5.
Action en responsabilité contre le titulaire d'un marché :
compétence administrative
Cass. Civ., 1ère, 23 juin 2010, pourvoi n° 09-14.592
La commune de Laon donne à bail à une association (MJC),
assurée pour sa responsabilité civile, des locaux qui ont été,
par la suite, endommagés par un incendie.
Après avoir indemnisé la commune, l'assureur de celle-ci
assigne la MJC et son assureur devant une juridiction de
l'ordre judiciaire pour voir déclarer l'association responsable
du sinistre et la voir condamnée avec son assureur, au
remboursement de la somme indemnisée.
Alors que les juges judiciaires se sont déclarés incompétents,
le Tribunal administratif d'Amiens, saisi dans un second
temps, renvoie l'affaire devant le Tribunal des conflits. Ce
dernier considère que les juridictions de l'ordre judiciaire sont
compétentes pour connaître du litige opposant les deux
assureurs.
La cour d'appel saisie à la suite de cette décision condamne
l'assureur de l'association à payer à l'assureur de la
commune la somme demandée. Pour ce faire, interprétant la
décision du Tribunal des conflits, la cour d'appel juge que
l'action fondée sur la subrogation de l'assureur de la
commune était distincte de l'action en responsabilité civile
contre l'association, la première action ne poursuivait que
l'exécution d'une obligation de droit privé et la mise en œuvre
de l'article L. 124-3 du Code des assurances, alors même
qu'elle aurait initialement été dirigée simultanément contre
l'association et son assureur. La Cour d'appel en a déduit
qu'elle n'avait pas à s'interroger sur la pertinence du moyen
selon lequel l'action en responsabilité contre l'auteur du
dommage relevait de la juridiction administrative.
La Cour de cassation censure cette position considérant que
compte tenu de la décision du Tribunal des conflits, la cour
d'appel ne pouvait pas statuer sur la responsabilité de
l'association.
Assurances vie : modification des supports
financiers par l'assureur et point de départ de la
prescription
Cass. civ., 2e, 1er juil. 2010, pourvoi n° 08-12.334
Dans cette affaire, une personne souscrit le 11 juin 1997, un
contrat d'assurance sur la vie multisupports, permettant des
versements libres sur des parts ou actions de supports
financiers acquis et gérés par l'assureur, entre lesquels les
souscripteurs pouvaient arbitrer en application d'une clause
d'arbitrage dite "à cours connu".
En janvier 1998, l'assureur procède à la modification
unilatérale des supports.
En 2002, afin d'obtenir le rétablissement des supports ainsi
qu'une indemnisation du préjudice résultant de cette
suppression, le souscripteur assigne l'assureur.
L'action est déclarée irrecevable par les juges de la Cour
d'appel de Paris. La cour a en effet considéré que l'action
était prescrite, estimant que le point de départ de la
prescription biennale se situait au 15 décembre 1998, jour où
le souscripteur a eu connaissance des conséquences
qu'entrainait pour lui la réduction des supports éligibles.
Saisie de la question, la Haute juridiction rejoint la position
des premiers juges et considère que "selon l'article L. 114-1
du code des assurances, le point de départ de la prescription
biennale de l'action en rétablissement des supports
supprimés et en responsabilité contre l'assureur pour
exécution déloyale du contrat se situe à la date de
l'évènement y donnant naissance c'est-à-dire, à la date où le
souscripteur a eu connaissance des manquements de
l'assureur à ses obligations et du préjudice résultant pour lui,
peu important que l'exécution du contrat ainsi modifié se soit
poursuivi".
Intermédiation : obligation de mise en garde et
sanction
Cass. civ., 2e, 1er juil. 2010, pourvoi n° 09-15.594
En l'espèce, une personne exerçant une activité
professionnelle à son domicile, souscrit par l'entremise d'une
société de courtage, une assurance multirisques habitation.
A la suite du vol de son matériel informatique, l'assuré
actionne la garantie de l'assureur qui refuse de prendre en
charge le sinistre. Face à ce refus de garantie, l'assuré
décide d'assigner son assureur afin d'obtenir l'indemnisation
des pertes subies.
Cette affaire a donné lieu à de longs développements sur le
plan procédural. En effet, après deux arrêts de cassation,
l'affaire est de nouveau portée devant la deuxième chambre
de la Cour de cassation.
Constatant le défaut de couverture des préjudices
immatériels par le contrat d'assurance multirisques, l'assuré
invoque les manquements du courtier et de l'assureur à leur
devoir de mise en garde et de conseil, reprochant à ces deux
professionnels de n'avoir pas attiré son attention sur le
caractère inadapté du contrat d'assurance proposé.
Dans un arrêt du 21 décembre 2006, la Cour de cassation
avait retenu l'existence de tels manquements. Dans ce
nouvel arrêt, l'assuré reprochait à la cour d'appel d'avoir limité
à 5% sa perte de chance de ne pas contracter une garantie
complémentaire.
La Cour d'appel, approuvée ici par la Cour de cassation,
retient notamment que "le matériel informatique professionnel
installé dans la résidence principale de l'assuré était couvert
par la police souscrite [auprès de la société d'assurance] par
l'intermédiaire de [la société de courtage], et qu'il revenait à
cet assureur ou/et cette dernière société par l'intermédiaire
de laquelle il avait contracté, de l'informer et de le conseiller
sur la possibilité ou l'impossibilité de contracter la garantie
complémentaire dommages professionnels immatériels".