le rapport Doligé - Inventaire général du patrimoine culturel

2011
[
LA SIMPLIFICATION DE
S
NORMES APPLICABLES AUX
COLLECTIVITES LOCALES]
Mission parlementaire
du Sénateur Eric Doligé
Mission sur la simplification du droit applicable aux collectivités territoriales
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Mission sur la simplification du droit applicable aux collectivités territoriales
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Synthèse
Exponentiel, instable, obscur, l’édifice normatif est devenu au fil des ans, un véritable
engrenage pour les collectivités territoriales. Alors qu’il devrait favoriser la culture de projets et
soutenir les initiatives locales, il apparaît comme un frein à la compétitivité, une source de
complexité voire une perte de temps… Dans un contexte financier difficile où les collectivités locales
exercent de nombreuses prérogatives autrefois dévolues à l’Etat, la prolifération normative incarne
la fracture entre d’un côté, un Etat central, prescripteur de dépenses et de contraintes nouvelles et
de l’autre des collectivités locales, devant sans cesse mobiliser des crédits nouveaux pour financer les
dispositifs pensés et conçus au niveau national. Face à l’empilement des textes, la perspective d’une
simplification semble fédérer l’ensemble des acteurs locaux. Au-delà d’un examen du stock de
normes existantes, ils aspirent tous à une évolution du mode de gouvernance, afin que les problèmes
quotidiens que rencontrent les collectivités locales dans l’application des normes soient durablement
pris en compte et qu’un dialogue équilibré s’installe entre l’échelon central et local.
I/ Une simplification urgente face à l’engrenage normatif qui entrave l’action des collectivités
territoriales
1. Changer la gouvernance normative entre l’Etat et les collectivités locales
1.1. Mettre en place une instance d’évaluation partagée des normes pour prendre en compte la
réalité territoriale
Au niveau législatif, la culture de l’évaluation des politiques locales est balbutiante et non
structurée. De nouvelles réformes sont adoptées dans l’ignorance des effets réels des politiques
existantes. L’absence d’évaluation partagée cristallise des conflits entre collectivités locales et Etat.
La mission propose de conditionner tout projet de réforme concernant les collectivités locales à une
évaluation partagée. A cette fin, elle recommande la création d’une instance indépendante
comprenant des personnels de l’Etat et des collectivités locales et disposant d’un système
d’information partagé. Elle suggère d’intégrer des critères pragmatiques et financiers précis dans les
études d’impact, qui souffrent d’un biais trop juridique en s’inspirant des tests de capacité et de
performance développés notamment aux Pays Bas et en s‘appuyant sur une modélisation de
l’impact financier par type de collectivité.
1.2. Structurer les processus de consultation pour permettre aux collectivités territoriales
d’exercer « un contre pouvoir normatif »
Au niveau européen les collectivités locales sont insuffisamment associées aux négociations
des directives qui les concernent néanmoins en tout premier lieu. De nouveau l’impact financier
n’est pas évalué et le temps imparti à la consultation des collectivités locales ne permet pas
réellement aux associations de collectivités locales d’exercer leur capacité critique. La mission
préconise d’intégrer dans la fiche d’impact simplifiée l’impact financier, de s’assurer que les projets
de réglementation sont présentés à la commission consultative d’évaluation des normes (CCEN),
d’associer les collectivités aux groupes de travail et de définir un mode de consultation formelle des
collectivités locales.
Au niveau national, chaque ministère voire chaque direction ministérielle a développé une
méthode plus ou moins participative en direction des collectivités locales. Dans la mosaïque de
commissions existantes, seul le comité des finances locales et ses émanations, la commission
consultative d’évaluation des charges et la CCEN semblent véritablement être en mesure de
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développer une approche transversale de la réglementation applicable aux collectivités locales.
Néanmoins, il est permis de s’interroger sur la capacité des élus à exercer un contre pouvoir normatif
efficace, en l’absence de véritables instruments de contre-expertise. C’est pourquoi la CCEN devrait
pouvoir bénéficier de l’expertise d’un pôle de compétences financier pour vérifier la pertinence des
études d’impact présentées.
Enfin, concernant les normes professionnelles opposables, trop souvent le choix est fait de
rendre la norme dans sa totalité obligatoire, et de se désintéresser des évolutions de la norme. Il est
impératif de responsabiliser sur les incidences de la normalisation :
- tant les collectivités locales en organisant un passage en CCEN des normes même non
obligatoires dès lors qu’elles peuvent avoir une incidence financière lourde pour les
collectivités et en les incitants à faire remonter les difficultés sur le terrain ;
- que les ministères en les obligeant :
à réaliser un suivi ministériel des difficultés engendrées et des surcoûts, qui devront
faire l’objet d’un rapport annuel présenté en CCEN,
à étudier chaque disposition de la norme avant de la rendre opposable dans son
intégralité en distinguant les objectifs qui doivent être obligatoires des moyens qui
ne sauraient être que des référentiels,
à réexaminer les dispositions de portée obligatoire ou pas pour les normes déjà
opposables lors des révisions de la norme.
2. Alléger les contraintes des collectivités face aux normes rigides et coûteuses dont elles
assument seules quelle que soit leur taille, la responsabilité de leur application
2.1 Changer en profondeur la culture normative de l’Etat
Excès de défiance et zèle juridique se traduisent par une véritable prolifération normative qui
nuit à la capacité d’action et d’innovation des territoires. La multiplication des textes et l’instabilité
de la règle de droit plaident pour un changement en profondeur de la culture normative de l’Etat :
- en imposant une obligation de résultat plutôt que de moyen,
- en privilégiant les référentiels de bonnes pratiques aux textes réglementaires à portée
contraignante,
- en limitant à 15 le nombre de ministères et en empêchant qu’un texte puisse porter le
nom d’un ministre ou d’un parlementaire,
- en créant un outil de planification de l’ensemble de l’activité réglementaire validée en
début d’année en Conseil des ministres et définissant l’ensemble de la stratégie
normative,
- en déterminant des règles de stabilité minimale dans le temps des textes associées à
une clause de révision périodique, selon l’exemple des « sunset law » américaines.
Afin de réduire le stock normatif, il est proposé à l’instar de certains pays de l’OCDE, de fixer
un objectif chiffré de textes à supprimer par an et de lancer un programme de réduction annuel
des normes.
Par ailleurs, au niveau législatif comme réglementaire, les collectivités locales subissent le
manque de lisibilité des textes. Très souvent les décrets renvoient à des codes et sont extrêmement
obscurs pour un non juriste. Afin de réduire la complexité du droit applicable aux collectivités locales
et de prendre en compte les difficultés d’application de la norme, la mission recommande d’initier
une démarche de suivi de la qualité et de l’application des normes au sein de chaque ministère en
créant un véritable « service après vente » de la norme.
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La compétitivité et la réactivité des territoires sont également entravées par la surenchère
normative et la mauvaise transposition des textes communautaires. Génératrice de surcoût, la sur-
réglementation est en effet source de complexité inutile Une collectivité qui souhaite ainsi aménager
un terrain pour accueillir une entreprise internationale et qui serait en concurrence avec une
collectivité d’un autre Etat membre, risque d’être désavantagée dans le choix final, les contraintes
normatives étant plus fortes côté français. Pour maintenir la compétitivité des territoires et attirer de
l’emploi, il est essentiel de mettre un terme à cette pratique, en transposant directement les
nouvelles directives sans verbatim.
2.1. Donner de véritables garanties aux collectivités territoriales face aux coûts élevés générés
par la production normative
Afin de les protéger contre les conséquences financières issues de l’activité normative de
l’Etat, il est nécessaire de réviser l’article 72 de la constitution pour introduire en droit français un
principe de proportionnalité au sens du droit communautaire défini comme l’exigence que toute
charge imposée au destinataire de la règle de droit soit limitée à la stricte mesure nécessaire de
l’objectif à atteindre et requiert un minimum de charges pour le destinataire de la norme et étendre
le droit de compensation des collectivités locales aux aménagements et approfondissements des
compétences prévus par la loi l’exception des lois de transposition des directives
communautaires). Parallèlement, il semble nécessaire de réaliser un suivi long terme du coût réel
des normes intégrant l’ensemble des coûts cachés.
2.2. Une application des normes uniforme qui nuit à la compétitivité des territoires
2.2.1. Un droit indifférent à la taille et aux moyens des collectivités
Les collectivités territoriales ne constituent pas un bloc monolithique, réparti de manière
mathématique et homogène. Fruit de l’histoire, elles traduisent toute la diversité, mais aussi la
richesse de nos territoires. L’application uniforme des règles de droit à des collectivités territoriales
aussi hétérogènes n’est pas sans poser de difficultés. Les contraintes normatives imposées sont
d’autant plus lourdes que la collectivité locale ne dispose pas de toute de l’ingénierie nécessaire, ce
qui est le cas de la majorité des petites communes. Afin de s’adapter à l’inégalité de facto qui
existent entre les collectivités, il est proposé, outre la poursuite de la politique volontariste
d’intercommunalité menée par le gouvernement, de moduler le droit en fonction de la taille des
collectivités concernées en introduisant « en droit un principe d’équité et d’adaptation favorisant
l’établissement de règles prévoyant elles-mêmes, lorsque l’application uniforme de leurs
dispositions de détail s’avère inadaptée, de déroger, suivant des mécanismes encadrés, aux
dispositions qu’elles édictent »
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. Cela supposerait d’intégrer les effets en fonction de la taille des
collectivités locales (et pas seulement par niveau) dans l’étude d’impact et dans la fiche d’impact
financier.
2.2.2. Des normes trop rigides qui s’accommodent mal des réalités variables du terrain
Il ressort très clairement des auditions qu’il existe un manque de souplesse dans l’application
du droit au niveau local. Alors même qu’il existe des dérogations possibles, prévues par les textes,
elles semblent souvent ignorées des petites collectivités. Par ailleurs, de nombreux élus locaux
renoncent souvent à déposer un recours, car ils ont le sentiment d’une extrême complexité de la
procédure avec à la clé, une faible chance d’être entendu, les commissions de recours ne déjugeant
pas, à leurs yeux, leurs pairs. Cette difficulté ne tient pas toujours au caractère inadapté de la norme
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Rapport du groupe de travail interministériel sur la qualité de la réglementation présidé par Monsieur
Dieudonné Mandelkern
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