LA MALADIE DE WILSON A PROPOS DE 4 CAS

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LA MALADIE DE WILSON
A PROPOS DE 4 CAS
I. SASSENOU, R. AFIFI, I. BENBELBARHDADI, A. AOURAGH, M. BENAZZOUZ, A.E. ESSAID, M.F. SEBTI.
s’exprime cliniquement qu’à l’état homozygote, alors que
les hétérozygotes ne développent jamais la maladie.
Dans cette affection, il existe 2 anomalies probables dans le
métabolisme du cuivre : (3, 10, 12, 20).
• Diminution du taux de cérulo plasmine
• Diminution de l’élimination biliaire de cuivre.
On rapporte 4 cas de maladie de Wilson diagnostiqués tardivement, ce qui souligne l’intérêt du dépistage surtout des
formes familiales.
RÉSUMÉ
La maladie de Wilson est une affection métabolique
héréditaire liée à l’accumulation de cuivre dans l’organisme. Notre étude concerne 4 malades, 3 garçons et
1 fille avec un âge moyen de 21,75 ans. Tous nos patients
ont une forme évoluée de la maladie de Wilson. Le
diagnostic est posé par la confrontation anatomo-clinique et biologique (cuprémie, cupriurie et céruloplasmine sanguine).
Le traitement est basé sur la D-penicillamine. L’évolution a été marquée par le décès de 3 malades dans un
tableau d’HTP sur cirrhose hépatique. Ceci souligne
l’intérêt du diagnostic précoce par le dépistage chez les
membres de la famille.
MATÉRIEL ET MÉTHODE
L’étude porte sur 4 malades hospitalisés dans le Service de
Médecine C (Pr. M.F. Sebti) (Hôpital Ibn Sina) entre 1992
et 1995.
Tous nos malades ont bénéficié d’un examen clinique
complet, et paraclinique, notamment un examen ophtalmologique à la lampe à fente, un bilan cuprique, une endoscopie haute, une laparoscopie et une ponction biopsie hépatique lorsque le bilan de crase le permet.
INTRODUCTION
La maladie de Wilson est une affection métabolique,
héréditaire, à transmission autosomique récessive, elle ne
LES OBSERVATIONS : (Voir tableau)
Tableau récapitulatif des observations des malades
Obs.
Manifestations
Hépatiques
Manifestations Manifestation
Neurologiques
Oculaire
Cuprémie
(V.N : 0901,20 mg/l)
Cupriurie
(V.N :
0-1,06 mg/j)
Ceruloplasmine
sanguine (V.N. :
200-400 mg/l)
Traitement
Evolution
N°1
Cirrhose du foie avec
HTP en décompensation
hémorragique
(PBF non faite)
Syndrome
extrapyramidal
(-)
0,56
0,100 mg/j
169 mg/l
Dpenicillamine
Décédé 1 an
après le début
du traitement
N°2
Cirrhose du foie avec HTP
en décompensation œdématoascitique (BPF faite)
(-)
(-)
0,36 mg/l
1,398 mg/j
70 mg/l
Dpenicillamine
Evolution stationnaire après 6 mois
de traitement
N°3
Cirrhose du foie avec HTP
en décompensation œdématoascitique
Syndrome
extrapyramidal
Anneau de
keiserfleisher
0,95 mg/l
0,12 mg/j
80 mg/l
Dpenicillamine
Décédé
N°4
Cirrhose du foie avec HTP
en décompensation
œdémato-ascitique
(PBF :cirrhose hépatique)
Syndrome
extrapyramidal
(-)
0,14 mg/l
0,07 mg/j
80 mg/l
Dpenicillamine
Décédé
Adresse : Dr I. SASSENOU, Clinique Médical C, Centre hospitalier
Universitaire Ibn Sina. Rabat. MAROC.
Adresse personnelle : Mr Ismail SASSENOU : Im. 10, Appt. 2, Hay Al
Mountazah, C.Y.M. Rabat Maroc.
Médecine du Maghreb 1996 n°60
22
Observation n°1 :
C’est un patient de 27 ans, issu d’un mariage consanguin
(1er degré) qui a présenté 6 ans auparavant une hématémese de moyenne abondance, le bilan fait était en faveur
d’une cirrhose du foie avec une hypertension portale, l’Ag
Hbs (+), l’Ac Hbs (-), l’Ac Hbc (+), et l’Ac antiHCV (-).
L’évolution était bonne sous sclérothérapie, après le malade a développé des troubles neurologiques faits de perturbation de la marche, tremblement et syndrome extrapyramidal. Le bilan cuprique orientait vers une maladie de
Wilson, et le malade a été mis sous D-pénicillamine. Le
patient est décédé 1 an après le début du traitement dans un
tableau hémorragique.
Observation n°2 :
C’est un jeune de 15 ans, issu d’un mariage non consanguin sans antécédents pathologiques, qui a présenté il y a 3
mois un syndrome oedèmato-ascitique, l’examen neurologique est normal.
L’échographie abdominale, la fibroscopie haute, la laparoscopie et la ponction biopsie du foie sont en faveur d’une
cirrhose hépatique avec hypertension portale, le bilan
cuprique a orienté vers une maladie de Wilson. Le malade
prend alors de la D-pénicillamine, et l’évolution est
station-naire, après 6 mois de traitement.
Observation n°3 :
Patient de 22 ans, issu d’un mariage consanguin de 2ème
degré. Dans ses antécédents on note une crise d’épilepsie à
l’âge de 12 ans, avec un frère décédé d’une cirrhose du foie
dont l’origine n’a pas été étiquettée.
Le début remonte à 1 mois par l’apparition d’un syndrome
oedèmato-ascitique, l’examen neurologique retrouve un
syndrome extrapyramidal. Le bilan conclue à une maladie
de Wilson dans sa localisation hépatique, neurologique et
ophtalmologique. Le patient est décédé d’une encéphalopathie sur infection du liquide d’ascite.
Observation n°4 :
Patiente de 23 ans, sans antécédents pathologiques, hospitalisé pour syndrome oedèmato-ascitique, le bilan biologique est en faveur d’une maladie de Wilson dans sa forme
hépatique et neurologique. La malade est mise sous D-
Médecine du Maghreb 1996 n°60
I. SASSENOU, R. AFIFI, I. BENBELBARHDADI, A. AOURAGH,
M. BENAZZOUZ, A.E. ESSAID, M.F. SEBTI.
pénicillamine mais décédé après 1 an de traitement dans un
tableau infectieux et encéphalopathique.
DISCUSSION
Dans les condition,s normales, après son absorption par la
partie proximale du tube digestif, le cuivre est transporté
dans le sang sous plusieurs formes :
- Dans les hématies, 50% du cuivre est lié à la superoxyde
dismutase, le reste du cuivre érythrocytaire soluble est
e
n
partie lié à des aides aminés.
- Dans le plasma, 90% du cuivre est lié à la céruloplasmine, les 10% restants sont liés soit à l’albumine soit à
des acides aminés. Après sa captation hépatique, le
cuivre est lié de façon prépondérante à la métallothionéine, cette forme est ensuite rapidement dégradée et
utilisée dans la synthèse de certaines enzymes et dans la
céruloplasmine. L’excrétion du cuivre est biliaire. (9)
Notre étude a intéressé 4 malades dont l’âge moyen est de
21,75 ans avec des extrêmes allant de 15 à 27 ans, en effet
(9) la maladie de Wilson est une affection de l’enfant et de
l’adulte jeune. On a recensé 3 garçons pour 1 fille. Il n’y a
pas de prédominance de sexe (9, 11).
Sur le plan clinique le foie est l’organe qui est le premier
atteint (14). Les 4 malades sont vus au stade de cirrhose du
foie, 3 d’entre eux avec décompensation oedémato-ascitique, 1 cas avec hémorragie haute.
Dans 3 cas, il y avait une atteinte neurologique qui s’est
exprimée par un syndrome extrapyramidal. Cette manifestation est variable (2, 13) dominée essentiellement par
l’atteinte extra-pyramidale, aussi on peut avoir un syndrome cérébelleux, un syndrome pyramidal, des crises d'épilepsies, et parfois des troubles psychiques.
L’atteinte oculaire est notée dans 1 cas sous forme d’un
anneau de Keiser fleisher. Il s’agit d’une précipitation de
sels de cuivre en granules irréguliers à la face postérieure
de la membrane de Descemet (2). Une cataracte peut être
notée (9).
Dans notre étude, aucun cas d’anémie hémolytique n’a été
rapporté. Le mécanisme de cette anémie est mal connu
tantôt il est assimilé aux grandes hémolyses observées chez
les cirrhotiques dont le caractère est à la fois corpusculaire
et extra-corpusculaire, tantôt cette anémie est liée aux
anomalies du métabolisme du cuivre (8).
LA MALADIE DE WILSON…
1 cas d’hypersplénisme, avec un syndrome de consommation. Le TP est effondré dans tous les cas. Ces anomalies
sont décrites dans la littérature (8, 19).
Le bilan cuprique montre une baisse de la cuprémie chez
3 malades, dans 1 cas la cuprémie est normale, la céruloplasmie sanguine est basse dans tous les cas, la cupriturie
quand à elle est augmentée chez les 4 malades. Ces perturbations du métabolisme du cuivre ne sont pas constantes
voire non spécifiques, en effet la céruloplasmine plasmatique est normale, parfois élevée dans 5% des cas (9). De
même la cuprémie peut être normale. Le dosage de la
cupriurie seule ne permet pas de différencier la maladie de
Wilson des autres hépatopathies (9).
La PBF faite dans 2 cas n’a pas montré d’aspect spécifique
de la maladie de Wilson, cependant au cours de cette maladie on a uniquement des aspects de fibrose et de stéatose.
La certitude n’est faite que par le dosage de cuivre hépatique qui est augmenté (19). Cependant pour des raisons
techniques, ce dernier n’a pu être dosé, à noter qu’il peut
être normal dans certains cas (15).
Chez nos malades, on n’a pas d’atteinte rénale, ni ostéoarticulaire, ni cutanéo-muqueuse. Ces manifestations peuvent être représentées par une tubulopathie, une lithiase
urinaire (18), une ostéoporose une ostéomaladie, des fractures spontanées, une chondrocalcinose et une hyperpigmentation cutanée (9).
Tous nos malades sont vus à un stade évolué de la maladie.
Le traitement proposé est la D-pénicillamine.
En effet dans les formes graves de cette pathologie, le
traitement médical garde sa place, (16), puisqu’il permet la
stabilisation et même la régression de l’atteinte neuropsychiatrique et ophtalmique.
L’instauration précoce de la D-penicillamine permet d’éviter la cirrhose du foie (14, 16), mais si celle-ci est déjà ins-
23
tallée, la chirurgie par la greffe hépatique reste la meilleure
alternative chirurgicale (17).
L’évolution était jugée surtout sur les troubles neurologiques, qui se sont amendés avec disparition du tremblement et diminution des autres troubles extrapyramidaux,
cependant on a déploré 3 décès, dont 1 par décompensation
hémorragique et 2 par encéphalopathie sur infection du
liquide d’ascite.
Pepin dans un travail comportant 30 cas, traités par la Dpenicillamine, l’évolution de signes neurologiques a été
favorable chez 21 sur 24. Sur 18 patients sans atteinte
hépatique notable, 2 sont décédés du fait de l’évolution
cirrhogène,e, après 5 et 15 années de traitement, 3 des 8
cas de cirrhose d’emblée évoluée sont décédés moins d’un
an après la mise en route du chélateur. L’anneau de Keiser
fleisher a disparu chez 11 patients, en moyenne en 5 ans.
Les manifestations hématologiques et rhumatologiques
n’ont pas été influencées par la pénicillamine (16).
Cependant le traitement par la D-penicillamine peut s’accompagner d’effet secondaire à type d’exagération des
troubles neurologiques, thrombopénie ou manifestation
allergique (5). D’autres alternatifs thérapeutiques existent à
type de triéthylène tétramine dihydrochloride (TETA) ou
sulfate de Zinc (8, 10).
CONCLUSION
Le pronostic de la maladie de Wilson dépend de la précocité du traitement, aussi faut-il penser au Wilson devant tout
syndrome extra pyramidal du jeune mais aussi devant un
ictère récidivant sans étiologie évidente.
L’idéal serait d’instaurer le traitement à un stade asymptomatique, ce qui permet d’éviter toutes ses complications.
De ce fait apparaît l’intérêt du dépistage et des enquêtes
familiales systématiques devant un cas de Wilson.
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