Mardi 26 septembre 2006 20 h 00 - 22 h 30 Salle municipale Gabriel Péri 25, rue Gabriel Péri 92320 - Châtillon Cancer : Les effets secondaires des traitements Fatigue, anorexie, nausées, troubles digestifs, perte de cheveux,... Compte rendu Onco 92 sud - 11, rue du Soleil Levant - 92140 Clamart Tél. : 01 46 30 18 14 - Fax : 01 46 30 46 71 - [email protected] www.onco92sud.com 2 Avertissement Les textes ci-après regroupent les interventions de la soirée d’information organisée le 26 septembre 2006 par le réseau Onco 92 sud à la salle municipale Gabriel Péri à Châtillon à laquelle 22 personnes, malades, proches, professionnels et bénévoles, ont assisté. Ces interventions ont été reproduites par le réseau Onco 92 sud à partir d’un enregistrement audionumérique. Le choix de supprimer ce qui paraissait difficile à restituer est de sa responsabilité. Le contenu des interventions n’engage la responsabilité de leurs auteurs qu’à la condition que ces interventions aient été fidèlement reproduites par le réseau Onco 92 sud. Réalisation : Gaëlle-Anne Estocq - Stéphane Lévêque - Cathy Michaud Réseau Onco 92 sud Novembre 2006 3 4 Sommaire Présentation du déroulement de la soirée……………………………..………..page 7 Gaëlle-Anne Estocq La perte des cheveux ….………………………………………………….…...…...page 8 Gaëlle-Anne Estocq Les compléments capillaires …..……………………………………………….…...page 10 Monsieur Plantade Les effets secondaires digestifs……………………………………………….…..page 12 Anne Thiellet La fatigue ………………………………………………………………………….....page 15 Rissane Ourabah Les aspects nutritionnels…………………………………………………….…….page 17 Virginie Dubois Débat avec les participants...………………………………………………………….page 21 5 6 Gaëlle-Anne Estocq Médecin coordinateur Réseau Onco 92 Sud Bonsoir. Nous sommes rassemblés ici pour une réunion d’information organisée par le réseau Onco 92 sud. Nous remercions la municipalité de Châtillon qui a bien voulu nous prêter cette salle, ainsi que Madame Sophie Illouz, pharmacien à Fontenay-aux-Roses qui s’est occupée de toutes les démarches de réservation de la salle. Pour cette troisième soirée, le thème choisi est celui des effets secondaires au cours des traitements du cancer. Le groupe de travail qui a organisé cette réunion a fait le choix de vous présenter certains des effets secondaires, ceux qui sont les plus fréquents et les plus gênants au quotidien. Notre présentation va se dérouler en 6 étapes : - tout d’abord, la perte des cheveux qui est la première crainte des patients. Je vais vous faire une courte présentation sur la physiologie des cheveux et autres poils (car on perd aussi les autres poils), et je laisserai ensuite la parole à Monsieur Plantade qui est coiffeur-perruquier à Garches. - ensuite, le Docteur Thiellet, oncologue-radiothérapeute au CRTT de Meudon-la-Forêt vous présentera les effets secondaires digestifs. - les problèmes de fatigue seront abordés par le Professeur Ourabah, médecin généraliste à Châtillon et président du département de médecine générale à la faculté de médecine Paris Sud. - Madame Dubois, diététicienne, nous proposera une approche nutritionnelle de ces symptômes. - enfin, nous pourrons répondre à vos questions et tous les intervenants se réuniront derrière cette table et seront à votre disposition. Avant de démarrer, je voudrais vous transmettre trois informations. Tout d’abord, le réseau Onco 92 sud organise des ateliers d’échanges et de réflexion qui permettront, nous l’espérons, d’offrir un espace de parole entre les patients et/ ou entre les proches de patients. Un premier groupe aura lieu le 5 octobre 2006 entre 14h30 et 16h00 dans les locaux du réseau à Clamart, sur le thème du retentissement du cancer sur la vie familiale et la vie de couple. En pratique, il y aura une petite intervention d’une quinzaine de minutes d’un animateur et après, la parole sera à ceux qui participeront. Cet atelier sera animé par 2 professionnels de santé, membres du réseau. Il est préférable de s’inscrire auprès du réseau pour y participer. D’autre part, le réseau a la possibilité, dans le cadre d’un dispositif bien particulier, de financer des consultations de psychologues à leur cabinet ou au domicile, soit pour les patients, soit pour leurs proches. Ces consultations sont gratuites pour les personnes puisqu’elles sont prises en charge financièrement par le réseau. Si vous avez besoin de renseignements complémentaires, vous pouvez contacter directement le réseau. Enfin, nous allons faire circuler parmi vous une liste de présence pour que vous puissiez noter vos coordonnées. Vous pourrez ainsi recevoir le compte-rendu de cette soirée. 7 Gaëlle-Anne Estocq Médecin coordinateur Réseau Onco 92 Sud Je vais donc commencer par la perte des cheveux que l’on appelle aussi alopécie. Je vais d’abord vous présenter les mécanismes de l’alopécie, puis j’évoquerai la prévention éventuelle que nous pouvons faire et les réponses qui peuvent être apportées. Dès que le cheveu est tombé, un nouveau cycle s’opère. Nous perdons 30 à 80 cheveux par jour, avec des variations saisonnières : la chute est plus importante au printemps, ainsi qu’en août et en automne. Une chute de plus de 100 cheveux par jour est une chute excessive. L’alopécie chimio-induite est une toxicité qui ne nous empêche pas de faire les traitements mais qui a un impact psychologique très fort. Lorsqu’un patient aborde une chimiothérapie, en général, c’est la première question qu’il pose, même si ce n’est pas forcément ce qui dure une fois que le traitement est démarré. La chute des cheveux démarre 10 à 20 jours après la première cure. C’est en général maximal au bout de deux mois, réversible à l’arrêt du traitement, sauf s’il y a eu une radiothérapie sur la zone. La repousse se fait entre plusieurs semaines à plusieurs mois avec une possibilité de modification de texture du cheveu. C’est quelque chose qui est variable d’un patient à l’autre, mais aussi variable d’une molécule à l’autre. Voici un schéma du cheveu. Vous pouvez voir la tige du cheveu qui sort de la peau. Tout au bas de la tige, il y a le follicule pileux et autour du follicule pileux, les vaisseaux sanguins et les nerfs. La tige capillaire est composée de protéine soufrée, la kératine. C’est la substance qui détermine la résistance du cheveu et sa souplesse. Puis, il y a les pigments. Plus un cheveu est pigmenté, plus il est foncé. Nous avons entre 100 000 et 160 000 cheveux dans notre chevelure, soit 250 à 350 cheveux par cm2, avec un renouvellement de 30 à 40 cheveux par jour. La zone péri bulbaire est la zone nourricière du cheveu. Le cheveu se renouvelle environ 25 fois au cours d’une vie. Il y a 3 phases : - la période de croissance qui dure 3 à 6 ans, - ensuite, il y a une période correspondant à l’arrêt de la pousse, pendant à peu près deux semaines, - enfin, une phase finale de quelques mois qui correspond à la chute du cheveu. 8 Grade 0 Pas d’alopécie Anticorps monoclonaux, Bortezomib Grade 1 Peu alopéciant Sels de platine, 5 FU, Carmustine, Gemcitabine Grade 1 – 2 Perte de cheveux Peu à moyennement alopéciant Bléomycine, Mitoxantrone, Méthotrexate Grade 2 Perte en plaques Moyennement alopéciant Cytarabine, Irinotécan, Alcaloïdes Grade 2 – 3 En plaques à complète Moyennement à très alopéciant Phosphamides, Topotécan Grade 3 Complète Très alopéciant Anthracyclines, Taxanes Vous voyez ici un tableau reprenant les grades de toxicité : au grade 0, il n’y a pas perte de cheveux ; au grade 1 et 2, on commence à perdre quelques cheveux ; puis au grade 2, on perd ses cheveux en plaques ; au grade 2-3, il s’agit de plaques plus importantes en nombre et en taille ; au grade 3, on a tout perdu. Dans le cadre de certains cancers, par exemple le cancer du sein, les médicaments très alopéciants sont les Taxanes et les Anthracyclines. Dans le cadre d’un cancer digestif, les traitements comme le 5FU ou les Sels de Platine sont moins alopéciants. Si un myélome est traité par le Bortezomib, qui est une nouvelle molécule, on ne perd pas ses cheveux. Si l’on utilise, dans le cas d’une tumeur gestationnaire, de la Bléomycine, on ne perd pas non plus ses cheveux, sauf certains patients qui les perdent tout à coup en fin de traitement. Donc, il y a à la fois la molécule, la dose, mais aussi le patient qui interviennent dans la chute des cheveux. nos patients qui n’ont pas forcément envie de la porter d’emblée, de l’avoir auprès d’eux, pour le jour où les cheveux tomberont. En plus des compléments capillaires, existent des foulards, des chapeaux,.... Enfin, à titre d’information, l’Institut National du Cancer vient de sortir une brochure sur le traitement du cancer et la chute des cheveux, qui donne aussi des conseils pour la protection des ongles et pour le maquillage. Cette brochure est à votre disposition sur la table à l’entrée de la salle. Je laisse maintenant la parole à Monsieur Plantade qui va nous dire comment cela se passe au quotidien. Un élément de prévention, est le casque réfrigérant qui ressemble à un bonnet glacé dont le but est de réduire le flux sanguin vers le crâne et, ainsi, de diminuer la quantité de produit de chimiothérapie qui arrivera au niveau des cellules du bulbe pileux. Il faut le poser dix minutes avant l’injection de produit et le maintenir 2 heures après l’arrêt de la perfusion. Il faut aussi protéger les oreilles. C’est assez difficile à supporter. Cela peut retarder, réduire, parfois éviter la perte de cheveux, mais le résultat est imprévisible. Dans certains cancers qui ont de forts potentiels de métastases vers le cerveau ou dans le cas des tumeurs hématologiques où l’on pratique une chimiothérapie par ponction lombaire dans la moelle épinière, il n’est pas question de porter ce casque réfrigérant qui empêcherait le traitement d’être totalement efficace. Enfin, dans les chimiothérapies continues sur plusieurs jours, il est difficile d’imaginer de porter un casque réfrigérant pendant 3 jours de suite. De même, dans les chimiothérapies qui se prennent par voie buccale, par comprimé, le métabolisme du médicament ne se fait pas du tout de la même façon que lors d’une intraveineuse. En ce qui concerne les perruques qui sont une des réponses à l’alopécie, on les obtient sur prescription médicale. Le remboursement était de 60 € par la sécurité sociale, il vient de passer à 125 € et chaque mutuelle prend une part plus ou moins importante à sa charge. Il faut privilégier le confort et la ressemblance. Nous conseillons toujours à nos patients d’y aller en début de traitement pour être encore en forme lors de l’achat, pour faire en sorte que ce soit ressemblant par rapport au visage, sauf pour quelques personnalités qui ont totalement envie de changer de look. Nous conseillons aussi à 9 Monsieur Plantade, Coiffeur-perruquier à Garches Bonsoir, Je vais vous expliquer un peu pourquoi je fais ce métier. Pour des raisons personnelles bien évidemment, comme vous pouvez vous en douter et puis aussi suite à une rencontre avec des personnes qui avaient décidé de former un groupe sur la France entière, des fabricants de perruques et de prothèses capillaires, qui ont décidé d’avoir une démarche beaucoup moins commerciale et plus à l’écoute des patients. Pour ce faire, ils ont créé le « Partenariat BeautéSanté ». A l’issue de cette rencontre, ils ont fait des coiffures de remplacement (ou perruques, prothèses capillaires, coiffures temporaires) fabriquées à la demande des hôpitaux de Lyon, pour les grands brûlés, qui demandaient d’avoir un produit permettant d’adhérer sans colle ou adhésif. Pour ce faire, ce groupement a décidé d’être le relais avec le monde médical, en gardant le privilège de la beauté, pour vous aider à passer des moments difficiles. Au quotidien, nous voyons des femmes et des hommes qui sont vraiment perdus. Je ne pensais pas, tout en étant coiffeur au départ, que l’image des cheveux pour les dames était si importante. Les cheveux, c’est ce qui se voit en premier et c’est difficile d’afficher autour de soi une image de personne malade. Nous n’avons pas encore trouvé toutes les solutions, mais tout notre groupe (une cinquantaine de coiffeurs-perruquiers en France, dont une petite dizaine sur la région parisienne, et une vingtaine en Belgique) a vraiment essayé de comprendre la démarche que vous deviez effectuer. Je vais donc vous donner deux conseils. Le plus important est que vous retrouviez votre image. Ensuite, comme je vous le dis moi-même lorsque vous êtes en cabine, il y a la sécurité et l’image. Et quand on réussit à faire ces trois rapprochements, on a une bonne solution. Evidemment, il y a le budget. Dans notre groupe, nous sommes à l’écoute, on s’arrange, on trouve toujours des solutions. Maintenant, si je vous dis que vous n’êtes pas forcément trois fois mieux dans une perruque à 600 € qu’avec une perruque à 200 €, c’est parce que j’ai l’honnêteté de vous le dire. Mais au moment où je vais vous passer la coiffure, il n’y 10 a que vous qui pouvez répondre en disant : « Je suis bien, c’est confortable ». Si vous avez un doute, je vous dirai : « Ne prenez pas celle-là ». Et si vous appréciez une perruque à 800 € et que je trouve qu’elle ne vous va pas très bien, je vous le dirai aussi. L’important c’est la démarche. Quand devezvous la faire ? Le plus rapidement possible. Vous aurez les adresses des prothésistes dans les hôpitaux, les centres de soins, par le personnel médical. Faîtes un choix, pas trop loin de chez vous, au cas où il y ait des soucis de réadaptation et que vous ayez besoin de vous déplacer par la suite. N’hésitez-pas, venez nous voir avant la chimiothérapie pour voir comment nous travaillons. Nous prenons un rendez-vous d’accueil. Nous passons environ une heure ensemble, nous essayons le meilleur rapport qualité-prix pour vous et le plus embêtant est réglé. Le jour où les cheveux commencent à tomber, environ 17 jours après le début de la chimiothérapie, vous revenez voir le prothésiste qui vous fera un shampooing, éventuellement vous coupera les cheveux. Ce qui nous importe, c’est de vous accompagner avant, pendant et après. Quand vos cheveux repousseront par la suite, vous n’aurez peut-être pas envie de retourner chez votre coiffeur avec trop peu de cheveux. Nous pouvons donc prendre en charge cette période. Vous pouvez éventuellement prévenir votre coiffeur habituel en lui disant qu’il ne vous verra peut-être pas pendant un petit moment car vous avez des problèmes de santé, sans rentrer dans les détails, afin qu’il ne s’inquiète pas. Faîtes la démarche, ne dîtes pas : « On m’avait dit que les cheveux tomberaient, mais je n’y croyais pas ». Il vaut mieux prévoir une chute éventuelle, et si les cheveux ne tombent pas, ce sera une bonne surprise. Nous ne sommes que le relais du personnel médical, nous ne parlerons jamais médecine avec vous parce que nous n’y connaissons rien et que ce n’est pas notre domaine. L’important, c’est de vous trouver une coiffure dans laquelle vous vous sentiez bien, belle et rassurée. Si vous n’êtes pas convaincue par le prothésiste qui vous a reçu, rien ne vous empêche d’aller voir ailleurs. L’essentiel est de se sentir bien, car c’est une image que l’on doit renvoyer aux autres et ce n’est pas facile de passer cette période seule. D’ailleurs, nous rions bien chez nous, je ne veux pas dire que nous dédramatisons tout, mais nos clients se sentent en confiance. Méfiez-vous, quand même de certains tarifs, car ce n’est pas parce que vous paierez très cher que ce sera forcément très bien. Il n’y a pas cinquante façons de fabriquer les perruques, il y a la bonne et les mauvaises, c’est tout. Après, ce sera toujours à peu près les mêmes bases, les mêmes fibres. Mis à part, pour ce qui nous concerne, le Dermafixe à l’intérieur de nos perruques qui permettent un meilleur maintien et qui nous assure un petit plus par rapport aux autres prothésistes. Pour les prix, privilégiez plutôt le prothésiste qui vous dira : « Ne prenez pas forcément ce qu’il y a de plus cher ! ». Nous ne sommes pas là pour faire uniquement de l’argent, mais aussi pour vous aider à passer ce cap difficile. N’hésitez pas à me poser des questions en fin de réunion, je suis là pour cela. Je vous remercie. 11 Anne Thiellet, Médecin radiothérapeuthe CRTT de Meudon Je vais vous parler des effets digestifs du traitement des cancers. Ce ne sera pas exhaustif, nous parlerons des principaux effets. Je vous propose de commencer par les effets secondaires de la radiothérapie sur le plan digestif, puis, des effets digestifs de la chimiothérapie et, dans un troisième chapitre, je vous parlerai de la symbolique du goût et de l’alimentation dans le cadre de la prise en charge d’un cancer. Les effets secondaires digestifs liés à la radiothérapie. La radiothérapie est un traitement ciblé sur un organe et les effets secondaires d’une radiothérapie sont donc toujours dépendants de la zone qui va être irradiée. Nous allons passer de la tête aux pieds, en commençant par les irradiations de la tête et du cou. Le principal effet secondaire sera l’irritation de la muqueuse, c'est-à-dire de la paroi qui tapisse la gorge et le cou. La radiothérapie peut amener une inflammation de cette muqueuse et donner, selon la zone que irradiée, des aphtes dans la bouche, des fausses membranes, c'est-àdire un enduit à l’intérieur de la gorge qui peut gêner considérablement l’alimentation, des douleurs de la déglutition qui peuvent être augmentées par le manque de salive (suite à l’irradiation des glandes salivaires). Les traitements sont symptomatiques : des bains de bouche, des antidouleur, des salives artificielles. Au niveau du thorax, irradié dans les tumeurs de l’œsophage, du poumon et également lorsque l’on fait une irradiation du sein (il arrive qu’on irradie une chaîne de ganglions qui est à proximité de la partie interne du sein, appelée la chaîne mammaire interne), il peut également y avoir une irritation de la muqueuse que l’on appelle une œsophagite. Cette œsophagite donne des douleurs à la déglutition. Les traitements sont les antidouleur, les corticoïdes, anti-inflammatoires puissants qui vont traiter l’inflammation locale, des pansements digestifs (Maalox®, Gaviscon®,...) qui vont tapisser les parois de l’œsophage, et bien sûr des précautions alimentaires : éviter les plats épicés, les vinaigrettes, cornichons, tout ce qui contient de l’acidité, la peau des tomates, les frites et privilégier plutôt les purées et tout ce qui est assez onctueux. 12 Au niveau de l’abdomen, il y a l’estomac. Quand on irradie l’estomac, on peut avoir des douleurs, des nausées. Les traitements sont les pansements digestifs, des anti-vomitifs dans le cas de nausées et de vomissements et des traitements pour lutter contre l’acidité de l’estomac. Lorsque l’on est amené à irradier le pancréas ou l’intestin grêle, on peut avoir des diarrhées, des spasmes douloureux, appelés coliques. On va donc donner un régime pour éviter ces diarrhées. On distribue des feuilles de régime et on recommande d’éviter les légumes à fibres qui irritent encore plus le tube digestif, on donne des anti-spasmodiques, c'est-à-dire des traitements contre la douleur qui vont traiter particulièrement les spasmes, et des anti diarrhéiques. Ensuite le petit bassin, ou pelvis. On irradie cette zone dans le cas d’irradiations de l’utérus, du rectum, de la prostate, de la vessie. Les irradiations de la prostate, alternative de plus en plus utilisée au traitement par la chirurgie, entraînent souvent une inflammation du rectum, ou rectite aigue. On va donner des suppositoires avec des anti-inflammatoires pour calmer la douleur. Parfois, les patients pourront présenter une rectite chronique, c'est-à-dire une inflammation à distance du traitement de radiothérapie, pouvant entraîner des saignements. Dans ce cas, on utilisera des traitements locaux à base de cortisone ou d’autres anti-inflammatoires. Et, dans des cas plus importants, des traitements au laser seront prescrits pour supprimer ces saignements. Les effets secondaires digestifs liés à la chimiothérapie. La perte des cheveux, avec ce traitement, est le problème le plus récurent, mais il y a aussi les nausées et les vomissements, l’anorexie, c'est-àdire l’incapacité à se nourrir qu’elle soit physique, psychologique ou autre, puis les troubles intestinaux liés aux troubles du transit digestif. Les nausées et vomissements peuvent être d’intensité variable selon le type de protocole, c'està-dire selon le type de médicaments utilisés. Il y a des chimiothérapies qui donnent peu de nausées, d’autres qui en donnent moyennement, et d’autres qui en donnent beaucoup. Les traitements et les préventions seront donc différents selon chaque type de médicament. Il y des facteurs majorants, par exemple les nausées sont plus fréquentes chez les femmes ; chez les femmes anxieuses ; plutôt chez les femmes jeunes, surtout lorsqu’elles ont le mal des transports ou qu’elles ont vomi durant leur grossesse. En revanche, les hommes, surtout les hommes de plus de 60-65 ans et/ou les hommes ayant des antécédents d’éthylisme, en particulier chroniques, ont moins de risques de nausées. Il est important de traiter ces nausées et vomissements parce que c’est extrêmement désagréable, mais aussi parce que c’est source de difficultés alimentaires, donc de risque d’amaigrissement et de risques de complications, j’y reviendrai. Pourquoi vomit-on lors d’une chimiothérapie ? Parce que l’on a, au niveau du bulbe cérébral, partie basse du cerveau, un centre du vomissement et les produits de chimiothérapie vont agir au niveau de cellules réceptrices au niveau digestif qui vont envoyer un signal vers ce centre du vomissement et cela va déclencher les vomissements. Le médicament de chimiothérapie passe sur ces centres et va donner ce déclenchement plus haut situé. Il y a trois types de nausées / vomissements. Tout d’abord, les vomissements aigus, plus précoces, survenant dans les heures qui suivent une chimiothérapie. Puis, il y a les vomissements retardés qui apparaissent au troisième, quatrième ou cinquième jour après la chimiothérapie. Puis, les vomissements anticipés, c'est-àdire le souvenir qui fait que l’on se met à vomir alors qu’il n’y a pas de circonstances ayant pu déclencher ce processus. Les vomissements aigus sont liés à la toxicité immédiate de la chimiothérapie. Le produit de chimiothérapie va se fixer sur les récepteurs des terminaisons nerveuses digestives qui vont donc envoyer le signal vers les centres du vomissement. Le rôle de la prévention est très important. Il est aussi très important de pouvoir traiter ces vomissements car ils induisent des vomissements retardés et ces fameux vomissements anticipés. La prévention, ce sont ces médicaments de la famille des Sétron (Zophren®, Kytril®,...). Ces médicaments sont assez nouveaux, ils existent depuis une dizaine d’années et ils ont révolutionné la tolérance à la chimiothérapie. Ils vont se fixer sur les récepteurs et vont saturer ces récepteurs et le message qui doit passer vers le centre de vomissement est alors bloqué. Les produits de chimiothérapie arrivent sur les cellules nerveuses mais il n’y aura pas d’information et le centre du vomissement ne sera donc pas sollicité, ou moins. Ces Sétrons existent par voie orale (comprimés de Zophren®, Kytril® et autres) et par voie injectable. Pour un traitement qui donne peu de nausées et vomissements, on donnera des comprimés pendant un ou deux jours. Si l’on pense qu’il y aura plus de nausées, on proposera plutôt une perfusion au moment de la chimiothérapie, plus un relais à la maison en suppositoires ou en comprimés à des doses plus importantes. On peut également donner des corticoïdes (Solupred®, Cortancyl®, Médrol®, Prednisolone®,…). La cortisone est un antiinflammatoire mais a également un bon effet anti-vomitif. Puis, il y a les autres anti-vomitifs plus classiques (Vogalène®, Motilium®,...) qui peuvent être associés à la cortisone et aux fameux Sétrons. Les nausées-vomissements retardés apparaissent au-delà des 24 premières heures et plutôt au 3ème, 4ème et 5ème jour après la chimiothérapie. Ils peuvent survenir à la suite des vomissements dits aigus, c'est-à-dire se prolonger, ou être totalement indépendants. Ils sont plus fréquents chez les femmes, avec certains médicaments de chimiothérapie, par exemple les Sels de Platine. Ils sont aggravés par le ralentissement de la motricité digestive, c'est-à-dire que quelqu’un qui est constipé a plus de risque d’avoir ces vomissements retardés. D’où, l’importance de traiter aussi la constipation. Cette fois-ci, les Sétrons sont inefficaces. Le traitement sera plutôt à base de corticoïdes, d’anti-vomitifs et d’anxiolytiques. Si ces vomissements durent longtemps et entraînent des complications pour s’alimenter, il faut prendre des compléments nutritionnels et essayer de garder un poids stable. Il arrive que l’on fasse des traitements de cortisone ou d’anti-vomitifs injectables lorsque la voie orale n’est pas possible. Les vomissements anticipés surviennent chez un patient qui a déjà vomi et qui a le souvenir de l’endroit où il a reçu un traitement ou d’un endroit où il a déjà vomi. Ce rappel peut engendrer à nouveau des nausées ou des vomissements. 13 Nous connaissons tous cela, pour des choses qui n’ont rien à voir avec la médecine : le souvenir d’une odeur, d’un bruit,... réveillent des sensations agréables ou désagréables. Cela peut être le parfum de l’infirmière, la voix du médecin, la couleur d’une boîte de médicaments,… C’est extrêmement difficile à traiter et cela devient même très compliqué à gérer chez certaines personnes. D’où l’importance de la prévention (moins on a eu de nausées au départ, mieux on se portera par la suite), des anxiolytiques et de l’accompagnement psychologique. Les troubles intestinaux sont les troubles du transit, la constipation. Certains produits de chimiothérapie constipent, les anti-vomitifs constipent, on bouge moins quand on est fatigué, on marche moins. C’est important de traiter une constipation car cela augmente les autres ennuis digestifs et les douleurs abdominales. Dans un autre cas, on peut aussi avoir des diarrhées, engendrées par certains médicaments de chimiothérapie et entraînant une déshydratation. C’est donc important de traiter la diarrhée et de boire beaucoup. Maintenant, nous allons parler, dans un cadre un peu plus général, de l’anorexie et des troubles de l’alimentation. On entend souvent dans les consultations : « Docteur, mon mari ou ma femme ne mange plus » ou « Toutes les choses que j’aimais avant ne me font plus envie. ». Lorsque l’on est dénutri, on perd du poids et quand on perd du poids, on va moins bien. Pourquoi perdons-nous du poids et pourquoi sommes-nous dénutris ? Cela peut être lié au cancer lui-même, en particulier les cancers d’origine digestive ; les traitements ; le syndrome dépressif lié à la maladie et au traitement,… Cela peut avoir des conséquences néfastes. Dans les études, il existe des corrélations entre la perte de poids et l’espérance de vie. Si l’on maigrit beaucoup, il semble que l’on ait une perte de chances. Cela a un impact sur la qualité de vie, parce que lorsque l’on est dénutri, on ne va pas bien, on est fatigué, cela aggrave les toxicités ORL et cutanées (les escarres, par exemple) et on a plus de complications infectieuses. C’est difficile de prévenir une anorexie, mais on peut en parler, démystifier, comprendre,… Pourquoi perdons-nous le plaisir de manger lorsque nous sommes malades ? D’abord parce que nous avons des dégoûts alimentaires. Les 14 traitements agissent sur les bourgeons du goût. Puis, il y a aussi une perte de l’odorat, on ne sent plus de la même façon et on a bien sûr moins envie d’apprécier quelque chose lorsque l’on n’a plus le goût comme avant. On a la bouche sèche, suite à la radiothérapie mais aussi à la chimiothérapie qui passe dans les glandes salivaires et peut donner un goût métallique très désagréable. Les traitements peuvent agresser également les muqueuses de la bouche et on a alors du mal à s’alimenter. Puis, il y a ce que l’on appelle les aversions conditionnées : on peut avoir une aversion pour un aliment lorsqu’il est associé à un évènement pénible. Certains psychologues ont imaginé la technique du bouc émissaire. On décide d’attribuer des aliments que l’on n’aime pas beaucoup à des évènements indésirables. Cela permet de tout focaliser sur cet aliment et lorsqu’on l’exclura de son alimentation, on n’aura plus cette aversion. Il ne faut donc pas associer les choses que nous aimons bien, lors d’une chimiothérapie, car ensuite nous aurons toujours tendance à rapporter à un aliment que nous aimons un évènement qui n’est pas très agréable. Il faut donc essayer de continuer de manger, parce que le repas c’est aussi le partage, le plaisir d’être ensemble. Quand on est trop fatigué et qu’on a perdu l’envie de manger, on perd aussi cette convivialité et peu à peu, un isolement de plus en plus important va s’installer. Lors d’une hospitalisation, le moment des repas est très important. Si l’on vous propose un repas qui n’est pas bien présenté, qui n’est pas agréable, qui n’a pas bonne odeur ou belle texture, on a encore moins envie de manger. Pour nous, il y a un travail à faire dans les cliniques, les hôpitaux, pour essayer de travailler avec des cuisiniers, des diététiciens et faire en sorte que ce moment important dans une journée d’hospitalisation reste un moment de plaisir. Pourquoi pas une vaisselle agréable, des petites quantités d’aliment, des aliments qui soient agréables à voir et à sentir, bien assaisonnés, pour susciter l’envie ? En conclusion, les troubles de l’alimentation sont complexes. Ils sont liés à la maladie, aux traitements, il y a une composante psychique très importante, l’incidence sur la vie familiale, la vie sociale,… D’où l’importance de la prévention, des soins et de l’accompagnement. Rissane Ourabah, Médecin généraliste - Châtillon Je vais vous parler de la fatigue, c’est un sujet qui est très vaste. En médecine générale, en dehors même du cancer, la plainte : « Je suis fatigué » est une plainte très importante, en termes de fréquence et cela relève d’une multiplicité de causes et de problèmes. Je voudrais en premier lieu évoquer les causes de la fatigue, puis, dans un second temps, vous parler de la prise en charge de cette fatigue. Les traitements du cancer, médicaments ou radiothérapie, détruisent les cellules cancéreuses mais aussi des cellules saines, partiellement, et cette destruction entraîne également une sensation de fatigue. Les effets secondaires des médicaments adjuvants, telle la corticothérapie. Puis, la maladie évoluant, les effets secondaires des médicaments entraînent des manifestations comme l’anémie, l’amaigrissement, la dénutrition, l’anorexie. La douleur aussi est une cause de fatigue. Cette asthénie intense est liée à la souffrance.. Les troubles du sommeil provoquent, bien sûr, de la fatigue.. Dans le Larousse la fatigue est définie comme une ‘sensation désagréable de difficulté à effectuer des efforts physiques ou intellectuels’, sensation provoquée par soit un effort intense, soit une maladie ou sans cause apparente. Les infections sont aussi cause de fatigue. Il peut apparaître, lors de l’évolution de la maladie cancéreuse, des maladies qui accompagnent le cancer, en particulier des infections qui déclenchent la fatigue. Si la fatigue liée à un effort physique se répare facilement, par le repos, celle liée le plus souvent à une maladie, a fortiori à un état pathologique comme le cancer, est constante, souvent intense et difficilement réparable par une action thérapeutique. Puis, les manifestations d’angoisse, la dépression accentuent la fatigue: on vit mal sa maladie, on vit mal la prise en charge, les traitements et cela peut induire une dépression qui est cause de fatigue. Dans le cadre du cancer, cette fatigue est présente à tous les stades de la maladie, mais s’aggrave à chaque fois qu’il y a une poussée de la maladie ou lors des métastases. C’est une plainte fréquente et constante de tous les patients qui sont atteints de cancer. Devant cette plainte, le praticien se doit d’évaluer l’intensité, de rechercher la cause et proposer les actions thérapeutiques. Quelles sont les causes de la fatigue chez un patient atteint de cancer ? La maladie elle-même est une cause de fatigue. Cette fatigue est d’autant plus présente que l’installation de la maladie avance. Le cancer est une maladie qui détruit les cellules et cette destruction cellulaire entraîne une sensation de fatigue. De la même façon, les réactions inflammatoires et immunitaires, les réactions de défenses de l’organisme face à la maladie sont elles-mêmes inductrices de fatigue. L’inflammation et l’immunité libèrent des substances, des tas de médiateurs, des interleukines, des interférons, des prostaglandines, et cette libération est génératrice de sensation de fatigue. Quelle prise en charge ? Quant à la prise en charge de la fatigue par le praticien, c’est d’une part la répétition des examens cliniques, des entretiens et la prescription de prises de sang qui permettent d’appréhender cette fatigue et de prendre des mesures thérapeutiques pour lutter contre elle. Grâce à la prise de sang, on obtient la numération sanguine, le dosage de la créatinine, on vérifie le taux de sucre,… ainsi que les facteurs de l’inflammation qui permettent d’apprécier l’intensité de la fatigue et de mettre en place les mesures thérapeutiques qui sont de deux ordres : - les mesures thérapeutiques médicamenteuses, bien qu’il n’existe pas de médicament spécifique contre la fatigue, mais toute une série de médicaments que l’on va prescrire face à des inconvénients qui surviennent lors de la prise en charge du traitement de la maladie elle-même. Par exemple pour l’anémie, on supplémente en fer, en folates, en acide folique, on peut faire des transfusions. Pour les anorexies, il faut varier l’alimentation comme nous l’a bien expliqué le Docteur Thiellet et garder une convivialité alimentaire. 15 Eventuellement, on peut avoir des compléments protidiques ou hyper protidiques pour aider à la restauration des cellules et lutter contre l’amaigrissement. Les pathologies dépressives, anxieuses peuvent être aidées par le soutien, la psychothérapie, mais aussi par les médicaments. Ces médicaments sont utiles, nécessaires, ils permettent d’aider à lutter contre l’angoisse et la dépression qui sont constantes dans l’évolution de la maladie. Dans certaines situations, il y a des diabètes qui sont induits par des médicaments, en particulier par les corticothérapies prolongées, et on doit prendre en charge ces diabètes, dont la fatigue est souvent annonciatrice. - les autres prises en charge, telles la psychothérapie, les conseils de relaxation, les prises en charge alternatives, les massages qui procurent un bien-être nécessaire, et, aussi paradoxal que cela puisse paraître, une rééducation à l’effort, se remettre à marcher et s’imposer de marcher 2 ou 3 fois par semaine pendant une ½ heure, 1 heure, sont d’excellents moyens de lutter contre la fatigue. 16 Virginie Dubois, Diététicienne - Paris Bonsoir à tous. Je travaille en cabinet libéral à Paris et j’interviens également dans la prise en charge des patients à domicile au sein du réseau Onco 94 Ouest où Je prends la relève de mes collègues hospitaliers pour le suivi de patients à domicile, en collaboration avec deux autres diététiciennes. Je suis très heureuse d’intervenir sur la prise en charge diététique, puisque nous rencontrons beaucoup de médecins qui ne savent pas donner de réponses pratiques aux questions que les patients peuvent poser. J’ai choisi de vous présenter ce petit exposé en 2 parties. La 1ère partie reprend l’origine des troubles nutritionnels, sans trop s’attarder ; une 2ème partie présente des conseils diététiques adaptés. Ces conseils sont importants pour combattre les problèmes de dénutrition, perte de poids et perte de masse musculaire qui vont entraîner de la fatigue. Nous intervenons donc sur un impact qui va être décisif dans l’évolution du traitement puisqu’une personne dénutrie aura des complications notables dont la pire conséquence serait qu’une altération de l’état général très avancée pourra minimiser les effets du traitement. Quant aux conseils diététiques par rapport aux effets secondaires, c’est plutôt pour intervenir dans la qualité de vie des patients. Par exemple, certains patients souffrent de diarrhées impérieuses, c'est-à-dire qu’ils n’ont pas la possibilité de se retenir. Ils restent donc bloqués chez eux par peur que la diarrhée ne survienne. Ils ne peuvent pas aller au cinéma, ils ne peuvent pas aller faire des courses,… Les patients ont parfois du mal à aborder ce sujet car cette affection peut paraître minime par rapport au cancer lui-même. Or, il ne faut pas hésiter à l’évoquer lors des consultations chez le cancérologue ou le médecin. Vous pouvez, en général, avoir accès à des consultations diététiques au sein de l’hôpital pour avoir des conseils concrets. A l’origine des troubles nutritionnels, vous avez soit une dénutrition qui entraîne une perte de poids, soit des effets secondaires qui vont dépendre du lieu de la tumeur, du traitement mis en place et éventuellement des réponses de l’organisme face au traitement. Les causes de la perte de poids sont liées à la fois au cancer et au traitement. Il existe des perturbations de l’organisme induites directement par le cancer, notamment un cancer qui va augmenter des dépenses énergétiques. Vous avez tous chaque jour des dépenses énergétiques liées aux fonctions vitales (la respiration, les battements du cœur,...) et ce cancer va demander un apport en énergie supplémentaire, d’où la perte de poids, une perte de masse musculaire, pour contrebalancer ce besoin énergétique et une dégradation de la masse graisseuse. Quand on perd du poids, on perd de la graisse, mais aussi pas mal de muscles. On a aussi la perte de l’envie de manger, l’anorexie, avec des troubles du goût, de l’odorat, des troubles de la digestion, et la fatigue. Perte de poids qui évolue vers une altération de l’état général. Il existe des troubles nutritionnels liés aux conséquences des traitements. La chirurgie va favoriser la perte de poids. Dans le cas de cancers digestifs, certains traitements chirurgicaux sont assez lourds et nécessitent de rester à jeun ou d’être sous alimentation parentérale pendant quelques jours, ce qui ne va pas aider le patient. Les traitements de chimiothérapie altèrent les cellules du tube digestif et entraînent nausées, vomissements, diarrhées et perte du goût. Puis, la radiothérapie entraîne des conséquences localisées comme des irritations, des douleurs et aussi des diarrhées si elle touche le tube digestif. Dans le cancer du sein, après la phase aigue, les femmes, au contraire, subissent une prise de poids liée au traitement sous hormonothérapie. Il y a eu la pathologie, la phase aigue de la pathologie qui est très difficile, et, alors que, au sein de la famille, on pense que c’est enfin terminé, il y a ce traitement sous forme médicamenteuse qui peut passer inaperçu, mais qui va entraîner des complications pour la femme elle-même sous forme d’une prise de poids relativement rapide pouvant aller jusqu’à 10 Kg. Il y a également des consultations diététiques proposées, sans mettre en place une alimentation restrictive, mais en changeant un peu son alimentation. 17 Le premier conseil diététique que je peux vous donner est de vous peser régulièrement, environ 2 fois par semaine, à la même heure, avec la même tenue, en notant votre poids. Ne jamais attendre que la perte de poids soit très importante avant de consulter un médecin. Une perte de poids de 10 % (par exemple, quelqu’un qui pèse 70 Kg et qui perd 7 Kg) doit inciter à consulter. Que faire en cas de perte de poids ? On conseille d’augmenter un peu la prise alimentaire. Faire un petit déjeuner, une collation dans la matinée sous forme d’un laitage ou d’une compote, le déjeuner, un goûter avec du laitage, du pain ou des biscuits, le dîner, et éventuellement en soirée une autre petite collation, en trouvant des choses qui fassent plaisir au patient et qui lui sont d’une vue agréable. Il faut consommer des aliments plus riches en énergie, donc enrichir ses préparations. Au lieu du lait demi-écrémé, on peut passer au lait entier, par exemple, remplacer le fromage blanc à 20 % de MG par du fromage blanc à 40 % de MG, de la crème fraîche, du beurre, le pain du matin peut être remplacé par de la brioche… Dans le cas de patients souffrant d’autres complications, comme l’hypercholestérolémie ou le diabète, il faut bien entendu une prise en charge plus adaptée. Donc, dans chaque groupe d’aliments, essayer de trouver les aliments un peu plus caloriques pour avoir, dans le même volume, un apport énergétique supplémentaire, rajouter de la crème dans les potages, de la confiture dans les fromages blancs,… Pour les préparations salées, plutôt que de faire un potage de légumes simple, on peut rajouter 40 ou 50 g de jambon mixé, des œufs, une poignée de fromage râpé, de la crème fraîche et également du lait en poudre, sans dépasser une cuillère à soupe de lait en poudre par personne,… Dans les préparations sucrées, on peut rajouter du miel, de la confiture dans les yaourts, du fromage blanc dans la compote,… Les compléments nutritionnels sont des éléments de substitution à l’apport énergétique même si on essaie de favoriser les repas et de mettre les compléments nutritionnels en dehors des repas, en général espacés de deux heures, pour que le déjeuner ou le dîner reste l’élément fondamental. J’ai apporté quelques exemples que vous connaissez certainement déjà. Vous avez différents formats. Vous avez des laits aromatisés, des crèmes dessert. Au niveau de la texture, pour ceux qui y ont goûté, c’est moins 18 agréable, si ce n’est qu’au niveau du goût, ils ont fait énormément de progrès ces dernières années et on peut avoir une ressemblance avec une crème dessert type Danette, par exemple. Vous avez également des jus de fruits, vous avez des nouveaux produits salés pour ceux qui préfèrent, des soupes, par exemple. Il y a certains parfums qui peuvent être réchauffés, quand vous avez un lait au chocolat, vous pouvez tout à fait le passer au micro-onde et donc remplacer votre chocolat au lait par ce produit ; le parfum café peut être chauffé également. Vous avez des arômes neutres, des petites bouteilles de lait où vous mettez ce que vous voulez, un peu de vanille, un peu de café en poudre, un arôme que vous aimez. Ces petits produits, en général, sont en format de 200 ml en moyenne, les petits pots font 125 g comme un yaourt traditionnel, et dans ces petits formats, c’est important de le préciser, vous avez quand même 20 g de protéines. Les protéines, c’est notamment ce qui sert à faire la masse musculaire et 20 g de protéines, pour vous donner un exemple très pratique, ça ressemble à une portion de steak haché ou un filet de poisson. Donc, en général, une à deux petites bouteilles en plus dans la journée, cela vous fait deux portions de viande ou de poisson, ou deux œufs ; c’est donc très important de les prendre, d’autant plus qu’ils ont une teneur en fer qui est importante aussi. Il faut savoir quand même que ces petites bouteilles sont prises en charge par la sécurité sociale. Vous avez des pharmacies qui, également, peuvent vous les proposer sans participation supplémentaire de votre part, on peut même vous les livrer à domicile si vous êtes fatigués. Donc une prise en charge qui est quand même très agréable. J’en viens maintenant aux effets secondaires et les rapports à l’alimentation, notamment la fatigue. A une personne fatiguée, on conseille de faire plusieurs petits repas dans la journée ; prendre un peu plus de liberté et ressentir les moments où l’on a envie de manger, pour en profiter. Ce n’est pas parce qu’il est 15 h 00 et que ce n’est pas l’heure de manger, qu’il ne faut rien avaler. Si vous sentez que vous avez envie de manger quelque chose, il ne faut pas vous priver. Préférez les aliments faciles à mâcher. Quand on est fatigué, on n’a pas envie d’avoir la viande rouge, par exemple, à mâcher. Donc préférez les purées, les potages, les laitages, les yaourts à boire, et pourquoi pas, par exemple, faire un petit milk-shake, un peu de glace à la vanille avec un peu de lait, cela rafraichit et c’est nutritif. lactose qui n’est pas dégradé peut être retrouvé plus loin dans le tube digestif, dans le côlon notamment, et entraîner des diarrhées. Donc là, il s’agit uniquement de ne pas consommer de lait. Choisissez des aliments que vous aimez, qui ne nécessitent pas de préparation. Et puis, évitez les aliments qui vont irriter la muqueuse du tube digestif, comme l’alcool, le vin, la bière, le café, le chocolat, qui sont des aliments qui peuvent irriter davantage. Il y a un conseil simple, qui est de cuisiner quand vous n’êtes pas fatigués et de congeler, prendre des plats cuisinés tout prêts. Donc, le conseil principal est de faire plusieurs petits repas dans la journée quand vous êtes fatigués. La diarrhée est un phénomène important qui peut nuire à la qualité de vie. Elle fait perdre beaucoup d’eau, il faut donc compenser cette perte et boire à peu près deux litres d’eau par jour. Quand je dis boire deux litres d’eau, ce n’est pas avoir la bouteille de 1.5 litres et absolument la finir avant la fin de la journée. Cela peut être aussi des tisanes, du thé, des potages, des bouillons ; donc, il s’agit de boire deux litres d’eau en comptant toutes les boissons qu’on peut ingérer. Privilégiez aussi une alimentation pauvre en fibres, à base de riz, de pâtes, de pommes vapeur, de carottes. En général, ce qu’il faut retenir dans la diarrhée, c’est qu’il faut plutôt mettre de côté les fruits et légumes. Cela étonne parfois certains patients qui me disent : « Les fruits et légumes, c’est très bon pour la santé, dans le cancer il faut en manger ». C’est vrai, mais quand il y a un problème de diarrhée, cela peut être important pendant quelques jours de les mettre de côté, de manger plutôt des choses comme du riz ou des pâtes qui vont limiter les diarrhées. Il y a un régime mis en place à l’hôpital qui s’appelle le régime sans résidus qui est un régime que l’on va proposer aux patients qui ne peuvent pas aller à la selle et qui est composé d’aliments qui n’entraînent pas de selles. Dans la carotte, il y a des fibres particulières qui vont retenir l’eau dans le tube digestif. Evitez les fruits et les légumes crus, les céréales, le pain complet, le lait également. Je parle bien du lait et non pas des yaourts. Quand vous avez la diarrhée, vous pouvez tout à fait consommer des yaourts et du fromage. Là, le problème vient du lactose. Il faut savoir que les personnes, avec l’avancée en âge, ont un déficit en lactase qui est une enzyme qui dégrade le lactose et ce Pour les nausées et vomissements, en plus des médicaments que le médecin peut vous donner, les conseils qui peuvent être faciles à appliquer, consistent toujours à faire plusieurs petits repas dans la journée. Quand vous avez des nausées, si vous voyez l’entrée, le plat, le yaourt, le fruit, vous vous dîtes que vous n’allez jamais tout manger. Donc, prenez ce qui passe le plus facilement, un petit plat, et puis pourquoi pas le yaourt et une compote deux heures après le repas. Privilégiez les aliments froids ou tièdes, quand vous êtes nauséeux, ce n’est pas la peine qu’il y ait des odeurs de cuisson, cela ne passera pas du tout. Evitez le poisson, prenez des viandes froides, éventuellement du fromage blanc qui passe plutôt bien. Evitez les aliments lourds à digérer et les aliments épicés. Mangez léger avant et après le traitement. Il est vrai que les nausées peuvent parfois être tellement importantes que le patient, trois jours après la chimiothérapie, peut ne pas manger du tout. Je dirais, et ce sera ma phrase de conclusion, qu’il faut essayer de se forcer un peu, en prenant des aliments froids et faciles à avaler, cela peut être des produits laitiers qui passent en général assez bien. Dans le cas de sécheresse de la bouche, qui va surtout toucher les cancers ORL, il faut privilégier les aliments moelleux et mixés. Ne pas hésiter à rajouter de la sauce, de la crème fraîche, de la mayonnaise, du beurre dans les préparations. Ainsi, vous luttez contre la sécheresse de la bouche mais aussi contre la perte de poids. Evitez les aliments acides et les aliments épicés. Les pommes de terre peuvent également entraîner des irritations au niveau de la bouche. Supprimez ou réduisez le tabac et l’alcool, notamment à proximité du traitement. 19 Les conclusions que je pourrais donner par rapport à cette présentation, c’est de surveiller son poids. Il faut monter de temps en temps sur la balance et voir si le poids reste stable. Veillez toujours à vous alimenter. Ce n’est pas parce que vous avez des nausées qu’il faut complètement bannir l’alimentation. C’est vrai que ce n’est pas évident, mais les conséquences de la dénutrition, comme nous l’avons vu, peuvent être importantes. Je vais quand même dire un petit mot sur la prise de poids dans le cancer du sein. L’intérêt, pour limiter la prise de poids serait surtout de faire l’inverse que pour la perte de poids, c'est-à-dire, dans chaque catégorie, prendre les aliments les moins caloriques. Prendre du lait écrémé ou demi-écrémé, des yaourts natures. Evitez le sucre d’ajout, tout ce qui est fruits sec et viandes grasses. Cela laisse tout de même un choix assez large parmi les aliments. N’hésitez pas à rajouter des herbes aromatiques, des légumes aromatiques et surtout n’associez pas le régime à une restriction dans l’assiette. Vous pouvez tout à fait manger équilibré et vous faire plaisir sans qu’il y ait de régime contraignant et frustrant. Merci de votre attention. 20 Gaëlle-Anne Estocq J’invite les orateurs à me rejoindre à la tribune. Nous sommes à la disposition de chacun d’entre-vous pour répondre aux questions que vous pourriez avoir. Qui a envie de poser la première question ? Une participante Bonjour. Je suis suivie au CRTT de Meudon. Avant de poser des questions, je voudrais juste faire une remarque. C’est la première fois que je viens ce soir et je voudrais juste savoir s’il y a une majorité de patients présents ou plutôt des personnes du domaine médical. Est-ce qu’il y a beaucoup de patients ? Il y a donc moins de patients que de professionnels… Ma remarque, c’était en tant que patiente que je voulais la faire. Au CRTT, j’ai vu vos affiches, et là je m’adresse directement à l’association, et je dois dire que j’ai été choquée par cette affiche parce que j’ai trouvé qu’elle était extrêmement négative. C’est quelque chose que je voulais vous dire. Je suis très agréablement surprise par ce qui s’est dit ce soir, mais cela ne reflète pas du tout ce qu’il y avait sur l’affiche. Je vous le dis tel que je l’ai ressenti, parce que j’ai envie de vous le faire partager et je pense que cela peut peut-être la prochaine fois attirer plus de patients. Si vous aviez titré votre soirée : « Comment lutter contre les nausées ? , Comment résoudre les problèmes d’anorexie ? », cela aurait été totalement différent. Cette affiche, j’ai trouvé qu’elle était extrêmement noire et je me suis dit que je voulais venir pour vous le dire. Parce que tout ce que j’ai vu sur votre affiche est tout ce qui est abordé entre le patient et son oncologue et je me suis demandée quelle était votre valeur ajoutée en tant qu’association et ce que vous alliez apporter de plus aux patients. Je ne sais pas quel est vraiment le but et comment a été créée cette association, c’est la première fois que je viens, mais il y a peut-être un tout petit effort de marketing à faire pour donner un peu plus envie aux patients de venir, en donnant le côté plus positif, en mettant en valeur qu’un traitement ce n’est pas seulement des pertes de cheveux, des nausées,..., c’est aussi se soigner, c’est aussi trouver des solutions. J’ai aussi une remarque pour Monsieur Plantade. Vous dîtes : « Il faut que vous veniez, que vous choisissiez votre perruque et surtout ne vous occupez plus de rien ! ». Et bien, moi, je dis au contraire qu’il faut que nous nous prenions en charge, que nous arrêtions d’être assistés. Il faut que nous choisissions seuls notre perruque, il faut que nous ayons envie de nous faire plaisir et que nous nous en occupions. On doit arrêter d’assister les malades qui, je le précise, sont encore en état physique et ont encore la possibilité de se déplacer, d’aller chez un coiffeur et de se faire belle ou beau. Il faut nous dire : « Votre perruque, c’est votre problème ». C’est mon point de vue. Monsieur Plantade Quand je dis : « Ne vous occupez plus de rien », je veux dire : « Occupez-vous de vous ! ». La perruque, quand vous l’avez choisie, vous n’avez plus rien à faire, elle est là, elle est chez moi, elle vous attend. La participante Si, nous devons vivre avec. Une fois que nous l’avons choisie, même si elle est chez vous, il faut penser que nous allons la porter, savoir comment nous allons la porter, l’image que nous voulons donner. Monsieur Plantade J’ai dû mal m’expliquer. Ce que j’ai voulu dire, c’est qu’à partir du moment où vous avez choisi votre coiffure, vous vous libérez d’un poids énorme. La participante Ce n’est pas d’aller chercher la perruque qui nous libère d’un poids énorme, c’est de vivre avec notre perruque. Je ne sais pas, mais pour les femmes qui en portent, c’est de vivre avec qui est le poids. Ce n’est pas d’aller la choisir, c’est facile et c’est même à la limite plutôt agréable. Je pense qu’il faut plutôt pousser les personnes à dire : « C’est votre problème, c’est comme cela que vous allez lutter, que vous allez avancer ». Il y a des choses sympas aussi dans le fait de choisir une perruque. On peut aussi varier, en en ayant plusieurs ; il y a des tas de variations possibles pour vivre avec. Monsieur Plantade Moi, je vois environ 1000 clientes par an et je n’en ai pas vu beaucoup dire : « Tiens, je vais me marrer, je vais prendre du roux alors que je suis blonde ». Cela m’arrive rarement. Quand on a discuté une heure avec la cliente, on a la propre image de cette cliente et il faut conserver cette image. Et quand je lui dis de ne plus s’occuper de rien, c’est parce que la perruque, c’est moi qui vais la couper pour la rendre conforme à son image. 21 Gaëlle-Anne Estocq Je réponds juste brièvement à votre question concernant les réseaux. Il y a un certain nombre de textes de loi qui ont été écrits, définissant les réseaux et la nécessité, pour exercer en cancérologie, de participer à un réseau de cancérologie. C’est écrit dans le texte de loi. Après, il y a le Plan Cancer, dont vous avez sûrement entendu parler. L’objectif est que tous les patients ayant un cancer soient inclus dans des réseaux de soins. Ces réseaux se constituent sur le territoire national, que ce soit sous forme régionale ou sous forme de petits territoires. Ces réseaux sont amenés à avoir une double composante : faire travailler entre eux des établissements qui ont parfois des statuts différents et faire le lien entre la ville et l’hôpital. Chaque réseau, en fonction de son territoire et de son histoire est un peu différent. En ce qui nous concerne à Onco 92 sud, nous existons au niveau statutaire et associatif depuis 2003 ; mais au niveau existentiel, avec un local, des salariés et des actions depuis août 2005. L’une de nos particularités, c’est que nous avons tout de suite mis en place un groupe de travail pour aller vers les patients. Donc, c’est pour cela qu’il y a des réunions comme celle de ce soir qui est le 3ème , et les autres évènements dont je vous ai parlé en début de soirée. Madame Thiellet voulait rebondir sur les problèmes de cheveux. Je lui donne le micro. Anne Thiellet Je voulais dire, pour moi qui suis tous les jours au contact des patients, qu’une femme est belle parce qu’elle a des cheveux, mais qu’elle peut être très belle aussi sans avoir de cheveux. C’est vrai qu’il faut accompagner quelqu’un qui va perdre ses cheveux au cours d’un traitement, mais nous sommes dans un monde actuellement ou l’apparence est importante et je crois que nous sommes quand même autre chose que notre apparence Je veux bien croire qu’il soit difficile de perdre ses cheveux, j’en suis consciente parce que c’est l’image que nous avons tous les jours, mais nous pouvons être très belles aussi sans nos cheveux. Ce n’est pas une obligation de porter une perruque, nous pouvons être belles aussi avec un foulard, un chapeau, simplement par un regard, un sourire. C’est à nous autres, soignants ou accompagnants, de dire cela aussi. Personnellement, je parle bien sûr beaucoup des problèmes de cheveux à mes patientes mais je dis aussi qu’il ne faut pas se précipiter au contraire. S’il faut une perruque, il sera toujours le temps de le faire. Parfois, avec les casques, on 22 n’a pas forcément besoin d’avoir une perruque, il faut essayer de dédramatiser cela. J’avais aussi une question par rapport aux cheveux et les teintures. La question que l’on me pose beaucoup est : « Qu’est-ce que je peux faire comme couleur ? Je commence une chimiothérapie, je vais peut-être perdre mes cheveux, j’ai les cheveux blancs, est-ce que je peux continuer à faire des couleurs ? Mes cheveux commencent à repousser, est-ce que je peux faire une couleur ? ». C’est ce genre de choses dont j’aimerais que vous nous parliez. Monsieur Plantade A partir du moment où vous commencez à faire une chimiothérapie, en principe, la médecine dit qu’il ne faut plus faire de coloration. Nous avons posé la question aux médecins, mais nous n’avons pas obtenu de réponse. Une participante Moi, j’ai une réponse de mon coiffeur. Tout au début de mon traitement, je n’avais pas encore perdu mes cheveux et j’ai voulu faire une couleur. Mon coiffeur a complètement refusé en me disant que si la chimiothérapie me faisait perdre mes cheveux, je pouvais dire que c’est la teinture qu’il m’a faite qui m’a fait perdre les cheveux et je pourrais alors me retourner contre lui. Monsieur Plantade Je pense que les coiffeurs n’ont pas trop ce souci. C’est la réponse qu’il vous a donnée. Nous avons toujours eu un souci avec la couleur et le milieu médical. Nous n’avons jamais été très bien vus avec toutes les teintures d’oxydation. L’Europe fait que cela s’améliore, mais les couleurs sont moins belles, c’est tout. De toute façon, ce qu’il faut savoir, c’est qu’à partir du moment où il y a chimiothérapie, vous ne devez plus faire de couleurs d’oxydation, vous ne faîtes plus non plus de couleurs temporaires parce que votre cheveu va être chimiquement transformé et cela ne va rien arranger. Supposons que, en règle générale, après une chimiothérapie, vous perdiez vos cheveux au bout de 17 jours, vous ne profiterez pas longtemps de la couleur. C’est donc inutile, même si ce n’est pas cela qui fera tomber vos cheveux. Après les soins, dernière chimiothérapie terminée, nous comptons qu’il y aura toujours en moyenne 3 semaines où le principe de la chimiothérapie reste dans le corps. Les cheveux ne repoussent donc pas encore, et, personnellement, je rajoute 3 semaines pour me dire que cela a bien fait le circuit total. Au-delà de ce temps-là, j’estime que je peux refaire des colorations, style Casting de Loréal, c'est-à-dire non pas des oxydants mais des révélateurs, beaucoup moins forts, environ 3 mois après la dernière chimio. Un participant Docteur Ourabah, en cas de fatigue, y a-t-il une modification de la composition chimique du sang ? Est-ce que l’on perd des globules rouges, des plaquettes ? A partir de 6 mois, on peut refaire des teintures d’oxydation sans aucun problème. Mais, je pense que le mieux est d’attendre, car de 0 à 3 mois, on a environ 1,5 cm à 2 cm de cheveux sur la tête. Mais chez vous, si vous pouvez vous permettre d’avoir un peu de cheveux colorés et de ne plus mettre cette perruque, c’est vrai que c’est soulageant, et on a une image avec des cheveux recolorés. Rissane Ourabah Ce sont toutes les modifications biologiques, en particulier l’anémie, qui entraînent la fatigue, ce n’est pas la fatigue qui entraîne l’anémie. La fatigue est la conséquence de la dénutrition, des effets secondaires de la maladie, des effets secondaires de médicaments, de la lutte de l’organisme contre la maladie. Tout ceci déclenche la fatigue mais toutes les modifications qui peuvent se produire dans le sang sont les conséquences ou de la maladie ou des effets secondaires et celles-ci entraînent la fatigue. Quand je parlais des traitements palliatifs de ces anomalies biologiques, ce sont des traitements de l’anomalie et pas du tout de la fatigue. En revanche, je peux dire aussi que quand on a perdu ses cheveux et qu’ils vont repousser, on a des chances qu’ils repoussent un peu plus colorés qu’ils ne l’étaient au départ. Parce qu’il y a un blocage de la mélanine pendant toute cette période durant laquelle le cheveu est parti et, au moment où elle se libère, elle peut arriver en quantité. Autre exemple, les cheveux peuvent repousser un peu frisés, avec une frisure qui n’est pas forcément celle que nous souhaiterions, mais c’est quand même encourageant parce que les cheveux repoussent. Pour ne pas parler que des cheveux, je voudrais évoquer les sourcils. Dès que l’on commence une chimiothérapie, il faut éviter les faux cils à cause de la colle et des problèmes au niveau des glandes lacrymales au moment de la chimio. Il ne faut donc pas rajouter de soucis aux ennuis. Une participante J’ai pratiqué les faux cils, justement, car quand on n’a pas de cils, on est très sensible au vent et les faux cils protègent. C’est génial ! Monsieur Plantade Tout est génial, à partir du moment où nous n’avons pas de problème. La cliente qui se fera faire une coloration d’oxydant alors qu’il lui aura été déconseillé d’en faire une mais qui n’aura pas de problème dira : « Pour moi, c’était super ! ». Mais, le jour où il y aura un problème, que dira t-elle ? La participante Mais, pour les faux cils, il n’y a pas beaucoup de risques… Monsieur Plantade Il n’y a jamais de risques, sauf lorsque le problème arrive… Mais ceci dit, c’est vrai que pour le vent, les faux cils sont efficaces. Anne Thiellet C’est quelque chose d’important à dire, car on nous demande tout le temps de prescrire des médicaments contre la fatigue. Nous voudrions bien, mais cela n’existe pas. Les vitamines dans le cas d’un cancer, ont peu de chances d’être utiles et les études sur leurs effets sont contradictoires. Il y a même des études qui montrent que donner des vitamines peut, au contraire, aggraver un cancer. D’autres études, pour d’autres types de vitamines, ont montré qu’au contraire, cela pouvait être un support. Donc, il ne sert à rien d’aller se ruiner, car ce sont des traitements qui ne sont pas pris en charge, pour acheter des vitamines qui, a priori, n’ont pas beaucoup de bénéfices. Les seules choses qui peuvent aider sont le traitement de l’anémie par l’EPO, transfusion de fer. Maintenant, il y a des traitements de médecine d’accompagnement. Nous savons très bien que nos patients vont prendre les traitements que nous leur proposons et des études ont montré qu’environ la moitié d’entre eux prennent d’autres choses, un petit peu parallèles. Gaëlle-Anne Estocq Je souhaiterais mettre un bémol, car si l’homéopathie est faiblement dosée et a priori sans trop de risques, il faut se méfier, par exemple, de la phytothérapie. Je vous donne un exemple très concret. Dans la pathologie du Sida, beaucoup de gens sont déprimés et prennent en auto médication du millepertuis. On s’est aperçu, car il y avait de nombreuses populations chez lesquelles le virus n’était plus contrôlé, qu’il y avait des 23 interactions entre le millepertuis et les médicaments contre le Sida. Donc, en pratique, il n’y a pas d’études, mais avec la phytothérapie, il faut rester méfiant. Anne Thiellet Nous avons un pharmacien dans la salle, cela serait intéressant d’avoir son avis. Monsieur Illouz Effectivement, nous voyons, qu’il faut pallier un peu le côté psychologique. Les gens, en effet, prennent des médicaments anti-cancéreux, mais viennent nous demander des médicaments pour lutter contre la fatigue, qui n’ont peut-être pas un effet extraordinaire, mais qui les aident psychologiquement. Je pense qu’il faut pallier ce côtélà qui est aussi très important. Le cas du millepertuis, effectivement, est connu, mais, parfois, cela aide les patients de prendre quelque chose et je ne vais pas aller contre cette demande. C’est vrai que cela ne leur met pas une super forme, mais ils viennent demander et on ne va pas leur dire : « Non, ne le prenez pas, cela ne sert à rien ». Anne Thiellet Peut-être que les personnes qui sont ici ont un avis sur ces traitements. Un participant Avant de répondre à cette question, je voudrais réagir à ce qu’a dit Madame tout à l’heure, car j’ai réagi complètement à l’inverse. Comme quoi nous n’avons pas toujours les mêmes perceptions. J’étais en pleine chimiothérapie à l’hôpital de jour quand on m’a donné l’information sur cette soirée. J’ai trouvé cela génial, j’ai pensé que j’allais entendre d’autres points de vue, entendre développer des choses que mon médecin n’a pas le temps de développer avec moi. Pour moi, l’expérience que j’ai, notamment par rapport à la fatigue, est un traitement complémentaire en homéopathie et surtout acupuncture. J’avais une séance d’acupuncture la veille de ma chimiothérapie et le lendemain. Quand je n’en n’avais pas, ce qui m’est arrivé notamment pendant les vacances, je voyais la différence. L’acupuncture m’a donné une pêche d’enfer. Peut-être que cela ne réussit pas chez tout le monde, mais pour moi cela a été très bénéfique et je ne peux que me féliciter des conseils qui m’ont été donnés à ce niveau là. Cela ne marche peut-être pas dans tous les types de cancer. 24 J’avais un lymphome non-hodgkinien, alors peut-être est-ce adapté à ce genre de chose… En revanche, pour la phytothérapie, j’avoue que j’ai été tenté à un moment donné, mais j’ai un traitement avec de l’anti vitamine K, donc le millepertuis était également déconseillé. Les médecins m’ont dit : « Pour l’homéopathie et l’acupuncture, pas de problèmes, mais la phytothérapie, il faut une certaine prudence ». D’ailleurs, Docteur Ourabah, tout à l’heure dans votre exposé sur la fatigue, vous n’avez pas cité l’acupuncture. Quel est votre avis sur la question ? Rissane Ourabah Sur l’acupuncture, je n’ai pas d’avis particulier. Sur les médecines d’accompagnement ou les médecines alternatives, je dirais, hormis dans le cas du millepertuis qui vient d’être soulevé, pourquoi pas ? Chacun trouvera dans chacune des thérapeutiques d’accompagnement le bénéfice qu’il peut en attendre, que ce soit un bénéfice placebo ou un bénéfice réel. En revanche, le message que je dois faire passer est que le protocole de la prise en charge du cancer doit être maintenu et poursuivi en accord avec l’oncologue. Un participant Je suis sophrologue et psychothérapeute. Je voulais savoir si certaines personnes ont déjà fait de la sophrologie afin de travailler sur la fatigue. Une participante Avant d’être malade, oui. Le participant La sophrologie est très intéressante pour soigner tous les gens qui sont dans la déprime, qui sont très fatigués, pour les reconditionner en quelque sorte, pour libérer toutes les tensions négatives accumulées et aussi pour se recharger en énergie. Je pense que la sophrologie est une relaxation qui permet énormément de choses, pour les patients souffrant de maux divers et cela permet à beaucoup de gens de reprendre un peu ce goût à la vie qu’ils ont perdu. Vous parliez d’alimentation, de diététique, il faut savoir que, pour les gens qui n’ont plus d’appétit, la sophrologie permet aussi de recadrer, d’accepter progressivement une nouvelle image de soi, de redonner le goût à la vie et aux choses. Rissane Ourabah Je n’ai pas détaillé, j’ai parlé de la relaxation et autres thérapeutiques de relaxation, mais il n’y a pas d’exclusivité pour telle ou telle technique. Gaëlle-Anne Estocq Dans les techniques aussi un peu originales et pas utilisées partout, il y a par exemple à l’Institut Gustave Roussy, une consultation d’auriculothérapie. L’auriculothérapie aide beaucoup pour la gestion des nausées, des vomissements. Mais ce n’est malheureusement pas encore développé dans notre territoire. Anne Thiellet Je pense que chacun va trouver, selon sa façon de vivre et sa personnalité, ce qui va l’aider. Une participante Je voulais poser une question sur les effets secondaires de la chimiothérapie, en particulier dans la baisse des défenses immunitaires. Je voulais savoir s’il y a des précautions à prendre à partir du moment où vos défenses immunitaires sont vraiment très basses. Anne Thiellet Vous savez, comme moi, qu’avant de faire une chimiothérapie, on fait toujours un bilan sanguin pour vérifier le taux de globules dans le sang. Il y a en particulier les globules blancs et une sorte de globules blancs qui s’appellent les polynucléaires neutrophiles qui servent à se défendre contre les infections. Nous sommes vigilants sur le chiffre de ces polynucléaires neutrophiles et nous ne faisons jamais de chimiothérapie lorsque ce chiffre est trop bas, classiquement au dessous de 1500 éléments par mm3. Nous savons que dans les chimiothérapies, il y aura des chimiothérapies qui ne font pas trop baisser les globules, d’autres qui feront moyennement baisser les globules et d’autres qui les feront beaucoup baisser. Donc, on adapte une chimiothérapie au poids et à la taille d’un patient. Lorsque l’on va donner une chimiothérapie qui pourra amener une très grande baisse de ces globules, on va alors associer la chimiothérapie à ce que l’on appelle des facteurs de croissance, médicaments qui vont stimuler la fabrication, à partir des cellules souches qui sont dans la moelle, de ces petits soldats de défense immunitaire. C’est ne pas faire de chimiothérapie lorsque les globules sont trop bas et faire un traitement préventif pour éviter que ces globules ne diminuent trop. Maintenant, avec une chimiothérapie qui fait baisser les globules, on prévient le patient que, entre 14 et 18 jours, c'est-à-dire environ la fin de la deuxième semaine après la chimiothérapie, c’est le moment où il y aura une baisse des globules. On lui demande donc d’éviter d’être en contact avec des personnes qui ont des maladies infectieuses, des enfants qui ont la varicelle, c’est-à-dire d’éviter de se trouver dans des situations où il a de grands risques d’attraper des infections. Il faut, par ailleurs, traiter toute pathologie à ce moment là qui risque de devenir grave si elle n’est pas soignée. Au cours d’une chimiothérapie, on est moins apte à se défendre. Dès que l’on a une angine, un mal de dents, une toux, il faut aller immédiatement voir son médecin généraliste qui sera à même de juger s’il y a un risque infectieux, de faire les examens complémentaires nécessaires et de traiter. En revanche, il ne faut pas faire de soins dentaires pendant cette période, ce n’est pas le moment parce que les risques infectieux sont plus importants lors d’une diminution de globules. Il y a également certains vaccins qui sont contre indiqués, mais, il est préférable de se faire vacciner contre la grippe plutôt que d’attraper une grippe. Sous chimiothérapie, la grippe sera plus grave et la fatigue plus importante. Cependant, il y a un moment pour faire le vaccin contre la grippe, ce n’est pas n’importe quand. Il ne faut pas le faire au moment où les globules sont au plus bas. Une participante Quand les défenses immunitaires ont baissé, peuvent-elles peuvent remonter ? Anne Thiellet A chaque chimiothérapie, on fait une prise de sang. Imaginons un schéma de trois semaines. Vous avez la chimiothérapie, les globules restent stables pendant une semaine. Ils commencent à baisser vers le 10ème - 12ème jour, sont au minimum entre le 15ème et le 17ème jour, et, en principe, remontent vers le 20ème jour. C’est un schéma classique, même si, chez certaines personnes globules ne vont remonter au bout des 23ème, 24ème ou 25ème jour. C’est pour cette raison qu’une chimiothérapie prévue au 21ème jour pourra être reculée d’une semaine si les globules ne sont pas assez élevés. 25 Les globules sont fabriqués dans la moelle des os. Dans cette moelle, il y a des cellules souches, c'est-à-dire des cellules indifférenciées. Elles vont en permanence fabriquer des nouveaux globules. La chimiothérapie va faire baisser les globules, mais pendant ce temps-là, il y en a de nouveaux qui se fabriquent. Cependant, parfois, ils ne remontent pas assez vite, ou une chimiothérapie va les faire trop baisser. Ce sont des cas où l’on va prescrire des facteurs de croissance, c’est-à-dire des injections qui vont stimuler la fabrication de globules. Vous connaissez peut-être l’histoire des chambres stériles, où sont traitées certaines pathologies par des chimiothérapies très fortes, lesquelles vont faire baisser les globules blancs à un taux extrêmement bas, ce qui rend la vie du patient à risque s’il rencontre un microbe. Dans ces cas là, les patients vont être hospitalisés dans des chambres stériles où les visites seront limitées. Et puis, au bout d’un certain nombre de jours, ils vont sortir de l’aplasie et remonter leur taux de globules. Gaëlle-Anne Estocq Dans certains lymphomes ou dans le myélome, il y a des anomalies de production au niveau de la moelle ou des cellules anormales qui sont produites. Il existe aussi des traitements très toxiques sur les lymphocytes, une autre population de cellules qui servent à se défendre plutôt contre les virus ou qui potentialisent les fameux polynucléaires neutrophiles. Dans ce cadre, il peut être prescrit en préventif un comprimé de Bactrim®, qui est un antibiotique. Chez les greffés, auxquels on va ensuite réinjecter leurs cellules souches, lorsqu’ils vont sortir de la chambre stérile, on va donner : des médicaments à dose préventive contre l’herpès, le fameux Bactrim® qui sert contre des pathologies opportunistes, c'est-à-dire des pathologies qui ne se développeront pas chez la totalité de la population mais simplement chez les gens qui n’ont plus de défenses immunitaires. Mais ce sont des cas très particuliers. Une participante Serait-il possible, lors des chimiothérapies qui sont parfois vomitives, d’intégrer l’alimentation parentérale avant d’atteindre des pertes de poids assez importantes ? Anne Thiellet Nous recommandons aux patients de se peser régulièrement, et s’il y a une perte de poids 26 importante, des nutritions parentérales pourront être proposées. La participante Mais est-il possible de l’envisager avant ? Anne Thiellet Non, cela n’a pas d’intérêt. On a le droit de maigrir un petit peu, cela n’est pas très grave non plus. La participante Et s’il y a des vomissements ? Anne Thiellet Ce ne sont pas les vomissements qui, dans une chimiothérapie, entraînent la perte de poids car le temps des vomissements est assez court. C’est plutôt le reste qui provoque l’amaigrissement. La participante Je pensais que dans ces périodes de chimiothérapie où le patient est réhydraté, il serait possible d’utiliser aussi l’alimentation parentérale. Rissane Ourabah Oui, mais ces produits ne se stockent pas dans l’organisme. Gaëlle-Anne Estocq En fait, après les chimiothérapies, il n’y a pas forcément d’hydratation. Cela dépend des produits utilisés : on fait des hydratations quand on utilise des produits qui ont une grosse toxicité pour les reins et pour la vessie. Virginie Dubois Et puis, l’alimentation parentérale représente un risque infectieux important. C’est en général le mode d’alimentation proposé en dernier recours. Entre deux, il y a aussi l’alimentation entérale, qui passe par un tube, la plupart du temps par le nez et qui permet de fournir l’alimentation liquide directement à l’estomac. Anne Thiellet Souvent, au cours d’une chimiothérapie, les patients maigrissent beaucoup la première semaine, voire la deuxième, puis, à partir de la troisième semaine, ils reprennent du poids. Une participante En plus on n’a pas forcément la même réaction à chaque chimiothérapie. Au début, cela a été très difficile, je n’ai pas mangé pendant plusieurs jours. A la deuxième séance, cela a été plus court et puis à la troisième un peu mieux et enfin à la dernière, j’ai pu manger 1 ou 2 heures après. Donc, s’il y avait un protocole très lourd avant de commencer, ce serait dommage car ce n’est pas toujours nécessaire et chaque patient réagit différemment, il est difficile de prévoir. Je voulais dire aussi, au sujet des perruques, que même si l’on est préparée, lorsque la perte des cheveux arrive, on change d’avis. Quand j’ai su que cela allait se produire, j’étais prête à ne rien porter, à mettre un petit foulard. Et puis, quand cela s’est produit, face à la réaction de l’entourage, j’ai changé d’avis parce que ce n’était pas aussi facile que je le croyais. Je suis d’accord avec vous, Monsieur Plantade, dans la mesure où si l’on va tout de suite voir un perruquier, avant d’avoir perdu ses cheveux, cela permet d’être mieux préparée. Il ne faut pas oublier que lorsque les cheveux tombent, on arrive dans une période de fatigue intense et faire la démarche après 3 ou 4 semaines de traitement, cela demande un gros effort. En revanche, si l’on est déjà allé voir le perruquier, on a franchi une étape importante. La qualité de l’accueil est aussi très importante. Je suis allée dans un grand centre très réputé où l’on ne s’est pas du tout occupé de moi, alors que j’avais pris rendez-vous très longtemps à l’avance. La démarche étant déjà difficile, j’étais très déçue et je suis ressortie en me disant que je ne reviendrai pas. Puis, sur les conseils d’amis, je suis allée dans un petit salon où l’accueil était très chaleureux. Et, contrairement à ce que dit Madame, moi, j’ai eu besoin de cet accompagnement sur le moment. Parce que cela n’est pas simple de porter une perruque pendant des mois : on a très froid quand il fait froid et quand les chaleurs arrivent, c’est très difficile à supporter. Donc c’est vraiment une épreuve de perdre ses cheveux et de passer par tout cela. Pour certains, le foulard peut suffire, mais moi, par exemple, j’ai des petits enfants et ils n’imaginaient pas que je puisse être sans cheveux. Il a bien fallu que, pour eux aussi, je fasse cet effort. Il faut arriver à vivre normalement avec tout cela et j’ai été très étonnée, au retour des grandes vacances, d’entendre une maman à l’école (je suis revenue avec des cheveux très courts) qui n’avait pas réalisé que j’avais traversé une longue période difficile, me dire : « Quelle drôle d’idée d’avoir changé de tête ! ». Je me suis dit que si elle connaissait l’histoire, elle ne m’aurait pas fait ce genre de réflexion. Monsieur Plantade D’un autre côté, c’est rassurant. La participante Quelque part, oui. Elle a du penser que je m’étais coupée les cheveux sur un coup de tête, comme quoi les gens perçoivent différemment les choses par rapport à ce que l’on perçoit nous-mêmes. Ce que je voulais dire aussi, c’est que la chimiothérapie peut varier d’une séance à l’autre et ceci est imprévisible. Il y a des périodes de très grande fatigue et d’autres moments plus faciles. Rissane Ourabah C’est parce que vous êtes moins bien sur le plan psychique à un moment donné et vous allez donc être plus fatiguée à thérapie égale. Les messages que l’on fait passer paraissent un peu réducteurs, mais en fait ce sont des messages généraux, adaptables à chaque individu. C’est le suivi régulier avec votre médecin, l’accompagnement, les échanges qui permettront d’adapter ces conseils à la situation. Anne Thiellet C’est quelque chose que l’on prend de plus en compte désormais. Je m’en rends compte au fur et à mesure de mon évolution médicale. Avant, on parlait peu de la fatigue, maintenant il y a toute une recherche clinique sur la fatigue, sur les compréhensions des facteurs. C’est important car quand on se sent moins fatigué, on va mieux psychologiquement. Et puis, on se traite mieux et on guérit mieux. Même l’industrie pharmaceutique travaille autour de la fatigue. Un participant Serait-ce une conséquence des lois Kouchner, sur l’accompagnement de la douleur ? Anne Thiellet L’idée que la prise en charge doit être globale, qu’on ne traite pas une maladie mais une personne sur tous les plans (psychologique, physique, douleur, fatigue,..) a certes été soutenue par des lois, mais si un médecin exerce ce métier, c’est pour soigner une personne et pas une maladie, ou alors il doit faire autre chose comme métier. Rissane Ourabah Ces notions de prise en charge globale, de dialogue, d’interaction entre le soignant et le soigné existaient bien avant ces lois. 27 Une participante Après les chimiothérapies surviennent souvent des problèmes au niveau buccal, avec une sécheresse de la bouche et aussi, quelques fois, des champignons. Les bains de bouche ne sont pas très efficaces. Y a-t’il des recherches pour trouver des traitements plus adaptés ? Anne Thiellet Pour la sécheresse de la bouche, c’est un vrai problème. Dans le cadre des radiothérapies, par exemple, l’irradiation des glandes salivaires pour les tumeurs ORL est un gros problème parce que les patients ont la bouche sèche, perdent le goût, ne mangent pas bien. Il y a des essais de radiothérapie plus ciblées sur les glandes salivaires, des traitements protecteurs avec certaines irradiations ORL, on donne des protecteurs salivaires, appelés Thioles. La chimiothérapie passe par les glandes salivaires et modifie le goût. Il n’y a malheureusement aucun moyen d’empêcher cela, il n’y a pas de protection des glandes salivaires en cours de chimiothérapie. J’ai lu qu’il fallait éviter de manger avec des couverts métalliques quand on a déjà un goût métallique dans la bouche, mais je ne sais pas trop si cela sert à quelque chose. Les mycoses sont un réel problème. A part les traitements préventifs contre les mycoses et les traitements des mycoses, il n’y a peu de choses à faire. Rissane Ourabah Il n’y a que les anti-mycosiques, même s’ils sont de plus en plus performants et de plus en plus puissants, mais on en reste toujours là. Ou alors, restent les anciennes techniques, comme l’alcalisation, les bains de bouche au bicarbonate de soude. Anne Thiellet Il y a les mycoses buccales, les mycoses anales, les mycoses vulvaires… Cela dépend aussi de la personne, il y a des gens qui font des mycoses et d’autres qui n’en font pas. Rissane Ourabah Cela est dû à une diminution des défenses immunitaires locales, du fait de l’irradiation. Une participante Qui persiste dans le temps ? 28 Rissane Ourabah Pas toujours. Anne Thiellet La plupart des effets secondaires d’une chimiothérapie disparaissent une fois celle-ci terminée ou à distance : on irradie une glande mammaire, la peau va rougir, puis elle pèle et redevient normale. Mais, sur les glandes salivaires, par exemple, on a peu de récupération sur le plan de la salive. Dans le cas d’une radiothérapie de la prostate, si le patient a une rectite, celle-ci ne va pas guérir spontanément, elle peut guérir avec des traitements locaux, mais elle ne partira pas spontanément. Il y a certains médicaments de chimiothérapie qui vont donner une toxicité au niveau des terminaisons nerveuses. Cela s’appelle la neuropathie. Ce sont des Sels de Platine ou certains médicaments de la famille des Taxanes qui peuvent donner ce genre de réaction, en particulier le Taxol®. Cela donne des troubles très désagréables, des sensations de picotements, de coups d’aiguille, l’impression de marcher sur du sable,… Il y a des chances que cela s’améliore avec le temps, mais parfois de façon incomplète. On donne des traitements de vitamines, des anxiolytiques, des neuroleptiques. La plupart des effets secondaires liés à une chimiothérapie passent dans les mois suivants, il faut être patient. Les effets de la chimiothérapie sur la fonction ovarienne sont irréversibles la plupart du temps. Cela peut être réversible sur des femmes jeunes. Mais plus on s’approche du moment d’une ménopause, moins on a de chances que la fonction ovarienne redémarre. Il y a certains cancers pour lesquels on peut donner sans aucun problème un traitement substitutif hormonal, mais pour d’autres pathologies comme les tumeurs mammaires, il y a une contre indication à prendre un traitement substitutif hormonal à cause des œstrogènes. Donc, dans ces cas, on aura les effets secondaires d’une ménopause que l’on ne pourra pas traiter : bouffées de chaleur, sécheresse de la peau et des muqueuses, risque d’ostéoporose, baisse de la libido, avec tout ce que cela engendre sur le plan personnel, sur le plan de la vie de couple,… Une participante Vous avez dit que les femmes avaient un terrain plus favorable pour les vomissements. Je voulais savoir si c’est parce que les récepteurs sont différents ou si c’est simplement psychosomatique. consultés en cas de douleur ou autre problème. C’est un effet secondaire. Anne Thiellet Je n’ai aucune réponse, je ne peux pas vous dire. Tout ce que je sais, c’est que plus elles sont jeunes et plus elles sont anxieuses, plus les femmes ont des nausées et des vomissements. Je ne crois pas que les récepteurs soient différents. Rissane Ourabah C’est une complication. Ce n’est pas un effet secondaire de la chimiothérapie. Un participant Par rapport aux problèmes évoqués concernant les infections dans la bouche, d’après mon expérience, c’est le seul effet secondaire que j’ai eu au moment de la chimiothérapie. J’ai eu des aphtes et je les ai traités par l’homéopathie de manière extrêmement efficace, notamment à base de Borax®, qui se trouve facilement en pharmacie. J’ai une question à poser, peut-être pour une séance ultérieure. Pendant toute ma chimiothérapie, je n’ai quasiment eu aucun effet secondaire de tout ce qu’on m’avait signalé. Pas de perte d’appétit, pas de perte de poids, pas de vomissements. J’avais un excellent moral, j’ai juste perdu un peu de cheveux, mais il m’en restait plus qu’à mon oncologue. J’ai juste eu quelques aphtes que j’ai donc traité par l’homéopathie. En revanche, j’ai été très surpris trois mois après la fin de la chimiothérapie. J’ai découvert que j’avais un cœur qui avait été très abîmé par un des produits de la chimiothérapie, et j’ai eu un syndrome cave supérieur, avec un caillot de trois centimètres qui s’est coincé dans le bout du cathéter. Comment qualifier cela ? Est-ce aussi un effet secondaire ? Cela pourrait-il être évoqué ultérieurement ? Gaëlle-Anne Estocq Effectivement, quand nous avons proposé cette réunion, nous avons souhaité évoquer ce qui était le plus gênant dans la vie des patients. Dès que l’on utilise les fameux « produits rouges », les anthracyclines, il faut faire un bilan du cœur avant la première chimiothérapie et, en fonction des résultats, soit on refait un bilan en cours, soit on refait un bilan à la fin. Donc, c’est quelque chose qui est à gérer, en première ligne, par les oncologues qui prescrivent la chimiothérapie, et en deuxième ligne, par les médecins traitants qui peuvent être Quant aux problèmes de cathéter qui se bouchent, cela arrive malheureusement, c’est une malchance, une complication. Anne Thiellet Dès que l’on met un corps étranger dans le corps, il y a un risque de complication lié à ce corps étranger, dont les risques de thrombose. On s’en rend compte par exemple le jour où vous avez une phlébite. On parle du syndrome cave supérieur, cela veut dire que la circulation sanguine dans les vaisseaux situés au dessus de l’aorte est bloquée. Mais c’est exceptionnel. Maintenant, l’obligation légale serait d’expliquer à un patient que l’on reçoit pour la première fois en consultation qu’il va recevoir un traitement et faire défiler toutes les complications possibles de tous les médicaments qu’il va recevoir. Ce ne serait pas une heure de consultation, ni deux, mais trois ou quatre heures qu’il nous faudrait... Cependant, les psychologues nous disent qu’audelà de trois ou quatre informations, on n’intègre plus les informations. Donc, il y a d’une part, le problème de l’information et d’autre part, celui de la quantité d’information. Un patient est-il à même d’entendre en consultation : « Vous allez avoir vingt ou vingtcinq effets secondaires ! » ? Nous avons ce souci de vous informer et, vous, vous avez envie de recevoir des informations, mais avez-vous envie de tout savoir ? Une participante Je travaille dans un service de cancérologie, je m’occupe de l’accueil de patients qui ont une chimiothérapie. C’est vrai que, même s’ils ont reçu beaucoup d’informations, quand je les reçois, je me rends compte qu’ils n’en ont retenu que trois ou quatre, sur lesquelles ils se sont focalisés. C’est pour cela que, quand on parlait des perruques tout à l’heure, il y a certains patients pour qui cela va être un problème énorme : on va leur dire qu’il y a des solutions, qu’ils peuvent aller voir un perruquier tout de suite, mais que cela ne sera peut-être pas nécessaire,... 29 Puis, il y des patients avec lesquels on ne peut pas du tout aborder ce sujet, parce que c’est trop pénible à entendre pour eux. Donc, pour toutes les informations données aux patients, je pense que c’est vraiment du cas par cas. Nous essayons de donner beaucoup d’informations, mais nous savons qu’au bout de trois ou quatre séances, il y aura encore des questions, parce qu’il y aura des choses qui auront changé au cours du traitement, des réactions qui seront modifiées,… Quand on prend en charge un patient pour une chimiothérapie, nous savons très bien que cela sera différent à chaque fois et que sa réaction personnelle sera différente de celle du patient qui est juste à côté de lui. Anne Thiellet C’est vrai que quand on met un port-a-cath, nous devrions insister sur les risques, parce que cela fait partie des complications de la mise en place d’un port-a-cath. Gaëlle-Anne Estocq Ceci dit, le port-a-cath est proposé versus la perfusion dans la veine. Or, il y a des produits très irritants pour les veines. La médecine est aussi une question d’équilibre : on pèse dans la balance ce qui apporte le plus de bénéfice contre ce qui est le plus risqué. Quand un médecin fait une proposition, c’est qu’il a réfléchi au problème, ce n’est pas anodin. On propose ce type d’outil pour perfuser parce que cela permet au produit de passer directement dans une veine où le flux est plus important, il y a moins de risques nécrotiques. Si vous n’y voyez pas d’inconvénients, nous allons terminer maintenant nos échanges, parce qu’il peut être tard pour certaines personnes. Je vais vous distribuer des questionnaires d’évaluation, pour que vous puissiez nous dire ce que vous pensez de notre soirée, cela peut nous permettre d’évoluer. N’hésitez-pas à faire toutes les remarques que vous jugerez utiles, ce qui était bien, ce qui ne l’était pas,... Et puis, il y a un petit buffet pour ne pas repartir l’estomac vide... Merci beaucoup de votre présence. 30 Onco 92 sud Réseau de prise en charge de personnes touchées par le cancer dans le sud des Hauts-de-Seine Onco 92 sud s'adresse : - aux patients - à leur entourage - aux professionnels et institutions de santé pour : - permettre une prise en charge globale et optimale du cancer - promouvoir la prise en charge médico-psycho-sociale du cancer s'étend sur : - les 14 communes du territoire de santé 92-1 Onco 92 sud 11, rue du Soleil Levant - 92140 - Clamart Tél. : 01 46 30 18 14 Fax : 01 46 30 46 71 E-mail : [email protected] Site Internet : www.onco92sud.com 31