qui aurait été difficilement imaginable avant la crise. Grâce notamment à sa bonne capitalisation au début des turbulences, l'UBS a su mener à bien deux augmentations de capital auprès d'investisseurs privés, alors qu'elle a accusé des pertes importantes pendant plus de douze mois. Suite à la faillite de la banque d'investissement américaine Lehman Brothers en septembre 2008 et en raison de la méfiance qui en a résulté à l'égard du système bancaire, l'UBS n'est pas parvenue à trouver à la mi-octobre 2008 un investisseur privé prêt à assumer les risques d'une transaction similaire à des conditions raisonnables. Elle s'est donc adressée à la Confédération et la BNS, afin de rétablir une capitalisation suffisante. Compte tenu de l'importance systémique de l'UBS, le Conseil fédéral, la BNS et l'ancienne CFB ont présenté le 15 octobre 2008 un train de mesures destiné à stabiliser le système 15 RS 831.40 Les résultats négatifs du groupe présentés par la banque sont notamment plus faibles, car en plus des produits ordinaires, ils sont mis en parallèle avec des produits comptables générés partiellement par la situation de perte. Il convient de citer à cet égard les bénéfices comptables résultant de l'aggravation de la propre solvabilité de la banque, la création d'impôts différés actifs (deferred tax assets) ou la réduction des créances présentées par les investisseurs pour les emprunts à conversion obligatoire. 16 22 Place financière suisse: situation et perspectives financier suisse et à renforcer durablement la confiance à l'égard du marché financier. Comme on ne pouvait exclure qu'une détérioration persistante des marchés entraîne pour l'UBS une aggravation de la crise de confiance, il a notamment été décidé de recapitaliser la banque et d'alléger son bilan. Il s'agit là de deux mesures coordonnées: • Premièrement, des actifs illiquides d'UBS SA ont été transférés pour un montant de 39 milliards de dollars américains (la limite était de 60 milliards maximum) à une société à but spécial nouvellement créée par la BNS; • deuxièmement, la Confédération a souscrit un emprunt à conversion obligatoire à hauteur de 6 milliards de francs afin de renforcer la base de fonds propres de l'UBS, ce qui a permis à cette dernière – entre autres – de doter la société à but spécial du capital propre requis sans réduire sa propre base de capital. En août 2009, la Confédération s'est entièrement désengagée de l'emprunt à conversion obligatoire en obtenant un produit net de quelque 1,2 milliard de francs. La vente s'est faite dans le cadre d'un placement secondaire à des investisseurs institutionnels suisses et étrangers. Ces mesures visent, d'une part, à soutenir un établissement d'importance systémique et, d'autre part, à rétablir la confiance dans cette banque en renforçant sa base de fonds propres et en allégeant son bilan. Ce faisant, elles contribuent à stabiliser l'ensemble du système financier. Le paquet de mesures comporte certes des risques financiers pour la BNS, la Confédération et les cantons, mais les risques pour l'économie seraient bien plus élevés si aucune mesure n'était prise. Le procédé choisi se justifie donc. La nouvelle direction de la banque, élue lors de l'assemblée générale d'avril 2009, a dû prendre des mesures radicales pour diminuer les coûts et éviter des pertes supplémentaires. Les effectifs ont notamment été réduits pour répondre à la baisse de l'activité commerciale. Fin juin 2009, l'UBS a une nouvelle fois obtenu des fonds propres sur le marché financier (3,8 milliards de dollars américains). 3.3.2. Mesures visant à renforcer la protection des déposants En plus du train de mesures mentionné au ch. 3.3.1, le Conseil fédéral a, dans son message du 5 novembre 2008, proposé au Parlement plusieurs modifications de la loi sur les banques 17 pour renforcer la protection des déposants. Celles-ci ont été reprises par le Parlement et sont entrées en vigueur le 20 décembre 2008 par l'intermédiaire d'une loi déclarée urgente valable jusqu'à fin 2010 18 . La première mesure concerne le relèvement à 100 000 francs des dépôts protégés. Ce montant est pour l'instant supérieur à la limite minimale en vigueur dans l'Union européenne (UE). Deuxièmement, les banques sont tenues de disposer en permanence de créances couvertes en Suisse ou d'autres actifs situés en Suisse, en fonction des dépôts privilégiés 19 de leurs clients. Troisièmement, il est désormais possible d'obtenir un remboursement immédiat plus généreux des dépôts garantis 20 à partir des actifs liquides disponibles d'une banque en difficulté. Quatrièmement, la limite supérieure du système, c'est-à-dire le montant maximal versé au titre du système de protection des déposants en cas d'utilisation, a été relevée de 4 à 6 milliards de 17 FF 2008 7951 RO 2009 55 19 Les dépôts privilégiés sont attribués à la deuxième classe en cas de faillite; ils sont ainsi toujours honorés avant toutes les autres créances et dettes de la banque, sur la base des actifs disponibles dans la masse en faillite. 20 Dépôts garantis: dépôts privilégiés dont le remboursement immédiat est garanti par le système de protection des déposants. 18 23 Place financière suisse: situation et perspectives francs. Enfin, conformément à un postulat maintes fois énoncé, les avoirs des fondations de prévoyance du 2e pilier et du pilier 3a sont soumis au privilège en cas de faillite à concurrence de 100 000 francs, en plus et indépendamment des autres dépôts. 3.3.3. Autres mesures - La réforme en cours du droit de la société anonyme prévoit des adaptations pour les systèmes de rémunération. De plus, la FINMA publiera à l'automne 2009 des standards minimums pour l'ensemble du secteur financier. L'UBS a également été contrainte de revoir ses systèmes d'indemnisation pour les membres de son conseil d'administration et pour sa direction et de les soumettre à la FINMA. Elle a satisfait à ces obligations en introduisant un nouveau système de rémunération et en obtenant l'approbation de la FINMA pour les éléments variables du salaire portant sur l'exercice 2008. - En 2008, la FINMA a édicté des exigences plus strictes en matière de fonds propres pour les deux grandes banques. Le niveau de fonds propres requis sera relevé progressivement jusqu'en 2013. Des fonds propres plus importants renforcent la capacité de résistance du système financier et protègent contre des pertes pouvant mettre un établissement en péril, car ils agissent comme un coussin de sécurité qui absorbe les chocs. - La BNS a adopté différentes mesures de politique monétaire afin d'assurer un approvisionnement suffisant du secteur financier en liquidités. - Enfin, le Conseil fédéral a indiqué qu'il était disposé, en cas de besoin, à garantir sur le marché des capitaux de nouveaux engagements à moyen terme des banques suisses. Des mesures supplémentaires, notamment en matière de réglementation et de surveillance des marchés financiers, sont à l'étude. Elles sont détaillées au ch. 4.2. 24 Place financière suisse: situation et perspectives 4. Nouvelles conditions-cadres 4.1. Evolution des structures financières internationales Le présent chapitre présente brièvement les projets de réforme existant au niveau mondial. Plusieurs initiatives internationales visent à redéfinir le cadre réglementaire afin de corriger les erreurs du passé et de prévenir les futures crises autant que faire se peut. 4.1.1. Modifications dans les instances financières internationales La crise financière a démontré qu'une collaboration internationale est importante afin de mettre en place une réglementation efficace. En plus d'une collaboration pratique des autorités de surveillance au niveau technique, le Forum de stabilité financière notamment (FSF, désormais Conseil de stabilité financière, FSB) a élaboré les principes d'une coopération transfrontalière pour la gestion des crises. La réforme repose sur les 67 recommandations formulées en avril 2008 par le groupe de travail du FSF et sur celles de différents organes de régulation, tels que le Comité de Bâle, l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) et l'Association internationale des contrôleurs d'assurance (AICA). Ces principes donnent un aperçu de l'approche retenue pour développer la collaboration dans les questions réglementaires fondamentales. Ils s'articulent autour d'un échange complet d'informations entre les autorités de surveillance, selon des critères définis au préalable. L'élaboration de stratégies communes en vue d'une gestion transfrontalière des crises est également envisagée afin d'améliorer la coordination des autorités de surveillance en périodes de crise. La crise financière a redonné de l'importance au G20 en tant qu'instance internationale. Créé à la fin des années 1990 après la crise asiatique, c'est un forum de concertation entre les ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales des principaux pays industrialisés et émergents. En raison de l'aggravation et de la propagation de la crise financière dans le monde, le G20 a pour la première fois réuni les chefs d'Etat et de gouvernement en novembre 2008. On ignore toutefois dans quelle mesure il pourra jouer un rôle politique majeur à long terme. Les travaux mis en œuvre par le G20 se basent, pour l'essentiel, sur ceux d'autres organisations chargées des activités correspondantes (notamment le Fonds monétaire international [FMI] et le FSF ou FSB). Les instances définissant les standards, telles que le Comité de Bâle ou le FSB, ont été étendues 21 . Ainsi, tous les pays du G20 sont également membres du FSB, contrairement au FSF. En plus du président, les organes de direction comprennent un nouveau comité de pilotage (Steering Committee), l'assemblée plénière du FSB et un secrétariat doté de davantage de personnel, basé à la Banque des règlements internationaux (BRI). La Suisse a adhéré au FSF en 2007. Grâce au développement du FSB, elle dispose désormais d'un second siège et fait partie du Steering Committee. D'une manière générale, l'adhésion de la Suisse au FSB relève de la compétence du DFF. Le président de la direction générale de la BNS et le directeur de l'Administration fédérale des finances (AFF) représentent la Suisse au sein du FSB. La mise en place du FSB souligne encore plus l'importance d'une collaboration clairement définie avec le FMI, qui joue un rôle central dans la prévention et la résolution des crises financières et économiques. On estime actuellement que celui-ci sortira très renforcé de cette crise financière, qui a mis en évidence le soutien essentiel que le FMI peut apporter à ses pays 21 Sont désormais membres du Comité de Bâle le Brésil, la Chine, l'Inde, la Russie, la Corée du Sud, le Mexique et l'Australie. 25 Place financière suisse: situation et perspectives membres. Aussi a-t-il été décidé d'accroître au moins provisoirement les fonds mis à la disposition du FMI pour garantir son rôle en la matière. A plus long terme, la facilité de réassurance auprès des Etats membres (nouveaux accords d'emprunt du FMI) sera nettement consolidée, ce qui permettra de surmonter des crises exceptionnelles comme la crise actuelle sans trop puiser dans les capacités financières ordinaires du FMI et, partant, sans devoir assister celui-ci. Le FMI pourrait également asseoir son statut d'institution garantissant la stabilité du système financier et monétaire international. 4.1.2. Réformes portant sur la surveillance et la réglementation des marchés financiers au niveau international D'une manière générale, les pays s'efforcent d'améliorer la qualité et l'efficacité de la surveillance prudentielle et de la législation sur le plan tant international que national. A cet égard, il convient de s'assurer que les autorités de surveillance peuvent assumer leurs fonctions en étant le moins possible soumises aux pressions des politiques et des établissements surveillés. Plusieurs institutions publiques et privées ont publié des rapports analysant les causes de la crise et proposant des réformes correspondantes. Au niveau de l'UE, les réflexions reposent sur le rapport De Larosière, qui suggère des modifications de la législation européenne. En GrandeBretagne, la «Turner Review» a jeté les bases de la nouvelle politique de réglementation et de surveillance de la Financial Services Authority (FSA). Le Group of Thirty, le Counterparty Risk Management Policy Group (CRMPG III), l'Institut de la finance internationale (Institute of International Finance) et les cercles académiques ont également apporté une contribution importante (par ex. le «Geneva Report» du Centre International d'Etudes Monétaires et Bancaires). En dépit de priorités différentes et de quelques divergences techniques, ces initiatives ont proposé plusieurs pistes de réflexion pour les développements futurs. Compte tenu des liens étroits existants entre les marchés financiers, la collaboration et l'échange d'informations entre les autorités, les organes de surveillance et les banques centrales doivent être renforcés à l'avenir. A cet égard, il convient d'étudier aux niveaux national et international comment les enseignements issus d'une analyse approfondie des risques pourront conduire à une réduction des risques excessifs et comment la surveillance pourra être étendue à des domaines jusqu'ici non réglementés. Des discussions correspondantes sont actuellement menées, notamment en ce qui concerne les agences de notation. Les fonds en instruments du marché monétaire qui proposent des opérations similaires à celles des banques pourraient être soumis à la surveillance prudentielle et bénéficier d'un accès aux facilités des banques centrales. Les risques systémiques d'autres institutions (par ex. les hedge fonds et les sociétés de private equity) pourraient également être recensés de manière adéquate par une autorité de surveillance nationale. L'application de Bâle II reste une priorité importante, comme en atteste l'exigence relative au renforcement de la base de fonds propres des banques, qui vise à réduire le poids des éléments procycliques dans le calcul de ces fonds. De plus, au regard des nouveaux enseignements acquis, il convient d'adapter la qualité et l'efficacité de la gestion des liquidités des établissements financiers. Les efforts en la matière devront, là aussi, porter davantage sur l'ensemble du système financier, car la crise actuelle a clairement mis en évidence des faiblesses dans le marché interbancaire et dans celui des prêts pour les banques. Les structures de compensation et la gestion des risques des établissements surveillés doivent elles aussi être remaniées afin notamment de prévenir la reprise de risques excessifs et de tenir compte des intérêts à long terme des actionnaires. 26 Place financière suisse: situation et perspectives Sur le plan international, l'adaptation des dispositions régissant la présentation des comptes est également à l'étude. Une obligation plus vaste de présentation des comptes et une amélioration des règles de consolidation pour les véhicules hors bilan devraient accroître la transparence. Il faut élaborer des directives plus réalistes sur le traitement des instruments peu liquides et s'efforcer de constituer des provisions adéquates pour les défaillances de crédit attendues. Conséquences directes des expériences faites ces deux dernières années: les standards des agences de notation devraient être révisés et le développement des CDS cotés en bourse et des plates-formes électroniques pour les contrats sur CDS sera encouragé. Les principales initiatives réglementaires pertinentes pour le secteur financier helvétique sont présentées ci-après: • Renforcement de la base de capital: le Comité de Bâle examine actuellement une modification des exigences de fonds propres afin de créer des coussins de sécurité. Un ratio d'endettement, c'est-à-dire un indicateur non basé sur le risque pour les fonds propres, devrait être introduit en complément – et non en remplacement – de ces exigences pondérées en fonction des risques. Il est déjà en vigueur aux Etats-Unis et au Canada et concernera désormais également les grandes banques suisses. Le groupe de travail compétent propose une définition relativement étroite des fonds propres. En revanche, la somme du bilan, qui se base sur les chiffres figurant dans la présentation des comptes, devrait être mesurée en tenant compte des opérations hors bilan et des titrisations, le but étant de fixer un cadre réglementaire plus strict que celui qui s'applique actuellement aux grandes banques suisses. Le calibrage du ratio proprement dit sera toutefois déterminant. Dans le domaine des assurances, les travaux de l'AICA sur la garantie de la solvabilité porteront davantage à l'avenir sur les défis découlant des structures de groupe. • Meilleure gestion des liquidités: l'évaluation erronée des risques de liquidités est l'un des principaux défauts mis en évidence par la crise dans la gestion des risques des banques. Le Comité de Bâle travaille notamment à l'élaboration de directives sur la gestion des liquidités. Plusieurs instances nationales préparent des mesures basées notamment sur des tests de résistance rigoureux, l'objectif étant que les entités disposent localement, à court terme, de liquidités suffisantes lorsque la maison-mère étrangère, par exemple, rencontre des difficultés. • Systèmes de rémunération axés sur les objectifs à long terme de l'entreprise: plusieurs recommandations internationales (G20, FSF, UE, OCDE) visent à réformer les systèmes de rémunération existants, qui ont contribué partiellement à la crise. Un groupe de travail du FSF a élaboré des principes en la matière. • Renforcement de la protection des déposants: différents cas, dont ceux de Kaupthing Bank en Islande et de Northern Rock en Grande-Bretagne, ont montré l'importance d'un système de protection des déposants efficace et crédible tant pour protéger les petits épargnants que pour préserver la confiance dans le système financier. Plusieurs pays, dont la Suisse, ont alors décidé d'augmenter la somme assurée par déposant et la capacité globale du système. Sur le plan international, une commission rattachée au groupe de travail du Comité de Bâle dirigé conjointement par la FINMA et la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) américaine a élaboré les principes fondamentaux d'un système efficace de protection des déposants (Core Principles for Effective Deposit Insurance Systems). 22 • Echange transfrontalier d'informations entre les autorités de surveillance: les initiatives visant à améliorer l'échange d'informations, qui avaient été lancées avant la crise, bénéficient désormais d'une priorité accrue. On citera notamment les Multilateral 22 Ces principes ont été publiés en mars 2009 en vue d'une consultation. 27 Place financière suisse: situation et perspectives Memoranda of Understanding de l'OICV et de l'AICA. Les pays qui ne respectent pas les principes internationaux relatifs à l'échange d'informations entre autorités font face à une pression croissante. • Intensification de la coopération internationale entre les autorités de surveillance: les activités internationales des établissements financiers nécessitent une collaboration étroite des autorités de surveillance. C'est pourquoi le FSF avait demandé, pour les plus grands établissements financiers internationaux, la création d'instances de contrôle, composées de représentants des principales autorités de surveillance des pays d'origine et d'accueil. La coordination et l'échange d'informations doivent être intensifiés au sein de ces instances en vue d'une surveillance constante. Celles-ci avaient déjà été créées par le prédécesseur de la FINMA pour les établissements internationaux domiciliés en Suisse (UBS, CS, Swiss Re, ZFS). Elles ont fait leurs preuves et ont été reconduites par la FINMA. L'AICA examine elle aussi activement cette thématique. • Gestion internationale des crises: suite à la crise, les banques centrales, les autorités de surveillance et les gouvernements ont dû prendre rapidement des mesures de sauvetage pour prévenir une aggravation de la situation. Ces mesures, décidées au niveau national, étaient peu coordonnées entre elles et se sont révélées insuffisantes pour combattre la crise. Un groupe de travail du comité de Bâle, qui est dirigé conjointement par la FINMA et la FDIC, a émis des recommandations pour améliorer ces mesures sur le plan national ainsi que leur coordination au niveau international. Au sein de l'AICA, l'Executive Committee et la Financial Stability Task Force, notamment, se sont penchés sur des sujets similaires. • Renforcement de la surveillance macroprudentielle: la crise a montré que la surveillance microprudentielle de certains établissements devait être complétée par une surveillance macroprudentielle de la stabilité du système. Au niveau mondial, ce rôle devrait être assumé par le FMI, en collaboration avec le FSB. • Extension de la réglementation: partout dans le monde, des initiatives voient le jour afin d'étendre la réglementation à des acteurs du marché qui n'y étaient pas encore soumis. Elles portent notamment sur l'introduction d'un système de surveillance des agences de notation (UE) ainsi que sur l'extension des dispositions aux participants du «secteur bancaire parallèle», tels que les hedge fonds, les sociétés de private equity, les fonds multicédants, etc. (OICV, UE, Etats-Unis). • Réduction des effets procycliques de la réglementation 23 : le Comité de Bâle et les autorités de surveillance nationales sont en train d'adapter l'accord de Bâle II afin d'atténuer les tendances procycliques de la réglementation. Des exigences de fonds propres plus élevées devraient s'appliquer en particulier aux positions du portefeuille de négoce des banques. • Consolidation des infrastructures du marché: plusieurs initiatives (G20, FSF, CRMPG III) préconisent également la création de contreparties centrales (Central Counterparty, CCP) pour les dérivés de crédit. Aux Etats-Unis, une plate-forme correspondante se charge déjà du clearing des contrats sur CDS. En Europe, Eurex souhaite proposer des services de clearing sur CDS à partir du deuxième trimestre. • Présentation des comptes: l'objectif est d'améliorer la présentation des comptes basée sur la juste valeur et d'arriver, à moyen terme, à une harmonisation des standards en la matière. 23 La réglementation en vigueur conduit, en cas de conditions favorables sur les marchés, à une augmentation de positions générant par la suite des amortissements lorsque les conditions des marchés se détérioraient. Ces amortissement peuvent requérir un renforcement de la capitalisation, aggravant davantage les difficultés du secteur financier. 28 Place financière suisse: situation et perspectives • Meilleure intégrité du marché: l'OICV élabore, entre autres, des principes uniformisant les obligations de contrôle et d'information relatives aux ventes à découvert. Les autorités nationales ont mis en place différentes réglementations – dans la mesure où celles-ci n'existaient pas encore 24 – pour contrecarrer les effets déstabilisateurs de ces ventes. • Transparence accrue: les incertitudes quant à l'ampleur et à la répartition des risques au sein du système ont accentué la crise. C'est pourquoi des instances internationales (Comité de Bâle, OICV) planchent sur une extension des obligations d'information. • Coordination des stratégies de désengagement: (cf. ch. 4.3.6.). 4.2. Perspectives en matière de réglementation et de surveillance en Suisse Les multiples initiatives lancées au niveau international susciteront également un durcissement des réglementations nationales. Ceci est d’autant plus vrai que de nombreux Etats se sont engagés dans des intermédiaires financiers pour soutenir les marchés. Sur les plans national et international, la crise constitue l’occasion de promouvoir des projets existants ou de lancer de nouvelles initiatives en matière de réglementation. Il en va ainsi des objectifs de réglementation antérieurs à la crise qui n’entretiennent pas nécessairement de rapport direct avec elle. D’aucuns demandent par exemple la régulation des hedge funds et des capitaux investissement, deux domaines qui ne sont pourtant pas considérés comme ayant directement provoqué la crise. Par ailleurs, des initiatives ont été lancées pour renforcer la collaboration en matière fiscale. A cet égard, il s’agit d’étayer solidement les projets proposés, tout en veillant à ne pas affecter inutilement la compétitivité ni la capacité d’innovation de la place financière au moment de la mise en œuvre. Les expériences acquises avec la crise mettent clairement en lumière les limites de la coopération internationale et de la convergence des réglementations: tandis que les groupes financiers internationaux sont dirigés au niveau mondial, les autorités nationales tendent à prendre des mesures à portée domestique, voire protectionniste, en temps de crise afin de préserver les intérêts nationaux. Pour y faire face, les institutions de surveillance pourraient étendre leur collaboration sur un plan international. Ceci ne doit toutefois pas empêcher l'élaboration de mesures nationales, afin d'augmenter la résistance du système financier (par ex. grâce à l’introduction d’un ratio d’endettement). En avril 2008, le FSF, auprès duquel la Suisse était représentée par la Banque nationale, a publié un rapport sur le renforcement de la capacité de résistance des marchés et des institutions. Ce document préconisait une prise en compte des enseignements de la crise des subprimes. Il proposait un catalogue de 67 recommandations à l’attention des autorités nationales compétentes et des autres protagonistes. L’ancienne CFB a examiné ces recommandations. Cinq axes principaux de mesures s’en dégagent, qui devront être mis en œuvre sans délai: augmentation des fonds propres des grandes banques, surveillance des liquidités au sein de celles-ci, systèmes de rémunération en fonction du risque, et coopération et gestion internationales des crises. Remplaçant la CFB, la FINMA est en train d’analyser en profondeur lesdites recommandations ou a déjà engagé des mesures en relation avec les points précités. Des réflexions sont en cours à divers niveaux, mais n’ont encore abouti à aucune proposition concrète. Dans la perspective des évolutions internationales, il est étudié en particulier la possibilité de soumettre les acteurs non réglementés du marché à une surveillance efficace orientée sur les risques. A cet égard, il s’agit de déterminer le degré de convergence nécessaire 24 Cf. communiqué de la CFB de septembre 2008 29 Place financière suisse: situation et perspectives entre la réglementation nationale et les initiatives internationales afin de satisfaire aux critères internationaux – pour autant que cela soit jugé opportun. De plus, il convient de tenir compte des effets de la forme de surveillance choisie sur la concurrence. Il pourrait s'agir par ex. d'une surveillance étatique, ou d’autres formes de surveillance, telles qu’une procédure d’enregistrement couplée à des prescriptions sur la transparence. Dans les domaines cités ci-après, les travaux sont déjà bien avancés dans notre pays. 4.2.1. Exigences en matière de fonds propres et gestion des liquidités En 2008 déjà, une collaboration étroite entre la CFB et la BNS permettait d’aboutir à un projet de durcissement des prescriptions en matière de fonds propres. Suite à cette collaboration, la CFB adoptait, le 20 novembre 2008, des décisions touchant les deux grandes banques, et qui visaient à introduire un ratio d'endettement tout en augmentant le niveau d’exigences en matière de fonds propres en fonction des risques. Au travers des exigences en matière de fonds propres, on cherche également à atténuer la procyclicité du régime de Bâle II. En période de croissance, un coussin de liquidités doit être constitué, pour être utilisé en période de crise. Par ailleurs, la crise a mis en lumière que la réglementation de la gestion des liquidités était tout aussi importante que celle des fonds propres. Un groupe de travail commun à la BNS et à la FINMA travaille actuellement à la définition de nouvelles prescriptions en matière de liquidité pour les grandes banques. Selon le nouveau régime, dont l’introduction est prévue pour 2010, les banques devront prouver, au moyen de scénarios de résistance, que leur structure commerciale leur permet de résister à une profonde crise des liquidités. D’une part, des actifs suffisamment liquides devront permettre de compenser à court terme les éventuelles sorties de fonds; d’autre part, les ventes et mises en gage d’actifs requises ne devront pas nuire à la solvabilité de la banque. Les hypothèses et modèles sous-jacents utilisés par les établissements seront soumis à l’approbation de la FINMA. 4.2.2. Systèmes de rémunération Les autorités de surveillance, ainsi que l’opinion publique ont rapidement évoqué toutes sortes de mesures en vue de systèmes de rémunération tenant compte des risques. La FINMA prévoit de publier une circulaire à ce sujet à l’automne 2009. Cette circulaire ne se limitera pas aux banques, mais s’appliquera également aux entreprises d’assurance, aux directions de fonds et aux négociants en valeurs mobilières. Le projet de réglementation de la FINMA est coordonné au niveau international. Les futurs standards minimaux envisagés reposent sur les recommandations du FSF. Ils les préciseront, voire les dépasseront dans certains domaines. A l’avenir, la politique de rémunération ne devra offrir aucune incitation à une prise de risques inappropriés. L’excès de risque devra se répercuter sur la rémunération des collaborateurs concernés. Tous devront être encouragés à tenir systématiquement compte des risques induits par leur comportement. La FINMA exige que les systèmes de rémunération soient correctement appliqués dans tous les secteurs pertinents d’une entreprise. Pour ce faire, elle édictera des prescriptions en matière de bonne gouvernance et de procédures de contrôle, qui permettront une application intégrale et ciblée, dans toute l’organisation, des réglementations concernant les rémunérations. Dans le cadre du processus de réglementation, la FINMA a lancé une procédure d’audition publique en publiant le projet de circulaire assorti du rapport en juin 2009. La FINMA publiera la circulaire 30 Place financière suisse: situation et perspectives au deuxième semestre 2009, au terme de l’audition et de l’analyse des avis qui lui seront parvenus. 4.2.3. Dispositions régissant l’établissement des comptes Avec la crise des marchés financiers, les dispositions régissant l’établissement des comptes ont fait davantage parler d’elles. Les normes les plus évoquées à ce titre étaient les International Financial Reporting Standards (IFRS) et les US Generally Accepted Accounting Principles (US GAAP), deux ensembles de règles internationales également utilisables en Suisse pour la consolidation des comptes annuels. Les deux organes de régulation concernés, l’International Accounting Standards Board (IASB) pour les IFRS, et le Financial Accounting Standards Board (FASB) pour les US GAAP, ont été invités à réviser leurs normes et à promouvoir plus activement l’harmonisation de celles-ci. Dans un premier temps, il s'agit de traiter deux sujets devenus déterminants à cause de la crise: l’évaluation des instruments financiers à leur juste valeur, et la consolidation des sociétés à but spécial (special purpose entities, SPE). La FINMA suit l'évolution de ce dossier et veille à ce qu’il tienne compte des questions de surveillance. En raison de la disparité des objectifs poursuivis, il se peut en effet que la présentation des comptes n’évolue pas nécessairement dans le sens des besoins du droit de surveillance. Dès lors, il est essentiel d’élaborer des positions correspondantes au niveau du droit de surveillance, principalement par le biais d’une collaboration internationale. 4.2.4. Système global et établissements individuels La crise que nous traversons est le résultat d'un malheureux concours de facteurs macroéconomiques et de facteurs spécifiques aux marchés financiers. Dès lors, la FINMA accordera un poids plus important à l’analyse de ces interactions et étendra sa surveillance aux aspects systémiques dans leur ensemble. Elle ne se contentera donc pas de surveiller des établissements individuels, mais examinera des secteurs entiers quant à leur stabilité systémique. Elle élargira son approche des entreprises pour réaliser une surveillance dite «macroprudentielle» au niveau international. Ce faisant, elle comblera la lacune qui existe entre les évaluations macroéconomiques, entre autres celles de la BNS, et le profil de risque des différents établissements. La FINMA doit pour cela élargir ses compétences en matière d'analyse économique et approfondir sa collaboration en particulier avec la BNS, les organismes internationaux et les autorités de surveillance d'autres pays afin de déceler les risques suffisamment tôt. Dans la mesure où la base légale (LFINMA et loi sur la Banque nationale) ne change pas, la coopération actuelle entre la FINMA et la BNS (cf. chapitre 2.4) ne devrait pas connaître de modifications radicales. L’échange d’informations sur les risques systémiques n’en devra pas moins être intensifié. La concertation des constats respectifs, leur étude critique et l’apport de compléments devra garantir l’identification la plus rapide possible de tels risques à l’avenir. Les deux instances disposent chacune de leurs propres instruments destinés à pallier de manière appropriée les faiblesses du système global. Il s'agira de compléter le dispositif actuel de surveillance en développant la capacité à analyser les risques qui s'étendent au-delà des établissements individuels et en améliorant l’efficacité de la surveillance dans le cadre d’une approche basée sur les risques. Par ailleurs, il sera nécessaire d'intensifier l’interaction avec les établissements surveillés à tous les niveaux, d'effectuer des contrôles sur place et de tenir compte de données externes et des évolutions extraordinaires susceptibles d’affecter des modèles commerciaux pourtant performants en apparence. Enfin, 31 Place financière suisse: situation et perspectives dans le cadre de son activité de surveillance, la FINMA fera procéder à un nombre croissant de tests de résistance. 4.2.5. Protection des déposants Après l'entrée en vigueur le 20 décembre 2008 de la révision urgente de la législation qui est limitée au 31 décembre 2010 la discussion sur des mesures supplémentaires se poursuit. Pour l'instant, le financement de ce système intervient a posteriori, c’est-à-dire qu’il n’est fourni qu’en cas d’insolvabilité d’un établissement. Cette pratique, avantageuse au niveau des coûts, présente plusieurs inconvénients: les fonds ne sont pas immédiatement disponibles et l’obligation faites aux banques de verser leur contribution après coup exerce un effet procyclique. Le système n’est pas non plus en mesure garantir l’intégralité des dépôts ouverts auprès des grandes banques et ses limites ne sauraient être étendues à volonté, au risque de voir le sauvetage d’une banque en difficulté fragiliser les autres banques. Enfin, dans son aménagement actuel, le système ne tient pas compte des risques, ce qui crée de fausses incitations, en particulier en matière de prise de risque de la part des banques et des clients. Par ailleurs, il est important de ne pas entraver l'activité des banques par des obligations excessives. Une protection des déposants trop généreuse pourrait alors entraîner des désavantages envers des compétiteurs étrangers. Pour toutes ces raisons, un groupe de travail composé de représentants de l’AFF, de la FINMA et de la BNS a entrepris un réexamen fondamental de la protection des déposants et formulé des propositions d'élaboration, sur mandat du DFF. Il a également étudié quelles modifications urgentes de 2008 devaient intégrer le droit permanent. Les résultats du travail de ce groupe constitueront la base du projet qui devrait vraisemblablement être mis en consultation par le Conseil fédéral à l’automne 2009. Les propositions du groupe de travail visent à combler les lacunes du système actuel. Le nouveau concept se fonde sur le système existant afin de le remplacer à terme, de manière à éviter un choc financier insupportable. 4.3. Place financière et concurrence internationale 4.3.1. Atouts de la Suisse dans le contexte de la concurrence internationale L’environnement fiscal, réglementaire et économique général est un facteur-clé du secteur financier. L’Etat peut influencer cet environnement par le biais de la législation d’une part, et de sa politique à long terme en matière de marchés financiers d’autre part. La surveillance et la réglementation de ces derniers revêtent donc une importance majeure, au même titre que l’aménagement de la fiscalité. La crise financière et économique actuelle provoque des bouleversements dont l’impact sur la concurrence internationale demeure difficilement mesurable à l’heure actuelle. En août 2003, le DFF publiait des «Lignes directrices régissant la politique à l’égard de la place financière». Il y formulait pour la première fois une politique globale et active en faveur de la place financière suisse. Ce document visait à assurer la compétitivité internationale, de garantir le bon fonctionnement, l’efficacité, et la stabilité de la place financière suisse, ainsi que de préserver l’intégrité de celle-ci. Afin d’améliorer le plus possible l’efficacité de la réglementation des marchés financiers dans la perspective de la concurrence internationale, le DFF a publié, à l’automne 2005, des «Lignes directrices applicables à la réglementation des 32 Place financière suisse: situation et perspectives marchés financiers». Celles-ci servent encore de guide pour une conception optimale de la réglementation des marchés. 25 Les perturbations actuelles tendent à aviver la concurrence internationale entre centres financiers. La place financière Suisse fait face à de multiples évolutions politiques et réglementaires. La reprise des directives de l’OCDE relatives à l’assistance administrative et à l’entraide judiciaire en matière fiscale nécessite l'adaptation de modèles commerciaux actuels dans le domaine de la gestion de fortune. Le dialogue mené avec l’UE concernant l’imposition des sociétés holding, des sociétés mixtes et des sociétés d’administration 26 se poursuit. De plus, le processus de réglementation subit toujours plus l’influence des évolutions internationales, qui rétrécissent la marge de manœuvre nationale. En plus de redimensionner le secteur financier d’une manière généralisée au niveau mondial, la crise financière que nous traversons pourrait aussi fortement modifier la compétitivité des différents centres financiers. Ces mutations sont à double tranchant pour la Suisse en tant que place financière internationale, car elles sont porteuses non seulement de risques, mais aussi d’opportunités. La compétence et les liens internationaux de la place financière suisse, assortis d'un contexte réglementaire qui demeure favorable dans le domaine de la gestion de fortune, constituent des atouts par rapport aux autres places financières. Au vu de la tendance actuelle au durcissement des réglementations, de tels avantages peuvent avoir deux effets sur la Suisse. D’un côté, la pression exercée sur notre pays pour qu’il s’aligne sur les normes internationales pourrait s’alourdir, ce qui le pénaliserait par rapport aux places financières dont le gouvernement échapperait à cette pression. Il perdrait ainsi des avantages concurrentiels et verrait sa position dans la gestion de fortune remise en question. D’un autre côté, il pourrait se distinguer dans un environnement réglementaire remodelé. La Suisse poursuit en effet ses efforts de coopération avec les organismes internationaux et d’adoption d’une nouvelle réglementation. Elle entend de la sorte exploiter la marge de manœuvre restante et consolider ses avantages concurrentiels relatifs. Cet objectif suppose toutefois le renforcement préalable de la stabilité du système financier à long terme. La Suisse bénéficie d’un contexte général favorable. Le niveau de formation élevé et un capital humain intéressant y contribuent notamment. Cet état de fait s’explique, entre autres, par des hautes écoles axées sur la technique et l’économie qui encouragent l’innovation, mais aussi par la diversité linguistique. La place financière profite également de cette situation dans la mesure où elle dispose d’un vivier de talents bien formés. En outre, les accords de libre circulation des personnes conclus avec l'UE représentent un potentiel supplémentaire pour le recrutement de travailleurs qualifiés, ce qui représente un avantage général pour la place économique suisse. L’infrastructure suisse est globalement excellente, spécialement dans le domaine des transports. Sa grande accessibilité internationale contribue à sa forte compétitivité. La performance de son infrastructure de communication (réseaux de fibres optiques) s’avérera certainement déterminante ces prochaines années. L’intervention étatique sur les marchés financiers est restée relativement limitée à ce jour comparé avec d'autres Etats de l'OCDE. Une politique financière et budgétaire axée sur la durabilité, la stabilité de la monnaie et du contexte politique renforcent également la place financière suisse. Tous ces facteurs devraient permettre à notre pays de retrouver une position 25 26 Les deux publications sont disponibles à l'adresse: http://www.efd.admin.ch/dokumentation/grundlagenpapiere L’imposition différenciée des sociétés selon leur forme juridique est en principe du ressort des cantons. 33 Place financière suisse: situation et perspectives concurrentielle privilégiée au moment de la reprise conjoncturelle, à condition toutefois qu’il sache tirer les enseignements de la crise actuelle. 4.3.2. Accès aux marchés Les prestataires suisses de services financiers dépendent de l’ouverture des marchés étrangers. Les tendances protectionnistes, en particulier dans le secteur financier, pourraient favoriser la fermeture progressive de certains marchés aux intervenants étrangers. La crise financière a mis un frein aux flux transfrontaliers de capitaux. Non seulement les banques ont réduit leurs positions risquées dans des engagements étrangers, désireuses de liquider le risque de leur bilan, mais certains Etats cherchent aussi à durcir le régime applicable aux marchés financiers. Dans les faits, il faut entre autres s’attendre à une limitation des prestations internationales. Les efforts de réglementation servent non seulement à stabiliser le système financier, mais aussi parfois à retenir un maximum de substance fiscale à l’intérieur du pays. Parfois, des mesures sont prises pour entraver l’accès des établissements étrangers aux marchés domestiques. Enfin, les incertitudes quant au futur profil de la réglementation poussent à la hausse les coûts et les risques des transactions transfrontières. Avant la crise, les prestataires de services financiers étaient déjà confrontés à des obstacles quant à l'accessibilité de marchés étrangers. Ces obstacles semblent s'être accrus récemment ou menacent de l'être. Les libéralisations en cours dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ne garantissent pas un accès complet aux marchés de certains partenaires commerciaux importants, comme par exemple l'UE. Il n'existe pas d'accord entre la Suisse et l'UE qui permettrait une offre transfrontalière sans entrave de services financiers vers le marché intérieur, ou une liberté d'établissement allant au-delà de l'accord sur les assurances de l'année 1989. Dans des domaines non-harmonisés, les membres de l'UE sont en outre libres de dresser des obstacles envers des Etats tiers, comme la Suisse. Dans le passé la suisse était disposée à accepter un certain nombre d'obstacles à un accès aux marchés de l'UE afin de bénéficier d'une réglementation propre, favorisant la position concurrentielle du secteur financier. Compte tenu de l'élargissement réglementaire actuel et du danger d'un accroissement des obstacles envers l'accès aux marchés, cette question devrait à nouveau être évaluée dans le cadre des relations avec l'UE. Une diminution du trafic de capitaux entre les pays de l’OCDE et avec les marchés émergents saperait les efforts déployés jusqu’ici et mettrait à mal l'économie de tous les pays concernés, dont la Suisse. Avec son économie hautement dépendante des relations commerciales internationales, notre pays est fortement exposé aux dangers du protectionnisme. Pour les contrer, il s’efforce d’éliminer les obstacles spécifiques d’accès aux différents secteurs et aux différents partenaires commerciaux. Dans les organismes multilatéraux, la Suisse s’engage contre la discrimination des opérateurs étrangers. 4.3.3. Contexte fiscal Un environnement fiscal favorable aux entreprises constitue un gage essentiel de croissance et d’emploi. Une particularité du système financier helvétique est parfois considérée comme un inconvénient: le droit de timbre fédéral. L’imposition de chaque transaction financière peut entraver l'émission et le négoce de produits financiers. Or la stratégie d’une place financière doit tenir compte de l’aspect de la fiscalité et empêcher que les conditions offertes ne soient moins attrayantes que dans les pays concurrents. 34 Place financière suisse: situation et perspectives Dans l’optique d’une consolidation de la position de la Suisse au sein de la concurrence fiscale internationale, le Conseil fédéral a entamé un troisième volet dans la réforme de l’imposition des entreprises. Les travaux sont en cours et le projet correspondant devrait être mis en consultation à l’automne 2009. Les réformes fiscales engagées dans de nombreux autres pays risquent de faire perdre du terrain à la Suisse. Les analyses du groupe de travail qui soustendent l’orientation du troisième volet de réforme soulignent que la Suisse demeure compétitive au niveau de l’imposition des bénéfices des entreprises, même si certaines taxes, dont le droit d’émission, enrayent la croissance. Dès lors, le nouveau train de mesures devrait proposer, dans la loi sur l’harmonisation des impôts directs, la suppression du droit d’émission sur les fonds propres et les fonds de tiers, l’exonération de l’impôt anticipé et du droit de timbre sur les transactions internes aux groupes, ainsi que la suppression facultative de l’impôt cantonal sur le capital. Par ailleurs, les statuts fiscaux cantonaux devront être modifiés (sociétés mixtes, de holding et d’administration) de manière à traiter sur un pied d’égalité les bénéfices réalisés par les sociétés suisses et les sociétés étrangères. Ces mesures étaieront la position de la Suisse en tant que place fiscale et garantiront sa reconnaissance internationale. Avec l’adaptation prévue des statuts fiscaux, le Conseil fédéral répond également à certaines requêtes de l’UE, qui avait introduit ce thème dans le cadre de la controverse fiscale. 4.3.4. Assistance administrative et entraide judiciaire Lancés pour enrayer la crise par de nombreux pays, les programmes de sauvetage et de relance conjoncturelle alourdissent la dette de l’Etat déjà existante. Ceci suscite le désir politique de recourir à de nouvelles sources de financement et de combler les failles dans l’imposition des revenus de la fortune des ressortissants des différents pays concernés. Le rôle de la coopération fiscale internationale a ainsi gagné en importance. Le Conseil fédéral a décidé par conséquent de reprendre le standard relatif à l’assistance administrative en matière fiscale énoncé à l’art. 26 du Modèle de convention de l’OCDE, et de retirer la réserve qu’il avait formulée à l’encontre de cette disposition. La politique d’assistance administrative en matière fiscale décidée par le Conseil fédéral devra être mise en œuvre par le biais d’une révision des conventions de double imposition (CDI) en vigueur et de la conclusion de nouveaux accords. Engagé en avril 2009, ce processus devra être mené à bien rapidement 27 . Les négociations avec les différents Etats seront en principe menées dans l’ordre suivant: 1. membres de l’OCDE, 2. Etats avec lesquels des contreparties peuvent être négociées dans d’autres domaines de la convention déterminants pour l’économie suisse 28 , ou avec lesquels il existe de bonnes chances de conclure rapidement les négociations. Dans ce contexte, il convient de relever également la décision du Conseil fédéral de s’en tenir à l’accord bilatéral sur la fiscalité de l’épargne même après sa décision de reprendre le standard 27 Pour le Conseil fédéral, la future politique d’assistance administrative en matière fiscale doit respecter les critères suivants: − échange d’informations accordé uniquement sur demande (pas d’échange automatique); − assistance administrative limitée au cas par cas (pas de chasse systématique aux renseignements); − restriction aux impôts tombant sous le coup de la convention; − interdiction de la rétroactivité; − principe de subsidiarité et de réciprocité; − préservation des possibilités de recours des personnes concernées. 28 Des exigences spécifiques à chaque pays doivent compléter les différentes négociations sur les CDI. Il s’agit d’exploiter le potentiel d’amélioration auquel la Suisse n’avait pas accès jusqu’à présent à cause de l’assistance administrative restreinte qu’elle offrait. 35 Place financière suisse: situation et perspectives de l’OCDE. Car l’assistance administrative sur demande, telle que définie par le standard de l’OCDE, ne saurait remplacer la retenue d’impôt convenue dans le cadre de l’accord bilatéral. Selon les règles de l’OCDE, l’assistance administrative sur demande est en effet un instrument adéquat pour combattre la soustraction des revenus provenant d’une activité lucrative et des bénéfices réalisés par les entreprises. Par contre, la retenue d’impôt est une mesure plus efficace pour garantir l’imposition des revenus des capitaux et en particulier des intérêts (en cas de soustraction d’impôt, on parle ici de «deuxième infraction»). A fin 2008, la Suisse communiquait déjà à l’UE qu'elle était en principe prête à engager des discussions techniques en vue de modifier l’accord sur la fiscalité de l’épargne. Si la Suisse reste aujourd'hui ouverte à ces discussions, le fait qu'elle soit disposée à reprendre le standard de l'OCDE relatif à l’assistance administrative a créé une nouvelle situation, qui devra être prise en considération en cas de modification de l’accord. En revanche, pour le Conseil fédéral, l’échange automatique d’informations n’entre pas en ligne de compte. 4.3.5. Infrastructure des marchés financiers L’infrastructure des marchés financiers se compose essentiellement de plates-formes d’échange (bourses), lesquelles comprennent des mécanismes de décompte et de règlement, des systèmes centralisés de traitement des paiements (p. ex. Swift et SEPA 29 ), ainsi que des réseaux de données et de communication. En ce qui concerne ces derniers, Londres poursuit par exemple une stratégie ciblée. L’infrastructure des marchés financiers appartient majoritairement à des opérateurs privés. En tant que propriétaires de réseaux de données et propriétaires d’immeubles, les deux grandes banques assument donc un rôle de premier ordre. En Suisse, la structure du négoce et du traitement des ordres boursiers a été remaniée pour laisser la place à une organisation verticale. Début 2008, le SIX Group naissait de la fusion de SWX Group (Bourse), du SIS Group (prestations en matière de titres) et du Telekurs Group (information financière). L’entreprise d’infrastructure offre des services aux opérateurs nationaux et internationaux de la place financière suisse. Ses compétences embrassent aussi bien le négoce de titres, les prestations sur titres, les informations financières et le service des paiements. La société est détenue par quelque 160 actionnaires nationaux et étrangers qui recourent également à son infrastructure. Début 2008, le négoce de la plate-forme virt-x (pour les blue chips suisses) était également intégré à SWX Europe et ainsi rapatrié depuis Londres vers la Suisse. Un dialogue noué avec le SIX Group devra permettre de déterminer les défis à venir liés à l’infrastructure des marchés financiers, ainsi qu’aux actions à engager pour les maîtriser. Toute évolution de la réglementation desdits marchés est susceptible d’accentuer ou d’amoindrir le rôle de l’infrastructure. Par exemple, lorsque les critères de surveillance boursière diffèrent d’un Etat à l’autre, l'entreprise d'infrastructure joue un rôle plus important que lorsque les critères de surveillance sont harmonisés. 4.3.6. Distorsions de concurrence et stratégies de désengagement Les Etats ont pris différentes mesures de lutte contre la crise et sont intervenus dans le fonctionnement du marché. Des bilans bancaires ont été assainis grâce au transfert d’actifs 29 SEPA (Single Euro Payments Area): espace unique de paiement en euro qui devrait être achevé d’ici à 2010. Le SEPA est né d’une collaboration entre des banques et des associations de banques de toute l’Europe, y compris de la Suisse. Depuis le 28 janvier 2008, il est possible de réaliser des virements SEPA dans toute l’Europe de manière totalement automatique et standardisée, ce qui simplifie le virement électronique des paiements dans la zone euro. 36 Place financière suisse: situation et perspectives illiquides à des sociétés à but spécial. Certains Etats ont pris part aux fonds propres de banques en difficulté afin de consolider la base de capital de ces dernières. Des garanties étatiques pour des emprunts bancaires ou des crédits ont été octroyées à des entreprises d’autres secteurs. Après avoir épuisé l'arsenal d'instruments classiques, les banques centrales ont recouru à des mesures non conventionnelles, telles l’acquisition d’obligations de débiteurs privés, afin de fournir suffisamment de liquidités à l’économie et de réduire les primes de risque sur les emprunts à long terme. Toutes ces mesures étatiques faussent la concurrence à différents degrés, non seulement entre concurrents sur un plan national, mais aussi au niveau international. Premièrement, elles pénalisent les entreprises qui ne jouissent d’aucune garantie étatique, soit parce qu’elles ont leur siège à l’étranger, soit parce qu’elles n’ont sollicité aucune aide. Les emprunts des banques suisses notamment ne bénéficient d’aucune garantie à ce jour. Deuxièmement, l’intervention de l’Etat peut servir à poursuivre des objectifs politiques au travers de l’influence exercée sur la politique commerciale de l’entreprise concernée. Contrairement à une garantie d’Etat, un gouvernement pourrait entre autres exiger l’assouplissement des critères d’octroi de crédits aux entreprises du secteur de l'industrie. Le cas échéant, il y aurait un risque de voir les capitaux mal affectés, c’est-à-dire octroyés par exemple à des entreprises qui assurent certes un grand nombre d’emplois ou constituent un symbole national, mais dont les chances de survie sont maigres. L’octroi prudent des crédits fait toutefois partie intégrante d’une gestion responsable. Les garanties étatiques, et parfois les efforts visant à garder des liquidités, peuvent également biaiser l’évaluation des risques, notamment lorsqu’ils maintiennent artificiellement à un bas niveau le prix des crédits. Dans un tel cas, le prix de l’emprunt – l’intérêt – peut refléter le risque de l’Etat garant, et non celui de l'émetteur. L’intervention de l’Etat soulève pour finir la question de l'aléa moral: les garanties gouvernementales implicites sont susceptibles d’atténuer le sens des responsabilités auprès des entreprises concernées. Une fois que la crise aura été surmontée, se posera encore le problème du désengagement de l’Etat. Les stratégies en la matière dépendent du type d’intervention. Elles doivent être coordonnées au niveau international de façon à prévenir toute distorsion supplémentaire lors de leur mise en œuvre. Les banques centrales, elles, sont confrontées au défi de réduire au bon moment les importants volumes de liquidités injectés. Elles doivent en effet prévenir l’inflation en veillant à ne pas nuire à l’essor conjoncturel recherché. A cet égard, elles devront aussi tenir compte des répercussions possibles sur les taux de change. Même au niveau national, le retrait de l’Etat du secteur financier pose un problème de coordination dans la mesure où la fin unilatérale du soutien étatique risque de pénaliser les acteurs financiers du pays concerné. Partant, la Suisse a prié le FMI d’élaborer des stratégies pour un désengagement coordonné à moyen terme de l’Etat du secteur financier. La Confédération souhaitait pour sa part mettre un terme à sa participation dans l’UBS aussitôt que les circonstances le permettraient. En août 2009, la Confédération s'est entièrement désengagée de l'emprunt à conversion obligatoire 30 . En ce qui concerne l’engagement de la Banque nationale, le transfert des actifs illiquides de l’UBS au fonds de stabilité de la BNS est achevé. Il n’existe ainsi plus aucun engagement ou promesse d’engagement de la Banque nationale en faveur de l’UBS. Le fonds de stabilité doit être constitué sur une période maximale de douze ans, au moyen de paiements d’intérêts, d’amortissements et de ventes d’actifs. Cet horizon éloigné doit garantir une liquidation ordonnée des actifs afin de maximiser leur valeur et minimiser les effets secondaires sur les marchés financiers. 30 Cf. ch. 3.3.1. 37 Place financière suisse: situation et perspectives 5. Perspectives : chances et risques du secteur financier Les pages ci-après présentent les principaux défis et problèmes auxquels fait face le secteur financier. Elles esquissent les bases de l’amélioration des conditions-cadres et les critères pour l’élaboration d’une stratégie. La Confédération ne dispose ni de la compétence politique, ni des informations nécessaires sur l’offre et la demande des marchés pour pouvoir élaborer des prévisions détaillées sur la croissance des différents secteurs, et ce d’autant moins que l’évolution de la situation demeure particulièrement incertaine et permet uniquement d’émettre des conjectures. 5.1. Comparaison entre centres financiers internationaux La crise a déstabilisé l’ensemble des places financières mondiales. Les stratégies engagées avant la crise ont été révisées à la lumière des événements récents. L’évolution future dépendra des changements apportés à l’architecture financière mondiale, mais aussi de la situation initiale respective des différents centres financiers. Les points suivants décrivent brièvement les principales caractéristiques des principales places financières. 5.1.1. Généralités Les places financières se distinguent entre elles par l’origine de la création de valeur, à savoir l’étranger ou le pays lui-même. Les centres tels que Tokyo, Paris ou Francfort sont en premier lieu tournés vers leur marché national. New York est à la fois le centre financier d’un très grand marché intérieur, et la plaque-tournante d’activités internationales. Il en va de même de Londres, qui est particulièrement tourné vers l’international, tout en servant le marché britannique. Les places de Singapour ou Hong Kong réalisent la majeure partie de leurs affaires avec l’étranger, même si cette dernière en particulier assume également la fonction de centre financier pour le reste de la Chine. La Suisse se caractérise par une orientation internationale et par la prépondérance des certaines activités spécialisées, telles que la gestion de fortune privée, le négoce de matières premières, la domiciliation de véhicules financiers pour hedge funds (fonds de fonds) et la réassurance. En comparaison internationale, la place suisse se singularise également par une forte concentration du marché. Sur le terrain des activités internationales, le marché est en effet détenu majoritairement par les deux grandes banques. Les domaines dans lesquels la Suisse est active sont en perpétuelle mutation dans le contexte de la concurrence internationale. Ainsi, les marchés de l’or, des changes et des Eurobonds étaient autrefois fortement représentés en Suisse. A l’inverse, le négoce des matières premières et la domiciliation de fonds de fonds ont connu un essor considérable dans notre pays ces dernières années. La crise financière et économique actuelle malmène tous les centres financiers de la planète et engendre des incertitudes quant à l’évolution future. Londres et New York sont plus fortement frappés que les autres par la crise. En Asie et dans les centres orientés vers leur marché national, les conséquences consistent pour l’heure en une chute des marges et une pression sur les coûts. A ce jour, l’impact sur la gestion de fortune privée et le secteur de l’assurance est relativement limité. 5.1.2. New York New York représente de loin le plus grand marché financier du monde, en termes de capitalisation boursière, comme en termes de nombre et de diversité des titres cotés. Cette place tire en outre profit du statut de monnaie de réserve mondiale dont jouit le dollar américain. Si celui-ci devait davantage partager sa prééminence avec d’autres monnaies, la pression sur New 38 Place financière suisse: situation et perspectives York s’accentuerait. Cette place, et les Etats-Unis en général, constituent le principal pôle pour la réassurance. D’autres branches d’assurance y sont également bien représentées, à la faveur d’un grand marché national. La taille de New York en tant que centre financier lui offre sans aucun doute un avantage considérable. La quantité et la variété de main d’œuvre qualifiée permet des synergies et attire à son tour une nouvelle main d’œuvre. La diversité culturelle est aussi un atout non négligeable. Par ailleurs, New York est la seule grande place financière sur le continent américain et dans les fuseaux horaires correspondants. Une concentration locale qui lie de nombreux opérateurs au site géographique de New York. Comparé à la taille de l’économie, le secteur financier occupe une position moins importante qu’en Suisse notamment, ce qui rend les interventions étatiques plus supportables, mais risque aussi d’accentuer la problématique de l'aléa moral, parce que la probabilité d’interventions étatiques est plus élevée. Les engagements considérables consentis par l’Etat (Citibank, AIG, Bank of America) se heurtent à la question des stratégies de retrait viables. De nos jours, diverses institutions assurent la surveillance financière à New York (Réserve fédérale, FDIC, SEC, etc.). A cela s’ajoutent des législateurs actifs au niveau fédéral et à celui des Etats. Avant la crise, le rapport Bloomberg-Schumer avançait déjà des pistes de réflexion sur le renforcement des avantages concurrentiels. Il proposait entre autres une approche davantage basée sur les principes en relation avec la mise en œuvre de Sarbanes Oxley, de même que la reconnaissance des normes comptables IFRS. Depuis peu, des discussions sont menées concernant l’adoption par la Banque centrale (Fed) d’une surveillance macroprudentielle. Le secteur financier new yorkais accuse actuellement une chute notable du nombre d’emplois. D’un autre côté, des places de travail se créent au sein de nouvelles entreprises plus petites, ou d’entreprises étrangères souhaitant s’implanter à New York. 5.1.3. Londres La taille de Londres, avec la présence qui s’ensuit de capital humain qualifié, représente un avantage d’implantation majeur pour ce centre financier. La concurrence avec d’autres centres financiers amène à se demander comment se présenteront à l’avenir les parts de marché dans des domaines d’activité spécialisés, ceux notamment qui se caractérisent par une certaine mobilité. Une législation avantageuse rend également Londres très attrayante dans le domaine de la gestion de fortune privée. A l’heure actuelle, un nombre considérable d’emplois disparaissent à Londres dans le secteur financier. Comme à New York, il en résulte une disponibilité accrue de main-d’œuvre pour les plus petites entreprises plutôt actives sur des marchés de niche. A titre d’exemple, près de 20 % de la fortune des hedge funds est gérée à partir de Londres (le reste l’étant en majeure partie depuis New York), et Londres fait office de plaque tournante des capitaux d'investissement. La place financière réagit généralement aux nouveaux défis avec rapidité et flexibilité. Ainsi, le rapport Turner a pris les devants dans le domaine de la régulation, ce qui a permis d’ouvrir le débat sur les préoccupations de la place financière londonienne. Bien des propositions du rapport Turner prévoient une rupture d’avec le modèle antérieur de régulation basé sur des principes. Ce rapport demande par ex. un taux de capitalisation explicite et élevé, qui devraient notamment dépendre de la situation conjoncturelle, une réglementation des structures de compensation des collaborateurs ou une réglementation pour une liquidation ordonnée d’une banque en dépôt de bilan. De même, le rapport Wigley de 2008, présentant des propositions 39 Place financière suisse: situation et perspectives visant à renforcer l’attrait de la place londonienne, prévoit de renforcer la régulation, à côté de mesures visant à consolider durablement l’infrastructure des marchés financiers (p. ex. réseaux de données et de communication) ou à améliorer le régime d’imposition. Le rapport Turner a également éveillé des craintes quant aux prescriptions de capital minimum, susceptibles de valoir à Londres un handicap compétitif. 5.1.4. Autres centres financiers Parmi les autres centres financiers, Singapour en particulier – et dans une moindre mesure Hong Kong – présentent des similitudes avec la Suisse. Singapour s’est notamment fait une spécialité du financement d’exportations et de transactions commerciales. De même, la gestion de fortune transfrontière (offshore) s’y est développée par croissance naturelle, mais aussi à la faveur d’un contexte réglementaire propice. A l’heure actuelle, il ne semble toutefois pas y avoir de transferts de fonds massifs de Suisse en direction de Singapour. Par leur vocation internationale, Singapour et Hong Kong partagent les mêmes intérêts dans le cadre des efforts internationaux de réglementation. Singapour vise en outre à renforcer son importance de centre financier régional en Asie. D’où notamment les efforts déployés pour développer les activités de réassurance dans cette ville-Etat. Il se peut toutefois que sous l’effet d’initiatives globales sur le terrain de la réglementation, les activités transfrontalières ralentissent. De telles mesures cherchent par exemple à prévenir la fuite d’un substrat fiscal potentiel. Les centres financiers d’Europe continentale sont susceptibles quant à eux de profiter de l’importance accrue de l’euro en tant que réserve monétaire. L’évolution future dans les centres financiers internationaux revêt une importance particulière pour les perspectives de la place financière suisse. 5.2. Opportunités et risques pour la place financière suisse 5.2.1. Défis généraux Des mesures étatiques ambitieuses ont été mises en place dans le monde entier, afin de combattre les conséquences de la crise financière et économique actuelle. Or les mesures de politique monétaire visant à maintenir la liquidité des marchés financiers impliquent une extension considérable de la masse monétaire. Il faudra donc retirer les liquidités injectées dès que les conditions s’y prêteront, au risque de créer une inflation préjudiciable pour les biens de consommation ou les biens patrimoniaux. Les mesures de politique budgétaire adoptées à beaucoup d’endroits pour stabiliser la conjoncture impliquent un creusement – massif parfois – de l’endettement des collectivités publiques. Les économies nationales et les budgets étatiques en subiront durablement les conséquences, plus douloureuses encore si les taux d’intérêt devaient renchérir sur les marchés des capitaux. Dans le cas de la Suisse, il convient de mentionner la souscription par la Confédération d’un emprunt à conversion obligatoire de l’UBS visant à renforcer la base de fonds propres de cette grande banque, lié à un prêt de la BNS au fonds de stabilisation destiné à la reprise des actifs illiquides de l’UBS. A cela s’ajoutent les trois phases des mesures de stabilisation prises par la Confédération en faveur de la conjoncture, ainsi que plusieurs initiatives cantonales. Par ailleurs, des amortissements massifs sur les actifs du fonds de stabilisation ne manqueraient pas d’affecter la distribution des bénéfices de la BNS à la Confédération et aux cantons. Une telle situation restreindrait la marge de manœuvre budgétaire en Suisse, déjà mise à mal par la crise de l’économie réelle. En revanche, la politique budgétaire, y compris les trois phases des mesures de stabilisation, 40 Place financière suisse: situation et perspectives respecte les exigences du frein à l’endettement et n’a pas suscité jusqu’ici d’augmentation structurelle de l’endettement. Le cours déprimé des actions, la perte générale d’appétit pour le risque sur les marchés financiers ainsi que la présence accrue d’obligations d’Etat risquent de se répercuter sur les choix en matière de placements financiers. Les premiers concernés seraient les investisseurs institutionnels, telles les caisses de pensions ou les assurances, ainsi que les banques qui privilégient des placements sûrs pour leurs réserves de liquidités. Les investisseurs seraient ainsi toujours plus dépendants des perspectives sur les marchés des obligations. Or une diminution en termes réels des rendements enregistrés pourrait entrainer des conséquences directes sur les prestations de rentes que les institutions de prévoyance seraient à même de verser à l’avenir. Les tendances protectionnistes croissantes dans le négoce mondial des biens et services – ce constat vaut en particulier pour les services financiers – posent problème. L’expérience des années trente a montré qu’une politique de fermeture des marchés aurait un coût macroéconomique majeur en termes d’emploi et de croissance économique. Il est donc réjouissant que le G20 se soit clairement opposé à tout cloisonnement des marchés. D’autres défis en perspective proviennent de l’engagement étatique accru, en bien des endroits, dans le secteur financier. Cette prise d’influence des Etats faisait suite à un besoin aigu d’intervention politique afin d’éviter des conséquences graves. Or à long terme, cet engagement pourrait inciter les acteurs du secteur financier à considérer comme un fait acquis l’existence d’une garantie d’Etat. D’où le risque que les banques bénéficiant d’une telle garantie implicite ne soient incitées à prendre des risques excessifs. Cet élément est dûment pris en compte dans les efforts de réglementation actuels, ce qui souligne encore l’importance institutionnelle de ce défi croissant. L’engagement étatique pourrait en particulier amener des Etats à exercer, pour des motifs politiques, une influence sur l’activité des banques aidées. La fonction de transmission et d’allocation du secteur financier en pâtirait, par exemple si l’octroi des crédits cessait de reposer sur une stratégie d’affaires orientée à long terme. Comme toute crise, la situation actuelle ne comporte pas seulement des risques, mais également de nouvelles opportunités. La Suisse dispose de certains atouts en sa faveur dans la concurrence internationale. Ainsi, la vague actuelle de réglementation est susceptible d’aboutir, sur certaines places financières, à une surréglementation. En outre, comme déjà signalé, les mesures adoptées dans le monde entier pour soutenir la conjoncture et le système financier impliquent des coûts qui pourraient s’avérer très élevés dans des cas d’espèce. Les pressions liées à la conjoncture sur le marché suisse et le durcissement de la concurrence entre les places financières à vocation mondiale représentent certes autant d’entraves dans la plupart des secteurs d’activité. Néanmoins, une concrétisation équilibrée des efforts internationaux de réglementation ainsi qu’une politique budgétaire et monétaire durable dans le pays sont susceptibles d’avoir une influence bénéfique sur les conditions-cadres en Suisse – comparativement à d’autres places économiques. De façon générale, les activités réalisées à l’étranger avec les marchés émergents offrent également des perspectives de croissance durable. Au vu des flux de capitaux à l’échelle internationale, c’est particulièrement vrai dans le domaine de la gestion de fortune. Les petites entreprises spécialisées notamment dans la gestion de fortune ou dans le financement des jeunes entreprises devraient également bénéficier d’un potentiel de croissance, à condition de se doter de modèles d’affaires clairs et de miser sur la transparence. 41 Place financière suisse: situation et perspectives Des restructurations sont également en cours dans les assurances. A la différence du secteur bancaire, la branche offre encore, notamment aux grandes entreprises à forte capitalisation et disposant de liquidités suffisantes, des opportunités d’expansion dans de nouveaux champs d’activité, afin d’étoffer leur palette de produits ou de tirer parti de rendements d’échelle croissants. 5.2.2. Gestion de fortune Les autorités fiscales de divers pays ont récemment intensifié leurs pressions sur la gestion de fortune privée transfrontière, sous l’effet de la crise économique et financière. A cela s’ajoutent des tendances isolationnistes croissantes. Les adaptations effectuées dans le domaine de l'assistance administrative et de l'entraide judiciaire auront des conséquences pour la gestion de fortune privée en Suisse. Il faut se garder toutefois de surestimer l’impact négatif du changement de pratique que représentent les nouveaux accords de double imposition. Indépendamment de cet aspect, la Suisse possède des avantages bien réels dans le domaine de la gestion de fortune. Cela se voit clairement, par exemple, aux parts de marché élevées que détient la place financière suisse dans le domaine de la gestion institutionnelle. Indépendamment de la crise du crédit, l’UBS en particulier a dû répondre, dans le segment de la clientèle privée, de négligences aux Etats-Unis qui ont contribué aux fortes pressions subies par le secret bancaire suisse au cours des derniers mois. La réputation de cette banque et de la place financière en général a donc été ternie. A présent, la situation de la banque semble toutefois s’améliorer graduellement. Ce résultat est en partie dû à l’arrangement conclu entre la Suisse et les Etats-Unis en août 2009. Cet accord prévoit que les Etats-Unis renoncent à une requête d'exécution introduite dans le cadre d’une procédure civile, visant à obtenir l’identité de 52 000 titulaires de comptes auprès de l’UBS. En contrepartie, la Suisse s’engage à traiter dans un délai d'un an une demande d'assistance administrative, qui porte sur quelque 4450 comptes. Une modification de l’assistance administrative et de l'entraide judiciaire ne signifie pas la suppression du secret bancaire. Conformément au vœu de la population, une protection adéquate de la sphère privée demeure prioritaire. Le secret bancaire protège d’ailleurs la sphère privée, mais non les délits. La retenue dans l’utilisation des données des clients reste ainsi de mise. En outre, la volonté affichée de n’admettre ni effet rétroactif, ni échanges automatiques d’information, devrait avoir un effet positif sur la sécurité du droit. De façon générale, la gestion de fortune helvétique fait preuve, entre autres compétences, d’un réel sens de l’écoute des besoins du client. A cela s’ajoute le rôle des avantages généraux de la place suisse. A l’avenir, les prestataires dans le secteur de la gestion de fortune privée devront veiller à faire clairement ressortir les avantages qu’ils ont à offrir. L’évolution de la situation représente certes un défi pour la politique commerciale des banques concernées. Mais les perspectives de succès dans ce domaine sont réelles. La situation actuelle serait également propice pour souligner la mise en œuvre exemplaire des normes internationales dans le domaine du blanchiment d’argent ou de la criminalité financière, ainsi que pour renforcer l’image d’une place financière propre. De son côté, la Confédération pourra soutenir le secteur financier en continuant à améliorer, dans la mesure du possible, les conditions-cadres. Autre enjeu de taille, les réglementations à tendance protectionniste sont en hausse à l’échelle mondiale. Les institutions actives dans la gestion de fortune privée doivent donc s’attendre à subir des pertes, notamment celles ne possédant pas d’établissement dans les pays en question. Cette situation concerne avant tout les petites banques, les fonds de placement, les assurances et les gestionnaires de fortune privés actifs sur le marché européen. Depuis un certain temps déjà, les grandes banques ont systématiquement renforcé leur présence locale (onshore) dans les pays 42 Place financière suisse: situation et perspectives d’origine de leur clientèle. La mise au point de modèles d’affaires onshore réduit a priori la pertinence d’aspects strictement fiscaux au sein de la branche. 5.3. Importance des grandes entreprises pour l’économie nationale Le secteur financier est marqué par la forte concentration du marché entre les deux grandes banques. La présence de ces entreprises a des effets bénéfiques pour l’ensemble de l’économie. En effet, il en résulte des interactions fortes et le plus souvent positives entre la place financière et la place industrielle. Or l’importance systémique des grandes banques ou d’autres entreprises a aussi son revers. Comme l’a montré le cas de Swissair, la faillite imminente d’une grande entreprise est entourée de nombreuses incertitudes quant à ses retombées économiques. En outre, les conséquences financières d’une intervention étatique risquent de fortement réduire la marge de manœuvre budgétaire de l’Etat. Les interventions étatiques dans le secteur financier ont un impact sur les structures d’incitation des institutions concernées. En particulier, des risques excessifs auront tendance à être pris, si une faillite est considérée comme impossible dans la pratique. D’où un réel défi politique, dans le cas des banques qui revêtent une importance systémique ou d’autres entreprises concernées par un problème d’aléa moral comparable. Cette problématique résultant des garanties d’Etat implicites ou explicites peut entraîner des dysfonctionnements des mécanismes du marché et accroître le risque financier supporté par l’Etat. Compte tenu de l’importance de ce sujet, le Conseil fédéral a proposé en novembre 2008 d’accepter la motion «Prévenir les risques démesurés pour l’économie suisse» du groupe UDC (08.3649). Cette motion charge le Conseil fédéral d’instituer une commission d’experts qui expose, dans un rapport, les conséquences que la faillite de grandes entreprises suisses pourrait avoir pour l’économie de notre pays. Elle montrera en outre comment les risques économiques pourraient être minimisés dans le cadre, d’une part, d’une réorganisation des banques (le cas échéant des assurances) et, d’autre part, d’une restructuration des risques dans la conduite des affaires. La FINMA a également entrepris, conjointement avec la Banque nationale, un projet visant à déterminer les possibilités offertes par le droit de la surveillance pour optimiser la situation en matière de risque des grandes entreprises ayant une importance systémique, notamment en réduisant la complexité due à la diversité de ces entreprises et à leurs structures internes. Ces travaux seront dûment coordonnés avec les résultats de la commission d’experts. Les travaux dans ce domaine devront préalablement clarifier le concept d’importance systémique ainsi qu’analyser les coûts liés à l’effondrement d’institutions relevant d’une telle importance potentiellement systémique. A ces coûts, le rapport devra également opposer les bénéfices que ces entreprises peuvent apporter à l’économie suisse. Pour cela il s’agira de prendre en compte les effets de réseau et les rendements d’échelle qui découlent de la taille d’une entreprise. Il faudra aussi tenir compte des coûts qui découlent d’une nouvelle réglementation, afin de les comparer à leur bénéfice potentiel. Les solutions proposées comprendront tout d’abord les possibilités en matière de prévention d’une prise de risques excessifs, par exemple par le biais d’une réglementation ou surveillance adaptée. En outre, il faudra étudier les possibilités pour réaliser une procédure de liquidation ordonnée d’une entreprise en faillite. Une telle procédure aura pour objectif de minimiser les coûts macroéconomiques, et pourrait inclure une concertation sur un plan international. 43 Place financière suisse: situation et perspectives 6. Perspectives 6.1. Tendances pour le secteur financier et l’économie en général La crise financière et économique est loin d’être terminée. Le processus de désendettement (deleveraging) n’est pas fini, l’emploi continue de décroître et la baisse des prix immobiliers aux Etats-Unis s’est poursuivie au premier semestre 2009. Il est donc trop tôt pour tirer un bilan. En effet, la conjoncture mondiale aura elle aussi un impact déterminant sur la profondeur et la durée de la récession, ainsi que sur le moment de la reprise en Suisse, pays fortement tributaire de ses exportations. La récession planétaire touchera – plus ou moins fortement – toutes les branches économiques. Or l’assombrissement des perspectives va de pair avec une érosion de la confiance des investisseurs et des consommateurs concernant leurs futurs revenus. Autrement dit, la crise de l’économie réelle se répercute à son tour sur le secteur financier. L’évolution de la crise montre clairement qu’il faut s’attendre à des adaptations structurelles dans le secteur financier en particulier, même si l’on ne peut encore mesurer toutes les conséquences de la crise. Une récession prolongée aboutirait toutefois à une augmentation du nombre de crédits en souffrance et renforcerait par contrecoup les pressions subies par le secteur financier. La récession laisse également prévoir un ralentissement de la marche des affaires dans le secteur des assurances. D’un autre côté, il convient de remarquer que le redimensionnement actuel du secteur financier fait suite à de longues années d’essor. Cette correction intervient donc à un niveau historiquement élevé. Dans son rapport d’avril 2009 sur la stabilité financière dans le monde 31 , le FMI estime que les banques et les autres entreprises devront procéder à des amortissements d’un montant total de 2800 milliards de dollars sur leurs avoir aux Etats-Unis. Cette somme porte sur la période allant de l’éclatement de la crise à l’année 2010. Si l’on y ajoute les besoins d’amortissement des avoirs provenant d’Europe et du Japon, on aboutit à une somme de 4100 milliards de dollars. Deux tiers de ce montant concernent des banques. Le FMI estime qu’un tiers seulement de ces amortissements ont été effectués en 2007 et 2008. Autrement dit, le plus gros reste à faire en 2009 et en 2010. Les banques américaines ont déjà procédé à la moitié environ des amortissements jugés nécessaires. Par contre, la part des amortissements à venir dans les banques européennes est nettement plus élevée. Les banques continueront donc vraisemblablement à réduire leur bilan pendant un certain temps encore. Les amortissements opérés se traduisent, tout comme la réduction visée du taux d’endettement, par un besoin en capital supplémentaire. Ce capital peut être généré soit par des bénéfices, soit par un apport de capital frais. Pour déterminer ce besoin et obtenir ainsi la transparence requise, les autorités américaines ont soumis à un test de résistance 19 de leurs banques. Leurs bilans ont été testés à l’aide de divers scénarios concernant l’évolution économique et le taux d’endettement cible. Les résultats publiés le 7 mai 2009 montrent un besoin de capital supplémentaire de 599 milliards de dollars au total. Et si l’on prend en compte les bénéfices et les mesures supplémentaires adoptées par les banques, il reste au bout du compte un besoin net de 74,6 milliards de dollars. Ce test de résistance américain se fonde toutefois sur un besoin d’amortissement qualifié entre-temps 31 Fonds monétaire international (FMI). Avril 2009. «Global Financial Stability Report». 44 Place financière suisse: situation et perspectives d’optimiste. Des tests de résistance comparables n’ont pas été publiés jusqu’ici pour les banques européennes. Le FMI estime cependant que les banques européennes n’ont pu générer que 40 % du capital supplémentaire requis. Mesurées à la même aune, les banques américaines en auraient déjà levé les deux tiers. A propos des grandes banques suisses, on constate que leur capitalisation est supérieure à la moyenne internationale et que le cas échéant, les amortissements supplémentaires à effectuer seraient comparativement moindres. L’évolution économique à venir et ses conséquences pour le secteur financier dépendront de la gravité de la récession et des réactions au niveau politique. Partant d’un scénario optimiste, l’économie se relève rapidement et des mesures protectionnistes ne sont adoptées que de façon ponctuelle. La reprise de la croissance met fin au processus de désendettement du secteur bancaire, tandis que les marchés financiers reprennent des couleurs. De même, les mesures de soutien conjoncturel portent leurs fruits et les prix des matières premières n’enregistrent qu’une légère hausse. Or dans un tel cas, les déséquilibres macroéconomiques antérieurs à la crise persisteraient, aggravés dans certains pays par la très forte augmentation de la dette publique. Ce nouvel endettement et la charge d’intérêts qu’il représente sont préoccupants. Car ils réduiront à l’avenir la marge de manœuvre de la politique budgétaire. A cela s’ajoute que l’évolution démographique pèsera lourdement sur les budgets des collectivités publiques. Partant de l’hypothèse d’un scénario plus pessimiste, une récession de longue durée permettrait certes de corriger graduellement les déséquilibres. Or plus une récession s’avère sévère, plus la probabilité d’interventions protectionnistes accrues dans les flux commerciaux et financiers mondiaux augmente, aggravant au passage l’ampleur de la récession. En pareil cas, l’interventionnisme étatique dans le secteur financier risque d’être plus marqué – les gouvernements exerçant, en tant que propriétaires, une influence directe et systématique sur le processus d’octroi de crédit. La crise financière actuelle n’est pas un simple creux conjoncturel. Elle est exceptionnelle par son ampleur comme par son évolution, et pourrait déboucher sur un redimensionnement mondial des activités du secteur financier. Toutes les places financières importantes de la planète sont malmenées et leur réglementation est sujette à des modifications, au même titre que leur positionnement dans la concurrence internationale. On ignore encore à quoi aboutira ce processus de restructuration. Mais tout indique que provisoirement, les rendements dans le secteur financier resteront sous pression. Il n’est pas possible à l’heure actuelle de dire dans quelle mesure les sources de recettes manquantes pourront être compensées à l’avenir, soit directement dans les secteurs d’activité concernés, soit par le développement de nouveaux secteurs d’activité. De premiers signaux indiquent une reprise graduelle dans le secteur financier ainsi que dans l’économie réelle, même si tout risque de nouvelle détérioration ne peut être exclu. 6.2. Elaboration d’une stratégie, en dialogue avec l’économie privée Au niveau international, des efforts sont en cours pour coordonner la réglementation, afin de mieux maîtriser les risques et de prévenir autant que possible de futures crises. Il s’agit de garder à l’esprit que les places financières sont en concurrence entre elles. Les mesures protectionnistes visant à protéger l’économie locale ne sont en principe pas souhaitables. L’Etat doit veiller à ce que les conditions-cadres comme le régime de surveillance, l’environnement fiscal ou les infrastructures permettent aux prestataires suisses de services financiers de s’imposer face à la concurrence internationale, sans négliger pour autant la protection des créanciers, des investisseurs ainsi que du système. En revanche, ce n’est pas le rôle des 45 Place financière suisse: situation et perspectives collectivités publiques de mener une politique industrielle et d’intervenir dans les activités de l’économie privée. Dès que les circonstances s’y prêteront, l’Etat doit se défaire de ses participations dans des entreprises privées. D’où la nécessité d’une stratégie de désengagement adéquate. Il incombe au secteur privé de se repositionner suite au bouleversement subi par le monde financier, afin d’occuper les créneaux porteurs. Le secteur financier joue un rôle majeur pour toute l’économie, pour les grandes entreprises aux ramifications internationales comme pour les PME. Par conséquent, l’Etat et le secteur privé doivent collaborer et mener un dialogue permanent sur la meilleure façon d’exploiter les chances créées par la réorientation des marchés financiers mondiaux ainsi que de gérer les risques systémiques latents. Il s’agira de réfléchir à la manière de concevoir notamment la surveillance des grandes banques. Le problème de l’aléa moral doit être résolu. Le système de prévoyance est lui aussi durablement touché par la crise. Outre les pertes subies, les changements de pondération opérés dans la politique de placement peuvent comporter des risques financiers. Une fois la crise actuelle surmontée, des risques inédits sont à prévoir. L’heure est à la redéfinition des conditions qui prévaudront à l’avenir pour la place financière suisse. Il importe de définir des stratégies claires, ce qui nécessite la collaboration des autorités et du secteur privé. Ainsi, l’Etat est responsable de l’aménagement des conditions-cadres, tandis que l’économie privée veillera à la bonne orientation des affaires par rapport à la concurrence internationale. Le présent rapport se veut un point de départ pour l’élaboration de telles stratégies. C’est sous l’égide de l’Association suisse des banquiers (ASB) qu’a été élaboré en septembre 2007 un «Masterplan pour la place financière suisse» (ci-dessous «Masterplan»), en vue de faire accéder d’ici 2015 la place financière helvétique au trio de tête des places financières internationales. Un important train de mesures a été proposé à cette fin. En novembre 2007, lors d’une rencontre entre la Confédération et les responsables des associations du secteur financier, il a été convenu d’approfondir le dialogue en vue de définir une stratégie transsectorielle pour la place financière suisse. L’objectif commun est d’élaborer des propositions en étroite coopération, en gardant à l’esprit les changements survenus depuis 2007, afin d’améliorer durablement les conditions-cadres et, partant, la compétitivité internationale du secteur financier suisse. Le «Comité de pilotage Dialogue place financière (CODIFI)», qui est composé de représentants du DFF, de la BNS, de la FINMA et du secteur financier, a été institué à cette fin. Ce comité a pour mission de coordonner et de piloter les travaux opérationnels au sein de ce projet. Le CODIFI est notamment chargé d’examiner de près certaines propositions du Masterplan esquissées par le secteur financier, ainsi que d’autres thèmes, avant de formuler les bases de décision nécessaires à l’attention du «Comité stratégique Dialogue place financière (comité stratégique)». Sur la base de ces résultats, le comité stratégique identifiera les mesures concrètes à prendre et mettra en œuvre les étapes de réalisation nécessaires. A sa séance du 2 septembre 2008, le CODIFI a adopté à l’intention du comité stratégique diverses mesures et un nouveau programme destiné à promouvoir la place financière suisse. A la mi-septembre 2008, la crise des marchés financiers s’est toutefois durcie et a laissé des traces durables, en Suisse également. D’une part, la crise a retardé les travaux du CODIFI, d’autre part le contexte a changé pour la place financière suisse. 46 Place financière suisse: situation et perspectives Dans ces conditions, le contexte auquel se réfère la stratégie de croissance du Masterplan, axé sur le renforcement et le développement de la compétitivité internationale, n’est plus d’actualité. La crise financière, ainsi que les autres problématiques auxquelles la Suisse doit faire face (soit d’abord le débat sur le secret bancaire suisse, le dialogue fiscal entre la Suisse et l’UE, ainsi que les difficultés américaines de l’UBS), obligent à une analyse fondamentale de l’avenir de la place financière suisse. En 2009, un nouveau groupe de travail mixte a été constitué dans le cadre du CODIFI, le «groupe de travail Stratégie». Ce groupe de travail a pour mandat de collecter les éléments constitutifs d’une future stratégie pour la place financière. Il devra autant que possible confronter entre eux les principaux axes stratégiques de développement envisageables pour la place financière. Ce comité soutient et accompagne les travaux en cours de la Confédération. Il est placé sous la conduite du directeur de l'AFF et composé de représentants des autorités et du système financier. Du côté des autorités, on y trouve la BNS, la FINMA, l’AFC et l’AFF. Le secteur financier est représenté par l’ASB, l’Association suisse d’assurances, l’Association suisse des fonds de placement et le groupe SIX. Les conclusions de ce dialogue permettront aux autorités de formuler une stratégie optimale pour améliorer les conditions-cadres, ainsi que de définir pour le secteur privé des stratégies relatives à l’évolution de chaque domaine d’activité. 6.3. Mesures nécessaires Les perspectives pour la place financière dépendront dans une très large mesure des tendances protectionnistes et des garanties d’accès aux marchés internationaux accordées aux entreprises suisses. La question des effets de l’engagement – tant explicite qu’implicite – de l’Etat en faveur d’entreprises systémiques, puis de son désengagement, s’avère également primordiale. A la lumière de ces défis fondamentaux, les chantiers législatifs porteront dans différents domaines. En résumé, une future stratégie devra inclure les points suivants: dans le domaine de la réglementation et de la surveillance des marchés financiers, la priorité est de mieux gérer les risques systémiques et d’assurer la protection adéquate des déposants et des investisseurs. En même temps, il s’agit de combler les lacunes du système de réglementation et d’améliorer la détection précoce des risques. Quant à l’objectif d’améliorer les conditions fiscales, il figure dans la troisième réforme de l’imposition des entreprises. Il s’agit concrètement de réformes du droit de timbre et de l’impôt anticipé, ainsi que d’adaptations concernant le statut fiscal accordé par les cantons. Les futures conditions-cadres seront également influencées par les adaptations apportées à l'assistance administrative et à l'entraide judiciaire en matière fiscale. Il s’agira par ailleurs d’améliorer l’accès aux marchés étrangers, de garantir une infrastructure efficace des marchés financiers ainsi que de poursuivre la coopération internationale et de préserver la bonne réputation de la place financière suisse. La suite des travaux devra aussi s’orienter sur une analyse détaillée des forces et des faiblesses de la place financière suisse et de ses principales concurrentes étrangères. Le Conseil fédéral présentera ses conclusions sur la stratégie à adopter pour la place financière dans ses réponses à des interventions parlementaires comme par ex. le postulat Graber (09.3209, Stratégie concernant la place financière). 47 Place financière suisse: situation et perspectives Sources Association suisse des banquiers, Wealth Management in Switzerland, janvier 2009. Banque nationale suisse, Financial Stability Report 2009, juin 2009. Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (Basel Committee for Banking Supervision), Core Principles for Effective Deposit Insurance Systems, Banque des règlements internationaux, juin 2009. de Larosière Group on Financial Supervision in the EU, Report, février 2009. Département fédéral des finances, Chiffres-clés relatifs à la place financière suisse, juin 2009. Deutsche Bank Research, Global Banking Trends After the Crisis, juin 2009. Financial Services Authority (UK), The Turner Review, A regulatory response to the global banking crisis, mars 2009. Fitch Ratings, Credit Derivatives (CDx) Survey, juillet 2007. Fonds monétaire international, Global financial stability report, avril 2009. Group of Twenty (G20), The Global Plan for Recovery and Reform, Final Communiqué, 2 avril 2009. Group of Twenty (G20), Declaration on Strengthening the Financial System, Annex to the Global Plan, 2 avril 2009 Message du 5 novembre 2008 concernant un train de mesures destinées à renforcer le système financier suisse, FF 2008 8027. Roth, Jean-Pierre, Globale Krise: Wie ist die Schweiz betroffen?, exposé tenu devant le Schweizerisch-Deutscher Wirtschaftsklub de Francfort, 2 mars 2009. SECO, Tendances conjoncturelles, hiver 2006/2007, thème spécial: L’importance des activités financières dans le PIB suisse, janvier 2007. The Banker (Magazin), The Banker Top 1000 World Banks, juillet 2007. 48 Place financière suisse: situation et perspectives Glossaire et liste d’abréviations ABS (asset backed securities): achat d’actifs provenant généralement de plusieurs prêteurs et émission d’un papier commercial (ABS). Le porteur d’un tel titre acquiert un droit à des flux en capital et en intérêts auprès d’une structure juridique spécialement créée lors de la titrisation (special purpose vehicle, SPV). ARS (auction rate securities): emprunts à long terme (20 à 30 ans) à taux variable (plafonné). Le taux d’intérêt est réajusté périodiquement par voie d’adjudication aux enchères. Les intervalles entre adjudications varient, des périodes de 7 ou 28 jours étant typiques. Blue Chips: actions d’entreprises généralement à grosse capitalisation, solvables et connues pour dégager des bénéfices réguliers. Capital-investissement: (private equity) financement de sociétés non cotées, le plus souvent des jeunes entreprises à forte croissance (start-ups), qui ont besoin de fonds propres. CDO (collateralized debt obligation): nom générique des titres adossés à des actifs (asset backed securities, ABS), et donc de produits de crédit structurés. CDS (credit default swap): dérivé de crédit servant à transférer à un tiers le risque de futures pertes de crédit. CFB (Commission fédérale des banques): ancienne autorité suisse de surveillance. CHF: franc suisse. Clearing/Settlement: compensation centrale de transactions monétaires (clearing) et de transferts de patrimoine (settlement) dans le négoce de titres. CLS: exploitant d’un système de règlement de transactions en monnaies étrangères. CODIFI: Comité de pilotage Dialogue place financière, dont font partie les autorités et des représentants du secteur financier. Conduit: cf. «Fonds multicédant». Crédits en souffrance: prêts pour lesquels le débiteur n’est plus en mesure de respecter ses obligations selon les conditions de paiement prévues («non-performing loans» ou «crédits douteux»). Cross-border transactions: opérations transfrontalières. EUR: devise de l’Euroland – la zone euro. A l’heure actuelle, tous les pays de l’UE sauf le Royaume Uni, la Suède, le Danemark, la République tchèque, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie et la Pologne. EUREX: European Exchange, bourse internationale de produits dérivés. Société créée en 1998 de la fusion de DTB (Deutsche Terminbörse) et de SOFFEX (Swiss Options and Financial Futures Exchange). Euromarché: marché international sur lequel se traitent les euro-obligations, obligations à taux fixe émises simultanément dans plusieurs pays, et les eurodevises (tel l’eurodollar), devises placées dans un pays autre que celui d’origine de la monnaie. FDIC: Federal Deposit Insurance Corporation. Agence américaine de garantie des dépôts bancaire, dotée de compétences de surveillance et de mise en liquidation. FINMA: Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers Fonds multicédant: (conduits) refinancement de titres (notamment ABS, CDO) et de crédits au moyen d’une structure juridique créée spécifiquement (special purpose vehicle) pour les traiter et émettre des papiers monétaires. FSAP: Financial Sector Assessment Program. Programme du FMI et de la Banque mondiale visant à renforcer la stabilité des marchés financiers. FSB: (Financial Stability Board): a pris le relais du FSF en avril 2009. FSF: (Financial Stability Forum): Forum de stabilité financière, ayant pour mission de promouvoir la stabilité des marchés financiers. 49 Place financière suisse: situation et perspectives G10: (onze pays industrialisés les plus riches) EtatsUnis, Japon, Canada, Allemagne, Royaume Uni, France, Italie, Pays-Bas, Belgique, Suède et Suisse. G20: Etats-Unis, Japon, Chine, Canada, Mexique, Inde, Corée, Brésil, Australie, Russie, Turquie, Indonésie, Arabie Saoudite, Afrique du Sud, Argentine, Allemagne, Royaume Uni, France, Italie, UE. GAFI: Groupe d’Action Financière (Financial Action Task Force, FATF), organisme le plus important en matière de lutte internationale contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Gestion de fortune (wealth management). Comprend la gestion institutionnelle (par . ex. caisses de pensions) et la gestion de fortune privée. Gestion de fortune transfrontalières (offshore): gestion d’un patrimoine dont l’ayant-droit ne réside pas dans le même pays que le gérant de fortune. La Suisse est le numéro un mondial de la gestion de fortune offshore, avec une part du marché proche d’un tiers. Gestion des risques: enregistrement et évaluation des risques de crédit, contrôle des réactions aux risques constatés. Hedge Funds: véhicules de placement utilisant diverses stratégies d’investissement définies individuellement – par. ex. la combinaison de positions en actions et de ventes à découvert. Hypothèques subprime: prêts hypothécaires accordés à une clientèle peu solvable. IAIS: International Association of Insurance Supervisors (Association internationale des contrôleurs d’assurance, AICA). Association des autorités nationales de surveillance de l’assurance. Investment banking: négoce de titres, offre aux entreprises de solutions lors de levées de capitaux, de fusions/acquisitions ou d’entrées en bourse, émission de produits structurés, etc. IOSCO (International Organisation of Securities Commissions): organisation faîtière internationale des organismes de surveillance boursière. Leveraged finance: (financement à effet de levier). Opération consistant à utiliser, pour financer l’acquisition d’une entreprise, davantage de fonds de tiers que ne veut l’usage. D’où un risque accru et un taux d’intérêt plus élevé. S’inscrit dans la poursuite d’objectifs à court terme, comme une reprise. Marché des capitaux: marché des emprunts d’une durée supérieure à un an. Sont réputés à long terme les emprunts émis pour une durée de cinq ans ou davantage. Marché monétaire: marché des emprunts (à court terme) dont l’échéance est inférieure à un an. Monoliners: voir rehausseurs de crédit. Obligations à rendement élevé: obligations offrant un taux d’intérêt très élevé en raison du risque élevé d’insolvabilité des débiteurs («high yield bonds»). Point de base (pb): centième d’un pour-cent. Prime de risque: rémunération supplémentaire exigée par les investisseurs pour prendre un risque. p.ex. prix d’un CDS ou Spread. Primes de risque de crédit: prix d’un credit default swap (CDS). Private Banking: services financiers plus sophistiqués et personnalisés que dans la banque de détail, rendus, à une clientèle généralement fortunée. Comprend le conseil en placement et la gestion de fortune (wealth management). Private Equity: cf. «Capital-investissement» Recapitalisation: augmentation des fonds propres d’une entreprise, généralement en cas de souscapitalisation. Rehausseurs de crédit: établissements spécialisés dont l’activité consiste à assurer des titres contre le risque de perte. Aux Etats-Unis, on parle de monoliners (ou «monoline insurers»). Retail banking: banque de détail. SPE / SPV: (special purpose entity / vehicle), Fonds commun de créances. Instrument de déconsolidation (par ex. de CDO, ABS) via des techniques de titrisation; sous forme par ex. d'un fonds multicédant. 50 Place financière suisse: situation et perspectives Spread: écart mesuré en taux d’intérêt entre les conditions qu’obtiendraient pour une même durée des emprunts comportant un risque différent («credit spread» ou «yield spreadۛ»). Facteur déterminant pour la prime de risque. Indique parfois aussi la différence entre des emprunts comportant un même risque mais avec une durée divergente («Maturity spread»). Surveillance prudentielle: la réglementation et la surveillance prudentielles visent à maintenir la solvabilité individuelle des banques, négociants en valeurs mobilières, assureurs, etc. Taux SWAP: prix auquel s’échangent des titres et / ou des devises (soit les flux en espèces qui en découlent). Un swap sur devises implique par. ex. de payer sur une période définie la différence d’intérêt (positive ou négative) entre les deux monnaies troquées. USD: dollar américain. Ventes à découvert: (short sales) opération à terme consistant à vendre un titre que l’on ne possède pas encore dans l’espoir de se couvrir. La vente aboutit à une position courte (short position; contraire: long position). Wealth-management: voir Private Banking. SWIFT: Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunications, coopérative exploitant un réseau international de télécommunications permettant d’assurer un trafic des paiements rationnel et rapide. Taux LIBOR: London Interbank Offered Rate. Taux d’intérêt pratiqué à Londres entre les principales banques internationales pour les dépôts à court terme. Il dépend de la durée du prêt et de la monnaie de référence. 51